Je suis un peu dépassé en ce qui concerne Reagan. Je me suis trompé sur son compte à tous les coups ! Je n’ai pas cru qu’il obtiendrait l’investiture (…) Je me sens disqualifié pour parler de Reagan. Je l’ai d’abord traité de tête de linotte. Mais, quand il a obtenu l’investiture, j’ai dû réviser mon jugement, et je l’ai appelé la super-tête de linotte, Après le débat avec Carter, j’ai pensé que c’était un acteur de troisième catégorie. Cet homme a du mal à retenir même les mots qu’on utilise en politique. Quant à comprendre les idées politiques, cela le dépasse. (…) Si Reagan était démocrate, je crois que je le préférerais à Carter. S’il partageait la philosophie de Carter, ce serait un gain non négligeable puisqu’un homme doué d’une personnalité malheureuse a été remplacé par un homme qui a une personnalité agréable. Mais il y a aussi des problèmes politiques véritables, et je ne pense pas que Reagan soit équipé pour les affronter. Il faudra attendre. (…) Je pense que nous allons connaître la loi martiale. Non pas demain, mais dans quelques années.(…) Une autre chose m’inquiète en Amérique, c’est que les gens deviennent non pas fascistes, mais qu’ils se rapprochent de plus en plus des phases qui précèdent le fascisme.Norman Mailer (1980)
Le candidat républicain n’est pas qualifié pour être président. Je l’ai dit la semaine dernière. Il n’arrête pas de le démontrer. Le fait que Donald Trump critique une famille ayant fait des sacrifices extraordinaires pour ce pays, le fait qu’il ne semble pas avoir les connaissances de base autour de sujets essentiels en Europe, au Moyen-Orient, en Asie, signifient qu’il est terriblement mal préparé pour ce poste.Barack Hussein Obama
Les Américains en ont marre de vos satanés e-mails, parlons des vrais problèmes aux Etats-Unis.Bernie Sanders
Pour paraphraser Bernie Sanders, les Américains en ont marre des satanés toilettes des progressistes. Mark Lilla
Vous allez dans certaines petites villes de Pennsylvanie où, comme ans beaucoup de petites villes du Middle West, les emplois ont disparu depuis maintenant 25 ans et n’ont été remplacés par rien d’autre (…) Et il n’est pas surprenant qu’ils deviennent pleins d’amertume, qu’ils s’accrochent aux armes à feu ou à la religion, ou à leur antipathie pour ceux qui ne sont pas comme eux, ou encore à un sentiment d’hostilité envers les immigrants. Barack Obama (2008)
Pour généraliser, en gros, vous pouvez placer la moitié des partisans de Trump dans ce que j’appelle le panier des pitoyables. Les racistes, sexistes, homophobes, xénophobes, islamophobes. A vous de choisir.Hillary Clinton
Pour généraliser, en gros, vous pouvez placer la moitié des partisans de Trump dans ce que j’appelle le panier des pitoyables. Les racistes, sexistes, homophobes, xénophobes, islamophobes. A vous de choisir. Hillary Clinton
Notre pays est en colère, je suis en colère et je suis prêt à endosser le manteau de la colère. Donald Trump
Aujourd’hui, le monde marque le passage d’un dictateur brutal qui a opprimé son propre peuple pendant près de six décennies. L’héritage de Fidel Castro, ce sont les pelotons d’exécution, le vol, des souffrances inimaginables, la pauvreté et le déni des droits de l’homme. Même si les tragédies, les morts et la souffrance provoquées par Fidel Castro ne peuvent pas être effacées, notre administration fera tout ce qu’elle peut pour faire en sorte que le peuple cubain entame finalement son chemin vers la prospérité et la liberté. Même si Cuba demeure une île totalitaire, mon espoir est que cette journée marque un éloignement avec les horreurs endurées trop longtemps et une étape vers un avenir dans lequel ce magnifique peuple cubain vivra finalement dans la liberté qu’il mérite si grandement.Donald Trump
Dans une époque où des nations opprimées sont privées des droits humains fondamentaux, de la justice et de la liberté, il reste heureusement des hommes libres qui restent dans la lutte jusqu’à leurs tout derniers jours.Hassan Rohani
J’adresse mes condoléances au gouvernement révolutionnaire et à la nation de Cuba après la mort de son excellence Fidel Castro, le dirigeant de la Révolution cubaine et personnalité centrale de la lutte contre le colonialisme et l’exploitation et symbole de la lutte pour l’indépendance des nations opprimées. Mohammad Javad Zarif
Fidel Castro était un exemple stimulant pour beaucoup de pays. Fidel Castro était un véritable ami de la Russie. Vladimir Poutine
Fidel a défendu son territoire et affermi son pays alors qu’il subissait un blocus américain éprouvant. Malgré cela, il a mené son pays sur la voie de l’autosuffisance et du développement indépendant. Mikhail Gorbatchev
Le peuple chinois a perdu un camarade proche et un ami sincère. Xi Jinping
Cuba, notre amie, a réussi sous sa conduite à résister aux sanctions et aux campagnes d’oppression les plus fortes jamais vues dans notre histoire récente, devant un flambeau de la libération des peuples d’Amérique du Sud et du monde entier. Le nom de Fidel Castro vivra à jamais dans l’esprit des générations et inspirera ceux qui aspirent à une véritable indépendance et à une libération du joug du colonialisme et de l’hégémonie. Bachar Al Assad
L’Histoire sera comptable et jugera de l’impact énorme de cette figure singulière sur le peuple et le monde qui l’entourent. Barack Hussein Obama
Rosalynn et moi partageons nos sympathies avec la famille Castro et le peuple cubain à la mort de Fidel Castro. Nous nous souvenons avec tendresse de nos visites avec lui à Cuba et de son amour pour son pays. Nous souhaitons aux citoyens cubains la paix et la prospérité dans les années à venir. Jimmy Carter
C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris aujourd’hui la mort du président cubain ayant le plus longtemps exercé cette fonction. Fidel Castro, leader plus grand que nature, a consacré près d’un demi-siècle au service du peuple cubain. Révolutionnaire et orateur légendaire, M. Castro a réalisé d’importants progrès dans les domaines de l’éducation et des soins de santé sur son île natale. Bien qu’il était une figure controversée, ses supporters et ses détracteurs reconnaissaient son amour et son dévouement immenses envers le peuple cubain, qui éprouvait une affection profonde et durable pour “el Comandante”. Je sais que mon père était très fier de le considérer comme un ami, et j’ai eu l’occasion de rencontrer Fidel lorsque mon père est décédé. Ce fut aussi un véritable honneur de rencontrer ses trois fils et son frère, le président Raúl Castro, au cours de ma récente visite à Cuba. Au nom de tous les Canadiens, Sophie et moi offrons nos plus sincères condoléances à la famille et aux amis de M. Castro ainsi qu’aux nombreuses personnes qui l’appuyaient. Aujourd’hui, nous pleurons avec le peuple de Cuba la perte d’un leader remarquable.Justin Trudeau
Fidel Castro était une des figures historiques du siècle dernier et l’incarnation de la Révolution cubaine. Avec la mort de Fidel Castro, le monde perd un homme qui était pour beaucoup un héros. Il a changé le cours de l’histoire et son influence s’est propagée bien au-delà. Fidel Castro demeure une des figures révolutionnaires du XXe siècle. Il appartiendra à l’histoire de juger son héritage. Jean-Claude Juncker
Il y a dix ans, au moment des atteintes très graves aux droits de l’homme, je n’aurais pas rencontré Fidel (il l’a rencontré en 2015, ndlr). (Mais) citez-moi un nom de prisonnier politique, il n’y en a pas. Des gens qui fuient, il y en a, des gens retenus en prison aussi. J’ai dit aux associations des droits de l’homme : ‘Donnez-moi des noms…’François Hollande
Fidel Castro était une figure du XXe siècle. Il avait incarné la révolution cubaine, dans les espoirs qu’elle avait suscités puis dans les désillusions qu’elle avait provoquées. Acteur de la guerre froide, il correspondait à une époque qui s’était achevée avec l’effondrement de l’Union soviétique. Il avait su représenter pour les cubains la fierté du rejet de la domination extérieure. François Hollande
Grâce à Fidel Castro, les Cubains ont récupéré leur territoire, leur vie, leur destin. Ils se sont inspirés de la Révolution française sans pour autant connaître la terreur qu’il y a eue pendant la Révolution française. […] Ecoutez, il y a beaucoup de désinformation, ce que j’observe c’est que jamais les relations diplomatiques n’ont été coupées avec Cuba, y compris de la part de certains responsables politiques qui me critiquent, qui critiquent la France, jamais. Il y a toujours du positif et du négatif dans les histoires, mais certains ne vont pas se rhabiller à bon compte au nom des droits de l’homme alors qu’on sait qu’ici, quand on demande des listes de prisonniers politiques, on n’en a pas. Eh bien fournissez-moi des listes de prisonniers politiques, à ce moment-là on pourra faire quelque chose. Donc il faut savoir regarder les choses positivement même si ça dérange. La France n’a pas à donner de leçon [à Cuba]. Je sais que ça dérange parce que justement voilà un pays insulaire qui protège son patrimoine, qui interdit les prédateurs, qui a réussi aussi à faire en sorte qu’il y ait une propreté, une sécurité vraiment remarquables, que l’on n’atteint pas dans beaucoup de pays qui donnent aujourd’hui des leçons de droits de l’Homme.Ségolène Royal (Cuba)
Fidel Castro était un géant de la scène internationale. Aux yeux des militants de ma génération, il incarnait l’esprit de résistance à l’impérialisme américain et la volonté de construire par la révolution une société plus juste. (…) Son oeuvre contrastée sera longtemps discutée ou contestée. Mais on ne peut oublier qu’il restera pour des milliers de latinos américains le Libertador, celui qui aura réussi à faire face opiniâtrement à la toute puissance américaine. Jack Lang
Fidel ! Fidel ! Mais qu’est-ce qui s’est passé avec Fidel ? Demain était une promesse. Fidel ! Fidel ! L’épée de Bolivar marche dans le ciel. Jean-Luc Mélenchon
Avec la mort de Fidel Castro disparait une énorme figure de l’histoire moderne, de l’indépendance nationale et du socialisme du XXe siècle. De la construction d’un système de santé et d’éducation de premier ordre à l’impressionnant bilan de sa politique étrangère, les réalisations de Castro ont été nombreuses. Malgré tous ses défauts, le soutien de Castro à l’Angola a joué un rôle crucial pour mettre fin à l’Apartheid en Afrique du Sud et il restera dans l’histoire comme à la fois un internationaliste et un champion de la justice sociale. Jeremy Corbyn
Ernesto Che Guevara de la Serna (1928 – 1967) représente une combinaison remarquable d’actions et d’idées datant de la deuxième moitié du XXe siècle mais à jamais inscrites dans la pensée politique en Amérique Latine. Incarnation de l’intellectuel organique, ce révolutionnaire ne connait pas de frontières dans sa recherche sans fin d’une stratégie pour émanciper les dépossédés du monde, ce qui explique la nature profondément universelle de son vaste héritage et son influence au-delà du Tiers-Monde. Sa contribution à l’action et à la théorie révolutionnaire, visible dans ses ouvrages théoriques, ses essais, mais aussi ses articles et ses discours, est d’une valeur extraordinaire, du fait de sa profondeur et de son étendue. C’est le résultat d’une analyse rigoureuse qui lui a permis d’intégrer des éléments créatifs, antidogmatiques et humanistes à la théorie marxiste, grâce à une systématisation conceptuelle en avance sur son temps. Il a notamment étudié avec un esprit analytique et réfléchi la réalité socio-politique en Amérique Latine et dans d’autres continents exploités, les mécanismes du pouvoir, les relations entre les systèmes économiques et les structures politiques, et a formulé des propositions concrètes. Ses journaux de son premier tour d’Amérique du sud et de son expérience dans les guérillas à Cuba, au Congo (anciennement Zaïre) et en Bolivie sont considérés comme des œuvres littéraires, de par leur style travaillé et leur valeur historique. Le Journal de Bolivie de Che Guevara est un document essentiel pour comprendre une période de l’histoire de la Bolivie et de l’Amérique latine. La grande variété des thèmes abordés dans ses écrits en font un philosophe de la praxis qui élabore une théorie de l’action révolutionnaire imprégnée des valeurs de solidarité, de dignité, de justice et de liberté. C’est l’expression d’une recherche continue qui a débuté dans sa jeunesse et l’a poussé à suivre sa vocation de révolutionnaire. Sa sociologie de la révolution est conçue de façon innovante et radicale, dans le cadre traditionnel de la gauche marxiste de son époque. Toute sa réflexion, essentiellement développée lors de ses années à Cuba et en Amérique Latine, a une portée universelle du fait de l’influence de ses écrits et de son expérience à travers le monde. Il est devenu un symbole de la libération, de l’internationalisme, du révolutionnaire sans frontières, surtout parce qu’il pratiquait ce qu’il prônait être la foi révolutionnaire. Des éditions de sa biographie, de son œuvre et de ses journaux ont été publiées dans différentes langues et continuent d’être reproduites partout dans le monde. Elles ont aussi inspiré plusieurs œuvres littéraires, cinématographiques et photographiques, entre autres. L’original du Journal de Bolivie est conservé dans un coffre-fort dans les archives de la Banque Centrale de Bolivie. Du fait de la nature exceptionnelle de son héritage théorique et pratique, l’héritage documentaire historique écrit par le Che ou à propos de lui découvert au Centre d’études Che Guevara est d’une valeur et d’une validité extraordinaires. Il souligne son évolution à travers une méthodologie qui suit les étapes essentielles de son développement intellectuel et révolutionnaire, renforcé par des documents originaux qui constituent la Mémoire historique de l’institution. C’est l’importance de la figure du Che, sans précédent dans l’histoire du XXe siècle, qui pousse Cuba et la Bolivie à proposer l’inscription de la collection de documents « La vie et l’œuvre d’Ernesto Che Guevara : des manuscrits originaux de son adolescence et sa jeunesse au Journal de campagne en Bolivie » au Registre Mémoire du Monde, sous le patronage de l’UNESCO.UNESCO (registre international de la mémoire du monde, février 2013)
With an impeccable instinct for venerating murderous thugs, the United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization (UNESCO) has now added to its Memory of the World Register the writings of Cuba’s Ernesto « Che » Guevara. That means that the documents generated by Che during his bloody career will now be treated as historical treasures, protected and cared for with the help of UNESCO. What’s next? The teachings of Stalin and Pol Pot? For those who know nothing about Che except that he wore a beret, smoked cigars and continues to turn up as a splash of radical chic on t-shirts and adolescent wall posters, UNESCO’s move might sound reasonable. But if you bother to learn anything about who Che really was, or what he did, that impression curdles fast. (…) Che’s works were nominated for UNESCO’s special attentions by Cuba and Bolivia, and to be added to the UNESCO Register the nomination had to be endorsed by UNESCO’s director-general, Irina Bokova. You might suppose that as a former Bulgarian government functionary, from the days when Bulgaria orbited the Soviet Union, Bokova would be aware of the horrors behind Che’s radical « cool. » But Bokova appears to suffer from a longstanding infatuation with Cuba’s repressive regime. Just last November she dropped by Havana to sing the praises of Cuba’s educational system — either oblivious or indifferent to the censorship and dreary ideological indoctrination that are the hallmarks of Cuban schooling. Claudia Rossett
Sometimes I wonder if Jeremy Corbyn even knows what he’s saying half the time. So often, he appears to be operating on some kind of 1980s student-union auto-pilot. But this is no joke. The latest example of Corbyn’s arrested development is the most serious yet. We now have to recognise that a major political party in Britain is being led by a teenage romantic revolutionary who just happens to be in his sixties.Martin Bright
L’appareil de propagande de l’organisation terroriste Daech a diffusé une séquence vidéo mettant en scène un terroriste parlant français, qui appelle ceux qu’il a été convenu d’appeler les loups solitaires de l’organisation, de perpétrer des attaques au couteau et de poignarder les gens au hasard dans les lieux de grande affluence, dans les capitales et villes des pays qui participent à la coalition qui combat Daech au moyen orient. La vidéo appelle les éléments terroristes à se contenter des attaques à l’arme blanche et à ne pas s’encombrer des attaques aux armes lourdes. C’est, apparemment, ce qu’a décidé de faire l’homme qui a attaqué le campus d’Ohio, ce lundi. Tunisie numérique
Notre volonté, c’est qu’au terme de ses études, chaque étudiant du secondaire ait au minimum été confronté à l’histoire de la colonisation et de la décolonisation au Congo. Mais aussi à celle d’un autre pays ‘à la carte’, en fonction du public scolaire. Catherine Moureaux (députée PS Molenbeeck, Belgique)
Obama will be remembered by historians as the man who turned over the White House to Donald Trump, the man who let Putin unleash the forces of Hell in Syria and Ukraine, and the man who honored European values but made the world steadily less safe for them. That Putin took the occasion of Obama’s final tour to open a wide new air offensive in Syria and withdraw from the ICC even as his allies celebrated victories in Estonia, Moldova and Bulgaria only underlines what a foreign policy disaster the 44th President has been. Many world leaders like Obama; some pity him; few respect him as a leader (rather than as a man); none fear him. Most are too busy coping with the consequences of his failures to spend a lot of time thinking about him at this point in his presidency. Even Germany, whose cheering crowds once greeted Obama as an enlightened internationalist in the mold of John F. Kennedy, has gradually lost faith in the President.The early signs of struggle and factionalism in the Donald Trump transition, meanwhile, are leading many foreigners to suppose that the next American President will be another inconsequential bumbler. We must hope that they are wrong; not even the power of the United States can survive a long string of failed Presidents unscathed. Walter Russell Mead
Mon deuxième prénom est peut-être Hussein, mais je suis un véritable intellectuel américain. Ainsi s’est présenté Barack Obama lors de nombreuses réceptions à la Maison-Blanche, d’émissions à la télévision ou de voyages à l’étranger. Rarement un président des États-Unis aura abaissé son pays à ce point, permettant à la Russie de Vladimir Poutine de redevenir la puissance mondiale sur laquelle s’appuyer pour le XXIe siècle. Ce ne sont pas ses petites blagues placées au début de chaque discours, ses larmes forcées pour parler de l’interdiction des ventes d’armes ou ses manières de transformer la Maison-Blanche en passage obligé de la jet-set mondiale qui constituent le principal élément à mettre au passif de ce président adoré par la bien-pensance européenne. Il symbolise un triple échec : international, économique et politique. International d’abord, car il incarne la poursuite du repli de l’Amérique sur elle-même, l’abandon de son célèbre soft power, l’échec de la lutte contre Dae’ch (créature américaine destinée à détruire toutes les régions fondatrices de notre civilisation), le refus de sceller la paix avec l’Iran, et ce regard bêtement enamouré pour la Chine et ses différents satellites. Obama, célébré Prix Nobel de la paix moins d’un an après son entrée en fonctions, n’a pas cessé de semer les graines de conflits à venir en s’évertuant à détruire l’Europe. (…) rarement on a vu un président démocrate trahir autant ses électeurs en allongeant de manière abyssale l’échelle des inégalités. En l’espace de huit ans, ce président élu parce qu’il était noir est parvenu à créer plus de 10 millions de pauvres supplémentaires. Ils sont désormais 46,5 millions d’Américains à vivre sous le seuil de pauvreté. Ce qui représente 15 % de la population des États-Unis. De la même manière, l’an passé on dénombrait pas moins de 600 000 sans-abri. À New York, 22 000 enfants n’ont pas de toit. Un chiffre jamais vu depuis la crise de 1929. Le bilan des années Obama est en fait très favorable à tous ceux qui ont voté contre lui à deux reprises. C’est-à-dire l’Amérique des actionnaires, l’Amérique des entrepreneurs ou l’Amérique de ceux qui ont la capacité de prendre des risques. Mais en agissant ainsi avec cynisme, Obama a désespéré l’Amérique des “petits Blancs”. Cette Amérique faite de pionniers, de conquérants et d’aventuriers qui nourrissent une méfiance sans précédent jusqu’ici à l’égard de Washington, de la classe politique, des médias et de façon générale de l’élite. Au point d’être prête à voter pour un homme d’affaires corrompu, xénophobe et sexiste ou pour une intrigante dont la famille mélange allègrement depuis des années fonds publics et intérêts privés. Ce choix absurde que les Américains seront amenés à faire dans quelques jours en dit long sur la décrépitude morale de l’Amérique, sur la faillite de cette Babylone moderne qui a cru que l’individu et la famille pouvaient être sacrifiés au profit d’un matérialisme sans avenir, et finalement sur le déclin annoncé de l’empire américain.Yves de Kerdrel
Une statistique plus brutale marque pourtant mieux que les autres la marque de fabrique du vote républicain. C’est le vote du white male, de l’homme blanc. Seuls 37 % d’entre eux ont voté pour Kerry, contre 62 % pour Bush, un écart considérable qui est près du double de celui enregistré pour les femmes blanches. Bill Clinton avait lancé le concept des soccer moms, ces femmes qui emmènent leurs enfants au soccer(football au sens où nous l’entendons, mais qui est plus chic aux Etats-Unis que le football américain) et qui votent démocrate. Bush capture le vote du nascar dad, qu’on pourrait traduire par le « papa-bagnole, qui se passionne pour les courses automobiles d’Indianapolis et de Daytona. Dans le langage des stratèges électoraux, les nascar dads sont les électeurs mâles, sans études supérieures, qui votaient jadis pour les démocrates et votent désormais pour les républicains. Grâce au Watergate et à la diffusion des enregistrements faits à la Maison Blanche, on sait que Nixon avait clairement saisi l’opportunité de rallier à la cause républicaine les cols bleus choqués par Woodstock et autres manifestations du « déclin de la civilisation occidentale ». C’est Reagan qui pousse à son paroxysme cette capture du vote ouvrier, dont Bush junior récolte les fruits bien mieux que son père. Dans un article publié par la New York Review of Book, « The White Man Unburdened », l’homme blanc privé de son fardeau, l’écrivain Norman Mailer faisait la liste de tout ce que l’homme blanc a perdu au cours des trente dernières années : son statut, son salaire, son autorité, ses athlètes (blancs) préférés…, pour expliquer le ralliement à la guerre irakienne de Bush (voir aussi le texte d’Arlie Hochschild « Let them eat war » sur tomdispatch.com). Il n’est pas besoin d’une longue démonstration pour voir apparaître, derrière un langage différent (la religion, le droit au port d’armes…), les mêmes traits qui ont expliqué en France le vote ouvrier en faveur de Le Pen. Loin d’apparaître comme un continent bizarre, si loin désormais de l’Europe, l’Amérique est soumise à un processus identique. Les mots pour le dire ne sont pas les mêmes, mais c’est le même désamour entre la gauche et la classe ouvrière qui s’est joué des deux côtés de l’Atlantique, qui marque dans les deux cas l’aboutissement d’un long processus de déracinement du monde ouvrier. Daniel Cohen
Pour la première fois, le modèle mondialisé des classes dominantes, dont Hillary Clinton était le parangon, a été rejeté dans le pays qui l’a vu naître. Fidèles à leurs habitudes, les élites dirigeantes déprécient l’expression de la volonté populaire quand elles en perdent le contrôle. Ainsi, les médias, à travers le cas de la Pennsylvanie – l’un des swing states qui ont fait le succès de Trump -, ont mis l’accent sur le refus de mobilité de la working class blanche, les fameux « petits Blancs », comme cause principale de la précarité et du déclassement. Le « bougisme », qui est la maladie de Parkinson de la mondialisation, confond les causes et les conséquences. Il est incapable de comprendre que, selon la formule de Christopher Lasch, « le déracinement déracine tout, sauf le besoin de racines ». L’élection de Trump, c’est le cri de révolte des enracinés du local contre les agités du global. (…) La gauche progressiste n’a eu de cesse, depuis les années 1980, que d’évacuer la question sociale en posant comme postulat que ce n’est pas la pauvreté qui interdit d’accéder à la réussite ou à l’emploi, mais uniquement l’origine ethnique. Pourtant, l’actuelle dynamique des populismes ne se réduit pas à la seule révolte identitaire. En contrepoint de la protestation du peuple-ethnos, il y a la revendication du peuple-démos, qui aspire à être rétabli dans ses prérogatives de sujet politique et d’acteur souverain de son destin. Le populisme est aussi et peut-être d’abord un hyperdémocratisme, selon le mot de Taguieff, une demande de démocratie par quoi le peuple manifeste sa volonté d’être représenté et gouverné selon ses propres intérêts. Or notre postdémocratie oscille entre le déni et le détournement de la volonté populaire. (…) Au XIXe siècle, la bourgeoisie a eu recours à la loi pour imposer le suffrage censitaire. Aujourd’hui, les classes dominantes n’en éprouvent plus la nécessité, elles l’obtiennent de facto : il leur suffit de neutraliser le vote populiste en l’excluant de toute représentation par le mode de scrutin et de provoquer l’abstention massive de l’électorat populaire, qui, convaincu de l’inutilité du vote, se met volontairement hors jeu. Ne vont voter lors des élections intermédiaires que les inclus, des fonctionnaires aux cadres supérieurs, et surtout les plus de 60 ans, qui, dans ce type de scrutin, représentent autour de 35 % des suffrages exprimés, alors qu’ils ne sont que 22 % de la population. Ainsi, l’écosystème de la génération de 68 s’est peu à peu transformé en un egosystème imposé à l’ensemble de la société. Dans notre postdémocratie, c’est le cens qui fait sens et se traduit par une surreprésentation des classes favorisées aux dépens de la France périphérique, de la France des invisibles. (…) On est arrivé à une situation où la majorité n’est plus une réalité arithmétique, mais un concept politique résultant d’une application tronquée du principe majoritaire. Dans l’Assemblée élue en 2012 avec une participation de 55 %, la majorité parlementaire socialiste ne représente qu’un peu plus de 16 % des inscrits. La majorité qui fait et défait les lois agit au nom d’à peine plus de 1 Français sur 6 ! Nous vivons sous le régime de ce qu’André Tardieu appelait déjà avant-guerre le « despotisme d’une minorité légale ». On assiste, avec le système de l’alternance unique entre les deux partis de gouvernement, à une privatisation du pouvoir au bénéfice d’une partitocratie dont la légitimité ne cesse de s’éroder. (…) Plus les partis ont perdu en légitimité, plus s’est imposée à eux l’obligation de verrouiller le système de crainte que la sélection des candidats à l’élection présidentielle ne leur échappe. Avec la crise de la représentation, le système partisan n’a plus ni l’autorité ni la légitimité suffisante pour imposer ses choix sans un simulacre de démocratie. Les primaires n’ont pas d’autre fonction que de produire une nouvelle forme procédurale de légitimation. En pratique, cela revient à remettre à une minorité partisane le pouvoir de construire l’offre politique soumise à l’ensemble du corps électoral. Entre 3 et 4 millions de citoyens vont préorienter le choix des 46 millions de Français en âge de voter. Or la sociologie des électeurs des primaires à droite comme à gauche ne fait guère de doute : il s’agit des catégories supérieures ou moyennes, qui entretiennent avec la classe politique un rapport de proximité. Les primaires auront donc pour effet d’aggraver la crise de représentation en renforçant le poids politique des inclus au moment même où il faudrait rouvrir le jeu démocratique. (…) D’un tel processus de sélection ne peuvent sortir que des produits de l’endogamie partisane, des candidats façonnés par le conformisme de la doxa et gouvernés par l’économisme. Des candidats inaccessibles à la dimension symbolique du pouvoir et imperméables aux legs de la tradition et de l’Histoire nationale. Sarkozy et Hollande ont illustré l’inaptitude profonde des candidats sélectionnés par le système à se hisser à la hauteur de la fonction. Dans ces conditions, il est à craindre que, quel que soit l’élu, l’élection de 2017 ne soit un coup à blanc, un coup pour rien. D’autant que les hommes de la classe dirigeante n’ont ni les repères historiques ni les bases culturelles pour défendre les sociabilités protectrices face aux ravages de la mondialisation. En somme, ils ne savent pas ce qu’ils font parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils défont. Quant au FN, privé de toute espérance du pouvoir, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, il offre un repoussoir utile à la classe dirigeante, qui lui permet de se survivre à bon compte. Il est à ce jour encore la meilleure assurance-vie du système. Patrick Buisson
Il n’y a de compétences que s’il y a des connaissances (…) la société française utilise la loi et le dogme républicains pour éviter toute transparence. La société française est malade de son rapport à la réalité. Tous ceux qui refusent les statistiques sont du côté de l’égalité formelle et veulent que rien ne change. Laurent Bigorgne (Institut Montaigne)
La vérité qui dérange, (…) c’est l’enquête de l’IFOP menée par l’Institut Montaigne sur les musulmans de France. Elle dérange tant que nul n’ose s’indigner. L’enquête est présentée avec une distance embarrassée. Rien à dire a priori sur un sondage réalisé en juin à partir d’un échantillon de 15 459 personnes et qui a isolé 874 personnes de religion musulmane. Et certains résultats laissent pantois. 29 % des musulmans interrogés pensent que la loi islamique (charia) est plus importante que la loi de la République, 40 % que l’employeur doit s’adapter aux obligations religieuses de ses salariés, 60 % que les filles devraient avoir le droit de porter le voile au collège et au lycée. 14 % des femmes musulmanes refusent de se faire soigner par un médecin homme, et 44 % de se baigner dans une piscine mixte. L’Institut Montaigne et leurs rédacteurs Hakim El Karoui et Antoine Jardin ressemblent un peu à Alain Juppé, qui rêve d’une identité heureuse, et affirment qu’« un islam français est possible ». Mais le constat est inquiétant sur la sous-catégorie musulmane la plus « autoritaire » : « 40 % de ses membres sont favorables au port du niqab, à la polygamie, contestent la laïcité et considèrent que la loi religieuse passe avant la loi de la République », écrit l’Institut Montaigne. Cette sous-catégorie représenterait 13 % de l’ensemble des musulmans. L’IFOP chiffrant les musulmans à 5,6 % de la population de plus de 15 ans, nous en déduisons que l’effectif concerné atteint plusieurs centaines de milliers de personnes. Le chiffre qui dérange. L’intégration correcte de la très grande majorité des musulmans ne doit pas non plus conduire à nier une réalité qui, si elle est minoritaire, ne semble pas marginale. (…) Les populations sont sages lorsqu’elles sont traitées en adultes. Les Britanniques multiplient à outrance les comptages ethniques. Le gouvernement allemand publie chaque année les statistiques de criminalité par nationalité. On y constate une surcriminalité des étrangers, mais dont les causes sont expliquées, et les Allemands se concentrent sur leur évolution. En France, on est livrés aux diatribes d’un Eric Zemmour, qui séduira tant qu’on sera incapable d’objectiver sereinement les faits. (…) Les élites ont perdu de leur crédibilité, en minimisant les inégalités délirantes aux Etats-Unis, tardivement mises en évidence par Thomas Piketty, et en ne prêtant pas attention aux perdants de la mondialisation. L’essentiel est de prendre à bras-le-corps les batailles de demain, pour que les populistes ne puissent pas dire « Je vous l’avais bien dit ». Ainsi, ne sous-estimons pas Nicolas Sarkozy, qui cherche pour des raisons électoralistes à évacuer le réchauffement climatique par une autre vérité qui dérange, l’explosion démographique de l’Afrique. Ne pas traiter ce sujet sérieusement, c’est redonner la main aux populistes. Arnaud Leparmentier (Le Monde)
Les élites qui apprécient le dynamisme et l’authenticité des quartiers ethniques avec leurs merveilleux restaurants (…) n’envoient pas leurs enfants dans les écoles pleines d’enfants immigrés qui ressemblent à des centres de détention juvénile. Matthew B. Crawford (Esprit, octobre 2016)
La tragique élection de Trump a l’avantage de clarifier la situation politique d’ensemble. Le Brexit n’était pas une anomalie. Autant qu’on le sache et qu’on se prépare pour la suite. Chacune des grandes nations qui ont initié le marché mondial se retire l’une après l’autre du projet. Le prolongement de cette démission volontaire est d’une clarté terrible : d’abord l’Angleterre ; six mois plus tard les Etats Unis, qui aspirent à la grandeur des années 1950. Et ensuite ? Si l’on suit les leçons de l’histoire, c’est probablement, hélas, au tour de la France, avant celui de l’Allemagne. Les petites nations se sont déjà précipitées en arrière : la Pologne, la Hongrie et même la Hollande, cette nation pionnière de l’empire global. L’Europe unie, ce prodigieux montage inventé après la guerre pour dépasser les anciennes souverainetés, se retrouve prise à contre-pied. C’est un vrai sauve-qui-peut : « Tous aux canots ! » Peu importe l’étroitesse des frontières pourvu qu’elles soient étanches. Chacun des pays qui ont contribué à cet horizon universel de conquête et d’émancipation va se retirer des institutions inventées depuis deux siècles. Il mérite bien son nom, l’Occident, c’est devenu l’empire du soleil couchant… Parfait, nous voilà prévenus et peut-être capables d’être un peu moins surpris. Car enfin, c’est bien l’incapacité à prévoir qui est la principale leçon de ce cataclysme : comment peut-on se tromper à ce point ? Tous les sondages, tous les journaux, tous les commentateurs, toute l’intelligentsia. C’est comme si nous n’avions aucun des capteurs qui nous auraient permis d’entrer en contact avec ceux que l’on n’a même pas pu désigner d’un terme acceptable : les « hommes blancs sans diplôme », les « laissés-pour-compte de la mondialisation » — on a même essayé les « déplorables ». C’est sans doute une forme de peuple, mais à qui nous n’avons su donner ni forme ni voix. Je reviens de six semaines sur les campus américains, je n’ai pas entendu une seule analyse un peu dérangeante, un peu réaliste sur ces « autres gens », aussi invisibles, inaudibles, incompréhensibles que les Barbares aux portes d’Athènes. Nous, « l’intelligence », nous vivons dans une bulle. Disons sur un archipel dans une mer de mécontentements. Bruno Latour
Un conseil aux candidats à la présidentielle en France : fuyez les artistes et les intellectuels. Ne leur demandez pas de faire campagne, ne les faites pas monter sur l’estrade. Surtout si vous avez envie de l’emporter. On doutait déjà qu’une actrice ou qu’un rockeur fassent gagner des voix. Mais on ne savait pas qu’ils pouvaient en faire perdre. C’est une leçon de l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche. Jamais on n’a vu le monde culturel s’engager à ce point, en l’occurrence pour Hillary Clinton. Aucun candidat n’avait reçu autant d’argent. De cris d’amour aussi – sur scène, à la télévision, sur les réseaux sociaux. On a même eu droit à la chanteuse Katy Perry qui se déshabille dans une vidéo pour inciter à voter Clinton, ou Madonna promettre de faire une fellation aux indécis. En face, Trump n’avait personne ou presque. Il n’a reçu que 500 000 dollars (environ 470 000 euros) d’Hollywood contre 22 millions de dollars pour la candidate démocrate. Alors il a moqué ce cirque à paillettes, dénoncé le star system, donc le système. Et il a gagné. Clinton a joué à fond les étoiles les plus brillantes, et elle a perdu. Prenons sa fin de campagne. Le 4 novembre, elle monte sur scène avec le couple Beyoncé et Jay Z (300 millions d’albums vendus à eux deux), à Cleveland, dans l’Ohio. Le 5, Katy Perry chante pour elle à Philadelphie (Pennsylvanie). Le 7, veille du scrutin, elle apparaît dans un meeting/concert de Jon Bon Jovi et de Bruce Springsteen devant 40 000 personnes, toujours à Philadelphie, puis finit la soirée à minuit avec Lady Gaga à Raleigh, en Caroline du Nord. Dans tous ces Etats clés, elle a perdu. Dans le même temps, Donald Trump a multiplié les meetings sur les tarmacs d’aéroports en disant qu’il n’a pas besoin de célébrités, puisqu’il a « le peuple des oubliés » – du pays et de la culture – avec lui. L’historien américain Steven Laurence Kaplan s’est indigné des mots de Trump qualifiant untel de stupide, de débile, de névrosé ou de raté, et traitant des femmes de « grosses cochonnes ». Il a raison. Mais il aurait pu ajouter que des notables culturels ont qualifié le candidat républicain de brute (Chris Evans), d’immonde (Judd Apatow), de porc (Cher), de clown (Michael Moore) ou de psychopathe (Moby). Robert De Niro, avant le scrutin, voulait lui mettre son poing dans la gueule. Chaque injure a fait grossir le camp conservateur et fait saliver son candidat. Car deux mondes s’ignorent voire se méprisent, séparés par un Grand Canyon de haine. Non pas les riches face aux pauvres. La fracture est culturelle et identitaire. Ceux qui ont gagné se sentent exclus du champ culturel et universitaire, et souvent le méprisent. Les perdants leur rendent bien ce mépris, les jugeant réactionnaires, racistes, etc., sans même voir que le monde se droitise.(…) L’autocritique du vaste champ culturel pourrait aller plus loin, sur le terrain de l’hypocrisie. Celle des artistes d’abord, dont l’engagement, souvent imprégné de pathos, apaise leur conscience, mais est souvent perçu comme faisant partie de leur spectacle permanent, dont ils tirent profit, et dont ils se détachent aussi vite pour retrouver, une fois déculpabilisés, leur monde ultra-protégé. Le meilleur exemple est Madonna qui, durant la soirée qui précède le vote, s’est mêlée à des badauds new-yorkais (des convaincus) pour improviser un bref concert en finissant par « demain sauvez ce pays en votant Hillary ». Les intellectuels des campus, quant à eux, insupportent le vote Trump par leur façon de lui faire la morale, de défendre un modèle multiculturel comme s’il s’agissait d’un paradis de fleurs. Ils font culpabiliser les riches en leur disant d’être plus généreux et les pauvres en leur disant d’accepter leurs voisins étrangers, sans vraiment montrer l’exemple. (…) On l’aura compris, la France culturelle et multiculturelle – c’est la même – a beaucoup à apprendre de cette élection passée, et à craindre de celle de 2017. Si elle ne se bouge pas. Michel Guerrin
If progressives will not heed principle, then maybe they will heed arithmetic. Make identity politics the main operational model in a country that is two-thirds white and 50 percent or so male, and what do you expect? President-elect Trump might have some thoughts on that. Kevin D. Williamson
L’immigration massive ayant été érigée en dogme moral et en nécessité économique, les classes moyennes occidentales ont vu surgir au sein de leurs villes, de leurs quartiers et de leurs écoles, parfois jusqu’à les dominer, des populations dont la culture est certes respectable mais, dans le cas de l’islam, radicalement distincte de la leur, dans son rapport aux femmes, à la liberté de conscience, à la démocratie. Cette immigration, dans la réalité des faits, n’est pas choisie, mais subie. Quand, après trente années de ce régime migratoire, les mêmes « gens ordinaires » constatent que des candidats à la migration se pressent toujours plus nombreux à leurs frontières, ils se posent légitimement la question de la perpétuation de leur mode de vie. Comment s’étonner que le dogme de l’immigration anarchique soit rejeté ? Cela indépendamment de la question du terrorisme (alors qu’il est par exemple établi que dix des douze auteurs des effroyables attentats de Paris, le 13 novembre 2015, se sont inflitrés en Europe comme migrants, cfr. Le Figaro, 12 novembre 2016). Pour compléter la tableau, relevons la guerre culturelle qui est menée aux classes moyennes, sur la seule foi du sexe et de la couleur de la peau. Examinons les deux aspects de ce Kulturkampf. D’abord, la théorie du genre, selon laquelle la distinction des sexes masculin et féminin est une invention culturelle (Judith Butler, Anne Fausto-Sterling). Au nom de cette idéologie, dans l’infini chatoiement de ses variétés académiques et médiatiques, des minorités sexuelles en sont venues à exiger l’éradication de la référence à l’hétérosexualité, vécue comme oppressive et stigmatisante. La revendication est de brouiller les genres, en les multipliant à l’infini, et de quitter la notion — statistiquement incontestable — de « normalité » hétérosexuelle. D’où ces polémiques, souvent émaillées de violences, pour décider de la question de savoir si les « queer » et transgenres peuvent, ou pas, accéder aux vestiaires sportifs, scolaires et toilettes de leur sexe biologique, ou de leur sexe choisi, ou les deux, et comment vérifier ? Des parents se posent légitimement la question de savoir si leur petite fille de six ou sept ans risque de croiser dans les toilettes une « femme » de 45 ans avec ce que l’on appelait autrefois un sexe masculin entre les jambes. Se fédère à ces polémiques l’hostilité de principe témoignée au garçon hétérosexuel, institué en dépositaire de la sexualité « du passé », ce qui justifie qu’il soit rééduqué dès la plus tendre enfance — à l’école —, discriminé lors de son entrée éventuelle à l’université, et que le moindre de ses gestes et paroles soit justiciable des tribunaux. Cette guerre du genre est menée avec autant d’âpreté que d’efficacité : la grande majorité des diplômés de l’enseignement supérieur américain et européen sont des femmes, et la réalité biologique de la binarité sexuelle est battue en brèche jusque dans nos textes de loi (Convention d’Istanbul, Conseil de l’Europe, 2011). Vient enfin la résurgence du racisme. D’abord, il y eut le discours anti-raciste, réprouvant le rejet d’une personne sur la seule foi de sa race. L’écrasante majorité des Occidentaux ont acquiescé à ce discours. Toutefois une rhétorique subtile s’est enclenchée, particulièrement dans des pays comme les Etats-Unis et la France, jusqu’à permettre, puis encourager, la mise en accusation des populations blanches. Ainsi des « safe spaces » se sont-ils multipliés sur les campus américains, c’est-à-dire des espaces réservés aux minorités, pour leur permettre de se soustraire à la présence réputée suffocante des Américains « caucasiens ». Dit autrement, les étudiants blancs se voient refuser l’accès de certaines zones du campus sur la seule foi de la couleur de leur peau. Paradoxal retournement d’un discours anti-raciste qui en vient à légitimer, souvent par la violence, des pratiques racialistes au sens strict. Ainsi du discours sur le « white privilege », soit l’idée qu’un Américain blanc est privilégié du seul fait de la couleur de sa peau, quels que soient ses origines et milieu social, et que la loi doit donc discriminer en sa défaveur, toujours sur la seule foi de la couleur de sa peau. Considérons ce répertoire de journalistes récemment créé sous l’égide du gouvernement francophone belge, dont l’objet est d’inclure d’une part les femmes, d’autre part les « hommes et femmes issus de la diversité », ce qui exclut qui ? Les hommes blancs, avec pour seul critère la couleur de leur peau. Racisme, vous avez dit proto-fascisme ? Qui ne voit que ces discours et pratiques reposent sur les notions de responsabilité raciale collective, et de responsabilité à travers les âges, soit très exactement les concepts qui ont, de tout temps, fondé l’antisémitisme, comme Sartre l’a montré dans ses Réflexions sur la question juive ? Ce racisme au nom de l’anti-racisme, les classes moyennes occidentales n’y consentent plus. Il est à noter que cette guerre sexuelle et racialiste menace les gens ordinaires, non seulement dans leurs conditions d’existence (impôt, normes, quartiers), mais dans leur être naturel (sexe, couleur de la peau). Qu’un rejet radical — une révolution, selon Stephen Bannon, éminence grise du nouveau président américain — se dessine, est-ce surprenant ? Drieu Godefridi
Nous sommes devenus habités par l’idée que nous ne sommes pas des citoyens qui ont été modelés par un certain nombre de pratiques et de traditions que nous chérissons parce que nous sommes membres d’un Etat qui est notre maison. Nous nous voyons plutôt comme les porteurs de telle ou telle identité, qui serait la seule chose importante à dire sur nous. Si l’on suit ce chemin, le but de l’Etat n’est plus d’être le médiateur des intérêts des citoyens, mais le distributeur de ressources basées sur ce qui vous est dû, en raison de votre identité. (…) Si vous êtes afro-américain, ne mentionnez pas s’il vous plaît que vous croyez en Dieu et allez à l’église; la politique de l’identité ne laisse aucune place au christianisme – bien qu’elle s’incline devant une pureté imaginaire de l’islam. Femmes? Vous pouvez avoir des craintes sur la façon dont la prolifération des «identités» de genre pèse sur votre lutte unique pour équilibrer et pour donner un sens aux exigences conflictuelles de la vie familiale et professionnelle. Vous ne devez cependant rien dire. Toute identité de genre imaginée doit être respectée. Vous pensiez que vous étiez spéciales, mais vous ne l’êtes pas. Nous vivons dans un monde où tout est possible. Quiconque parle de limites, de contraintes, est «phobique» d’une manière ou d’une autre. L’esprit bourgeois qui a construit l’Amérique, l’intérêt de gagner beaucoup d’argent, d’avoir «réussi», de prendre des risques – avant tout la force de l’âme nécessaire pour affronter l’échec et revenir plus fort – sont méprisés. Personne n’ose parler dans un monde politiquement correct. Les sentiments pourraient être blessés; les gens peuvent se sentir «mal à l’aise». Les avertissements de contenus sensibles et les «espaces sûrs» occupent notre attention. La tâche dans le monde hautement chorégraphié de la «politique de l’identité» n’est pas de durcir mais de domestiquer. Pas de combats. Pas d’insultes auxquelles nous répondons avec force et confiance en soi et assurance. Même par le rire! Partout: les protections rendues possibles par le Grand Protecteur – l’Etat – car nous ne pouvons pas nous montrer à la hauteur de l’occasion. La grandeur importe; si nous voulons l’avoir, personnellement et en tant que pays, nous devons rejeter le discours politiquement correct qui, en nous protégeant de la souffrance, fait de nous sa victime à perpétuité. Sur chacune de ces questions – les frontières, l’immigration, l’intérêt national, l’esprit d’entreprise, le fédéralisme et le discours politiquement correct – Hillary Clinton répond avec la novlangue de « la mondialisation et de la politique de l’identité », le langage qui nous a donné un monde qui est à présent épuisé, vicié et irrécupérable. C’est contre ce genre de monde que les citoyens se révoltent. Et pas seulement aux États-Unis, mais aussi en Europe et en Grande-Bretagne. Les idées de «mondialisation» et de «politique de l’identité» qui nous ont fascinés après la guerre froide appartiennent maintenant à la poubelle de l’histoire. La question, plus importante que la question des personnalités de Hillary Clinton et de Donald Trump, est de savoir si nous aurons une nouvelle administration qui les autorise et essaie de résoudre nos problèmes à travers leur objectif. Joshua Mitchell
One of the many lessons of the recent presidential election campaign and its repugnant outcome is that the age of identity liberalism must be brought to an end. Hillary Clinton was at her best and most uplifting when she spoke about American interests in world affairs and how they relate to our understanding of democracy. But when it came to life at home, she tended on the campaign trail to lose that large vision and slip into the rhetoric of diversity, calling out explicitly to African-American, Latino, L.G.B.T. and women voters at every stop. This was a strategic mistake. If you are going to mention groups in America, you had better mention all of them. If you don’t, those left out will notice and feel excluded. Which, as the data show, was exactly what happened with the white working class and those with strong religious convictions. Fully two-thirds of white voters without college degrees voted for Donald Trump, as did over 80 percent of white evangelicals. (…) the fixation on diversity in our schools and in the press has produced a generation of liberals and progressives narcissistically unaware of conditions outside their self-defined groups, and indifferent to the task of reaching out to Americans in every walk of life. At a very young age our children are being encouraged to talk about their individual identities, even before they have them. By the time they reach college many assume that diversity discourse exhausts political discourse, and have shockingly little to say about such perennial questions as class, war, the economy and the common good. In large part this is because of high school history curriculums, which anachronistically project the identity politics of today back onto the past, creating a distorted picture of the major forces and individuals that shaped our country. (The achievements of women’s rights movements, for instance, were real and important, but you cannot understand them if you do not first understand the founding fathers’ achievement in establishing a system of government based on the guarantee of rights.) When young people arrive at college they are encouraged to keep this focus on themselves by student groups, faculty members and also administrators whose full-time job is to deal with — and heighten the significance of — “diversity issues.” Fox News and other conservative media outlets make great sport of mocking the “campus craziness” that surrounds such issues, and more often than not they are right to. Which only plays into the hands of populist demagogues who want to delegitimize learning in the eyes of those who have never set foot on a campus. How to explain to the average voter the supposed moral urgency of giving college students the right to choose the designated gender pronouns to be used when addressing them? How not to laugh along with those voters at the story of a University of Michigan prankster who wrote in “His Majesty”? This campus-diversity consciousness has over the years filtered into the liberal media, and not subtly. Affirmative action for women and minorities at America’s newspapers and broadcasters has been an extraordinary social achievement — and has even changed, quite literally, the face of right-wing media, as journalists like Megyn Kelly and Laura Ingraham have gained prominence. But it also appears to have encouraged the assumption, especially among younger journalists and editors, that simply by focusing on identity they have done their jobs. (…) How often, for example, the laziest story in American journalism — about the “first X to do Y” — is told and retold. Fascination with the identity drama has even affected foreign reporting, which is in distressingly short supply. However interesting it may be to read, say, about the fate of transgender people in Egypt, it contributes nothing to educating Americans about the powerful political and religious currents that will determine Egypt’s future, and indirectly, our own. (…) The media’s newfound, almost anthropological, interest in the angry white male reveals as much about the state of our liberalism as it does about this much maligned, and previously ignored, figure. A convenient liberal interpretation of the recent presidential election would have it that Mr. Trump won in large part because he managed to transform economic disadvantage into racial rage — the “whitelash” thesis. This is convenient because it sanctions a conviction of moral superiority and allows liberals to ignore what those voters said were their overriding concerns. It also encourages the fantasy that the Republican right is doomed to demographic extinction in the long run — which means liberals have only to wait for the country to fall into their laps. The surprisingly high percentage of the Latino vote that went to Mr. Trump should remind us that the longer ethnic groups are here in this country, the more politically diverse they become. Finally, the whitelash thesis is convenient because it absolves liberals of not recognizing how their own obsession with diversity has encouraged white, rural, religious Americans to think of themselves as a disadvantaged group whose identity is being threatened or ignored. Such people are not actually reacting against the reality of our diverse America (they tend, after all, to live in homogeneous areas of the country). But they are reacting against the omnipresent rhetoric of identity, which is what they mean by “political correctness.” Liberals should bear in mind that the first identity movement in American politics was the Ku Klux Klan, which still exists. Those who play the identity game should be prepared to lose it. (…) To paraphrase Bernie Sanders, America is sick and tired of hearing about liberals’ damn bathrooms. Mark Lilla (Columbia)
The death of Fidel Castro was the first foreign policy test for President-elect Donald Trump and he acquitted himself brilliantly. For anyone who thought that his tough talk was just campaign bluster, witness the incredibly strong statement made about the bloody Cuban strongman (…) For those of us used to President Barack Obama’s bland, milquetoast amorality on world affairs, and his practiced refusal to condemn evil, Trump’s words are a breath of fresh air and, God willing, portend a new American foreign policy based on the American principles of holding murderers accountable. Contrast Trump’s words with Obama’s perfection in saying absolutely nothing (…) This neutral nonsense betrays a cowardly refusal to condemn Castro as a tyrant. Most memorable is President Obama’s unique ability to make Castro’s death about himself and his own presidency. Perhaps President Obama forgot that he is leader of the free world and could have used the death of a dictator to say something about the importance of human liberty and human rights. But why, after eight years of Obama cozying up to Erdogan of Turkey and, worse, Ayatollah Khameini of Iran, should we expect anything else? (…) I have long said that President Obama’s greatest failure as a leader is his refusal to hate and condemn evil. Could there be any greater confirmation than this, and just six weeks before he leaves office? But while Trump distinguished himself as a leader prepared to bravely express his hatred of evil, virtually every other world leader followed President Obama instead, disgracing themselves to various degrees. I put them in three categories: brownnosers, appeasers, and suckups. Taking the pole position of brown-noser-in-chief is Canadian Prime Minister Justin Trudeau. His obsequiousness to the murderous Castro was so great that it read like parody (…) Here you have the leader of one of the Western world’s greatest democracies saying that an autocrat who murdered his people and ruled over them with an iron fist was loved by them. (…) Then there are the appeasers, those world leaders with no backbone, and who have probably set their sights on their countries opening up a beach resort in Cuba, or who will use Castro’s crimes to cover up their own. Bashar Assad of Syria, a man better known for gassing Arab children than writing eloquent eulogies said, “The name Fidel Castro will remain etched in the minds of all generations, as an inspiration for all the peoples seeking true independence and liberation from the yoke of colonization and hegemony.” U.N. Secretary-General Ban Ki Moon, a man who never met a dictator he couldn’t coddle, expressed how « at this time of national mourning, I offer the support of the United Nations to work alongside the people of the island. » I would never have thought Vladimir Putin of Russia a suckup, but how else to explain hailing Fidel Castro as a « wise and strong person » who was « an inspiring example for all countries and peoples.” Kind of stomach-turning. But perhaps the most disappointing comment came from Pope Francis who sent a telegram to Raúl Castro: « Upon receiving the sad news of the passing of your beloved brother, the honorable Fidel Castro … I express my sadness to your excellency and all family members of the deceased dignitary … I offer my prayers for his eternal rest.” If there is any spiritual justice in the world the only place Castro will rest is in a warm place in Hell. The Pope, to whom so many millions, including myself, look to for moral guidance, on this occasion can look to the president-elect of the United States for the proper response in the confrontation with evil. Shmuley Boteach
La réaction de Barack Obama, l’islamo-gauchiste encore présent à la Maison Blanche, au moment de l’annonce du décès de Fidel Castro a été digne d’un disciple de Fidel Castro : prétendre tendre la main au peuple cubain tout en évoquant le statut “historique” d’un abject dictateur est méprisable. Le peuple cubain souffre sous le joug totalitaire depuis près de six décennies et lui tendre la main ne passe pas par l’évocation du statut “historique” du principal responsable de la souffrance subie. La réaction de Donald Trump a été infiniment plus digne, et a été celle d’un vrai Président des Etats Unis. Donald Trump a appelé le dictateur par son nom de dictateur, a rappelé ses multiples crimes, et a dit souhaiter la liberté pour les Cubains. La presse internationale, tout particulièrement en France, a, de manière générale, usé de mots élogieux pour décrire le mort. Elle continue, ce qui n’est pas étonnant. (…) L’ »ouverture” voulue ces dernières années par le pape François, pratiquée par Barack Obama, et, aussi, par le crétin de l’Elysée, est une façon de renflouer les caisses de la dictature, sans que rien n’ait changé aux pratiques de la dictature : c’est donc une assistance à dictature en danger, et un crime supplémentaire contre le peuple cubain. (…) La nostalgie de ceux qui parlent de Fidel le “révolutionnaire” est obscène : mais les gens de gauche sont souvent obscènes et n’ont aucun sens des valeurs éthiques les plus élémentaires. Ils marchent chaque jour sur des millions de cadavres suppliciés. Ils détestent Trump, élu démocratiquement, mais admirent l’assassin Fidel Castro comme ils ont admiré tant d’autres assassins : Lénine, Ho Chi Minh, Arafat, etc.Guy Millière
Et si pour une fois c’était les peuples qui avaient vu juste ?
Et la confirmation du véritable désastre qu’auront été, entre abandon criminel du Moyen-Orient et campagne aussi insignifiante que futile pour le mariage ou les toilettes pour tous, les politiques complètement déconnectées du réel de nos Obama, Hollande ou Merkel …
Nos donneurs de leçons en rajoutent sur l’incompétence du président-élu américain et, à défaut de pouvoir changer le peuple, appellent des deux côtés de l’Atlantique à contester dans la rue le résultat des urnes …
Nos médias et nos élus (à quand après les cours islamiques anglaises, les cours d’histoire aménagée selon l’origine des élèves ?) continuent à coup de « premières » leur matraquage multiculturaliste …
Devinez qui parmi l’ensemble des dirigeants de la planète …
Contre l’incroyable déni et auto-aveuglement de toute une génération d’élites nourries au petit lait de la mondialisation et de l’identité heureuses …
Et les tomberaux d’hommages qui ont salué la mort d’un des plus notoires dictateurs de la planète ..
Aura eu le courage – ou le simple bon sens – d’appeler un chat un chat ?
La réaction de Barack Obama, l’islamo-gauchiste encore présent à la Maison Blanche, au moment de l’annonce du décès de Fidel Castro a été digne d’un disciple de Fidel Castro : prétendre tendre la main au peuple cubain tout en évoquant le statut “historique” d’un abject dictateur est méprisable.
Le peuple cubain souffre sous le joug totalitaire depuis près de six décennies et lui tendre la main ne passe pas par l’évocation du statut “historique” du principal responsable de la souffrance subie. La réaction de Donald Trump a été infiniment plus digne, et a été celle d’un vrai Président des Etats Unis. Donald Trump a appelé le dictateur par son nom de dictateur, a rappelé ses multiples crimes, et a dit souhaiter la liberté pour les Cubains.
La presse internationale, tout particulièrement en France, a, de manière générale, usé de mots élogieux pour décrire le mort. Elle continue, ce qui n’est pas étonnant.
Il faut donc le souligner une fois de plus.
Fidel Castro a été un dictateur féroce, dès son arrivée au pouvoir en 1959. Il s’est emparé de Cuba par la force des armes, y a installé un régime destructeur et barbare à la solde de l’Union Soviétique (et je le souligne : d’emblée à la solde de l’Union Soviétique). Il a fait assassiner des milliers d’opposants, en usant au commencement d’un exécuteur des basses oeuvres cruel et sadique appelé Ernesto Che Guevara, parti ensuite pratiquer le terrorisme en Afrique et en Amérique latine. Il a ravagé une économie qui, avant lui, était prospère, a provoqué une chute vertigineuse du niveau de vie du pays, aboli toutes les libertés, suscité l’exode de centaines de milliers de Cubains vers les Etats-Unis, volé des propriétés immobilières et des entreprises par centaines, transformé l’île en une grande prison.
Il faut le rappeler, Fidel Castro a failli provoquer une guerre mondiale en octobre 1962 quand il a accepté (ce qui était logique puisqu’il était un agent soviétique) l’installation de missiles nucléaires soviétiques à Cuba, missiles braqués vers les Etats Unis en un temps où l’Union Soviétique affichait ses intentions destructrices vis-à-vis de la principale puissance du monde libre. Fidel Castro a demandé explicitement à l’époque à l’Union Soviétique d’utiliser les missiles nucléaires installés à Cuba pour détruire les Etats-Unis. Nikita Khrouchtchev a refusé.
Il faut le rappeler aussi, Fidel Castro est le seul et unique responsable de la rupture de toute relation commerciale ou autre entre Cuba et les Etats-Unis. A l’arrivée de Fidel Castro au pouvoir, les Etats-Unis ont eu une attitude neutre, voire positive, vis-à-vis du nouveau régime : l’antipathie est vite venue, avec les exécutions sommaires, l’instauration de la dictature, la confiscation de toutes les entreprises américaines, la transformation de l’île en base soviétique.
Et il faut le dire : l’absence de toute relation entre Cuba et les Etats-Unis n’a jamais empêché Cuba sous Castro de commercer avec le reste du monde. La ruine économique de Cuba a une cause et une seule : la destruction de l’économie de marché et des structures de production du pays par des criminels sanguinaires, incompétents, vicieux, et méprisants envers l’être humain. Des gens tels qu’Hugo Chavez au Venezuela ou Jean-Luc Mélenchon s’il arrivait au pouvoir en France. Le crétin de l’Elysée, après avoir qualifié (comme Obama) Fidel Castro de grande figure historique, a incriminé l’embargo américain. Il aurait mieux fait d’incriminer les causes de la ruine de Cuba et de demander comme Trump un retour à la liberté à Cuba, mais le crétin en question étant socialiste, ce serait trop lui demander.
Il faut le dire : l’expédition de la Baie des Cochons fut une expédition libératrice qui aurait pu permettre au peuple cubain de retrouver la liberté face à la férocité qui s’abattait déjà sur lui. Elle a échoué à cause de la pusillanimité de John Kennedy, qui a retiré aux forces cubaines libres les moyens logistiques et l’appui qui leur avait été promis, cela au moment même où elles débarquaient. Si John Kennedy n’était pas mort à Dallas en 1963, le monde aurait fini par s’apercevoir qu’il était, outre un obsédé sexuel, un mauvais Président. Les Cubains de Floride se souviennent et savent que les démocrates sont, en général, des traîtres.
Il faut l’ajouter : le discours qui imprègne les grands médias aujourd’hui disant que, sous Battista, Cuba était un lieu de débauche et de prostitution est particulièrement infect. Cuba sous Battista avait un niveau de vie équivalent à celui de l’Italie de l’époque, et La Havane était une ville de casinos où la prostitution existait, une sorte de Las Vegas tropical. Des clubs de vacance existaient, les salaires allaient aux employés. Ces dernières années, quand les frères Castro ont eu besoin d’argent, des clubs de vacance ont ouvert, les salaires sont versés par les entreprises qui ont ouvert les clubs au gouvernement cubain, qui donne une pitance (20 dollars) équivalant à deux pour cent des salaires aux employés cubains utilisés, qui n’ont pas l’autorisation de ramener de la nourriture jetée dans les poubelles des clubs à leurs familles qui crèvent de faim. Les jeunes filles se prostituent pour un prix modique parce qu’elles crèvent de faim elles aussi.
Il faut l’ajouter : Fidel Castro n’a rien apporté au peuple cubain, sinon la souffrance et la mort. La médecine cubaine pour les Cubains est digne de celle du pire pays du tiers-monde (même les médicaments de base tels l’aspirine sont rationnés) tandis que des hôpitaux traitent, pour des sommes élevées de riches clients étrangers, tous les bénéfices allant au régime. Cuba était un pays très alphabétisé avant Castro, la différence est que l’alphabétisation désormais est totalement imprégnée de propagande léniniste monolithique.
L’ »ouverture” voulue ces dernières années par le pape François, pratiquée par Barack Obama, et, aussi, par le crétin de l’Elysée, est une façon de renflouer les caisses de la dictature, sans que rien n’ait changé aux pratiques de la dictature : c’est donc une assistance à dictature en danger, et un crime supplémentaire contre le peuple cubain.
La joie des Cubains de Floride est très logique et pleinement légitime. Les Cubains encore à Cuba ne peuvent exprimer la moindre joie sans risquer d’avoir à le payer cher.
La nostalgie de ceux qui parlent de Fidel le “révolutionnaire” est obscène : mais les gens de gauche sont souvent obscènes et n’ont aucun sens des valeurs éthiques les plus élémentaires. Ils marchent chaque jour sur des millions de cadavres suppliciés. Ils détestent Trump, élu démocratiquement, mais admirent l’assassin Fidel Castro comme ils ont admiré tant d’autres assassins : Lénine, Ho Chi Minh, Arafat, etc.
Que les cendres de Fidel Castro soient destinées à reposer là où se trouve la sépulture de José Marti, qui était un libéral, un démocrate, un défenseur de la liberté de parole, et qui est mort lors de la décolonisation de Cuba, menée grâce aux Etats-Unis en 1895, est une insulte à la mémoire de José Marti, dont Fidel Castro a piétiné l’héritage.
The death of Fidel Castro was the first foreign policy test for President-elect Donald Trump and he acquitted himself brilliantly.
For anyone who thought that his tough talk was just campaign bluster, witness the incredibly strong statement made about the bloody Cuban strongman:
Today, the world marks the passing of a brutal dictator who oppressed his own people for nearly six decades. Fidel Castro’s legacy is one of firing squads, theft, unimaginable suffering, poverty and the denial of fundamental human rights.
While Cuba remains a totalitarian island, it is my hope that today marks a move away from the horrors endured for too long, and toward a future in which the wonderful Cuban people finally live in the freedom they so richly deserve.
For those of us used to President Barack Obama’s bland, milquetoast amorality on world affairs, and his practiced refusal to condemn evil, Trump’s words are a breath of fresh air and, God willing, portend a new American foreign policy based on the American principles of holding murderers accountable.
Today, we offer condolences to Fidel Castro’s family, and our thoughts and prayers are with the Cuban people. For nearly six decades, the relationship between the United States and Cuba was marked by discord and profound political disagreements.
During my presidency, we have worked hard to put the past behind us, pursuing a future in which the relationship between our two countries is defined not by our differences but by the many things that we share as neighbors and friends — bonds of family, culture, commerce, and common humanity.
This neutral nonsense betrays a cowardly refusal to condemn Castro as a tyrant. Most memorable is President Obama’s unique ability to make Castro’s death about himself and his own presidency.
Perhaps President Obama forgot that he is leader of the free world and could have used the death of a dictator to say something about the importance of human liberty and human rights. But why, after eight years of Obama cozying up to Erdogan of Turkey and, worse, Ayatollah Khameini of Iran, should we expect anything else?
Indeed, his Secretary of State John Kerry, whose tenure has been distinguished by near-total capitulation to Iran, the world’s foremost state sponsor of terrorism, said of Castro: « We extend our condolences to the Cuban people today as they mourn the passing of Fidel Castro … He played an outsized role in their lives, and he influenced the direction of regional, even global affairs.”
I’d be outraged if I were not already asleep.
I have long said that President Obama’s greatest failure as a leader is his refusal to hate and condemn evil. Could there be any greater confirmation than this, and just six weeks before he leaves office?
But while Trump distinguished himself as a leader prepared to bravely express his hatred of evil, virtually every other world leader followed President Obama instead, disgracing themselves to various degrees. I put them in three categories: brownnosers, appeasers, and suckups.
Taking the pole position of brown-noser-in-chief is Canadian Prime Minister Justin Trudeau. His obsequiousness to the murderous Castro was so great that it read like parody:
“Fidel Castro was a larger than life leader who served his people for almost half a century.” Trudeau added that Castro was “Cuba’s longest serving President.”
Notice that Castro “served” rather than ruled, and that he was “President” and not « dictator.”
But Trudeau’s just getting started.
“While a controversial figure, both Mr. Castro’s supporters and detractors recognized his tremendous dedication and love for the Cuban people who had a deep and lasting affection for ‘el Comandante…” He continued. Castro was “a legendary revolutionary and orator” and that his death at 90 had brought him “deep sorrow.”
Here you have the leader of one of the Western world’s greatest democracies saying that an autocrat who murdered his people and ruled over them with an iron fist was loved by them.
As an American who loves Canada and has the privilege of hosting a national TV show there, “Divine Intervention,” I am embarrassed for the good people of Canada.
Then there are the appeasers, those world leaders with no backbone, and who have probably set their sights on their countries opening up a beach resort in Cuba, or who will use Castro’s crimes to cover up their own.
Bashar Assad of Syria, a man better known for gassing Arab children than writing eloquent eulogies said, “The name Fidel Castro will remain etched in the minds of all generations, as an inspiration for all the peoples seeking true independence and liberation from the yoke of colonization and hegemony.”
U.N. Secretary-General Ban Ki Moon, a man who never met a dictator he couldn’t coddle, expressed how « at this time of national mourning, I offer the support of the United Nations to work alongside the people of the island. »
I would never have thought Vladimir Putin of Russia a suckup, but how else to explain hailing Fidel Castro as a « wise and strong person » who was « an inspiring example for all countries and peoples.” Kind of stomach-turning.
But perhaps the most disappointing comment came from Pope Francis who sent a telegram to Raúl Castro: « Upon receiving the sad news of the passing of your beloved brother, the honorable Fidel Castro … I express my sadness to your excellency and all family members of the deceased dignitary … I offer my prayers for his eternal rest.”
If there is any spiritual justice in the world the only place Castro will rest is in a warm place in Hell.
The Pope, to whom so many millions, including myself, look to for moral guidance, on this occasion can look to the president-elect of the United States for the proper response in the confrontation with evil.
Boteach, “America’s Rabbi,” whom the Washington Post calls “the most famous Rabbi in America,” is founder of The World Values Network and is the international best-selling author of 31 books, including “The Israel Warrior,” which has just been published. Follow him on Twitter @RabbiShmuley.
Miami residents celebrate the death of Fidel Castro on November 26, 2016 in Miami, Florida. Cuba’s current President and younger brother of Fidel, Raul Castro, announced in a brief TV appearance that Fidel Castro had died at 22:29 hours on November 25 aged 90. (Gustavo Caballero/Getty Images)
Fidel Castro is dead at age 90. In power for more than a half century, his regime ruled the last planned socialist economy. (Unless we include quirky North Korea). In 1957, when Castro launched his Cuban revolution, Cuban GDP per capita equaled the Latin American average. On the day of Fidel’s death, it has fallen to less than half that average. Over the fifty years of Castro’s communist rule, Cuba went from being among the more prosperous countries of Latin America to being among its poorest. When Fidel marched victoriously into Havana, it had fifty-eight national newspapers. Now it has six, all published by the Cuban communist party and its affiliates.
When Communism fell in the Soviet Union and Eastern Europe, advocates of Communism throughout the world shrugged. They argued that the Communist system is sound. The problem is that Communist countries have had the wrong leaders. Communist true believers, the world over, had to put their faith in Fidel and to hope that his example would spread Communism beyond Cuba’s shores – to countries like Venezuela and Nicaragua. Communist true believers looked at Fidel’s Cuba and praised its health-care and education systems, its income equality, and the fact that Cuba survived the U.S. embargo. They ignored the fact the Fidel remained in power thanks to repression of political opponents, his willingness to lose his most ambitious citizens as boat people to the US, and cheap oil as a client state of the USSR and then Venezuela.
Two decades back, only ten percent of Americans viewed Cuba favorably. On the day of Fidel’s death, more than half of Americans have a positive view of Cuba. The party divide is enormous: Three quarters of Democrats and one third of Republicans hold positive views of Cuba. In the 1960s, the New Left, with its ubiquitous Che posters, was enraptured by Castro and the Cuban model. More recent assessments by socialists fret that Cuba is not striving for a true form of socialism.
The American Left views Fidel as a veteran, battle-scarred in his battle against a US imperialism, bent on Cuba’s destruction. Despite all these obstacles, as stated by Bernie Sanders in 1985, people “forget that Castro educated their kids, gave their kids healthcare, and totally transformed society” in a “revolution of values.” The American Right sees Fidel’s Cuba as an oppressive one-party state that permits no dissent. It is managed by a regime that has run the economy into the ground, despite accomplishments in education and health care. Equality in Cuba means an equal right to poverty.
An oppressive dictator who imprisons opponents and forces his best-and-brightest to flee or a heroic leader thumbing his nose in the face of the global hegemon while providing his people with education and health, one thing is clear: The Castro planned socialist economy has doomed the Cuban people to lives of poverty. If Cuba had simply matched the lackluster performance of Latin America, the Cuban people would have double the living standard they have today.
The rise in favorable American opinion about Cuba, especially among Democrats, reflects the leftward tilt of their thinking, and a naïve belief, as expressed by the Sanders campaign, that Democratic Socialism is possible. If so, let them give one real-world example, and not the phony Scandinavian model. Fidel knew otherwise and did not tinker with democracy, and he died in power. Gorbachev did not, and he was unceremoniously dumped from power. I imagine Raul Castro is aware of these facts.
What you thought of Castro, who died at the age of 90 on Friday, has always been a reflection of your politics, your nationality, and your age. He was a hero of the revolutionary left in Latin America, proving that a ragtag band of guerrillas could overthrow the Western Hemisphere’s hegemon. He was a communist stooge to the American officials who repeatedly tried to kill him, presiding over an outpost of the Soviet Union just off the coast of Florida. To Cubans themselves he was a dictator who impoverished the country, jailed and killed thousands of dissidents, and stripped citizens of their basic rights. And to those who came of age in the post-Cold War era, he was simultaneously a retro figure on a T-shirt and a cranky old man in an Adidas tracksuit.
The disintegration of the post-Cold War order—culminating in Brexit in Great Britain and the election of Donald Trump in the United States—has been mirrored in the chaotic response to Castro’s death. Jeremy Corbyn, the leader of Britain’s Labour Party, hailed Castro as a “champion of social justice,” which is decidedly more sympathetic than anything Tony Blair might have said. Paeans have poured in from predictable quarters (Brazil’s Dilma Rousseff, herself a one-time revolutionary) and those less so (Canada’s Justin Trudeau, the scion of a former prime minister). In the United States, a Democratic president who ushered in a new relationship with Cuba largely based on free market liberalization is being succeeded by a Republican businessman who has threatened to roll back this progress for a “better deal.”
What Trump and Cuban President Raul Castro plan to do now is the ultimate question hanging over Cuba in the wake of Fidel’s death. So far, Trump has indicated nothing more than that he is aware of the news, which we can all agree, even in these divided times, is a good start.
Le 8 novembre 2016 est une date historique. Elle marque l’accession prochaine à la présidence des Etats-Unis d’un homme, Donald J. Trump, qui, après le Brexit, incarne le surgissement sur la scène politique et culturelle occidentale d’une force nouvelle : les classes moyennes.
Ne sont-ce pas les classes moyennes qui, par définition, dominent la scène depuis les Trente Glorieuses ? Certes, mais la spécificité de la situation actuelle est que ces « gens ordinaires » que désigne le sociologue canadien Mathieu Bock-Côté se comportent désormais de façon politiquement cohérente. Avec une solidarité, une conscience de classe, comme disent les marxistes. Bref, elles votent en masse et en tant que telles.
« La démocratie est lente », constatait le communiste espagnol Denis Fernandez Récatala. De la survenance d’un problème à sa résolution par le mode démocratique — appropriation de la problématique par un parti, accession de ce parti au pouvoir, mise en œuvre d’une politique — s’écoulent souvent de longues années. Particulièrement lorsque le diagnostic est lui-même disputé.
Toutefois, certaines réalités économiques et culturelles sont devenues si prégnantes qu’elles ne peuvent plus être niées. Je soutiens que la révolte des classes moyennes occidentales est le fruit de la détérioration de ses conditions d’existence, dont les motifs sont similaires des deux côtés de l’Atlantique.
La taxation, dans nos pays, est confiscatoire. Depuis 1945, la part de richesse prélevée par l’Etat n’a cessé de croître. Même s’ils ignorent l’aphorisme de Frédéric Bastiat selon lequel « L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde », les citoyens « sentent » que le système tourne à leurs dépens. Que l’Etat, pour octroyer telle prime, tel encouragement ou service, perçoit un impôt plus lourd que ne le serait le prix du service sans son intervention, car il doit rémunérer une pléthore d’agents, de partenaires et de clientèles. Cette réalité est d’autant moins tolérée qu’elle s’inscrit dans le contexte d’un « capitalisme de connivence » qui compense, avec l’argent des contribuables, et à coup de dizaines de milliards, les pertes abyssales d’un secteur financier dont les bénéfices sont privés.
Ayant payé son écot — de 50 à 65% de ses revenus, dans la plupart de nos pays — le citoyen dispose d’un capital résiduel. Ce capital, en principe il en use à sa guise, car nos régimes restent fondés sur le principe de l’autonomie de la volonté. Mais seulement en théorie. Car, à chaque instant le citoyen doit louvoyer et se glisser sous les clôtures électrifiées de normes toujours plus nombreuses. La gauche culturelle a longtemps soutenu, jusqu’à nos jours, que nous évoluons dans un univers capitaliste « dérégulé », dont la généalogie remonterait au règne de M. Reagan et de Mme Thatcher. Rien n’est plus faux. Que l’on regarde les chiffres de la production législative et réglementaire — disons normative — dans les pays européens et aux Etats-Unis, et l’on verra qu’aucun individu dans l’histoire de l’humanité ne s’est trouvé aussi étroitement sanglé de normes. L’Occidental est tel un Gulliver auquel on donne la liberté en titre, mais que l’on paralyse par mille liens. Ce n’est pas le lieu de produire des chiffres — je le ferai dans une étude comparative et historique à paraître — contentons-nous de relever que la France produit autant de normes chaque année que durant les cinq cent années qui vont du 13e siècle de Saint-Louis à la révolution de 1789. À ce formidable magma normatif en croissance exponentielle, vient encore s’agglutiner l’épaisse gangue des régulations que sécrètent les institutions européennes. Outre son caractère anti-économique, cette prolifération normative contraint, force et entrave les citoyens jusque dans les détails infimes et intimes de leur vie quotidienne.
La fiscalité et l’hyperinflation normative s’aggravent de la dégradation urbaine et scolaire. L’immigration massive ayant été érigée en dogme moral et en nécessité économique, les classes moyennes occidentales ont vu surgir au sein de leurs villes, de leurs quartiers et de leurs écoles, parfois jusqu’à les dominer, des populations dont la culture est certes respectable mais, dans le cas de l’islam, radicalement distincte de la leur, dans son rapport aux femmes, à la liberté de conscience, à la démocratie. Cette immigration, dans la réalité des faits, n’est pas choisie, mais subie. Quand, après trente années de ce régime migratoire, les mêmes « gens ordinaires » constatent que des candidats à la migration se pressent toujours plus nombreux à leurs frontières, ils se posent légitimement la question de la perpétuation de leur mode de vie. Comment s’étonner que le dogme de l’immigration anarchique soit rejeté ? Cela indépendamment de la question du terrorisme (alors qu’il est par exemple établi que dix des douze auteurs des effroyables attentats de Paris, le 13 novembre 2015, se sont inflitrés en Europe comme migrants, cfr. Le Figaro, 12 novembre 2016).
Pour compléter la tableau, relevons la guerre culturelle qui est menée aux classes moyennes, sur la seule foi du sexe et de la couleur de la peau. Examinons les deux aspects de ce Kulturkampf.
D’abord, la théorie du genre, selon laquelle la distinction des sexes masculin et féminin est une invention culturelle (Judith Butler, Anne Fausto-Sterling). Au nom de cette idéologie, dans l’infini chatoiement de ses variétés académiques et médiatiques, des minorités sexuelles en sont venues à exiger l’éradication de la référence à l’hétérosexualité, vécue comme oppressive et stigmatisante. La revendication est de brouiller les genres, en les multipliant à l’infini, et de quitter la notion — statistiquement incontestable — de « normalité » hétérosexuelle. D’où ces polémiques, souvent émaillées de violences, pour décider de la question de savoir si les « queer » et transgenres peuvent, ou pas, accéder aux vestiaires sportifs, scolaires et toilettes de leur sexe biologique, ou de leur sexe choisi, ou les deux, et comment vérifier ? Des parents se posent légitimement la question de savoir si leur petite fille de six ou sept ans risque de croiser dans les toilettes une « femme » de 45 ans avec ce que l’on appelait autrefois un sexe masculin entre les jambes. Se fédère à ces polémiques l’hostilité de principe témoignée au garçon hétérosexuel, institué en dépositaire de la sexualité « du passé », ce qui justifie qu’il soit rééduqué dès la plus tendre enfance — à l’école —, discriminé lors de son entrée éventuelle à l’université, et que le moindre de ses gestes et paroles soit justiciable des tribunaux. Cette guerre du genre est menée avec autant d’âpreté que d’efficacité : la grande majorité des diplômés de l’enseignement supérieur américain et européen sont des femmes, et la réalité biologique de la binarité sexuelle est battue en brèche jusque dans nos textes de loi (Convention d’Istanbul, Conseil de l’Europe, 2011).
Vient enfin la résurgence du racisme. D’abord, il y eut le discours anti-raciste, réprouvant le rejet d’une personne sur la seule foi de sa race. L’écrasante majorité des Occidentaux ont acquiescé à ce discours. Toutefois une rhétorique subtile s’est enclenchée, particulièrement dans des pays comme les Etats-Unis et la France, jusqu’à permettre, puis encourager, la mise en accusation des populations blanches. Ainsi des « safe spaces » se sont-ils multipliés sur les campus américains, c’est-à-dire des espaces réservés aux minorités, pour leur permettre de se soustraire à la présence réputée suffocante des Américains « caucasiens ». Dit autrement, les étudiants blancs se voient refuser l’accès de certaines zones du campus sur la seule foi de la couleur de leur peau. Paradoxal retournement d’un discours anti-raciste qui en vient à légitimer, souvent par la violence, des pratiques racialistes au sens strict. Ainsi du discours sur le « white privilege », soit l’idée qu’un Américain blanc est privilégié du seul fait de la couleur de sa peau, quels que soient ses origines et milieu social, et que la loi doit donc discriminer en sa défaveur, toujours sur la seule foi de la couleur de sa peau. Considérons ce répertoire de journalistes récemment créé sous l’égide du gouvernement francophone belge, dont l’objet est d’inclure d’une part les femmes, d’autre part les « hommes et femmes issus de la diversité », ce qui exclut qui ? Les hommes blancs, avec pour seul critère la couleur de leur peau. Racisme, vous avez dit proto-fascisme ? Qui ne voit que ces discours et pratiques reposent sur les notions de responsabilité raciale collective, et de responsabilité à travers les âges, soit très exactement les concepts qui ont, de tout temps, fondé l’antisémitisme, comme Sartre l’a montré dans ses Réflexions sur la question juive ? Ce racisme au nom de l’anti-racisme, les classes moyennes occidentales n’y consentent plus.
Il est à noter que cette guerre sexuelle et racialiste menace les gens ordinaires, non seulement dans leurs conditions d’existence (impôt, normes, quartiers), mais dans leur être naturel (sexe, couleur de la peau). Qu’un rejet radical — une révolution, selon Stephen Bannon, éminence grise du nouveau président américain — se dessine, est-ce surprenant ?
Tels sont les facteurs dont la conjugaison explique, selon moi, à la fois la détérioration des conditions de vie des classes moyennes occidentales, et leur révolte politique.
It is a truism that America has become a more diverse country. It is also a beautiful thing to watch. Visitors from other countries, particularly those having trouble incorporating different ethnic groups and faiths, are amazed that we manage to pull it off. Not perfectly, of course, but certainly better than any European or Asian nation today. It’s an extraordinary success story.
But how should this diversity shape our politics? The standard liberal answer for nearly a generation now has been that we should become aware of and “celebrate” our differences. Which is a splendid principle of moral pedagogy — but disastrous as a foundation for democratic politics in our ideological age. In recent years American liberalism has slipped into a kind of moral panic about racial, gender and sexual identity that has distorted liberalism’s message and prevented it from becoming a unifying force capable of governing.
One of the many lessons of the recent presidential election campaign and its repugnant outcome is that the age of identity liberalism must be brought to an end. Hillary Clinton was at her best and most uplifting when she spoke about American interests in world affairs and how they relate to our understanding of democracy. But when it came to life at home, she tended on the campaign trail to lose that large vision and slip into the rhetoric of diversity, calling out explicitly to African-American, Latino, L.G.B.T. and women voters at every stop. This was a strategic mistake. If you are going to mention groups in America, you had better mention all of them. If you don’t, those left out will notice and feel excluded. Which, as the data show, was exactly what happened with the white working class and those with strong religious convictions. Fully two-thirds of white voters without college degrees voted for Donald Trump, as did over 80 percent of white evangelicals.
The moral energy surrounding identity has, of course, had many good effects. Affirmative action has reshaped and improved corporate life. Black Lives Matter has delivered a wake-up call to every American with a conscience. Hollywood’s efforts to normalize homosexuality in our popular culture helped to normalize it in American families and public life.
Have you changed anything in your daily life since the election? For example, have you tried to understand opposing points of view, donated to a group, or contacted your member of Congress? Your answer may be included in a follow up post.
But the fixation on diversity in our schools and in the press has produced a generation of liberals and progressives narcissistically unaware of conditions outside their self-defined groups, and indifferent to the task of reaching out to Americans in every walk of life. At a very young age our children are being encouraged to talk about their individual identities, even before they have them. By the time they reach college many assume that diversity discourse exhausts political discourse, and have shockingly little to say about such perennial questions as class, war, the economy and the common good. In large part this is because of high school history curriculums, which anachronistically project the identity politics of today back onto the past, creating a distorted picture of the major forces and individuals that shaped our country. (The achievements of women’s rights movements, for instance, were real and important, but you cannot understand them if you do not first understand the founding fathers’ achievement in establishing a system of government based on the guarantee of rights.)
When young people arrive at college they are encouraged to keep this focus on themselves by student groups, faculty members and also administrators whose full-time job is to deal with — and heighten the significance of — “diversity issues.” Fox News and other conservative media outlets make great sport of mocking the “campus craziness” that surrounds such issues, and more often than not they are right to. Which only plays into the hands of populist demagogues who want to delegitimize learning in the eyes of those who have never set foot on a campus. How to explain to the average voter the supposed moral urgency of giving college students the right to choose the designated gender pronouns to be used when addressing them? How not to laugh along with those voters at the story of a University of Michigan prankster who wrote in “His Majesty”?
This campus-diversity consciousness has over the years filtered into the liberal media, and not subtly. Affirmative action for women and minorities at America’s newspapers and broadcasters has been an extraordinary social achievement — and has even changed, quite literally, the face of right-wing media, as journalists like Megyn Kelly and Laura Ingraham have gained prominence. But it also appears to have encouraged the assumption, especially among younger journalists and editors, that simply by focusing on identity they have done their jobs.
Recently I performed a little experiment during a sabbatical in France: For a full year I read only European publications, not American ones. My thought was to try seeing the world as European readers did. But it was far more instructive to return home and realize how the lens of identity has transformed American reporting in recent years. How often, for example, the laziest story in American journalism — about the “first X to do Y” — is told and retold. Fascination with the identity drama has even affected foreign reporting, which is in distressingly short supply. However interesting it may be to read, say, about the fate of transgender people in Egypt, it contributes nothing to educating Americans about the powerful political and religious currents that will determine Egypt’s future, and indirectly, our own. No major news outlet in Europe would think of adopting such a focus.
But it is at the level of electoral politics that identity liberalism has failed most spectacularly, as we have just seen. National politics in healthy periods is not about “difference,” it is about commonality. And it will be dominated by whoever best captures Americans’ imaginations about our shared destiny. Ronald Reagan did that very skillfully, whatever one may think of his vision. So did Bill Clinton, who took a page from Reagan’s playbook. He seized the Democratic Party away from its identity-conscious wing, concentrated his energies on domestic programs that would benefit everyone (like national health insurance) and defined America’s role in the post-1989 world. By remaining in office for two terms, he was then able to accomplish much for different groups in the Democratic coalition. Identity politics, by contrast, is largely expressive, not persuasive. Which is why it never wins elections — but can lose them.
The media’s newfound, almost anthropological, interest in the angry white male reveals as much about the state of our liberalism as it does about this much maligned, and previously ignored, figure. A convenient liberal interpretation of the recent presidential election would have it that Mr. Trump won in large part because he managed to transform economic disadvantage into racial rage — the “whitelash” thesis. This is convenient because it sanctions a conviction of moral superiority and allows liberals to ignore what those voters said were their overriding concerns. It also encourages the fantasy that the Republican right is doomed to demographic extinction in the long run — which means liberals have only to wait for the country to fall into their laps. The surprisingly high percentage of the Latino vote that went to Mr. Trump should remind us that the longer ethnic groups are here in this country, the more politically diverse they become.
Finally, the whitelash thesis is convenient because it absolves liberals of not recognizing how their own obsession with diversity has encouraged white, rural, religious Americans to think of themselves as a disadvantaged group whose identity is being threatened or ignored. Such people are not actually reacting against the reality of our diverse America (they tend, after all, to live in homogeneous areas of the country). But they are reacting against the omnipresent rhetoric of identity, which is what they mean by “political correctness.” Liberals should bear in mind that the first identity movement in American politics was the Ku Klux Klan, which still exists. Those who play the identity game should be prepared to lose it.
We need a post-identity liberalism, and it should draw from the past successes of pre-identity liberalism. Such a liberalism would concentrate on widening its base by appealing to Americans as Americans and emphasizing the issues that affect a vast majority of them. It would speak to the nation as a nation of citizens who are in this together and must help one another. As for narrower issues that are highly charged symbolically and can drive potential allies away, especially those touching on sexuality and religion, such a liberalism would work quietly, sensitively and with a proper sense of scale. (To paraphrase Bernie Sanders, America is sick and tired of hearing about liberals’ damn bathrooms.)
Teachers committed to such a liberalism would refocus attention on their main political responsibility in a democracy: to form committed citizens aware of their system of government and the major forces and events in our history. A post-identity liberalism would also emphasize that democracy is not only about rights; it also confers duties on its citizens, such as the duties to keep informed and vote. A post-identity liberal press would begin educating itself about parts of the country that have been ignored, and about what matters there, especially religion. And it would take seriously its responsibility to educate Americans about the major forces shaping world politics, especially their historical dimension.
Some years ago I was invited to a union convention in Florida to speak on a panel about Franklin D. Roosevelt’s famous Four Freedoms speech of 1941. The hall was full of representatives from local chapters — men, women, blacks, whites, Latinos. We began by singing the national anthem, and then sat down to listen to a recording of Roosevelt’s speech. As I looked out into the crowd, and saw the array of different faces, I was struck by how focused they were on what they shared. And listening to Roosevelt’s stirring voice as he invoked the freedom of speech, the freedom of worship, the freedom from want and the freedom from fear — freedoms that Roosevelt demanded for “everyone in the world” — I was reminded of what the real foundations of modern American liberalism are.
Mark Lilla, a professor of the humanities at Columbia and a visiting scholar at the Russell Sage Foundation, is the author, most recently, of “The Shipwrecked Mind: On Political Reaction.”
The New York Times, like Walt Whitman, contains multitudes and necessarily contradicts itself. In the Sunday edition there is an intelligent essay by Mark Lilla titled “The End of Identity Liberalism.” In the Times magazine is an essay by Alexander Fury asking “Can a Corset Be Feminist?” Lilla argues that the tiresomely omphaloskeptic identity politics of the contemporary Left is counterproductive, standing in the way of a genuine liberalism of principle and cosmopolitan broad-mindedness. He writes: “How often, for example, the laziest story in American journalism — about the ‘first X to do Y’ — is told and retold. Fascination with the identity drama has even affected foreign reporting, which is in distressingly short supply. However interesting it may be to read, say, about the fate of transgender people in Egypt, it contributes nothing to educating Americans about the powerful political and religious currents that will determine Egypt’s future, and indirectly, our own. No major news outlet in Europe would think of adopting such a focus.” If we were feeling generous, we could overlook the fact that such sterling progressives as Jonathan Chait began to question the value of identity politics right around the time that “Shut up, white man!” came to be accepted as an all-purpose response to columns by Jonathan Chait. Lilla’s understandably Europhilic column does not grapple with the demographic facts — that Switzerland is full of Swiss people and Mississippi isn’t — but his prescription for liberal reform is the right one, one that certainly would please conservatives even if it made no impression on the Left, which does not have very many liberals anymore. A liberal education system, Lilla writes, would acquaint students with the structures and dynamics of American government and prepare them for the duties of citizenship. A liberal press would take more than an “anthropological interest in the angry white male” and “would begin educating itself about parts of the country that have been ignored, and about what matters there, especially religion.” (Learning the elementary facts about firearms would be something, too.)
The most interesting and insightful part of Lilla’s essay is his argument that the right-leaning rural and small-town Americans are not in fact revolting against the fact of American diversity but against the “omnipresent rhetoric of identity, which is what they mean by ‘political correctness.’” That is exactly right. He ends with a salute to Franklin Roosevelt’s “Four Freedoms,” without getting into the messy fact that the Democratic party has declared open war on two of them — freedom of speech and freedom of worship — with Harry Reid’s Senate caucus having gone so far as to vote for repealing the First Amendment. Make identity politics the main operational model in a country that is two-thirds white and 50 percent or so male, and what do you expect? How different is Alexander Fury’s essay on the corset, by comparison. Fury’s piece is the usual exercise in progressive moral panic: How should the right sort of people feel about corsets? (Kale? Juice cleanses? Whole Foods? Tesla automobiles?) The corset, Fury says, is not just another article of clothing, and one can feel a dreadful premonition of the abuse of the word “literally” before Fury gets around to writing it: “As opposed to merely transforming our perceptions of the figure, as with the padding and extensions of 18th-century pannier skirts, or the 19th-century bustle, the corset acted — and still acts — directly on the form, kneading and shifting flesh to literally carve out a new body for its wearer, no situps required.” We are all good liberals here, but I am confident that literally carving the human body remains a crime, even in New York. RELATED: Identity Politics Are Ripping Us Apart Fury’s version of things is the opposite of Lilla’s tolerant liberalism: To be the right sort of people, we must be feminists, and to be feminists, we must have opinions on . . . everything, and assign to the entirety of the universe moral gradations based upon the feminist position that all of the right sort of people must assume. Fury ultimately comes down as a corset libertarian: “A woman wearing a corset today is a symbol of empowerment, of sexual freedom, of control. She’s the one holding the laces, the one constructing her own femininity.” But the problem is less the answer than the question, and the question-begging — the identification of feminism with virtue and the hunt for heresy. More P.C. Culture Football and Fallacies Enemies of Language If You Need a Hotline to Handle Thanksgiving, Then You Actually Need to Get Over Yourself Lilla’s plea is probably doomed to fall upon deaf ears — or ears that are at the very least not listening. There is almost nothing that people enjoy so much as talking about themselves and all of the splendid ways in which they and their experiences are utterly unique, and it is very difficult to listen to others while talking about one’s self. Sir Richard Francis Burton wasn’t entirely wrong to conclude that “man never worshipped anything but himself.” But if progressives will not heed principle, then maybe they will heed arithmetic. Make identity politics the main operational model in a country that is two-thirds white and 50 percent or so male, and what do you expect? President-elect Trump might have some thoughts on that. — Kevin D. Williamson is the roving correspondent for National Review.
Since the end of the Cold War, America has been mesmerized by two ideas that have given hazy coherence to the post-1989 world: “globalism” and “identity politics.” Formidable political movements in America and in Europe, still raucous and unrefined, now reject both ideas. Political and intellectual elites dismiss these movements because they believe the post-1989 world as they have understood it is still intact, and that no thoughtful person could think otherwise. Hence, the only-dumb-white-people-vote-for-Trump trope.
The “globalization” idea has expressions on both the Left and Right: on the Left, the emphasis has been on so-called “global norms” and culture; on the Right, the emphasis has been on so-called “free-trade” and democracy promotion through military means. Both sides believe in the inevitability of their idea of globalization. We live, however, in a world of states. In that world, the movement of cultural information and material goods has not been free-flowing, and really can never be. Regulatory agencies within the state, often captured by corporations who by virtue of economies of scale can afford large back-office compliance staff, determine what comes in and what stays out. NAFTA is hundreds of pages long. TPP is thousands of pages long. The real beneficiaries of these arrangements are state regulators and large corporations. They will always be in favor of so-called “free trade.” They both gain; but American workers generally do not. Consumers get cheaper goods, but a chasm opens up between those who are in on the game and those who are not. Standards of living fall for all but the few. Government grows. Corporations get rich. What happens to everybody else?
“Globalization” suggests a world where states matter little. If states matter little, then citizenship matters little. To assist in this diminishment of the importance of the state, we have become enthralled by the idea that we are not citizens who have been encultured into a certain set of practices and traditions that we hold dear because we are legal members of a state in which we find our home. Rather, we are bearers of this or that “identity,” which is the only really important thing about us. With this idea, the purpose of the state shifts from mediating the interests of lawful citizens (with a view to defending liberty and property) to disseminating resources based on what you deserve because of your “identity.” The “aggrieved” person is not an active citizen, encouraged to build a common world with his or her neighbors, but a passive victim who is to receive assistance from the state. The real debt of money does not matter, for the U.S. Government can go deeper into debt without cost. All that matters is that educators and politicians continue to chant about the debt you are owed because of your “identity.” In exchange, you, the identity-bearing citizen, must continue to chant about “global norms” and “free trade” that elites promise will redound to the benefit of all. And if it doesn’t, all is not lost, because even if the crony-capitalists and state regulators don’t do anything but line their own pockets, you will at least get the satisfaction that you are owed something because of your victim-status. They, who are getting rich while you are getting poor, tell you so. Indeed, the price of admission to their world, is that you should continue to be mesmerized by “globalization” and “identity politics.” Here, parenthetically, is the corruption at the heart of the American University, without which this configuration of ideas could not have come to prevail in the post-1989 world.
The upcoming Presidential campaign is about many things, not least the persons of Donald Trump and Hillary Clinton. In the midst of a world that longs for perfection, we find ourselves with two human-all-too-human candidates.
Beyond the lure or abhorrence of their character is the singular question: will the next Administration double-down on the mesmerizing configuration of “globalization” and “identity politics,” and in the process fortify the crony-capitalist class and those who think they profit from identity politics? Hillary Clinton and The Clinton Foundation are ground-zero for this configuration. Donald Trump opposes that configuration, on a good day gives inchoate expression of a genuine alternative, on a bad day blunders horribly, and will probably lose the upcoming national election.
The outlines of a genuine alternative involve the following correlated ideas, some of which have been clearly formulated in Trump’s campaign, while others have been lurking in it or are merely encouraged by it:
Because States are territories within which specific laws are enforced, borders matter. Borders mark where one set of laws begins and another set of laws ends. Tender-hearted sentiments about “universal humanity” cannot overrule this consideration. If mercy is shown, it is as an exception to generally-binding law, and not a repudiation of it. Borders matter.
Because the laws of States work only when people are acculturated to them and adopt them as their own, legal immigration of people from cultures not accustomed to the laws of the State and their practical foundation must proceed slowly, and with the understanding that it takes several generations to acculturate them. Immigration policy matters.
Because we live in a world of States, there will always be war. Therefore we must firmly establish who our allies are, and what we will do to defend them. In keeping with a somber view of the world, we cannot be driven by the dreamy ideals of universal world-around democracy in choosing our allies. Foreign policy is for the purpose of defending our own nation, not spending blood and treasure trying to persuade other nations to imitate our laws and ways. National interests, not so-called universal interests, matter.
Because the United States is composed of immigrants, admission into the Middle Class, made possible by robust economic growth, must be among the highest domestic priorities. Crony-capitalism diminishes growth by pre-determining permanent winners and permanent losers. So-called “free trade” agreements that benefit crony-capitalists eventually slow growth. Also slowing growth is the ever-increasing state regulation of nearly every aspect of daily life, which purports to protect us from harm. What good is such protection, however, when citizens cease to believe that they are responsible for themselves, their families, and their neighbors; and when the very spirit of entrepreneurship is undermined by it? The spirit of entrepreneurship, not just state-sponsored “care” of docile citizens, matters.
Because the sway of lobbyists in national politics grows in proportion to the growth of the federal government, the distorting power of lobbyists cannot be curtailed until the Constitutional limits on the federal government, established by the Founding Fathers, are observed anew. The federal government was set up to adjudicate certain issues, but not others. Those other issues—issues pertaining to the daily life of citizens—were to be adjudicated by state and local governments. When the purview of the federal government is extended beyond its original bounds, it becomes dysfunctional, and the power of the Executive and the Courts extends to compensate. This invites the tyranny of the Executive. The greater danger is not the person holding the Presidential office at any given time; the greater danger is the nature of the Executive office when the federal government grows disproportionally. Federalism and the decentralization of power matters.
Because “identity politics” undermines the idea of citizens who must engage one-another based not on their identity, but on “the content of their character” as Martin Luther King famously said, the politically correct speech that destroys citizenship and the possibility of any common accord about what personal and national greatness may involve must be roundly repudiated. PC speech is corrosive to the soul of America. It is humorless; it reduces all real “differences” to highly contrived, orchestrated, and controlled categories, the cost of straying from which is ostracism or worse. The Salem witch trials of 1692-93 have nothing on us today. America: ever involved in casting out the impure and the doubting. If you are African-American, please don’t mention that you believe in God and go to Church; identity politics allows no room for Christianity—though it bows before an imagined purity of Islam. Women? You may have apprehensions about how the proliferation of gender “identities” bears on your unique struggle to balance and to make sense of the conflicting demands of family and professional life. You, however, must say nothing. Every imagined gender identity is to be equally respected. You thought you were special, but you are not. We live in a world where all things are possible. Anyone who speaks of limits, of constraints, is “phobic” in one way or another. The bourgeois spirit that built America, the interest in making lots of money, in being “successful,” in taking risks—above all the strength of soul necessary to face failure and come back from it, stronger—these are held in contempt. No one dares speak up in a PC world. Feelings might be hurt; people may feel “uncomfortable.” Trigger warnings and “safe spaces” occupy our attention. The task in the highly choreographed world of “identity politics” is not to toughen up but to domesticate. No fights. No insults to which we respond with strength and self-assurance and overweening confidence. Indeed, with laughter! Everywhere: protections made possible by The Great Protector—the State—for by ourselves we cannot rise to the occasion. Greatness matters; if we are to have it, personally and as a country, we must cast off PC speech that in “protecting” us from suffering causes us to be its victim in perpetuity.
On each of these issues—borders, immigration, national interest, the spirit of entrepreneurship, federalism, and PC speech—Hillary Clinton responds with “globalization-and-identity-politics-SPEAK,” the language that has given us a world that is now exhausted, stale, and unredeemable. It is against this sort of world that citizens are revolting. And not just in the United States, but in Europe and Britain as well. The ideas of “globalization” and “identity politics” that mesmerized us in the aftermath of the Cold War now belong in the dust-bin of history. The question, bigger than the question of the personalities of Hillary Clinton and Donald Trump, is whether we will have one more Administration that authorizes them and tries to solve our problems through their lens.
Joshua Mitchell is a Professor of Government at Georgetown University. His most recent book is Tocqueville in Arabia: Dilemmas in a Democratic Age.
L’utopie d’un retour au passé et aux nations fortes des partisans de Donald Trump est aussi obsolète que celle de la mondialisation, estime le philosophe Bruno Latour.
Bruno Latour (Philosophe)
Le Monde
12.11.2016
La tragique élection de Trump a l’avantage de clarifier la situation politique d’ensemble. Le Brexit n’était pas une anomalie. Autant qu’on le sache et qu’on se prépare pour la suite. Chacune des grandes nations qui ont initié le marché mondial se retire l’une après l’autre du projet.
Le prolongement de cette démission volontaire est d’une clarté terrible : d’abord l’Angleterre ; six mois plus tard les Etats Unis, qui aspirent à la grandeur des années 1950. Et ensuite ? Si l’on suit les leçons de l’histoire, c’est probablement, hélas, au tour de la France, avant celui de l’Allemagne. Les petites nations se sont déjà précipitées en arrière : la Pologne, la Hongrie et même la Hollande, cette nation pionnière de l’empire global.
L’Europe unie, ce prodigieux montage inventé après la guerre pour dépasser les anciennes souverainetés, se retrouve prise à contre-pied. C’est un vrai sauve-qui-peut : « Tous aux canots ! » Peu importe l’étroitesse des frontières pourvu qu’elles soient étanches. Chacun des pays qui ont contribué à cet horizon universel de conquête et d’émancipation va se retirer des institutions inventées depuis deux siècles. Il mérite bien son nom, l’Occident, c’est devenu l’empire du soleil couchant…
Parfait, nous voilà prévenus et peut-être capables d’être un peu moins surpris. Car enfin, c’est bien l’incapacité à prévoir qui est la principale leçon de ce cataclysme : comment peut-on se tromper à ce point ? Tous les sondages, tous les journaux, tous les commentateurs, toute l’intelligentsia. C’est comme si nous n’avions aucun des capteurs qui nous auraient permis d’entrer en contact avec ceux que l’on n’a même pas pu désigner d’un terme acceptable : les « hommes blancs sans diplôme », les « laissés-pour-compte de la mondialisation » — on a même essayé les « déplorables ».
C’est sans doute une forme de peuple, mais à qui nous n’avons su donner ni forme ni voix. Je reviens de six semaines sur les campus américains, je n’ai pas entendu une seule analyse un peu dérangeante, un peu réaliste sur ces « autres gens », aussi invisibles, inaudibles, incompréhensibles que les Barbares aux portes d’Athènes. Nous, « l’intelligence », nous vivons dans une bulle. Disons sur un archipel dans une mer de mécontentements.
Deux bulles d’irréalisme
La vraie tragédie, c’est que ces autres vivent eux aussi dans une bulle, dans un monde du passé que la mutation climatique ne viendra pas déranger, qu’aucune science, aucune étude, aucun fait ne viendront ébranler. La preuve, c’est qu’ils ont avalé tous les mensonges de cet appel à la restauration d’un ordre ancien sans qu’aucun « fact-checker » n’émousse leur enthousiasme. Un Trump, ça trompe énormément, mais quel plaisir de se laisser tromper. Il ne faut pas compter sur eux pour jouer le rôle du bon peuple plein de bon sens et les pieds sur terre. Leurs idéaux sont encore plus éthérés que les nôtres.
Nous nous retrouvons donc avec des pays coupés en deux, chaque moitié devenue incapable de capter sa réalité aussi bien que celle de l’autre. Les premiers, disons les globalisés, croient encore que l’horizon de l’émancipation et de la modernité (souvent confondu avec le règne de la finance) ne va cesser de s’étendre en recouvrant la planète.
Les seconds ont décidé de se retirer sur l’Aventin en rêvant au retour d’un monde passé. Deux utopies par conséquent ; celle de l’avenir affrontée à celle du passé. Ce que figurait plutôt bien le choc Trump contre Clinton. Deux bulles d’irréalisme. Pour le moment, l’utopie du passé triomphe. Rien ne prouve que les choses se seraient arrangées durablement si l’utopie du futur avait triomphé.
Il s’est passé en effet quelque chose depuis vingt ans qui explique cette frénésie de déconnexions. Si l’horizon du globe ne peut plus attirer les masses, c’est que tout le monde a compris plus ou moins clairement qu’il n’y a pas de planète, je veux dire de vie réelle, matérielle correspondant à ces visions de terres promises. Il y a juste un an, la COP21 aura servi de déclaration solennelle à cette impossibilité : le global est trop vaste pour la terre.
Au-delà de ces limites, nos tickets ne sont plus valables. Quant au retour aux terroirs des anciens pays, il n’y faut pas compter davantage. Ils ont tous disparu. De toute façon, ils sont trop riquiqui pour y faire tenir la nouvelle terre. La mutation écologique est passée par là. Pas étonnant que les deux parties fassent assaut d’irréalisme.
L’éléphant est dans la pièce
Toute la question est maintenant de savoir si la tragédie du 8 novembre venant après celle du Brexit peut nous rendre capable d’éviter la suite. Autrement dit, peut-on s’éloigner des deux utopies, celle du global comme celle du retour à l’ancien sol ? Il faudrait pouvoir atterrir sur une terre un peu solide, réaliste et durable. Pour le moment hélas la crise écologique est l’éléphant dans la pièce mais on fait comme si de rien n’était, comme si le choix était de continuer courageusement à marcher en avant vers le futur ou à s’accrocher au passé. Trump et les siens ont même choisi de nier l’existence de cette crise.
Pourtant, à ma connaissance, personne n’a expliqué clairement que la globalisation était terminée et qu’il fallait de toute urgence se rapatrier vers une terre qui ne ressemble pas plus aux frontières protectrices des Etats-nations qu’à l’horizon infini de la mondialisation. Le conflit des utopies du passé et du futur ne doit plus nous occuper.
Ce qui compte, c’est comment apparier deux sortes de migrants : ceux qui se voient obligés par la mutation écologique de changer de monde en traversant les frontières et ceux qui se voient obligés de changer de monde sans pour autant avoir bougé — et que les frontières ne protègent plus.
Si nous ne parvenons pas à donner forme à cette terre et à rassurer ceux qui y migrent, jamais elle n’aura assez de puissance d’attraction pour contrebalancer les forces opposées de ceux qui rêvent encore de l’ancien globe ou de l’ancienne nation. Dans ce cas, une chose est sûre : en 2017, ce sera au tour de la France de rendre son tablier.
Aux Etats-Unis, les élites ignorent les partisans de Donald Trump. Mais sa victoire montre que le monde intellectuel a tout intérêt à faire une autocritique.
Michel Guerrin
Le Monde
18.11.2016
Un conseil aux candidats à la présidentielle en France : fuyez les artistes et les intellectuels. Ne leur demandez pas de faire campagne, ne les faites pas monter sur l’estrade. Surtout si vous avez envie de l’emporter.
On doutait déjà qu’une actrice ou qu’un rockeur fassent gagner des voix. Mais on ne savait pas qu’ils pouvaient en faire perdre. C’est une leçon de l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche.
Jamais on n’a vu le monde culturel s’engager à ce point, en l’occurrence pour Hillary Clinton. Aucun candidat n’avait reçu autant d’argent. De cris d’amour aussi – sur scène, à la télévision, sur les réseaux sociaux. On a même eu droit à la chanteuse Katy Perry qui se déshabille dans une vidéo pour inciter à voter Clinton, ou Madonna promettre de faire une fellation aux indécis.
En face, Trump n’avait personne ou presque. Il n’a reçu que 500 000 dollars (environ 470 000 euros) d’Hollywood contre 22 millions de dollars pour la candidate démocrate. Alors il a moqué ce cirque à paillettes, dénoncé le star system, donc le système. Et il a gagné.
Un Grand Canyon de haine
Clinton a joué à fond les étoiles les plus brillantes, et elle a perdu. Prenons sa fin de campagne. Le 4 novembre, elle monte sur scène avec le couple Beyoncé et Jay Z (300 millions d’albums vendus à eux deux), à Cleveland, dans l’Ohio. Le 5, Katy Perry chante pour elle à Philadelphie (Pennsylvanie). Le 7, veille du scrutin, elle apparaît dans un meeting/concert de Jon Bon Jovi et de Bruce Springsteen devant 40 000 personnes, toujours à Philadelphie, puis finit la soirée à minuit avec Lady Gaga à Raleigh, en Caroline du Nord.
Dans tous ces Etats clés, elle a perdu. Dans le même temps, Donald Trump a multiplié les meetings sur les tarmacs d’aéroports en disant qu’il n’a pas besoin de célébrités, puisqu’il a « le peuple des oubliés » – du pays et de la culture – avec lui.
L’historien américain Steven Laurence Kaplan s’est indigné des mots de Trump qualifiant untel de stupide, de débile, de névrosé ou de raté, et traitant des femmes de « grosses cochonnes ». Il a raison. Mais il aurait pu ajouter que des notables culturels ont qualifié le candidat républicain de brute (Chris Evans), d’immonde (Judd Apatow), de porc (Cher), de clown (Michael Moore) ou de psychopathe (Moby). Robert De Niro, avant le scrutin, voulait lui mettre son poing dans la gueule. Chaque injure a fait grossir le camp conservateur et fait saliver son candidat.
Car deux mondes s’ignorent voire se méprisent, séparés par un Grand Canyon de haine. Non pas les riches face aux pauvres. La fracture est culturelle et identitaire. Ceux qui ont gagné se sentent exclus du champ culturel et universitaire, et souvent le méprisent.
Les perdants leur rendent bien ce mépris, les jugeant réactionnaires, racistes, etc., sans même voir que le monde se droitise. Rudy Giuliani, l’ancien maire de New York et proche de Donald Trump, surfe sur cette fracture quand il dit que les campus américains sont truffés « de véritables crétins de gauchistes ».
Dans nos pages, l’essayiste Paul Berman ajoute que cette élection traduit un « effondrement culturel » : les voix qui structurent une société ne sont plus écoutées. Toujours dans nos pages, le sociologue Bruno Latour a évoqué sa récente tournée des campus américains : « Je n’ai pas entendu une seule analyse un peu dérangeante, un peu réaliste sur ces “autres gens”, aussi invisibles, inaudibles, incompréhensibles que les barbares aux portes d’Athènes. Nous, “l’intelligence”, nous vivons dans une bulle. Disons sur un archipel dans une mer de mécontentements. »
L’autocritique du vaste champ culturel pourrait aller plus loin, sur le terrain de l’hypocrisie. Celle des artistes d’abord, dont l’engagement, souvent imprégné de pathos, apaise leur conscience, mais est souvent perçu comme faisant partie de leur spectacle permanent, dont ils tirent profit, et dont ils se détachent aussi vite pour retrouver, une fois déculpabilisés, leur monde ultra-protégé.
Le meilleur exemple est Madonna qui, durant la soirée qui précède le vote, s’est mêlée à des badauds new-yorkais (des convaincus) pour improviser un bref concert en finissant par « demain sauvez ce pays en votant Hillary ».
« Parler à des gens différents »
Les intellectuels des campus, quant à eux, insupportent le vote Trump par leur façon de lui faire la morale, de défendre un modèle multiculturel comme s’il s’agissait d’un paradis de fleurs. Ils font culpabiliser les riches en leur disant d’être plus généreux et les pauvres en leur disant d’accepter leurs voisins étrangers, sans vraiment montrer l’exemple.
Notre confrère Nicolas Truong racontait très bien cela dans Le Monde du 14 novembre. Il citait le philosophe Matthew B. Crawford (revue Esprit, octobre 2016), pour qui les élites « qui apprécient le dynamisme et l’authenticité des quartiers ethniques avec leurs merveilleux restaurants (…) n’envoient pas leurs enfants dans les écoles pleines d’enfants immigrés qui ressemblent à des centres de détention juvénile ».
On l’aura compris, la France culturelle et multiculturelle – c’est la même – a beaucoup à apprendre de cette élection passée, et à craindre de celle de 2017. Si elle ne se bouge pas.
Le directeur de la rédaction du New York Times, Dean Baquet, écrit qu’il faut aller sur le terrain pour « parler à des gens différents de ceux à qui nous parlons ». C’est vrai aussi, en France comme ailleurs, pour les gens de culture et les universitaires. D’autant qu’en France, nous avons une politique culturelle publique dont la priorité est de s’adresser à tous mais qui, toujours plus, bénéficie essentiellement aux riches. On l’a déjà écrit dans cette chronique. L’élection de Trump le confirme, hélas.
President Obama, who has done less for Europe than any American President since Calvin Coolidge, cannot stop telling Europeans what to do. As Obama sets out on his final European tour as President, with his political party back home in a state of near collapse, and with Putin inflicting yet another painful humiliation on the least successful American President in the history of the modern Middle East, nothing seems able to shake his serene confidence that he knows more than other people, sees farther than they do, and that other people are eager to gather up his pearls of insight.
President Barack Obama urged Europe to resolve lingering issues from its debt crisis, saying on Tuesday that leaders should favor growth over austerity, as part of their response to the rising populism in Western countries exemplified by the election of Donald Trump.
Mr. Obama made the appeal after meeting with Greek Prime Minister Alexis Tsipras, who said it is time for Greece to receive significant debt relief from Europe. Mr. Obama said European leaders should follow economic policies that ease some of the voter backlash against globalization, as they grapple with political trends similar to those behind Mr. Trump’s victory in the U.S. presidential election.
Not everything Obama is recommending to Europe is bad, but his words no longer have a significant impact from a continent battered first by his failures in foreign policy and now by the collapse of his legacy at home. Obama will be remembered by historians as the man who turned over the White House to Donald Trump, the man who let Putin unleash the forces of Hell in Syria and Ukraine, and the man who honored European values but made the world steadily less safe for them.
That Putin took the occasion of Obama’s final tour to open a wide new air offensive in Syria and withdraw from the ICC even as his allies celebrated victories in Estonia, Moldova and Bulgaria only underlines what a foreign policy disaster the 44th President has been. Many world leaders like Obama; some pity him; few respect him as a leader (rather than as a man); none fear him. Most are too busy coping with the consequences of his failures to spend a lot of time thinking about him at this point in his presidency. Even Germany, whose cheering crowds once greeted Obama as an enlightened internationalist in the mold of John F. Kennedy, has gradually lost faith in the President.The early signs of struggle and factionalism in the Donald Trump transition, meanwhile, are leading many foreigners to suppose that the next American President will be another inconsequential bumbler. We must hope that they are wrong; not even the power of the United States can survive a long string of failed Presidents unscathed.
Depuis les attentats islamistes qui ont ensanglanté la France et la figure de style « zemmourienne » proposant de la « bombarder », plus personne n’ignore l’existence de la commune de Molenbeek. Elle fut décrite dans la presse comme « chamarrée » et « multiculturelle », ce qui est assez surprenant puisqu’elle est au contraire une des plus homogènes de la région bruxelloise. Et si homogénéité il y a, elle s’est faite sous l’étendard d’Allah qui y est grand, grâce au pseudo laïque mais anticlérical rabique que le monde entier ne nous envie pas : Philippe Moureaux. Adulé par les fondamentalistes musulmans, grand mufti du PS, ancien ministre et professeur d’Histoire, Philippe Moureaux a deux filles de sa première épouse, elle aussi ponte du PS, dont l’une, Catherine, marche sur les traces de papa.
Députée PS, Catherine Moureaux a rejoint ce même parti à Molenbeek, bien qu’elle soit originaire de la très huppée commune d’Uccle. Alignant le plus souvent des niaiseries que même le plus attardé des soixante-huitards jugerait pénibles à force d’idéologie baveuse, la jeune héritière s’est illustrée il y a peu. Catherine Moureaux, a suçoté son Bic, consulté le plafond, froncé les sourcils et trouvé la bonne idée : des cours d’Histoire personnalisés !
Ça fait « peuple » et même « nation », donc exclusif
Il n’y a rien de vraiment neuf : depuis la Révolution française, et même avant, ceux-ci sont trafiqués, instrumentalisés afin d’ensemencer les jeunes cerveaux dans le sens de la doxa du moment. Mais, reconnaissons-le, même falsifié, le cours d’Histoire constituait un « roman national », fait d’heures glorieuses et de défaites, outrageantes mais provisoires. Cela avait l’avantage de souder une nation autours de mythes ou de réalités factuelles et de donner aux enfants immigrés l’envie et la fierté de rejoindre ce superbe troupeau. Depuis peu, la tendance allait plutôt à la repentance et à la honte, nous étions les descendants piteux d’horribles colonialistes ou d’immondes esclavagistes. Soit ! Mais enfin, c’était « nous ». Nous tous qui portions le fardeau de la culpabilité, nous tous qui allions à Canossa, nous tous qui, depuis nos ancêtres les Gaulois jusqu’à la guerre d’Algérie, partagions la croix du genre humain, nous tous qui nous vautrions dans le narcissisme du conquérant haïssable.
Mais ce « nous tous », ça fait « peuple », et même « nation », donc exclusif, a pensé Mlle Moureaux. En un mot, discriminatoire. Mais si ! Adieu donc ces cours d’Histoire !
Frétillant à la pensée de tenir l’idée du siècle comme Archimède sortant de son bain, elle se rua vers l’hémicycle pour annoncer son intention d’instaurer des cours d’Histoire adaptés, c’est-à-dire des cours d’Histoire construits en fonction de l’origine des « apprenants ». A l’instar des tribunaux médiévaux qui, jusqu’à ce que Saint-Louis harmonise tout cela sous son chêne, demandaient au prévenu « Quelle est ta loi ? » et jugeaient en fonction, les profs d’Histoire demanderaient à chacun « Quelle est ton origine ? » et dispenseraient leur savoir à la carte. Voilà un projet fascinant. Comme ces tribunaux « sharia » pour les différends conjugaux entre musulmans qui s’implantent tout doucement à Londres.
Elle rétropédale, mais le ver est dans le fruit
Malheureusement, les nations, si honnies depuis la dernière guerre mondiale, le peuple, devenu nauséabond depuis qu’il s’exprime, n’ont pas loupé l’occasion de la ridiculiser, elle et son projet. Non contents d’avoir tressé les lauriers de la victoire de Trump ou de Fillon, les réseaux sociaux ont dénoncé cette nouvelle ineptie.
Elle aura beau crier à la démagogie, la pleutrerie , la bêtise, le principe est toujours le même: on lance un ballon d’essai, fut-il outrancier, on rétro-pédale, mais le ver est dans le fruit.
Face au tollé, Mademoiselle Moureaux a en effet décrété qu’on l’avait mal comprise, qu’elle parlait simplement d’étudier l’Histoire des colonisations sous un autre angle d’attaque. Pardon Mademoiselle, scripta manent !« Il serait intéressant de ne pas perdre cet élément [le devoir de mémoire de diverses autres personnes ou communautés] de vue, d’autant que certains publics scolaires pourraient trouver pertinent de remonter la trace d’autres faits […] ». Sans compter que vous prônez sur votre site la recherche identitaire et la prise de conscience des racines. Le simple fait que vous parliez sans cesse de l’enseignement du colonialisme en lieu et place de l’enseignement des colonisations est déjà très révélateur…
La digne héritière de son père
Cas typique de rétropédalage. Mais le mal est fait ! Digne héritière de votre père, fossoyeur en chef de tout ce qui peut paraître un poil conservateur, vous avez fissuré un des derniers piliers d’une nation dont l’unité a déjà beaucoup morflé. La lézarde s’agrandira, soyez-en convaincue. Comme pour le port du voile, les cantines hallal ou l’interdiction de fumer dans les troquets, on pense toujours que c’est tellement énorme et tellement idiot que ça ne passera jamais. Et pourtant !
Je vois comme un léger obstacle à votre inventif projet… Dans la foulée de la loi éponyme de votre papa – qui condamne le « racisme », « l’antisémitisme » et « la xénophobie » – les statistiques ethniques ont été interdites en Belgique. Comment vous y prendriez-vous donc pour déterminer quelle histoire enseigner à l’un ou à l’autre ? Quel sera votre critère ? Le nom de famille ? La couleur de la peau ? Un test ADN ? Raciste, va !
Votre esprit formaté n’a pas compris que les idées qui sous-tendent vos conneries sont une forme particulièrement perverse d’oppression : l’assignation à résidence identitaire. Combien de générations faudra-t-il pour qu’une personne puisse s’émanciper de ses origines et adhérer, librement, à une communauté nationale dont elle ferait siennes les racines parce qu’elle ferait sien le destin ?
Certains résultats de l’enquête de l’IFOP menée par l’Institut Montaigne sur les musulmans de France « laissent pantois ». D’autres études devraient être menées pour savoir si une partie de la population est en « rébellion idéologique vis-à-vis du reste de la société française ».
Arnaud Leparmentier
Le Monde
21.09.2016
Une vérité qui dérange. Chacun se rappelle le film d’Al Gore sur le réchauffement climatique, sorti en 2006. Prouver à force de graphiques et d’études, contre les lobbys, l’origine humaine du phénomène. La vérité qui dérange, c’est un peu la plume portée dans la plaie d’Albert Londres, une nécessité démocratique.
Et la vérité de la semaine, c’est l’enquête de l’IFOP menée par l’Institut Montaigne sur les musulmans de France. Elle dérange tant que nul n’ose s’indigner. L’enquête est présentée avec une distance embarrassée. Rien à dire a priori sur un sondage réalisé en juin à partir d’un échantillon de 15 459 personnes et qui a isolé 874 personnes de religion musulmane. Et certains résultats laissent pantois. 29 % des musulmans interrogés pensent que la loi islamique (charia) est plus importante que la loi de la République, 40 % que l’employeur doit s’adapter aux obligations religieuses de ses salariés, 60 % que les filles devraient avoir le droit de porter le voile au collège et au lycée. 14 % des femmes musulmanes refusent de se faire soigner par un médecin homme, et 44 % de se baigner dans une piscine mixte.
L’Institut Montaigne et leurs rédacteurs Hakim El Karoui et Antoine Jardin ressemblent un peu à Alain Juppé, qui rêve d’une identité heureuse, et affirment qu’« un islam français est possible ». Mais le constat est inquiétant sur la sous-catégorie musulmane la plus « autoritaire » : « 40 % de ses membres sont favorables au port du niqab, à la polygamie, contestent la laïcité et considèrent que la loi religieuse passe avant la loi de la République », écrit l’Institut Montaigne. Cette sous-catégorie représenterait 13 % de l’ensemble des musulmans. L’IFOP chiffrant les musulmans à 5,6 % de la population de plus de 15 ans, nous en déduisons que l’effectif concerné atteint plusieurs centaines de milliers de personnes. Le chiffre qui dérange. L’intégration correcte de la très grande majorité des musulmans ne doit pas non plus conduire à nier une réalité qui, si elle est minoritaire, ne semble pas marginale.
« La société française est malade de son rapport à la réalité »
Tabou brisé
C’est toutefois insuffisant. Il convient, tel Al Gore, de multiplier les enquêtes pour en savoir plus. Le gouvernement serait avisé de dépenser 150 000 euros pour poser une batterie de questions plus précises, pour savoir si la supériorité de la charia relève d’une conviction intime ou d’une volonté de supplanter l’ordre républicain ; si la polygamie est une revendication d’immigrants récents qui s’estompe bien vite, etc. Bref, savoir si une partie de la population est en « rébellion idéologique vis-à-vis du reste de la société française ».
Viendra ensuite l’analyse des causes – celles sociales, sont évidentes, lorsqu’on découvre que 30 % des musulmans de France sont inactifs non retraités et que l’on lit l’édifiante étude de France Stratégie sur les discriminations – puis les solutions. L’Institut Montaigne a fait ses propositions, très inclusives, d’autres peuvent être présentées. L’essentiel est d’accepter de travailler sur des données et de sortir du « on-fait-dire-aux-chiffres-ce-que-l’on-veut », gri-gri des obscurantistes des temps modernes.
Laurent Bigorgne, directeur général de l’Institut Montaigne, qui combat sans relâche les discriminations, voit bien le tabou brisé. « Il n’y a de compétences que s’il y a des connaissances, explique-t-il, déplorant que la société française utilise la loi et le dogme républicains pour éviter toute transparence. La société française est malade de son rapport à la réalité. Tous ceux qui refusent les statistiques sont du côté de l’égalité formelle et veulent que rien ne change. »
Toutes les vérités sont-elles bonnes à dire ? Les populations sont sages lorsqu’elles sont traitées en adultes. Les Britanniques multiplient à outrance les comptages ethniques. Le gouvernement allemand publie chaque année les statistiques de criminalité par nationalité. On y constate une surcriminalité des étrangers, mais dont les causes sont expliquées, et les Allemands se concentrent sur leur évolution. En France, on est livrés aux diatribes d’un Eric Zemmour, qui séduira tant qu’on sera incapable d’objectiver sereinement les faits.
L’essentiel est de prendre à bras-le-corps les batailles de demain
Déni populiste
C’est l’objectif poursuivi par Jean Pisani-Ferry, directeur de France Stratégie : réduire le champ des désaccords aux remèdes, mais pas aux constats, comme c’est le cas désormais grâce aux chiffres du Conseil d’orientation des retraites. L’effort est parfois douloureux. « Sur les diagnostics, il ne faut pas avoir peur. Longtemps, le politiquement correct disait que l’euro nous avait protégés. Or la Suède se porte mieux que la zone euro », concède Pisani-Ferry, qui met en garde : « Avoir des zones d’ombre sur des phénomènes sociaux ou économiques qu’on ne regarde pas crée de la défiance. Aujourd’hui, la distance entre perception et réalité est énorme. » Ainsi, les Français ont le plus peur de tomber dans la pauvreté, alors que le taux de pauvreté y est l’un des plus faibles de la zone euro.
Cette exigence est d’autant plus forte que le monde occidental entre, selon Pisani, dans une « grande régression », avec les mensonges du Brexit et le phénomène Trump : « Le fact-checking sur Trump ne donne rien. Faire fortune en politique en niant la réalité, c’est très impressionnant, et cela va faire école. »
Certes, mais le déni populiste ne vient pas de nulle part. Les élites ont perdu de leur crédibilité, en minimisant les inégalités délirantes aux Etats-Unis, tardivement mises en évidence par Thomas Piketty, et en ne prêtant pas attention aux perdants de la mondialisation. L’essentiel est de prendre à bras-le-corps les batailles de demain, pour que les populistes ne puissent pas dire « Je vous l’avais bien dit ». Ainsi, ne sous-estimons pas Nicolas Sarkozy, qui cherche pour des raisons électoralistes à évacuer le réchauffement climatique par une autre vérité qui dérange, l’explosion démographique de l’Afrique. Ne pas traiter ce sujet sérieusement, c’est redonner la main aux populistes.
Why are so many so eager to whitewash a dictator’s true legacy?
Austin Yack
National Review
November 28, 2016
On Friday, Fidel Castro, the former Communist dictator of Cuba, passed away at the age of 90. The Castro regime exiled 1 million Cubans; it killed tens of thousands. Yet, as many public figures penned their thoughts on Castro’s death, they opted to overlook his inhumane, tyrannical actions and highlight the positives.
Here’s a list of the ten most outrageous reactions to Castro’s death.
Jimmy Carter, former president of the United States
Rosalynn and I share our sympathies with the Castro family and the Cuban people on the death of Fidel Castro. We remember fondly our visits with him in Cuba and his love of his country. We wish the Cuban citizens peace and prosperity in the years ahead.
Jeremy Corbyn, Labour party leader in the United Kingdom
Fidel Castro’s death marks the passing of a huge figure of modern history, national independence and 20th century socialism. From building a world class health and education system, to Cuba’s record of international solidarity abroad, Castro’s achievements were many. For all his flaws, Castro’s support for Angola played a crucial role in bringing an end to Apartheid in South Africa, and he will be remembered both as an internationalist and a champion of social justice.
Michael Higgins, president of Ireland
“Fidel Castro will be remembered as a giant among global leaders whose view was not only one of freedom for his people but for all of the oppressed and excluded peoples on the planet,” Higgins said.
Reverend Jesse Jackson, Sr., American civil rights leader
In many ways, after 1959, the oppressed the world over joined Castro’s cause of fighting for freedom & liberation – he changed the world. RIP Jean-Claude Juncker, president of the European Commission
“Castro was one of the historic figures of the past century,” Juncker said. “The world has lost a man who was a hero for many.”
Ban Ki-moon, secretary-general of the United Nations
Ki-moon went on to praise Castro for overseeing “advances in the field of education literacy and health” and being “a strong voice for social justice in global discussions at the UN General Assembly.”
Enrique Peña Nieto, president of Mexico
“I regret the death of Fidel Castro Ruz, leader of the Cuban revolution and emblematic symbol of the twentieth century,” Nieto said.
Barack Obama, president of the United States
At this time of Fidel Castro’s passing, we extend a hand of friendship to the Cuban people. We know that this moment fills Cubans – in Cuba and in the United States – with powerful emotions, recalling the countless ways in which Fidel Castro altered the course of individual lives, families, and of the Cuban nation. History will record and judge the enormous impact of this singular figure on the people and world around him.
For nearly six decades, the relationship between the United States and Cuba was marked by discord and profound political disagreements. During my presidency, we have worked hard to put the past behind us, pursuing a future in which the relationship between our two countries is defined not by our differences but by the many things that we share as neighbors and friends – bonds of family, culture, commerce, and common humanity. This engagement includes the contributions of Cuban Americans, who have done so much for our country and who care deeply about their loved ones in Cuba.
Today, we offer condolences to Fidel Castro’s family, and our thoughts and prayers are with the Cuban people. In the days ahead, they will recall the past and also look to the future. As they do, the Cuban people must know that they have a friend and partner in the United States of America.
Jill Stein, Green party presidential candidate
Fidel Castro was a symbol of the struggle for justice in the shadow of empire. Presente!
Justin Trudeau, prime minister of Canada
It is with deep sorrow that I learned today of the death of Cuba’s longest serving President.
Fidel Castro was a larger than life leader who served his people for almost half a century. A legendary revolutionary and orator, Mr. Castro made significant improvements to the education and healthcare of his island nation.
While a controversial figure, both Mr. Castro’s supporters and detractors recognized his tremendous dedication and love for the Cuban people who had a deep and lasting affection for “el Comandante”.
I know my father was very proud to call him a friend and I had the opportunity to meet Fidel when my father passed away. It was also a real honour to meet his three sons and his brother President Raúl Castro during my recent visit to Cuba.
On behalf of all Canadians, Sophie and I offer our deepest condolences to the family, friends and many, many supporters of Mr. Castro. We join the people of Cuba today in mourning the loss of this remarkable leader.
— Austin Yack is a William F. Buckley Fellow in Political Journalism at the National Review Institute.
Ex-NSA official: Al-Qaida ignited California blazes
09/11/2013
As the 2013 season of devastating wildfires continues to rage across the American West, the question of arson as a form of major terrorism is again being raised.
Already this year, 35,440 reported fires have burned a total of 3.9 million acres, with a quarter-million acres scorched the iconic Yosemite National Park.
Large blazes continue to burn in several states, with six alive in Idaho, five each in California and Montana, and one each in Alaska, Louisiana, Oregon, Texas and Washington.
The National Interagency Fire Center in Boise, Idaho, says at this time last year, 45,278 fires had burned 7.9 million acres, and in 2011, there were 55,619 fires devastating 7.2 million acres.
In July 2012, William Scott, a former National Security Agency official and Aviation Week editor, told the American Center for Democracy that terrorists are using fire as a tactical weapon of war.
“Perhaps the most simple form of economic warfare is wild land arson,” Scott said in hs “Fire Wars” presentation. “That’s just setting fires in U.S. forests [and] grasslands.”
“For any terrorists that are determined to inflict significant damage with very little investment or risk, fire is an extremely high-leverage weapon of mass effect.”
Scott explained that after U.S. Navy SEALs killed al-Qaida chief Osama bin Laden, they “captured a treasure trove of material that provided some unprecedented insight into the al-Qaida plans. And one of those was a detailed campaign for starting fires throughout the [American] West.”
“U.S. officials have pretty much determined that some of the fires that burned in California [in 2011] were ignited by al-Qaida operatives,” Scott said.
An editorial in June by the Washington Examiner noted, “Those trying to downplay the threat of terrorism have dismissed such a possibility as paranoid. As Americans learned in 2001, and again as recently as 2012 in Benghazi and 2013 with the Boston Marathon bombing, terrorist threats are not something to take lightly.”
This year’s wildfire in Yosemite started Aug. 17 in the Stanislaus National Forest, but authorities believe it was not an act off terror. They say a hunter’s illegal fire swept out of control, torching 394 square miles of timber, meadows and sensitive wildlife habitat. The Associated Press reports it has cost more than $89 million to fight, and officials say it will cost tens of millions of dollars more to repair the environmental damage alone.
As WND reported in June, an expert on Islamic terrorism believes a wildfire that ravaged the outskirts of Colorado Springs, Colo., killing two people and destroying more than 500 homes, should be examined by terror investigators.
“One thing that my investigators have given me the authority to state is that they have all but ruled out natural causes as the cause of this fire,” said Sheriff Terry Maketa at the time. “I can’t really go any further on that, but I can say we are pretty confident it was not, for instance, a lightning strike.”
The causes for most forest fires are limited to electrical problems, out-of-control campfires or grills, accidents such as a car fire and sparks from chain saws or other back-country tools.
Those causes, to an expert investigator, are readily identifiable.
But authorities said they were focusing on a 28-foot square patch where they believe the fire started, examining some portions with a magnifying glass.
It put an end to lawsuits brought in foreign jurisdictions where speech protections do not exist or are not as robust as in the United States which were simply intended to censor or chill speech in the U.S.
“Bill Scott, who’s a senior fellow at ACD, warned about such a scenario last July, speaking at the ACD-EWI Economic Threats briefing on Capital Hill,” Ehrenfeld wrote. “An expert on aerial firefighting, he presented a sobering analysis of the devastating (2012) Waldo Canyon Fire [in Colorado], pointing out that the striking rise [in] Western U.S. wildfires may be caused by elements other than nature.
“He noted that in spring 2012, al-Qaida’s English-language online magazine, Inspire, published an article called ‘It Is of Your Freedom to Ignite a Firebomb,’ which featured instructions on how to build an incendiary bomb to light forests on fire.”
She explained that Russia’s security chief, Aleksandr Bortnikov, also has warned, “Al-Qaida was complicit in recent forest fires in Europe” as part of terrorism’s “strategy of a thousand cuts.”
“Since then, more fatwas advocating that ‘fire is a cheap, easy and effective tool for economic warfare’ have been issued,” Ehrenfeld wrote. “They’ve included detailed instructions for constructing remote-controlled ’ember bombs, and how to set fires without leaving a trace.’”
Israel’s forests also have been targeted, she noted.
“While many of the fires that have scorched millions of acres and destroyed thousands of homes in Arizona, California, Colorado, New Mexico, Utah and other states have been identified as arson, none has been publicly attributed to criminal or terrorist groups, despite the presence of Mexican gangs and [a] large number of other illegals in our Western states,” she said.
Mother Jones reported Don Smurthwaite, a Bureau of Land Management spokesman, “downplayed” Ehrenfeld’s ideas, “but he didn’t dismiss the notion outright.”
“We don’t have any hard evidence that any wildfires in the U.S. were started by terrorists in recent years,” he told the publication. “But is it a possibility? Certainly.”
He noted the last confirmed weaponized wildfires were in World War II, when the Japanese sent incendiary balloons across the Pacific.
The terror group’s magazine included pictures, diagrams and explanations on how to start fires to obtain the most damage.
CBN analyst Erick Stakelbeck said the extreme detail provides reason for concern. The information, he said, is “all designed to cause the maximum amount of carnage and death.”
CBN noted that in the U.S., more houses are built in the countryside than in the cities and cited a Montana fire chief who said the prospect of a wildfire terrorist attack was not farfetched.
WND also reported websites run by jihadis made claims of arson in a number of California wildfires.
WND reported in 2004 that an Arabic-language jihadi website also posted a message purporting to be “al-Qaida’s plan of economic attack” on the U.S. that including proposals to turn the nation’s forests into raging infernos.
The National Terror Alert Response Center report said: “We are NOT implying that the California fires are an act of terrorism; however, the threat of pyro-terrorist attacks pose a significant risk to the U.S. and the fires in California and Greece earlier this year should be a wake-up call.”
Even in 2003, an FBI memo warned that national forests in the West could be the next target for terror by Osama bin Laden’s al-Qaida network.
The memo, obtained by the Arizona Republic, warned law enforcement that a senior al-Qaida detainee told interrogators he planned to spark multiple, catastrophic wildfires simultaneously in Colorado, Montana, Utah and Wyoming to strike a blow to the U.S. economy.
WND also reported documents recovered from a remote area along the Pakistan border revealed that bin Laden wanted al-Qaida to launch a “global fireball” by lighting forest fires in Europe, the United States, Australia and South America.
The documents, uncovered during an operation led by the British intelligence service MI6, were described by experts in that agency as “the most worrying [plot] that the world is facing.”
Norman Mailer, le romancier du » rêve américain « , a une passion pour les personnages-limites, auxquels il s’identifie volontiers : par exemple le président des États-Unis ou l’assassin Gary Gilmore, héros de son dernier livre.
Pierre Dommergues
Le Monde
01.12.1980
NORMAN MAILER, c’est d’abord un romancier. Comme cous les romanciers américains, il rêve d’écrire le » grand roman américain « , cette mère qu’aucun d’eux n’a jamais rencontrée, mais qu’ils recherchent tous Mailer a néanmoins écrit plusieurs » grands romans américains » : les Nus et les Morts, en 1948, il avait alors vingt-cinq ans et ce fut la gloire du jour au lendemain. Puis Un rêve américain (1965), et Pourquoi sommes-nous au Vietnam ? (1967) Enfin, le plus accessible de tous, le Chant du bourreau, qui sort cette semaine aux éditions Laffont, où Mailer évoque l’histoire de Gary Gilmore, cet assassin qui refusa de faire appel et exigea d’être exécuté (1).
Mailer est aussi l’un des observateurs les plus attentifs de la scène américaine, dont il décrit les vibrations, les contradictions infinies. C’est toute l’Amérique que l’on retrouve dans ses interviews, ses articles, ses essais, ses romans – reportages. Le phénomène beatnik (Advertisements for Myself, 1959), les luttes contre la guerre du Vietnam (les Armées de la nuit, 1968), les conventions politiques (Miami and the Siege of Chicago, 1968), le problème du féminisme (le Prisonnier du sexe, 1971), l’impact sur l’imaginaire américain du débarquement sur la Lune (Bivouac sur la Lune, 1969).
» Vous êtes le seul grand écrivain américain à vous être intéressé – jusqu’à l’obsession – aux présidents des États-Unis. Dès 1948, vous faisiez campagne pour Henry Wallace. Au début des années 60, vous écriviez un essai enthousiaste sur J.F. Kennedy (Presidential Papers 1963). Le spectre de Lyndon Johnson plane sur les Armées de la nuit (1968). Dans Saint George and the Godfather (1972), McGovern est le saint, Nixon le parrain. En 1976, vous publiez un entretien avec le président Carter dans le New York Times. Pourquoi cette fascination pour la race des présidents ?
– Je n’y ai encore jamais pensé. Ce sont sans doute les circonstances particulières de ma vie. Mon premier succès avec les Nus et les Morts (1948), mon brusque passage de l’obscurité à ce qui m’est apparu comme la lumière spectrale de la célébrité. Ma vie m’a toujours semblé étrange, différente de celle des autres. J’ai toujours été fasciné par ces gens qui pouvaient avoir mes problèmes, de façon parfois encore plus aiguë. Les présidents ont des existences artificielles. À vingt-cinq ans, j’ai découvert que ma vie était devenue parfaitement artificielle. Les gens ne réagissaient plus envers moi parce qu’ils m’aimaient ou qu’ils me détestaient. Tant qu’on est inconnu, les amitiés se forment sur une base organique. Les amis poussent sur le même terrain que vous. Ils ont la compatibilité des légumes qui ont levé côte à côte dans le même potager. Avec la célébrité, c’est comme si l’on vous transplantait dans la stratosphère. Vous devenez une plante hydroponique.
» Une autre explication ? Ma conception de l’écrivain qui, pour moi, n’est rien d’autre qu’un calculateur – comme l’est un joueur professionnel. Il évalue sans cesse ses chances, examine les occasions, cherche à laisser sa trace. Les écrivains sont les derniers entrepreneurs du neuvième siècle. Donc, de mon point de vue de calculateur, j’avais une position idéale sur écrire sur ces gens. J’étais capable de les voir du dedans, alors que ceux qui écrivent sur les personnalités politiques ou sur les présidents acceptent généralement les airs que ces derniers se donnent. La terminologie, médiocre et ridicule, utilisée par les politiciens est, de surcroît, reprise par ces commentateurs qui tentent d’expliquer ces hommes politiques à la nation.
» Les politiciens ne s’intéressent pas aux problèmes politiques, ce sont des acteurs. C’est encore plus vrai aux États-Unis qu’en Europe, où il y a une tradition politique. En Amérique, la politique est un sport à l’usage des très ambitieux. En Europe, où elle procède moins du vedettariat, la politique est aussi pus professionnelle. C’est une carrière raisonnable. On y trouve une certaine sécurité, absente de la vie américaine.
De l’audace
– Plus précisément, qu’est-ce qui vous a fasciné chez un Kennedy, un Johnson ou un Nixon ?
– Chez Kennedy, c’était une certaine audace. Dans les années 50, le seul fait de dire : » Je veux me présenter à l’élection présidentielle, et j’ai mes chances » était une hypothèse tout à fait remarquable. Kennedy a pris des risques. À l’époque, les hommes politiques étaient beaucoup plus circonspects en ce qui concerne la sexualité. Bien longtemps avant qu’on ait entendu parler de Kennedy, en tant que » grand homme politique « , on connaissait le » grand amant « .
» Johnson avait potentiellement bien plus de valeur qu’il ne voulait le montrer. Mais c’était un hypocrite, et il avait un tel mépris du public que ça en devenait stupide. Malgré son intelligence et son astuce, il n’a jamais compris ce que Kennedy a réussi Ni que Kennedy l’avait battu parce qu’il était plus passionnant que lui. Johnson faisait tout pour maintenir les Américains dans l’ennui. C’est tout ce qu’il avait appris au Texas : ennuyer les gens ; et il a transposé cette pratique sur le plan national. Johnson a desservi le peuple américain. Pour moi, un président a le devoir d’être intéressant. C’est pour cela que Carter a été repoussé par les électeurs : il traitait le public américain comme une vache. Il prédigérait la nourriture avant de l’enfourner dans la panse de la bête.
» Nixon ? Un jour que j’interviewais Kissinger – c’était à l’époque du Watergate, – il me dit combien il était dommage que je ne rencontre pas le président. Nixon, disait-il, m’aurait fasciné. C’était un homme sur lequel il faudrait écrire. Si lui, Kissinger, avait été écrivain, ajoutait le secrétaire d’État (c’est un des charmes de Kissinger : quand il est avec un écrivain, il lui donne l’impression qu’il aimerait écrire, et quand il est avec P.-D. G., qu’il aimerait, etc.). Bref, il me déclara que Nixon était aux portes de la grandeur, non seulement pour son époque, mais à l’égard de l’histoire, car il allait conclure la paix dans le monde, pour cinquante ans, pour un siècle peut-être. Ce petit Watergate, ce misérable grain de poussière dans un œil, allait le détruire pouce après pouce. Kissinger parlait avec une grande tristesse, car, en fin de compte, si Nixon avait fait la paix. Kissinger en aurait été le principal architecte.
» J’ai beaucoup écrit sur Nixon, mais je ne suis pas d’accord avec Kissinger. Pour écrire un roman sur Nixon, il faudrait pouvoir vider sa propre tête. Je ne crois pas que j’en serai capable. Je ne le comprends pas suffisamment. De l’extérieur, oui, Mais c’est une chose de comprendre un personnage du dehors et une autre de pénétrer dans sa tête. C’est un saut périlleux. Je ne comprends pas comment un homme de sa trempe a pu se laisser flétrir. Chaque fois qu’il ouvrait la bouche pour faire un discours, c’était un échec esthétique. Il était particulièrement terne. Il aurait été l’un des plus mauvais acteurs du monde, car il était incapable de communiquer une émotion ou un sentiment sans l’afficher grossièrement. S’il disait que l’Amérique devait être forte, il brandissait le poing. S’il voulait exprimer sa joie à l’annonce d’une bonne nouvelle. Il souriait de toutes ses dents. Il faisait tout ce que les jeunes acteurs apprennent à ne plus faire après un premier cours d’art dramatique. Pourtant, quand il était jeune, il rêvait d’être acteur !
» L’histoire des États-Unis aurait pu être différente si Nixon avait eu une personnalité agréable. Il a sans doute été le président le plus profond que nous ayons jamais eu. Oui, même s’il est aussi un fils de pute et une pourriture ! Il avait au moins une appréhension globale des réalités politiques. Seul Nixon pouvait faire la paix avec la Chine. Ce fut une étape extraordinaire.
Tête de linotte
– Et Reagan, le président élu ?
– Je suis un peu dépassé en ce qui concerne Reagan. Je me suis trompé sur son compte à tous les coups ! Je n’ai pas cru qu’il obtiendrait l’investiture, je pensais que Connally serait le gagnant. Je pensais aussi que ce serait un combat entre Kennedy et Connally. Je me sens disqualifié pour parler de Reagan. Je l’ai d’abord traité de tête de linotte. Mais, quand il a obtenu l’investiture, j’ai dû réviser mon jugement, et je l’ai appelé la super-tête de linotte, Après le débat avec Carter, j’ai pensé que c’était un acteur de troisième catégorie. Cet homme a du mal à retenir même les mots qu’on utilise en politique. Quant à comprendre les idées politiques, cela le dépasse.
» Reagan concrétise une autre de mes idées, à savoir que le président dont l’Amérique a besoin est un leader et non plus un politicien. Il y a des limites à ce que peut faire un homme politique. La fonction de président relève en partie du cérémonial et en partie de l’organisation. Mais, en dernière analyse, le rôle principal du président est de donner un peu de chaleur, un peu d’humour, un peu d’énergie au peuple américain…
– Mais n’est-ce pas là ce que Reagan peut apporter ?
– Peut-être ! Si Reagan était démocrate, je crois que je le préférerais à Carter. S’il partageait la philosophie de Carter, ce serait un gain non négligeable puisqu’un homme doué d’une personnalité malheureuse a été remplacé par un homme qui a une personnalité agréable. Mais il y a aussi des problèmes politiques véritables, et je ne pense pas que Reagan soit équipé pour les affronter. Il faudra attendre.
– Si vous deviez rencontrer Reagan, quelles questions lui poseriez-vous ?
– On ne peut pas obtenir de réponse de Reagan. Beaucoup ont essayé. Comment peut-on parler de réduire les impôts et, en même temps, d’augmenter les dépenses militaires ? Si vous ne pouvez pas mener de front ces deux objectifs (et, pour l’instant, personne n’a montré comment), il est évident que l’on commencera par la remilitarisation qui apportera à l’Amérique un peu de prospérité pour quelque temps. Mais cela va également accroître le taux d’inflation et aussi l’impôt si on prétend équilibrer le budget. Alors va-t-on renverser la vapeur et renoncer au sacro-saint équilibre budgétaire, ou va-t-on, au contraire, réduire les dépenses sociales ?
» Dans le second cas, cela équivaudrait à supprimer les ressources d’un très grand nombre de Noirs, et les villes américaines connaîtraient – disons dans deux ans peut-être – une situation critique. En effet, le libéralisme a acheté la colère des Noirs au cours des deux dernières décennies. Ils en ont maintenant pris l’habitude. Ils ont grandi avec un nouveau style de vie, que vous leur enlèveriez sans rien leur donner de substantiel à la place. Ils sont des millions. Et l’industrie de guerre ne va pas fournir l’équivalent sous forme d’emplois nouveaux. Alors que faire si les villes bougent une fois encore ?
» Avec Reagan, je ne pourrais jamais aller aussi loin dans les questions. Il faudrait un entretien de cinq heures ! C’est un politicien qui connaît ses faiblesses mieux que son interlocuteur, et qui a l’art de la dérive. Mais la véritable réponse, je crois, serait la suivante : » Que ces Noirs durcissent leurs positions, et on les matera. » Je pense que nous allons connaître la loi martiale. Non pas demain, mais dans quelques années.
» Je dois ajouter que je ne sais pas grand-chose en économie et que, comme la plupart des grands économistes d’aujourd’hui, je ne comprends pas ce qui se passe. Aussi n’est-il pas impossible que l’économie fonctionne un petit peu mieux, que l’Amérique émerge de certaines de ses difficultés et que, dans ce cas, l’ère de Reagan ne soit pas pire que celle d’Eisenhower. Une autre chose m’inquiète en Amérique, c’est que les gens deviennent non pas fascistes, mais qu’ils se rapprochent de plus en plus des phases qui précèdent le fascisme.
» Ma bête noire »
– Vous avez toujours été hostile aux idéologies. Mais, aujourd’hui, alors que le libéralisme, le christianisme, le judaïsme, le radicalisme sont attaqués aussi violemment par la droite que par la gauche, en France comme aux États-Unis, quelle est votre attitude à leur égard ?
– Je ne pense pas qu’il existe une idéologie, quelle qu’elle soit, qui ait aujourd’hui la moindre utilité. Sa seule fonction est de permettre aux gens de poursuivre leur vie quotidienne en se raccrochant à quelques lambeaux. La plupart des gens ne peuvent pas vivre sans idéologie. Elles servent de garde-fou aux psychismes de millions de personnes. Mais, en ce qui concerne la façon de résoudre les problèmes à venir, il va falloir trouver de nouvelles sources, de nouvelles idées politiques.
» Si je me représentais à des élections (2), je ne le ferais certainement pas sur la base d’idées reçues. Je choisirais un thème dément. Par exemple, l’impôt unique, un peu à la manière de Henry George (3), qui se proposait de substituer un impôt sur la terre à l’impôt sur le revenu et aux diverses taxes locales. Bien sûr, il ne s’agirait pas aujourd’hui d’un impôt sur la terre, ce serait injuste pour ceux qui en vivent, cela avantagerait systématiquement les revenus industriels. Je serais pour ma part, favorable à un impôt unique qui frappe, par exemple, les plastiques. Je considère que le plastique détruit notre niveau de vie, qu’il dégrade notre existence. C’est la peste des temps modernes. Il dilue la substance la plus intime de notre être. C’est ma bête noire (4). En s’appuyant sur la sensibilité écologique, nous pourrions concevoir une politique fondée sur l’idée que les gens se déterminent en fonction de la nocivité des substances qui les entourent. Les produits considérés comme les plus nocifs par consensus démocratique seraient les plus fortement imposés. Telle serait l’assiette de l’impôt.
» Je ne veux même pas prendre en compte l’idée de communisme ou de capitalisme. Je suis prêt à m’accommoder du capitalisme, non pas parce que j’en suis épris, mais parce que le capitalisme est plus existentiel que le communisme. Pour certains, la gestion de leurs petites entreprises est le seul élément de créativité dans l’existence. J’en viens à l’idée que tout être qui mène une vie un tant soit peu créative est légèrement moins malheureux que celui qui mène une existence totalement dépourvue de créativité. C’est en ce sens que je peux m’entendre avec le petit capitalisme.
» Je pense, par contre, que les sociétés multinationales ne sont que des vaisseaux de guerre, versions miniaturisées du communisme. Ce sont des États collectivistes, des enclaves dans la nation. De même que le communisme crée les principales difficultés en Union soviétique, de même le capitalisme multinational est à l’origine des principaux problèmes de l’Amérique. Il ne cesse de nous gaver de produits que nous n’aimons pas. Il nous impose des styles de vie. Il faut commencer par attaquer le mal à la racine. Un nouveau modèle d’imposition peut être une des voies pacifiques pour atteindre cet objectif.
» Pourquoi pas moi ? »
– Considérez-vous que l’on assiste, aujourd’hui, à un essor du conservatisme aux États-Unis et que Reagan a été élu par une nouvelle coalition qui exprime ce courant ?
– Il y a autour de Reagan quelques conservateurs sérieux qui ont des idées intéressantes. Le député Jack Kemp, par exemple, que, selon moi, Reagan aurait dû choisir comme vice-président. Je ne suis d’accord avec lui que sur très peu de points, mais c’est un conservateur intelligent.
– Un conservateur à la Edmund Burke ?
– Un jour, je me suis défini comme un » conservateur de gauche « . J’avais dit que si l’on devait me demander : doit-on fusiller ces cinq hommes ou abattre ces cinq arbres, je répondrais : montrez-les-moi, mettez les hommes à gauche les arbres à droite… Le véritable conservatisme nous vient de Burke : il considérait que les grands chênes de la vieille Angleterre constituaient un héritage humain plus important que l’homme moderne lui-même.
» Et pourtant, que croient les conservateurs américains d’aujourd’hui ? Que le gouvernement en soi est un mal et que moins il y en aura, plus grandes seront les chances de voir renaître la productivité et les activités créatrices ! Et ils sont prêts à dépouiller l’État d’une grande partie de ses pouvoirs.
» Je ne pense pas que Reagan soit un conservateur véritable. Il représente tous ceux qui, en Amérique, ont pillé la nation depuis quarante ans et qui veulent la piller encore davantage. C’est le chef de file des » Je veux ma part de gâteau, Joe « , dans un style un peu nouveau avec un saupoudrage de conservatisme, mais au fond, Reagan est un centriste, un homme de gouvernement. Il veut tout simplement que l’État donne encore plus aux super-riches et moins au super-pauvres. Le problème est que les gens qui sont au haut de l’échelle et qui s’approprient les trois quarts des dépouilles, du surplus si vous préférez, veulent désormais récupérer le dernier quart. Ils acceptent mal l’idée que ceux qui sont au bas de l’échelle aient, eux aussi, droit à une partie du gaspillage. Ils n’ont pas la moindre culpabilité à l’endroit des Noirs qu’ils ont maintenus en esclavage pendant des siècles. Mais les Noirs se sont habitués depuis les vingt dernières années à ce que le gouvernement les aide. » Mec, pourquoi pas moi, pensent-ils, pourquoi je n’aurais pas ma part du gaspi ! « . Et, à mon avis, ils ont parfaitement raison.
Punks
– Et la classe moyenne dans ce schéma ?
– Elle a le grand avantage de prendre peu de risques et d’avoir beaucoup de sécurité. Son plus grand problème est de se mesurer au vice et de résister à son emprise. La classe moyenne ressemble à la race des prisonniers à vie : ou bien votre vie s’améliore, ou bien elle se détériore. Je n’ai pas de grande sympathie pour cette Amérique moyenne qui a pourtant subventionné le haut et le bas de l’échelle. J’aurai beaucoup plus d’estime à son endroit lorsqu’elle se rendra compte que l’élite lui prélève une part plus importante de ses ressources que les pauvres.
– Quels sont, aujourd’hui, les facteurs de revitalisation ? Dans la gamme des personnages qui, dans votre œuvre, vont du saint au psychopathe – et dont le » White Negro » (le Blanc au comportement de nègre) était pour vous le prototype dans les années 60, – quel serait aujourd’hui l’équivalent de ce héros existentiel sauvé par son ancrage dans le présent ?
– Je ne sais pas. Peut-être les adolescents qui vont dans les concerts punks. J’y suis allé trois ou quatre fois à New-York. Et j’y ai senti une sorte de ferment sauvage et révolutionnaire. J’ai été surpris de voir à quel point j’éprouvais de la sympathie pour eux, alors que, pour moi, cette musique est bruyante, vraiment assourdissante. Ces jeunes ont été élevés dans le boucan de la télé interrompue toutes les sept minutes par les publicités. Ils doivent trouver une forme de transgression à écouter du bruit ininterrompu. Le punk est la valve de sécurité de leurs nerfs déchiquetés. C’est une nouvelle explosion, encore plus intense, qui pulvérise les débris de la première. C’est là que subsiste une forme de rébellion qui ne peut pas être étouffée.
» Je voudrais revenir à une autre raison pour laquelle je ne peux pas m’imaginer président des États-Unis. Cela voudrait dire en effet que les Américains auraient opté contre le réarmement. Un de mes thèmes serait de montrer qu’il est ridicule de poursuivre la course aux armes nucléaires. Il vaudrait mieux inviter les Soviétiques à venir chez nous. Rien ne détruirait plus rapidement leur système qu’une tentative de nous gouverner d’en haut et de l’extérieur. L’Amérique organiserait le plus puissant réseau de résistance que l’histoire ait jamais connu. Le communisme serait détruit de l’intérieur. Les Russes n’ont en fait aucun désir de contrôler les États-Unis. Ils sont trop préoccupés par la croissance de leur propre empire. Ils sont notoirement sous-équipés pour lutter contre les idéologies étrangères, et aucune ne l’est davantage que la nôtre avec sa profonde tradition individualiste.
Un roman
– La première partie de votre nouveau roman – le Chant du bourreau – est une très belle histoire d’amour entre un Roméo et une Juliette qui partagent leur temps entre la cavale et le pénitencier. Gary Gilmore, le protagoniste principal, n’est-il pas également une sorte de dissident, l’homme qui résiste aux manipulations des avocats qui veulent le sauver contre son gré et des journalistes qui veulent faire un scoop avec le récit en direct de son exécution ?
– C’est absolument exact. Gary est constamment manipulé. En prison, les processus de manipulation sont concentrés. Vous êtes manipulés par les autorités pénitentiaires, par certains codétenus, par des cliques à l’intérieur, par la famille à l’extérieur. Les prisonniers finissent par se considérer comme des condamnés plutôt que comme des détenus. Et ils partagent avec Gilmore cet élan de résistance.
» Mais je me méfie de la dissidence. C’est un autre piège qui renforce encore le bras des fascistes à venir. Beaucoup de jeunes cassent tout ce qu’ils voient et détruisent toutes les idées. Est-ce parce que je vieillis ? Mais je ne trouve plus cela très amusant. Et puis on nous rabâche la vieille rengaine d’il y a cinquante ou cent ans : éduquez les masses afin qu’elles comprennent ce qui leur arrive. Comment les éduquer quand on sait à peine ce qui se passe, quand on comprend si mal ce qui arrive. Le monde était plus simple, il y a trente ans.
– Cette complexité explique-t-elle la place importante de la réalité dans votre fiction ? Le Chant du bourreau, comme le précise le sous-titre anglais, est l’histoire réelle de Gary Gilmore, exécuté en janvier 1977 dans le pénitencier de l’Utah.
– Dans ce livre, mon projet est de mettre à nu la réalité, 1e l’enregistrer telle qu’elle est, au mieux de mes capacités. J’ai voulu écrire un livre où l’on puisse reconnaître des détails sur l’espace, le temps, l’atmosphère. Quelques détails suffisent parfois à remettre un peu d’ordre dans le monde. S’il y avait cinq ou six livres comme celui-ci qui présentent différents aspects de la vie américaine, nous aurions peut-être une idée plus nette de l’Amérique. C’est ce que Balzac a entrepris pour la société française, à lui seul. Zola a poursuivi la tâche. Flaubert a hérité d’une vision restée globale jusqu’à Proust, qui lui ajoute encore une dimension nouvelle. C’est pourquoi les Français, à la différence des Américains, ont une vision d’ensemble de leur monde.
– On est frappé par la ressemblance entre Gary, ce condamné à mort qui avait fait la couverture de Newsweek il y a quatre ans, et vous-même tel que vous vous présentez dans vos essais et récits autobiographiques. Avez-vous tenté de » maile-riser » votre personnage ?
– Oui, au début. J’ai pensé que si j’avais commis un meurtre comme le sien, j’aurais agi comme lui – peut-être, car il est prétentieux d’affirmer qu’on pourrait être aussi courageux que lui. Peu de gens comprennent le courage qu’il faut pour aller jusqu’au bout de sa propre exécution. C’est un peu comme si vous étiez l’acteur principal d’une pièce et que, à la fin de la première, après avoir connu toutes les épreuves, vous vous avanciez vers le public pour que l’on vous exécute. C’est un geste ambitieux, même s’il y a quelque chose de tordu dans ce comportement. Au cours de mes recherches, après neuf mois de travail, j’ai su que je n’essaierais pas de façonner Gary à mon image. Au contraire, j’ai voulu qu’il ait une existence totalement indépendante de la mienne.
– Comment s’effectue pour vous le passage de la réalité, de l’autobiographie et de la biographie (les divers matériaux que vous utilisez) à la fiction ?
– Je viens de publier sur Marilyn Monroe un nouveau livre que j’appelle une » fausse autobiographie » ou » pseudo-Mémoires « . J’essaie de raconter l’histoire de quelques années de sa vie, comme si elle parlait à son scribe ou à elle-même. C’est un exemple de l’imbrication biographie-fiction.
» Les Armées de la nuit offre un deuxième cas de figure : c’est un reportage, si vous voulez, bien que je n’aime pas le terme. Il s’agit plutôt d’impressions en profondeur. La première partie, la plus longue, généralement considérée comme la plus réussie, est centrée autour de ce qui m’est arrivé pendant la marche sur le Pentagone en 1967. La seconde partie, plus courte, totalement objective, tente de cerner ce qui s’est passé à Washington au cours de la manifestation.
» Le Chant du bourreau est totalement différent. Il n’y a rien d’autobiographique, c’est un véritable morceau d’écriture romanesque. La seule différence avec un roman traditionnel, c’est que les éléments constitutifs ne sont pas » fictifs « , ils ne sont pas sortis de mon imagination. Mais l’essentiel de l’œuvre d’art est l’agencement de ces éléments, quelle que soit leur origine. En ce sens, le Chant du bourreau est un roman au sens le plus strict du terme, le travail d’un romancier qui fonctionne, j’ose l’espérer, à pleine vapeur ou presque…
Dieu
– Que signifie le titre ?
– Il y a deux significations principales sans rapport, l’une et l’autre, avec le problème de la peine capitale, ni avec l’exécution de Gilmore, au sens littéral. La première, c’est que Gilmore est le bourreau, le livre est donc le chant de Gilmore. La seconde, c’est que, en fin de compte, Dieu est notre exécuteur à tous, il choisit le moment de notre mort. Mais dans ce livre, que j’ai essayé d’écrire avec le maximum de distanciation, il ne s’agit pas d’un Dieu qui médite sur les événements, mais plutôt d’une voix romanesque qui vient de loin, qui émerge de ces merveilleux romans du dix-neuvième siècle écrits à la troisième personne, comme ceux de Thomas Hardy. On sent que ce n’est pas Dieu qui est présent, mais l’œil de la providence qui jette son regard sur le monde.
– Ce regard de Dieu, ce chant, n’est-ce pas aussi celui de Mailer, l’artiste ?
– Non, sauf si vous considérez que tout artiste, tout romancier, est à la fois une incarnation personnelle et une représentation de l’esprit. On ne peut pas écrire pendant trente ou quarante ans, comme je l’ai fait, sans participer à cette spiritualité abstraite. Il n’est pas impossible que tout ce que j’ai appris au cours de ces années sur le détachement de la voix de l’auteur se trouve en quelque sorte concentré dans cet ouvrage. Mes précédents romans sont plus personnels, plus individuels. Dans celui-ci, la distance est plus grande que jamais entre le matériau que j’ai utilisé et moi-même. C’est sans doute cette part neuve et inutilisée de moi-même qui explique ce détachement nouveau. »
(1) Voir P. Dommergues, » Un » roman-vérité » de Norman Mailer » le Monde des livres, 28 décembre 1979.
(2) En 1969, Mailer est candidat à la mairie de New-York.
(3) Henry George est un économiste réformiste américain du dix-neuvième siècle, qui propose un système de l’impôt unique sur la terre, à une époque où commencent les grandes spéculations foncières en Californie
Je me souviens de ce célèbre expert des États-Unis, croisé dans les allées de BFM TV la veille de l’élection présidentielle américaine : « Éric, j’ai eu mes contacts à Washington. C’est plié : Hillary l’emporte avec plus de 55 % des voix. » J’en ris encore… Qui avait pris la peine, dans les semaines qui précédaient l’élection américaine, d’inviter les représentants de la campagne de Donald Trump en France ? Personne. Nous avons découvert leur visage le lendemain du 8 novembre. Alors que les démocrates se bousculaient sur nos plateaux de télévision depuis plus de quinze jours…
Aujourd’hui encore, l’état de sidération est total. Sondeurs et journalistes américains rasent les murs. Et avec eux, les soi-disant experts français. Pour calmer l’opinion publique, on esquisse quelques explications (les mêmes à chaque fois qu’un institut de sondage se trompe) : “un sondage est une photographie de l’opinion à un instant ‘t’, pas une prédiction” ; “les intentions de vote ne sont pas figées” ; “une fraction de l’électorat du candidat républicain n’a pas déclaré son vote, comme c’est parfois le cas pour le Front national en France” ; “il y avait beaucoup d’indécis…”
Pourtant, cet échec à capter le désarroi de l’électorat américain témoigne de l’hallucinant décalage entre un pays et ses élites médiatiques… « Comme tout le monde, nous nous sommes trompés », avouait Tony Romando, le propriétaire de Newsweek. Son magazine, comme la plupart des médias américains, n’avait même pas envisagé la victoire de Donald Trump (le jour de l’élection, 84 % des médias prédisaient la victoire de la candidate démocrate)… Rappelons que le site FiveThirtyEight.com estimait que Mme Clinton avait 70 % de chances de l’emporter. Rappelons que le Wisconsin et la Pennsylvanie étaient “journalistiquement” acquis à Hillary Clinton : le New York Times leur donnait respectivement 93 % et 89 % de chances de s’offrir à la candidate démocrate… et c’est Trump qui l’a emporté dans ces deux États. Rappelons que le lundi 7 novembre, veille de l’élection américaine, le Huffington Post donnait 1,6 % de chances de victoire à Donald Trump ! Et que la une de Newsweek, “Madam President”, était déjà imprimée. Il a fallu en fabriquer une autre en urgence…
« Les médias sont passés à côté […]. Les chiffres n’étaient pas seulement un mauvais guide, […] ils étaient comme une bretelle de sortie qui nous écarte de la réalité », confesse Jim Rutenberg, le critique média du New York Times. Certains journalistes se dédouanent en rejetant la faute sur les instituts de sondage, impuissants à anticiper la déferlante Trump : « J’ai cru dans les données en politique pendant trente ans et les données sont mortes ce soir », assène sur Twitter Mike Murphy de la chaîne NBC, ajoutant : « Je n’aurais pas pu me tromper davantage à propos de cette élection. »
Le plus étonnant, c’est que les journalistes américains ont labouré les États républicains pendant des mois. Ils ont rencontré des mineurs, interviewé des chômeurs, côtoyé la misère et le déclassement. Pourtant, aveuglés par le discours policé du biotope new-yorkais, par leur foi idéologique dans la candidate des élites, ils n’ont pas pris au sérieux ces “deplorables”. Selon le milliardaire Peter Thiel, soutien de Donald Trump, c’est une grossière erreur : « Les journalistes prennent toujours Trump au pied de la lettre mais sans le prendre au sérieux. Ses électeurs, en revanche, le prennent au sérieux mais ne le prennent pas au pied de la lettre. Par exemple, quand il propose de construire un mur à la frontière mexicaine, les journalistes exigent des détails, veulent savoir comment il va s’y prendre. Ses électeurs comprennent qu’il ne veut pas vraiment édifi er un mur. Ils entendent simplement qu’il propose une politique migratoire plus saine et plus intelligente. »
Les médias français devraient en prendre de la graine, car d’importantes élections se profilent dans notre pays…
Le choix absurde que les Américains seront amenés à faire dans quelques jours en dit long sur la décrépitude morale de l’Amérique, et sur le déclin annoncé de cette Babylone moderne.
Mon deuxième prénom est peut-être Hussein, mais je suis un véritable intellectuel américain. Ainsi s’est présenté Barack Obama lors de nombreuses réceptions à la Maison-Blanche, d’émissions à la télévision ou de voyages à l’étranger. Rarement un président des États-Unis aura abaissé son pays à ce point, permettant à la Russie de Vladimir Poutine de redevenir la puissance mondiale sur laquelle s’appuyer pour le XXIe siècle. Ce ne sont pas ses petites blagues placées au début de chaque discours, ses larmes forcées pour parler de l’interdiction des ventes d’armes ou ses manières de transformer la Maison-Blanche en passage obligé de la jet-set mondiale qui constituent le principal élément à mettre au passif de ce président adoré par la bien-pensance européenne.
Il symbolise un triple échec : international, économique et politique. International d’abord, car il incarne la poursuite du repli de l’Amérique sur elle-même, l’abandon de son célèbre soft power, l’échec de la lutte contre Dae’ch (créature américaine destinée à détruire toutes les régions fondatrices de notre civilisation), le refus de sceller la paix avec l’Iran, et ce regard bêtement enamouré pour la Chine et ses différents satellites. Obama, célébré Prix Nobel de la paix moins d’un an après son entrée en fonctions, n’a pas cessé de semer les graines de conflits à venir en s’évertuant à détruire l’Europe.
Sur le plan économique, en apparence tout est satisfaisant avec une croissance qui tutoie les 3 %, une job machine qui tourne à plein régime et permet la création de 2,5 millions d’emplois par an, une indépendance énergétique retrouvée grâce à l’exploitation du gaz de schiste et la formidable émergence des nouvelles stars du numérique. Mais rarement on a vu un président démocrate trahir autant ses électeurs en allongeant de manière abyssale l’échelle des inégalités. En l’espace de huit ans, ce président élu parce qu’il était noir est parvenu à créer plus de 10 millions de pauvres supplémentaires. Ils sont désormais 46,5 millions d’Américains à vivre sous le seuil de pauvreté. Ce qui représente 15 % de la population des États-Unis. De la même manière, l’an passé on dénombrait pas moins de 600 000 sans-abri. À New York, 22 000 enfants n’ont pas de toit. Un chiffre jamais vu depuis la crise de 1929. Le bilan des années Obama est en fait très favorable à tous ceux qui ont voté contre lui à deux reprises. C’est-à-dire l’Amérique des actionnaires, l’Amérique des entrepreneurs ou l’Amérique de ceux qui ont la capacité de prendre des risques.
Mais en agissant ainsi avec cynisme, Obama a désespéré l’Amérique des “petits Blancs”. Cette Amérique faite de pionniers, de conquérants et d’aventuriers qui nourrissent une méfiance sans précédent jusqu’ici à l’égard de Washington, de la classe politique, des médias et de façon générale de l’élite. Au point d’être prête à voter pour un homme d’affaires corrompu, xénophobe et sexiste ou pour une intrigante dont la famille mélange allègrement depuis des années fonds publics et intérêts privés.
Ce choix absurde que les Américains seront amenés à faire dans quelques jours en dit long sur la décrépitude morale de l’Amérique, sur la faillite de cette Babylone moderne qui a cru que l’individu et la famille pouvaient être sacrifiés au profit d’un matérialisme sans avenir, et finalement sur le déclin annoncé de l’empire américain. Un déclin qu’Alexandre Soljenitsyne, à peine sorti du goulag, avait superbement prophétisé dans son fameux discours de Harvard en 1978. Il y parlait longuement du déclin du courage. « Ce déclin du courage, disait-il, est particulièrement sensible dans la couche dirigeante et dans la couche intellectuelle dominante, d’où l’impression que le courage a déserté la société tout entière. » Il a en tout cas déserté ce qui fut l’Amérique de Franklin, de Washington, de Jefferson et de Lincoln. Il ne reste plus aux colonnes du Temple qu’à s’effondrer.
With an impeccable instinct for venerating murderous thugs, the United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization (UNESCO) has now added to its Memory of the World Register the writings of Cuba’s Ernesto « Che » Guevara. That means that the documents generated by Che during his bloody career will now be treated as historical treasures, protected and cared for with the help of UNESCO. What’s next? The teachings of Stalin and Pol Pot?
For those who know nothing about Che except that he wore a beret, smoked cigars and continues to turn up as a splash of radical chic on t-shirts and adolescent wall posters, UNESCO’s move might sound reasonable. But if you bother to learn anything about who Che really was, or what he did, that impression curdles fast. Writing on Slate in 2004, author Paul Berman gave an excellent summary of Che’s character and career:
Che was a totalitarian. He achieved nothing but disaster. Many of the early leaders of the Cuban Revolution favored a democratic-socialist direction for the new Cuba. But Che was a mainstay of the hardline pro-Soviet faction, and his faction won. Che presided over the Cuban Revolution’s first firing squads. He founded Cuba’s « labor camp » system — the system that was eventually employed to incarcerate gays, dissidents and AIDS victims.
Berman went on to say, « The modern-day cult of Che blinds us not just to the past but also to the present … I wonder if people who stand up to cheer a hagiography of Che Guevara … will ever give a damn about the oppressed people of Cuba — will ever lift a finger on behalf of the Cuban liberals and dissidents. »
Well, not at UNESCO they won’t. Che’s works were nominated for UNESCO’s special attentions by Cuba and Bolivia, and to be added to the UNESCO Register the nomination had to be endorsed by UNESCO’s director-general, Irina Bokova. You might suppose that as a former Bulgarian government functionary, from the days when Bulgaria orbited the Soviet Union, Bokova would be aware of the horrors behind Che’s radical « cool. » But Bokova appears to suffer from a longstanding infatuation with Cuba’s repressive regime. Just last November she dropped by Havana to sing the praises of Cuba’s educational system — either oblivious or indifferent to the censorship and dreary ideological indoctrination that are the hallmarks of Cuban schooling.
INTERVIEW. Décapeur. Pour l’ancien conseiller à l’Élysée, les deux grands partis se servent des primaires pour verrouiller le processus électoral.
Propos recueillis par Laureline Dupont
Le Point
Le Point : Quelle analyse faites-vous de l’élection de Donald Trump ?
Patrick Buisson : Pour la première fois, le modèle mondialisé des classes dominantes, dont Hillary Clinton était le parangon, a été rejeté dans le pays qui l’a vu naître. Fidèles à leurs habitudes, les élites dirigeantes déprécient l’expression de la volonté populaire quand elles en perdent le contrôle. Ainsi, les médias, à travers le cas de la Pennsylvanie – l’un des swing states qui ont fait le succès de Trump -, ont mis l’accent sur le refus de mobilité de la working class blanche, les fameux « petits Blancs », comme cause principale de la précarité et du déclassement. Le « bougisme », qui est la maladie de Parkinson de la mondialisation, confond les causes et les conséquences. Il est incapable de comprendre que, selon la formule de Christopher Lasch, « le déracinement déracine tout, sauf le besoin de racines ». L’élection de Trump, c’est le cri de révolte des enracinés du local contre les agités du global.
En France aussi, on commence à utiliser ce terme de « petits Blancs ». Mais cela ne revient-il pas à ethniciser le débat et donc à le fausser ?
La gauche progressiste n’a eu de cesse, depuis les années 1980, que d’évacuer la question sociale en posant comme postulat que ce n’est pas la pauvreté qui interdit d’accéder à la réussite ou à l’emploi, mais uniquement l’origine ethnique. Pourtant, l’actuelle dynamique des populismes ne se réduit pas à la seule révolte identitaire. En contrepoint de la protestation du peuple-ethnos, il y a la revendication du peuple-démos, qui aspire à être rétabli dans ses prérogatives de sujet politique et d’acteur souverain de son destin. Le populisme est aussi et peut-être d’abord un hyperdémocratisme, selon le mot de Taguieff, une demande de démocratie par quoi le peuple manifeste sa volonté d’être représenté et gouverné selon ses propres intérêts. Or notre postdémocratie oscille entre le déni et le détournement de la volonté populaire.
Dans votre livre, vous parlez d’un retour au suffrage censitaire. Mais tout citoyen âgé de 18 ans ou plus et inscrit sur les listes électorales peut voter en France.
Au XIXe siècle, la bourgeoisie a eu recours à la loi pour imposer le suffrage censitaire. Aujourd’hui, les classes dominantes n’en éprouvent plus la nécessité, elles l’obtiennent de facto : il leur suffit de neutraliser le vote populiste en l’excluant de toute représentation par le mode de scrutin et de provoquer l’abstention massive de l’électorat populaire, qui, convaincu de l’inutilité du vote, se met volontairement hors jeu. Ne vont voter lors des élections intermédiaires que les inclus, des fonctionnaires aux cadres supérieurs, et surtout les plus de 60 ans, qui, dans ce type de scrutin, représentent autour de 35 % des suffrages exprimés, alors qu’ils ne sont que 22 % de la population. Ainsi, l’écosystème de la génération de 68 s’est peu à peu transformé en un egosystème imposé à l’ensemble de la société. Dans notre postdémocratie, c’est le cens qui fait sens et se traduit par une surreprésentation des classes favorisées aux dépens de la France périphérique, de la France des invisibles.
À vous lire, le populisme ne serait en somme que le symptôme de la crise de légitimité politique qui affecte l’ensemble du système de représentation ?
On est arrivé à une situation où la majorité n’est plus une réalité arithmétique, mais un concept politique résultant d’une application tronquée du principe majoritaire. Dans l’Assemblée élue en 2012 avec une participation de 55 %, la majorité parlementaire socialiste ne représente qu’un peu plus de 16 % des inscrits. La majorité qui fait et défait les lois agit au nom d’à peine plus de 1 Français sur 6 ! Nous vivons sous le régime de ce qu’André Tardieu appelait déjà avant-guerre le « despotisme d’une minorité légale ». On assiste, avec le système de l’alternance unique entre les deux partis de gouvernement, à une privatisation du pouvoir au bénéfice d’une partitocratie dont la légitimité ne cesse de s’éroder.
La primaire serait donc, elle aussi, une confiscation de l’élection présidentielle ?
C’est incontestable. Plus les partis ont perdu en légitimité, plus s’est imposée à eux l’obligation de verrouiller le système de crainte que la sélection des candidats à l’élection présidentielle ne leur échappe. Avec la crise de la représentation, le système partisan n’a plus ni l’autorité ni la légitimité suffisante pour imposer ses choix sans un simulacre de démocratie. Les primaires n’ont pas d’autre fonction que de produire une nouvelle forme procédurale de légitimation. En pratique, cela revient à remettre à une minorité partisane le pouvoir de construire l’offre politique soumise à l’ensemble du corps électoral. Entre 3 et 4 millions de citoyens vont préorienter le choix des 46 millions de Français en âge de voter. Or la sociologie des électeurs des primaires à droite comme à gauche ne fait guère de doute : il s’agit des catégories supérieures ou moyennes, qui entretiennent avec la classe politique un rapport de proximité. Les primaires auront donc pour effet d’aggraver la crise de représentation en renforçant le poids politique des inclus au moment même où il faudrait rouvrir le jeu démocratique.
Quelles seront les conséquences sur l’élection présidentielle ?
D’un tel processus de sélection ne peuvent sortir que des produits de l’endogamie partisane, des candidats façonnés par le conformisme de la doxa et gouvernés par l’économisme. Des candidats inaccessibles à la dimension symbolique du pouvoir et imperméables aux legs de la tradition et de l’Histoire nationale. Sarkozy et Hollande ont illustré l’inaptitude profonde des candidats sélectionnés par le système à se hisser à la hauteur de la fonction. Dans ces conditions, il est à craindre que, quel que soit l’élu, l’élection de 2017 ne soit un coup à blanc, un coup pour rien. D’autant que les hommes de la classe dirigeante n’ont ni les repères historiques ni les bases culturelles pour défendre les sociabilités protectrices face aux ravages de la mondialisation. En somme, ils ne savent pas ce qu’ils font parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils défont. Quant au FN, privé de toute espérance du pouvoir, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, il offre un repoussoir utile à la classe dirigeante, qui lui permet de se survivre à bon compte. Il est à ce jour encore la meilleure assurance-vie du système.
Et ces commandements, que je te donne aujourd’hui, seront dans ton coeur. Tu les inculqueras à tes enfants. Deutéronome 6: 6-7
Fais de l’étude de la Torah ta principale occupation. Shammaï (10 avant JC)
Ainsi partit le paysan, En traversant la nuit des temps A la recherche d’une terre. « Mes bras sont forts, j’ai du courage. J’accepte même un marécage… « Il ne trouva que des barrières. « T’es pas d’ici, t’as un accent. Fais-toi prêteur, fais-toi marchand Mais tu n’auras jamais de terre. On se méfie de ton trésor, Ton étoile d’or… » Faute d’avoir un champ de blé, L’homme se mit à cultiver Son petit champ dedans sa tête. On le vit scribe et puis docteur Puis violoniste et professeur, Peintre, savant ou bien poète… Herbert Pagani
On pouvait se demander, en effet, et on se demandait même chez beaucoup de Juifs, si l’implantation de cette communauté sur des terres qui avaient été acquises dans des conditions plus ou moins justifiables et au milieu des peuples arabes qui lui étaient foncièrement hostiles, n’allait pas entraîner d’incessants, d’interminables, frictions et conflits. Certains même redoutaient que les Juifs, jusqu’alors dispersés, mais qui étaient restés ce qu’ils avaient été de tous temps, c’est-à-dire un peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur, n’en viennent, une fois rassemblés dans le site de leur ancienne grandeur, à changer en ambition ardente et conquérante les souhaits très émouvants qu’ils formaient depuis dix-neuf siècles. De Gaulle (conférence de presse du 27 novembre 1967)
Ce langage maurrassien, antisioniste au départ, antisémite à l’arrivée, me paraissait abusif, surtout de la part d’un homme qui avait le sens de l’exactitude. Tim
On pourrait aussi se demander si le Président de la République juge utile à sa diplomatie et conforme à l’intérêt de la France, de revenir sur le passé, de raconter à sa façon le cours des évèvenements qui conduisit à la naissance de l’Etat d’Israël. L’expression « plus ou moins justifiables » pour justifier l’acquisition des terres a heurté les Israéliens; elle tranche en faveur des Arabes, un des procès vainement plaidés depuis des dizaines d’années. (…) Définir un ‘peuple’ par deux adjectifs: un homme d’Etat s’abaisse lui-même lorsqu’il recourt à un tel procédé, celui des stéréotypes nationaux, des préjugés raciaux, celui des habitués du Café du commerce ne se lassent pas et dont psychologues et psychiatres analysent infatigablementt les mécanismes. Le général de Gaulle s’est abaissé parce qu’il voulait porter un coup bas: expliquer l’impérialisme israélien par la nature éternelle, l’instinct dominateur du peuple juif. Pourquoi ce coup bas ? Je ne sais. Mais pour l’amour du ciel (…) reconnaissez qu’il y a quelque chose à comprendre, même pour celui, non-juif, qui n’a pas le coeur meurtri. La phrase relative au peuple juif « resté sûr de lui lui-même et dominateur », ne répondait nullement aux besoins de la démonstration. Que les Juifs constituent ou non un peuple, qu’ils soient ou non dominateurs, l’établissement d’un foyer juif en Palestine risquait en effet, peut-être même devait-il inexorablement entrainer des conflits interminables. Et la dialectique de l’hostilité, à son tour, pouvait inciter les Israéliens à l’agressivité, sans pour autant que le peuple juif, par nature et à travers les siècles, soit et reste « sûr de lui et dominateur ». (…) Les Juifs de France ou, pour mieux dire, du monde entier, ont immédiatement saisi la portée historique des quelques mots prononcés le 28 novembre 1967 par le président de la République française: les antisémites (et M. Xavier Vallat n’a pas eu un instant d’hésitation) recevaient du chef de l’Etat l’autorisation solennelle de reprendre la parole et d’user du même langage qu’avant le massacre. L’antisémitisme d’Etat, d’un coup, redecenait salonfähig, comme disent les Allemands. or, sur ce point, je mets au défi n’importe quel homme de bonne foi de me contredire, le général de Gaulle ne pouvait pas ne pas prévoir les réactions passionnelles qu’il a « provoquées, sucitées plus exactement ». Aucun homme d’État occidental n’avait parlé des Juifs dans ce style, ne les avait caractérisés comme ‘peuple’ par deux adjectifs. Ce style, ces adjectifs, nous les connaissons tous, ils appartienent à Drumont, à Maurras, non pas à Hitler et aux siens. Après tout, Georges Bernanos. n’a jamais admis un lien quelconque entre son vieux maitre Drumont auquel il demeura fidèle jusqu’au bout, et Hitler, qui lui inspirait une horreur profonde. (…) Le général de Gaulle a, sciemment, volontairement, ouvert une nouvelle période de l’histoire juive et peut-être de l’antisémitisme. Tout redevient possible. Tout recommence. Pas question, certes, de persécution : seulement de ‘malveillance’. Pas le temps du mépris : le temps du soupçon. (…) Pourquoi le général de Gaulle a-t-il solennellement réhabilité l’antisémitisme ? Afin de se donner le plaisir du scandale ? Pour punir les Israéliens de leur désobéissance et les juifs de leur anti-gaullisme occasionnel ? Pour interdire solennellement toute velléité de double allégeance ? Pour vendre quelques Mirage de plus aux pays arabes ? Visait-il les États-Unis en frappant les juifs ? Voulait-il soumettre à une nouvelle épreuve l’inconditionnalité de certains de ses fidèles qui ont souffert sous Charles de Gaulle ? Je l’ignore. Raymond Aron
Twenty years of schoolin’ And they put you on the day shift. Bob Dylan
You who build these altars now to sacrifice these children, you must not do it anymore. Leonard Cohen
And what can I tell you my brother, my killer What can I possibly say? I guess that I miss you, I guess I forgive you I’m glad you stood in my way.If you ever come by here, for Jane or for me Well your enemy is sleeping, and his woman is free. Yes, and thanks, for the trouble you took from her eyes I thought it was there for good so I never tried. Leonard Cohen
The problem with that song is that I’ve forgotten the actual triangle. Whether it was my own – of course, I always felt that there was an invisible male seducing the woman I was with, now whether this one was incarnate or merely imaginary I don’t remember, I’ve always had the sense that either I’ve been that figure in relation to another couple or there’d been a figure like that in relation to my marriage. I don’t quite remember but I did have this feeling that there was always a third party, sometimes me, sometimes another man, sometimes another woman. It was a song I’ve never been satisfied with. It’s not that I’ve resisted an impressionistic approach to songwriting, but I’ve never felt that this one, that I really nailed the lyric. I’m ready to concede something to the mystery, but secretly I’ve always felt that there was something about the song that was unclear. So I’ve been very happy with some of the imagery, but a lot of the imagery. Leonard Cohen
Now I’ve heard there was a secret chord that David played, and it pleased the Lord. Leonard Cohen
Je suis juif… un Juif n’a-t-il pas des yeux ? Un Juif n’a-t-il pas des mains, des organes, des proportions, des sens, des émotions, des passions ? N’est-il pas nourri de même nourriture, blessé des mêmes armes, sujet aux mêmes maladies, guéri par les mêmes moyens, réchauffé et refroidi par le même été, le même hiver, comme un chrétien ? Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ? Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez, ne mourons-nous pas ?Shakespeare (Le Marchand de Venise)
Combattez ceux qui rejettent Allah et le jugement dernier et qui ne respectent pas Ses interdits ni ceux de Son messager, et qui ne suivent pas la vraie Religion quand le Livre leur a été apporté, (Combattez-les) jusqu’à ce qu’ils payent tribut de leurs mains et se considèrent infériorisés.Coran 9:29
Des théologiens absurdes défendent la haine des Juifs… Quel Juif pourrait consentir d’entrer dans nos rangs quand il voit la cruauté et l’hostilité que nous manifestons à leur égard et que dans notre comportement envers eux nous ressemblons moins à des chrétiens qu’à des bêtes ? Luther (1519).
Nous ne devons pas […] traiter les Juifs aussi méchamment, car il y a de futurs chrétiens parmi eux. Luther
Si les apôtres, qui aussi étaient juifs, s’étaient comportés avec nous, Gentils, comme nous Gentils nous nous comportons avec les Juifs, il n’y aurait eu aucun chrétien parmi les Gentils… Quand nous sommes enclins à nous vanter de notre situation de chrétiens, nous devons nous souvenir que nous ne sommes que des Gentils, alors que les Juifs sont de la lignée du Christ. Nous sommes des étrangers et de la famille par alliance; ils sont de la famille par le sang, des cousins et des frères de notre Seigneur. En conséquence, si on doit se vanter de la chair et du sang, les Juifs sont actuellement plus près du Christ que nous-mêmes… Si nous voulons réellement les aider, nous devons être guidés dans notre approche vers eux non par la loi papale, mais par la loi de l’amour chrétien. Nous devons les recevoir cordialement et leur permettre de commercer et de travailler avec nous, de façon qu’ils aient l’occasion et l’opportunité de s’associer à nous, d’apprendre notre enseignement chrétien et d’être témoins de notre vie chrétienne. Si certains d’entre eux se comportent de façon entêtée, où est le problème? Après tout, nous-mêmes, nous ne sommes pas tous de bons chrétiens. Luther (Que Jésus Christ est né Juif, 1523)
Les Juifs sont notre malheur (…) Les Juifs sont un peuple de débauche, et leur synagogue n’est qu’une putain incorrigible. On ne doit montrer à leur égard aucune pitié, ni aucune bonté. Nous sommes fautifs de ne pas les tuer! Luther
Juifs. Faire un article contre cette race qui envenime tout, en se fourrant partout, sans jamais se fondre avec aucun peuple. Demander son expulsion de France, à l’exception des individus mariés avec des Françaises ; abolir les synagogues, ne les admettre à aucun emploi, poursuivre enfin l’abolition de ce culte. Ce n’est pas pour rien que les chrétiens les ont appelés déicides. Le juif est l’ennemi du genre humain. Il faut renvoyer cette race en Asie, ou l’exterminer. Pierre-Joseph Proudhon (1849)
Observons le Juif de tous les jours, le Juif ordinaire et non celui du sabbat. Ne cherchons point le mystère du Juif dans sa religion, mais le mystère de sa religion dans le Juif réel. Quelle est donc la base mondaine du judaïsme ? C’est le besoin pratique, l’égoïsme. Quel est le culte mondain du Juif ? C’est le trafic. Quelle est la divinité mondaine du Juif ? C’est l’argent. Karl Marx
L’argent est le dieu jaloux d’Israël devant qui nul autre Dieu ne doit subsister. Karl Marx
Dans les villes, ce qui exaspère le gros de la population française contre les Juifs, c’est que, par l’usure, par l’infatigable activité commerciale et par l’abus des influences politiques, ils accaparent peu à peu la fortune, le commerce, les emplois lucratifs, les fonctions administratives, la puissance publique . […] En France, l’influence politique des Juifs est énorme mais elle est, si je puis dire, indirecte. Elle ne s’exerce pas par la puissance du nombre, mais par la puissance de l’argent. Ils tiennent une grande partie de de la presse, les grandes institutions financières, et, quand ils n’ont pu agir sur les électeurs, ils agissent sur les élus. Ici, ils ont, en plus d’un point, la double force de l’argent et du nombre. Jean Jaurès (La question juive en Algérie, Dépêche de Toulouse, 1er mai 1895)
Nous savons bien que la race juive, concentrée, passionnée, subtile, toujours dévorée par une sorte de fièvre du gain quand ce n’est pas par la force du prophétisme, nous savons bien qu’elle manie avec une particulière habileté le mécanisme capitaliste, mécanisme de rapine, de mensonge, de corset, d’extorsion. Jean Jaurès (Discours au Tivoli, 1898)
Parmi eux, nous pouvons compter les grands guerriers de ce monde, qui bien qu’incompris par le présent, sont néanmoins préparés à combattre pour leurs idées et leurs idéaux jusqu’à la fin. Ce sont des hommes qui un jour seront plus près du cœur du peuple, il semble même comme si chaque individu ressent le devoir de compenser dans le passé pour les péchés que le présent a commis à l’égard des grands. Leur vie et leurs œuvres sont suivies avec une gratitude et une émotion admiratives, et plus particulièrement dans les jours de ténèbres, ils ont le pouvoir de relever les cœurs cassés et les âmes désespérées. Parmi eux se trouvent non seulement les véritables grands hommes d’État, mais aussi tous les autres grands réformateurs. À côté de Frédéric le Grand, se tient Martin Luther ainsi que Richard Wagner. Hitler (« Mein Kampf », 1925)
Le 10 novembre 1938, le jour anniversaire de la naissance de Luther, les synagogues brûlent en Allemagne. Martin Sasse (évêque protestant de Thuringe)
Avec ses actes et son attitude spirituelle, il a commencé le combat que nous allons continuer maintenant; avec Luther, la révolution du sang germanique et le sentiment contre les éléments étrangers au Peuple ont commencé. Nous allons continuer et terminer son protestantisme; le nationalisme doit faire de l’image de Luther, un combattant allemand, un exemple vivant « au-dessus des barrières des confessions » pour tous les camarades de sang germanique. Hans Hinkel (responsable du magazine de la Ligue de Luther Deutsche Kultur-Wacht, et de la section de Berlin de la Kampfbund, discours de réception à la tête de la Section Juive et du département des films de la Chambre de la Culture et du ministère de la Propagande de Goebbels)
Là, vous avez déjà l’ensemble du programme nazi. Karl Jaspers
Tout ce qui se passe dans le monde aujourd’hui est la faute des sionistes. Les Juifs Américains sont derrière la crise économique mondiale qui a aussi frappé la Grèce. Mikis Theodorakis (2011)
Les enfants de Trump doivent reprendre l’entreprise avec le conflit d’intérêt, ils pourront vendre des gratte-ciels au gouvernement israélien. Des immeubles luxueux à construire dans les territoires occupés, que le Président des États-Unis les aidera à occuper et il leur enverra des Mexicains pour nettoyer les chiottes. Charline Vanhoenacker
C’était une cité fortement convoitée par les ennemis de la foi et c’est pourquoi, par une sorte de syndrome mimétique, elle devint chère également au cœur des Musulmans.Emmanuel Sivan
Les Juifs sont un groupe célèbre pour ses réalisations. Ils représentent 0,2 % de la population mondiale, mais 54 % des champions du monde d’échecs, 27 % des lauréats du prix Nobel de physique et 31 % des lauréats du prix Nobel de médecine. Les Juifs représentent 2 % de la population américaine, mais 21 % des étudiants de l’Ivy League, 26 % des lauréats du Kennedy Center, 37 % des réalisateurs récompensés par l’Academy Award, 38 % des personnes figurant sur une liste récente des principaux philanthropes établie par Business Week et 51 % des lauréats du prix Pulitzer pour les ouvrages non romanesques. Dans son livre « The Golden Age of Jewish Achievement », Steven L. Pease énumère quelques-unes des explications données pour expliquer ce palmarès. La foi juive encourage la croyance dans le progrès et la responsabilité personnelle. Elle est fondée sur l’apprentissage et non sur des rites. La plupart des Juifs ont abandonné ou ont été contraints d’abandonner l’agriculture au Moyen-Âge ; leurs descendants vivent depuis lors de leur intelligence. Ils ont souvent émigré, avec l’ambition et la volonté d’un migrant. Ils se sont rassemblés autour des carrefours mondiaux et ont bénéficié de la tension créative endémique dans ces lieux. Aucune explication ne peut à elle seule rendre compte des réalisations juives. Ce qui est étrange, c’est qu’Israël n’a pas été traditionnellement le plus fort là où les Juifs de la diaspora étaient les plus forts. Au lieu de s’adonner à la recherche et au commerce, les Israéliens ont été contraints de consacrer leur énergie à la lutte et à la politique. Milton Friedman avait l’habitude de dire en plaisantant qu’Israël réfutait tous les stéréotypes juifs. Les gens pensaient que les Juifs étaient de bons cuisiniers, de bons gestionnaires économiques et de mauvais soldats ; Israël leur a prouvé le contraire. Mais les choses ont changé. Les réformes économiques de Benjamin Netanyahu, l’arrivée d’un million d’immigrants russes et la stagnation du processus de paix ont provoqué un changement historique. Les Israéliens les plus ingénieux se lancent dans la technologie et le commerce, et non plus dans la politique. Cette évolution a eu un effet désolant sur la vie publique de la nation, mais un effet revigorant sur son économie. Tel-Aviv est devenu l’un des principaux centres d’affaires du monde. Israël compte plus d’entreprises de haute technologie par habitant que n’importe quel autre pays du monde, et de loin. Il est le premier pays au monde pour les dépenses civiles de recherche et de développement par habitant. Il se classe au deuxième rang, derrière les États-Unis, pour le nombre d’entreprises cotées au Nasdaq. Israël, qui compte sept millions d’habitants, attire autant de capital-risque que la France et l’Allemagne réunies. Comme l’écrivent Dan Senor et Saul Singer dans « Start-Up Nation : The Story of Israel’s Economic Miracle », Israël dispose aujourd’hui d’un pôle d’innovation classique, un lieu où les obsédés de la technologie travaillent à proximité les uns des autres et se nourrissent de leurs idées respectives. (…) La réussite technologique d’Israël est l’aboutissement du rêve sioniste. Le pays n’a pas été fondé pour que des colons égarés puissent s’asseoir parmi des milliers de Palestiniens en colère à Hébron. Le pays n’a pas été fondé pour que des colons égarés puissent s’asseoir parmi des milliers de Palestiniens en colère à Hébron. Il a été fondé pour que les Juifs disposent d’un lieu sûr où se rassembler et créer des choses pour le monde. Cette évolution de l’identité israélienne a des implications à long terme. M. Netanyahou prêche l’optimisme : Israël deviendra le Hong Kong du Moyen-Orient, avec des retombées économiques dans le monde arabe. Et, en fait, il y a des éléments qui soutiennent ce point de vue dans des endroits comme la Cisjordanie et la Jordanie. Mais il est plus probable que le bond en avant économique d’Israël creuse le fossé qui le sépare de ses voisins. Tous les pays de la région parlent d’encourager l’innovation. Certains États riches en pétrole dépensent des milliards pour construire des centres scientifiques. Mais des endroits comme la Silicon Valley et Tel-Aviv sont le fruit d’une confluence de forces culturelles, et non de l’argent. Les nations environnantes n’ont pas de tradition de libre échange intellectuel et de créativité technique. Par exemple, entre 1980 et 2000, les Égyptiens ont déposé 77 brevets aux États-Unis. Les Saoudiens en ont déposé 171. Les Israéliens en ont déposé 7 652. Le boom technologique crée également une nouvelle vulnérabilité. Comme l’a souligné Jeffrey Goldberg de The Atlantic, ces innovateurs sont les personnes les plus mobiles de la planète. Pour détruire l’économie israélienne, l’Iran n’a pas besoin de lancer une arme nucléaire dans le pays. Il suffit que l’instabilité soit suffisante pour que les entrepreneurs décident qu’ils feraient mieux de s’installer à Palo Alto, où nombre d’entre eux ont déjà des contacts et des maisons. Les juifs américains avaient l’habitude de garder un pied en Israël au cas où les choses tourneraient mal ici. Aujourd’hui, les Israéliens gardent un pied aux États-Unis. David Brooks
Dans la première moitié du XXe siècle, malgré la discrimination sociale omniprésente et continue contre les Juifs dans le monde occidental, malgré le retrait des droits légaux et malgré l’Holocauste, les Juifs ont remporté 14 % des prix Nobel de littérature, de chimie, de physique et de médecine. /physiologie. Dans la seconde moitié du XXe siècle, lorsque les prix Nobel ont commencé à être décernés à des personnes du monde entier, ce chiffre est passé à 29 %. Jusqu’à présent, au 21e siècle, il a été de 32 %. Les Juifs constituent environ deux dixièmes d’un pour cent de la population mondiale.Charles Murray
Les protestants se retrouvent parmi les lauréats élevés aux États-Unis dans une proportion légèrement supérieure à leur nombre dans la population générale. Ainsi, 72 % des 71 lauréats, mais environ deux tiers de la population américaine, ont été élevés dans l’une ou l’autre confession protestante – principalement presbytérienne, épiscopalienne ou luthérienne, plutôt que baptiste ou fondamentaliste. Cependant, seulement 1 % des lauréats étaient d’origine catholique, soit un vingt-cinquième du pourcentage d’Américains recensés comme adhérents au catholicisme romain (US bureau of the Census, 1958). Les Juifs, en revanche, sont surreprésentés : représentant environ 3 % de la population américaine, ils constituent 27 % des Nobel qui ont grandi aux Etats-Unis. (…) Ces chiffres, il faut le souligner, se réfèrent aux origines religieuses de cette ultra-élite scientifique, et non à leurs propres préférences religieuses. Quelles que soient ces origines, les lauréats se décrivent souvent comme agnostiques, sans affiliation religieuse formelle ni engagement à l’égard d’un corps de doctrine religieuse. La forte représentation des Juifs parmi les lauréats n’est en aucun cas un phénomène exclusivement américain. Selon des estimations approximatives, les Juifs représentent 19 % des 286 lauréats du prix Nobel, toutes nationalités confondues, nommés jusqu’en 1972, un pourcentage bien plus élevé que celui que l’on trouve dans la population des pays dont ils sont originaires et qui pourrait être lié à la propension souvent documentée des Juifs pour les professions libérales en général et pour la science en particulier. Ces données commenceraient à remettre en question la croyance souvent exprimée selon laquelle la représentation notable des Juifs parmi les lauréats « américains » résulte de la grande migration de jeunes scientifiques talentueux dans le sillage de la montée au pouvoir d’Hitler… Il est vrai que de nombreux scientifiques se sont enfuis aux États-Unis où ils ont augmenté de manière significative le nombre de Juifs parmi l’élite scientifique ainsi que dans la base, mais les réfugiés n’ont pas matériellement augmenté la proportion de Juifs parmi les futurs lauréats. Dix-neuf des 71 lauréats élevés aux États-Unis (27 %) et sept des 21 élevés à l’étranger (33 %) étaient d’origine juive. Les sept futurs lauréats juifs émigrés, bien qu’ils constituent un ajout substantiel à l’ultra-élite, n’augmentent la proportion de Juifs parmi les 92 futurs lauréats que d’un pour cent. (…) Les contributions des scientifiques émigrés à l’effort de guerre et en particulier au développement de la bombe atomique sont maintenant devenues la mesure conventionnelle de leur premier impact sur la science américaine. Mais (…) leur influence a été plus étendue. Beaucoup se sont illustrés non seulement par leurs propres travaux scientifiques, mais aussi en formant des apprentis qui, à leur tour, ont apporté des contributions scientifiques majeures. (…) Ainsi, pour mesurer l’ampleur réelle du « don d’Hitler », il faut prendre en compte non seulement le travail scientifique des émigrés eux-mêmes (pendant la guerre et après), mais aussi leur effet multiplicateur en tant que mentors de nouvelles générations de scientifiques, dont bon nombre de Nobel. Nous devrions nous arrêter un instant pour examiner comment les mêmes événements peuvent être considérés dans la perspective complémentaire de ce que l’hégémonie nazie a signifié pour la science en Allemagne. (…) L’Allemagne a dominé les prix Nobel jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. En 1933, lorsque les nazis sont arrivés au pouvoir, le nombre total de prix Nobel décernés à des scientifiques ayant effectué leurs recherches en Allemagne s’élevait à 31, soit 30 % des 103 prix décernés en Allemagne : 30 % des 103 prix décernés depuis leur création en 1901. Après 1934 et jusqu’en 1976, seuls 19 scientifiques ayant travaillé en Allemagne ont été récompensés, soit 9 % des 210 prix décernés au cours de cette période. Ce déclin s’explique en partie par la réduction drastique du nombre de lauréats juifs, qui est passé de neuf à seulement deux. Même ces deux-là, Max Born et Otto Stern, n’ont pas choisi de survivre à la tempête en Allemagne. Born s’est installé à Édimbourg en 1936, dix ans après avoir publié son interprétation statistique de la fonction d’onde. Stern a accepté une chaire au Carnegie Institute of Technology et a émigré en 1933, après avoir développé la méthode du faisceau moléculaire et mesuré le moment magnétique du proton. Bien qu’officiellement crédités respectivement à la Grande-Bretagne et aux États-Unis, ils devraient être considérés comme des Allemands puisque les recherches ont été effectuées en Allemagne. Plus révélateur peut-être que la quasi-élimination des lauréats juifs d’Allemagne après 1933 est le fait que le nombre de lauréats non-juifs a également diminué de 20 %. L’effet des nazis sur la science allemande ne peut être attribué exclusivement à la persécution des Juifs. Le démantèlement par les nazis d’une grande partie de l’establishment scientifique et les conditions d’appauvrissement qui prévalaient après la guerre contribuent à expliquer le déclin du nombre de lauréats allemands. Harriet Zuckerman
Il a réinventé des figures très anciennes dans le rock : celle du grand prêtre juif, sa fonction sacerdotale, ainsi que celle du poète mystique et du troubadour – bref, tous les registres de la vie du cœur… Son rock est précis tant dans les textes que les sons, avec sa voix monocorde qui entre en résonance avec de petites valses obscures et des chœurs angéliques. Vingt ans après, il transforme le crooner en figure spirituelle et toujours nous reconnecte à ce que nous avons de plus profond : le cœur…Il a un talent naturel pour la gravité, il utilise cette disposition fondamentale (physique par sa voix grave, culturelle par son nom et psychologique (ses tendances à tutoyer les abîmes de la dépression). Il voit les corps tomber dans un monde soumis aux lois de la gravité, il est dans le jeu avec la gravité et nous donne des armes spirituelles avec son pouvoir de changer une chose en son contraire, une charge lourde en légèreté. Ce visionnaire de la gravité sait utiliser le pessimisme pour nous rendre plus vivants et plus joyeux... Christophe Lebold
Chez Dylan, il y a profusion du langage alors qu’il faut cinq ans de réécriture à Cohen pour enlever tout ce qui n’est pas nécessaire…(…) Avec Songs of Léonard Cohen (1967), I am your man (1988) et Ten new songs (2001), on a les trois versions de Cohen : le troubadour, le crooner et le maitre zen. Et on a ses trois formes de gravité : celle du poète, noire et désespérée, puis celle, ironique et sismique portée par cette voix grave qui fait trembler le monde et, enfin, à partir de 2000, cette gravité aérienne d’un maître zen angélique qui nous instruit sur notre lumière cachée. Avec ces trois albums, on peut convertir tout le monde à Léonard Cohen… [Ma chanson préférée ?] serait Everybody knows (1988) qui sonne comme une lamentation de Jérémie sur l’état du monde, avec l’ironie d’un crooner postmoderne (…) La vie du perfectionniste Leonard capable de réécrire ses chansons vingt ans après me montre à quel point l’écriture est un travail de chiffonnier… Dans nos vies sursaturées de prétendues informations, de bavardages incessants, de gadgets électroniques et de surconsommation où tout est organisé pour détruire nos vies intérieures, il est important de retrouver un sens de la puissance lumineuse du verbe, car il peut illuminer nos vies de façon concise : ce n’est plus de l’érudition gratuite, ça nous rend plus vivants, plus affûtés et plus précis. Rien de tel pour cela que la compagnie d’un homme aussi drôle et profond que Leonard pour s’affûter : son pessimisme est lumineux. Il nous fait du bien en utilisant des chansons douces comme des armes spirituelles et il nous reconnecte directement par le verbe et le sens mélodique, sur des airs de valses obsédantes, à nos cœurs et à tout ce qui est mystérieux (l’amour ou son absence, l’abîme ou Dieu). Fréquenter ce contrebandier de lumière est quelque chose de merveilleux, il nous apprend aussi à transformer quelque chose en son contraire, c’est aussi une activité à notre portée… (…) C’est un poète de la qualité qui opérait sur un médium de masse. Dans les sixties, le rock a cherché des poètes pour se légitimer : il y avait lui, Dylan et les Beatles. Les gens n’en sont pas revenus que ce métaphysicien du cœur brisé leur parle de leur condition d’être en chute libre– et leur propose d’entendre une miséricorde angélique, un appel à l’élévation…C’est sur cette brisure du cœur que l’on peut fonder une vraie fraternité… Son premier album n’a pas pris une ride en quarante-sept ans : déjà minimaliste, il est tranchant et aussi indémodable qu’une calligraphie zen…Leonard est un éveillé qui suspend son départ pour nous éveiller à ce que nous avons d’essentiel. (…) Je pense à ce koan zen : un âne regarde un puits jusqu’à ce que le puits regarde l’âne… Leonard peut faire ça, son œuvre a cette force de transformation absolue. Un maître, c’est quelqu’un qui vous libère…Christophe Lebold
Plus que la tradition de la musique américaine, c’est celle des troubadours et trouvères, ces poètes-conteurs-chanteurs du Moyen-Âge que Bob Dylan a d’abord incarné. Né dans le Minnesota en 1941 à deux pas de la route 61 qui inspirera l’un de ses albums les plus emblématiques « Highway 61 revisited », celui qui est d’abord Robert Zimmerman pour l’état-civil et Shabbtaï à sa circoncision, vient d’une famille juive d’Odessa qui a fui les pogroms du début du XXè siècle. La petite communauté juive locale est dit-on, très unie par les épreuves vécues en Europe de l’Est. Le signe de l’errance, de la fuite. Il en est le porteur, il l’assume à la première occasion en filant à New York à la première occasion, abandonnant ses études à l’université dès la première année. Là-bas, à Greenwich Village, il n’est pas le plus doué de tous les folkeux qui écument le quartier, mais il est le plus assidu. « Avec le temps, la goutte fend les rocs les plus résistants » dit le Talmud. Pour ce faire, il fréquente de longues heures les bibliothèques afin de dénicher les chansons folkloriques les plus anciennes. Jonathan Aleksandrowicz
Leonard Cohen a grandi au sein d’une famille juive d’ascendance polonaise. Son grand-père était rabbin et son père, décédé alors qu’il n’a que 9 ans, a été le créateur du journal The Jewish Times. « Monsieur Cohen est un juif observant qui respecte le shabbat même lorsqu’il est en tournée », écrit le New York Times en 2009. Parallèlement à sa judéité, Leonard Cohen se retire de la vie publique durant près de cinq ans (1994-1999) dans un monastère bouddhiste près de Los Angeles, en plein désert californien. Certains se demandent alors comment il peut être à la fois juif pratiquant et bouddhiste. « Pour commencer, dans la tradition du Zen que j’ai pratiquée, il n’y a pas de service de prière et il n’y a pas d’affirmation de déité. Donc, théologiquement, il n’y a pas d’opposition aux croyances juives », racontera l’artiste. (…) Pour sa carrière multiforme, Leonard Cohen se voit décerner de nombreuses récompenses, dont celle en 2003 de compagnon de l’Ordre du Canada, de membre du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens en 2006, membre du Rock and Roll Hall of Fame en 2008. Parce que Leonard Cohen est un homme « à part » dans la chanson, allant de la musique folk à la pop en passant par le blues et l’électro, il n’a eu de cesse d’inspirer de nombreux artistes qui ont aussi repris, et parfois traduit, ses propres chansons. Plus de 1 500 titres du poète chanteur ont été repris. Il en va ainsi de dizaines d’artistes de renommée mondiale, dont Nina Simone, Johnny Cash, Willie Nelson, Joan Baez, Bob Dylan, Nick Cave, Peter Gabriel, Alain Bashung, Graeme Allwright, Suzanne Vega, sans oublier la version bouleversante d’ « Hallelujah » par Jeff Buckley. Leonard Cohen a de son côté très rarement repris des titres dont il n’était pas l’auteur. Parmi eux, sa réinterprétation de « La complainte du partisan » (dont la musique est signée Anna Marly, coautrice avec Maurice Druon et Joseph Kessel du « Chant des partisans »). « The Partisan », sera aussi repris à son tour par Noir Désir. RFI
Le personnage biblique de David, dont le nom en hébreu signifie « bien-aimé », pourrait représenter à cet égard le « modèle » de Leonard. La tradition attribue à ce roi poète et musicien tout l’ensemble du livre des Psaumes. Mais le texte biblique nous fait connaître aussi le nom d’un certain nombre de femmes de ce grand polygame : Ahinoam, Abigayil, Mikal, Égla, Avital, Bethsabée, Abishag… (…) De fait, les compositions de Cohen regorgent d’allusions scripturaires, qui témoignent d’une fréquentation assidue du Livre saint : on y retrouve bien des personnages (Adam, Samson, David ou Isaac), des épisodes (notamment ceux du Déluge ou de la sortie d’Égypte), des réminiscences de tel ou tel prophète voire, justement, de tel ou tel psaume. Ainsi, la chanson By the Rivers Dark (album Ten New Songs) propose une relecture hardie du ps.136-137 : « Vers les sombres fleuves j’allais, errant / j’ai passé ma vie à Babylone / et j’ai oublié mon saint cantique / je n’avais pas de force à Babylone ». Mais il y a plus : sans jamais s’y attarder, Cohen distille à l’occasion des allusions très précises à la tradition juive, tant liturgique que mystique –et notamment à la kabbale. On trouve par exemple des allusions au thème de la « brisure des vases » dans la chanson Anthem (album The Future) : « il y a une fissure, une fissure en toute chose / c’est comme ça que la lumière pénètre »… Parmi les figures juives du passé, il en est une qui ne laisse pas tranquille le juif Leonard Cohen : c’est celle de Jésus. L’homme de Nazareth apparaît avec une fréquence étonnante dans le corpus des chansons (j’en relève pour ma part une douzaine d’occurrences, explicites ou non). « Jésus pris au sérieux par beaucoup, Jésus pris à la blague par quelques-uns » (Jazz Police, album I’m Your Man) : et par toi-même, Leonard ? Cela reste quelque peu indécidable. S’il avoue ne rien comprendre au Sermon sur la montagne (Democracy, album The Future), et évoque « le Christ qui n’est pas ressuscité / hors des cavernes du cœur » (The Land of Plenty, album Ten New Songs), notre auteur, à propos de Jésus, se parle ainsi à lui-même : « tu veux voyager avec lui / tu veux voyager en aveugle / et tu penses pouvoir lui faire confiance / car il a touché ton corps parfait avec son esprit » (Suzanne, album Songs of Leonard Cohen). Et comment comprendre cette double injonction : « Montre-moi l’endroit où le Verbe s’est fait homme / montre-moi l’endroit où la souffrance a commencé » (Show me the Place, album Old Ideas) ? Il y a là un singulier mélange de dérision et de fascination. Curieusement, les figures de la sainteté chrétienne suscitent chez lui une sympathie plus immédiate : celles de la vierge Marie –si c’est bien elle qu’il faut reconnaître dans Notre-Dame de la solitude (Our Lady of Solitude, album Recent Songs) ; de François d’Assise (Death of a Ladies’ Man, dans l’album homonyme) ; de Bernadette de Lourdes (Song of Bernadette, chantée par Jennifer Warnes dans son album Famous Blue Raincoat) ; et surtout de Jeanne d’Arc (Last Year’s Man et Joan of Arc, toutes deux dans l’album Songs of Love and Hate). C’est le lieu de rappeler que le jeune Leonard Cohen a acquis, à Montréal, une bonne culture chrétienne. Certains aspects de la piété catholique, comme le culte du Sacré-Cœur ou les visions de sœur Faustine, continuent d’ailleurs à le toucher. (…) « prêtre » se dit en hébreu… « cohen ». Il faut citer à ce propos la superbe chanson qui s’adresse ainsi à l’Être divin : « Que ta miséricorde se déverse / sur tous ces cœurs qui brûlent en enfer / si c’est ta volonté / de nous faire du bien » (If it Be Your Will, album Various Positions). Ici s’unissent bel et bien le cœur de l’homme (il s’agit d’une prière d’intercession) et celui de Dieu (prêt à répandre sa tendresse sur l’humanité). Or selon un adage de la tradition juive : « la porte de la prière est parfois fermée, mais la porte de la miséricorde reste toujours ouverte » Leonard a compris cette leçon. Et s’il n’adopte le ton de la prière que de manière exceptionnelle (par exemple dans Born in Chains et You Got Me Singing, deux chansons de l’album Popular Problems), il témoigne fréquemment d’une véritable compassion envers tous ceux qui crient : « de grâce, ne passez pas indifférents » (Please, Don’t Pass me by, album Live Songs), qu’il s’agisse de l’enfant encore à naître, de l’exclu, du handicapé, bref de tous les « pauvres » au sens biblique du terme. « Et je chante ceci pour le capitaine / dont le navire n’a pas été bâti / pour la maman bouleversée / devant son berceau toujours vide / pour le cœur sans compagnon / pour l’âme privée de roi / pour la danseuse étoile / qui n’a plus aucune raison de danser » (Heart With no Companion, album Various Positions). Du reste, au-delà de toutes les formes religieuses, il convient de souligner que plusieurs textes de notre Juif errant évoquent la rencontre de Dieu. Ces expériences mystiques, que l’auteur suggère avec discrétion, peuvent avoir pour cadre une église (Ain’t no Cure for Love, album I’m Your Man), mais aussi une simple chambre (Love Itself, album Ten New Songs), voire un lieu indéterminé (Almost Like the Blues, album Popular Problems). Pudeur cohénienne, mais aussi sans doute réticence juive à mettre un nom sur le « Sans-Nom ». « J’entends une voix qui m’évoque celle de Dieu », dit-il (Closing Time, album The Future) : n’est-ce pas elle qu’il faut reconnaître dans Going Home (album Old Ideas) : « J’aime parler avec Leonard… » ? Mais ce dialogue d’amour entre Leonard et son Dieu restera secret. Chéri par les femmes, le David biblique apparaît également comme l’élu de Dieu, lequel déclare : « J’ai trouvé David, un homme selon mon cœur » (Actes des apôtres, 13, 22). Et notre barde de Montréal, comme en écho : « J’ai appris qu’il y avait un accord secret / que David jouait pour plaire au Seigneur » (Hallelujah, album Various Positions). Outre les deux tonalités que l’on vient d’évoquer, la lyrique et la mystique, il existe un troisième registre, non moins prégnant chez Leonard : c’est celui du constat désabusé, parfois même désespéré pour ne pas dire nihiliste. Donnons-en quelques échantillons : « Les pauvres restent pauvres et les riches s’enrichissent / c’est comme ça que ça se passe / tout le monde le sait » (Everybody Knows, album I’m Your Man) ; « De parcourir le journal / ça donne envie de pleurer / tout le monde s’en fiche que les gens / vivent ou meurent » (In my Secret Life, album Ten New Songs) ; « Je n’ai pas d’avenir / je sais que mes jours sont comptés / le présent n’est pas si agréable / juste pas mal de choses à faire / je pensais que le passé allait me durer / mais la noirceur s’y est mise aussi » (The Darkness, album Old Ideas) ; « J’ai vu des gens qui mouraient de faim / il y avait des meurtres, il y avait des viols / leurs villages étaient en feu / ils essayaient de s’enfuir » (Almost Like the Blues, album Popular Problems). Et rien n’échappe à cet acide corrosif, pas même l’amour des femmes. Nous voilà loin de la célébration de l’éros, comme si l’on était passé du Cantique des Cantiques… au livre de Qohélet : « Vanité des vanités, dit Qohélet ; vanité des vanités, tout est vanité » (Qohélet, 1, 2). Mais justement, ces deux textes bibliques se présentent comme écrits par le même Salomon, ce qui ne manquera pas de rendre perplexes les commentateurs : comment le fils de David a-t-il pu composer deux ouvrages d’esprit aussi diamétralement opposé ? Les rabbins ont imaginé une réponse : c’est le jeune Salomon, amoureux et optimiste, qui a écrit le Cantique ; devenu vieux, blasé et pessimiste, il a composé le livre de Qohélet. Mais tout cela relève du même genre littéraire : la littérature de sagesse. Somme toute, il en va de même pour Leonard, qui déploie à son tour les différents aspects d’une moderne sagesse. Du reste, mystique et critique peuvent chez lui aller de pair : « Tu m’as fait chanter / quand bien même tout allait de travers / tu m’as fait chanter / la chanson ‘Alléluia’ » (You Got me Singing, ibid.)… Dominique Cerbelaud
C’est à regret que je parle des Juifs : cette nation est, à bien des égards, la plus détestable qui ait jamais souillé la terre. Voltaire (Article « Tolérance »)
Qu’ils s’en aillent! Car nous sommes en France et non en Allemagne!” … Notre République est menacée d’une invasion de protestants car on choisit volontiers des ministres parmi eux., … qui défrancise le pays et risque de le transformer en une grande Suisse, qui, avant dix ans, serait morte d’hypocrisie et d’ennui. Zola (Le Figaro, le 17/5/1881)
Ce projet a causé la désertion de 80 à 100 000 personnes de toutes conditions, qui ont emporté avec elles plus de trente millions de livres ; la mise à mal de nos arts et de nos manufactures. (…) Sire, la conversion des cœurs n’appartient qu’à Dieu …Vauban (« Mémoire pour le rappel des Huguenots », 1689)
Dans la dispute entre ces races pour savoir à laquelle revient le prix de l’avarice et de la cupidité, un protestant genevois vaut six juifs. A Toussenel, disciple de Fourier, 1845
Qu’ils s’en aillent! Car nous sommes en France et non en Allemagne! … Notre République est menacée d’une invasion de protestants car on choisit volontiers des ministres parmi eux., … qui défrancise le pays et risque de le transformer en une grande Suisse, qui, avant dix ans, serait morte d’hypocrisie et d’ennui. Zola (Le Figaro, le 17/5/1881)
Si le Décalogue consacre son commandement ultime à interdire le désir des biens du prochain, c’est parce qu’il reconnaît lucidement dans ce désir le responsable des violences interdites dans les quatre commandements qui le précèdent. Si on cessait de désirer les biens du prochain, on ne se rendrait jamais coupable ni de meurtre, ni d’adultère, ni de vol, ni de faux témoignage. Si le dixième commandement était respecté, il rendrait superflus les quatre commandements qui le précèdent. Au lieu de commencer par la cause et de poursuivre par les conséquences, comme ferait un exposé philosophique, le Décalogue suit l’ordre inverse. Il pare d’abord au plus pressé: pour écarter la violence, il interdit les actions violentes. Il se retourne ensuite vers la cause et découvre le désir inspiré par le prochain. René Girard
De même que pour les juifs, ce sont les mêmes qui dénoncent les sorcières et qui recourent à leurs services. Tous les persécuteurs attribuent à leurs victimes une nocivité susceptible de se retourner en positivité et vice versa. René Girard
Ils ont tout, c’est connu. Vous êtes passé par le centre-ville de Metz ? Toutes les bijouteries appartiennent aux juifs. On le sait, c’est tout. Vous n’avez qu’à lire les noms israéliens sur les enseignes. Vous avez regardé une ancienne carte de la Palestine et une d’aujourd’hui ? Ils ont tout colonisé. Maintenant c’est les bijouteries. Ils sont partout, sauf en Chine parce que c’est communiste. Tous les gouvernements sont juifs, même François Hollande. Le monde est dirigé par les francs-maçons et les francs-maçons sont tous juifs. Ce qui est certain c’est que l’argent injecté par les francs-maçons est donné à Israël. Sur le site des Illuminatis, le plus surveillé du monde, tout est écrit. (…) On se renseigne mais on ne trouve pas ces infos à la télévision parce qu’elle appartient aux juifs aussi. Si Patrick Poivre d’Arvor a été jeté de TF1 alors que tout le monde l’aimait bien, c’est parce qu’il a été critique envers Nicolas Sarkozy, qui est juif… (…) Mais nous n’avons pas de potes juifs. Pourquoi ils viendraient ici ? Ils habitent tous dans des petits pavillons dans le centre, vers Queuleu. Ils ne naissent pas pauvres. Ici, pour eux, c’est un zoo, c’est pire que l’Irak. Peut-être que si j’habitais dans le centre, j’aurais des amis juifs, mais je ne crois pas, je n’ai pas envie. J’ai une haine profonde. Pour moi, c’est la pire des races. Je vous le dis du fond du cœur, mais je ne suis pas raciste, c’est un sentiment. Faut voir ce qu’ils font aux Palestiniens, les massacres et tout. Mais bon, on ne va pas dire que tous les juifs sont des monstres. Pourquoi vouloir réunir les juifs et les musulmans ? Tout ça c’est politique. Cela ne va rien changer. C’est en Palestine qu’il faut aller, pas en France. Karim
Ce sont les cerveaux du monde. Tous les tableaux qui sont exposés au centre Pompidou appartiennent à des juifs. A Metz, tous les avocats et les procureurs sont juifs. Ils sont tous hauts placés et ils ne nous laisseront jamais monter dans la société. « Ils ont aussi Coca-Cola. Regardez une bouteille de Coca-Cola, quand on met le logo à l’envers on peut lire : « Non à Allah, non au prophète ». C’est pour cela que les arabes ont inventé le « Mecca-cola ». Au McDo c’est pareil. Pour chaque menu acheté, un euro est reversé à l’armée israélienne. Les juifs, ils ont même coincé les Saoudiens. Ils ont inventé les voitures électriques pour éviter d’acheter leur pétrole. C’est connu. On se renseigne. (…) Si Mohamed Merah n’avait pas été tué par le Raid, le Mossad s’en serait chargé. Il serait venu avec des avions privés. Ali
Certains trouvent encore intolérable d’admettre que le peuple juif se soit trouvé, à trois reprises, plus ou moins volontairement, un élément essentiel au patrimoine de l’humanité: le monothéisme, le marché et les lieux saints. Car il n’est pas faux de dire, même si c’est schématique, que les juifs ont été mis en situation d’avoir à prêter aux deux autres monothéismes, et à les partager avec eux, leur dieu, leur argent et leurs lieux saints. Et comme la meilleure façon de ne pas rembourser un créancier, c’est de le diaboliser et de l’éliminer, ceux qui, dans le christianisme et l’islam, n’acceptent toujours pas cette dette à l’égard du judaïsme, se sont, à intervalles réguliers, acharnés à le détruire, attendant pour recommencer que le souvenir de l’élimination précédente se soit estompé. Jacques Attali
Les prix Nobel ont été décernés à plus de 850 personnes, dont au moins 22% (plus de 24% sans le prix de la paix) étaient des Juifs, bien que les Juifs représentent moins de 0,2% de la population mondiale (soit 1 personne sur 500). Au total, les Juifs ont remporté 41 % des prix Nobel d’économie, 28 % des prix Nobel de médecine, 26 % des prix Nobel de physique, 19 % des prix Nobel de chimie, 13 % des prix Nobel de littérature et 9 % des prix Nobel de la paix… Wikipedia
Luther rend nécessaire ce que Gutenberg a rendu possible : en plaçant l’Écriture au centre de l’eschatologie chrétienne, la Réforme fait d’une invention technique une obligation spirituelle. François Furet et Jacques Ozouf
Après la Réforme, les régions protestantes ont surgi des marécages de l’Europe pour supplanter les pays catholiques en tant que puissances économiques. En 1700, avant la véritable révolution industrielle, les pays protestants avaient dépassé le monde catholique en termes de revenus. Un écart important entre les revenus des protestants et ceux des catholiques s’est creusé au cours des 250 années suivantes. Aucun signe de convergence n’est apparu avant les années 1960. Il ne s’agit toutefois pas d’une simple justification de la thèse de l’ »éthique protestante ». … Un certain nombre d’hypothèses alternatives … pourraient expliquer la domination économique de l’Europe protestante. Elles comprennent (1) la sécularisation – la libération de l’économie des contrôles religieux ; (2) le développement de l’éducation (et l’accent mis par les protestants sur l’alphabétisation – la capacité à lire la Bible) ; (3) les conséquences désastreuses de la Contre-Réforme catholique ; (4) l’importance de la traite atlantique (des esclaves) dans la création d’une classe d’affaires autonome qui exigeait des réformes institutionnelles modernisatrices. (…) La Réforme a été un moment culturel crucial dans le développement du capitalisme (…). La Réforme a fait de l’alphabétisation un élément central de la dévotion religieuse. Dans l’Église catholique, le clergé interprétait (canalisait ?) la parole de Dieu pour les croyants. La Bible était jugée trop complexe pour être comprise par le commun des mortels. Le protestantisme, en revanche, a répandu la notion de « sacerdoce de tous les croyants ». Tous les chrétiens devraient étudier la Bible et se rapprocher de leur religion d’une manière beaucoup plus personnelle et privée. Il s’agit là d’une tâche ardue, alors que seule une infime partie de la population est alphabétisée et que la Bible est écrite en latin. Les protestants ont travaillé dur sur ces deux fronts, en traduisant la Bible en langue vernaculaire (les langues que les gens parlaient réellement) et en évangélisant pour une éducation de masse. Assez soudainement, et pour des raisons tout à fait non économiques, le règne médiéval de l’ignorance a été rejeté et remplacé par des demandes d’investissement dans le capital humain. L’Écosse en est un excellent exemple. L’un des principes fondateurs de la Réforme écossaise (1560) était l’éducation gratuite pour les pauvres. La première taxe scolaire locale au monde a peut-être été établie en 1633 (renforcée en 1646). C’est dans ce contexte que s’est développée la pensée éclairée écossaise : David Hume, Francis Hutcheson, Adam Ferguson et le parrain de l’économie moderne, Adam Smith. À cette époque, l’érudition écossaise était tellement supérieure à celle des autres nations que Voltaire a écrit : « Nous nous tournons vers l’Écosse pour toutes nos idées de civilisation ». L’un des aspects attrayants de cette réflexion sur le protestantisme est qu’elle se prête à des tests empiriques quantitatifs. Les pays protestants ont-ils investi davantage dans l’éducation ? au moins en 1830, les pays protestants avaient un taux de scolarisation primaire beaucoup plus élevé : 17 % en Allemagne, 15 % aux États-Unis, 9 % au Royaume-Uni, 7 % en France, et seulement 3 ou 4 % en Italie et en Espagne… Alors que les pays protestants aspiraient à l’idéal d’un « sacerdoce de tous les croyants », encourageant une norme sociale d’alphabétisation et d’érudition personnelle, l’Europe catholique a réagi violemment à la Réforme et a consacré une centaine d’années à l’endiguement et au contrôle brutal de la « pensée, de la connaissance et de la croyance ». L’accent n’est pas tant mis sur l’alphabétisation en tant que telle. Selon Landes, la Réforme n’a pas simplement « stimulé l’alphabétisation », mais a surtout « engendré des dissidents et des hérésies, et encouragé le scepticisme et le refus de l’autorité qui sont au cœur de l’effort scientifique ». Alors que les protestants traduisaient la Bible et militaient pour l’éducation publique, la Contre-Réforme (l’Inquisition) brûlait les livres, les hérétiques et emprisonnait les scientifiques. La réaction catholique à la Réforme – en grande partie motivée par l’Empire espagnol – a consisté à terroriser le principe de la libre pensée. Bien qu’étant à bien des égards le berceau de la science moderne, « l’Europe méditerranéenne dans son ensemble a raté le train de la soi-disant révolution scientifique » (Landes 1998:180). Dans un climat de peur et de répression, le centre intellectuel et scientifique de l’Europe s’est déplacé vers le nord. Peut-être que la Réforme, plutôt que de créer un nouvel « esprit du capitalisme », a simplement conduit à la relocalisation de l’activité capitaliste. En l’absence de conflits religieux, la révolution industrielle aurait pu prendre racine là où le capitalisme médiéval était le plus fort (Italie, Belgique, Espagne, etc.). Les guerres de religion et la Contre-Réforme ont « secoué » les centres de l’ancien capitalisme médiéval, entraînant une migration massive de capitaux et de compétences entrepreneuriales. La piste la plus prometteuse pour la recherche historique consiste peut-être à étudier les schémas de mobilité et de migration des capitaux après la Réforme. La division de l’Europe en deux mondes religieux a produit des dynamiques frappantes qui, à mon avis, vont bien au-delà de la thèse de Weber. Le monde protestant, semble-t-il, a nourri un esprit contestataire d’hérésie et de pensée critique, une alphabétisation populaire et une morale commerciale de laissez-faire ; le catholicisme a brûlé des livres, emprisonné des scientifiques, étouffé la pensée et exigé une orthodoxie rigoureuse. Tout cela a condamné les anciennes régions prospères de l’Europe à devenir la périphérie (la « ceinture de l’olivier »). Les régions arriérées qui se sont révoltées contre Rome sont devenues la destination des migrations capitalistes, et c’est là que les institutions du capitalisme moderne ont progressivement pris forme. Enfin, le fait qu’à peu près à la même époque, le centre du commerce et des échanges se soit déplacé de la Méditerranée vers l’Atlantique, ajoutant une nouvelle « opportunité géographique » aux régions protestantes, n’a sans doute pas été étranger à cette évolution.Cristobal Young
Pour ses promoteurs, il existe dans la France de la Troisième République un » complot protestant « , mené par des étrangers de l’intérieur. Ce » péril » menace l’identité française et cherche sournoisement à » dénationaliser » le pays. Leurs accusations veulent prendre appui sur l’actualité : la guerre de 1870, la création de l’école laïque, les rivalités coloniales, l’affaire Dreyfus, la séparation des églises et de l’État. Derrière ces événements se profilerait un » parti protestant » qui œuvrerait en faveur de l’Angleterre et de l’Allemagne. Mais, à coté de l’actualité, la vision de l’histoire constitue également un enjeu et les antiprotestants, en lutte contre l’interprétation universitaire de leur époque, tentent une révision de la compréhension d’événements historiques comme la Saint-Barthélemy et la Révocation de l’Édit de Nantes. Ils accusent les protestants d’intolérance et érigent des statues à Michel Servet, victime de Calvin au XVIe siècle. La réaction protestante à ces attaques se marque non seulement par une riposte juridique, mais aussi par une auto-analyse plus critique que dans le passé. Cet axe se termine par une réflexion plus large sur la condition minoritaire en France et la manière dont la situation faite aux minorités est révélatrice du degré de démocratie de la société française. (…) L’antisémitisme de cette époque concentre deux traditions hostiles aux juifs : l’une, religieuse, qui les accuse de » déicide « , l’autre, économique, qui les accuse de » spéculation financière « . La conjonction de ces deux traditions engendre des thèses raciales sur une lutte éternelle entre l’ » aryen » et le » sémite « , alors que les accusations raciales antiprotestantes, quand elles existent, n’atteignent pas ce degré d’intensité. L’anticléricalisme est l’envers du cléricalisme : deux camps de force égale se trouvent en rivalité politico-religieuse et leurs arguments dérivent souvent dans des stéréotypes où la haine n’est pas absente. La haine anticléricale se développe lors de la lutte contre les congrégations. Mais, à partir de 1905, la séparation des églises et de l’État constitue un » pacte laïque » et permet un dépassement de l’anticléricalisme. (…) Paradoxalement, plus le groupe visé est faible, plus la haine à son encontre est forte. À ce titre, l’antiprotestantisme apparaît comme une haine intermédiaire entre l’anticléricalisme et l’antisémitisme. Mais, partout, à l’origine des haines, se trouve une vision conspirationniste de l’histoire : les pouvoirs établis et les idées qui triomphent sont le résultat de » menées occultes « , d’ « obscurs complots ». Jean Bauberot
L’Âge moderne est l’Âge des Juifs, et le XXe siècle est le Siècle des Juifs. La modernité signifie que chacun d’entre nous devient urbain, mobile, éduqué, professionnellement flexible. Il ne s’agit plus de cultiver les champs ou de surveiller les troupeaux, mais de cultiver les hommes et de veiller sur les symboles […] En d’autres termes, la modernité, c’est le fait que nous sommes tous devenus juifs. Yuri Slezkine
Le problème de la plupart des théories exposées jusqu’à présent est qu’elles présentent des trous béants dans la logique ou des preuves si importantes qu’elles n’auraient jamais pu figurer dans le Talmud. La faille la plus importante est de loin le fait que beaucoup de ces arguments reposent sur une idée du passé juif que nous n’avons aucune bonne raison de croire vraie ; ce n’est pas parce que les rabbins le souhaitaient que c’était nécessairement le cas. De même, les idées reçues sur une communauté juive farouchement pratiquante et souvent orthodoxe ne sont guère étayées. (Et, comme l’a révélé Alana Newhouse il y a quelques années, même les images que nous avons d’un shtetl juif farouchement pieux ont été largement manipulées). (…) En combinant un examen très approfondi du dossier historique avec de nouvelles analyses économiques et démographiques, les auteurs rejettent sommairement un grand nombre des hypothèses sous-jacentes qui ont produit des théories sur l’alphabétisation juive dans le passé. Alors que beaucoup ont lié l’évolution des Juifs vers des métiers professionnels à l’époque européenne où les Juifs étaient persécutés, Botticini et Eckstein apportent la preuve que l’abandon du monde non lettré de l’agriculture prémoderne s’est en fait produit mille ans plus tôt, lorsque les Juifs étaient largement libres d’exercer la profession de leur choix. Et là où tant de gens ont simplement considéré comme acquis l’alphabétisation universelle des Juifs, les économistes découvrent qu’une majorité de Juifs n’était en fait pas disposée à investir dans l’éducation juive, avec le résultat choquant que plus des deux tiers de la communauté juive ont disparu vers la fin du premier millénaire. Botticini et Eckstein se penchent sur le Talmud et remarquent qu’il traite essentiellement d’agriculture, ce qui, en conjonction avec les preuves archéologiques des premier et deuxième siècles, brosse le tableau d’un passé juif où l’alphabétisation était le privilège d’une élite. Mais ces rabbins défendaient également la vision d’un judaïsme futur très différent de celui qui avait dominé, au moins symboliquement, la majeure partie de l’histoire juive jusqu’alors. Alors que le Temple de Jérusalem, les sacrifices rituels et l’économie agricole qu’ils impliquaient avaient été la norme jusque-là, ces rabbins – au sens large, les Pharisiens – cherchaient à mettre l’accent sur la lecture de la Torah, la prière et la synagogue. Lorsque la secte du judaïsme qui mettait l’accent sur le Temple – en gros, les Sadducéens – a été essentiellement anéantie par les Romains peu après l’époque de Jésus, les dirigeants pharisiens, sous la forme des sages du Talmud, ont eu toute latitude pour remodeler le judaïsme à leur propre image. Au cours des centaines d’années qui ont suivi, eux et leurs descendants idéologiques ont codifié le Talmud et déclaré la nécessité d’une éducation juive universelle. Toute cette histoire est largement connue et comprise, mais ce que Botticini et Eckstein font différemment, c’est de retracer cette évolution en même temps que la taille de la population juive et sa répartition professionnelle. La population juive mondiale est passée d’au moins 5 millions à 1 million entre 70 et 650. Il n’est pas surprenant qu’un peuple conquis, des rébellions étouffées et la perte d’un foyer entraînent une diminution de la population, mais Botticini et Eckstein affirment que « les massacres liés à la guerre et le déclin général de la population expliquent environ la moitié de cette perte ». Où sont allés les 2 millions de Juifs survivants sur 3 millions ? Selon eux, au fil des générations, ils ont tout simplement cessé d’être juifs : La notion d’identité juive étant désormais directement liée à l’alphabétisation par les rabbins pharisiens survivants du Talmud, élever ses enfants en tant que juifs nécessitait un investissement substantiel dans l’éducation juive. Pour pouvoir justifier cet investissement, il fallait être soit un juif particulièrement dévoué, soit quelqu’un qui espérait trouver pour ses enfants une profession où l’alphabétisation était un avantage, comme le commerce, l’artisanat et le prêt d’argent. Pour ceux qui n’étaient pas particulièrement dévoués et qui avaient peu d’espoir de voir leurs enfants tirer un avantage économique d’une éducation juive, l’option de quitter simplement la communauté juive, selon les économistes, était plus séduisante que celle de rester comme ses masses non alphabétisées. Les deux tiers de la population juive survivante, affirment-ils, ont suivi cette voie. Ce revirement de l’histoire de la population, qui s’accompagne d’une recherche montrant que près de 90 % de la population juive s’est engagée dans l’agriculture et près de 90 % dans des métiers professionnels au cours de ces mêmes centaines d’années, aborde un problème clé des théories précédentes sur l’alphabétisation des Juifs : déterminer ce qu’il est advenu de ceux qui n’ont pas voulu devenir des érudits. Botticini et Eckstein apportent d’autres preuves que la tradition juive est à l’origine de la réussite dans le commerce. Un système extrajudiciaire de tribunaux rabbiniques pour régler les litiges a permis de développer le type de confiance nécessaire à la croissance des entreprises commerciales. La langue universelle qu’est l’hébreu a facilité les négociations internationales. Dans une critique dévastatrice de la théorie selon laquelle les persécutions ont en fait favorisé cette évolution économique, les économistes examinent les sociétés dans lesquelles les Juifs ont développé à l’origine ce penchant pour le commerce et constatent que les Juifs n’ont fait l’objet d’aucune discrimination particulière qui les aurait rendus moins performants dans le domaine de l’agriculture. En fait, ils montrent que les Juifs ont souvent fait l’objet de discriminations précisément en raison de l’importance qu’ils accordaient au commerce, comme lors de leur expulsion d’Angleterre en 1290, qui n’a eu lieu qu’après qu’on leur a demandé à plusieurs reprises d’abandonner la profession de prêteur d’argent (ce qui a trouvé un écho dans l’ordre d’Ulysses S. Grant d’expulser les Juifs du territoire qu’il commandait pendant la guerre de Sécession). C’est ainsi que le peuple juif est devenu un peuple aux deux héritages entrelacés : une culture dans laquelle les lettrés juifs continuent à passer le flambeau et une culture dans laquelle l’accent mis sur les métiers était nécessaire pour que tous, à l’exception des plus fervents, continuent à le faire. Lorsqu’une famille donnée cessait d’être dévouée ou suffisamment riche, elle disparaissait tout simplement. Steven Weiss
Rédigé par les économistes Maristella Botticini et Zvi Eckstein, cet article explique le succès juif en termes d’alphabétisation précoce à la suite de la destruction du Temple par Rome en 70 de notre ère et de la dispersion subséquente des Juifs dans tout l’empire romain – des Juifs qui devaient compter sur leurs propres rabbins et synagogues pour maintenir leur religion au lieu des grands prêtres de Jérusalem. Vous connaissez peut-être une histoire similaire à propos de la Réforme protestante : l’abandon du clergé catholique et de sa liturgie latine au profit de la lecture des Écritures dans les langues locales et les avantages matériels qui en ont découlé. Pourquoi l’Europe du Nord – l’Allemagne, la Hollande, l’Angleterre, la Suède – est-elle tellement plus prospère que l’Europe du Sud – le Portugal, l’Italie, la Grèce, l’Espagne ? Pourquoi les seconds sont-ils redevables aux premiers et non l’inverse ? Cela aurait-il quelque chose à voir avec l’héritage protestant du Nord et l’héritage catholique du Sud ? Paul Solman
Le message clé des « Heureux élus » est que l’alphabétisation du peuple juif, associée à un ensemble d’institutions chargées de faire respecter les contrats, développées au cours des cinq siècles qui ont suivi la destruction du second temple, a donné aux Juifs un avantage comparatif dans des professions telles que l’artisanat, le commerce et le prêt d’argent – des professions qui ont bénéficié de l’alphabétisation, des mécanismes de mise en œuvre des contrats et de la constitution de réseaux et qui ont généré des revenus élevés. (…) les Juifs de l’Europe médiévale se sont volontairement lancés puis spécialisés dans le prêt d’argent et la banque parce qu’ils disposaient des principaux atouts pour réussir sur les marchés du crédit : le capital déjà accumulé en tant qu’artisans et les capacités de réseautage commercial parce qu’ils vivaient dans de nombreux endroits, pouvaient facilement communiquer entre eux et s’informer des meilleures opportunités d’achat et de vente, et que l’alphabétisation, le calcul et les institutions chargées de l’exécution des contrats – des « dons » que leur religion leur avait accordés – leur donnaient un avantage sur leurs concurrents.Maristella Botticini and Zvi Eckstein
Partout et à chaque fois que les Juifs vivaient au sein d’une population majoritairement non scolarisée, ils disposaient d’un avantage comparatif. Ils pouvaient lire et écrire des contrats, des lettres d’affaires et des livres de comptes en utilisant un alphabet [hébreu] commun, tout en apprenant les langues locales des différents endroits où ils vivaient. Ces compétences sont devenues précieuses dans l’économie urbaine et commerciale qui s’est développée sous la domination musulmane dans la région allant de la péninsule ibérique au Moyen-Orient.Maristella Botticini
Le rédacteur en chef du Journal des économistes (…) a affirmé que l’antisémitisme et la haine contre les Juifs devaient être comparés à l’expulsion des Huguenots de France au XVIIe siècle, les persécutions économiques et religieuses étant généralement parallèles. Les persécutions religieuses des huguenots peuvent être expliquées comme des persécutions économiques qui s’appliquent parfaitement aux Juifs du XIXe siècle. Selon cette explication, l’intolérance religieuse catholique a provoqué l’expulsion des factions les plus dynamiques de la société, provoquant ainsi le déclin des nations catholiques. (…) Les travaux novateurs de Max Weber et sa critique fondamentale de l’interprétation marxiste de la religion et de l’économie ont joué – et, d’une certaine manière, continuent de jouer – un rôle clé dans la recherche sur la religion et la modernisation économique. Weber a également attribué un rôle important au judaïsme, bien que son travail ait contribué à alimenter un énorme débat et certaines réactions de ressentiment, en particulier de la part d’intellectuels juifs. La Poignée d’élus est un livre qui couvre l’histoire des Juifs depuis la destruction du second temple (70 de notre ère) jusqu’à l’expulsion d’Espagne en 1492. (…) Le judaïsme ancien a subi une forme de modification sismique qui, comme le décrivent Botticini et Eckstein, a redéfini la structure religieuse du judaïsme. L’exemple le plus typique est la disparition du système sacrificiel organisé autour du temple de Jérusalem après sa destruction en 70 de notre ère. L’effondrement politique du judaïsme ancien est le point de départ de La Poignée d’élus qui vise à comprendre les changements d’époque du judaïsme rabbinique et, plus précisément, le type de culture que le judaïsme a suscité après ce que l’on pourrait appeler à juste titre le grand « traumatisme » de l’effondrement de sa structure ancienne et centrale. La Poignée d’élus traite de la relation entre les règles religieuses et l’alphabétisation, et tente donc d’étudier la transformation que le judaïsme a subie au cours d’une période de formation relativement longue. (…) La première hypothèse est que les Juifs de l’ancien monde (200 avant notre ère – 200 de notre ère) qui vivaient en Eretz Israël étaient principalement occupés à des activités agricoles. Or, en l’espace de quelques siècles, les Juifs de la Diaspora ont radicalement changé leur situation économique et professionnelle. Comment cela s’est-il produit ? Ce changement est particulièrement dû à l’introduction d’une règle qui s’est avérée centrale, selon le récit de Botticini et Eckstein. Il s’agit précisément de la règle attribuée à Yehoshua ben Gamla, un prêtre mentionné dans les premiers textes rabbiniques, selon laquelle l’obligation d’enseigner la Torah aux enfants a été mise en œuvre en tant que règlement communautaire. En termes comparatifs, cette norme a été introduite dans le contexte d’un monde religieux modelé sur les règles des religions antiques, qui se concentraient sur les offrandes sacrificielles et les activités dans les temples, l’initiation et la magie, le jeûne et les prières. Malgré leurs croyances et leur structure rituelle différentes, les religions romaine et grecque, ainsi que le zoroastrisme, les religions à mystères, les cultes orphiques et dionysiaques et le mithraïsme n’ont jamais mis en œuvre une loi imposant une connaissance textuelle significative d’une tradition sacrée écrite. Pour les historiens des religions, il s’agit là d’une innovation importante, même si la diffusion imminente du christianisme et de l’islam allait introduire un grand nombre de transformations supplémentaires dans le monde religieux de l’Antiquité tardive. (…) Néanmoins, comme tout grand récit qui vise à fournir une explication unique aux faits historiques, celui-ci suscite un certain nombre de questions et d’éventuelles réponses critiques. Je ne mentionnerai que trois problèmes susceptibles d’être pertinents. 1. Tout d’abord, il faut rappeler que la diaspora n’a pas commencé après la chute de Jérusalem, mais qu’elle a été une composante visible et pertinente du judaïsme ancien. Les Juifs vivaient dans des métropoles, comme Rome et Alexandrie, et étaient probablement engagés dans des activités urbaines. L’historiographie sur le christianisme a souligné que le christianisme s’est répandu avant tout dans les grands centres urbains de l’Empire romain, bien que le mouvement de Jésus se soit surtout répandu dans les villages. La fascinante théorie de la conversion proposée par les auteurs est donc intéressante, mais doit être étayée par davantage de preuves. 2. Etant donné l’étendue du livre et la prétention à une théorie explicative universelle et générale du judaïsme, une comparaison avec d’autres groupes similaires s’imposait. En quoi le judaïsme dans l’empire musulman diffère-t-il des minorités chrétiennes qui, elles, étaient dotées de métiers similaires ? Comment évaluer alors les Arméniens, les Grecs orthodoxes ou les divers groupes religieux sectaires qui ont été en concurrence avec les Juifs et ont joué des rôles similaires ? 3. La théorie et l’histoire sont en quelque sorte déconnectées dans ce livre. La théorie proposée par les auteurs est appliquée à des contextes historiques, sociaux et religieux très différents. On peut se demander si l’organisation de l’économie dans l’empire musulman et celle de l’Europe chrétienne médiévale ne présentent pas des caractéristiques multiples et dissemblables, entraînant une relation perpétuellement différente avec le judaïsme, quand elles ne l’influencent pas directement. L’anachronisme est généralement inévitable, mais j’ai l’impression qu’il apparaît comme un élément trop fort dans ce récit. Est-il possible de supposer, à l’aide de la théorie économique et de la modélisation, qu’un paysan de l’ancien monde se comporterait exactement comme un paysan contemporain d’un pays du tiers monde ? Le long voyage dans le temps nécessite, entre autres, de s’identifier à un monde qui aurait pu être radicalement différent. De plus, ce long voyage est souvent un chemin complexe dans un labyrinthe que l’historien est poussé à explorer dans ses multiples directions.Cristiana Facchini
Et si l’essentiel de ce que nous croyons savoir sur l’histoire du peuple juif entre la destruction du second Temple et l’expulsion des Espagnols était erroné ? C’est sur ce postulat intrigant que s’appuie La Poignée d’élus : Comment l’éducation a façonné l’histoire juive, 70-1492, un nouveau livre ambitieux des économistes Maristella Botticini et Zvi Eckstein. Soixante-quinze ans après la première mise en garde de l’historien Salo Baron contre la réduction du passé juif à « une histoire de souffrance et d’érudition », la plupart d’entre nous continuent de considérer l’histoire juive médiévale sous cet angle. Il est certainement temps de rompre avec la théorie larmoyante du malheur pré-révolutionnaire et d’adopter un point de vue plus conforme à la vérité historique », implorait Baron à la fin de son article du Menorah Journal de 1928 intitulé « Ghetto et émancipation » : Devons-nous réviser le point de vue traditionnel ? » Botticini et Eckstein (…) démontent systématiquement une grande partie des idées reçues sur l’histoire juive médiévale. Par exemple, ils explorent comment la nature dispersée de la diaspora juive était principalement motivée par la recherche d’opportunités économiques plutôt que par une persécution implacable. Ils démontrent également que les massacres liés à la guerre n’expliquent qu’une partie du déclin de la population juive entre 70 et 700 avant notre ère et entre 1250 et 1400 avant notre ère, et jettent un doute sérieux sur la théorie selon laquelle la conversion généralisée au christianisme et à l’islam au cours de ces périodes a été principalement motivée par la discrimination antijuive. De même, ils montrent que les restrictions imposées aux Juifs en matière de propriété foncière et d’appartenance à des guildes d’artisans dans l’Europe chrétienne – facteurs souvent cités pour expliquer la propension des Juifs médiévaux à faire du commerce et à prêter de l’argent – ont retardé de plusieurs siècles le passage des Juifs de l’agriculture au commerce. Les auteurs sont loin d’être les seuls parmi les chercheurs à défendre leur cause. Mais en consolidant une vaste littérature secondaire en un argument concis et convaincant, ils rendent un service louable. (…) Comme le suggère le sous-titre de leur livre, les auteurs se tournent vers l’éducation pour expliquer la transformation générale de la vie juive au cours des 15 premiers siècles de l’ère commune. Plus précisément, ils se concentrent sur l’injonction rabbinique qui demandait aux pères d’enseigner à leurs fils comment lire et étudier la Torah. L’alphabétisation, affirment-ils, a été le moteur de l’histoire juive. Elle a facilité la transformation économique des Juifs, qui sont passés du statut d’agriculteur à celui d’artisan, de commerçant et de financier. Elle a encouragé leur mobilité, puisqu’ils sont partis à la recherche d’endroits offrant des perspectives de rentabilité. Elle a déterminé leurs schémas de migration, en particulier leur regroupement dans les centres urbains animés du monde musulman, où ils ont pu prospérer dans une myriade d’activités urbaines telles que la banque, le commerce du bétail, la vente de vin, la fabrication de textiles, la tenue de magasins et la médecine. Elle explique également leur installation dispersée dans des dizaines de petites communautés à travers l’Europe chrétienne, où la demande d’emplois qualifiés était beaucoup plus limitée. Elle est même indirectement responsable du déclin de la population juive. Botticini et Eckstein suggèrent que les analphabètes étaient considérés comme des parias dans la société juive et qu’un pourcentage important d’entre eux a choisi d’échapper au dénigrement et à l’ostracisme social en embrassant le christianisme et l’islam, où l’analphabétisme restait la norme. Selon les auteurs, une fois que la transformation professionnelle et résidentielle de l’agriculture a été achevée, il n’y a pas eu de retour en arrière. Les Juifs ont payé un prix élevé pour leur société alphabétisée. Les normes culturelles juives exigeaient l’entretien des synagogues et des écoles, et présumaient que les familles renonceraient à des années de revenus potentiels de leurs fils pour les maintenir à l’école. Lorsque les économies urbaines se sont effondrées, comme ce fut le cas en Mésopotamie et en Perse à la suite de la conquête mongole, la pratique du judaïsme est devenue intenable, ce qui a entraîné une défection généralisée par conversion à l’islam. En conséquence, les Juifs sont devenus « une petite population de gens très alphabétisés, qui ont continué à chercher des occasions de rentabiliser leur investissement dans l’alphabétisation ». La théorie des auteurs peut laisser certains un peu mal à l’aise, y compris ceux qui ont rationalisé la propension des Juifs à prêter de l’argent dans l’Angleterre, la France et l’Allemagne médiévales comme une réponse logique à des autorités antagonistes qui les ont systématiquement coupés d’autres possibilités économiques. (…) Botticini et Eckstein (…) insistent au contraire sur le fait que les Juifs étaient naturellement attirés par le prêt d’argent parce qu’il était lucratif et parce qu’ils possédaient quatre avantages culturels et sociaux significatifs qui prédisposaient à leur succès. Tout d’abord, le judaïsme rabbinique mettait l’accent sur l’éducation ; l’alphabétisation et le calcul étaient des compétences indispensables pour prêter de l’argent. Les Juifs pouvaient également compter sur d’autres avantages intrinsèques, notamment un capital important, des réseaux de parenté étendus et des tribunaux et chartes rabbiniques qui fournissaient des mécanismes d’application de la loi et d’arbitrage en cas de défaut de paiement et de litige. Les auteurs ajoutent que si les mauvais traitements, les lois discriminatoires et les expulsions ont souvent été motivés par la prédominance des Juifs dans le secteur du prêt d’argent, ils n’ont joué qu’un rôle limité, voire nul, dans la promotion de cette spécialisation professionnelle. La pertinence du déterminisme culturel fait l’objet d’un débat vigoureux dans les cercles intellectuels (…) La relative rareté des preuves que Botticini et Eckstein rassemblent pour étayer leur argument en faveur de l’alphabétisation est particulièrement préoccupante. Les déclarations talmudiques sur l’importance de l’éducation peuvent facilement, et à tort, être interprétées comme descriptives plutôt que prescriptives, et les auteurs surestiment sans doute l’influence des rabbins sur les comportements et l’autodéfinition des masses juives. Ils semblent être sur un terrain plus solide lorsqu’ils ont recours aux documents variés de la Genizah du Caire, mais ils ne consacrent pratiquement aucune attention aux tendances de l’éducation juive en Europe chrétienne. Ils ne disent pas non plus dans quelle mesure l’enseignement de l’arithmétique et de la lingua franca complétait un programme scolaire destiné à promouvoir l’aptitude à lire et à interpréter les livres saints en hébreu et en araméen. L’enseignement dans ces domaines aurait un impact direct sur la capacité des Juifs à fonctionner dans une économie urbaine. Il ne fait aucun doute que les taux de fréquentation des écoles juives et les normes des programmes scolaires variaient selon les lieux et au fil du temps. Jonathan B. Krasner
Botticini et Eckstein affirment que la plupart des Juifs de l’Antiquité étaient des agriculteurs qui n’avaient pas besoin de savoir lire et écrire pour gagner leur vie. Lorsque le judaïsme s’est reformé autour de l’étude des textes après la destruction du Temple en 70 de notre ère, les parents ont été contraints de payer des frais de scolarité s’ils voulaient que leurs enfants restent juifs. Selon Botticini et Eckstein, au cours des six siècles suivants, la population juive a chuté de 5,5 à 1,2 million de personnes parce que seuls les garçons issus de familles particulièrement engagées, ou ceux dont les fils avaient l’intelligence et l’assiduité nécessaires pour étudier les textes juridiques, payaient pour envoyer leurs enfants à l’école. Tous les autres se sont convertis au christianisme (…) Botticini et Eckstein appuient leur modèle sur des « découvertes archéologiques qui documentent le calendrier de construction des synagogues » dans lesquelles les enfants pouvaient être éduqués. Ils expliquent que « les premières preuves archéologiques de l’existence d’une synagogue en Terre d’Israël » remontent au milieu du Ier siècle de l’ère chrétienne. Un certain nombre de synagogues palestiniennes antérieures à la destruction ont été identifiées, la plus ancienne découverte à ce jour, à Modi’in, datant du début du IIe ou de la fin du IIIe siècle avant J.-C. Ce qui nous amène à la question de savoir si la sélection opérée par Botticini et Eckstein a jamais eu lieu. Certains chiffres cités par Botticini et Eckstein sont tout simplement erronés. Par exemple, ils résument les conclusions des historiens de l’Antiquité Seth Schwartz et Gildas Hamel, et de l’archéologue Magen Broshi, en disant que « la Terre d’Israël n’abritait pas plus d’un million de Juifs ». Schwartz a en fait écrit : « La Palestine a atteint sa population prémoderne maximale durable d’environ un million d’habitants au milieu du premier siècle. Il est probable que la moitié de cette population était juive ». Ainsi, Botticini et Eckstein ne tiennent pas compte de l’expression « environ la moitié » de Schwartz pour une population d’un million de Juifs. Ils supposent alors qu’il y avait en fait 2,5 millions de Juifs en Israël. Il n’existe aucun recensement précis des Juifs de l’Antiquité. Les estimations selon lesquelles pas plus d’un million de personnes auraient pu vivre sur la terre d’Israël au premier siècle ont été calculées à partir des surfaces cultivables et des rendements des récoltes. Et rien ne permet de penser que l’ancien Israël avait la capacité d’importer les volumes gargantuesques de préparation pour falafel qui auraient été nécessaires pour nourrir une population de plus d’un million d’habitants. Botticini et Eckstein choisissent, sans justification, l’estimation « prudente » d’un démographe contemporain de 4,5 millions de Juifs au total dans le monde antique. Ils ajoutent ensuite allègrement jusqu’à un million de Juifs supplémentaires pour atteindre leur chiffre de 5 à 5,5 millions. Mais le fait de représenter graphiquement un chiffre non étayé, comme ils le font, ne rend pas ce chiffre exact. Si nous acceptons des estimations plus prudentes de 2 ou même 2,5 millions de Juifs dans le monde avant l’an 70, la perte d’environ un million pendant et après les brutales guerres judéo-romaines, lorsqu’on suppose que de nombreux craignant Dieu de langue grecque et latine ont abandonné le judaïsme, n’est pas surprenante. À en juger par les preuves qu’ils fournissent, le modèle élégant de Botticini et Clark, selon lequel les choix des anciens agriculteurs juifs confrontés à des frais de scolarité élevés ont produit un événement de sélection spectaculaire, ne tient pas la route. (…) Botticini et Eckstein appuient leur hypothèse sur l’information, répétée par Clark, selon laquelle « les passages des premiers écrivains chrétiens et des Pères de l’Église indiquent que la plupart des juifs convertis au christianisme étaient analphabètes et pauvres ». Cette information, cependant, est citée dans des travaux périmés d’Adolf von Harnack, théologien allemand du début du siècle dont l’antijudaïsme a ouvert la voie à l’antisémitisme nazi et qui, en tant que président de la société Kaiser Wilhelm, a créé le tristement célèbre Institut pour l’anthropologie, l’hérédité humaine et l’eugénisme. Diana Muir Appelbaum and Paul S. Appelbaum
David Mamet écrit qu’il y a deux sortes d’endroits dans le monde : les endroits où les Juifs ne peuvent pas aller et les endroits où les Juifs ne peuvent pas rester. Comment les Juifs ont-ils donc survécu ? Selon Maristella Botticini et Zvi Eckstein, auteurs de La Poignée d’élus : Comment l’éducation a façonné l’histoire juive, 70-1492 (Princeton University Press, 2012), la réponse a autant à voir avec l’économie qu’avec la spiritualité. Cinq événements majeurs ont bouleversé le monde juif au cours de ces 1422 années : la destruction du second temple, la montée du christianisme, la naissance de l’islam, la naissance de l’Europe chrétienne moderne et l’invasion mongole. Étant donné que les Juifs qui ne sont pas professeurs d’université (et il y en a) considèrent souvent les événements sous l’angle de « Est-ce bon ou mauvais pour les Juifs ? », je vais résumer l’opinion des auteurs. Je résumerai les conclusions des auteurs de cette manière. La destruction du Temple et la montée du christianisme – mauvais pour les Juifs. Après l’an 70, les prêtres qui dirigeaient le Temple n’étaient plus au pouvoir, cédant la place aux rabbins et aux érudits juifs qui ont rédigé le Talmud au cours des siècles suivants. À l’époque, la plupart des Juifs (et la plupart des autres personnes) étaient des agriculteurs. Après la destruction du Temple, la population juive mondiale a diminué, non seulement à cause des guerres et des massacres, mais aussi pour des raisons économiques. Si vous étiez pieux et riche, vous étiez susceptible de payer l’éducation juive de vos fils. Si vous étiez spirituel mais que vous n’aviez pas beaucoup d’argent, vous deveniez chrétien ou rejoigniez l’un des autres groupes populaires qui n’exigeaient pas une éducation juive coûteuse. À quoi sert un fils qui sait lire la Torah si vous voulez seulement qu’il aide à récolter les grenades ? C’est donc l’économie qui a dicté qui restait et qui s’éloignait. L’essor de l’empire islamique : étonnamment, les Juifs en ont profité. Lorsque Mahomet est apparu au septième siècle, les Juifs ont commencé à quitter les fermes pour s’installer dans les nouvelles villes construites par les musulmans, notamment Bagdad et Damas. Ils se sont alors lancés dans des activités bien plus lucratives que l’agriculture, notamment le commerce international et le prêt d’argent. Dans ces domaines, les Juifs bénéficiaient d’avantages considérables : alphabétisation universelle, langue et culture religieuse communes, et possibilité de faire respecter les contrats, même à des milliers de kilomètres de distance. Le monde musulman s’étendait alors de l’Espagne et du Portugal à la moitié de l’Asie. Partout dans le monde arabe, les Juifs pouvaient se déplacer, commercer ou s’installer librement et bénéficier de leurs vastes réseaux religieux et familiaux. Selon des documents vieux de plusieurs milliers d’années découverts dans la Genizah du Caire, les documents commerciaux liant les commerçants juifs à travers le monde arabe portaient au verso des décisions de tribunaux juifs. Les Juifs pouvaient donc envoyer de l’argent ou des marchandises sur des milliers de kilomètres, avec la certitude que leurs investissements seraient en sécurité. Le christianisme européen à partir de l’an 1000 : pas si bon pour les Juifs. Si la culture islamique a offert aux Juifs un accueil chaleureux, l’Europe occidentale a été une bénédiction mitigée. Il semble qu’à quelques dizaines de kilomètres à la ronde, un prince ou un roi différent soit aux commandes, avec des lois différentes, des conditions de citoyenneté différentes et des attitudes différentes à l’égard des Juifs. Certains endroits étaient extrêmement accueillants pour les Juifs, d’autres moins. Les monarques pouvaient expulser leurs populations juives en période de difficultés économiques, afin que les citoyens païens n’aient pas à rembourser leurs emprunts, pour les accueillir à nouveau lorsque la situation économique s’améliorait. Contrairement à ce que l’on croit souvent, Botticini et Eckstein écrivent que les juifs n’ont pas été contraints de se lancer dans le prêt d’argent parce qu’ils ont été chassés des guildes. Sous la domination musulmane et chrétienne, les Juifs se sont lancés dans la finance des siècles avant même que les guildes ne soient fondées. En d’autres termes, les juifs ont choisi des carrières dans la finance de la même manière que les meilleurs et les plus brillants de la culture américaine moderne se sont dirigés vers Wall Street et les écoles de commerce. L’Europe occidentale a donc été une bénédiction pour les Juifs. D’un côté, ils pouvaient faire des affaires, vivre leur vie juive et fonder certaines des meilleures académies talmudiques de l’histoire juive. Hélas, les Juifs sont également victimes de massacres et d’expulsions, qui se produisent avec une régularité terrifiante au fil des siècles, et qui culminent avec l’Inquisition espagnole de 1492. Pendant ce temps, au Moyen-Orient, l’invasion mongole du XIIIe siècle est néfaste pour les Juifs. Oh, vraiment, vraiment mauvais pour les Juifs. La liberté et la sécurité relatives dont jouissaient les Juifs sous la domination musulmane se sont brutalement arrêtées au début du XIIIe siècle, lorsque Gengis Khan et ses maraudeurs ont attaqué et rasé la majeure partie de la civilisation urbaine que les musulmans avaient si laborieusement bâtie au fil des siècles. Avec la destruction des villes et des institutions urbaines, les Juifs qui ont eu la chance de survivre à l’invasion mongole n’ont eu d’autre choix que de retourner à l’agriculture. Certains sont restés, d’autres se sont convertis à l’islam. Le nombre de Juifs dans les anciennes terres arabes restera donc faible pendant des centaines d’années, jusqu’à ce que toutes les traces de la civilisation mongole soient effacées et que le monde commence à se reconstruire. Eggpen
Pourquoi l’éducation a-t-elle été si importante pour le peuple juif ? L’auteure Maristella Botticini affirme qu’une norme religieuse unique promulguée au sein du judaïsme il y a deux millénaires a rendu l’alphabétisation des hommes universelle chez les juifs plusieurs siècles avant qu’elle ne le soit pour le reste de la population mondiale. (…) En mettant l’accent sur l’alphabétisation au fil du temps, les juifs se sont préparés à la réussite économique, affirment Mme Botticini et Zvi Eckstein, auteurs du livre « La Poignée d’élus: Comment l’éducation a façonné l’histoire juive ». (…) Dans leur livre, qu’ils décrivent comme une réinterprétation de l’histoire sociale et économique juive des années 70 à 1492 après J.-C., Botticini et Eckstein affirment que les Juifs sont devenus au cours de ces années « le petit nombre d’élus » – une population démographiquement restreinte d’individus vivant dans des centaines d’endroits à travers le monde et se spécialisant dans les professions les plus qualifiées et les plus urbaines. Ces professions bénéficient de l’alphabétisation et de l’éducation. (…) D’un point de vue économique, écrivent les auteurs, il était coûteux pour les agriculteurs juifs vivant dans une société agraire de subsistance d’investir une part importante de leurs revenus dans l’alphabétisation imposée par les rabbins. Une économie essentiellement agraire n’avait guère besoin de personnes instruites. Par conséquent, une partie des agriculteurs juifs ont choisi de ne pas investir dans l’éducation religieuse de leurs fils et se sont convertis à d’autres religions, comme le christianisme, qui n’imposait pas cette norme à ses adeptes. « Au cours de cette période talmudique (3e-6e siècles), alors que la population juive s’alphabétisait de plus en plus, elle ne cessait de diminuer en raison des conversions, des décès liés à la guerre et du déclin général de la population », explique M. Botticini à JNS.org. « Cette situation menaçait l’existence de l’importante communauté juive en Eretz Israël (la terre d’Israël) et dans d’autres lieux où des communautés juives importantes avaient existé dans l’Antiquité, comme l’Afrique du Nord, la Syrie, le Liban, l’Asie mineure, les Balkans et l’Europe de l’Ouest. Au VIIe siècle, le centre démographique et intellectuel de la vie juive s’est déplacé d’Eretz Israël vers la Mésopotamie, où vivent désormais environ 75 % des juifs du monde ». Comme presque partout ailleurs dans le monde, la Mésopotamie avait une économie basée sur l’agriculture, mais cela a changé avec la montée de l’Islam au cours du 7ème siècle et les conquêtes musulmanes conséquentes sous les califes au cours des deux siècles suivants. L’établissement d’un vaste empire s’étendant de la péninsule ibérique à l’Inde a conduit à une vaste urbanisation et à la croissance de l’industrie et du commerce au Moyen-Orient, à l’introduction de nouvelles technologies, au développement de nouvelles industries produisant un large éventail de biens, à l’expansion du commerce local et du commerce à longue distance, et à la croissance de nouvelles villes. (…) Le livre n’occulte pas les persécutions qui ont eu lieu au cours des 15 siècles d’histoire juive qu’il examine, précise M. Eckstein. « Lorsque [la persécution des Juifs] s’est produite, nous l’avons consignée dans notre livre », déclare-t-il. « Mais ce que nous disons est différent. Il y a eu des époques et des lieux où il n’y avait pas de restrictions légales ou économiques pour les Juifs. Non pas parce que nous le disons, mais parce que cela est amplement documenté par de nombreux historiens. Les Juifs pouvaient posséder des terres et être agriculteurs dans l’empire musulman omeyyade et abbasside. Il en va de même dans l’Europe du haut Moyen Âge. Si ces restrictions n’existaient pas dans les lieux et à l’époque que nous couvrons, elles ne peuvent expliquer pourquoi les Juifs ont abandonné l’agriculture et se sont lancés dans le commerce, la finance et la médecine. Il doit y avoir un autre facteur qui a conduit les Juifs à devenir le peuple qu’ils sont aujourd’hui. Dans ‘La Poignée d’élus’, nous proposons une hypothèse alternative et nous vérifions ensuite si cette hypothèse est cohérente avec les preuves historiques ».Why has education been so important to the Jewish people? Author Maristella Botticini says a unique religious norm enacted within Judaism two millennia ago made male literacy universal among Jews many centuries earlier than it was universal for the rest of the world’s population. (…) Emphasizing literacy over time set Jews up for economic success, say Botticini and Zvi Eckstein, authors of the 2012 book “The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History.” (…) In their book, which they describe as a reinterpretation of Jewish social and economic history from the years 70 to 1492 A.D., Botticini and Eckstein say that Jews over those years became “the chosen few”—a demographically small population of individuals living in hundreds of locations across the globe and specializing in the most skilled and urban occupations. These occupations benefit from literacy and education. (…) From an economic point of view, the authors write, it was costly for Jewish farmers living in a subsistence agrarian society to invest a significant amount of their income on the rabbis’ imposed literacy requirement. A predominantly agrarian economy had little use for educated people. Consequently, a proportion of Jewish farmers opted not to invest in their sons’ religious education and instead converted to other religions, such as Christianity, which did not impose this norm on its followers. “During this Talmudic period (3rd-6th centuries), just as the Jewish population became increasingly literate, it kept shrinking through conversions, as well as war-related deaths and general population decline,” Botticini tells JNS.org. “This threatened the existence of the large Jewish community in Eretz Israel (the land of Israel) and in other places where sizable Jewish communities had existed in antiquity, such as North Africa, Syria, Lebanon, Asia Minor, the Balkans, and Western Europe. By the 7th century, the demographic and intellectual center of Jewish life had moved from Eretz Israel to Mesopotamia, where roughly 75 percent of world Jewry now lived.” Like almost everywhere else in the world, Mesopotamia had an agriculture-based economy, but that changed with the rise of Islam during the 7th century and the consequent Muslim conquests under the caliphs in the following two centuries. Their establishment of a vast empire stretching from the Iberian Peninsula to India led to a vast urbanization and the growth of manufacture and trade in the Middle East; the introduction of new technologies; the development of new industries that produced a wide array of goods; the expansion of local trade and long-distance commerce; and the growth of new cities. (…) The book does not whitewash the persecution that took place during the 15 centuries of Jewish history it examines, Eckstein says. “When [persecution of Jews] happened, we record [it] in our book,” he says. “[But] what we say is something different. There were times and locations in which legal or economic restrictions on Jews did not exist. Not because we say so, but because it is amply documented by many historians. Jews could own land and be farmers in the Umayyad and Abbasid Muslim empire. The same is true in early medieval Europe. If these restrictions did not exist in the locations and time period we cover, they cannot explain why the Jews left agriculture and entered trade, finance, medicine. There must have been some other factor that led the Jews to become the people they are today. In ‘The Chosen Few’ we propose an alternative hypothesis and we then verify whether this hypothesis is consistent with the historical evidence.” Jewish News Service
En fait, ce que nous avons voulu démontrer, ma collègue Maristella Botticini, de la Bocconi, et moi, c’est que l’obligation d’étudier a un coût, et oblige donc l’individu rationnel à rechercher une compensation pour obtenir un retour sur investissement. Dans le cas des juifs, le problème se pose après la destruction du Temple de Jérusalem, en 70 de l’ère courante. La caste des prêtres qui constituait alors l’élite perd le pouvoir au profit de la secte des pharisiens, qui accorde une grande importance à l’étude. C’est de cette secte que vont sortir les grands rabbis, ceux qui vont pousser les juifs à se concentrer sur l’étude de la Torah, un texte dont la tradition veut qu’elle ait été écrite par Moïse sous la dictée de Dieu. Vers l’an 200, obligation est ainsi faite aux pères de famille d’envoyer leurs fils dès l’âge de 6 ans à l’école rabbinique pour apprendre à lire et étudier la fameuse Torah. Or l’essentiel des juifs sont des paysans, et pour les plus pauvres, cette obligation pèse très lourd car elle les prive de bras pour travailler aux champs. Beaucoup vont alors préférer se convertir au christianisme, d’où, on le voit dans les statistiques de l’époque, une baisse drastique de la population juive au Proche-Orient à partir du IIIe siècle alors que, jusqu’à la destruction du Temple, cette religion était en augmentation constante et multipliait les convertis. Pour ceux qui ont accepté le sacrifice financier que représente la dévotion, il va s’agir de valoriser leur effort. Or autour d’eux, ni les chrétiens ni, plus tard, les musulmans n’imposent à leurs enfants d’apprendre à lire et à écrire. Les juifs bénéficient donc d’un avantage compétitif important. C’est ainsi un juif converti à l’islam qui a servi de scribe à Mahomet et aurait mis par écrit pour la première fois le Coran. (…) Notre étude, fondée sur l’évolution économique et démographique du peuple juif, de l’Antiquité à la découverte de l’Amérique, remet en cause en fait la plupart des théories avancées jusqu’ici. Si les juifs sont médecins, juristes ou banquiers plus souvent qu’à leur tour, ce n’est pas parce qu’ils sont persécutés et condamnés à s’exiler régulièrement, comme l’a avancé l’économiste Gary Becker, ou parce qu’ils n’avaient pas le droit d’être agriculteurs, comme l’a soutenu Cecil Roth. Car si dans certains pays, on les a empêchés de posséder des terres, c’était bien après qu’ils aient massivement abandonné l’agriculture, et s’ils ont pu être persécutés, cela ne justifie pas qu’ils soient devenus médecins ou juristes : les Samaritains, très proches des juifs et eux aussi traités comme des parias, sont demeurés paysans. De même, contrairement à ce que dit Max Weber, ce n’est pas parce qu’un juif ne peut pas être paysan du fait des exigences de la Loi juive. Les juifs du temps du Christ la respectaient alors qu’ils étaient majoritairement occupés à des travaux agricoles et à la pêche. C’est dans l’Orient musulman, sous les Omeyyades et les Abbassides, à un moment où ils sont particulièrement valorisés, que les juifs s’installent massivement dans les villes et embrassent des carrières citadines. Pourquoi ? Parce qu’ils peuvent alors tirer parti du fait d’être lettrés. D’un point de vue purement économique, il est alors beaucoup plus rentable de devenir marchand ou scientifique que de labourer la terre. D’où notre théorie : si les juifs sont devenus citadins et ont occupé des emplois indépendants de l’agriculture, c’est d’abord parce qu’ils étaient formés. Et s’ils étaient formés, c’est que leur religion exigeait qu’ils le soient. (…) ces professions étaient beaucoup plus rentables que le travail de paysan. Pour un juif du Moyen Âge, l’apprentissage de la Torah allait de pair avec le fait de faire des affaires. Rachi, le grand commentateur du Talmud, était un entrepreneur qui possédait des vignes. Ses quatre fils, tous érudits, se sont installés dans quatre villes différentes où ils ont tous fait du business, notamment de prêts d’argent, tout en étant rabbins. Grâce à leur connaissance des langues et leurs réseaux familiaux, les juifs ont pu rentabiliser leur formation, le fait de savoir lire et écrire, mais aussi raisonner, plus aisément que d’autres communautés. (…) Il est essentiel que la culture fasse partie intégrante de l’éducation quotidienne. Et en cela, la mère joue un rôle essentiel, toutes les études le montrent. C’est elle qui transmet les valeurs fondamentales. La probabilité que vous alliez à l’université est plus importante si votre mère a été elle-même à l’université. Donc, le fait que la mère ait un minimum d’éducation a représenté très tôt un avantage compétitif par rapport aux autres communautés religieuses où la femme n’en recevait pas. Nous étudions actuellement la période allant de la Renaissance à l’Holocauste. Et nous avons déjà découvert ceci : en Pologne, au XVIIe siècle, la population juive a fortement progressé par rapport à la population chrétienne. Pourquoi ? Tout simplement parce que la mortalité infantile y était plus faible. Conformément à l’enseignement du Talmud, les enfants bénéficiaient en effet d’un soin tout particulier. Les femmes gardaient leur enfant au sein plus longtemps que les chrétiennes, et elles s’en occupaient elles-mêmes. Voilà un exemple tout simple des effets que peut avoir l’éducation. Zvi Eckstein
Pour faire face au danger que le christianisme et la romanisation faisaient courir à la survie du judaïsme, les Pharisiens imposèrent une nouvelle forme de dévotion. Tout chef de famille, pour rester fidèle à la foi judaïque, se devait d’envoyer ses fils à l’école talmudique, afin de perpétuer et d’approfondir, par un travail cumulatif de commentaire, la connaissance de la Torah. Cette nouvelle obligation religieuse a eu des répercussions socio-économiques considérables. Envoyer ses fils à l’école représentait un investissement coûteux qui n’était pas à la portée de la majorité des juifs, simples paysans comme les autres populations du Moyen-Orient au milieu desquelles ils vivaient. Ceux qui n’en avaient pas les moyens et restèrent paysans, s’éloignèrent du judaïsme. Ils se convertirent souvent au christianisme. C’est ce qui explique l’effondrement de la population juive durant l’Antiquité tardive. Ceux qui tenaient au contraire à remplir leurs obligations religieuses, durent choisir des métiers plus rémunérateurs. Ils devinrent commerçants, artisans, médecins et surtout financiers. Les juifs ne se sont pas tournés vers ces métiers urbains parce qu’on leur interdisait l’accès à la terre, comme on l’a dit souvent, mais pour pouvoir gagner plus d’argent et utiliser en même temps leurs compétences de lettrés. Ils étaient capables désormais de tenir des comptes, écrire des ordres de paiement, etc… (…) S’ils s’imposent partout dans le crédit, ce n’est pas parce que l’Eglise interdisait aux chrétiens le prêt à intérêt (en réalité l’islam et le judaïsme lui imposaient des restrictions comme le christianisme), mais parce qu’ils ont à la fois la compétence et le réseau pour assurer le crédit, faire circuler les ordres de paiements et les marchandises précieuses du fond du monde musulman aux confins de la chrétienté. (…) c’est souvent à la demande des seigneurs ou évêques locaux qu’ils étaient venus s’installer dans les villes chrétiennes, parce qu’on recherchait leur savoir faire pour développer les échanges et l’activité bancaire. Les premières mesures d’expulsion des juifs par des princes chrétiens à la fin du XIII° siècle semblent avoir été guidées par la volonté de mettre la main sur leurs richesses beaucoup plus que par le désir de les convertir. (…) C’est pour des raisons religieuses que le judaïsme s’est imposé brusquement un investissement éducatif coûteux qui le singularise parmi les grandes religions du livre. Car ni le Christianisme qui s’est donné une élite particulière, à l’écart du monde, vouée à la culture écrite, ni l’Islam n’ont imposé à leur peuple de croyants un tel investissement dans l’alphabétisation. Cet investissement a eu l’effet d’une véritable sélection darwinienne. Il a provoqué une réorientation complète de l’activité économique du monde juif en même temps qu’il faisait fondre sa masse démographique. Il a surtout fait fleurir, par le miracle de l’éducation, des aptitudes intellectuelles précieuses qui en ont fait durablement une minorité recherchée et jalousée. André Burguière
Vous avez dit « peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur » ?
Et si de Gaulle ou le premier Mohamed venu de nos banlieues avaient vu juste ?
Isaiah Berlin, Jerome Kern, Richard Rodgers, Harold Arlen, Hammerstein, Gershwin, Bernstein, Copland, Glass, Robert Zimmerman (alias Bob Dylan), Leonard Cohen, Elvis Presley, David Marks (Beach boys), Simon & Garfunkel, Jefferson Airplane, The Mamas & the Papas, Robby Krieger, Phil Spector, Melanie (Safka), Joey Ramone, Randy Meisner, Randy Newman, Lou Reed, Iggy Pop, (né James Osterberg) Beastie Boys, Pat Benatar (née Patricia Mae Andrzejewski), Blood, Sweat & Tears, David Lee Roth, Blue Öyster Cult, Kiss, Guns N’ Roses, The Cars, Harry Connick, Jr., Country Joe and the Fish, Neil Diamond, Chris Isaak, Janis Ian, Billy Joel, Carole King (née Carole Klein), Carly Simon, Linda Ronstadt, Courtney Love, Juice Newton (née Judith Kay Cohen), Pink, Barbra Streisand, Leonard Cohen, Abel Meeropol (« Strange fruit » pour Billie Holliday), Benny Goodman …
Goldwyn, Mayer, Warner, Cohn (Columbia), Zukor (Paramount), Fritz Lang, Ernst Lubitsch, Erich von Stroheim, Greorge Cukor, Cecil B. DeMille, Stanley Donen, Otto Preminger, Hedy Lamarr, frères Marx, Douglas Fairbanks (né Douglas Ullman), Fred Astaire (né Frederick Austerlitz), Danny Kaye, Paulette Goddard, Kirk Douglas, Michael Douglas, Dustin Hoffman, Robert Wise, Jerry Lewis, Mel Brooks, Sydney Pollack, Milos Forman, Stanley Kubrick, Steven Spielberg, Oliver Stone, Woody Allen, Scarlett Johansson, Natalie Portman, Sarah Michelle Gellar, Kate Hudson, Gwyneth Paltrow, Joaquin Phoenix, Winona Ryder, Alicia Silverstone, Tori Spelling, Patricia Arquette, Lisa Bonet, Phoebe Cates, Robert Downey Jr., David Duchovny, Daryl Hannah, Lisa Kudrow, Jennifer Jason Leigh, ulia Louis-Dreyfus, Cindy Margolis, Sarah Jessica Parker , Sean Penn, Adam Sandler, Rob Schneider, Ben Stiller, Rosanna Arquette, Jamie Lee Curtis, Carrie Fisher, Jerry Seinfeld, Howard Stern, Debra Winger , James Caan, Richard Dreyfuss, Harrison Ford, Goldie Hawn, Henry Winkler, Elliott Gould, Harvey Keitel, Leonard Nimoy, Gene Wilder, Lauren Bacall, Lenny Bruce, Tony Curtis, Paul Newman, Shelley Winters, Peter Falk, Lee J. Cobb, Sammy Davis, Jr., Marilyn Monroe (par conversion)…
Joe Shuster et Jerome Siegel (Superman), Joe Simon (Captain America), Bill Finger et Bob Kane (Batman), Stan Lee (Spider-Man, X-Men, The Hulk, Fantastic Four), Jack Kirby (Captain America, Hulk), Max Fleischer (Popeye, Betty Boop), Ralph Bakshi (Fritz the Cat), Art Spiegelman (Maus), Harvey Kurtzman, Al Jaffee, Al Feldstein, Will Elder et William Gaines (MAD) …
Abraham, Moïse, Salomon, Jésus, Saul de Tarse (alias Paul) …
A l’heure où, entre le prix Nobel de Bob Dylan et l’hommage planétaire à Léonard Cohen, la chanson populaire reçoit littéralement ses lettres de noblesse …
Et où l’ONU comme nos premiers humoristes venus n’ont que les juifs à la bouche …
Comment ne pas voir …
Derrière la forêt que cachent ces deux formidables arbres …
A savoir sans compter notre Jean-Jacques Goldman national contraint devant le trop-plein de célébrité (et d’imposition ?) de s’exiler à Londres …
La confirmation – sans parler des prix Nobel de science (24% pour moins de 0.2% de la population mondiale)– dans un domaine de plus …
Du fameux mot du général de Gaulle comme, de nos banlieues aux territoires dits « occupés », de l’intution des nouveaux damnés de la terre …
Surtout lorsque l’on comprend avec l’éclairant ouvrage de Maristella Botticini et Zvi Eckstein …
L’avance plus que millénaire suite à la destruction de leur Temple par les Romains et, abandonnant peu à peu l’agriculture, le réinvestissement dans l’étude de la « patrie portable » qu’était devenue leur Torah …
Qu’ils avaient prise dans l’alphabétisation de leurs enfants et, la surinstruction aidant, dans la spécialisation dans les professions les plus profitables (artisanat, commerce, prêt et médecine) …
D’où aussi la multimillénaire et souvent meurtrièrejalousie que, comme plus tard leurs cousins protestants, ils ont inévitablement suscitée tout au long de leur histoire dans les sociétés où ils avaient le malheur de prospérer… ?
Avec leur remarquable « La poignée d’élus », les historiens Maristella Botticini et Zvi Ekcstein développent avec brio une thèse qui dédramatise la dispersion du peuple juif. Dans le sillage de Marc Bloch, ils montrent que la religion concerne aussi l’infrastructure des sociétés, pas seulement leur superstructure.
Une avalanche de livres récents sur l’histoire du peuple juif a mis à mal l’image romantique du juif errant cherchant vainement, à travers le monde, un refuge et un toit loin de la Terre Sainte, après la destruction du Grand Temple de Jérusalem par Titus, le fils de l’Empereur Vespasien. Armés d’une solide connaissance des sources, Maristella Botticini et Zvi Ekcstein développent avec brio une thèse qui finit de dédramatiser la dispersion du peuple juif.
Au début de l’ère chrétienne, la population juive, présente en Palestine, en Mésopotamie et sur la rive africaine de la Méditerranée compte prés de 6 millions d’âmes. Cinq siècles plus tard, il n’en reste à peine plus d’un million. La désintégration du monde urbain et la peste justinienne (au VI° et VII° siècles) ont provoqué un fort recul du peuplement dans tout le bassin méditerranéen mais pas au point d’expliquer un tel effondrement. En réalité, l’anéantissement des activistes juifs (les résistants de Massada) par l’intervention romaine, la disparition des zélotes ainsi que des notables religieux qui assuraient le service du Grand Temple, avaient fortifié en Palestine le pouvoir de la seule élite juive épargnée, les Pharisiens, c’est-à-dire les lettrés. Pour faire face au danger que le christianisme et la romanisation faisaient courir à la survie du judaïsme, les Pharisiens imposèrent une nouvelle forme de dévotion. Tout chef de famille, pour rester fidèle à la foi judaïque, se devait d’envoyer ses fils à l’école talmudique, afin de perpétuer et d’approfondir, par un travail cumulatif de commentaire, la connaissance de la Torah. Cette nouvelle obligation religieuse a eu des répercussions socio-économiques considérables. Envoyer ses fils à l’école représentait un investissement coûteux qui n’était pas à la portée de la majorité des juifs, simples paysans comme les autres populations du Moyen-Orient au milieu desquelles ils vivaient. Ceux qui n’en avaient pas les moyens et restèrent paysans, s’éloignèrent du judaïsme. Ils se convertirent souvent au christianisme. C’est ce qui explique l’effondrement de la population juive durant l’Antiquité tardive. Ceux qui tenaient au contraire à remplir leurs obligations religieuses, durent choisir des métiers plus rémunérateurs. Ils devinrent commerçants, artisans, médecins et surtout financiers. Les juifs ne se sont pas tournés vers ces métiers urbains parce qu’on leur interdisait l’accès à la terre, comme on l’a dit souvent, mais pour pouvoir gagner plus d’argent et utiliser en même temps leurs compétences de lettrés. Ils étaient capables désormais de tenir des comptes, écrire des ordres de paiement, etc…
A partir du IX° siècle, la diaspora juive se reconstitue mais avec une répartition géographique différente. Toujours très présente en Mésopotamie et bientôt dans tout le monde musulman, elle commence à s’installer dans l’Europe chrétienne où elle tisse un réseau de plus en plus dense de petites communautés juives qui recouvre le réseau urbain en plein réveil. Les « juiveries » sont de taille modeste car les juifs craignent de se faire concurrence dans ces métiers très spécialisés. En revanche, le grand nombre de ces implantations qui peuvent se mettre en réseau, fait leur force. Dans un espace où la circulation est difficile, risquée, le fait d’avoir des correspondants, à l’autre bout du monde connu, en qui l’on peut avoir pleine confiance parce que la moindre irrégularité commerciale ou financière les exclurait de leur communauté, a donné aux juifs un avantage considérable.
S’ils s’imposent partout dans le crédit, ce n’est pas parce que l’Eglise interdisait aux chrétiens le prêt à intérêt (en réalité l’islam et le judaïsme lui imposaient des restrictions comme le christianisme), mais parce qu’ils ont à la fois la compétence et le réseau pour assurer le crédit, faire circuler les ordres de paiements et les marchandises précieuses du fond du monde musulman aux confins de la chrétienté. A part quelques cas assez rares d’intolérance religieuse, comme dans l’Espagne wisigothique, les juifs n’ont guère été l’objet de persécutions religieuses avant le XII° siècle. L’historien Berhard Blumenkranz avait daté les premiers pogroms de juifs en Occident (par exemple dans la vallée du Rhin) de la mise en mouvement des premières croisades.
Mais c’est souvent à la demande des seigneurs ou évêques locaux qu’ils étaient venus s’installer dans les villes chrétiennes, parce qu’on recherchait leur savoir faire pour développer les échanges et l’activité bancaire. Les premières mesures d’expulsion des juifs par des princes chrétiens à la fin du XIII° siècle semblent avoir été guidées par la volonté de mettre la main sur leurs richesses beaucoup plus que par le désir de les convertir.
Ce sont paradoxalement les mongols, pourtant eux-mêmes assez éclectiques au plan religieux et parfois tentés par le judaïsme, qui ont interrompu ce premier âge d’or de la diaspora juive, à partir du milieu du XIII° siècle, en ravageant le monde musulman. L’effondrement des principales villes a ruiné l’activité des juifs qui animaient les circuits d’échanges économiques et financiers. Ruinés, les juifs sont redevenus paysans et, ne pouvant plus assumer l’investissement scolaire exigé par le rabbinat, ils se sont assez vite islamisés. Cet effondrement a créé un véritable court circuit avec le réseau des implantations juives de l’Europe chrétienne. Il y aura, à l’époque moderne, un nouveau cycle de la diaspora juive qui va même gagner le Nouveau Monde ; mais un cycle au rythme heurté, perturbé par les expulsions, les procès de l’Inquisition et d’autres manifestations de l’intolérance chrétienne, en attendant des horreurs bien pires encore.
La façon dont Maristella Botticini et Zvi Eckstein ont rebattu les cartes de l’histoire, ô combien singulière, du peuple juif en lui appliquant un modèle inspiré par la réflexion économique, sera peut-être critiquée par certains spécialistes pour son schématisme démonstratif. Mais elle est fascinante. Marc Bloch, voulant critiquer le réductionnisme de certaines interprétations marxistes du rôle de l’Eglise au Moyen-Âge, affirmait que pour comprendre certaines époques, il fallait renoncer à considérer que la religion concerne toujours la superstructure et l’économie l’infrastructure. C’est parfois l’inverse. Ce livre nous en fournit une magnifique démonstration.
C’est pour des raisons religieuses que le judaïsme s’est imposé brusquement un investissement éducatif coûteux qui le singularise parmi les grandes religions du livre. Car ni le Christianisme qui s’est donné une élite particulière, à l’écart du monde, vouée à la culture écrite, ni l’Islam n’ont imposé à leur peuple de croyants un tel investissement dans l’alphabétisation. Cet investissement a eu l’effet d’une véritable sélection darwinienne. Il a provoqué une réorientation complète de l’activité économique du monde juif en même temps qu’il faisait fondre sa masse démographique. Il a surtout fait fleurir, par le miracle de l’éducation, des aptitudes intellectuelles précieuses qui en ont fait durablement une minorité recherchée et jalousée.
* Maristella Botticini et Zvi Eckstein, La poignée d’élus. Comment l’éducation a façonné l’histoire juive 70-1492 , Albin Michel, 425 p., 30 euros.
Dans « Une poignée d’élus », deux économistes expliquent les heureuses conséquences de l’apprentissage des textes sacrés par les enfants. Interview.
Catherine Golliau
Le Point
05/04/2016
Zvi Eckstein est doyen de l’École d’économie et de management du centre interdisciplinaire Herzliya en Israël.
Le Point.fr : Pour vous, si Albert Einstein a inventé la bombe atomique, c’est parce qu’il a dû, enfant, étudier le Talmud ?
Zvi Eckstein : C’est un raccourci très… raccourci, mais c’est un peu cela. En fait, ce que nous avons voulu démontrer, ma collègue Maristella Botticini, de la Bocconi, et moi, c’est que l’obligation d’étudier a un coût, et oblige donc l’individu rationnel à rechercher une compensation pour obtenir un retour sur investissement. Dans le cas des juifs, le problème se pose après la destruction du Temple de Jérusalem, en 70 de l’ère courante. La caste des prêtres qui constituait alors l’élite perd le pouvoir au profit de la secte des pharisiens, qui accorde une grande importance à l’étude. C’est de cette secte que vont sortir les grands rabbis, ceux qui vont pousser les juifs à se concentrer sur l’étude de la Torah, un texte dont la tradition veut qu’elle ait été écrite par Moïse sous la dictée de Dieu. Vers l’an 200, obligation est ainsi faite aux pères de famille d’envoyer leurs fils dès l’âge de 6 ans à l’école rabbinique pour apprendre à lire et étudier la fameuse Torah. Or l’essentiel des juifs sont des paysans, et pour les plus pauvres, cette obligation pèse très lourd car elle les prive de bras pour travailler aux champs. Beaucoup vont alors préférer se convertir au christianisme, d’où, on le voit dans les statistiques de l’époque, une baisse drastique de la population juive au Proche-Orient à partir du IIIe siècle alors que, jusqu’à la destruction du Temple, cette religion était en augmentation constante et multipliait les convertis. Pour ceux qui ont accepté le sacrifice financier que représente la dévotion, il va s’agir de valoriser leur effort. Or autour d’eux, ni les chrétiens ni, plus tard, les musulmans n’imposent à leurs enfants d’apprendre à lire et à écrire. Les juifs bénéficient donc d’un avantage compétitif important. C’est ainsi un juif converti à l’islam qui a servi de scribe à Mahomet et aurait mis par écrit pour la première fois le Coran.
Le sociologue Max Weber assure que la vie paysanne n’était pas adaptée aux exigences de la Loi juive et que cela a poussé ses fidèles vers les villes…
Je ne suis pas d’accord. Notre étude, fondée sur l’évolution économique et démographique du peuple juif, de l’Antiquité à la découverte de l’Amérique, remet en cause en fait la plupart des théories avancées jusqu’ici. Si les juifs sont médecins, juristes ou banquiers plus souvent qu’à leur tour, ce n’est pas parce qu’ils sont persécutés et condamnés à s’exiler régulièrement, comme l’a avancé l’économiste Gary Becker, ou parce qu’ils n’avaient pas le droit d’être agriculteurs, comme l’a soutenu Cecil Roth. Car si dans certains pays, on les a empêchés de posséder des terres, c’était bien après qu’ils aient massivement abandonné l’agriculture, et s’ils ont pu être persécutés, cela ne justifie pas qu’ils soient devenus médecins ou juristes : les Samaritains, très proches des juifs et eux aussi traités comme des parias, sont demeurés paysans. De même, contrairement à ce que dit Max Weber, ce n’est pas parce qu’un juif ne peut pas être paysan du fait des exigences de la Loi juive. Les juifs du temps du Christ la respectaient alors qu’ils étaient majoritairement occupés à des travaux agricoles et à la pêche. C’est dans l’Orient musulman, sous les Omeyyades et les Abbassides, à un moment où ils sont particulièrement valorisés, que les juifs s’installent massivement dans les villes et embrassent des carrières citadines. Pourquoi ? Parce qu’ils peuvent alors tirer parti du fait d’être lettrés. D’un point de vue purement économique, il est alors beaucoup plus rentable de devenir marchand ou scientifique que de labourer la terre. D’où notre théorie : si les juifs sont devenus citadins et ont occupé des emplois indépendants de l’agriculture, c’est d’abord parce qu’ils étaient formés. Et s’ils étaient formés, c’est que leur religion exigeait qu’ils le soient.
Si nous suivons votre raisonnement, au Moyen Âge, en Europe, les juifs sont marchands ou changeurs de monnaie uniquement parce qu’ils recherchent un meilleur retour sur investissement de leurs études ?
C’est évidemment plus complexe. Mais oui, ces professions étaient beaucoup plus rentables que le travail de paysan. Pour un juif du Moyen Âge, l’apprentissage de la Torah allait de pair avec le fait de faire des affaires. Rachi, le grand commentateur du Talmud, était un entrepreneur qui possédait des vignes. Ses quatre fils, tous érudits, se sont installés dans quatre villes différentes où ils ont tous fait du business, notamment de prêts d’argent, tout en étant rabbins. Grâce à leur connaissance des langues et leurs réseaux familiaux, les juifs ont pu rentabiliser leur formation, le fait de savoir lire et écrire, mais aussi raisonner, plus aisément que d’autres communautés.
Pour vous, la mère juive est essentielle dans cette évolution. Pourquoi ?
Il est essentiel que la culture fasse partie intégrante de l’éducation quotidienne. Et en cela, la mère joue un rôle essentiel, toutes les études le montrent. C’est elle qui transmet les valeurs fondamentales. La probabilité que vous alliez à l’université est plus importante si votre mère a été elle-même à l’université. Donc, le fait que la mère ait un minimum d’éducation a représenté très tôt un avantage compétitif par rapport aux autres communautés religieuses où la femme n’en recevait pas. Nous étudions actuellement la période allant de la Renaissance à l’Holocauste. Et nous avons déjà découvert ceci : en Pologne, au XVIIe siècle, la population juive a fortement progressé par rapport à la population chrétienne. Pourquoi ? Tout simplement parce que la mortalité infantile y était plus faible. Conformément à l’enseignement du Talmud, les enfants bénéficiaient en effet d’un soin tout particulier. Les femmes gardaient leur enfant au sein plus longtemps que les chrétiennes, et elles s’en occupaient elles-mêmes. Voilà un exemple tout simple des effets que peut avoir l’éducation.
La poignée d’élus, de Maristella Botticini et Zvi Eckstein, avant-propos de Daniel Cohen, traduction Pierre Emmanuel Dauzat, Albin Michel, collection « Histoire », 425 pages, 30 euros.
Jews are a famously accomplished group. They make up 0.2 percent of the world population, but 54 percent of the world chess champions, 27 percent of the Nobel physics laureates and 31 percent of the medicine laureates.
Jews make up 2 percent of the U.S. population, but 21 percent of the Ivy League student bodies, 26 percent of the Kennedy Center honorees, 37 percent of the Academy Award-winning directors, 38 percent of those on a recent Business Week list of leading philanthropists, 51 percent of the Pulitzer Prize winners for nonfiction.
In his book, “The Golden Age of Jewish Achievement,” Steven L. Pease lists some of the explanations people have given for this record of achievement. The Jewish faith encourages a belief in progress and personal accountability. It is learning-based, not rite-based.
Most Jews gave up or were forced to give up farming in the Middle Ages; their descendants have been living off of their wits ever since. They have often migrated, with a migrant’s ambition and drive. They have congregated around global crossroads and have benefited from the creative tension endemic in such places.
No single explanation can account for the record of Jewish achievement. The odd thing is that Israel has not traditionally been strongest where the Jews in the Diaspora were strongest. Instead of research and commerce, Israelis were forced to devote their energies to fighting and politics.
Milton Friedman used to joke that Israel disproved every Jewish stereotype. People used to think Jews were good cooks, good economic managers and bad soldiers; Israel proved them wrong.
But that has changed. Benjamin Netanyahu’s economic reforms, the arrival of a million Russian immigrants and the stagnation of the peace process have produced a historic shift. The most resourceful Israelis are going into technology and commerce, not politics. This has had a desultory effect on the nation’s public life, but an invigorating one on its economy.
Tel Aviv has become one of the world’s foremost entrepreneurial hot spots. Israel has more high-tech start-ups per capita than any other nation on earth, by far. It leads the world in civilian research-and-development spending per capita. It ranks second behind the U.S. in the number of companies listed on the Nasdaq. Israel, with seven million people, attracts as much venture capital as France and Germany combined.
As Dan Senor and Saul Singer write in “Start-Up Nation: The Story of Israel’s Economic Miracle,” Israel now has a classic innovation cluster, a place where tech obsessives work in close proximity and feed off each other’s ideas.
Because of the strength of the economy, Israel has weathered the global recession reasonably well. The government did not have to bail out its banks or set off an explosion in short-term spending. Instead, it used the crisis to solidify the economy’s long-term future by investing in research and development and infrastructure, raising some consumption taxes, promising to cut other taxes in the medium to long term. Analysts at Barclays write that Israel is “the strongest recovery story” in Europe, the Middle East and Africa.
Israel’s technological success is the fruition of the Zionist dream. The country was not founded so stray settlers could sit among thousands of angry Palestinians in Hebron. It was founded so Jews would have a safe place to come together and create things for the world.
This shift in the Israeli identity has long-term implications. Netanyahu preaches the optimistic view: that Israel will become the Hong Kong of the Middle East, with economic benefits spilling over into the Arab world. And, in fact, there are strands of evidence to support that view in places like the West Bank and Jordan.
But it’s more likely that Israel’s economic leap forward will widen the gap between it and its neighbors. All the countries in the region talk about encouraging innovation. Some oil-rich states spend billions trying to build science centers. But places like Silicon Valley and Tel Aviv are created by a confluence of cultural forces, not money. The surrounding nations do not have the tradition of free intellectual exchange and technical creativity.
For example, between 1980 and 2000, Egyptians registered 77 patents in the U.S. Saudis registered 171. Israelis registered 7,652.
The tech boom also creates a new vulnerability. As Jeffrey Goldberg of The Atlantic has argued, these innovators are the most mobile people on earth. To destroy Israel’s economy, Iran doesn’t actually have to lob a nuclear weapon into the country. It just has to foment enough instability so the entrepreneurs decide they had better move to Palo Alto, where many of them already have contacts and homes. American Jews used to keep a foothold in Israel in case things got bad here. Now Israelis keep a foothold in the U.S.
During a decade of grim foreboding, Israel has become an astonishing success story, but also a highly mobile one.
Jews are extravagantly overrepresented in every field of intellectual accomplishment. Why?
Charles Murray
Commentary
Since its first issue in 1945, COMMENTARY has published hundreds of articles about Jews and Judaism. As one would expect, they cover just about every important aspect of the topic. But there is a lacuna, and not one involving some obscure bit of Judaica. COMMENTARY has never published a systematic discussion of one of the most obvious topics of all: the extravagant overrepresentation of Jews, relative to their numbers, in the top ranks of the arts, sciences, law, medicine, finance, entrepreneurship, and the media.
I have personal experience with the reluctance of Jews to talk about Jewish accomplishment—my co-author, the late Richard Herrnstein, gently resisted the paragraphs on Jewish IQ that I insisted on putting in The Bell Curve (1994). Both history and the contemporary revival of anti-Semitism in Europe make it easy to understand the reasons for that reluctance. But Jewish accomplishment constitutes a fascinating and important story. Recent scholarship is expanding our understanding of its origins.
And so this Scots-Irish Gentile from Iowa hereby undertakes to tell the story. I cover three topics: the timing and nature of Jewish accomplishment, focusing on the arts and sciences; elevated Jewish IQ as an explanation for that accomplishment; and current theories about how the Jews acquired their elevated IQ.
From 800 B.C.E. through the first millennium of the Common Era, we have just two examples of great Jewish accomplishment, and neither falls strictly within the realms of the arts or sciences. But what a pair they are. The first is the fully realized conceptualization of monotheism, expressed through one of the literary treasures of the world, the Hebrew Bible. It not only laid the foundation for three great religions but, as Thomas Cahill describes in The Gifts of the Jews (1998), introduced a way of looking at the meaning of human life and the nature of history that defines core elements of the modern sensibility. The second achievement is not often treated as a Jewish one but clearly is: Christian theology expressed through the New Testament, an accomplishment that has spilled into every aspect of Western civilization.But religious literature is the exception. The Jews do not appear in the annals of philosophy, drama, visual art, mathematics, or the natural sciences during the eighteen centuries from the time of Homer through the first millennium C.E., when so much was happening in Greece, China, and South Asia. It is unclear to what extent this reflects a lack of activity or the lack of a readily available record. For example, only a handful of the scientists of the Middle Ages are mentioned in most histories of science, and none was a Jew. But when George Sarton put a high-powered lens to the Middle Ages in his monumental Introduction to the History of Science (1927-48), he found that 95 of the 626 known scientists working everywhere in the world from 1150 to 1300 were Jews—15 percent of the total, far out of proportion to the Jewish population.
As it happens, that same period overlaps with the life of the most famous Jewish philosopher of medieval times, Maimonides (1135–1204), and of others less well known, not to mention the Jewish poets, grammarians, religious thinkers, scholars, physicians, and courtiers of Spain in the “Golden Age,” or the brilliant exegetes and rabbinical legislators of northern France and Germany. But this only exemplifies the difficulty of assessing Jewish intellectual activity in that period. Aside from Maimonides and a few others, these thinkers and artists did not perceptibly influence history or culture outside the confines of the Jewish world.
Generally speaking, this remained the case well into the Renaissance and beyond. When writing a book called Human Accomplishment (2003), I compiled inventories of “significant figures” in the arts and sciences, defined as people who are mentioned in at least half of the major histories of their respective fields. From 1200 to 1800, only seven Jews are among those significant figures, and only two were important enough to have names that are still widely recognized: Spinoza and Montaigne (whose mother was Jewish).
The sparse representation of Jews during the flowering of the European arts and sciences is not hard to explain. They were systematically excluded, both by legal restrictions on the occupations they could enter and by savage social discrimination. Then came legal emancipation, beginning in the late 1700’s in a few countries and completed in Western Europe by the 1870’s, and with it one of the most extraordinary stories of any ethnic group at any point in human history.As soon as Jewish children born under legal emancipation had time to grow to adulthood, they started appearing in the first ranks of the arts and sciences. During the four decades from 1830 to 1870, when the first Jews to live under emancipation reached their forties, 16 significant Jewish figures appear. In the next four decades, from 1870 to 1910, the number jumps to 40. During the next four decades, 1910–1950, despite the contemporaneous devastation of European Jewry, the number of significant figures almost triples, to 114.
To get a sense of the density of accomplishment these numbers represent, I will focus on 1870 onward, after legal emancipation had been achieved throughout Central and Western Europe. How does the actual number of significant figures compare to what would be expected given the Jewish proportion of the European and North American population? From 1870 to 1950, Jewish representation in literature was four times the number one would expect. In music, five times. In the visual arts, five times. In biology, eight times. In chemistry, six times. In physics, nine times. In mathematics, twelve times. In philosophy, fourteen times.
Disproportionate Jewish accomplishment in the arts and sciences continues to this day. My inventories end with 1950, but many other measures are available, of which the best known is the Nobel Prize. In the first half of the 20th century, despite pervasive and continuing social discrimination against Jews throughout the Western world, despite the retraction of legal rights, and despite the Holocaust, Jews won 14 percent of Nobel Prizes in literature, chemistry, physics, and medicine/physiology. In the second half of the 20th century, when Nobel Prizes began to be awarded to people from all over the world, that figure rose to 29 percent. So far, in the 21st century, it has been 32 percent. Jews constitute about two-tenths of one percent of the world’s population. You do the math.
What accounts for this remarkable record? A full answer must call on many characteristics of Jewish culture, but intelligence has to be at the center of the answer. Jews have been found to have an unusually high mean intelligence as measured by IQ tests since the first Jewish samples were tested. (The widely repeated story that Jewish immigrants to this country in the early 20th century tested low on IQ is a canard.) Exactly how high has been difficult to pin down, because Jewish sub-samples in the available surveys are seldom perfectly representative. But it is currently accepted that the mean is somewhere in the range of 107 to 115, with 110 being a plausible compromise.The IQ mean for the American population is “normed” to be 100, with a standard deviation of 15. If the Jewish mean is 110, then the mathematics of the normal distribution says that the average Jew is at the 75th percentile. Underlying that mean in overall IQ is a consistent pattern on IQ subtests: Jews are only about average on the subtests measuring visuo-spatial skills, but extremely high on subtests that measure verbal and reasoning skills.
A group’s mean intelligence is important in explaining outcomes such as mean educational attainment or mean income. The key indicator for predicting exceptional accomplishment (like winning a Nobel Prize) is the incidence of exceptional intelligence. Consider an IQ score of 140 or higher, denoting the level of intelligence that can permit people to excel in fields like theoretical physics and pure mathematics. If the mean Jewish IQ is 110 and the standard deviation is 15, then the proportion of Jews with IQ’s of 140 or higher is somewhere around six times the proportion of everyone else.
The imbalance continues to increase for still higher IQ’s. New York City’s public-school system used to administer a pencil-and-paper IQ test to its entire school population. In 1954, a psychologist used those test results to identify all 28 children in the New York public-school system with measured IQ’s of 170 or higher. Of those 28, 24 were Jews.
Exceptional intelligence is not enough to explain exceptional accomplishment. Qualities such as imagination, ambition, perseverance, and curiosity are decisive in separating the merely smart from the highly productive. The role of intelligence is nicely expressed in an analogy suggested to me years ago by the sociologist Steven Goldberg: intelligence plays the same role in an intellectually demanding task that weight plays in the performance of NFL offensive tackles. The heaviest offensive tackle is not necessarily the best. Indeed, the correlation between weight and performance among NFL offensive tackles is probably quite low. But they all weigh more than 300 pounds.
So with intelligence. The other things count, but you must be very smart to have even a chance of achieving great work. A randomly selected Jew has a higher probability of possessing that level of intelligence than a randomly selected member of any other ethnic or national group, by far.
Nothing that I have presented up to this point is scientifically controversial. The profile of disproportionately high Jewish accomplishment in the arts and sciences since the 18th century, the reality of elevated Jewish IQ, and the connection between the two are not to be denied by means of data. And so we come to the great question: how and when did this elevated Jewish IQ come about? Here, the discussion must become speculative. Geneticists and historians are still assembling the pieces of the explanation, and there is much room for disagreement.I begin with the assumption that elevated Jewish intelligence is grounded in genetics. It is no longer seriously disputed that intelligence in Homo sapiens is substantially heritable. In the last two decades, it has also been established that obvious environmental factors such as high income, books in the house, and parental reading to children are not as potent as one might expect. A “good enough” environment is important for the nurture of intellectual potential, but the requirements for “good enough” are not high. Even the very best home environments add only a few points, if that, to a merely okay environment. It is also known that children adopted at birth do not achieve the IQ’s predicted by their parents’ IQ.
To put it another way, we have good reason to think that Gentile children raised in Jewish families do not acquire Jewish intelligence. Hence my view that something in the genes explains elevated Jewish IQ. That conclusion is not logically necessary but, given what we know about heritability and environmental effects on intelligence in humans as a species, it is extremely plausible.
Two potential explanations for a Jewish gene pool favoring high intelligence are so obvious that many people assume they must be true: winnowing by persecution (only the smartest Jews either survived or remained Jews) and marrying for brains (scholars and children of scholars were socially desirable spouses). I too think that both of these must have played some role, but how much of a role is open to question.
In the case of winnowing through persecution, the logic cuts both ways. Yes, those who remained faithful during the many persecutions of the Jews were self-selected for commitment to Judaism, and the role of scholarship in that commitment probably means that intelligence was one of the factors in self-selection. The foresight that goes with intelligence might also have had some survival value (as in anticipating pogroms), though it is not obvious that its effect would be large enough to explain much.
But once the Cossacks are sweeping through town, the kind of intelligence that leads to business success or rabbinical acumen is no help at all. On the contrary, the most successful people could easily have become the most likely to be killed, by virtue of being more visible and the targets of greater envy. Furthermore, other groups, such as the Gypsies, have been persecuted for centuries without developing elevated intelligence. Considered closely, the winnowing-by-persecution logic is not as compelling as it may first appear.
What of the marrying-for-brains theory? “A man should sell all he possesses in order to marry the daughter of a scholar, as well as to marry his daughter to a scholar,” advises the Talmud (Pesahim 49a), and scholarship did in fact have social cachet within many Jewish communities before (and after) emancipation. The combination could have been potent: by marrying the children of scholars to the children of successful merchants, Jews were in effect joining those selected for abstract reasoning ability with those selected for practical intelligence.
Once again, however, it is difficult to be more specific about how much effect this might have had. Arguments have been advanced that rich merchants were in fact often reluctant to entrust their daughters to penniless and unworldly scholars. Nor is it clear that the fertility rate of scholars, or their numbers, were high enough to account for a major effect on intelligence. The attractiveness of brains in prospective marriage partners surely played some role but, once again, the data for assessing how much have not been assembled.
Against this backdrop of uncertainty, a data-driven theory for explaining elevated Jewish IQ appeared in 2006 in the Journal of Biosocial Science. In an article entitled “Natural History of Ashkenazi Intelligence,” Gregory Cochran (a physicist) and Jason Hardy and Henry Harpending (anthropologists) contend that elevated Jewish IQ is confined to the Ashkenazi Jews of northern and central Europe, and developed from the Middle Ages onward, primarily from 800 to 1600 C.E.In the analysis of these authors, the key factor explaining elevated Jewish intelligence is occupational selection. From the time Jews became established north of the Pyrenees-Balkans line, around 800 C.E., they were in most places and at most times restricted to occupations involving sales, finance, and trade. Economic success in all of these occupations is far more highly selected for intelligence than success in the chief occupation of non-Jews: namely, farming. Economic success is in turn related to reproductive success, because higher income means lower infant mortality, better nutrition, and, more generally, reproductive “fitness.” Over time, increased fitness among the successful leads to strong selection for the cognitive and psychological traits that produce that fitness, intensified when there is a low inward gene flow from other populations—as was the case with Ashkenazim.
Sephardi and Oriental Jews—i.e., those from the Iberian peninsula, the Mediterranean littoral, and the Islamic East—were also engaged in urban occupations during the same centuries. But the authors cite evidence that, as a rule, they were less concentrated in occupations that selected for IQ and instead more commonly worked in craft trades. Thus, elevated intelligence did not develop among Sephardi and Oriental Jews—as manifested by contemporary test results in Israel that show the IQ’s of non-European Jews to be roughly similar to the IQ’s of Gentiles.
The three authors conclude this part of their argument with an elegant corollary that matches the known test profiles of today’s Ashkenazim with the historical experience of their ancestors:
The suggested selective process explains the pattern of mental abilities in Ashkenazi Jews: high verbal and mathematical ability but relatively low spatio-visual ability. Verbal and mathematical talent helped medieval businessmen succeed, while spatio-visual abilities were irrelevant.
The rest of their presentation is a lengthy and technical discussion of the genetics of selection for IQ, indirect evidence linking elevated Jewish IQ with a variety of genetically based diseases found among Ashkenazim, and evidence that most of these selection effects have occurred within the last 1,200 years.
No one has yet presented an alternative to the Cochran-Hardy-Harpending theory that can match it for documentation. But, as someone who suspects that elevated Jewish intelligence was (a) not confined to Ashkenazim and (b) antedates the Middle Ages, I will outline the strands of an alternative explanation that should be explored.It begins with evidence that Jews who remained in the Islamic world exhibited unusually high levels of accomplishment as of the beginning of the second millennium. The hardest evidence is Sarton’s enumeration of scientists mentioned earlier, of whom 15 percent were Jews. These were not Ashkenazim in northern Europe, where Jews were still largely excluded from the world of scientific scholarship, but Sephardim in the Iberian peninsula, in Baghdad, and in other Islamic centers of learning. I have also mentioned the more diffuse cultural evidence from Spain, where, under both Muslim and Christian rule, Jews attained eminent positions in the professions, commerce, and government as well as in elite literary and intellectual circles.
After being expelled from Spain at the end of the 15th century, Sephardi Jews rose to distinction in many of the countries where they settled. Some economic historians have traced the decline of Spain after 1500, and the subsequent rise of the Netherlands, in part to the Sephardi commercial talent that was transferred from the one to the other. Centuries later, in England, one could point to such Sephardi eminences as Benjamin Disraeli and the economist David Ricardo.
In sum, I propose that a strong case could be assembled that Jews everywhere had unusually high intellectual resources that manifested themselves outside of Ashkenaz and well before the period when non-rabbinic Ashkenazi accomplishment manifested itself.
How is this case to be sustained in the face of contemporary test data indicating that non-Ashkenazi Jews do not have the elevated mean of today’s Ashkenazim? The logical inconsistency disappears if one posits that Jews circa 1000 C.E. had elevated intelligence everywhere, but that it subsequently was augmented still further among Ashkenazim and declined for Jews living in the Islamic world—perhaps because of the dynamics described by Cochran, Hardy, and Harpending (that is, Oriental Jews were concentrated in trades for which high intelligence did not yield wealth).
Recent advances in the use of genetic markers to characterize populations enable us to pursue such possibilities systematically. I offer this testable hypothesis as just one of many possibilities: if genetic markers are used to discriminate among non- Ashkenazi Jews, it will be found that those who are closest genetically to the Sephardim of Golden Age Spain have an elevated mean IQ, though perhaps not so high as the contemporary Ashkenazi IQ.
The next strand of an alternative to the Cochran-Hardy-Harpending theory involves reasons for thinking that some of the elevation of Jewish intelligence occurred even before Jews moved into occupations selected for intelligence, because of the shift in ancient Judaism from a rite-based to a learning-based religion.All scholars who have examined the topic agree that about 80–90 percent of all Jews were farmers at the beginning of the Common Era, and that only about 10–20 percent of Jews were farmers by the end of the first millennium. No other ethnic group underwent this same kind of occupational shift. For the story of why this happened, I turn to a discussion by Maristella Botticini and Zvi Eckstein entitled “Jewish Occupational Selection: Education, Restrictions, or Minorities?” which appeared in the Journal of Economic History in 2005.
Rejecting the explanation that Jews became merchants because they were restricted from farming, Botticini and Eckstein point to cases in which Jews who were free to own land and engage in agriculture made the same shift to urban, skilled occupations that Jews exhibited where restrictions were in force. Instead, they focus on an event that occurred in 64 C.E., when the Palestinian sage Joshua ben Gamla issued an ordinance mandating universal schooling for all males starting at about age six. The ordinance was not only issued; it was implemented. Within about a century, the Jews, uniquely among the peoples of the world, had effectively established universal male literacy and numeracy.
The authors’ explanation for the subsequent shift from farming to urban occupations reduces to this: if you were educated, you possessed an asset that had economic value in occupations that required literacy and numeracy, such as those involving sales and transactions. If you remained a farmer, your education had little or no value. Over the centuries, this basic economic reality led Jews to leave farming and engage in urban occupations.
So far, Botticini and Eckstein have provided an explanatory backdrop to the shift in occupations that in turn produced the selection pressures for intelligence described by Cochran, Hardy, and Harpending. But selection pressure in this classic form was probably not the only force at work. Between the 1st and 6th centuries C.E., the number of Jews in the world plummeted from about 4.5 million to 1.5 million or fewer. About 1 million Jews were killed in the revolts against the Romans in Judea and Egypt. There were scattered forced conversions from Judaism to another religion. Some of the reduction may be associated with a general drop in population that accompanied the decline and fall of the Roman Empire. But that still leaves a huge number of Jews who just disappeared.
What happened to them? Botticini and Eckstein argue that an economic force was at work: for Jews who remained farmers, universal education involved a cost that had little economic benefit. As time went on, they drifted away from Judaism. I am sure this explanation has some merit. But a more direct explanation could involve the increased intellectual demands of Judaism.
Joshua ben Gamla’s ordinance mandating literacy occurred at about the same time as the destruction of the Second Temple—64 C.E. and 70 C.E., respectively. Both mark the moment when Judaism began actively to transform itself from a religion centered on rites and sacrifices at the Temple in Jerusalem to a religion centered on prayer and the study of the Torah at decentralized synagogues and study houses. Rabbis and scholars took on a much larger role as leaders of local communities. Since worship of God involved not only prayer but study, all Jewish males had to read if they were to practice their faith—and not only read in private but be able to read aloud in the presence of others.
In this context, consider the intellectual requirements of literacy. People with modest intelligence can become functionally literate, but they are able to read only simple texts. The Torah and the Hebrew prayer book are not simple texts; even to be able to read them mechanically requires fairly advanced literacy. To study the Talmud and its commentaries with any understanding requires considerable intellectual capacity. In short, during the centuries after Rome’s destruction of the Temple, Judaism evolved in such a way that to be a good Jew meant that a man had to be smart.
What happened to the millions of Jews who disappeared? It is not necessary to maintain that Jews of low intelligence were run out of town because they could not read the Torah and commentaries fluently. Rather, few people enjoy being in a position where their inadequacies are constantly highlighted. It is human nature to withdraw from such situations. I suggest that the Jews who fell away from Judaism from the 1st to 6th centuries C.E. were heavily concentrated among those who could not learn to read well enough to be good Jews—meaning those from the lower half of the intelligence distribution. Even before the selection pressures arising from urban occupations began to have an effect, I am arguing, the remaining self-identified Jews circa 800 C.E. already had elevated intelligence.
A loose end remains. Is it the case that, before the 1st century C.E., Jews were intellectually ordinary? Are we to believe that the Bible, a work compiled over centuries and incorporating everything from brilliant poetry to profound ethics, with stories that speak so eloquently to the human condition that they have inspired great art, music, and literature for millennia, was produced by an intellectually run-of-the-mill Levantine tribe?In The Evolution of Man and Society (1969), the geneticist Cyril Darlington presented the thesis that Jews and Judaism were decisively shaped much earlier than the 1st century C.E., namely, by the Babylonian captivity that began with the fall of Jerusalem to the forces of Nebuchadnezzar in 586 B.C.E.
Darlington’s analysis touches on many issues, but I will focus on just the intelligence question. The biblical account clearly states that only a select group of Jews were taken to Babylon. We read that Nebuchadnezzar “carried into exile all Jerusalem: all the officers and fighting men, and all the craftsmen and artisans. . . . Only the poorest people of the land were left” (2 Kings 24:10).
In effect, the Babylonians took away the Jewish elites, selected in part for high intelligence, and left behind the poor and unskilled, selected in part for low intelligence. By the time the exiles returned, more than a century later, many of those remaining behind in Judah had been absorbed into other religions. Following Ezra’s command to “separate yourselves from the peoples around you and from your foreign wives” (Ezra 10:9), only those who renounced their foreign wives and children were permitted to stay within the group. The returned exiles, who formed the bulk of the reconstituted Jewish community, comprised mainly the descendants of the Jewish elites—plausibly a far more able population, on average, than the pre-captivity population.
I offer the Babylonian captivity as a concrete mechanism whereby Jewish intelligence may have been elevated very early, but I am not wedded to it. Even without that mechanism, there is reason to think that selection for intelligence antedates the 1st century C.E.
From its very outset, apparently going back to the time of Moses, Judaism was intertwined with intellectual complexity. Jews were commanded by God to heed the law, which meant they had to learn the law. The law was so extensive and complicated that this process of learning and reviewing was never complete. Moreover, Jewish males were not free to pretend that they had learned the law, for fathers were commanded to teach the law to their children. It became obvious to all when fathers failed in their duty. No other religion made so many intellectual demands upon the whole body of its believers. Long before Joshua ben Gamla and the destruction of the Second Temple, the requirements for being a good Jew had provided incentives for the less intelligent to fall away.
Assessing the events of the 1st century C.E. thus poses a chicken-and-egg problem. By way of an analogy, consider written Chinese with its thousands of unique characters. On cognitive tests, today’s Chinese do especially well on visuo-spatial skills. It is possible, I suppose, that their high visuo-spatial skills have been fostered by having to learn written Chinese; but I find it much more plausible that only people who already possessed high visuo-spatial skills would ever devise such a ferociously difficult written language. Similarly, I suppose it is possible that the Jews’ high verbal skills were fostered, through secondary and tertiary effects, by the requirement that they be able to read and understand complicated texts after the 1st century C.E.; but I find it much more plausible that only people who already possessed high verbal skills would dream of installing such a demanding requirement.
This reasoning pushes me even farther into the realm of speculation. Insofar as I am suggesting that the Jews may have had some degree of unusual verbal skills going back to the time of Moses, I am naked before the evolutionary psychologists’ ultimate challenge. Why should one particular tribe at the time of Moses, living in the same environment as other nomadic and agricultural peoples of the Middle East, have already evolved elevated intelligence when the others did not?
At this point, I take sanctuary in my remaining hypothesis, uniquely parsimonious and happily irrefutable. The Jews are God’s chosen people.
« Le Siècle juif » (Editions La Découverte), de Yuri Slezkine, professeur d’histoire à Berkeley et spécialiste de la question nationale en URSS, propose une brillante réflexion sur l’identité juive et sur la dimension juive de l’homme moderne au XXè siècle.
Partant du principe de l’opposition entre « Apolloniens » et « Mercuriens », termes désignant d’un côté les hommes et les femmes attachés à la terre et à la tribu, et, de l’autre, ceux qui descendent du messager Hermès, nomades capables d’échanger leurs différentes formes de savoir, Slezkine, dans la première partie de son livre, montre combien la condition des Juifs, ces « nomades fonctionnels les plus doués de la planète », est similaire à celle d’autres peuples. Tels les Chinois en Asie, ou encore la caste indienne des Parsis, lorsque ces paysans furent transplantés en Afrique de l’Est face aux natifs ougandais ou kenyans, engendrant à la fois dépendance et jalousie à leur égard. Les parallèles qu’il étudie entre goyim et Juifs, gadjos et gitans, thaïs et chinois, paysans latino-américains et commerçants « turcos » (syro-libanais), bref « Mercuriens » et « Apolliniens », dans le champ de l’imaginaire et dans celui de la division du travail, sont à ce titre édifiants et démontrent bien comment l’antisémitisme qui a sévi en Europe de l’Est s’enracine dans des représentations anthropologiques universelles.
La suite du livre, extrêmement riche en notes littéraires (de Babel à Sholem Aleichem, en passant par Joyce et Pouchkine) et statistiques (en particulier sur le rôle prépondérant des Juifs dans la révolution bolchévique) déroule une passionnante étude sur les Juifs inventeurs de la modernité marxiste et freudienne puis porteurs, avec le sionisme, du « plus excentrique des nationalismes », pour finir sur les grandes « Terres promises » au XXe siècle que furent pour les Juifs la Russie soviétique, l’Amérique capitaliste et libérale et Israël, état « apollonien » par excellence.
Pour l’auteur, « L’Âge moderne est l’Âge des juifs, et le XXe siècle est le Siècle des Juifs. La modernité signifie que chacun d’entre nous devient urbain, mobile, éduqué, professionnellement flexible… En d’autres termes, la modernité, c’est le fait que nous sommes tous devenus juifs. ». Elu par le magazine Lire « Meilleur livre de l’année 2009″ dans la catégorie Histoire, cet ouvrage étonnant et provocateur, qui a connu un immense retentissement et suscité de nombreuses polémiques lors de sa parution aux Etats-Unis en 2004, n’est pas qu’une « autre histoire » du peuple juif, mais bien une oeuvre indispensable pour comprendre le monde actuel
Enorme surprise ! Bob Dylan, l’auteur-compositeur-interprète qui a traversé la musique populaire de la seconde moitié du XXè siècle, vient d’être récompensé par le prix Nobel de littérature.
On attendait le Syrien Adonis, le Japonais Murakami, voire le Norvégien Jon Fosse. Le jury du prix Nobel de littérature a choisi de prendre tout son monde à contrepied pour 2016 en faisant d’un chanteur populaire mais grand poète le récipiendaire de la distinction. Bien sûr, certain regretteront avec justesse que Philip Roth n’ait encore une fois pas été récompensé, mais la retraite du vieux patron des lettres américaines l’a probablement écarté pour toujours des débats tenus secrets durant 50 ans des jurés du Nobel. Quant au très vendeur Murakami, la réputation de « superficialité » de ses textes selon le petit monde du livre remet aux calendes grecques la figuration de son nom au palmarès, même s’il est chaque année le grandissime favori des bookmakers.
Bob Dylan, donc. Le sale gosse de la folk-music, celui qui donne désormais des concerts où il assure le strict minimum, limitant ses interactions avec le public. Un choix fort pour le jury du Nobel, le désignant « pour avoir créé dans le cadre de la grande tradition de la musique américaine de nouveaux modes d’expression poétique ». Plus que la tradition de la musique américaine, c’est celle des troubadours et trouvères, ces poètes-conteurs-chanteurs du Moyen-Âge que Bob Dylan a d’abord incarné. Né dans le Minnesota en 1941 à deux pas de la route 61 qui inspirera l’un de ses albums les plus emblématiques « Highway 61 revisited », celui qui est d’abord Robert Zimmerman pour l’état-civil et Shabbtaï à sa circoncision, vient d’une famille juive d’Odessa qui a fui les pogroms du début du XXè siècle. La petite communauté juive locale est dit-on, très unie par les épreuves vécues en Europe de l’Est. Le signe de l’errance, de la fuite. Il en est le porteur, il l’assume à la première occasion en filant à New York à la première occasion, abandonnant ses études à l’université dès la première année.
Hobboes
Là-bas, à Greenwich Village, il n’est pas le plus doué de tous les folkeux qui écument le quartier, mais il est le plus assidu. « Avec le temps, la goutte fend les rocs les plus résistants » dit le Talmud. Pour ce faire, il fréquente de longues heures les bibliothèques afin de dénicher les chansons folkloriques les plus anciennes. Les Etats-Unis sortent de peu de la Seconde guerre mondiale et la crise des années 1930 est derrière elle, mais son imaginaire collectif est encore tributaire des Hobboes, ces vagabonds, clochards célestes, que le « Jeudi noir » a mis sur les routes et les rails en quête d’un travail plus à l’ouest. La conquête de l’ouest au XIXe siècle s’est poursuivie avec l’espoir à l’ouest. Les lecteurs de John Steinbeck se souviendront des « Raisins de la colère ». Ces Hobboes, donc, figures mythiques du rêve américain, sans le sou mais les yeux dans les étoiles, affamés mais libres, ont souvent une guitare à la main et la bouche pleine de chansons pour rythmer les nuits de leur infortune. Ils deviennent la source d’inspiration principale de Bob Dylan qui à l’origine chante des reprises. Suivre cette tradition, la dépoussiérer, mais rien n’y ajouter.
Pourtant, le jeune homme écrit déjà des poèmes, de longs poèmes qu’il met en musique. Ecrite dix minutes dans un café, « Blowin’ in the wind » devient l’une des premières Protest Songs qui portent les luttes d’émancipation aux Etats-Unis. Car Bob Dylan, c’est d’abord la figure de la contre-culture américaine. Avant Woodstock, son Flower Power et son Summer of Love, Bob Dylan est le chantre des Beatniks : un artiste engagé, le « prophète-poète » de cette jeune génération d’après-guerre, chantant même avec sa grande complice de l’époque Joan Baez à la Marche de Washington. Encore cette idée de mouvement, la marche, cette impossibilité de tenir en place qui force à l’errance. Mais « The times they are a changin’ », car il opère dès 1965 un tournant plus rock, que le monde Folk dont il est issu ne lui pardonne pas. Exit la guitare sèche et l’harmonica, « Highway 61 revisited », plus musclé, résonne de guitares électriques, et comporte notamment la célébrissime « Like a rolling stone », élue morceau rock du XXe siècle ! D’une durée de presque sept minutes, Bob Dylan raconte dans ses « Chroniques » qu’elle comportait bien plus de strophes à l’origine. Situation identique pour l’ultra-repris « Knocking on heaven’s door » qui fait partie de la bande-originale du film de Sam Peckinpah « Pat Garrett and Billy the Kid » dans lequel il tient un rôle muet de lanceur de couteaux pas malhabile de ses mains.
Audace
Des chansons à rallonge, des poèmes aux strophes sans fin, Bob Dylan pourtant admet lui-même que l’inspiration a tendance à se tarir et qu’il lui faut user de moyens intenses pour la faire jaillir du rocher. Ses « Chroniques » évoquent d’ailleurs avec intensité son errance lorsqu’il dut enregistrer deux albums à Nashville. Une véritable traversée du désert, d’autant que le « poète-prophète » est bientôt surnommé le « poète-profit » à cause d’un style jugé commercial. Qu’importe, encore un contrepied : sa voix usée le pousse à chaque fois à réinterpréter ses chansons et le fan distrait serait bien incapable de reconnaître ses titres préférés lors d’un concert s’il n’est pas capable d’attention. Les strophes qui s’étiraient en longueur se brisent en même temps que sa voix comme si chaque nouvelle scène portait la possibilité d’errer autour d’une chanson comme autour d’un idéal que l’on n’atteint jamais. Détresse à cause d’un horizon de sens toujours fuyant ? Une réponse peut-être, dans la conversion au christianisme évangélique à la fin des années 1970 : le beatnik assagi par la grâce d’une nouvelle naissance ! Les fans sont déçus, les musiciens le raillent ? Lui n’en a cure ! Que les filles et « les garçons ne pleurent pas », parce que même le chant demeure pour lui une aventure personnelle, et la Bible abonde en prophètes qui se mirent le peuple à dos. L’errance ne s’achève pas là, puisqu’il fait son retour au judaïsme. Enfin la terre promise ? Pas sûr, tant pour lui, tout vient à se faner…
Le choix des jurés du Nobel est donc extrêmement audacieux. C’est une icône populaire qui se trouve récompensée, un chanteur avant que d’être un poète, un homme qui a su sans cesse se poser des questions. On a désormais hâte d’entendre son discours de réception du prix qui sera sans nul doute la curiosité des soirées de remise.
À l’occasion de la sortie du nouvel album de Leonard Cohen, « You want it darker », le théologien Dominique Cerbelaud évoque la quête spirituelle du chanteur canadien.
Vendredi 21 octobre 2016, Leonard Cohen, 82 ans, offre un nouvel album à son public, intitulé You want it darker (« Tu voudrais qu’il fasse plus sombre »). C’est l’occasion de revenir sur son œuvre de chanteur, entreprise voici un demi-siècle. C’est à 1967, en effet, que remonte le premier disque du Montréalais, Songs of Leonard Cohen (« Chansons de Leonard Cohen »), qui comportait notamment le titre Suzanne – une chanson qui devait assurer à tout jamais sa notoriété.
De fait, le public français connaît Cohen surtout comme chanteur (rappelons cependant son œuvre de poète et de romancier), mais il ne garde souvent mémoire que des compositions les plus anciennes, sans guère prêter attention à l’œuvre ultérieure – sinon pour quelques chansons cultes comme Hallelujah ou Closing Time. Ce corpus, qui compte aujourd’hui environ cent cinquante titres, mérite pourtant qu’on s’y arrête : il s’agit, comme on dit si bien, de « chansons à textes », longuement mûries et soigneusement composées, d’une densité et d’une richesse rares. On se propose de le survoler ici sous l’angle des thématiques religieuses, qui représentent à n’en pas douter l’une des grandes préoccupations de Leonard Cohen.
D’autres thèmes y apparaissent avec insistance, et en tout premier lieu celui de la relation amoureuse, décliné inlassablement : « À cause de ces quelques chansons/dans lesquelles j’évoque leur mystère/ les femmes ont été d’une gentillesse exceptionnelle /envers mon grand âge » (Because of, album Dear Heather). Ainsi parlait le septuagénaire, avec une belle modestie : en réalité, c’est dans bon nombre de textes qu’il célèbre le mystère de la femme, sous toutes ses figures et dans tous ses états. Et les femmes, de toute évidence, lui en savent gré.
Qu’elle soit nommée (depuis les mythiques Suzanne, Nancy et Marianne jusqu’aux plus récentes Heather et Alexandra), ou que, le plus souvent, elle reste anonyme, la femme est en effet omniprésente du début à la fin du corpus cohénien.
Le personnage biblique de David, dont le nom en hébreu signifie « bien-aimé », pourrait représenter à cet égard le « modèle » de Leonard. La tradition attribue à ce roi poète et musicien tout l’ensemble du livre des Psaumes. Mais le texte biblique nous fait connaître aussi le nom d’un certain nombre de femmes de ce grand polygame : Ahinoam, Abigayil, Mikal, Égla, Avital, Bethsabée, Abishag… Laissons aux biographes le soin de faire la liste de celles qu’a pu connaître le Canadien errant… si tant est que cela ait de l’importance dans son parcours de créateur.
Des allusions très précises à la tradition juive
Et nous voilà déjà dans le texte biblique !
De fait, les compositions de Cohen regorgent d’allusions scripturaires, qui témoignent d’une fréquentation assidue du Livre saint : on y retrouve bien des personnages (Adam, Samson, David ou Isaac), des épisodes (notamment ceux du Déluge ou de la sortie d’Égypte), des réminiscences de tel ou tel prophète voire, justement, de tel ou tel psaume. Ainsi, la chanson By the Rivers Dark (album Ten New Songs) propose une relecture hardie du ps.136-137 : « Vers les sombres fleuves j’allais, errant / j’ai passé ma vie à Babylone / et j’ai oublié mon saint cantique / je n’avais pas de force à Babylone ».
Mais il y a plus : sans jamais s’y attarder, Cohen distille à l’occasion des allusions très précises à la tradition juive, tant liturgique que mystique –et notamment à la kabbale. On trouve par exemple des allusions au thème de la « brisure des vases » dans la chanson Anthem (album The Future) : « il y a une fissure, une fissure en toute chose / c’est comme ça que la lumière pénètre »…
Parmi les figures juives du passé, il en est une qui ne laisse pas tranquille le juif Leonard Cohen : c’est celle de Jésus. L’homme de Nazareth apparaît avec une fréquence étonnante dans le corpus des chansons (j’en relève pour ma part une douzaine d’occurrences, explicites ou non). « Jésus pris au sérieux par beaucoup, Jésus pris à la blague par quelques-uns » (Jazz Police, album I’m Your Man) : et par toi-même, Leonard ? Cela reste quelque peu indécidable. S’il avoue ne rien comprendre au Sermon sur la montagne (Democracy, album The Future), et évoque « le Christ qui n’est pas ressuscité / hors des cavernes du cœur » (The Land of Plenty, album Ten New Songs), notre auteur, à propos de Jésus, se parle ainsi à lui-même : « tu veux voyager avec lui / tu veux voyager en aveugle / et tu penses pouvoir lui faire confiance / car il a touché ton corps parfait avec son esprit » (Suzanne, album Songs of Leonard Cohen). Et comment comprendre cette double injonction : « Montre-moi l’endroit où le Verbe s’est fait homme / montre-moi l’endroit où la souffrance a commencé » (Show me the Place, album Old Ideas) ? Il y a là un singulier mélange de dérision et de fascination.
Curieusement, les figures de la sainteté chrétienne suscitent chez lui une sympathie plus immédiate : celles de la vierge Marie –si c’est bien elle qu’il faut reconnaître dans Notre-Dame de la solitude (Our Lady of Solitude, album Recent Songs) ; de François d’Assise (Death of a Ladies’ Man, dans l’album homonyme) ; de Bernadette de Lourdes (Song of Bernadette, chantée par Jennifer Warnes dans son album Famous Blue Raincoat) ; et surtout de Jeanne d’Arc (Last Year’s Man et Joan of Arc, toutes deux dans l’album Songs of Love and Hate). C’est le lieu de rappeler que le jeune Leonard Cohen a acquis, à Montréal, une bonne culture chrétienne. Certains aspects de la piété catholique, comme le culte du Sacré-Cœur ou les visions de sœur Faustine, continuent d’ailleurs à le toucher.
Ajoutons que depuis de longues années, l’auteur-compositeur s’intéresse au bouddhisme zen, et qu’il a effectué à ce titre de longs séjours au monastère de Mount Baldy, près de Los Angeles. Cependant, les thèmes religieux extrême-orientaux n’apparaissent guère dans le corpus des chansons, sinon à l’état de traces…
Un ton élégiaque
Mais au-delà de ces contenus, il faut tenter d’évoquer le ton, ou plutôt les tons dont il use pour les décliner.
Nous avons déjà rencontré la modulation élégiaque : c’est celle de la célébration de l’amour, toujours recommencée. Des paysages s’ébauchent ici, ou plutôt des évocations, où l’on trouve bon nombre de clairs de lune, de cloches qui carillonnent et de chants d’oiseaux. Sans oublier le fleuve, souvent présent chez ce natif de Montréal…
Nous avons également capté au passage les accents mystiques.
Rappelons à cet égard que l’emblème juif le plus communément répandu s’appelle « sceau de Salomon » ou « bouclier de David ». Il se constitue de deux triangles entrelacés qui dessinent une étoile à six branches. C’est celui qui figure par exemple sur le drapeau de l’État d’Israël.
Or Leonard s’est confectionné, au fil du temps, son propre « sceau » à partir non pas de deux triangles, mais de deux cœurs.
Comment interpréter un tel logo ? On peut voir dans l’assemblage de ces deux cœurs l’union du masculin et du féminin, une sorte de yin-yang judaïsé.
Mais on peut aussi en proposer une autre lecture car ce dessin est apparu pour la première fois sur la couverture de la deuxième édition du Book of Mercy (Livre de la Miséricorde), le recueil de prières juives composé par Leonard. Aujourd’hui enrichi et compliqué d’éléments adventices, il s’accompagne parfois de la légende « Order of the Unified Heart », ce qui renvoie clairement à l’univers religieux. Dès lors, les deux cœurs ne représentent-ils pas celui de l’homme… et celui de Dieu ? Cet Ordre religieux d’un nouveau genre, Leonard en est d’ores et déjà le grand prêtre : n’est-ce pas la fonction primordiale du prêtre d’assurer ainsi la double médiation, de la terre vers le ciel et du ciel vers la terre ? Or « prêtre » se dit en hébreu… « cohen ».
Il faut citer à ce propos la superbe chanson qui s’adresse ainsi à l’Être divin : « Que ta miséricorde se déverse / sur tous ces cœurs qui brûlent en enfer / si c’est ta volonté / de nous faire du bien » (If it Be Your Will, album Various Positions).
Ici s’unissent bel et bien le cœur de l’homme (il s’agit d’une prière d’intercession) et celui de Dieu (prêt à répandre sa tendresse sur l’humanité).
Or selon un adage de la tradition juive : « la porte de la prière est parfois fermée, mais la porte de la miséricorde reste toujours ouverte ».
Une compassion intense envers les souffrants
Leonard a compris cette leçon. Et s’il n’adopte le ton de la prière que de manière exceptionnelle (par exemple dans Born in Chains et You Got Me Singing, deux chansons de l’album Popular Problems), il témoigne fréquemment d’une véritable compassion envers tous ceux qui crient : « de grâce, ne passez pas indifférents » (Please, Don’t Pass me by, album Live Songs), qu’il s’agisse de l’enfant encore à naître, de l’exclu, du handicapé, bref de tous les « pauvres » au sens biblique du terme. « Et je chante ceci pour le capitaine / dont le navire n’a pas été bâti / pour la maman bouleversée / devant son berceau toujours vide / pour le cœur sans compagnon / pour l’âme privée de roi / pour la danseuse étoile / qui n’a plus aucune raison de danser » (Heart With no Companion, album Various Positions).
Du reste, au-delà de toutes les formes religieuses, il convient de souligner que plusieurs textes de notre Juif errant évoquent la rencontre de Dieu. Ces expériences mystiques, que l’auteur suggère avec discrétion, peuvent avoir pour cadre une église (Ain’t no Cure for Love, album I’m Your Man), mais aussi une simple chambre (Love Itself, album Ten New Songs), voire un lieu indéterminé (Almost Like the Blues, album Popular Problems). Pudeur cohénienne, mais aussi sans doute réticence juive à mettre un nom sur le « Sans-Nom ». « J’entends une voix qui m’évoque celle de Dieu », dit-il (Closing Time, album The Future) : n’est-ce pas elle qu’il faut reconnaître dans Going Home (album Old Ideas) : « J’aime parler avec Leonard… » ? Mais ce dialogue d’amour entre Leonard et son Dieu restera secret.
Chéri par les femmes, le David biblique apparaît également comme l’élu de Dieu, lequel déclare : « J’ai trouvé David, un homme selon mon cœur » (Actes des apôtres, 13, 22). Et notre barde de Montréal, comme en écho : « J’ai appris qu’il y avait un accord secret / que David jouait pour plaire au Seigneur » (Hallelujah, album Various Positions).
Mystique et critique
Outre les deux tonalités que l’on vient d’évoquer, la lyrique et la mystique, il existe un troisième registre, non moins prégnant chez Leonard : c’est celui du constat désabusé, parfois même désespéré pour ne pas dire nihiliste. Donnons-en quelques échantillons : « Les pauvres restent pauvres et les riches s’enrichissent / c’est comme ça que ça se passe / tout le monde le sait » (Everybody Knows, album I’m Your Man) ; « De parcourir le journal / ça donne envie de pleurer / tout le monde s’en fiche que les gens / vivent ou meurent » (In my Secret Life, album Ten New Songs) ; « Je n’ai pas d’avenir / je sais que mes jours sont comptés / le présent n’est pas si agréable / juste pas mal de choses à faire / je pensais que le passé allait me durer / mais la noirceur s’y est mise aussi » (The Darkness, album Old Ideas) ; « J’ai vu des gens qui mouraient de faim / il y avait des meurtres, il y avait des viols / leurs villages étaient en feu / ils essayaient de s’enfuir » (Almost Like the Blues, album Popular Problems).
Et rien n’échappe à cet acide corrosif, pas même l’amour des femmes. Nous voilà loin de la célébration de l’éros, comme si l’on était passé du Cantique des Cantiques… au livre de Qohélet : « Vanité des vanités, dit Qohélet ; vanité des vanités, tout est vanité » (Qohélet, 1, 2).
Mais justement, ces deux textes bibliques se présentent comme écrits par le même Salomon, ce qui ne manquera pas de rendre perplexes les commentateurs : comment le fils de David a-t-il pu composer deux ouvrages d’esprit aussi diamétralement opposé ? Les rabbins ont imaginé une réponse : c’est le jeune Salomon, amoureux et optimiste, qui a écrit le Cantique ; devenu vieux, blasé et pessimiste, il a composé le livre de Qohélet. Mais tout cela relève du même genre littéraire : la littérature de sagesse.
Somme toute, il en va de même pour Leonard, qui déploie à son tour les différents aspects d’une moderne sagesse. Du reste, mystique et critique peuvent chez lui aller de pair : « Tu m’as fait chanter / quand bien même tout allait de travers / tu m’as fait chanter / la chanson ‘Alléluia’ » (You Got me Singing, ibid.)…
Qu’il me soit permis de citer pour finir un souvenir personnel. Lors de ma première rencontre avec Leonard (une après-midi entière dans le jardin d’un hôtel particulier parisien), je lui ai posé la question : « Leonard, tu es juif ; tu es en train de parler avec un prêtre catholique ; on sait que tu t’intéresses beaucoup au bouddhisme : comment tout cela tient-il ensemble ? »
Réponse : « Oui, je suis juif, et cela a beaucoup d’importance pour moi ; j’ai des amis catholiques, et j’ai grand plaisir à parler avec eux ; je fais des séjours au monastère de Mount Baldy. Mais tu vois, pour moi, tout cela ce sont des chemins. Ce qui importe, c’est le but. La seule chose qui m’intéresse, c’est Dieu »…
Y a-t-il beaucoup de célébrités, dans le monde du show-biz, qui pourraient dire en toute vérité : « La seule chose qui m’intéresse, c’est Dieu » ?
Le poète et chanteur canadien Leonard Cohen s’est éteint à l’âge de 82 ans, a annoncé son entourage ce 10 novembre. Amoureux des mots, monstre sacré de la musique, il laisse derrière lui une carrière de plus de cinquante ans de succès qui ont traversé les générations. « Tu nous manqueras », a dit le Premier ministre canadien Justin Trudeau, dans un vibrant hommage au musicien disparu.
Leonard Cohen est mort, a annoncé son entourage ce 10 novembre 2016, quelques jours après la sortie de son dernier album You want it darker, hanté par la mort. L’homme, au visage d’acteur qui ne se défaisait que rarement de son chapeau et de sa guitare ou de son harmonica, avait 82 ans.
Né à Montréal le 21 septembre 1934, Leonard Cohen se met à la guitare dès l’adolescence et forme, quelques années plus tard le groupe de country music Buckskin Boys. Etudiant à l’université de Montréal, le musicien, qui est aussi homme de lettres, publie ses premiers poèmes dans une revue étudiante. Il n’a que 18 ans quand est édité un recueil de ses poésies. Le nom de Leonard Cohen commence à se répandre.
Le jeune homme ne cache pas son amour pour les romanciers français comme Camus et Sartre, pour le poète espagnol Federico Garcia Lorca, l’Irlandais William Butler Yeats, et pour la Bible, « les poésies de la Bible », confiait-il.
Leonard Cohen s’envole pour Londres à la fin des années 1960 puis décide de s’installer sur une île grecque, Hydra, lieu propice à l’inspiration, en 1960. Là-bas, il acquiert une maison qu’il gardera quarante ans et continue d’écrire des poèmes et des romans. En 1966, à la publication de Beautiful Losers même si le nombre de ventes n’est pas énorme, le Boston Globe déclare que « James Joyce n’est pas mort. Il vit sous le nom de Leonard Cohen ».
« Suzanne »
Puis Leonard Cohen se lance dans la chanson. Il côtoie Joan Baez, Bob Dylan, Lou Reed, etc. C’est grâce au titre très minimaliste « Suzanne », l’ex-épouse d’un de ses amis, qu’il parvient à fouler les planches de la scène musicale en 1967, aux Etats-Unis où il s’est installé. La même année il sort son premier album, Songs of Leonard Cohen, salué par la critique européenne.
Mais il faut attendre Songs from a Room (1969), pour que la future star planétaire soit reconnue, avec, entre autres, les titres « Bird on the Wire », « Story of Isaac » et « The Partisan ». Leonard Cohen va ensuite composer plus d’une dizaine d’albums, et sortir de nombreux live. Son très spirituel et mystique (et planétairement connu) « Hallelujah » sort en 1984 sur l’album Various Positions. Le changement de ton apparaît, ainsi que les synthétiseurs, en 1988 sur I’m Your Man. Pour ses 80 printemps sort Popular Problems, un album empreint de blues encensé par la critique internationale. Le charme inconditionnel de Leonard Cohen opère, encore et toujours.
Durant toute sa carrière d’écrivain, de musicien, de compositeur, Leonard Cohen n’aura presque écrit et chanté que les mêmes thèmes. L’amour et la passion bien sûr et l’espoir, mais aussi religion, la rédemption, la sexualité, la drogue, l’imperfection de la condition humaine et la solitude, un sujet dont il ne se défait que rarement, lui qui avouait être chroniquement en dépression.
Un homme mystique et charismatique
Leonard Cohen a grandi au sein d’une famille juive d’ascendance polonaise. Son grand-père était rabbin et son père, décédé alors qu’il n’a que 9 ans, a été le créateur du journal The Jewish Times. « Monsieur Cohen est un juif observant qui respecte le shabbat même lorsqu’il est en tournée », écrit le New York Times en 2009.
Parallèlement à sa judéité, Leonard Cohen se retire de la vie publique durant près de cinq ans (1994-1999) dans un monastère bouddhiste près de Los Angeles, en plein désert californien. Certains se demandent alors comment il peut être à la fois juif pratiquant et bouddhiste. « Pour commencer, dans la tradition du Zen que j’ai pratiquée, il n’y a pas de service de prière et il n’y a pas d’affirmation de déité. Donc, théologiquement, il n’y a pas d’opposition aux croyances juives », racontera l’artiste.
En 1996, Leonard Cohen est ordonné moine zen, il porte le nom de Jikan, « le silencieux ». Il faudra attendre 2001 pour retrouver le chanteur et poète, avec le sublime Ten New Songs, coécrit avec Sharon Robinson. Le compositeur, toujours très énigmatique, avoue devoir prendre son temps pour écrire, il est en quête perpétuelle de réflexion… et de perfection.
Pour sa carrière multiforme, Leonard Cohen se voit décerner de nombreuses récompenses, dont celle en 2003 de compagnon de l’Ordre du Canada, de membre du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens en 2006, membre du Rock and Roll Hall of Fame en 2008.
Des centaines de reprises et une influence sur de nombreuses générations
Parce que Leonard Cohen est un homme « à part » dans la chanson, allant de la musique folk à la pop en passant par le blues et l’électro, il n’a eu de cesse d’inspirer de nombreux artistes qui ont aussi repris, et parfois traduit, ses propres chansons.
Plus de 1 500 titres du poète chanteur ont été repris. Il en va ainsi de dizaines d’artistes de renommée mondiale, dont Nina Simone, Johnny Cash, Willie Nelson, Joan Baez, Bob Dylan, Nick Cave, Peter Gabriel, Alain Bashung, Graeme Allwright, Suzanne Vega, sans oublier la version bouleversante d’ « Hallelujah » par Jeff Buckley.
Leonard Cohen a de son côté très rarement repris des titres dont il n’était pas l’auteur. Parmi eux, sa réinterprétation de « La complainte du partisan » (dont la musique est signée Anna Marly, coautrice avec Maurice Druon et Joseph Kessel du « Chant des partisans »). « The Partisan », sera aussi repris à son tour par Noir Désir.
Le 29 juillet 2016, Marianne Ihlen, la muse norvégienne de Leonard Cohen pour qui il compose « So, long, Marianne » disparaît à l’âge de 81 ans. Leonard Cohen, deux jours avant la mort de « la plus belle femme qu’il ait jamais connue », lui écrit une lettre. « Eh bien, Marianne, voici venu le temps où nous sommes vraiment si vieux que nos corps partent en morceaux, et je crois que je vais te suivre très bientôt. Sache que je suis si près derrière toi qu’en tendant ta main, tu peux toucher la mienne (…) Je veux seulement te souhaiter un très bon voyage. Adieu, ma vieille amie. Mon amour éternel, nous nous reverrons. » So long, Leonard Cohen.
Voir par ailleurs:
The Chosen Few
Has an emphasis on education been bad for the Jewish population?
Steven Weiss
Slate
Nov. 9 2012
Jews, as a whole, have done very well for themselves in the West since World War II: Besides the aforementioned Nobel prizes, American Jews, according to one of the largest studies, are nearly twice as likely to have a college degree as the average American and more than four times as likely to have a graduate degree. This translates into a serious economic advantage: American Jews are roughly 33 percent more likely to be employed in a high-status job category, and Jewish households here report around 25 percent higher income than the average American household.
While examining such a phenomenon would have been unthinkable a few decades ago—when Jews generally tended to be more frightened of raising the kinds of topics anti-Semites like to talk about—the past decade or so has seen a wellspring of effort devoted to tackling what’s variously described as Jewish « literacy, » « superiority, » or any number of other things, including « chosenness. »
The core theory usually derives from a mix of two themes that stand out in Jewish history: an emphasis on education and a tendency to be persecuted. For the former, the rabbis of the Talmud and thereafter were fierce advocates of universal primary education, with the best-known example being a Jewish boy indicating his achievement of Jewish adulthood by reading publicly from the Torah at a bar mitzvah. (Universal primary education was boys-only until at least the late 19th century.) In regard to persecution, a common notion is that Jews weren’t allowed to own land throughout much of their history in exile and thus were forced to invest in a form of personal capital that could be of value across geographies. There are other theories, too, some even including a notion of simple genetic superiority, by way of an idea that Jewish communities modified natural selection through upholding scholars as examples of the proper way to be, providing them the choicest wives and expecting them to have many children.
The problem with so many of the theories thus far expounded is that they have gaping holes in logic or evidence so large that let’s just say they’d never make it into the Talmud. By far the largest fault with them is the reality that many of these arguments rely on an idea of the Jewish past that we don’t have any good reason to think is true; just because the rabbis desired it doesn’t mean it was necessarily so. And our overall received notions of a Jewish community that was fiercely observant and often Orthodox also have little evidence to back them up. (And, as Alana Newhouse revealed a couple of years ago, even the images we have of a fiercely pious Jewish shtetl have been largely manipulated.)
Maristella Botticini and Zvi Eckstein started jawing over the issue of the Jews’ economic history in the Boston University cafeteria 12 years ago, and the resulting research, conferences, and communication since has produced the first of a two-volume work, The Chosen Few, that tackles these issues in a way no one has before, taking an interdisciplinary approach to this basic question.
By combining a very thorough look at the historical record with new economic and demographic analyses, the authors summarily dismiss a great many of the underlying assumptions that have produced theories around Jewish literacy in the past. Where many tied the Jewish move into professional trades to the European era when Jews were persecuted, Botticini and Eckstein bring forward evidence that the move away from the unlettered world of premodern agriculture actually happened a thousand years earlier, when Jews were largely free to pursue the profession of their choice. And where so many have simply taken as a given universal literacy among Jews, the economists find that a majority of Jews actually weren’t willing to invest in Jewish education, with the shocking result that more than two-thirds of the Jewish community disappeared toward the end of the first millennium.
Botticini and Eckstein pore over the Talmud and notice the simple fact that it’s overwhelmingly concerned with agriculture, which, in conjunction with archaeological evidence from the first and second century, paints a picture of a Jewish past where literacy was the privilege of an elite few. But these rabbis were also touting a vision of a future Judaism quite different from that which had been at least symbolically dominant for much of Jewish history to that point. Where a focus on the Temple in Jerusalem, with ritual sacrifices and the agricultural economy they required being the standard to that point, these rabbis—broadly speaking, the Pharisees—sought to emphasize Torah reading, prayer, and synagogue. When the sect of Judaism that emphasized the Temple—broadly, the Sadducees—was essentially wiped out by the Romans shortly after the time of Jesus, the Pharisaic leaders, in the form of the sages of the Talmud, were given a mostly free hand to reshape Judaism in their own image. Over the next several hundred years, they and their ideological descendants codified the Talmud and declared a need for universal Jewish education as they did so.
All of this history is widely known and understood, but what Botticini and Eckstein do differently is trace this development alongside the size of the Jewish population and their occupational distribution. The Jewish global population shrunk from at least 5 million to as little as 1 million between the year 70 and 650. It’s not surprising that a conquered people, stifled rebellions, and loss of home would lead to population shrinkage, but Botticini and Eckstein argue that « War-related massacres and the general decline in the population accounted for about half of this loss. » Where did the remaining 2 million out of 3 million surviving Jews go? According to them, over multiple generations they simply stopped being Jewish: With the notion of Jewish identity now tied directly to literacy by the surviving Pharisaic rabbis of the Talmud, raising one’s children as Jews required a substantial investment in Jewish education. To be able to justify that investment, one had to be either or both an especially devoted Jew or someone hoping to find a profession for his children where literacy was an advantage, like trade, crafts, and money lending. For those not especially devoted and having little hope of seeing their children derive economic benefit from a Jewish education, the option to simply leave the Jewish community, the economists argue, was more enticing than the option to remain as its unlettered masses. Two-thirds of the surviving Jewish population, they assert, took that route.
This distinct twist of the population story, which accompanies research showing a shift from nearly 90 percent of the Jewish population engaging in agriculture to nearly 90 percent engaging in professional trades over that same several hundred years, addresses a key problem of previous theories of Jewish literacy: determining what happened to those who wouldn’t be scholars.
Botticini and Eckstein bring other evidence of Jewish tradition generating success in trade. An extrajudicial system of rabbinical courts for settling disputes allowed for the development of the kind of trust required for commercial enterprises to grow. A universal language of Hebrew eased international negotiations. And in a devastating critique of the theory that persecution actually pushed this economic shift along, the economists examine the societies in which Jews originally developed this bias toward trades and find Jews faced no particular discrimination that would have made them less successful in agriculture. In fact, they show, Jews were often discriminated against precisely because of their emphasis on trade, such as in their expulsion from England in 1290, which only came after they were repeatedly told to give up the profession of money lending (eventually echoed in Ulysses S. Grant’s order to expel the Jews from the territory under his command during the Civil War).
And so the Jewish people have grown into a people of two intertwined legacies: a culture in which the Jewishly literate continue to pass the torch and one in which an emphasis on trades was necessary to continue to do so for all but the most fervently devoted. When a given family stopped being devoted or wealthy enough, it simply faded away.
The astonishing theory presented here has great implications for both the Jewish community and the broader world today. For an American Jewish community in which more than 75 percent of day school students are now Orthodox and the top concern for most Orthodox families in repeated surveys is finding a way to pay for ever-increasing tuition costs, the price of admission to the highly affiliated Jewish community is not just a large amount of ritual observance but also a basic need to join the 1 percent—or nearly so. Frequently, one can hear Orthodox Jews joke that $250,000 a year is « minimum wage » for the community; certainly, this overstates things but only by so much. In the New York area, elementary school often carries a price tag of $15,000-$25,000 in post-tax dollars per year; at the high-school level, some tuition rates are well into the $30,000 range. Outside of the New York area, tuition is generally lower, but so is the average income. And as Botticini and Eckstein predicted for their medieval models, modern American Jews who are fiercely devoted but without high incomes will endure significant financial sacrifice to maintain their Jewish lifestyles: The ultra-Orthodox enclave of Kiryas Joel, N.Y., is the poorest city in the country, and ultra-Orthodox communities broadly are frequently both poor and heavy recipients of government assistance.
And for most of the 80 to 90 percent of families representing the non-Orthodox portion of the Jewish community in America, the cost of Jewish education has simply meant great numbers growing up without the ability to read Hebrew or engage with the Bible and other Jewish texts.
Here we see precisely the same dichotomy that Eckstein and Botticini saw in the early years of post-Temple rabbinic Judaism: The especially devoted and wealthy provide their children with a Jewish education, but many others see too high a price in either or both of time and money and so choose a different path.
And yet, so many of today’s unlettered Jews have been able to retain at least some sense of Jewish identity, where their predecessors 1,500 years ago could not. A majority of American Jews today are unaffiliated with the synagogues the Pharisaic rabbis emphasized, and yet 79 percent report feeling « very positive » about being Jewish. In part, Botticini and Eckstein would likely argue, that’s because of America’s unique tolerance of Jews, which removes the economic disincentive of maintaining an identity as a Jewish minority even when one doesn’t have a very strong connection to Judaism.
At the same time, today’s unaffiliated Jews no longer face an economic disadvantage relative to those attending Jewish schools: The aim for universal literacy in America broadly, and increasingly in all corners of the world, has led to the same kinds of professional opportunities for many people in the way that Jews used to have largely to themselves. Or, as Eckstein put it in an interview with me, « Almost everybody has become Jewish, because almost everybody is literate. »
A note from Paul Solman: Nine years ago, someone sent me an academic paper that put forward a radically new explanation of why Jews have been so successful economically. Written by economists Maristella Botticini and Zvi Eckstein, the paper explained Jewish success in terms of early literacy in the wake of Rome’s destruction of the Temple in 70 C.E. and the subsequent dispersion of Jews throughout the Roman empire – Jews who had to rely on their own rabbis and synagogues to sustain their religion instead of the high priests in Jerusalem.
You may know a similar story about the Protestant Reformation: the bypassing of the Catholic clergy and their Latin liturgy for actual reading of Scripture in native languages and the eventual material benefits of doing so. Why is Northern Europe — Germany, Holland, England, Sweden — so much more prosperous than Southern Europe: Portugal, Italy, Greece, Spain? Why do the latter owe the former instead of the other way around? Might it have something to do with the Protestant legacy of the North, the Catholic legacy of the South?
Botticini and Eckstein have spent their careers studying not Christianity, but Judaism. And they have now come out with a book elaborating on their novel thesis: “The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History, 70-1492,” published by the Princeton University Press.
Maristella Botticini and Zvi Eckstein: Imagine a dinner conversation in a New York or Milan or Tel Aviv restaurant in which three people–an Israeli, an American, and a European — ask to each other: “Why are so many Jews urban dwellers rather than farmers? Why are Jews primarily engaged in trade, commerce,
entrepreneurial activities, finance, law, medicine, and scholarship? And why have the Jewish people experienced one of the longest and most scattered diasporas in history, along with a steep demographic decline?”
Most likely, the standard answers they would suggest would be along these lines: “The Jews are not farmers because their ancestors were prohibited from owning land in the Middle Ages.” “They became moneylenders, bankers, and financiers because during the medieval period Christians were banned from lending money at interest, so the Jews filled in that role.” “The Jewish population dispersed worldwide and declined in numbers as a result of endless massacres.”
Imagine now that two economists (us) seated at a nearby table, after listening to this conversation, tell the three people who are having this lively debate: “Are you sure that your explanations are correct? You should read this new book, ours, “The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History,” and you would learn that when one looks over the 15 centuries spanning from 70 C.E. to 1492, these oft-given answers that you are suggesting seem at odds with the historical facts. This book provides you with a novel explanation of why the Jews are the people they are today — a comparatively small population of economically successful and intellectually prominent individuals.”
Suppose you are like one of the three people in the story above and you wonder why you should follow the advice of the two economists. There are many books that have studied the history of the Jewish people and have addressed those fascinating questions. What’s really special about this one?
To understand the spirit of the study we’ve undertaken, one should borrow two tools: a magnifying glass and a telescope. With the magnifying glass, the reader will be like a historian, who focuses on a place and a time period, painstakingly digs through the sources, and carefully documenting the historical trajectory of the Jews there. A thousand such scholars will offer a detailed description of the history of the Jews in hundreds of locales throughout history.
But with the telescope, the reader will be like an economist, who assembles and painstakingly compares the information offered by the works of the historians, creates a complete picture of the economic and demographic history of the Jewish people over 15 centuries, and then uses the powerful tools of economic reasoning and logic to address one of the most fundamental questions in Jewish history:
Why are the Jews, a relatively small population, specialized in the most skilled and economically profitable occupations?
In doing so, the “alliance” of the historians and the economists offers a completely novel interpretation of the historical trajectory of the Jews from 70 to 1492. In turn, this may help us understand several features of the history of the Jewish people from 1500 up to today, including the successful performance of the Israeli economy despite the recent economic crisis.
The journey of “The Chosen Few” begins in Jerusalem, following the destruction of the Second Temple in the year 70, continues in the Galilee during the first and second centuries, moves to Babylon in Mesopotamia during the fourth and fifth centuries, and then to Baghdad in the second half of the first millennium when the Muslim Abbasid empire reaches its economic and intellectual apex.
At the turn of the millennium, the historical voyage reaches Cairo, Constantinople, and Cordoba, and soon after the whole of western and southern Europe, then turns back to Baghdad in the 1250s during the Mongol conquest of the Middle East before ending in Seville in 1492.
During these 15 centuries, a profound transformation of Judaism coupled with three
historic encounters of the Jews — with Rome, with Islam, and with the Mongol Conquest — shaped the economic and demographic history of the Jewish people in a unique and long-lasting way up to today.
Let’s first start describing the profound transformation of Judaism at the beginning of the first millennium, which has been amply documented by scholarly works. In the centuries before 70, the core of Judaism was centered around two pillars: the Temple in Jerusalem, in which sacrifices were performed by a small elite of high priests, and the reading and the study of the Written Torah, which was also restricted to a small elite of rabbis and scholars. (It was the power of this elite that the Jew Yeshua ben Josef, later know as Jesus Christ, so often decried.)
The destruction of the Temple in 70 at the end of the first Jewish-Roman war was the first of the three external events which permanently shaped the history of the Jewish people. Momentously, it canceled one of the two pillars of Judaism, shifting the religious leadership within the Jewish community from the high priests in Jerusalem to a much more widely dispersed community of rabbis and scholars. In so doing, it transformed Judaism into a religion whose main norm required every Jewish man to read and to study the Torah in Hebrew himself and, even more radically, to send his sons from the age of six or seven to primary school or synagogue to learn to do the same.
In the world of universal illiteracy, as it was the world at the beginning of the first millennium, this was an absolutely revolutionary transformation. At that time, no other religion had a similar norm as a membership requirement for its followers, and no state or empire had anything like laws imposing compulsory education or universal literacy for its citizens. The unexpected consequences of this change in the religious norm within Judaism would unfold in the subsequent centuries.
To understand what happened to the Jewish people in the eight centuries after 70, “The Chosen Few” asks the reader to travel back in time to a village in the Galilee around the year 200. What would the reader see?
They would see Jewish farmers, some rich, some poor who have to decide whether to send their children to primary school as their rabbis tell them to do. Some farmers are very attached to Judaism and willing to obey the norms of their religion, others are not very devout and consider whether or not to convert to another religion. In this rural economy, educating the children as Judaism requires is a cost, but brings no economic benefits because literacy does not make a
farmer more productive or wealthier.
Given this situation, what would economic logic predict? What would likely happen to Judaism and the Jewish people? Given a high preference for religious affiliation, some Jews will educate their children and will keep their attachment to their religion. Other Jews, however, will prefer their material well-being and will not educate their children. Furthermore, a portion of this latter group will likely convert to other religions with less demanding requirements. And so, over time, even absent wars or other demographic shocks, the size of the Jewish population will shrink because of this process of conversions.
But are the predictions of the economic theory consistent with what really happened to the Jews during the first millennium? The historical evidence assembled in our book says yes. The implementation of this new religious norm within Judaism during the Talmud era (third to sixth centuries) determined two major patterns from 70 C.E. to the early 7th century.
The first of these trends was the growth and spread of literacy among the predominantly rural Jewish population. The second: a slow but significant process of conversion out of Judaism (mainly into Christianity) which, caused a significant fall in the Jewish population — from 5 to 5.5 million circa 65 to roughly 1.2 million circa 650. War-related massacres and epidemics contributed to this drastic drop, but they cannot by themselves explain it.
At the beginning of the 7th century, the Jews experienced their second major historic
encounter — this time with Islam. In the two centuries after the death of Mohammed, in 632, the Muslim Umayyad and, later, Abbasid caliphs, established a vast empire stretching from the Iberian Peninsula to India and China, with a common language (Arabic), religion (Islam), laws, and institutions. Concomitant with the ascent of this empire, agricultural productivity grew, new industries developed, commerce greatly expanded, and new cities and towns developed. These changes vastly increased the demand for skilled and literate occupations in the newly established urban empire.
How did this affect world Jewry? Between 750 and 900, almost all the Jews in Mesopotamia and Persia — nearly 75 percent of the world’s remaining 1.2 million Jews — left agriculture, moved to the cities and towns of the newly established Abbasid Empire, and entered myriad skilled occupations that provided higher earnings than as farmers. Agriculture, the typical occupation of the Jewish people in the days of Josephus in the first century, was no longer their typical occupation seven to eight centuries later.
This occupational transition occurred at a time in which there were no legal restrictions on Jewish land ownership. The Jews could and did own land in the many locations of the vast Abbasid Muslim Empire. And yet, Jews moved away from farming. This is of vital importance.
Modern explanations of why the Jews became a population of craftsmen, traders, shopkeepers, bankers, scholars, and physicians have relied on supposed economic or legal restrictions. But these do not pass the test of the historical evidence.
This is one of our main and novel messages: mass Jewish literacy was key. It enabled Jews — incentivized Jews — to abandon agriculture as their main occupation and profitably migrate to Yemen, Syria, Egypt, and the Maghreb.
The tide of migrations of Jews in search of business opportunities also reached Christian Europe. Migrations of Jews within and from the lands of the Byzantine Empire, which included southern Italy, may have set the foundations, via Italy, for much of European Jewry. Similarly, Jews from Egypt and the Maghreb settled in the Iberian Peninsula, and later, in Sicily and parts of southern Italy.
The key message of “The Chosen Few” is that the literacy of the Jewish people, coupled with a set of contract-enforcement institutions developed during the five centuries after the destruction of the Second Temple, gave the Jews a comparative advantage in occupations such as crafts, trade, and moneylending — occupations that benefited from literacy, contract-enforcement mechanisms, and networking and provided high earnings.
Once the Jews were engaged in these occupations, there was no economic pressure to convert, which is consistent with the fact that the Jewish population, which had shrunk so dramatically in earlier times, grew slightly from the 7th to the 12th centuries.
Moreover, this comparative advantage fostered the voluntary diaspora of the Jews during the early middle ages in search of worldwide opportunities in crafts, trade, commerce, moneylending, banking, finance, and medicine.
This in turn would explain why the Jews, at this point in history, became so successful in occupations related to credit and financial markets. Already during the 12th and 13th centuries, moneylending was the occupation par excellence of the Jews in England, France, and Germany, and one of the main professions of the Jews in the Iberian Peninsula, Italy, and other locations in western Europe.
A popular view contends that both their exclusion from craft and merchant guilds and usury bans on Muslims and Christians segregated European Jews into moneylending during the Middle Ages. But our study shows, with evidence we have come upon during more than a decade of research, that this argument is simply untenable.
Instead, we have been compelled to offer an alternative and new explanation, consistent with the historical record: the Jews in medieval Europe voluntarily entered and later specialized in moneylending and banking because they had the key assets for being successful players in credit markets:
capital already accumulated as craftsmen and traders,
networking abilities because they lived in many locations, could easily communicate with and alert one another as to the best buying and selling opportunities, and
literacy, numeracy, and contract-enforcement institutions — “gifts” that their religion has given them — gave them an advantage over competitors.
With these assets, small wonder that a significant number of Jews specialized in the most profitable occupation that depended on literacy and numeracy: finance. In this sector they worked for many centuries. As they specialized, just as Adam Smith would have predicted, they honed their craft, giving them a competitive advantage, right up to the present.
But what if the economy and society in which the Jews lived, suddenly ceased being urban and commercially-oriented and turned agrarian and rural, reverting to the environment in which Judaism had found itself centuries earlier?
The third historic encounter of the Jews — this time with the Mongol conquest of the Middle East — offers the possibility to answer this question. The Mongol invasion of Persia and Mesopotamia began in 1219 and culminated in the razing of Baghdad in 1258. It contributed to the demise of the urban and commercial economy of the Abbasid Empire and brought the economies of Mesopotamia and Persia back to an agrarian and pastoral stage for a long period.
As a consequence, a certain proportion of Persian, Mesopotamian, and then Egyptian, and Syrian Jewry abandoned Judaism. Its religious norms, especially the one requiring fathers to educate their sons, had once again become a costly religious sacrifice with no economic return. And so a number of Jews converted to Islam.
Once again, persecutions, massacres, and plagues (e.g., the Black Death of 1348) took a toll on the Jewish population in these regions and in western Europe. But the voluntary conversions of Jews in the Middle East and North Africa, we argue, help explain why world Jewry reached its lowest level by the end of the 15th century.
The same mechanism that explains the decline of the Jewish population in the six centuries after the destruction of the Second Temple, that is, accounts for the decline of the Jewish communities of the Middle East in the two centuries following the Mongol shock.
None of this was planned. The rabbis and scholars who transformed Judaism into a religion of literacy during the first centuries of the first millennium, could not have foreseen the profound impact of their decision to make every Jewish man capable of reading and studying the Torah (and, later, the Mishna, the Talmud, and other religious texts).
However, an apparently odd choice of religious norm–the enforcement of literacy in a mostly illiterate, agrarian world, potentially risky in that the process of conversions could make Judaism too costly and thus disappear–turned out to be the lever of the Jewish economic success and intellectual prominence in the subsequent centuries up to today. This is the overall novel message of “The Chosen Few.”
Maristella Botticini is professor of economics, as well as director and fellow of the Innocenzo Gasparini Institute for Economic Research (IGIER), at Bocconi University in Milan.
Zvi Eckstein is the Mario Henrique Simonson Chair in Labor Economics at Tel Aviv University and professor and dean of the School of Economics at IDC Herzliya in Herzliya, Israel.
Their current book, “The Chosen Few,” won the National Jewish Book Award for scholarship. Addressing the puzzles that punctuate Jewish history from 1492 to today is the task of the next journey, which the authors will take in their next book, “The Chosen Many.”
Princeton – Oxford: Princeton University Press, 2012, pp. xvii-323 (Kindle Edition).
(Heb. Transl. Haim Rubin, Tel Aviv, 2012; It. Transl. Università Bocconi Editore, Milano, 2013)
Cristiana Facchini
The Return of the Grand Narrative
In 1899, Henry Dagan published a short collection of interviews under the title Enquête surl’antisemitisme.1 All the most prominent French and Italian intellectuals of socialist beliefs were asked a few questions about the rise and spread of anti-Semitism. Amongst the many different answers given for it, a particular one emerged.
Most likely owing to a common socialist culture, the intellectuals that took part in this project explained that the rise of new forms of anti-Semitism could be better understood through the economic prism, therefore presenting anti-Semitism as a response to the economic struggle intensified by capitalism, and ultimately as a form of resentment that spread amongst impoverished middle classes. The chief editor of the Journal des économistes established a parallel that was almost a myth. He claimed that anti-Semitism and hatred against the Jews were to be compared to the expulsion of the Huguenots from France in seventeenth century, as economic and religious persecution usually ran parallel. The religious persecutions of the Huguenots could be explained as economic persecution that applied perfectly to Jews of the nineteenth century. According to this explanation, Catholic religious intolerance caused the expulsion of the most dynamic factions of society, and thus provoked the decline of Catholic nations. Surprisingly enough, this explanation was grounded in seventeenth century Jewish thought, an argument that was originally elaborated by Simone Luzzatto, a learned and sophisticated Venetian rabbi, in an attempted plea for tolerance of the Jews according to the doctrine of raison d’état.2 The decline of Catholic countries was later to be explained as the result of the expulsion of Jews and the rise of new mercantile nations that preached religious tolerance, namely, those of Protestant leaning. How these arguments developed since the early modern period cannot be explored here. Nevertheless, they provide an ideal framework for the understanding of recent trends in historiography of the Jews and Judaism.
Religion and economy have been at the core of scholarly debate and public discussion since the inception of modernity as such. The groundbreaking work of Max Weber and his underlining critique of Marxist interpretation of religion and economy played – and in some ways continue to play – a key role in addressing research in the field of religion and economic modernization. Weber also assigned a significant role to Judaism, although his work contributed to fueling an enormous debate and some resentful reactions, especially from Jewish intellectuals.3 Ever since, historians have been debating the relationship between religion and economy, with each historiographical tradition opposing, criticizing, supporting or correcting Weber’s hypothesis.4
Scholarly research on the economic behavior of religious minorities, and more precisely of merchant communities, has attracted a lot of attention. Works such as Yuri Slezkin and Francesca Trivellato, to mention just a few, analyzed the role of religious and ethnic minorities and the services they provided for their host communities from different angles.5 Historiography on port-cities has suggested that religious minorities – and Jews especially – offered highly specialized services, which added to shaping a certain path to modernity.6
While the above-mentioned works dealt with early modern and modern Jewish history, certainly providing a ‘grand narrative,’ works that embrace the long sweep of Jewish history, or even the whole notion of Judaism, are much rarer in the context of postmodern narratives. In this sense, the book of Maristella Botticini and Zvi Eckstein is a novelty in the recent historiographical setting, and therefore calls for a short commentary.
The Chosen Few is a book that encompasses the history of the Jews from the destruction of the Second Temple (70 CE) to the expulsion from Spain in 1492. Attempts to write a comprehensive history of Judaism are very rare: there are a few excellent exceptions, with the most outstanding examples being sociologist Shemuel N. Eisenstadt’s Jewish Civilization and Judaism by Catholic theologian Hans Kung. Both perspectives are culturally charged, the first one being from a Jewish standpoint, and the second from a Christian stance. Nevertheless, both are interesting as they convey modes of understanding Judaism in its extraordinary long history and in holistic terms: as a complex religious system, and subsequently, as a civilization that coped with many challenges of various natures.
Ancient Judaism underwent a form of seismic modification that, as Botticini and Eckstein describe, redefined the religious structure of Judaism. The most typical example is the disappearance of the sacrificial system that was organized around the temple of Jerusalem following its destruction in 70 CE. The political collapse of ancient Judaism is the starting point of the Chosen Few, which aims at understanding the epochal changes of rabbinical Judaism, and more precisely, the kind of culture Judaism prompted after what might aptly be called the great “trauma” of the collapse of its ancient and central structure. The Chosen Few deals with the relationship between religious rules and literacy, and accordingly, it attempts to investigate the transformation that Judaism underwent through a relatively long formative period. More precisely, the authors are interested in reassessing some tenets of Jewish history, from late antiquity to the early Renaissance, as they claim in their book.
The Chosen Few is divided into ten chapters, each one dealing with a specific topic: the first one introduces the general theme of the book, and particularly deals with the issue of demography; the second aims at assessing whether or not the Jews were a persecuted minority; the third chapter progresses through a chronological path and deals with the introduction of new rules related to religious literacy as a feature of ancient Judaism; chapter four is mainly theoretical, whereas chapter five delves into the consequences of literacy from 200-650. The sixth chapter follows up on and analyzes the transformation of Jews from farmers into merchants (750-1150); the seventh deals with migration and the eighth with the key issue of segregation and money-lending (1000-1500); the ninth introduces a lesser-known topic, which is the impact of the Mongol conquest, and finally, the last chapter summarizes the results and offers new insight into future research.
The table of contents clearly reflects major trends in historiography of the latest decades, although both authors address one of the main issues that have been on the agenda of historians and social scientist since the nineteenth century, when historiography on Jews and Judaism developed into a more or less professional discipline. How and why did Jews turn to certain specific professions, namely money-lending, medicine, trade, and a few other specialized urban occupations? The debate over Jews, Judaism and economy is an important part of Western thought, not to mention the very problematic essay composed by Marx on the “Jewish Question”, which fired, along with other writings on religion, the scholarly and public debate on religion and its role in society. These questions reflected a different problem as well, which was related to the process of political emancipation of the Jews in European society. The issue over role of the Jews in the past was twofold, and reflected changes in the process of Jewish integration throughout the nineteenth and early twentieth century. On one hand, supporters of Jewish emancipation suggested that the Jewish economic structure and specialization should also be changed, and that Jews must be permitted to practice professions that they were previously barred from, due to religious hatred. Political emancipation and reforms, like the ones implemented in the Hapsburg Empire, contributed to a great extent in shifting the professional position of the Jews. These achievements and their relatively successful integration into the fabric of modern society incited resentment and new forms of anti-Semitism.
Historians and Jewish historiography in particular underlined how Jews were pushed by legal restrictions and impediments into despised and risky professions, namely to the performance of what was considered “polluted activities.” This was especially true in Christian societies where, though often with a certain ambivalence, some economic activities were forbidden for specific social groups. Authors of The Chosen Few challenge a set of these historical explanations, and expressly claim that they are retroactive historiographical answers that may not be applicable to the history of the Jews in late antiquity and the medieval period. Let us briefly follow the authors on their journey.
The first assumption is that Jews in the ancient world (200b BCE – 200 CE) who lived in Eretz Israel were mainly occupied in agricultural activities. In a time span of a few centuries however, Jews of the Diaspora had dramatically changed their economic and professional position. How had that come into being? The change is particularly indebted to the introduction of a rule that proved to be central, according to Botticini and Eckstein’s account. It is precisely the rule attributed to Yehoshua ben Gamla, a priest mentioned in the early rabbinic texts, according to which a compulsory obligation to teach Torah to children was enforced as a communal regulation. In comparative terms, this norm was introduced in the background of a religious world that was modeled after the rules of ancient religions, which focused on sacrificial offerings and temple activities, initiation and magic, fasting and prayers.7 Despite their different beliefs and ritual structure, Roman and Greek religions, alongside Zoroastrianism, mysteries religions, Orphic and Dionysian cults, and Mithraism never implemented a law that imposed significant textual knowledge of a written sacred tradition. For historians of religion this is an important innovation indeed, even though the imminent spread of Christianity and Islam would introduce a great number of additional transformations to the religious world of late antiquity.8 We will not discuss the issue extensively; suffice it to note that literacy was not one of the primary interests of other religious groups, which preserved, transmitted and elaborated religious memory in different ways and through other means.
Compulsory Jewish education, the goal of which was primarily religious and not universal, contributed to redefining the borders of Judaism when the “religious market” was fluid and very diverse. In chapter four, the authors apply some known theories based on choice analysis and economic behavior. Moreover, they highlight how a religious system is defined according to its appeal and capability to attract or sustain its members. Religion is one of the many commodities that are available on a relative free market, and it is likely to attract or reject on the basis of its appeal. Men and women will choose according to their expectations and needs. “Religious affiliation typically requires some costly signal of belonging to a club or network,”9 and rabbinic Judaism required literacy and education. According to this norm, Jewish farmers had to send their children to school where the teaching of the Torah was enforced. In other words, it meant they had to invest time and resources in religious literacy, rather than having the help of their children in working the land. Any farming society would be well-acquainted with this problem.
On the basis of this assumption, the authors elaborate a model, which aims to explain the demographic crisis of Judaism between the first and seventh century, and the pattern of conversion. According to the model, the high cost of the norm was likely to drive away Jewish families that were unwilling to receive such low benefits or that were not wealthy enough to support such a request. The idealized Galilean village of around 200 CE, as it is envisioned by the authors, depicts several situations that are likely to provide an explanation for patterns of conversion in late antiquity. The religious farmer, whether wealthy or less so, would perform the norm because the benefits of belonging to the group were higher than the cost of literacy. Yet both the wealthy and the less affluent farmer might also choose to not obey the norm for a number of reasons, and thus would have to accept the social stigma that came with the label of am ha-aretz.10 Ultimately, they might decide to convert and join a different religious group, especially one of the many Christian sects that proliferated in the late antiquity period, and that were quite familiar, particularly those still following certain Jewish rules (as the Ebionites did). Rich and poor were likely to pay the cost of compulsory religious literacy and belong to the group; or, they might avoid the cost and live on the margin of the religious group, ultimately deciding to convert to another religion.
This theory is fascinating and offers new insight into what can be termed self-segregation rules, focusing, in this case for example, on literacy more than the laws of purity. It also provides an explanatory theory for conversion that is applicable to societies that are relatively open and pluralistic in their religious organization. Examples of microhistory, which are not provided for this period, might shed light on the opportunities, constraint and options made available to a small or larger group of Jews. Their choices would be determined by a number of factors that would influence their actions and practice.
The implementation of the rule of religious education spread during the Talmudic period (200-650) when the society of farmers became literate. Talmudic literature, Gaonic responsa and archeological evidence from synagogues indicate a strong emphasis on universal education.
The implementation of rule over education coincides with the demographic decline detected by scholars. Although figures vary, there is a scholarly consensus on the dramatic drop of the Jewish population between the fall of the temple and the end of the Talmudic period. The causes of this decline were usually attributed to the impact of wars, famine, plague and changes in fertility rates. However, Botticini and Eckstein claim that these explanations are not supported by evidence, and the only explanation for the demographic demise of the Jewish population is conversion. As the theory suggests, conversion of Jews to Christianity escalated as a result of religious rules that enforced increased literacy in the framework of a farming society.
In the following centuries major changes took place in the religion and culture of the Jews, and the structure of the Jewish Diaspora was reconfigured. What were the consequences of this process? From chapter six onward, the theory defined in the previous chapters is used to explain the main, though inadvertent, changes in the social structure of Judaism. The world of literate farmers was destined to develop into a world of urban professionals composed of merchants, doctors, craftsmen, and artisans. As a part of the old Diaspora vanished in highly Hellenized areas, a new Diaspora rose in those regions that underwent a religious revolution around the seventh century CE. The majority of Jews now lived in Mesopotamia and Persia, where they slowly abandoned agriculture and moved to villages in order to practice new professions. This transformation reached its apex after the establishment of the Abbasid Empire.11 “This occupational transition took about 150 years: by 900 the overwhelming majority of the Jews in Mesopotamia and Persia were engaged in a wide variety of crafts, trade, moneylending and medicine.”12
The rise of Islam and the establishment of a world-wide, highly urbanized and dynamic empire offered the ideal setting for the benefits enhanced by literacy. The authors claim that, in the changing context of the Muslim caliphate, religious literacy had “spillover effects,” meaning that skills acquired by learning to read and write might improve the ability to count, write contracts and letters, and therefore bolster practices of law-enforcement. The improvement in technology, science and art that accompanied the development of a sophisticated empire contributed to the dissemination of literacy at large, and these main changes in society contributed to reinforcing literacy among Jews. Using ample evidence from the Cairo Geniza and specifically Shelomo Goitein’s research, the authors highlight that literacy was spread among Jewish communities of the Muslim world, where, one should add, seventy percent of Jewry lived.
Following Avner Greif, the authors stress how rabbinic Judaism, with Talmudic and responsa literature, were able to build a system of legal protection which operated as a contract-enforcement mechanism, even in the absence of a state. In this sense, a common language and high literacy contributed to transforming Jewish settlements and their professional landscape radically, prompting a change that, according to Botticini and Eckstein, would continue in the following centuries.
The following chapters are devoted to describing the formation of a voluntary Diaspora, and focus on the rise of Western European Jewry. How did Jews arrive to the Christian countries of Western Europe?
Chapter seven and eight address the question of how the Diaspora came into being, and how Jews willingly moved from different areas – mainly to cities – in search of better social conditions and professional options. The arrival of Jews into the diverse and parceled Christian kingdoms of the Middle Ages suggests that Jews were invited, in small groups, to offer their highly specialized services. A parallel development in the cultural and religious milieu took place in the same period, with the emergence of the great rabbinic centers of France and Ashkenaz that contributed to normalizing support for these new settlements. By the year 1000, charters show that Jews could own land, and were involved in the fields of craft, trade and medicine in general, with highly specialized urban professions. However, money-lending was not a distinctively Jewish occupation. How did Jews become involved in money-lending?
The answer follows the path of argumentation which was set forth earlier. The authors explore different historical explanations, according to which Jews were pushed into money-lending: one suggests that they were thrust into it because of the exclusive membership of Christian guilds (Roth); another one emphasizes persecutions and portable capital as driving forces that produced this professional specialization, and the last explanation is given by Haym Soloveitchik, which regards the laws on buying and selling wine in medieval Europe. Because wine was a profitable commodity, Jewish involvement with this business needed to be formally and legally sanctioned from within the Jewish community. According to Soloveitchik, laws regulating wine trade and consumption were gradually softened by eminent rabbis – particularly Rashi – and the strict rules that forbade Jews to drink, buy and sell wine produced by Gentiles was slowly lifted.
Botticini and Eckstein offer some historical examples of a Jewish preference for money-lending. Both English and French cases illustrate how Jews became preeminent in money-lending and how later, between the thirteen and the fourteenth century, they were slowly replaced by Christians, especially Lombards and Florentines. Jews were expelled from England in 1290, more than a century after the appearance of ritual murder libels. In France, after reaching a key role in money-lending, Jews were expelled at the end of fourteenth century, and the same pattern is traceable throughout German lands and elsewhere, with the exception of the Italian states and the Iberian Peninsula.
“We show that the entry and then specialization of the Jews in lending money at interest can be explained by their comparative advantage in the four assets that were and still are the pillars of the financial intermediation: capital, networking, literacy and numeracy, and contract enforcement institutions.”13 This is the leitmotif that supports the whole narrative, which is a grand narrative on Judaism: literacy and economic performances. An inadvertent revolution was launched by rabbis in the midst of a great trauma, and with the collapse of the ancient politeia, and through compulsory religious education of male children, a great transformation that would subsequently be well-suited for the social and economic integration in developed empires and economies was triggered. The theory is certainly intriguing and attractive, and at times very convincing. “Lachrymose history” is not part of this story, which instead highlights the positive and creative effort of Judaism in Muslim and Christian lands. Moreover, a number of historical certainties are challenged and a different explanation is offered, on the basis of microanalysis or detailed accounts of historical material. A wide and impressive amount of secondary literature is described and thoroughly discussed, along with a number of primary sources.
Ultimately, as I have already said, the book is both a historical account of Judaism, and a history of the Jews covering a relatively long historical period and which offers a fairly new interpretation through the lens of economic history. Such an undertaking indicates a certain interest in the return of grand narratives, after a period of postmodern historical practices that made a narrative of any kind impossible.
Nevertheless, as with every grand narrative that aims at providing one unique explanation for historical facts, this one provokes a number of questions and possible critical responses. I will mention only three problems that may be of some relevance.
1. First of all, one must recall that the Diaspora did not begin after the fall of Jerusalem, but rather, was a conspicuous and relevant component of ancient Judaism. Jews lived in metropolises, like Rome and Alexandria, and were likely engaged in urban activities. Historiography on Christianity has stressed that Christianity spread first and foremost in the great urban centers of the Roman Empire, although the movement of Jesus was mainly throughout villages. The fascinating theory of conversion offered by the authors is therefore interesting, but needs to be supported by more evidence.
2. Considering the wide scope of the book and the claim to a universal and general explanatory theory of Judaism, some comparison with other similar groups was needed. In which way did Judaism in the Muslim empire differ from Christian minorities, which in turn were endowed with similar trades? How then are Armenians, Greek Orthodox, or various sectarian religious groups to be evaluated when they competed with Jews and performed similar roles?
3. Theory and history are somehow disconnected in this book. The theory the authors offer is applied to very different historical, social and religious contexts. One wonders if the organization of economy in the Muslim empire and the one in Medieval Christian Europe does not bear multiple and dissimilar features, resulting in a perpetually different relationship with Judaism, when not directly influencing it.
Anachronism is generally inevitable, but my impression is that it strikes as too strong an element in this narrative. Is it possible to assume, with the help of economic theory and modeling, that a peasant in the ancient world would behave exactly as a contemporary peasant in a third world country? The long journey back in time requires, among other things, identification with a world that might have been radically different. Moreover, this long journey is often an intricate path into a labyrinth, which the historian is impelled to explore in its multiple directions.
Cristiana Facchini, Alma Mater Studiorum Università di Bologna
[1]Enquête sur l’antisemitisme, ed. Henry Dagan, (Paris: Stock 1899).
[2] See Simone Luzzatto, Scritti politici e filosofici di un ebreo scettico nella Venezia del Seicento, a cura di Giuseppe Veltri (Milan: Bompiani, 2013); Jonathan Karp, The Politics of Jewish Commerce. Economic Thought and Emancipation in Europe, 1638-1848 (Cambridge: Cambridge University Press, 2008).
[3] Max Weber, Ancient Judaism (New York: Free Press, 1952).
[4] I refer, for example, to Catholic scholars who have tried to show how Catholicism fueled economic modernity, following Weber’s path but attempting to amend it. Trevor Roper offered a different interpretation of Weber’s theory, claiming that modernity and capitalism were initiated by merchant communities who practiced a form of “erasmianism.” Sombart opposed his interpretation of capitalism as a byproduct of Judaism, although with an anti-Semitic twist.
[5] Yuri Slezkine, The Jewish Century (Princeton – Oxford: Princeton University Press, 2004); Francesca Trivellato, The Familiarity of Strangers: The Sephardic Diaspora, Livorno, and Cross-cultural Trade in the Early Modern Period (New Haven: Yale University Press, 2009).
[6] For a more complex view on minorities and port-cities see: Tullia Catalan, “The Ambivalence of a Port-City. The Jews of Trieste from the 19th to the 20th Century,” Quest. Issues in Contemporary Jewish History 2/2011: 69-98.
[7] These ritual settings relating to different religious systems appeared in the ancient world (chap. 3).
[8] For a brief introduction to these themes: Guy G. Stroumsa, The End of Sacrifice: Religious Transformations of Late Antiquity (Chicago: Chicago University Press, 2009).
[9] Botticini, Eckstein, The Chosen Few, pos. 2334.
[10] There is a lot of literature on ammei ha-aretz, “people of the land.” Botticini and Eckstein affirm that they are those people/Jews unwilling to perform the norm of learning the Torah.
[11] Botticini, Eckstein, The Chosen Few, Chapter 5.
What if most of what we thought we know about the history of the Jewish people between the destruction of the Second Temple and the Spanish Expulsion is wrong? This intriguing premise informs The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History, 70-1492, an ambitious new book by economists Maristella Botticini and Zvi Eckstein.
Seventy-five years after historian Salo Baron first warned against reducing the Jewish past to “a history of suffering and scholarship,” most of us continue to view medieval Jewish history in this vein. “Surely, it is time to break with the lachrymose theory of pre-Revolutionary woe, and to adopt a view more in accord with historic truth,” Baron implored at the end of his 1928 Menorah Journal article “Ghetto and Emancipation: Shall We Revise the Traditional View?”
Botticini and Eckstein could not agree more, and in the book they systematically dismantle much of the conventional wisdom about medieval Jewish history. For example, they explore how the scattered nature of the Jewish Diaspora was driven primarily by the search for economic opportunity rather than by relentless persecution. They also demonstrate that war-related massacres only account for a fraction of the Jewish population declines from 70 to 700 C.E. and from 1250 to 1400 C.E., and cast serious doubt on the theory that widespread conversion to Christianity and Islam during these periods was motivated primarily by anti-Jewish discrimination. Likewise, they show that restrictions on Jewish land ownership and membership in craft guilds in Christian Europe — factors that are often cited to explain medieval Jews’ proclivity for trade and moneylending — postdated by centuries the Jews’ occupational shift from agriculture to commerce.
The authors are hardly alone among scholars in advancing their case. But in consolidating a vast secondary literature into a concise and compelling argument, they provide a commendable service. Their demolition job is not an end in itself, however. Rather, it affords them with an opportunity to advance their own unifying theory of Jewish history to fill the explanatory void.
As the subtitle of their book suggests, the authors look to education to explain the across-the-board transformation of Jewish life in the first 15 centuries of the Common Era. Specifically, they zero in on the rabbinic injunction that required fathers to teach their sons how to read and study the Torah.
Literacy, they argue, was the engine that drove the train of Jewish history. It facilitated the economic transformation of the Jews from farmers to craftsmen, merchants and financiers. It encouraged their mobility, as they went in search of locations that presented the prospect of profitability. It determined their migration patterns, specifically their congregation in bustling city centers throughout the Muslim world, where they were able to thrive in myriad urban occupations such as banking, cattle dealing, wine selling, textile manufacturing, shopkeeping and medicine.
It also explained their scattered settlement in scores of small communities throughout Christian Europe, where the demand for skilled occupations was far more limited. It was even indirectly responsible for Jewish population decline. Botticini and Eckstein suggest that illiterates were regarded as outcasts in Jewish society and that a substantial percentage chose to escape denigration and social ostracism by embracing Christianity and Islam, where illiteracy remained the norm.
Once the occupational and residential transformation from farming was complete, the authors argue, there was no going back. Jews paid a high premium for their literate society. Jewish cultural norms required the maintenance of synagogues and schools, and presumed that families would forgo years of their sons’ potential earnings to keep them in school. When urban economies collapsed, as they did in Mesopotamia and Persia as a result of the Mongol conquest, the practice of Judaism became untenable, and the result was widespread defection through conversion to Islam. Accordingly, the Jews became “a small population of highly literate people, who continued to search for opportunities to reap returns from their investment in literacy.” And thus they remained up to the present day.
Botticini and Eckstein’s argument seems tailor-made for the present American environment of stagnant, if not declining, economic resources. In an age where steep day school tuition has (unintentionally) become a form of birth control in modern Orthodox circles and contributed to sluggish enrollment rates among the non-Orthodox, Jewish practice is once again in danger of becoming unsustainable. American Jewish assimilation is often understood as a function of Jewish apathy, but perhaps part of the problem is that Judaism is pricing itself out of the market.
The authors’ theory may leave some a little queasy, including those who have rationalized the Jewish proclivity for moneylending in medieval England, France and Germany as a logical response to antagonistic authorities who systematically cut them off from other avenues of economic opportunity. Many of these same defenders of Jewish honor have been quick to insist that nothing particular to Judaism itself promoted moneylending.
Botticini and Eckstein have little patience for this sort of apologetics. On the contrary, they insist, Jews were naturally attracted to moneylending because it was lucrative and because they possessed four significant cultural and social advantages that predisposed their success. First and foremost was rabbinic Judaism’s emphasis on education; literacy and numeracy were prerequisite skills for moneylending.
Jews were also able to rely on other built-in advantages, including significant capital, extensive kinship networks, and rabbinic courts and charters that provided legal enforcement and arbitration mechanisms in the cases of defaults and disputes. The authors add that while maltreatment, discriminatory laws and expulsions were frequently motivated by the prevalence of Jews in moneylending, they played little or no role in promoting this occupational specialization.
The relevance of cultural determinism is the subject of vigorous debate in intellectual circles, as evidenced by the recent brouhaha over Republican presidential candidate Mitt Romney’s remarks about the differences in wealth between Israel and the Palestinian territories being the result of cultural differences. Most scholars would probably dismiss Romney’s argument as “dangerously out of date,” as Jared Diamond recently wrote in The New York Times. At the same time, Diamond and others warn against mono-causal explanations for socioeconomic historical trends, and such concern is warranted for “The Chosen Few” as well.
Of particular concern is the relative paucity of evidence that Botticini and Eckstein marshal for their literacy argument. Talmudic pronouncements on the importance of education can easily, and inaccurately, be read as descriptive rather than prescriptive, and the authors arguably overestimate the influence of the rabbis on the behaviors and self-definition of the Jewish masses.
They seem to be on firmer ground once they have recourse to the variegated documents in the Cairo Genizah, but they devote almost no attention to Jewish educational trends in Christian Europe. They also have little to say on the extent to which instruction in arithmetic and the lingua franca supplemented a school curriculum designed to promote facility in reading and interpreting Hebrew and Aramaic holy books. Instruction in these areas would have a direct impact on the Jews’ ability to function in an urban economy. Undoubtedly, Jewish school attendance rates and curricular norms varied by location and over time.
To be fair, the history of Jewish education remains an understudied subject, leaving Botticini and Eckstein relatively few secondary sources from which to draw evidence. One can say that their economic theory is plausible, particularly if it is advanced in conjunction with other factors.
But the jury must remain out in the absence of more conclusive hard evidence. Hopefully, the fascinating and elegant argument set forth in “The Chosen Few” will encourage historians to interrogate literary sources and archaeological evidence in search of a clearer picture about Jewish educational norms, Jewish literacy and its impact on the demographics and socioeconomic trajectory of Jewish life in the Middle Ages.
Jonathan B. Krasner is Associate Professor of the American Jewish Experience at Hebrew Union College – Jewish Institute of Religion, in New York.
Jews play a disproportionate role in A Troublesome Inheritance: Genes, Race and Human History, an extended argument by Nicholas Wade for the impact on modern life of genetic differences among races. Why are Jews so important to the story? Because, well, says Wade, Jews are such a really smart race. Of course, there’s an irony here. The last time genes were used to explain why some whole peoples prosper and others don’t – during the Progressive Era’s eugenics movement – Jews were held up as a people of innately low physical, moral, and intellectual capacity. Now, Wade and others tell us that Jews are endowed by evolution with superior verbal and mathematical ability (albeit not spatial intelligence; in Wade’s view, Jews stopped hunting so long ago that Jewish genes can’t find their way out of a paper bag).
Wade, a respected science writer, casts himself as a new Darwin, announcing that « human evolution has been recent, copious and regional. » He points out that natural selection for certain genes has enabled human groups in the Himalayas, Andes and the Ethiopian plateau to evolve capacities to thrive at high altitudes. Moreover, other genetically transmitted traits, such as the ability to tolerate the lactose in cow’s milk, have spread across geographic regions. So far, so good, but note that this is pretty much as far as the really solid evidence for recent, regional human evolution goes.
Wade is after bigger game. He wants to argue that events like the bifurcation of the world into farmers and hunter-gatherers, which began about 10,000 B.C.E., or the « rabbinical requirement for universal male literacy » may have produced genetic adaptations favoring specific kinds of social and emotional intelligence within particular ethnic or racial groups. And for Wade that includes « a genetic enhancement of Jewish cognitive capacity. »[1]
Operating on a global scale, Wade argues that the regional (or if you prefer, racial) evolution of mental capacities can answer such big questions as: Why is European civilization more prosperous than other cultures? Max Weber fingered the Protestant Ethic as the cause, while Jared Diamond argued for environment in Guns, Germs and Steel. Wade relies on the thesis of a remarkable 2007 book by economic historian Gregory Clark, A Farewell to Alms: A Brief Economic History of the World, which was reviewed for the New York Times by… Nicholas Wade. Clark suggested that the Industrial Revolution happened when « [t]hrift, prudence, negotiation and hard work were becoming values for communities that previously had been spendthrift, impulsive, violent and leisure loving. » Then he startled the academic world by proposing a novel causative mechanism for this shift.
Clark proposes that most English girls from successful families married men less prosperous than their fathers, and that these children of prosperity out-reproduced the offspring of the poor, giving England bumper crops of penniless youth endowed with the virtues that created the industrial revolution. Clark acknowledges that this was a cultural phenomenon – modestly fixed parents taught their children the virtues that had made grandpapa rich – but he argues that an overlooked key to success lay in upscale genes.
Reviewers asked for evidence, and Clark produces it in a new book, The Son Also Rises, in which a multi-lingual phalanx of research assistants mine a diverse array of data seeking out peculiar surnames. It turns out that everyone from banking moguls to registered paupers can bear surnames shared by a mere handful of people. By tracing rare surnames over time, Clark demonstrates that when a man with an odd surname owned substantial property in England in the 1300s, or was a Swedish intellectual in the 1600s, or passed the Imperial Chinese examinations to become a Mandarin during the Song Dynasty, people with that surname were more successful than average for the next 400 or even 1,000 years.
Clark finds more social mobility in the 1400s than you probably imagine, and less today than you probably wish. Accomplishment, he thinks, runs in families, and high status « is actually genetically determined. »[2] Whether he proves his case is a different matter.
After all, the child of successful parents is likely to be taught real skills, such as good grammar, vocabulary, and a « proper » accent, and he or she may also benefit from ineffable advantages. Given that even in egalitarian Sweden, people from old families with aristocratic names like Rosenkrantz and Guildenstern or Latin ones like Linnaeus do better than Swedes with « peasant » names like Johnsson, it could be that just having an impressive surname contributes to success. Moreover, a growing body of data supports the idea that success is largely dependent on believing that success is possible. Amy Chua and Jeff Rubenfeld tap into something like this in The Triple Package: How Three Unlikely Traits Explain the Rise and Fall of Cultural Groups in America, proposing that a sort of superiority complex accounts in part for the success of certain immigrant groups, including Jews and Chinese.
But Nicholas Wade’s just-so story about Ashkenazi success relies on a bold 2012 book, The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History, by economists Maristella Botticini and Zvi Eckstein. Here he finds evidence that Jews « adapted genetically to a way of life that requires higher than usual cognitive capacity, » representing « a striking example of natural selection’s ability to change a human population in just a few centuries. »[3]
Botticini and Eckstein argue that most ancient Jews were farmers who did not need literacy to earn a living. When Judaism re-formed around text study following the destruction of the Temple in 70 C.E., parents were forced to pay school fees if they wanted their children to stay Jewish. According to Botticini and Eckstein, over the next six centuries the Jewish population plummeted from 5.5 to 1.2 million because only boys from families with an unusual degree of commitment, or those whose sons had the brains and diligence to pore over legal texts, paid to send their children to school. Everyone else converted to Christianity, a dramatic selection event that Wade describes as possibly « the first step toward a genetic enhancement of Jewish cognitive capacity. »[4] And so it might be if there were evidence that it happened – and if there actually is a gene for diligence.
It is not clear why we should assume that families with « low-ability sons » converted to Christianity while those with « smart and diligent » sons paid for an expensive Torah education not calculated to lead to a high-earning career.[5] Why not assume that parents of smart and diligent sons would have improved their prospects by converting (see late 19th-century Germany, for example), or by having them taught Greek or Latin? After all, that is what almost everybody else in the Roman Empire did. The first and second centuries teemed with now-forgotten religions: the cult of Isis, the Dionysian Mysteries and Mithraism were wildly popular and growing fast. The real question is why a million or so Jews remained Jewish in a late Roman world where persecution of non-Christians and the advantages of joining the new imperial church drove other, more popular religions to extinction?
Botticini and Eckstein support their model with « archaeological discoveries that document the timing of the construction of synagogues » in which children could be educated. They explain that « the earliest archaeological evidence of the existence of a synagogue in the Land of Israel » dates to the mid-1st century C.E.[6] This is an enormous misstatement of fact. A number of pre-destruction Palestinian synagogues have been identified, the earliest uncovered so far, in Modi’in, dating to the early 2nd or late 3rd century B.C.E.
Which brings us to the question of whether Botticini and Eckstein’s selection event ever occurred. Some numbers cited by Botticini and Eckstein are just plain wrong. For example, they summarize the findings of ancient historians Seth Schwartz and Gildas Hamel, and of archaeologist Magen Broshi, as « the Land of Israel hosting no more than 1 million Jews. »[7] Schwartz actually wrote: « Palestine reached its maximum sustainable pre-modern population of approximately one million in the middle of the first century. Probably about half of this population was Jewish. » Thus, Botticini and Eckstein miscite Schwartz’s « about half of » for a population of one million Jews. They then guess that there were, in fact, 2.5 million Jews in Israel.
There are no accurate counts of ancient Jewry. Estimates that no more than 1 million people could have lived in the Land of Israel in the first century were derived from arable acreage and crop yields. And there is no evidence suggesting that ancient Israel had the capacity to import the gargantuan volumes of falafel mix that would have been required to feed a population of over a million. (Rome imported wheat on that scale; Israel didn’t.) Botticini and Eckstein choose, without offering a rationale, one contemporary demographer’s « cautiously » offered estimate of 4.5 million Jews total in the ancient world. Then they blithely add up to a million more Jews, to reach their 5 – 5.5 million number. But graphing an unsubstantiated number, as they do, does not make the number accurate.
If we accept more conservative estimates of 2 or even 2.5 million Jews worldwide before the year 70, loss of a million or so during and after the brutal Roman-Jewish Wars, when it is assumed that many Greek- and Latin-speaking God-fearers fell away from Judaism, is not surprising. Judged by the evidence they provide, Botticini and Clark’s elegant model in which the choices of ancient Jewish farmers facing high tuition bills produced a dramatic selection event doesn’t hold water.
But Wade is a man in search of data to support his theory of recent, regional evolution. Ashkenazi Jews are among the most intensively studied of ethnic genetic clusters, and he tracks them down the Rhine Valley like a bloodhound. The Ashkenazi Jewish community was founded by a mere handful of Jews living along the Rhine about a thousand years ago, and founder effects can be genetically powerful. It is not absurd to regard Ashkenazim as a large cousinhood – something like the Darwins and Wedgwoods, two intertwined families that have produced generation after generation of accomplished offspring. Because the number of founders was so small, and Jews married one another, genetic characteristics could have been amplified within the community.
However, Clark does not flag the founder effect as the cause of Ashkenazi success. He posits a centuries-long selection, beginning as described by Botticini and Eckstein and continuing because only the successful could afford to pay the punitive taxes imposed on Jews by Muslim and Christian governments. « There must have been some selection based on talent. »[8]
Perhaps there was. The actual evidence, however, is spotty, and the sources for the event provided by Botticini and Eckstein are sometimes downright creepy. Botticini and Eckstein support their hypothesis with the information, repeated by Clark that, « passages by early Christian writers and Church Fathers indicate that most Jewish converts to Christianity were illiterate and poor. »[9] This information, however, is cited to outdated work by Adolf von Harnack, turn-of-the-century German theologian whose anti-Judaism prepared the way for Nazi anti-Semitism and who, as President of the Kaiser Wilhelm Society, created the infamous Institute for Anthropology, Human Heredity and Eugenics.
There are good reasons to be suspicious of arguments suggesting powerful selection effects over brief time frames for cognitive abilities. To be sure, intelligence – at least the form most frequently measured by psychologists – has a clear genetic component. But years of research have failed to identify any genes that account for this effect. The dominant explanation is that intelligence, like height, may be determined by the cumulative effect of scores, perhaps hundreds of genes, each of which makes an incremental contribution to cognitive ability. To further complicate things, those genes may interact to amplify or negate their influences on intelligence, and it is certain that environment plays a key role. Indeed, recent evidence indicates that genetic effects on intelligence are stronger in high socioeconomic circumstances, which presumably allow maximization of individual potential, but fade away in poor families.
With scores of genes likely involved, most distributed widely in the population, selection for or against particular genes becomes more difficult and time-consuming. The rapid selection event on which Wade (following Botticini and Eckstein) relies hence strains credulity from a biological perspective. Although some guesses about how the Jews got their disproportionate share of Nobel prizes put forward in these books could be right (after all, it’s awfully hard to disprove an untestable theory), there is very little evidence to support them and good reasons to doubt their validity.
Diana Muir Appelbaum is an author and historian.
Paul S. Appelbaum is Dollard Professor of Psychiatry, Medicine & Law at Columbia University, where he directs a center on the ethical, legal and social implications of advances in genetics.
ENDNOTES
1. A Troublesome Inheritance: Genes, Race and Human History, by Nicholas Wade, Penguin Press, 2014, p. 212.
2. The Son Also Rises: Surnames and the History of Social Mobility, by Gregory Clark, Princeton University Press, 2014, p. 281.
3. The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History, by Maristella Botticini and Zvi Eckstein, Princeton University Press, 2012, p. 199.
David Mamet writes that there are two kinds of places in the world: places where Jews cannot go, and places where Jews cannot stay.
So how exactly have the Jews survived?
According Maristella Botticini and Zvi Eckstein, authors of The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History, 70-1492 (Princeton University Press, 2012), the answer has as much to do with economics as with spirituality.
Five major events rocked the Jewish world during those 1,422 years: the destruction of the Second Temple, the rise of Christianity; the birth of Islam; birth of modern Christian Europe; and the Mongol invasion. Since Jews who aren’t university professors (and there are some) often view events through a lens of “Is this good or bad for the Jews?” I’ll summarize the authors’ findings in that manner.
Destruction of the Temple and the rise of Christianity—bad for the Jews. After the year 70, the priests who ran the Temple were no longer in the ascendency, yielding power to the Jewish rabbis and scholars who ultimately wrote the Talmud over the next few centuries. Most Jews (and most of everyone else) were farmers back then. After the destruction of the Temple, the worldwide Jewish population dwindled not just because of war and massacre, but because of economics.
If you were devout and wealthy, you were likely to pay for your sons’ Jewish education.
If you were spiritual but didn’t have much money, you became a Christian or joined one of the other popular groups that didn’t require an expensive Jewish education. What good is a son who can read the Torah if you just want him to help harvest pomegranates? So economics dictated who stayed and who strayed.
The rise of the Islamic empire: surprisingly, good for the Jews.
When Muhammad appeared in the seventh century, Jews began to move from farms into new Moslem-built cities including Baghdad and Damascus. There they went into trades that proved far more lucrative than farming, most notably international trade and money lending. In those arenas, Jews had enormous advantages: universal literacy; a common language and religious culture; and the ability to have contracts enforced, even from a distance of thousands of miles.
The Moslem world then stretched from the Spain and Portugal to halfway across Asia. Anywhere in the Arab ambit, Jews could move, trade, or relocate freely and benefit from their extensive religious and family networks. According to thousand-year-old documents found in the Cairo Genizah, business documents linking Jewish traders across the Arab world would have Jewish court decisions written on the back. So Jews could send money or goods thousands of miles, certain their investments would be safe.
European Christianity from the year 1,000: not so good for the Jews.
If Islamic culture offered Jews a warm welcome, Western Europe was a mixed blessing.
Seemingly every few dozen miles in Western Europe, a different prince or king was in charge, with different laws, different requirements for citizenship, and different attitudes about the Jews. Some places were extremely welcoming of Jews; others less so. Monarchs might boot out their Jewish populations in hard economic times, so that Gentile citizens wouldn’t have to repay their loans, only to welcome them back when the economy improved.
Contrary to common belief, Botticini and Eckstein write, Jews weren’t forced into money lending because they were forced out of guilds. Under Muslim and Christian rule alike, Jews went into finance centuries before the guilds were even founded. In other words, Jews chose careers in finance the same way the best and the brightest in modern American culture head for Wall Street and business school.
Western Europe, therefore, was a mixed blessing for the Jews. On the upside, they could do business, live their Jewish lives, and establish some of the finest Talmudic academies in Jewish history. Alas, Jews were also subject to massacres and expulsions, which happened with terrifying regularity across the centuries, culminating in the Spanish Inquisition of 1492.
Meanwhile, back in the Middle East: the thirteenth-century Mongol invasion: bad for the Jews. Oh, really, really bad for the Jews.
The relative freedom and safety the Jews enjoyed under Muslim rule came to an abrupt halt in the early 13th century, when Genghis Khan and his marauders attacked and leveled most of urban civilization that the Moslems had so painstakingly built up over the centuries.
With the destruction of cities and urban institutions, those Jews fortunate enough to survive the Mongol invasion had no option other than going back to farming. Some stayed; some converted to Islam. So the numbers of Jews in formerly Arab lands would remain low for hundreds of years, until all traces of Mongol civilization were wiped out and the world began to rebuild.
The poet Ogden Nash once wrote, “How odd of God/To choose the Jews.” If you’ve ever wondered how the Chosen People survived the vagaries of history, reading The Chosen Few will give you answers you cannot find anywhere else.
Why has education been so important to the Jewish people?
Author Maristella Botticini says a unique religious norm enacted within Judaism two millennia ago made male literacy universal among Jews many centuries earlier than it was universal for the rest of the world’s population.
“Wherever and whenever Jews lived among a population of mostly unschooled people, they had a comparative advantage,” Botticini tells JNS.org. “They could read and write contracts, business letters, and account books using a common [Hebrew] alphabet while learning the local languages of the different places they dwelled. These skills became valuable in the urban and commercially oriented economy that developed under Muslim rule in the area from the Iberian Peninsula to the Middle East.”
Emphasizing literacy over time set Jews up for economic success, say Botticini and Zvi Eckstein, authors of the 2012 book “The Chosen Few: How Education Shaped Jewish History.”
An economic historian, Botticini earned a B.A. in Economics from Università Bocconi in Milan and a Ph.D. in Economics from Northwestern University. After working at Boston University, she returned to Italy and works at her alma mater. An economist, Eckstein received his B.A. from Tel Aviv University and his Ph.D. from the University of Minnesota. He spent five years as the Bank of Israel’s deputy governor, and is now dean of the School of Economics at the Interdisciplinary Center in Herzylia.
In their book, which they describe as a reinterpretation of Jewish social and economic history from the years 70 to 1492 A.D., Botticini and Eckstein say that Jews over those years became “the chosen few”—a demographically small population of individuals living in hundreds of locations across the globe and specializing in the most skilled and urban occupations. These occupations benefit from literacy and education.
“Our book begins with the profound and well-documented transformation of the Jewish religion after the destruction of the Second Temple in 70 [AD] at the end of the first Jewish-Roman war,” Eckstein tells JNS.org. “Judaism permanently lost one of its two pillars—the Temple in Jerusalem—and consequently the religious leadership shifted from the high priests, who were in charge of the Temple service, to the rabbis and scholars, who had always considered the study of the Torah, the other pillar of Judaism, the paramount duty of any Jewish individual.”
The Jews’ new religious leadership set their people on a path to become “a literate religion, which required every Jewish man to read and study the Torah and every father to send his sons to a primary or synagogue school to learn to do the same,” says Eckstein.
From an economic point of view, the authors write, it was costly for Jewish farmers living in a subsistence agrarian society to invest a significant amount of their income on the rabbis’ imposed literacy requirement. A predominantly agrarian economy had little use for educated people. Consequently, a proportion of Jewish farmers opted not to invest in their sons’ religious education and instead converted to other religions, such as Christianity, which did not impose this norm on its followers.
“During this Talmudic period (3rd-6th centuries), just as the Jewish population became increasingly literate, it kept shrinking through conversions, as well as war-related deaths and general population decline,” Botticini tells JNS.org. “This threatened the existence of the large Jewish community in Eretz Israel (the land of Israel) and in other places where sizable Jewish communities had existed in antiquity, such as North Africa, Syria, Lebanon, Asia Minor, the Balkans, and Western Europe. By the 7th century, the demographic and intellectual center of Jewish life had moved from Eretz Israel to Mesopotamia, where roughly 75 percent of world Jewry now lived.”
Like almost everywhere else in the world, Mesopotamia had an agriculture-based economy, but that changed with the rise of Islam during the 7th century and the consequent Muslim conquests under the caliphs in the following two centuries. Their establishment of a vast empire stretching from the Iberian Peninsula to India led to a vast urbanization and the growth of manufacture and trade in the Middle East; the introduction of new technologies; the development of new industries that produced a wide array of goods; the expansion of local trade and long-distance commerce; and the growth of new cities.
“These developments in Mesopotamia increased the demand for literate and educated people—the very skills Jews had acquired as a spillover effect of their religious heritage of study,” Eckstein says.
Between 750 and 900, almost all Jews in Mesopotamia and Persia—nearly 75 percent of world Jewry—left agriculture and moved to the cities and towns of the newly established Abbasid Empire to engage in skilled occupations. Many also migrated to Yemen, Syria, Egypt, and the Maghreb; to, from, and within the Byzantine Empire; and later to Christian Europe in search of business opportunities.
“Once the Jews were engaged in these skilled and urban occupations, they rarely converted to other religions, and hence, the Jewish population remained stable or grew between the 8th and the 13th centuries,” Botticini says.
The book does not whitewash the persecution that took place during the 15 centuries of Jewish history it examines, Eckstein says.
“When [persecution of Jews] happened, we record [it] in our book,” he says. “[But] what we say is something different. There were times and locations in which legal or economic restrictions on Jews did not exist. Not because we say so, but because it is amply documented by many historians. Jews could own land and be farmers in the Umayyad and Abbasid Muslim empire. The same is true in early medieval Europe. If these restrictions did not exist in the locations and time period we cover, they cannot explain why the Jews left agriculture and entered trade, finance, medicine. There must have been some other factor that led the Jews to become the people they are today. In ‘The Chosen Few’ we propose an alternative hypothesis and we then verify whether this hypothesis is consistent with the historical evidence.”
Botticini says the key message of the book “is that even in very poor communities or countries, individuals and families should invest in education and human capital even when it is costly and it seems to bring no economic returns in the short-run.”
“Education and human capital endow those individuals and those communities that invest in them with skills and a comparative advantage that pays off and can bring economic well-being and intellectual achievements in many dimensions,” she says.
“A motto in which we strongly believe [is] go to the local public library and borrow a book and read it,” adds Botticini. “Even when you end up disagreeing with or not liking a book, it is never a waste of time reading a book. Reading and studying are precious gifts. This is the bottom line message of ‘The Chosen Few.’”
Maître de conférences à l’Université de Strasbourg et metteur en scène de théâtre, Christophe Lebold a une autre corde vibrante à son arc zen : il est l’auteur d’une somme monumentale consacrée à Leonard Cohen.
En janvier 2012, un poète de soixante-dix-huit ans sortait de sa retraite et renouait avec une renommée internationale de rock star distraitement abandonnée au seuil d’un monastère zen : serial séducteur notoire vivant en ermite et « chanteur sans voix » réputé plutôt « déprimant », l’immense Leonard Cohen venait de publier un nouvel album haut de gamme nourri de poésie délicatement ciselée et de grâce, Old Ideas. Un retour en majesté qui fait passer sur le monde, une fois encore, en sombres mélopées infiniment hypnotiques, comme un frisson de beauté – celle-là même que toute sa vie il a cherché à voir de près, jusqu’à s’y brûler parfois sans pour autant être carbonisé…
Broyer du noir pour faire advenir la lumière ?
Leonard Cohen a son biographe à Strasbourg. Un de plus ? Le 15 mai dernier, Christophe Lebold proposait à l’auditorium de l’espace culturel de Vendenheim une soirée autour du film d’Armelle Brusq. La documentariste brosse une manière de portrait intimiste du célébrissime auteur-compositeur et chanteur canadien (dont chacune des chansons depuis 1967 est devenue un grand « classique ») suspendu entre la discipline de son monastère zen et l’appel obsédant d’une œuvre à accomplir encore – serait-ce pour de pressantes raisons fiscales…
Auteur de la dernière biographie en date de Leonard Cohen, la plus complète aussi, Christophe Lebold confie les raisons d’une attirance pour un pessimiste radical réputé « déprimant » dont l’œuvre se veut un « manuel pour vivre avec la défaite » : « Léonard Cohen a changé fondamentalement quelque chose à ma manière de voir le monde et de vivre. Ses chansons, sa poésie et ses romans m’accompagnent depuis vingt ans. Il nous révèle que la noirceur est au centre du processus de création. Il se fait alchimiste pour nous apprendre à changer le noir en lumière. Broyer du noir pour faire advenir la lumière… C’est ce qu’il nous rappelle : si nos cœurs semblent destinés à être brisés, c’est parce la lumière du monde ne peut entrer que par cette brisure… ».
L’amour libérateur
Le père de Christophe Lebold était un cheminot voyageur passionné de rock et de littérature fantastique. L’année de la naissance de son fils, il achète New skin for the old ceremony, le dernier album du poète-crooner canadien qui venait de sortir. L’enfance du petit Chris se passe à La Walck-Pfaffenhoffen, chez ses grands-parents dans une plénitude semi-bucolique baignée par les mélodies envoûtantes de Leonard, ses inflexions de poésie véritable et ses colonnes de mots envoyées vers le ciel : « J’ai ressenti très tôt tout le pouvoir de la musique des mots et l’attrait pour le Verbe, bien avant d’avoir le vocabulaire pour le formuler : le langage a une capacité à illuminer nos vies. J’ai perçu très tôt un appel dans son œuvre, qui me ramenait au plus profond de moi-même. Mais c’est à l’âge de quatorze ans, au collège, que je me suis véritablement immergé dans l’œuvre de Leonard, en étudiant l’anglais. Depuis, ça ne m’a plus jamais quitté. D’abord, c’est une voix de plus en plus grave et caverneuse au fil de ses douze albums qui dépose des prières pleines d’humour noir, d’abord sur un rock acoustique épuré puis sur fond de synthétiseurs. Immédiatement, j’ai su que lorsqu’il serait question d’écrire sur quelqu’un ou de faire des recherches approfondies, ce serait sur lui et personne d’autre…».
Après avoir succombé à une irrésistible attirance pour la littérature dite « classique » puis russe et japonaise ainsi que pour les mystiques rhénans, Christopher Lebold voyage beaucoup (en train…) et se découvre cet autre point commun avec ce Léonard Cohen dont l’immense ombre poétique s’étend sur lui depuis sa naissance : « C’est un grand arpenteur de villes, un mélange de juif errant et de passant baudelairien, un artiste du passage qui réintroduit de la légèreté et un passeur de lumière… ».
Différents stades de gravité jusqu’à cette ardente profondeur…
En 1995, le magazine Les Inkorruptibles consacrait (après bien d’autres…) sa Une à Léonard Cohen : le journaliste Gilles Tordjman l’avait visité dans son monastère zen sur le Mount Baldy (le « mont chauve » en Californie) pour nous le révéler en « guerrier de la spiritualité » voire comme « l’un des derniers grands mystiques de notre époque ».
Son nom ne signifie-t-il pas « prêtre » en hébreu ? Leonard n’était pas né pour la futilité mais pour la lutte avec l’ange ou l’abîme – et pour nous apprendre à jouer de tous les registres de la gravité comme le rappelle son biographe enthousiaste : « Il a réinventé des figures très anciennes dans le rock : celle du grand prêtre juif, sa fonction sacerdotale, ainsi que celle du poète mystique et du troubadour – bref, tous les registres de la vie du cœur… Son rock est précis tant dans les textes que les sons, avec sa voix monocorde qui entre en résonance avec de petites valses obscures et des chœurs angéliques. Vingt ans après, il transforme le crooner en figure spirituelle et toujours nous reconnecte à ce que nous avons de plus profond : le cœur…Il a un talent naturel pour la gravité, il utilise cette disposition fondamentale (physique par sa voix grave, culturelle par son nom et psychologique (ses tendances à tutoyer les abîmes de la dépression). Il voit les corps tomber dans un monde soumis aux lois de la gravité, il est dans le jeu avec la gravité et nous donne des armes spirituelles avec son pouvoir de changer une chose en son contraire, une charge lourde en légèreté. Ce visionnaire de la gravité sait utiliser le pessimisme pour nous rendre plus vivants et plus joyeux...».
Dans les concerts de ce grand initié, dit-on, il se fait un tel silence que l’on entendrait « une métaphore tomber » – l’on y sent même s’ouvrir, à la manière d’une fleur japonaise dans l’eau, quelque chose comme une ardente profondeur…
Convertir le monde à Leonard ?
En 1997, Christophe Lebold fait un mémoire de master sur Beautiful Loosers (Les Perdants magnifiques), le second roman de Léonard Cohen, « écrit sous acide » sur l’île d’Hydra et paru en 1966.
Un septennat plus tard, alors qu’il est attaché temporaire d’enseignement et de recherche, il soutient sa thèse intitulée Ecritures, masques et voix pour une poétique des chansons de Léonard Cohen et de Bob Dylan. La différence entre ces deux créateurs ? « Chez Dylan, il y a profusion du langage alors qu’il cinq ans de réécriture à Cohen pour enlever tout ce qui n’est pas nécessaire… ».
Maître de conférences depuis 2005, il enseigne la littérature américaine et anime un cours consacré à la poétique des singer-songwriters. Il confie le tiercé gagnant des œuvres du Canadien errant qu’il préfère : « Avec Songs of Léonard Cohen (1967), I am your man (1988) et Ten new songs (2001), on a les trois versions de Cohen : le troubadour, le crooner et le maitre zen. Et on a ses trois formes de gravité : celle du poète, noire et désespérée, puis celle, ironique et sismique portée par cette voix grave qui fait trembler le monde et, enfin, à partir de 2000, cette gravité aérienne d’un maître zen angélique qui nous instruit sur notre lumière cachée. Avec ces trois albums, on peut convertir tout le monde à Léonard Cohen… ». Sa chanson préférée ? « Ce serait Everybody knows (1988) qui sonne comme une lamentation de Jérémie sur l’état du monde, avec l’ironie d’un crooner postmoderne »…
A ce jour, le créateur de Suzanne (1967) a publié douze albums – mais il y a aussi ceux tirés de ses huit tournées mondiales, sans oublier ses deux romans et ses neuf recueils de poèmes depuis Let Us Compare Mythologies paru en 1956.
Si Christophe Lebold dévore les grandes œuvres de la littérature mondiale (notamment Proust et Dostoïevski, des « révélations absolues »), il ne franchit pas pour autant le pas vers l’écriture personnelle et fait l’acteur au sein de la compagnie de théâtre La compagnie des gens : « Je n’ai pas ressenti l’appel de la page blanche comme absolu : cela m’amuse plus de dire des textes sur scène…La vie du perfectionniste Leonard capable de réécrire ses chansons vingt ans après me montre à quel point l’écriture est un travail de chiffonnier… ».
En mai 2013 et 2014, la troupe a donné des représentations du spectacle Saint François d’Assise, paroles d’oiseaux, de saints et de fous – qui doit beaucoup aux textes d’un autre troubadour de chevet de Christophe Lebold, le héraut de La grande vie Christian Bobin dont il a adapté les textes : « J’ai voulu faire évoluer Saint-François d’Assise sous le regard de Jean-Claude Van Damme… ».
Un pessimisme lumineux
Sur les traces de Leonard Cohen, il étudie depuis l’an 2000 la voie du zen : « Dans nos vies sursaturées de prétendues informations, de bavardages incessants, de gadgets électroniques et de surconsommation où tout est organisé pour détruire nos vies intérieures, il est important de retrouver un sens de la puissance lumineuse du verbe, car il peut illuminer nos vies de façon concise : ce n’est plus de l’érudition gratuite, ça nous rend plus vivants, plus affûtés et plus précis. Rien de tel pour cela que la compagnie d’un homme aussi drôle et profond que Leonard pour s’affûter : son pessimisme est lumineux. Il nous fait du bien en utilisant des chansons douces comme des armes spirituelles et il nous reconnecte directement par le verbe et le sens mélodique, sur des airs de valses obsédantes, à nos cœurs et à tout ce qui est mystérieux (l’amour ou son absence, l’abîme ou Dieu). Fréquenter ce contrebandier de lumière est quelque chose de merveilleux, il nous apprend aussi à transformer quelque chose en son contraire, c’est aussi une activité à notre portée… ».
Mais à quoi tient l’immense succès planétaire d’un poète aussi profond qui s’est toujours refusé aux veuleries en vogue et dont chacun des chansons pourtant nous est si instantanément familière ? « C’est un poète de la qualité qui opérait sur un médium de masse. Dans les sixties, le rock a cherché des poètes pour se légitimer : il y avait lui, Dylan et les Beatles. Les gens n’en sont pas revenus que ce métaphysicien du cœur brisé leur parle de leur condition d’être en chute libre– et leur propose d’entendre une miséricorde angélique, un appel à l’élévation…C’est sur cette brisure du cœur que l’on peut fonder une vraie fraternité… Son premier album n’a pas pris une ride en quarante-sept ans : déjà minimaliste, il est tranchant et aussi indémodable qu’une calligraphie zen… ».
Le biographe de Leonard Cohen l’a rencontré une fois dans sa vie pendant trois minutes, en tout et pour tout : « Nous avions convenu par mail des rendez-vous qui n’ont jamais abouti car il est très pris… Un soir, j’étais à Liverpool pour un colloque sur la musique populaire où je faisais une intervention sur mon sujet de prédilection. En sortant de l’université, je marche et à un moment je lève les yeux et je vois ledit sujet venir à ma rencontre… C’était bien Leonard, avec son regard à la fois perçant et si bienveillant, et nous n’avions pasrendez-vous ! C’était hautement surréaliste et ça s’est passé comme dans une de ses chansons : le « hasard » a tellement bien fait les choses qu’il a mis la ville où j’allais parler de lui sur sa liste de concerts planétaires… ».
Un poète venait de passer – le mot de la fin s’éternise dans une histoire sans fin… « Leonard est un éveillé qui suspend son départ pour nous éveiller à ce que nous avons d’essentiel. Je pense à ce koan zen : un âne regarde un puits jusqu’à ce que le puits regarde l’âne… Leonard peut faire ça, son œuvre a cette force de transformation absolue. Un maître, c’est quelqu’un qui vous libère… ». Et si dans l’immense et fervente communauté des inconditionnels entrés dans le cercle de lumière du très paradoxal Leonard Cohen se levait, au bord de l’absolu vertige, une armée d’éveilleurs à son image ?
Une première version de cet article a paru dans Les Affiches-Moniteur
Christophe Lebold, Leonard Cohen, l’homme qui voyait tomber les anges, éditions Camion Blanc, 720 p., 36 €
S’il est clair que vous aimez la chose que vous critiquez, ça aide. John Oliver
How the fuck did we get here? Well clearly there are many possible answers to that question, including misleading forecasts that bred complacency, a flawed candidate who failed to appeal to white, rural, and working class voters, and – and this is worth repeating – deep racism and/or indifference to it. For those, including us, who were shocked by Tuesday, we’re going to be examining all of this for years. But for tonight, let’s look at just one narrow element that may have helped bring us here, because it will be important going forward, and that is our media. Specifically how a system that is supposed to catch a serial liar failed. (…) Weird conspiracy bullshit has always been bubbling under the surface. But Trump was the first major candidate to harness and fully legitimize it. And it’s obvious in hindsight: He came along and told millions of people every crazy email you’ve ever forwarded was true. And that, at least in part, is why he will be our next president. (…) So keep reminding yourself: This is not normal. Write it on a Post-It note, and stick it on your refrigerator. Hire a skywriter once a month. Tattoo it on your ass. Because a Klan-backed, misogynist internet troll is going to be delivering the next State of the Union address. And that is not normal, it is fucked up. John Oliver
We recognized much earlier than most that there was a little bit of a phenomenon to Donald Trump. I’d say that if we made a mistake last year it’s that we probably did put on too many of his campaign rallies in those early months unedited and just let them run. You never knew what he was going to say. You never knew what was going to happen.Jeff Zucker (president of CNN Worldwide)
It may not be good for America, but it’s damn good for CBS, that’s all i gotta say. (…) So what can I say? The money’s rolling in, this is fun. (…) They’re not even talking about issues. They’re throwing bombs at each other and I think the advertising reflects that. (…) I’ve never seen anything like this and this is going to be a very good year for us. Sorry. It’s a terrible thing to say, but bring it on, Donald, go ahead, keep going. Les Moonves (chief executive of CBS)
Attention, l’Amérique a la rage (…) La science se développe partout au même rythme et la fabrication des bombes est affaire de potentiel industriel. En tuant les Rosenberg, vous avez tout simplement esayé d’arrêter les progrès de la science. Jean-Paul Sartre (« Les animaux malades de la rage », Libération, 22 juin 1953)
L’Amérique des grandes villes, des jeunes et des minorités, n’est qu’une partie de ce grand pays. Elle cache une autre Amérique, plus continentale, plus blanche, qui remâche des haines recuites. Trump a été acclamé par les hommes blancs sans diplômes, souvent laissés pour compte de la mondialisation, et qui ont le sentiment d’être déclassés. (…) Avec beaucoup d’intuition, Trump s’est également emparé du déclassement du monde ouvrier américain, en promettant de dénoncer les traités internationaux, de construire des murs et de rouvrir les mines et les usines. Trump a été acclamé par les hommes blancs sans diplômes, souvent laissés pour compte de la mondialisation, dont la situation n’est pas toujours précaire, loin s’en faut, mais qui ont néanmoins le sentiment d’être déclassés. Cette Amérique-là a la «rage», pour reprendre une formule célèbre de Sartre.Pap Ndiaye
It was plainly wrong though to see the White House lit up in rainbow colors to celebrate the Supreme Court’s legalization of same-sex marriage. That was not cool to me. Tonya Register
Pour le dire crûment, les médias sont passés à côté. Le Washington Post
Toute la technologie éblouissante, l’utilisation des bases de données et la modélisation sophistiquée que les rédactions américaines ont apportées pour l’analyse de la politique pendant cette élection présidentielle, n’ont pas permis aux journalistes d’être à nouveau derrière l’histoire, derrière le reste du pays. (…) Les médias ont raté ce qu’il se passait autour d’eux (…) les chiffres n’étaient pas simplement un piètre guide pour la nuit électorale, ils étaient à mille lieues de ce qui se passait réellement. Le raté de ce mardi soir était beaucoup plus qu’un échec dans le scrutin, c’était aussi l’échec de la compréhension de la colère bouillante d’une grande partie de l’électorat américain, qui se sent laissée de côté par une récupération sélective et trahie par des accords commerciaux qu’elle considère comme des menaces à ses emplois. (…) Les journalistes n’ont pas remis en question les sondages quant ils confirmaient leur intuition que Donald Trump ne pourrait jamais devenir président. Ils ont décrit les partisans du candidat qui croyaient encore qu’il avait une chance comme déconnectés de la réalité. En fait, c’était l’inverse. (…) Si les médias ne parviennent pas à présenter un scénario politique basé sur la réalité, alors ils ont échoué dans l’accomplissement de leur fonction la plus fondamentale (…) l’Amérique profonde n’est pas un lieu, c’est un état d’esprit – c’est dans certaines parties de Long Island et Queens, beaucoup de Staten Island, certains quartiers de Miami ou même de Chicago. Et, oui, elle est largement – mais pas exclusivement – concerne les travailleurs de la classe blanche. Ils pensent que quelque chose va tellement mal que toutes les vérifications factuelles de M. Trump cette année, les innombrables rapports sur ses mensonges – qu’il a prononcés plus que Mme Clinton – et l’enquête vigoureuse de son entreprise et de ses transgressions personnelles, les a dérangés bienomins que les maux nationaux perçus que M. Trump a pointés et promis de traiter. Selon l’avis des électeurs américains, le gouvernement était cassé, le système économique était cassé, et nous l’avons entendu si souvent, les médias étaient cassés. Eh bien, quelque chose est sûrement rompu. Il peut être réparé, mais il faut le faire une bonne fois pour toutes. Le New York Times
Il y a même une partie de moi qui aime ce gars. John Oliver
Le problème, c’est que même lorsque l’on peut prouver par la démonstration que Trump a tort, cela n’a en quelque sorte pas d’importance. (…) Et c’est peut-être parce qu’il a passé des décennies à transformer son nom en une marque, synonyme de succès et de qualité (…), une marque dont il est lui-même la mascotte (…). Mais s’il faut vraiment qu’il soit le candidat républicain à l’élection présidentielle, il est urgent d’arrêter de penser à la mascotte et de commencer à regarder l’homme. Un candidat à la présidence doit proposer une série de propositions cohérentes. Quoi que vous pensiez de Marco Rubio ou de Ted Cruz, au moins, vous savez plus ou moins ce qu’ils pensent. Les opinions de Trump, à l’inverse, sont largement incohérentes. Il a été successivement pour et contre l’avortement, pour et contre l’interdiction de la vente de fusils d’assaut, pour l’immigration de réfugiés et pour l’idée de les expulser hors du pays. (…) Ce qui fait peur, c’est que nous n’avons aucun moyen de savoir lesquelles de ces opinions contradictoires il défendra s’il gagne l’élection. (…) Cette campagne a été dominée par les scandales, mais il est dangereux de penser qu’il y en a un nombre égal des deux côtés. Et vous pouvez être irrité par certains des scandales d’Hillary – c’est compréhensible – mais vous devriez alors être foutument scandalisé par ceux de Trump. John Oliver
Il est évident que, sans la presse, tout ce que les journaux télévisés auraient à nous montrer, ce serait des présentateurs occupés à jouer à la baballe. (…) Nous devrons tôt ou tard payer pour le travail journalistique, ou alors nous finirons tous par en payer le prix. Non seulement cela laisserait la voie libre aux pires manipulations, mais, en plus, tous les futurs films de journalistes risqueraient de ressembler à ça. John Oliver
Voilà un type qui aime se saisir de sujets ennuyeux et les rendre intéressants. Si vous pouvez faire la même chose que ce qu’il s’est passé avec la FCC et la neutralité du Net, imaginez le niveau d’intérêt des gens pour des questions encore plus proches d’eux. Cyrus Habib
Il n’a pas les défauts d’autres animateurs satiriques. Il ne donne jamais l’impression qu’il méprise son public ou les gens dont il parle. Son humour n’est pas cynique, et ses sujets semblent magnifiquement enquêtés. Jean Lesieur (France 24)
Oliver a d’étonnantes audaces: parler plus de quinze minutes sans interruption face caméra, aborder des sujets techniques (le lobbying des télécoms, la Cour suprême) ou controversés (les médicaments, le tabac). (…) John Oliver possède la distance nécessaire (un Anglais en Amérique) pour faire marrer, et en plus, il informe, sensibilise, et parvient même à déclencher l’engagement de ses téléspectateurs pour des combats politiques. A l’heure où l’on accuse de plus en plus l’infotainment de promouvoir des opinions (voire des mensonges) sous couvert d’humour, John Oliver aurait-il inventé la formule parfaite ? Grazia
John Oliver n’a pas peur d’aborder des thèmes polémiques qui divisent fortement la société américaine comme l’avortement ou la peine de mort. Et si ses vidéos culminent à plus de huit millions de vues sur Youtube en moyenne ce n’est pas par hasard. Plutôt que d’aborder rapidement le sujet, John et l’équipe de Last Week Tonight ont fait le choix de consacrer une vingtaine de minutes environ à un sujet précis, sur lequel ils enquêtent (comme de véritables journalistes) et qu’ils présentent de façon claire et argumentée. (…) La démarche d’Oliver s’inscrit dans un héritage, celui de la satire politique. Traduction : c’est terriblement drôle. La grande force du Britannique est de se présenter comme un comédien (c’est son métier après tout) et non pas un journaliste d’investigation. Il cherche à illustrer les absurdités d’une société où chacun cherche à imposer son point de vue de façon plus ou moins violente, et choisit comme arme l’humour. L’effet est garanti. (…) L’impertinence d’Oliver diffère à mon sens de celle d’un Yann Barthès par exemple, en ce qu’elle ne s’attaque pas qu’aux dérapages de représentants politiques ou de la vie civile, mais en ce qu’elle oblige la société américaine à affronter ses contradictions (aussi diverses soient-elles) et son hypocrisie manifeste. Y compris l’hypocrisie de l’axe politique que défend Oliver, celui des libéraux (qui correspondrait à la gauche en France). Ce que n’arrive pas à faire (ou ne souhaite pas?) le Petit Journal, précisément parce qu’exceptés les sketchs d’Eric et Quentin ou d’Alex Lutz et Bruno Sanchez, la rédaction est composée de journalistes, là où l’équipe d’Oliver s’appuie sur des auteurs et comédiens. Or, cette liberté de ton propre à l’exercice de la satire me parait plus efficace pour dénoncer les excès et dérapage d’une société. Louise Michel
L’animateur du “Last Week Tonight” (…) s’est fait le meilleur vulgarisateur des problèmes américains, dont les diatribes ont souvent des conséquences dans la vraie vie. C’est ce qu’on pourrait appeler le « John Oliver effect ». Provoquer une réaction citoyenne avec une simple tribune humoristique hebdomadaire en fin de soirée sur HBO – et qui recommence, pour une saison 3, ce dimanche 14 février. Depuis que l’acteur anglais a pris les commandes du Last Week Tonight en avril 2014, ses sermons dominicaux sur les problèmes qui minent les Etats-Unis (de la cause transgenre aux problèmes des insfrastructures publiques), ont réussi à faire changer les choses. Cet ancien disciple de Stephen Colbert et Jon Stewart n’a pas seulement fidélisé une solide base de téléspectateurs prêts à faire ce qu’il leur dicte, il a aussi poussé les politiques à se saisir de questions aussi austères qu’essentielles, qu’il traite avec son œil de citoyen britannique, émigré aux Etats-Unis depuis une quinzaine d’années et marié à une vétéran de la guerre d’Irak. Entouré d’une équipe qui travaille trois semaines sur des sujets dont il s’offusque, John Oliver ne souhaite pas forcément clouer son pays d’adoption au pilori : « Je ne cherche pas à ce que l’éviscération soit la caractéristique qui définisse notre boulot hebdomadaire », explique-t-il d’ailleurs à USA Today. Il réalise seulement un boulot unique, rigoureux et pédagogue. Et si le meilleur journaliste télé des Etats-Unis était en fait un humoriste ? Détail de ses coups d’éclat qui ont fait bouger les lignes. Télérama
John Oliver avait prévenu : la primaire ne l’intéresse qu’assez peu. Mais le présentateur du LastWeekTonight, le show le plus corrosif de la télévision américaine, pouvait difficilement s’abstenir de parler de Donald Trump. Alors que le candidat à la primaire républicaine remporte les Etats les uns après les autres (et pourrait de ce fait remporter le ticket – réponse partielle mardi 1er mars), il devenait de plus en plus urgent de s’intéresser à sa campagne et ses idées fluctuantes. Dans son émission du 28 février (que l’on n’espère pas noyée par les Oscars), avec la rigueur et la puissance comique qu’on lui connaît, l’Anglais émigré aux Etats-Unis a cliniquement dézingué l’homme politique, qualifié de « grain de beauté dans le dos » : « inoffensif il y a un an, tellement gros maintenant qu’il serait inconscient de l’ignorer ». Durant vingt minutes, John Oliver expose rigoureusement les faits, entrecoupés de piques comiques pour les appuyer. « Cet homme paraît séduisant… jusqu’à ce qu’on y regarde de plus près » : oui, Donald Trump est drôle, mais non, tout ce qu’il dit n’est pas vrai. Oui, il finance sa campagne, mais non, celle-ci ne repose pas que sur ses sous à lui. Oui, il est riche, mais non, il ne pèse pas 10 milliards de dollars (plutôt entre 150 et 250 millions). Oui, son nom est synonyme de succès, mais non, toutes ses affaires ne sont pas florissantes. On sent toutefois Oliver moins sarcastique qu’à l’accoutumé. Car l’heure est grave : « S’il devient vraiment le candidat républicain, il faut arrêter de penser à la mascotte Trump et commencer à penser à l’homme. » Un homme qui est, selon John Oliver, inconstant politiquement (tantôt pro-avortement, pro-migrants, pro-armes, et tantôt contre) et très trouble sur ses positions : « Il n’y a aucun moyen de savoir où se situeront ses convictions quand il sera à la Maison Blanche. » Et Oliver de sortir, l’air grave, le programme de Trump pour combattre l’Etat islamique (« Nous devons tuer leurs familles ») : « Ça, c’est le probable futur candidat républicain qui préconise un crime de guerre. » Prophétique, il prévient que le 20 janvier 2017, si Trump est élu et prête serment ce jour-là, « des voyageurs du futur viendront pour empêcher cela ». Aussi, pour tenter de saper l’influence de sa marque, qui capitalise sur le sens anglais de son nom (« trump » = atout), Oliver rappelle que celui-ci n’est pas le véritable nom d’origine de la famille : « Un de ses ancêtres a fait changer son nom de Drumpf à Trump. C’est bien moins magique et cela reflète sa personnalité. » Télérama
« Cette campagne cauchemardesque » et Donald Trump étaient du petit lait pour l’animateur britannique, qui a élevé le candidat républicain au rang de meilleur ennemi. Si, au début de la primaire républicaine, il s’est refusé à parler de lui, le comédien s’est finalement laissé aller à un portrait en forme de missile scud en février : vingt minutes de diatribe aussi jouissive qu’explosive. Les vannes étaient ouvertes : presque chaque semaine ensuite, l’élection aux mille noms a fait l’objet d’un traitement dont Trump avait les faveurs, défis et piques assassines en bonus. Jusqu’à l’émission de dimanche dernier, dans laquelle John Oliver avoue sa part de responsabilité : « Il y a quelques temps, on eut pu trouver drôle une candidature de Trump », explique l’Anglais, qui fait son mea culpa en diffusant des images de 2013. Alors animateur intérimaire du Daily Show, il appelait de ses vœux une candidature du milliardaire « à la coupe cheveux ridicule ». « Je suis un idiot », regrette-t-il, hilare, demandant aux Américains d’aller voter. Quand on connaît sa force de persuasion auprès de ses ouailles, on peut espérer qu’ils l’écoutent. Télérama
There is an outsider mentality as well as a faux authority thing that probably helps me comedically. (…) There’s a respect for authority in America that is a little odd to me. You respect the office, and never mind the person in it. That is not the case in England. In England, you always want to punch up. There is no respect for the office, the building, or any of the people who go in or out of it. There is much more deep-rooted contempt. (…) There is nothing I can accuse America of doing that Britain has not done worse in its history. So I’m coming from a point of self-criticism at the start. That helps in a way. And if it’s clear that you love the thing that you’re criticizing, that helps. John Oliver
She is very American with a capital A,” and “once you’ve bled for America, you definitely get to say you’re an American in a slightly louder tone of voice. (…) She grounds me in the fact that what I do doesn’t really matter at all, and also I’m a little more defensive of how America is perceived overseas. America takes a lot of [expletive], much of it well earned, from the rest of the world. And yet when something terrible goes down, people are waiting for Americans to fall out of the sky and help them. (…) If you don’t have anyone in your family who’s serving, you can very easily think that we’re not at war now. But we are. This is a country at war. There’s a massive disconnect between America and its military, and being married to a veteran removes that disconnect in a very substantial way. John Oliver
I can’t come home and say I had a really tough day at work today and see her roll her eyes and go, ‘Really?’ And she would be like, ‘I can’t imagine how difficult it was for you. You clown!’ Rightly, I have no place to whine about anything. That’s the problem with living with someone who has fought a war. You lose the moral high ground.John Oliver
It’s the most emasculating thing I could possibly do to go out with someone who has actually done something valuable with their life. John Oliver
There’s a long tradition of people from another nation being able to present their cultural criticism or satire as having a distance that a native seemingly doesn’t have. It feels like Oliver understands us differently than we do because he wasn’t born here. He’s seeing America as this other thing that he can hold at arm’s length. It creates the illusion of a perspective that he does a good job of playing up. He captures this outraged confusion at whatever crazy thing he’s talking about in current events. Jason Mittell (Middlebury College)
As a covert operative for the liberal elite, Oliver was working behind enemy lines at the RNC. When convention security chased after him for entering into a restricted area Oliver, who was still on a temporary work visa, found himself at risk for potential deportation. Attempting to avoid arrest and subsequent Breturn, the reporter and his camera crew happened upon a group of veterans who offered to help them hide. In a meet-cute befitting a beloved political satirist, one of those veterans was Oliver’s future wife—U.S. Army combat medic Kate Norley. After exchanging emails (aww, 2008) Oliver and Norley struck up a friendship; in 2010, the bespectacled Brit proposed in St. Thomas, and the couple tied the knot one year later. Norley, who Oliver describes as “Very American with a capital A,” is already a fan hero for (permanently!) saving her celebrity husband from deportation, but she’s also a straight-up American hero. At age 19, Norley enlisted in the military after the 9/11 attacks, serving as a combat medic in Fallujah and a mental health specialist in Ramadi, providing counsel to returning soldiers. In addition to being the only female combat-stress specialist, she was awarded the Combat Medic badge for providing medical care while under fire. Stateside, she worked as a veteran’s rights advocate for Vets for Freedom; the organization, which was founded in 2006, advocated on behalf of victory in the War on Terror, and promoted like-minded politicians. To say that Norley keeps Oliver grounded seems like an understatement. In classic self-effacing style, Oliver explained, “It’s the most emasculating thing I could possibly do to go out with someone who has actually done something valuable with their life.” Long-term emasculation aside, Norley’s combat experience gives the comedian some much-needed perspective: “I can’t come home and say I had a really tough day at work today and see her roll her eyes and go, ‘Really?’ And she would be like, ‘I can’t imagine how difficult it was for you. You clown!’ Rightly, I have no place to whine about anything. That’s the problem with living with someone who has fought a war. You lose the moral high ground.” When Oliver was offered his current gig hosting his own show, Last Week Tonight with John Oliver, at HBO, his Daily Show departure was huge entertainment news. But as Oliver tells it, Norley knew just how to keep him humble. As the comedian was making a career-defining move, his wife was on emergency deployment in the Philippines as a first responder to Typhoon Haiyan. “I got to speak to her once on this spotty satellite phone,” he recalls, “and she’s saying, ‘We had to do emergency C-sections and amputations and there are dead bodies everywhere, it’s worse than people are letting on, it’s just death, death, everywhere.’ And there’s no point at which you can go, ‘I’ve got some news as well!’ It just doesn’t matter.” Oliver distinguishes himself from the late night pack with his British accent, across-the-pond intellectualism, and genuine outsider’s confusion. But after eight years with a proud vet, Oliver has proven himself to be quite the patriot. After his 2013 break with The Daily Show was finalized, John and Kate headed to Afghanistan as part of the USO Tour. The unconventional second honeymoon found the Oliver’s sleeping in the barracks, eating with the troops, and performing at more than half a dozen forward operating bases. Last Week Tonight viewers might be surprised to learn that Oliver’s wife is a Republican—let alone a Republican who’s advocated on behalf of GOP politicians on Fox News. The unabashedly liberal HBO show has been credited with real change, otherwise known as the “John Oliver effect.” Oliver’s ability to synthesize and sensationalize under-reported topics into viral videos has led to political victories for causes ranging from unfair bail requirements to FCC regulations. And while Oliver is an equal opportunity satirist, his popular “Make Donald Drumpf Again” campaign suggests that He’s with Her. In an increasingly polarized political climate, it’s rare and refreshing to see bipartisan cooperation—let alone wedlock. And while Oliver hasn’t publicly commented on any political squabbles at home, he’s unequivocally supportive of his wife and her veteran activism: “Once you’ve bled for America, you definitely get to say you’re an American in a slightly louder tone of voice.” The Daily Beast
Attention: un effet peut en cacher un autre !
Anglais en Amérique, diplomé de Cambridge, monologues de 15 minutes face caméra et sans interruption, sujets techniques (lobbying des télécoms, Cour suprême) ou controversés (médicaments, tabac), distancié mais pas méprisant, désopilant mais pas cynique, sujets magnifiquement enquêtés qui parviennent à informer, sensibiliser et même mobiliser les téléspectateurs …
Au lendemain d’une élection américaine proprement historique par ses résultats aussi prévisibles qu’imprévus …
Et où après le fiasco des sondeurs et sans parler des différentes officines – y compris balkaniques – pressant jusqu’à la dernière goutte le citron de la Trumpmania …
C’est aux journalistes eux-mêmes de faire leur mea culpa …
Pendant qu’avec la même violence qu’ils reprochaient à leurs opposants, les partisans du pouvoir en place montrent leurs vraies couleurs …
Quelle meilleure mesure de la véritable hystérie collective et de l’auto-aveuglement massif …
Qui s’est emparé de nos belles âmes et de nos beaux esprits …
Que de voir comment le si longtemps célébré effet John Oliver …
Ce mélange rare du meilleur de l’université (Cambridge, s’il vous plait !) et de l’humour (Monty Python) britanniques du plus brillant des animateurs satiriques de la télévision américaine …
Mais tristement réduit à la fin aux attaques ad hominem (sur la tête ou le nom du candidat) voire au degré zéro du simple juron …
Qui réussissait, joignant la critique la plus implacable et le respect du public le plus exigeant, à avoir des conséquences dans la vraie vie …
John Oliver avait prévenu : la primaire ne l’intéresse qu’assez peu. Mais le présentateur du LastWeekTonight, le show le plus corrosif de la télévision américaine, pouvait difficilement s’abstenir de parler de Donald Trump. Alors que le candidat à la primaire républicaine remporte les Etats les uns après les autres (et pourrait de ce fait remporter le ticket – réponse partielle mardi 1er mars), il devenait de plus en plus urgent de s’intéresser à sa campagne et ses idées fluctuantes.
Dans son émission du 28 février (que l’on n’espère pas noyée par les Oscars), avec la rigueur et la puissance comique qu’on lui connaît, l’Anglais émigré aux Etats-Unis a cliniquement dézingué l’homme politique, qualifié de « grain de beauté dans le dos » : « inoffensif il y a un an, tellement gros maintenant qu’il serait inconscient de l’ignorer ».
Durant vingt minutes, John Oliver expose rigoureusement les faits, entrecoupés de piques comiques pour les appuyer. « Cet homme paraît séduisant… jusqu’à ce qu’on y regarde de plus près » : oui, Donald Trump est drôle, mais non, tout ce qu’il dit n’est pas vrai. Oui, il finance sa campagne, mais non, celle-ci ne repose pas que sur ses sous à lui. Oui, il est riche, mais non, il ne pèse pas 10 milliards de dollars (plutôt entre 150 et 250 millions). Oui, son nom est synonyme de succès, mais non, toutes ses affaires ne sont pas florissantes.
On sent toutefois Oliver moins sarcastique qu’à l’accoutumé. Car l’heure est grave : « S’il devient vraiment le candidat républicain, il faut arrêter de penser à la mascotte Trump et commencer à penser à l’homme. » Un homme qui est, selon John Oliver, inconstant politiquement (tantôt pro-avortement, pro-migrants, pro-armes, et tantôt contre) et très trouble sur ses positions : « Il n’y a aucun moyen de savoir où se situeront ses convictions quand il sera à la Maison Blanche. » Et Oliver de sortir, l’air grave, le programme de Trump pour combattre l’Etat islamique (« Nous devons tuer leurs familles ») : « Ça, c’est le probable futur candidat républicain qui préconise un crime de guerre. » Prophétique, il prévient que le 20 janvier 2017, si Trump est élu et prête serment ce jour-là, « des voyageurs du futur viendront pour empêcher cela ».
Aussi, pour tenter de saper l’influence de sa marque, qui capitalise sur le sens anglais de son nom (« trump » = atout), Oliver rappelle que celui-ci n’est pas le véritable nom d’origine de la famille : « Un de ses ancêtres a fait changer son nom de Drumpf à Trump. C’est bien moins magique et cela reflète sa personnalité. » Son émission ne serait pas complète sans une tentative (vaine ?) de John Oliver pour changer les choses : « Nous avons rempli les dossiers nécessaires pour déposer le nom “Drumpf”, lâche-t-il, et nous avons ouvert le site DonaldJDrumpf.com sur lequel vous pouvez télécharger une extension pour votre navigateur, qui transformera les occurrences “Trump” en “Drumpf” [on a testé, ça marche, NDLR]. »
« Ne restons pas aveuglés par la magie de son nom, finit-il, déchaîné. Ne votez pas pour lui en gobant ce qu’il dit : c’est un artiste de la connerie. Monsieur Trump, j’attends votre procès. F*ck Donald Trump. »
Maintenant, il ne reste plus qu’à surveiller si le John Oliver effect prendra. Tout le monde retient son souffle.
L’animateur du “Last Week Tonight” rempile pour une troisième saison le 14 février sur HBO. En l’espace de deux ans et fort de téléspectateurs dévoués, l’humoriste s’est fait le meilleur vulgarisateur des problèmes américains, dont les diatribes ont souvent des conséquences dans la vraie vie.
C’est ce qu’on pourrait appeler le « John Oliver effect ». Provoquer une réaction citoyenne avec une simple tribune humoristique hebdomadaire en fin de soirée sur HBO – et qui recommence, pour une saison 3, ce dimanche 14 février. Depuis que l’acteur anglais a pris les commandes du Last Week Tonighten avril 2014, ses sermons dominicaux sur les problèmes qui minent les Etats-Unis (de la cause transgenre aux problèmes des insfrastructures publiques), ont réussi à faire changer les choses. Cet ancien disciple de Stephen Colbert et Jon Stewart n’a pas seulement fidélisé une solide base de téléspectateurs prêts à faire ce qu’il leur dicte, il a aussi poussé les politiques à se saisir de questions aussi austères qu’essentielles, qu’il traite avec son œil de citoyen britannique, émigré aux Etats-Unis depuis une quinzaine d’années et marié à une vétéran de la guerre d’Irak. Entouré d’une équipe qui travaille trois semaines sur des sujets dont il s’offusque, John Oliver ne souhaite pas forcément clouer son pays d’adoption au pilori : « Je ne cherche pas à ce que l’éviscération soit la caractéristique qui définisse notre boulot hebdomadaire », explique-t-il d’ailleurs à USA Today. Il réalise seulement un boulot unique, rigoureux et pédagogue. Et si le meilleur journaliste télé des Etats-Unis était en fait un humoriste ? Détail de ses coups d’éclat qui ont fait bouger les lignes.
Avoir – presque – fait disparaître le nom de Trump du web
Tout le monde l’attendait et il l’a enfin fait. Le 28 février, deux jours avant le premier « Super Tuesday » de ces primaires démocrates et républicaine, John Oliver s’attaque enfin à Donald Trump. Durant 20 minutes, l’Anglais, méticuleux et brillant, démonte les finances moribondes, les ambitions nauséabondes, l’inconstance politique crasse et même le véritable nom du candidat qui pourrait, malheureusement, prendre la tête du parti républicain en vu de l’élection présidentielle de novembre prochain. Finalement, Oliver rappelle que l’un des ancêtres de Trump a fait changer le nom de famille de Drumpf à Trump.
L’effet Oliver : De la même manière que Trump a transformé son nom en marque, Oliver propose, dans sa grandiloquence habituelle, de « Make Donald Drumpf again », ou, d’après le slogan de sa campagne « Make America great again », de rebaptiser Trump sur le Net. « C’est bien moins magique et cela reflète sa personnalité », explique-t-il et assure : « Nous avons rempli les dossiers nécessaires pour déposer le nom “Drumpf” et nous avons ouvert le site DonaldJDrumpf.com sur lequel vous pouvez télécharger une extension pour votre navigateur, qui transformera les occurrences “Trump” en “Drumpf” [on a testé, ça marche, NDLR]. »
Le résultat : Si l’efficace charge d’OIiver n’a pas empêcher Trump de sortir vainqueur du « Super Tuesday » du 1er mars, l’introduction du nom « Donald Drumpf », elle, a pleinement marché. Car, durant 24 heures, le nom « Donald Drumpf » a plus été recherché sur Google que les noms de Marco Rubio et Ted Cruz. « On peut dire que M. Oliver et son mouvement #MakeDonaldDrumpfAgain ont effectué une meilleure campagne que Ms Rubio et Cruz », ironise le New York Times qui révèlent les chiffres.
Avoir protégé la neutralité du web
Dans un segment consacré à l’épineux mais – avouons-le – très chiant problème de la neutralité du Net (pour faire simple : éviter un internet à deux vitesses, permettant à des sociétés qui paieraient plus aux fournisseurs de pouvoir envoyer leur contenu plus vite que les autres), John Oliver a accusé la FCC, le gendarme américain des télécoms, de vouloir mettre à mal ce principe. Il en a appelé, non sans lyrisme, les internautes à canaliser leur colère de façon utile, en se connectant et en écrivant, tous ensemble, à la FCC.
L’effet Oliver : Les téléspectacteurs et internautes ont pris au pied de la lettre les recommandations de John Oliver et se sont massivement rendus sur le site gouvernemental… au point de le faire planter.
Le résultat : Face à un tel effet – totalement inattendu même pour les équipes d’Oliver –, la FCC a finalement voté l’adoption de régulations pour la neutralité du Net. Chapeau.
S’être fait le héraut de la lutte anti-corruption à la Fifa
A une semaine de la Coupe du monde de foot au Brésil en juin 2014, John Oliver, en bon Anglais qui se respecte, crie tout l’amour qu’il porte au football, et en profite surtout pour dénoncer l’instance dirigeante du foot mondial. Une démonstration intelligente de la corruption (alors seulement soupçonnée) de ses leaders, de leur amour pour l’argent (« Imaginez l’argent comme des poils pubiens et la Fifa comme de la cire. Une fois que vous l’arrachez, elle emporte tout avec elle », explique-t-il, pédagogue), des méthodes cavalières de ses dirigeants, dont Sepp Blatter, pour imposer des propres lois aux pays hôtes, etc.
L’effet Oliver : Si le scandale de la Fifa a éclaté un an après sa diatribe grâce à une enquête des autorités américaines sur la base d’un indic au sein de l’organisation, John Oliver a tout de même le mérite d’avoir porté à la connaissance de ceux qui l’ignoraient le système mafieux qui régit le foot mondial. Et d’avoir fait connaître United Passions, le film à la gloire de la Fifa… produit par la Fifa.
Le résultat : L’occasion était trop belle pour ne pas y revenir au moment du scandale qui a coûté la tête de plusieurs de ses dirigeants, dont Sepp Blatter et Michel Platini. En fin d’édito, Oliver supplie Budweiser, sponsor historique de la Fifa au même titre qu’Adidas ou McDonald’s, de lâcher la Fédération : « Je ferai l’ultime sacrifice : si vous participez à l’éviction de Blatter, je boirai l’une de vos bières dégoûtantes. Si vous vous débarrassez de ce démon suisse, cette merde aura le goût de champagne. » La tête de Blatter a fini par tomber, et Oliver a tenu sa promesse.
Avoir limité les confiscations de biens personnels par la police
Aux Etats-Unis, et aussi curieux que cela puisse paraître, la police a le droit de confisquer les biens personnels (argent liquide, maison, voiture…) à des gens arrêtés sans qu’ils soient forcément accusés du moindre crime. Ces biens saisis sont automatiquement coupables (oui, comme un humain) jusqu’à ce que le citoyen prouve le contraire. Une aberration de la justice américaine que John Oliver a dénoncée durant seize minutes lors d’une émission en octobre 2014, en racontant des anecdotes plus folles les unes que les autres : un homme sur le point d’acheter un véhicule d’occasion dépossédé de son argent, un commando de police saisissant des voitures se rendant à une fête (avec vidéo de surveillance à l’appui) ou le témoignage surréaliste d’un policier qui avoue l’arbitraire de ces saisies (« Comme de l’argent tombé du ciel pour acheter des jouets » – une machine à margarita par exemple, histoire vraie). Si le « civil forfeiture » peut se montrer efficace dans la lutte contre le trafic de drogue, il reste « du vol organisé » dans la majeure partie des cas et a généré trois milliards de dollars entre 2008 et 2015. Pour appuyer son discours, Oliver a convoqué Jeff Goldblum dans une parodie de la série New York : unité spéciale des saisies de biens personnels.
L’effet Oliver : L’animateur s’est emparé du sujet à la suite de deux enquêtes du Washington Post et du New Yorker sur cet important vice du droit américain, donnant une visibilité sans précédent à ce système mis en place lors de « guerre contre la drogue » des années 1980.
Le résultat : En janvier 2015, le procureur général des Etats-Unis de l’époque, Eric Holder, a annoncé que les Etats et les officiers de police ne seraient plus autorisés à utiliser la loi fédérale pour saisir des biens sans preuve tangible qu’un crime a été commis. En juillet, le Montana et le Nouveau-Mexique ont changé leur droit : la saisie ne peut s’opérer que s’il y a conviction de crime et le bien accusé bénéficie de la présomption d’innocence. L’argent saisi n’est d’ailleurs plus encaissé par la police mais par le gouvernement local.
Avoir fait plier sur les cautions de prison
Si un citoyen est arrêté et suspecté, il a trois choix : payer une caution qui lui sera rendue s’il se présente à son jugement, plaider coupable et revenir se faire juger, ou attendre d’être jugé en prison. S’il a l’argent, tant mieux, sinon, et cela concerne les plus pauvres des Américains, c’est passage par la case prison ou par l’aveu de sa culpabilité. Un dilemme cornélien et un vieux « problème systémique » d’une justice à deux vitesses : un riche soupçonné de meurtre (par exemple, Robert Durst) peut vivre libre dans l’attente de son procès quand un pauvre ayant commis une infraction mineure (comme rouler avec un permis périmé) peut se retrouver à Rikers Island dans l’attente de son procès. Selon les chiffres sortis par Oliver, près de 40 % des détenus aux Etats-Unis le sont parce qu’ils ne peuvent payer leur caution. « La prison devrait être réservée aux dangereux criminels. Si 40 % d’un groupe ne correspond pas aux critères basiques pour y être, cela devrait changer votre perception de ce groupe », commente-t-il. Avec les conséquences dramatiques qu’une incarcération, même très courte, ou qu’un aveu de culpabilité peuvent engendrer : perte d’emploi, perte de logement, mise au ban de la société, etc. « La prison peut vous détruire. » Et Oliver de dénoncer le commerce parallèle des prêteurs sur gage, bien moins classieux que Robert Forster dans Jackie Brown, et de leurs corollaires, les chasseurs de prime.
L’effet Oliver : Diffusé en juin 2015, le message de l’émission, très remonté mais très pédagogue n’a pris qu’un seul mois à infuser, notamment dans l’esprit du maire de New York, Bill de Blasio.
Le résultat : En juillet 2015, Bill de Blasio et la municipalité de New York donnent le pouvoir aux juges de relâcher 3000 détenus à faible risque en attente de leur jugement des prisons du comté, et de les surveiller afin qu’ils se rendent bien à leur procès. « Ce système de caution est un vrai problème car certaines personnes sont emprisonnées sur la taille de leur compte en banque et non sur le risque qu’ils posent », a commenté le maire de la ville. La prison de Rikers se verrait ainsi délester de 200 détenus par jour.
Avoir financé des bourses pour les étudiantes ingénieures
Le saviez-vous ? Aux Etats-Unis, l’organisation qui gère l’élection de Miss America est le plus gros donateur de bourses pour femmes dans le monde. Selon elle, elle financerait, chaque année, 45 millions de dollars de bourses. Comme si le Comité Miss France donnait une partie de ses revenus en taxe d’apprentissage aux universités ou grandes écoles françaises. « C’est un peu bizarre parce que Miss America ne donne qu’aux femmes qui participent au concours », introduit Oliver dans son émission du 21 septembre 2014. Et cela pose un léger problème, car, pour participer à Miss America, les jeunes femmes doivent déclarer ne pas être mariées et ne pas être ou avoir été enceinte. Mais c’est surtout le chiffre de 45 millions de dollars qui a taraudé l’Anglais. Après examen minutieux et complet de milliers de pages d’impôts, l’équipe du Last Week Tonight, a en fait découvert que Miss America est loin, très loin, de donner autant d’argent. Tout juste 4 millions en 2012 selon leurs calculs. Mais, même si Miss America truque ses chiffres, la réalité est tout de même là : l’organisation reste bel et bien le plus gros donateur de bourses pour femmes dans le monde.
L’effet John Oliver : Lors de sa présentation, le présentateur a rappelé que les dons de Miss America dépassaient de loin ceux d’autres organisations plus respectables. Et de citer plusieurs fondations. « Vous pouvez tout à fait donner à ces organismes si vous voulez changer le fait que le plus gros donateur pour étudiantes leur demande de ne pas être mariées et d’avoir un utérus en parfait état. » Ce qu’ont écouté les téléspectateurs dans un effort de dons surnommé le « sursaut John Oliver ».
Le résultat : Ce « John Oliver bounce », appelé ainsi par la Société des femmes ingénieures de Chicago, a permis à cette organisation de récolter 25 000 dollars (soit 15% de leurs dons annuels) durant les seuls trois jours qui ont suivi la diffusion de l’émission. La fondation a aussi vu le trafic doubler sur son site web et sa présence sur les réseaux sociaux boostée.
Avoir fait un don de 70 000 dollars à Médecins sans frontières
La religion et les bigots, l’une des marottes de John Oliver. Dans un épisode d’août 2015, l’Anglais a minutieusement et durant vingt minutes présenté le pas très catholique business des télévangélistes, ces prédicateurs qui, en plus de promettre de guérir des cancers à travers les écrans de télévision, engrangent des millions de dollars soutirés à leurs ouailles (parfois vulnérables voire malades) pour acheter jets privés et villas. Ces demandes de dons sont parfaitement légales… et totalement nettes d’impôts. Le fisc américain est d’ailleurs très vague sur la notion d’église et n’est absolument pas regardant sur les croyances – même fantasques – qu’elles prônent. Aussi, après avoir correspondu pendant sept mois avec un télévangéliste (et envoyé près de 300 dollars), John Oliver a décidé de fonder lui-même sa propre église, Our Lady of Perpetual Exemption, et de récolter légalement les dons, nets d’impôts, de ses fidèles à lui.
L’effet John Oliver : Le pasteur Oliver a donc réclamé à ses fidèles téléspectateurs de « planter leurs graines » et de lui envoyer de l’argent, rappelant : « Tout ceci est très légal. » Ce qui est vrai.
Le résultat : Une semaine plus tard, John Oliver commence son émission par rappeler que son Eglise, fondée quelques jours auparavant, a rencontré un succès surprise : « Bizarrement, vous étiez plus nombreux à répondre que nous l’attendions. » Deux semaines plus tard, devant des boîtes pleines de courriers, de vrais sacs de graines et d’autres offrandes graveleuses, le pasteur Oliver annonce fermer son Eglise parce que quatre téléspectateurs ont trouvé malin d’envoyer leur véritable semence. « Fonder une Eglise est marrant jusqu’à ce que quelqu’un vous envoie son sperme dans une enveloppe », regrette-t-il. Mais l’honneur est sauf : avec sa fausse congrégation, John Oliver a réussi à récolter 70 000 dollars, entièrement reversés à Médecins sans frontières. En attendant, le fisc américain n’a pas touché à sa législation.
Rendre les suppliques citoyennes au gouvernement par vidéo possible
Toutes ces causes qui ont évolué grâce à des vidéos reprises en boucle sur Internet ont forcément donné des idées. En janvier 2015, le sénateur démocrate de l’Etat de Washington Cyrus Habib a demandé à introduire, dans un amendement, la possibilité aux citoyens d’envoyer, sous la forme de vidéos, leurs avis et leurs témoignages sur les lois en cours de vote. Le sénateur n’aurait ainsi qu’à se connecter sur une plateforme vidéo pour écouter les suppliques des électeurs, tandis que le citoyen n’aurait pas à se déplacer à son parlement local ou à faire appel à des lobbyistes pour se faire entendre. Pratique et surtout directement inspiré par John Oliver : « Voilà un type qui aime se saisir de sujets ennuyeux et les rendre intéressants, a expliqué Cyrus Habib. Si vous pouvez faire la même chose que ce qu’il s’est passé avec la FCC et la neutralité du Net, imaginez le niveau d’intérêt des gens pour des questions encore plus proches d’eux. »
Avec l’énorme boulot pour que le monde commence à tourner rond et la très grande base de fans prêts à faire tout ce qu’il leur demande, il y a fort à parier que la saison 3 réservera son lot de surprises. Et pourquoi pas permettre à l’effet Oliver de faire tomber de son piédestal sa tête de Turc favorite, le candidat Donald Trump.
Avec parfois une dernière charge pour la route, les late shows américains ont géré de différentes manières l’avant-scrutin.
Ils ont multiplié les sketchs et les éditos engagés, fait commenter leurs invités du showbiz, et même reçus tous les candidats : les late shows, ces émissions de fin de soirée très appréciés par les téléspectateurs américains, ont joué un rôle important dans la campagne présidentielle. Mais Jimmy Fallon, Stephen Colbert, Jimmy Kimmel ou encore James Corden ont approché de manière très différente les derniers jours avant le scrutin.
Stephen Colbert, le plus droit dans ses bottes
Si le très politique animateur de CBS a tout de même invité Trump une fois sur son plateau – un passage presque obligé –, il s’est contenté par la suite de recevoir son double en dessin animé, tout aussi orange et vulgaire que l’original. Mais, pour sa dernière émission avant le scrutin, il est resté dans la droite lignée de son engagement anti-Trump : une nouvelle fois aidé par Jon Stewart, son prédécesseur (et mentor), Colbert a monté une mini-comédie musicale afin d’inciter les gens à voter… mais surtout à faire le bon choix et ne pas offrir sa voix à ce « connard en colère ».
Jimmy Fallon, le plus silencieux
Jimmy Fallon a beau être le présentateur de late show le plus efficace de la télé depuis qu’il a repris les rênes du Tonight Show en 2014, il a prouvé, lors de cette campagne, qu’il est aussi le plus complaisant. Dans le but d’être sympa avec tout le monde (et sûrement ne pas s’aliéner son public), il a aussi bien fait le foufou avec Hillary Clinton qu’avec Donald Trump, qu’il a, par exemple, décoiffé, tout évoquant, du bout des lèvres, certains points de son programme. Résultat, il s’est senti obligé de faire son mea culpa, insistant sur le fait qu’il n’« aime pas » le candidat républicain. On n’en doutait pas. Mais quand même : ses derniers shows étaient 100 % divertissement, 0 % politique, malgré quelques discrètes – quoiqu’amusantes – allusions. Dommage. La veille de l’élection, il a tout de même reçu son confrère de HBO, le plus politique Bill Maher, qui a tenu à remettre les points sur les « I » : « Donald Trump n’est pas drôle. » Une pique à peine déguisée à Fallon, que celui-ci a prise toujours avec le sourire.
Pour sa dernière émission avant-scrutin, son compatriote Benedict Cumberbatch lui lit le Conte de l’élection 2016 : un résumé enfantin, mais drôle, très ironique, rigoureusement vrai et très, très anti-Trump. Ça vaut le coup d’œil :
John Oliver, le plus désolé
« Cette campagne cauchemardesque » et Donald Trump étaient du petit lait pour l’animateur britannique, qui a élevé le candidat républicain au rang de meilleur ennemi. Si, au début de la primaire républicaine, il s’est refusé à parler de lui, le comédien s’est finalement laissé aller à un portrait en forme de missile scud en février : vingt minutes de diatribe aussi jouissive qu’explosive. Les vannes étaient ouvertes : presque chaque semaine ensuite, l’élection aux mille noms a fait l’objet d’un traitement dont Trump avait les faveurs, défis et piques assassines en bonus.
Jusqu’à l’émission de dimanche dernier, dans laquelle John Oliver avoue sa part de responsabilité : « Il y a quelques temps, on eut pu trouver drôle une candidature de Trump », explique l’Anglais, qui fait son mea culpa en diffusant des images de 2013. Alors animateur intérimaire du Daily Show, il appelait de ses vœux une candidature du milliardaire « à la coupe cheveux ridicule ». « Je suis un idiot », regrette-t-il, hilare, demandant aux Américains d’aller voter. Quand on connaît sa force de persuasion auprès de ses ouailles, on peut espérer qu’ils l’écoutent.
Jimmy Kimmel, le plus malin
Entre Jimmy Fallon et Jimmy Kimmel, c’est une petite guerre. Qui sera le king du late show ? Si Fallon a peut-être une longueur d’avance sur le fun, Kimmel est plus fort sur le rire intelligent. Lui aussi a invité chacun des candidats (y compris des primaires) sur son plateau, blaguant avec eux. Lui aussi a été plutôt sympa avec Donald Trump, même s’il ne s’est pas privé pour le basher sur ses propostions invraisemblables. Mais, lui ne s’est jamais laissé compromettre. Régulièrement dans ses monologues ou ses sketchs, celui qui se rêve vice-président a étrillé le candidat républicain. Et dans cette dernière ligne droite, il a lancé une nouvelle séquence hilarante, Drunk Donald Trump, dans laquelle il s’amuse à ralentir les discours du candidat pour le faire passer pour un soulard. Lundi soir, Kimmel a fait encore plus fort : en remontant de vrais compliments faits par Trump à Clinton, il a transformé les propos du républicain en clip de soutien à son adversaire démocrate. A s’y méprendre mais plutôt naturel quand on sait que Trump est une girouette.
Seth Meyers, le plus radical
Dans le show qui suit Jimmy Fallon sur NBC, pas de compromission : Seth Meyers est résolument anti-Trump et ne s’est même pas embarrassé à l’inviter dans son Late Night. Armé du sourire narquois qui ne le quitte jamais, le fringant animateur s’est fait le pourfendeur du républicain dans pas loin de la totalité de ses A Closer Look, sorte d’édito quotidien au vitriol. Et pour son dernier, il ne s’est pas retenu, en reprenant les aberrations de Trump durant cette « chaotique » fin de campagne : ses soutiens (dont le rockeur sudiste aux sorties sexistes et antisémites Ted Nugent) bien miséreux à côté de ceux de Clinton, son compte Twitter qui lui est retiré par ses équipes de campagne, ses promesses de vengeance post-élection ou encore sa vaine tentative de récupération lors du retour du scandale des e-mails. Assez brillant.
The ‘Last Week Tonight’ host broke down the so-called scandals associated with the two presidential candidates and found Trump’s to be far, far worse.
Marlow Stern
09.26.16
On the eve of the first presidential debate, a broadcast event moderated by NBC News’ Lester Holt that’s expected to attract as many as 100 million viewers, John Oliver returned to his Last Week Tonight hosting duties after a month-long hiatus (and one big Emmy win).
There was, of course, a lot for the comedian to unpack on Sunday night’s edition of his acclaimed HBO series, so Oliver chose to dedicate the meat of his program to the 2016 election, or as he called it: “The electoral equivalent of seeing someone puking so you start puking and then someone else is puking and pretty soon everyone is puking 2016.”
Oliver took it upon himself to inform the voting masses about the two scandal-ridden candidates, Hillary Clinton and Donald Trump, by running down all of their alleged scandals.
First came Hillary. “I do know that even talking about her scandals will irritate some of you, given that her opponent is an unambiguously racist scarecrow stuffed with scrunched-up copies of Jugs magazine, and that’s fair,” said Oliver. “But not being as bad as Donald Trump is a low bar to clear, and if you focus on nothing but him, you fail to vet a woman who might be president.”
The British political satirist then ran down the list of Hillary’s so-called scandals, many of which have already been “heavily litigated” in the past.
“For instance: Whitewater. More than six years of investigations by three different prosecutors and multiple committees failed to find sufficient evidence of wrongdoing,” offered Oliver. “Then there was Benghazi: Now, eight congressional investigations broadly concluded the State Department could have done more to increase security at the embassy but none found evidence of wrongdoing by Clinton. And then there is the problematic issue of the Swiss File Transfer, and while, yes, investigators found that Hillary was in Zurich at the time of the transfer, and documents show she was aware the transfer took place, and yes, the Clintons did have something to gain financially from it, the fact is the Swiss File Transfer is something I just made up right now, but the very fact that for a second you kind of rememberedit says something about the tone of coverage surrounding Clinton.”
But the two big current scandals surrounding Clinton concern emailgate (or that Hillary used an unsecure private server to transmit classified information as secretary of state) and the Clinton Foundation pay-for-play allegations. Oliver found that these two scandals were pretty overblown.
“The FBI found 113 such emails [sent by Hillary that were classified in nature], though in fairness, only three of them had classification markers and were not in the header of the email as they should have been. And while the FBI found Clinton and her staff to be ‘extremely careless,’ they said they couldn’t ‘find a case that would support bringing criminal charges.’ So it’s not good, but it’s not as bad as it looks,” Oliver said of Clinton’s email scandal.
As far the Clinton Foundation, which has “helped millions around the world access lower-cost HIV treatment,” Oliver and his crack team of researchers went through the only seemingly legitimate allegation against the foundation—that the State Department approved the sale of a uranium mine to Putin’s Russia as a key player in the deal made four separate donations to the Clinton Foundation totaling $2.35 million.
“Not only was Hillary not involved in that decision,” said Oliver, “but eight other federal agencies—plus the Nuclear Regulatory Commission—also had to sign off, which they did. So this donation was legal, but very annoyingly handled. Any suggestion of pay-for-play fails to account for the separate actions of nine unrelated government agencies.”
“We’ve spent several frustrating weeks trolling through all the innuendo and exaggerations surrounding [Hillary’s] email and foundation scandals, and the worst thing you can say is: They both look bad, but the harder you look, the less you actually find,” continued Oliver. “There’s not nothing there; what is there is irritating rather than grossly nefarious. And this is where it’s instructive to compare her to her opponent: Donald Trump, America’s wealthiest hemorrhoid.”
Oliver added: “He’s quantifiably worse.”
First, as far as honesty goes, Oliver cited PolitiFact, which found that 13 percent of Hillary’s statements were flatly false throughout the course of the campaign, compared to 53 percent of Trump’s. Then there’s the issue of Trump’s taxes, which unlike his opponent, he has thus far refused to release—an unprecedented move among recent POTUS candidates.
“Bear in mind: We know nothing about Trump’s finances, and that is not good. He’s the first major party nominee since 1980 not to release his tax returns, and his justification is pathetic,” said Oliver, referencing Trump’s lame excuse that he can’t release his returns because they’re currently under audit (the IRS has explicitly said he still can release them).
“On top of Trump’s personal tax records, there are unanswered questions about his business dealings,” added Oliver. “As many experts have pointed out, his investments, debts, and business ties span the globe and could present unprecedented ethical challenges for a president.”
First, Trump has claimed that he wouldn’t place his financial holdings in a “blind trust”—instead stating time and again that his various companies would be run by his children, whom he’d undoubtedly have regular contact and communication with.
Then there is the matter of the Trump Foundation. “If the financial actions of the Clinton Foundation annoy you, let me introduce you to the Trump Foundation,” cracked Oliver.
The Washington Post’s investigations have found, among other things, that: Trump has not given any of his personal money to the foundation since 2008; that the foundation spent a quarter of a million dollars in donor money to settle lawsuits against Trump businesses; and that Trump used foundation money to purchase ridiculous items for himself—like $10,000 at a charity auction in 2014 for a Trump portrait painting (the second time he’d used charity funds to purchase a portrait of himself), as well as $12,000 for a signed Tim Tebow helmet. Trump’s foundation also donated $25,000 to Florida AG Pam Bondi around the time she was considering investigating Trump University.
“The thing is, we have barely scratched the surface of [Trump’s] scandals,” said Oliver, running out of time. “There is everything, from the ongoing lawsuits against that bullshit university, to the alleged use of undocumented workers when building Trump Tower, to the fact that he received an illegal $3.5 million loan from his father in the form of a purchase of chips from one of Trump’s casinos.”
“The point is, this campaign has been dominated by scandals, but it is dangerous to think there is an equal number on both sides,” he concluded. “You can be irritated by some of Hillary’s—that is understandable—but you should then be fucking outraged by Trump’s…He is ethically compromised to an almost unprecedented degree.”
The Last Week Tonight host ridicules Trump’s recent performances and concocts a plan to get the Republican candidate to concede
Benjamin Lee
The Guardian
24 October 2016
John Oliver took aim at Donald Trump’s failed Hillary Clinton jokes at this week’s Al Smith dinner in his HBO show on Sunday night.
On Last Week Tonight with John Oliver, the comedian ridiculed the Republican candidate’s much-criticized performance at the charity dinner, questioning just why he would bomb so badly at what should have been a perfectly suited event.
“This wasn’t a town hall or a debate,” he said. “This was a $3,000-a-plate fundraising gala at a moth-eaten Manhattan hotel, organized by the Catholic church, a real estate-owning, male-dominated, sex-scandal plagued organization.”
He went on: “You’re treating a benefit for needy children like open mic night at Rascal McBigot’s, Long Island’s fourth-best alt-right comedy club.”
Oliver also believed that the reason Trump did so poorly was that the dinner required people to have “a healthy share of self-deprecation” but Trump was “almost pathologically unable to acknowledge any flaw or fault”.
He then went back to criticize Trump’s demeanor at last week’s final debate, showing a clip of Clinton’s Emmy joke and how much it seemed to annoy him.
“Of course he wants an Emmy,”Oliver said. “It’s a woman, it’s gold and it’s proportionate to his tiny hands. It’s basically Trump’s ideal mate.”
Finally, he talked about Trump’s seeming inability to accept the possibility of a Clinton victory. Oliver hatched a plan to make Trump happy: if he loses, he’ll still be able to claim that he won something.
“Let’s bet on the outcome of this election,” he said. “I will take the side that you win. You take the side that you lose. That way, if you lose, you still win.”
The prize for Trump would be an Emmy, something Oliver has many of. “She’s so small and so silent,” he said. “You don’t even have to take her furniture shopping.”
• This article was amended on 25 October 2016. An earlier version said Oliver had described the Catholic church as a “sexist, scandal-plagued organization”. That has been corrected to “sex-scandal plagued organization”.
Last Week Tonight host John Oliver once found love in the unlikeliest of places: the Republican National Convention.
Amy Zimmerman
The Daily Beast
07.18.16
With a xenophobic Cheeto calling the shots, this year’s RNC is fated to be the most stripper-tastic, soul-crushing convention yet. But before Trump touches down in Sodom and Gomorrah aka Cleveland, let’s journey back to a more innocent time and place: St. Paul, Minnesota, 2008. John McCain was at the helm of the GOP, amateur geographer Sarah Palin was his first mate, and love was in the air.
At the time, comedian John Oliver was two years into his gig as Senior British Correspondent for The Daily Show with Jon Stewart. As a covert operative for the liberal elite, Oliver was working behind enemy lines at the RNC. When convention security chased after him for entering into a restricted area Oliver, who was still on a temporary work visa, found himself at risk for potential deportation. Attempting to avoid arrest and subsequent Breturn, the reporter and his camera crew happened upon a group of veterans who offered to help them hide. In a meet-cute befitting a beloved political satirist, one of those veterans was Oliver’s future wife—U.S. Army combat medic Kate Norley. After exchanging emails (aww, 2008) Oliver and Norley struck up a friendship; in 2010, the bespectacled Brit proposed in St. Thomas, and the couple tied the knot one year later.
Norley, who Oliver describes as “Very American with a capital A,” is already a fan hero for (permanently!) saving her celebrity husband from deportation, but she’s also a straight-up American hero. At age 19, Norley enlisted in the military after the 9/11 attacks, serving as a combat medic in Fallujah and a mental health specialist in Ramadi, providing counsel to returning soldiers. In addition to being the only female combat-stress specialist, she was awarded the Combat Medic badge for providing medical care while under fire. Stateside, she worked as a veteran’s rights advocate for Vets for Freedom; the organization, which was founded in 2006, advocated on behalf of victory in the War on Terror, and promoted like-minded politicians.
To say that Norley keeps Oliver grounded seems like an understatement. In classic self-effacing style, Oliver explained, “It’s the most emasculating thing I could possibly do to go out with someone who has actually done something valuable with their life.” Long-term emasculation aside, Norley’s combat experience gives the comedian some much-needed perspective: “I can’t come home and say I had a really tough day at work today and see her roll her eyes and go, ‘Really?’ And she would be like, ‘I can’t imagine how difficult it was for you. You clown!’ Rightly, I have no place to whine about anything. That’s the problem with living with someone who has fought a war. You lose the moral high ground.”
When Oliver was offered his current gig hosting his own show, Last Week Tonight with John Oliver, at HBO, his Daily Show departure was huge entertainment news. But as Oliver tells it, Norley knew just how to keep him humble. As the comedian was making a career-defining move, his wife was on emergency deployment in the Philippines as a first responder to Typhoon Haiyan. “I got to speak to her once on this spotty satellite phone,” he recalls, “and she’s saying, ‘We had to do emergency C-sections and amputations and there are dead bodies everywhere, it’s worse than people are letting on, it’s just death, death, everywhere.’ And there’s no point at which you can go, ‘I’ve got some news as well!’ It just doesn’t matter.”
Oliver distinguishes himself from the late night pack with his British accent, across-the-pond intellectualism, and genuine outsider’s confusion. But after eight years with a proud vet, Oliver has proven himself to be quite the patriot. After his 2013 break with The Daily Show was finalized, John and Kate headed to Afghanistan as part of the USO Tour. The unconventional second honeymoon found the Oliver’s sleeping in the barracks, eating with the troops, and performing at more than half a dozen forward operating bases.
Last Week Tonight viewers might be surprised to learn that Oliver’s wife is a Republican—let alone a Republican who’s advocated on behalf of GOP politicians on Fox News. The unabashedly liberal HBO show has been credited with real change, otherwise known as the “John Oliver effect.” Oliver’s ability to synthesize and sensationalize under-reported topics into viral videos has led to political victories for causes ranging from unfair bail requirements to FCC regulations. And while Oliver is an equal opportunity satirist, his popular “Make Donald Drumpf Again” campaign suggests that He’s with Her.
In an increasingly polarized political climate, it’s rare and refreshing to see bipartisan cooperation—let alone wedlock. And while Oliver hasn’t publicly commented on any political squabbles at home, he’s unequivocally supportive of his wife and her veteran activism: “Once you’ve bled for America, you definitely get to say you’re an American in a slightly louder tone of voice.”
Despite the time off, Last Week Tonight host John Oliver has had a busy few months. He and his wife, Kate Norley, recently welcomed their first child into the world in November. And both have taken to parental duties, as the two are certainly a caring couple. Oliver has shown his compassion for others in his more vibrant Last Week Tonight segments, and, well, Norley’s kindness runs even deeper as an Iraq War veteran, veterans advocate, and all around awesome human being. It’s quite likely that Kate Norley is even more badass than John Oliver.
Her background is amazing, and her upbringing is simply unbelievable. The child of affluent parents, Norley has made it explicitly clear that money has never made for an easy, lazy life for her. She’s previously described her mother as being incredibly altruistic and committed to volunteering and has similarly taken to acts of kindness, such as her efforts with Project Rubicon, a nonprofit dedicated to providing disaster relief in some of the most dangerous, underserved areas in the world.
When Norley was just 16, a reckless driver collided with her while she was riding her bike. She subsequently suffered severe head trauma and was forced to relearn vital language components, including reading and writing. Norley somehow was able to use the devastating injury to motivate her altruistic efforts and dedication to serving, marveling that « the Army has given me a chance to do things I never dreamed I was capable of doing. » Here are just some of the many ways she’s excelled and seriously outshined Oliver.
She’s An Iraqi War Veteran
Norley enlisted shortly after the Sept. 11 attacks. She felt compelled to serve, she told Stars and Stripes, and soon found herself in a role with the 1st Cavalry Division’s 15th Forward Support Battalion in Baghdad working as a 91 X, or mental health specialist. The veteran spent a majority of her deployment helping her fellow soldiers suffering from combat fatigue.
She’s Also A Veterans Advocate
Norley’s advocacy position with Vets for Freedom is what led her to meet her husband. The two crossed paths at the 2008 Republican National Convention in St. Paul, Minnesota. Norley and her group helped hide Oliver and his crew when the then Daily Show correspondent saw security approaching. Realizing his work visa would put him in a precarious position and that he was in a restricted area, Oliver desperately sought help. Vets for Freedom came to their rescue, he and Norley began a correspondence, and were married three years later.
Her Heroic Efforts Include Helping Iraqi Citizens
Some of Norley’s most fulfilling moments while deployed were spent helping locals near Camp Blackjack in Baghdad, she’s said. It’s near the 1st Cavalry Division base that squatters and the underserved gather and where Norley spent her scant free time tending to Iraqi children.
She’s Part Of Team RubiconTeam Rubicon works to send veterans and qualified civilians with first responder skills to disaster sites and at-risk areas to perform relief efforts ranging from medical care to infrastructure repair. Given her background, it’s no wonder that Norley would take to the noble nonprofit’s cause and work with them.
She’s A Proud Half-Marathon Participant
… And not just any half-marathon: the 2014 New York City Half-Marathon, which benefits the low-income homeowner advocacy nonprofit Rebuilding Together. In addition to successfully raising more than $1,000 and competing in the marathon, Norley was also able to participate in volunteer opportunities with Rebuilding Together as part of their Race2Rebuild initiative with the NYC Marathon and Half-Marathon.
Her Dream Is To Start A Women-Led Nonprofit
Outside of the armed forces, the veteran is reportedly looking to help even more women living in underserved areas through female empowerment. Norley’s ultimate dream is « to send American women to the Third World so other women can see what it’s like to have rights and power, » she said in a moving profile that appeared in Stars and Stripes.
Her Husband Is In Awe Of Her
Oliver has spoken repeatedly about how inspiring his wife is and how much the work she’s doing means to him. The Last Week Tonight host has stated that having a veteran spouse has changed his very idea of what it means to be an American and made him that much more appreciative of her current role as a veterans advocate. « When you’ve married someone who’s been at war, there is nothing you can do that compares to that level of selflessness and bravery, » Oliver stated in a late night appearance.
‘Daily Show’ Correspondent Talks About Comedy and His Dream Job
Jillian A. Berry
Tech/MIT
April 25, 2008
Ever since Briton John Oliver appeared as a correspondent on The Daily Show, I’ve wanted to see more of his work, and have hoped to some day be able to talk to him. Thanks to a Comedy Central special, I got to do both this past week. On Sunday, Mr. Oliver starred in his own one-hour stand-up special, “Terrifying Times,” in which he discussed the scariness that is world politics. Instead of crude humor, Mr. Oliver made intelligent observations about serious situations put in a comedic light. A few days before “Terrifying Times” aired, I was able to talk to Mr. Oliver by phone about his transition into comedy, his work on The Daily Show, and his new comedy special. Below is an excerpt.
The Tech: You went to Cambridge University. What was your major there and how did you go from Cambridge to comedy?
John Oliver: I did English there, which was easy because I’m already English. So I was bound to be good at it. And there’s quite a famous comedy troupe there called the Footlights, which gave birth to Peter Cook and Monty Python and many, many other people. I was involved in that, so I started doing comedy there at Cambridge writing.
TT: You mentioned in the special that comedians don’t choose comedy until all the career dreams of their parents are in the gutter. Did you choose comedy before your parents’ dreams for you died?
JO: What, were smashed? No, I think my dad probably realized that his dream for me was dying early. He desperately wanted me to become a football player. But I think it became pretty clear that I didn’t have the physical attributes for that … I guess by the time I got to university they had probably pretty much given up. I was putting all my eggs in one very shaky basket. And I think they knew I was going to do something stupid, like try a career in comedy.
TT: And how did you transition from comedy to The Daily Show?
JO: Well, I was writing and doing stand-up in London. And I’m not entirely sure how they heard of what I was doing over there … It’s the kind of thing you don’t want to ask too many questions about. I was flown over to meet them and I was offered a job on the spot. It was my favorite show before I came here — I’d never been to America before I came here to work here. It happened fast. I can’t really explain it now.
TT: When you were doing comedy in England, did you always do political humor?
JO: Maybe not, I guess, when I started off. But as I got better at writing, I started writing about what I cared about more, and I’ve always been interested in politics.
TT: Did your work include American political humor, or was it more focused on English politics?
JO: People in Europe and I guess around the world know more about American politics than Americans think they do. We have to because what happens here impacts our lives very directly, especially in Britain with our special, special relationship. And don’t think we’re not grateful for that every morning as well. So, yeah, it very much touched on American policies because America runs the world in the way that we used to.
TT: Do you have any vices?
JO: Vices! Not really. I don’t really drink. I don’t smoke. I’m emotionally repressed as any good British person is. So, I don’t know. I like sport. I really like sport, and I could watch sport all day, everyday, and in fact, can get pretty close to that … I’m about as far from [John] Belushi that you can be without becoming a Mormon.
TT: What is it like being a Daily Show correspondent?
JO: It’s great. It’s kind of my dream job, really. I guess my experience is slightly different because I’m a writer on the show as well. I come in at 9:00 every morning and we start the writing meetings. So then, if I’m on the show, I’ll be writing something for that. If I’m not, I’ll be writing something for somebody else.
TT: How are the correspondents chosen for each piece? Is there competition?
JO: No, not competition. Usually we kind of decide as we’re coming up with the bit; usually it’s pretty obvious who would be the best for it, then we’ll write for that person.
TT: Have you been surprised by your success on the show, and now having your own special?
JO: Yeah, of course. I mean, when I first moved over here, my manager in England advised me not to sign a lease or rent longer than a month because he reckoned I’d be fired within three weeks. So to be honest, anything from there became a surprise because my expectations were so low … I’ve been absolutely amazed by how it’s all gone, and I couldn’t be happier. I was fully expecting to be fired due to lack of talent and be back in England by now, by a long stretch.
TT: What are the biggest things that have surprised you about America and working on The Daily Show?
JO: The food in America has different flavors than I’m used to. I’m used to one flavor in food, and that flavor is nothing. So having anything more than that has been a great surprise. And in terms of working on The Daily Show, it’s just quite strange the kind of guests you end up meeting. I met [Pervez] Musharraf, the current prime minister of Pakistan. It’s very strange on days like that. None of us can understand why he’s here. That’s true of all the candidates when they come on. You feel it’s just a cable comedy show. We work in a small office above a small studio and we just try to make each other laugh all day. And then all of a sudden someone running for leader of the free world will show up to do a five minute bit. It’s very strange. We tend to be quite an enclosed community on this show, so it’s hard to — we tend not to think about the wider implications of what we’re doing at all.
TT: I hate to go back to the less political part of your answer, but what’s your favorite food?
JO: I like Indian food a lot because I come from England and the food we eat more than anything else is Indian food.
TT: Do you feel like Indian food is one of the better results of English imperialism?
JO: Definitely. We got some great trophies from our empire. Indian food, that was good. We also got carpets, and pretty much everything inside the British Museum was stolen. It’s basically like a warehouse for gangsters, the British Museum … There’s nothing in there that we genuinely legally own, other than perhaps the Magna Carta.
TT: In the special, you talk about being fascinated by an inflatable barbeque in a mall. Do you like to visit malls?
JO: No. I very much do not like visiting malls because they sap my will to live.
TT: Finally, where do you see yourself in five years?
JO: I’d like to still be here. I get asked that a lot by journalists, I guess because what other people have gone on to do — like [Steve] Carell or [Stephen] Colbert, and I guess [Ed] Helms now. If I was doing anything else in America, I would be trying to get on this show. So now I’m just trying not to get fired. I just don’t want to leave, so I’ll very happily be here in five years.
En quelques mois, le show Last Week Tonight, cousin américain du Petit Journal de Canal+, a bouleversé les codes de l’infotainment. Retour sur un parcours sans faute.
LA NOUVELLE STAR US
HBO a trouvé sa nouvelle star, et l’Amérique, un cousin d’une élégance rare au Petit Journal de Canal+. Début février a ainsi démarré la deuxième saison du Last Week Tonight, un « late show » né au printemps 2014 et mené par John Oliver. Comment ce « lunetteux » bien peigné à l’accent savoureusement britannique est-il devenu en quelques mois la coqueluche des médias, des téléspectateurs et des internautes (ses émissions dépassent régulièrement les 3 millions de vues sur YouTube)?
MERCI RICKY GERVAIS
Il a fallu tout le flair du comique anglais Ricky Gervais qui, en 2006, conseille à Jon Stewart, le pape de l’infotainment américain depuis 1999 avec son Daily Show (Yann Barthès lui rend un discret hommage en reproduisant chaque soir certaines de ses mimiques), de le recevoir pour un casting. Gervais ne le connaît pas, mais il l’a entendu car à l’époque, John Oliver tente de percer dans les médias britanniques en animant des chroniques de satire politique. Oliver débarque donc en Amérique pour incarner le « correspondant britannique senior » du Daily Show. La collaboration est si fructueuse que Jon Stewart décide de se faire remplacer par Oliver quelques semaines lorsqu’il part réaliser un film en 2013. L’enjeu est de taille : l’émission est l’une des plus influentes, dit-on, auprès des jeunes décideurs américains. Oliver livre une prestation d’une telle qualité qu’HBO lui propose aussitôt son propre show, avec toute la liberté qu’offre cette chaîne payante affranchie de la pub.
LE MARATHON DU TALK
C’est ainsi que démarre Last Week Tonight, où Oliver a d’étonnantes audaces: parler plus de quinze minutes sans interruption face caméra, aborder des sujets techniques (le lobbying des télécoms, la Cour suprême) ou controversés (les médicaments, le tabac). « Il n’a pas les défauts d’autres animateurs satiriques, estime Jean Lesieur, cofondateur de France 24 et grand observateur des médias US. Il ne donne jamais l’impression qu’il méprise son public ou les gens dont il parle. Son humour n’est pas cynique, et ses sujets semblent magnifiquement enquêtés. » John Oliver possède la distance nécessaire (un Anglais en Amérique) pour faire marrer, et en plus, il informe, sensibilise, et parvient même à déclencher l’engagement de ses téléspectateurs pour des combats politiques. A l’heure où l’on accuse de plus en plus l’infotainment de promouvoir des opinions (voire des mensonges) sous couvert d’humour, John Oliver aurait-il inventé la formule parfaite ?
LE SCAN TÉLÉ / VIDÉOS – La notoriété du programme de Yann Barthès dépasse nos frontières. Pour illustrer la chute de la chanteuse, l’animateur John Oliver a diffusé un extrait de l’émission de Canal+.
Après les attentats, le coup de gueule de John Oliver, animateur anglais qui officie dans un late-show américain sur HBO, a fait le tour du web et a fait du bien à la France. Il y insultait allègrement les terroristes et montrait un soutien franc et cocasse à la France.
D’ailleurs, lors de son émission spéciale, Le Petit Journal avait salué l’intervention de John Oliver en diffusant un extrait de son monologue incisif, parmi les nombreux hommages rendus à Paris.
Coïncidence amusante et sympathique clin d’œil, le week-end dernier, c’est John Oliver qui a, à son tour, diffusé un extrait du Petit Journal. Le but étant de… se moquer de la chute de la chanteuse Shy’M qui a fait rire la France (ou au moins une bonne grosse partie des internautes), la semaine dernière. En montrant le saut raté de l’artiste (et le fait que personne dans le public ne l’ait rattrapée), John Oliver a souligné: «Ça, c’est le Paris qu’on connaît et qu’on aime!». Et l’animateur a même diffusé l’extrait des comédiens Eric et Quentin qui se sont moqués de cette chute avec des riverains parisiens, provoquant le fou rire ces derniers. En clôturant, Oliver a précisé qu’il s’agissait «là du meilleur signe que la France irait mieux [après les attentats]».
Conclusions:
1. La chute de Shy’M fait rire le monde entier.
2. Le Petit Journal est devenu bon au point d’être (souvent) cité, même à l’étranger.
3. C’est bien joli de se faire des clins d’œil par émission interposée, mais à quand la rencontre Yann Barthès / John Oliver?
J’invite tous ceux qui pensent lire ici une biographie de John Oliver, homme politique canadien né le 31 juillet 1856 à passer leur chemin, car cet article a pour sujet son non moins célèbre homonyme (John Oliver était sûrement célèbre aux yeux des paysans de la Colombie-Britannique au XIXe siècle) John William Oliver, comédien britannique originaire de Birmingham!
Le vrai John Oliver (pas le canadien mort au XIXe siècle)
Ceux qui me lisent sont donc déjà perdus et se demandent « mais qui est donc ce « je » qui nous harangue à coup de John Oliver? Déjà il ne peut y avoir qu’un John, notre Johnny national (je parle ici de l’homme primé aux Oscars pour son rôle dans Optic 2000 mon amour) et ensuite que peut m’apporter cet énergumène qui ressemble drôlement à Harry Potter? »
Pour des raisons de sécurité nationale, mon identité doit rester secrète, mais sachez qu’il m’arrive d’errer dans les couloirs de Louise Michel à mes heures perdues, afin de dispenser le peu de savoir dont je dispose. En réalité tout cela est beaucoup moins sexy que ça en a l’air. J’effectue ici un Service Civique (Allons enfants de la patriiiiie) dans le cadre d’une mission d’alphabétisation et d’aide aux devoirs.
En ce qui concerne ce cher John, je vous assure qu’il peut vous apporter beaucoup. Certes, il vit de l’autre coté de l’Atlantique. Certes, il s’exprime dans la langue de la Perfide Albion et tout le monde ne peut donc le suivre. Mais croyez-moi, ce brun ténébreux à lunettes (je m’emporte) constitue à lui seul une révolution dans l’univers des Late Show américains.
Mon totem
Ma première rencontre avec John date de l’époque où il travaillait encore au Daily Show with Jon Stewart, le grand satiriste de la vie politique américaine du XXIe siècle, le fabuleux Jon Stewart, celui que les Américains veulent voir comme modérateur du débat de la présidentielle de 2016 (autant dire que David Pujadas à côté c’est Popeye dans les Bronzés), un Mark Twain des temps modernes et mentor de John Oliver. Le Daily Show est donc un vrai-faux journal télévisé (un modèle dont s’est inspiré le Petit Journal de Yann Barthès) mais dont la volonté était de réellement informer ses téléspectateurs, notamment en dénonçant les excès (et stupidités) des médias américains (comme la chaîne d’information Fox News)
Un peu de bon sens dans ce monde de brutes
Informer donc, mais en s’amusant, contrairement à ce que pourraient faire de « vrais » journalistes. Et c’est dans cette verve que s’inscrit la démarche de Last Week Tonight, l’émission animée par John Oliver depuis 2014 sur la chaîne câblée HBO (vous savez, cette petite PME connue pour avoir produit une série sur les dragons et l’inceste).
Le décor est planté, le personnage peut monter sur scène et vous déclamer son texte. Car arrivés à ce stade de l’article (si vous n’avez pas renoncé entre-temps) vous vous dites sûrement : « c’est bien joli toute cette histoire de la satire politique aux Etats-Unis, mais de quoi parle Emmett Brickowoski? ».
De tout mes chers amis. De tout. John Oliver n’a pas peur d’aborder des thèmes polémiques qui divisent fortement la société américaine comme l’avortement ou la peine de mort. Et si ses vidéos culminent à plus de huit millions de vues sur Youtube en moyenne ce n’est pas par hasard. Plutôt que d’aborder rapidement le sujet, John et l’équipe de Last Week Tonight ont fait le choix de consacrer une vingtaine de minutes environ à un sujet précis, sur lequel ils enquêtent (comme de véritables journalistes) et qu’ils présentent de façon claire et argumentée.
Et si cela peut paraître rasoir de prime abord, n’oubliez pas ce que je vous ai dit plus tôt! La démarche d’Oliver s’inscrit dans un héritage, celui de la satire politique. Traduction : c’est terriblement drôle. La grande force du Britannique est de se présenter comme un comédien (c’est son métier après tout) et non pas un journaliste d’investigation. Il cherche à illustrer les absurdités d’une société où chacun cherche à imposer son point de vue de façon plus ou moins violente, et choisit comme arme l’humour. L’effet est garanti.
Par exemple si je vous parle de la neutralité du net, je parie que se réveille en vous une envie de fuir très loin. Au moins à Troyes. Et de rester cacher là-bas. Ou comme le dit John « je préférerais lire un livre de Thomas Friedman plutôt que d’en entendre parler, je préférerais m’asseoir avec ma nièce et regarder Caillou, un dessin animé sur la vie d’un enfant canadien chauve à qui il n’arrive absolument rien. »
Mais comme il le signale par la suite, « la neutralité sur le net est un enjeu très important. Concrètement, cela signifie que toutes les données sont traitées de façon égale, peu importe qui les créent. C’est pourquoi le monde d’internet est un grand terrain de jeu et c’est comme cela que des start-ups ont pu devancer des grandes marques de l’establishment. C’est comme cela que Facebook a supplanté MySpace, qui avait supplanté Friendster qui avait déjà supplanté le fait d’avoir des amis. Vous vous souvenez de l’amitié avec de vraies personnes en face de vous? C’était atroce, vous ne pouviez pas taper sur la tête des gens pour les faire partir ».
Un sujet de société en somme très sérieux et qui nous concerne tous (vous êtes actuellement sur internet) et qui paraitrait vraiment ennuyeux à n’importe qui s’il n’était pas traité sur le ton de l’humour. Or l’impact d’Oliver est réel, puisqu’il lance un appel aux trolls d’internet à la fin de cette vidéo, les exhortant à délivrer leur haine sur le site de la FFC, et cela fonctionne : le site a connu un bug monumental.
Petit message d’amour à la FFC « Ooops il semble que vous ayez crashé le site de la FFC, j’espère que vous êtes fiers de vous »
Pouvez-vous imaginer une émission de divertissement partir en guerre contre le CSA au nom de la liberté sur internet? Et tout cela en réussissant à vous faire rire et à vous faire découvrir Caillou (comment ne pas succomber au charme de ce crâne chauve)? Et à ceux qui me rétorquent que cette émission existe déjà en France et qu’elle est diffusée à partir de 20h10 sur Canal + du lundi au vendredi je répondrai un « gnnnn ce n’est pas tout à fait la même chose ».
L’impertinence d’Oliver diffère à mon sens de celle d’un Yann Barthès par exemple, en ce qu’elle ne s’attaque pas qu’aux dérapages de représentants politiques ou de la vie civile, mais en ce qu’elle oblige la société américaine à affronter ses contradictions (aussi diverses soient-elles) et son hypocrisie manifeste. Y compris l’hypocrisie de l’axe politique que défend Oliver, celui des libéraux (qui correspondrait à la gauche en France). Ce que n’arrive pas à faire (ou ne souhaite pas?) le Petit Journal, précisément parce qu’exceptés les sketchs d’Eric et Quentin ou d’Alex Lutz et Bruno Sanchez, la rédaction est composée de journalistes, là où l’équipe d’Oliver s’appuie sur des auteurs et comédiens. Or, cette liberté de ton propre à l’exercice de la satire me parait plus efficace pour dénoncer les excès et dérapage d’une société.
Je côtoie cet humoriste depuis quelques années maintenant et mon avis ne peut être parfaitement objectif à son sujet (je rappelle que j’ai un badge sur mon effigie sur mon sac à dos. Hello à tous les stalkeurs) mais je ne pense pas être la seule personne sensible à l’impertinence de John Oliver et à ce qu’il a pu (peut et pourra) apporter au paysage politique américain (et mondial!) dans son exercice critique. Mon ultime conseil sera donc de vous inviter fortement à aller voir ses vidéos sur YouTube (il suffit de taper Last Week Tonight dans le moteur de recherche et c’est la première chaîne qui s’affiche) d’abord pour rire et ensuite pour vous souvenir que les démocraties que nous défendons à cors et à cris ne sont pas exemptes de défauts substantiels. Le rire cristallin (et ironique) de ce cher Britannique peut constituer une piqûre de rappel…
Les deux journaux de référence, par la voix de leurs éditorialistes, soulignent l’aveuglement des journalistes, y compris de leur rédaction, face aux sondages tout-puissants. Et plus largement, l’incapacité de la presse à prendre le pouls du pays.
« Pour le dire crûment, les médias sont passés à côté.» A l’heure où les Etats-Unis se sont endormis avec l’image de Donald Trump, leur nouveau Président, le constat de Margaret Sullivan, éditorialiste au Washington Post, est sans détour. Et sonne clairement comme un aveu d’échec, naissant, d’une partie de la presse américaine.
Le New York Times, autre grand quotidien de référence sur la côte Est – et qui s’était engagé comme son homologue de Washington en faveur d’Hillary Clinton –, exprime, quelques heures après la victoire de Trump, un sentiment similaire, par la voix de Jim Ruthenberg, le médiateur du journal, dans un article en forme de mea culpa. « Les médias d’informations ont échoué dans les grandes largeurs à comprendre ce qui était en train de se passer », déplore à chaud le journaliste.
On ne peut s’empêcher de penser que Sullivan, comme Ruthenberg, expriment une partie de l’auto-critique probablement à l’oeuvre – ou à venir – dans les rédactions américaines, qui avaient annoncé ces dernières semaines l’élection confortable d’Hillary Clinton, en dépit de signaux contraires et sur la foi de sondages érigés en majesté.
Au-delà de la confiance aveugle et excessive accordée à ces enquêtes d’opinions, les deux éditorialistes pointent du doigt l’incapacité des journalistes à prendre eux-mêmes le pouls du pays. « Ils ont échoué à capter la colère d’une large part de l’électorat américain, qui se sent mis de côté, (…) et ignoré par les élites de Washington, Wall Street et des médias de masse », analyse Ruthenberg.
Sullivan, elle, met en cause la sociologie même de la classe journalistique, comme un élément structurant de l’éloignement vis-à-vis de la réalité du terrain, et du peuple américain. « Les journalistes – diplômés, urbains, et pour une bonne part, libéraux [adjectif qui aux Etats-Unis désigne les partisans d’un état plutôt interventionniste, NDLR], sont encore susceptibles de vivre et travailler dans des villes comme New York, Washington ou sur la côté Ouest. Et bien que nous nous soyons tous rendus dans les Etats les plus favorables aux Républicains, ou que nous ayons interviewé des mineurs ou des chômeurs de l’industrie automobile dans la Rust Belt, la région ouvrière du Nord-Ouest des Etats-Unis, nous ne les avons pas pris au sérieux. Ou pas suffisamment.»
Et l’éditorialiste du Washington Post de citer les paroles récentes de Peter Thiel, le milliardaire qui a entraîné la faillite du défunt site Gawker. « Les médias ne prennent jamais Trump au sérieux, mais pourtant toujours au pied de la lettre.» Tandis que les électeurs américains, eux, sont allés au-delà de ses formules provocatrices : quand Trump promet la construction d’un mur à la frontière avec le Mexique, ils comprennent surtout qu’il s’empare de la question de l’immigration dans le pays.
« Trump – qui a qualifié les journalistes de déchets et corrompus – nous a tellement détourné de l’essentiel que nous n’étions pas capables de voir ce qui était pourtant sous nous yeux », conclut Sullivan. Une thèse que développait déjà en juin dernier Jack Shafer, journaliste à Politico, dans un article intitulé « Avons-nous créé Trump ? » , où il expliquait que ce dernier était certes un populiste, mais aussi un redoutable manipulateur des médias de masse. Il y citait notamment une réflexion du désormais président, prononcée en 1987 : « Si vous êtes un peu différent, ou choquant… La presse parlera de vous ».
All the dazzling technology, the big data and the sophisticated modeling that American newsrooms bring to the fundamentally human endeavor of presidential politics could not save American journalism from yet again being behind the story, behind the rest of the country.
The news media by and large missed what was happening all around it, and it was the story of a lifetime. The numbers weren’t just a poor guide for election night — they were an off-ramp away from what was actually happening.
No one predicted a night like this — that Donald J. Trump would pull off a stunning upset over Hillary Clinton and win the presidency.
The misfire on Tuesday night was about a lot more than a failure in polling. It was a failure to capture the boiling anger of a large portion of the American electorate that feels left behind by a selective recovery, betrayed by trade deals that they see as threats to their jobs and disrespected by establishment Washington, Wall Street and the mainstream media.
Journalists didn’t question the polling data when it confirmed their gut feeling that Mr. Trump could never in a million years pull it off. They portrayed Trump supporters who still believed he had a shot as being out of touch with reality. In the end, it was the other way around.
It was just a few months ago that so much of the European media failed to foresee the vote in Britain to leave the European Union. Election 2016, thy name is Brexit.
Election Day had been preceded by more than a month of declarations that the race was close but essentially over. And that assessment held even after the late-October news that the Federal Bureau of Investigation was reviewing a new batch of emails related to Mrs. Clinton’s private server.
Mrs. Clinton’s victory would be “substantial but not overwhelming,” The Huffington Post had reported, after assuring its readers that “she’s got this.” That more or less comported with The New York Times’s Upshot projection early Tuesday evening that Mrs. Clinton was an 84 percent favorite to win the presidency.
Then came a profound shift, as mainstream media organizations scrambled to catch the bus that had just run them over. By 10:30 p.m., the Upshot projection had switched around, remarkably, to 93 percent in favor of Mr. Trump.
Other major sites also flipped from a likely Clinton victory to a likely Trump victory. John King of CNN proclaimed to his huge election night audience that during the previous couple of weeks, “We were not having a reality-based conversation” given the map he had before him, showing Mr. Trump with a clear opportunity to reach the White House.
That was an extraordinary admission; if the news media failed to present a reality-based political scenario, then it failed in performing its most fundamental function.
The unexpected turn in the election tallies immediately raised questions about the value of modern polling: Can it accurately capture public opinion when so many people are now so hard to reach on their unlisted cellphones?
“I think the polling was a mess,” Stanley Greenberg, a Democratic pollster, told me Tuesday night. “But I think a lot of it was interpretation of the polls.”
Mike Murphy, a Republican strategist, said on MSNBC, “My crystal ball has been shattered into atoms’’ because he predicted the opposite outcome. “Tonight data died,’’ he added.
Regardless of the outcome, it was clear that the polls, and the projections, had underestimated the strength of Mr. Trump’s vote, and the movement he built, which has defied all predictions and expectations since he announced his candidacy last year.
And that’s why the problem that surfaced on Tuesday night was much bigger than polling. It was clear that something was fundamentally broken in journalism, which has been unable to keep up with the anti-establishment mood that is turning the world upside down.
Politics is not just about numbers; data can’t always capture the human condition that is the blood of American politics. And it is not the sole function of political reporting to tell you who will win or who will lose. But that question — the horse race — has too often shadowed everything else, and inevitably colors other reporting, too.
You have to wonder how different the coverage might have been had the polls, and the data crunching, not forecast an almost certain Clinton victory. Perhaps there would have been a deeper exploration of the forces that were propelling Mr. Trump toward victory, given that so much of his behavior would have torpedoed any candidate who came before him.
Maybe we’d know a lot more about how Mr. Trump’s plan to build a wall along the southern border would fare in Congress, or what his proposal to make it easier to sue journalists might actually look like. How about his plan to block people from countries with links to terrorism?
Then there was the drop in the global stock market on Tuesday night, which wasn’t just figures on a screen but wealth being erased. The expectations were out of whack, and Wall Street doesn’t do out-of-whack well.
What’s amazing is how many times the news media has missed the populist movements that have been rocking national politics since at least 2008. It failed to initially see the rise of the Tea Party, which led to the Republican wave of elections of 2010 and 2014, which was supposed to be the year the so-called Republican establishment regained control over its intraparty insurgency.
Then, of course, there was Mr. Trump’s own unexpected rise to the nomination. And after each failure came a vow to learn lessons, and not ever allow it to happen again. And yet the lessons did not come fast enough to get it right when it most mattered.
In an earlier column, I quoted the conservative writer Rod Dreher as saying that most journalists were blind to their own “bigotry against conservative religion, bigotry against rural folks, and bigotry against working class and poor white people.”
Whatever the election result, you’re going to hear a lot from news executives about how they need to send their reporters out into the heart of the country, to better understand its citizenry.
But that will miss something fundamental. Flyover country isn’t a place, it’s a state of mind — it’s in parts of Long Island and Queens, much of Staten Island, certain neighborhoods of Miami or even Chicago. And, yes, it largely — but hardly exclusively — pertains to working-class white people.
They think something is so wrong that all the fact-checking of Mr. Trump this year, the countless reports of his lies — which he uttered more than Mrs. Clinton did — and the vigorous investigation of his business and personal transgressions, bothered them far less than the perceived national ills Mr. Trump was pointing to and promising to fix.
In their view the government was broken, the economic system was broken, and, we heard so often, the news media was broken, too. Well, something surely is broken. It can be fixed, but let’s get to it once and for all.
Voir par ailleurs:
The Surprising Origin of the Phrase ‘Flyover Country’
Everyone knows where it is, especially in an election year. But the people who call the heartland « flyover country » aren’t who you think.
The meaning of « flyover country » is obvious. Its origin is a bit more mysterious.
The National Geographic
March 14, 2016
The term « flyover country » is often used to derisively refer to the vast swath of America that’s not near the Atlantic or Pacific coasts. It sounds like the ultimate putdown to describe places best seen at cruising altitude, the precincts where political and cultural sophisticates visit only when they need to.
But in fact, as a saying, flyover country isn’t quite the elitist insult we imagine. And it’s not even all that old.
The Oxford English Dictionary’s first citation for flyover country is from 1980, 59 years after “fly-over” was first used to describe an aircraft passing over a place, and about 30 years after the advent of nonstop transcontinental commercial flights. Thomas McGuane began an Esquire article about the landscape painter Russell Chatham with the line: “Because we live in flyover country, we try to figure out what is going on elsewhere by subscribing to magazines.”
Note the “we.” McGuane was born in Michigan and, like Chatham, lived in Montana. “This must have come from the time I worked in movies, an industry that seemed to acknowledge only two places, New York and Los Angeles,” McGuane says when asked how he came to the phrase. “I recall being annoyed that the places I loved in America were places that air travel allowed you to avoid.”
“It’s a stereotype of other people’s stereotypes,” lexicographer Ben Zimmer says. But it’s not as if the stereotypes are entirely imagined. Zimmer says the concept behind flyover country is present in older phrases, like middle America, “which has been used to talk about, geographically, the middle part of the U.S. since 1924, but then also has this idea of not only the geographic middle but the economic and social middle of the country as well, that kind of middle-ness that’s associated with the Midwest.” Another term for the same place, Zimmer notes, is heartland, which is “for people who want to valorize a particular social or political value.”
And the heartland gets a lot of attention when it has votes that can be won. Politicians across the spectrum paint this place as more real than the coasts. This year, Ted Cruz blasted fellow Republican presidential candidate Donald Trump’s “New York values.” And in 2008, vice presidential candidate Sarah Palin quoted columnist Westbrook Pegler’s heartland-boosting line “We grow good people in our small towns.” All this is a way of championing a set of values that is imagined to exist outside of big urban centers. It treats middle America like a time capsule from a simpler era, which, when you consider the Dust Bowl, the circumstances that led to the existence of Rust Belt, and the Civil Rights struggles before and after the Great Migration, never really existed for many people.
Romanticizing can also read as patronizing for people in the middle of the country.
“You know when you’re being ignored. You know when you’re being looked down on,” says journalist Sarah Kendzior, who grew up in Connecticut, but now lives in Missouri. Kendzior’s 2013 essay “The View From Flyover Country” details how easily outsiders overlook the nuances of the middle of the country. “It’s just ignored as a region unless it’s politically convenient. Unless something happens like a mass protest or a presidential primary, reporters don’t pay attention to it,” she says.
Hence the self-coining of flyover country—it’s a way for Midwesterners (and Southerners and people from the plains and mountains) to define themselves relative to the rest of the country. It’s defensive but self-deprecating, a way of shouting out for attention but also a means for identifying yourself by your home region’s lack of attention. It’s the linguistic nexus of Minnesota nice and Iowa stubborn. This self-identification has become a celebration. The country singer Jason Aldean angrily defended flyover states in a hit single, while indie singer Pokey LaFarge has reveled in his region’s slightly inconvenient time zone. (Both, perhaps, responses to the Talking Heads’ 1978 song “The Big Country,” which is—likely sarcastically—sung from the perspective of a person flying over the heartland.)
Aldean, LaFarge, Kendzior, and McGuane all come from different parts of the middle of the country, but they all belong to the same, self-identified place, a place rooted more in attitude than in soil. As a concept, flyover country can exist almost anywhere in the United States. As a phrase, it’s become almost a dare, a way for Midwesterners to cajole the coastal elites into paying attention to a place they might otherwise overlook. But it’s also a bond for Midwesterners—a way of forging an identity in a place they imagine being mocked for its lack of identity. It’s a response to an affront, real or imagined, and a way to say “Well, maybe we don’t think that much of you, either.
D’Hillary Clinton et de Donald Trump, lequel livre le plus de données incorrectes ? Quel traitement accordent les médias à la campagne présidentielle ? Qui finance qui ? Autant de questions auxquelles répondent les dix sites Internet ici sélectionnés.
Qui finance la campagne d’Hillary Clinton ? Donald Trump pourra-t-il vraiment fermer l’entrée des Etats-Unis aux musulmans ? Pourquoi est-il interdit de faire un selfie dans l’isoloir ? Si vous vous passionnez pour l’élection américaine mais ne savez où trouver les informations face aux dantesques flux qui nous assaillent tous les jours, voici dix sites innovants pour suivre et comprendre en temps réel le duel entre Hillary Clinton et Donald Trump.
Le statisticien Nate Silver, ancien blogueur du New York Times, est le roi du poker politique. Avec l’équipe de FiveThirtyEight, il analyse les tendances et les possibles aboutissants de l’élection à partir d’un seul et même matériau brut : les données. En croisant quotidiennement résultats passés, statistiques et sondages, le site s’engage directement sur le résultat de chacun des 50 Etats. En 2012, Silver avait correctement prédit l’issue du scrutin pour 49 d’entre eux, avant de faire un sans-faute à l’élection suivante. Cette année, c’est plus compliqué…
PolitiFact fait partie des pionniers du fact-checking en ligne, ce type de journalisme qui s’attache à vérifier les assertions des personnalités publiques. Lancé en 2007 par le quotidien Tampa Bay Times en Floride, son succès tient à sa simplicité et à son aspect ludique : un baromètre juge la véracité de chaque affirmation sur une échelle allant de « vrai » à « flagrant délit de mensonge ». Un classement permet ensuite de visualiser quelle personnalité lance le plus de contre-vérités (spoiler : il a un prénom de palmipède).
Indépendant et non partisan, Crowdpac cherche à « rendre la politique aux citoyens » en mettant en lumière l’apport financier des lobbies et des grosses industries aux candidats. Sa page « Money race » offre toutes les indications numéraires liées au financement des campagnes, aux donateurs et aux systèmes d’influence. De quoi donner envie de se présenter soi-même, ce qu’encourage Crowdpac via divers outils de participation à la vie politique américaine.
Cette section du grand quotidien américain a été créée en 2014 en préparation de l’élection présidentielle et en réaction au départ de son blogueur à succès Nate Silver, parti exporter ses statistiques sur son propre site (voir FiveThirtyEight). Porté par le puissant travail de data du New York Times, The Upshot n’est cependant pas une accumulation de graphiques et de pourcentages, l’expertise du journal permettant de tirer des chiffres, sélectionnés et éditorialisés, une analyse pour comprendre les tenants de la course à la Maison Blanche.
L’excellent site d’information et d’opinion fondé par Ezra Klein a réussi à bâtir une jeune audience grâce à un ton informel et à une approche explicative de ses sujets. Les vidéos pleines de malice de Vox poussent encore davantage le curseur de la pédagogie, servies par une réalisation sans faille. Les thèmes traités ont très peu en commun, mais lorsqu’ils touchent à la politique ou au sociétal, les vidéos offrent un brillant éclairage sur les Etats-Unis, leur histoire et les déchirements qui les traversent.
Réservé aux plus assidus, Ballotpedia est, comme le suggère son titre, le Wikipedia de l’élection. Y sont rassemblées toutes les informations liées aux candidats, aux thèmes de la campagne, aux scrutins, aux institutions ou aux Etats. La quantité de contenu encyclopédique rebute un peu, mais l’internaute cherchant une précision particulière ou voulant tout savoir sur tout peut commencer par là.
Infographies, gifs, visualisation de données, contenus tirés des réseaux sociaux : l’équipe de graphistes et de développeurs du quotidien économique s’en donne à cœur joie pour offrir la couverture data la plus visuelle et la plus ludique de l’élection américaine. La mise en scène des données – tout en diversité d’angles et en couleurs flashy – aide à avaler la complexité des informations apportées.
Les junkies des affaires publiques trouveront leur pain quotidien sur Real Clear Politics, agrégateur d’informations politiques et de sondages basé à Chicago. Très prisé des journalistes et des politiques eux-mêmes, le site rassemble les nouvelles études d’opinion liées à la campagne et une sélection éclectique d’articles tirés de publications aussi bien libérales que conservatrices et locales qu’internationales, proposant une revue de presse synthétique mais diversifée.
Le réseau américain public de télévision PBS a mis en place un programme en ligne destiné aux professeurs et à leurs étudiants pour comprendre le système politique du pays, parfois kafkaïen, et son processus électoral tout aussi abscons. Un ensemble d’outils éducatifs en vidéos, cartes ou graphiques pour comprendre, débattre… et améliorer son anglais.
La lorgnette par laquelle Election Tracker observe la campagne est médiatique. Il ne s’agit pas d’un site d’information mais d’une application créée par l’entreprise de gestion canadienne OpenText qui analyse en data la couverture de l’élection aux Etats-Unis. Temps de parole des candidats, mentions en une des journaux, sujets de prédilection, articles à charge ou à défense : tout est quantifié et comparé, offrant une cartographie du paysage médiatique américain et de son rapport à Clinton et Trump depuis le début de la campagne.
“This is the news of the millennium!” said the story on WorldPoliticus.com. Citing unnamed FBI sources, it claimed Hillary Clinton will be indicted in 2017 for crimes related to her email scandal.
“Your Prayers Have Been Answered,” declared the headline.
For Trump supporters, that certainly seemed to be the case. They helped the baseless story generate over 140,000 shares, reactions, and comments on Facebook.
Meanwhile, roughly 6,000 miles away in a small town in the former Yugoslav Republic of Macedonia, a young man watched as money began trickling into his Google AdSense account.
Over the past year, the Macedonian town of Veles (population 45,000) has experienced a digital gold rush as locals launched at least 140 US politics websites. These sites have American-sounding domain names such as WorldPoliticus.com, TrumpVision365.com, USConservativeToday.com, DonaldTrumpNews.co, and USADailyPolitics.com. They almost all publish aggressively pro-Trump content aimed at conservatives and Trump supporters in the US.
The young Macedonians who run these sites say they don’t care about Donald Trump. They are responding to straightforward economic incentives: As Facebook regularly reveals in earnings reports, a US Facebook user is worth about four times a user outside the US. The fraction-of-a-penny-per-click of US display advertising — a declining market for American publishers — goes a long way in Veles. Several teens and young men who run these sites told BuzzFeed News that they learned the best way to generate traffic is to get their politics stories to spread on Facebook — and the best way to generate shares on Facebook is to publish sensationalist and often false content that caters to Trump supporters.
As a result, this strange hub of pro-Trump sites in the former Yugoslav Republic of Macedonia is now playing a significant role in propagating the kind of false and misleading content that was identified in a recent BuzzFeed News analysis of hyperpartisan Facebook pages. These sites open a window into the economic incentives behind producing misinformation specifically for the wealthiest advertising markets and specifically for Facebook, the world’s largest social network, as well as within online advertising networks such as Google AdSense.
“Yes, the info in the blogs is bad, false, and misleading but the rationale is that ‘if it gets the people to click on it and engage, then use it,’” said a university student in Veles who started a US politics site, and who agreed to speak on the condition that BuzzFeed News not use his name.
Sample stories from US politics sites run by Macedonians.
Using domain name registration records and online searches, BuzzFeed News identified over 100 active US politics websites being run from Veles. The largest of these sites have Facebook pages that boast hundreds of thousands of followers.
BuzzFeed News also identified another 40 US politics domains registered by people in Veles that are no longer active. (An April report from the Macedonian website Meta.mk identified six pro-Trump sites being run from Veles. A Guardian report identified 150 politics sites.)
Their reasons for launching these sites are purely financial, according to the Macedonians with whom BuzzFeed News spoke.
“I started the site for a easy way to make money,” said a 17-year-old who runs a site with four other people. “In Macedonia the economy is very weak and teenagers are not allowed to work, so we need to find creative ways to make some money. I’m a musician but I can’t afford music gear. Here in Macedonia the revenue from a small site is enough to afford many things.”
Most of the posts on these sites are aggregated, or completely plagiarized, from fringe and right-wing sites in the US. The Macedonians see a story elsewhere, write a sensationalized headline, and quickly post it to their site. Then they share it on Facebook to try and generate traffic. The more people who click through from Facebook, the more money they earn from ads on their website.
Earlier in the year, some in Veles experimented with left-leaning or pro–Bernie Sanders content, but nothing performed as well on Facebook as Trump content.
“People in America prefer to read news about Trump,” said a Macedonian 16-year-old who operates BVANews.com.
BuzzFeed News’ research also found that the most successful stories from these sites were nearly all false or misleading.
For example, the most successful post BuzzFeed News found from a Macedonian site is based on a story from a fake news website. The headline on the story from ConservativeState.com was “Hillary Clinton In 2013: ‘I Would Like To See People Like Donald Trump Run For Office; They’re Honest And Can’t Be Bought.’” The post is a week old and has racked up an astounding 480,000 shares, reactions, and comments on Facebook. (To put that into perspective, the New York Times’ exclusive story that revealed Donald Trump declared a $916 million loss on his 1995 income tax returns generated a little more than 175,000 Facebook interactions in a month.)
The viral Clinton story was sourced from TheRightists.com, a site that admits it publishes both real and fake content. According to emails released by WikiLeaks, Clinton said in a private speech to Goldman Sachs that she would like to see more successful business people enter politics. But she did not mention Donald Trump in any way. The quote used in the headline is false.
The original hoax from The Rightists. The Rightists
Four of the five most successful posts from the Macedonian sites BuzzFeed News identified are false. They include the false claim that the pope endorsed Trump, and the false claim that Mike Pence said Michelle Obama is the “most vulgar first lady we’ve ever had.” Those four posts together generated more than 1 million shares, reactions, and comments on Facebook. That resulted in huge traffic and significant ad revenue for the owners of these sites, with many people being misinformed along the way.
The Macedonians BuzzFeed News spoke to said the explosion in pro-Trump sites in Veles means the market has now become crowded, making it harder to earn money. The people who launched their sites early in 2016 are making the most money, according to the university student. He said a friend of his earns $5,000 per month, “or even $3,000 per day” when he gets a hit on Facebook.
The 16-year-old who operates BVANews.com with a partner said he also runs health websites in addition to the US politics site. They launched the site in early 2016 and it’s now averaging 1 million page views a month, said his partner. (The teens declined to share revenue figures.)
The 17-year-old and his three partners are still waiting for Google’s AdSense program to approve their site for ads. As of now, they’re only generating about 800 views a day and aren’t earning any revenue. The university student launched his site in August and stopped updating it in order to focus on another, more successful site he has that’s focused on health and well-being. He estimated there are “thousands” of health-related sites being run out of Veles. US politics is just this year’s opportunity, thanks to a combination of Trump and Facebook.
“I stopped because I didn’t really enjoy doing it and we didn’t actually make any money from it since there are so many people posting already,” the university student said. “The people who started early are the ones reaping the rewards.”
Aside from the allure of easy money, they also have an element of pride that web-savvy people — including teenagers — in a small country like Macedonia can earn money by gaming Facebook, Google, and Americans.
“A good chunk of the world thinks Macedonia is primitive, but that is not true,” the 17-year-old said.
The young men running these sites know the Trump traffic bonanza will soon come to an end. They expect traffic and revenue to decline significantly once the election is over. But they also hold out hope that a Trump win will keep their sites afloat.
“If Trump loses I plan to redirect my site to sports,” the 16-year-old’s partner said. “It means that there will be no more politics [worth covering].”
La prédiction est un art bien difficile, surtout en ce qui concerne l’avenir. Niels Bohr
Soudain, Norman se sentit fier. Tout s’imposait à lui, avec force. Il était fier. Dans ce monde imparfait, les citoyens souverains de la première et de la plus grande Démocratie Electronique avaient, par l’intermédiaire de Norman Muller (par lui), exercé une fois de plus leur libre et inaliénable droit de vote.Le Votant (Isaac Asimov, 1955)
Vous allez dans certaines petites villes de Pennsylvanie où, comme ans beaucoup de petites villes du Middle West, les emplois ont disparu depuis maintenant 25 ans et n’ont été remplacés par rien d’autre (…) Et il n’est pas surprenant qu’ils deviennent pleins d’amertume, qu’ils s’accrochent aux armes à feu ou à la religion, ou à leur antipathie pour ceux qui ne sont pas comme eux, ou encore à un sentiment d’hostilité envers les immigrants. Barack Obama (2008)
Pour généraliser, en gros, vous pouvez placer la moitié des partisans de Trump dans ce que j’appelle le panier des pitoyables. Les racistes, sexistes, homophobes, xénophobes, islamophobes. A vous de choisir.Hillary Clinton
I continue to believe Mr. Trump will not be president. And the reason is that I have a lot of faith in the American people. Being president is a serious job. It’s not hosting a talk show, or a reality show. The American people are pretty sensible, and I think they’ll make a sensible choice in the end. It’s not promotion, it’s not marketing. It’s hard. And a lot of people count on us getting it right. Barack Hussein Obama (Feb. 2016)
Comme je l’ai dit depuis le début, notre campagne n’en était pas simplement une, mais plutôt un grand mouvement incroyable, composé de millions d’hommes et de femmes qui travaillent dur, qui aiment leur pays, et qui veulent un avenir plus prospère et plus radieux pour eux-mêmes et leur famille. C’est un mouvement composé d’Américains de toutes races, de toutes religions, de toutes origines, qui veulent et attendent que le gouvernement serve le peuple. Ce gouvernement servira le peuple. J’ai passé toute ma vie dans le monde des affaires et j’ai observé le potentiel des projets et des personnes partout dans le monde. Aujourd’hui, c’est ce que je veux faire pour notre pays. Il y a un potentiel énorme, je connais bien notre pays, il y a potentiel incroyable, ce sera magnifique. Chaque Américain aura l’opportunité de vivre pleinement son potentiel. Ces hommes et ces femmes oubliés de notre pays, ces personnes ne seront plus oubliées. Donald Trump
Je suis désolé d’être le porteur de mauvaises nouvelles, mais je crois avoir été assez clair l’été dernier lorsque j’ai affirmé que Donald Trump serait le candidat républicain à la présidence des États-Unis. Cette fois, j’ai des nouvelles encore pires à vous annoncer: Donald J. Trump va remporter l’élection du mois de novembre. Ce clown à temps partiel et sociopathe à temps plein va devenir notre prochain président. (…) Jamais de toute ma vie n’ai-je autant voulu me tromper. (…) Voici 5 raisons pour lesquelles Trump va gagner : 1. Le poids électoral du Midwest, ou le Brexit de la Ceinture de rouille 2. Le dernier tour de piste des Hommes blancs en colère 3. Hillary est un problème en elle-même 4. Les partisans désabusés de Bernie Sanders 5. L’effet Jesse Ventura. Michael Moore
The phenomenon of voters telling pollsters what they think they want to hear, however, actually has a name: the Bradley Effect, a well-studied political phenomenon. In 1982, poll after poll showed Tom Bradley, Los Angeles’ first black mayor and a Democrat, with a solid lead over George Deukmejian, a white Republican, in the California gubernatorial race. Instead, Bradley narrowly lost to Deukmejian, a stunning upset that led experts to wonder how the polls got it wrong. Pollsters, and some political scientists, later concluded that voters didn’t want to say they were voting against Bradley, who would have been the nation’s first popularly-elected African-American governor, because they didn’t want to appear to be racist. (…) In December, a Morning Consult poll examined whether Trump supporters were more likely to say they supported him in online polls than in polls conducted by live questioners. Their finding was surprising: « Trump performs about six percentage points better online than via live telephone interviewing, » according to the study. At the same time, « his advantage online is driven by adults with higher levels of education, » the study says, countering data showing Trump’s bedrock support comes from voters without college degrees. « Importantly, the differences between online and live telephone [surveys] persist even when examining only highly engaged, likely voters. » But Galston says while the study examines « a legitimate question, » the methodology is unclear, and « it’s really important to compare apples to apples. You need to be sure that the online community has the same demographic profile » as phone polling. « It may also be the case that people who are online and willing to participate in that study are already, in effect, a self-selected sample » of pro-Trump voters, Galston says. (…) Ultimately, Trump’s claim « is more of a way to try to explain poor polling numbers. Trump is losing at the moment and he’s trying to explain it off, » Skelley says. « This doesn’t really hold up under scrutiny. »US News & world report (July 2016)
Ever since the ascendency of their “war room,” the Clinton-inspired Left has attacked the integrity and morality of all Republican presidential candidates: McCain was rendered a near-senile coot, confused about the extent of his wife’s wealth and the number of their estates. No finer man ran for president than Mitt Romney. And by November 2012 when he lost, he had been reduced to a bullying hazer in his teen-age years, a vulture capitalist, a heartless plutocrat who was rude to his garbage man, tortured dogs, had an elevator in his house, and provided horses and stables to his aristocratic wife. All were either lies or exaggerations or irrelevant and all insidiously cemented the picture of the gentlemanly Romney as a preppie, out-of-touch, old white-guy snob, and gratuitously cruel to the less fortunate. Trump was certainly more vulgar than either McCain or Romney, but what voters he lost owing to his crass candor he may well have gained back through his slash-and-burn, take-no-prisoners willingness to fight back against the liberal smear machine. We can envision what Marco Rubio, Jeb Bush, or Ted Cruz would look like after six months of “going high” from the Clinton-campaign treatment. It is a mistake to believe that any other candidate would have better dealt with the Clinton-Podesta hit teams; all we can assume is that most would have suffered far more nobly than Trump. It would be wonderful if a Republican candidate ran with Romney’s personal integrity, Rubio’s charisma, Walker’s hands-on experience, Cruz’s commitment to constitutional conservatism, and Trump’s energy, animal cunning, and ferocity, but unfortunately such multifaceted candidates are rare. Victor Davis Hanson
What I was hearing was this general sense of being on the short end of the stick. Rural people felt like they’re not getting their fair share. (…) First, people felt that they were not getting their fair share of decision-making power. For example, people would say: All the decisions are made in Madison and Milwaukee and nobody’s listening to us. Nobody’s paying attention, nobody’s coming out here and asking us what we think. Decisions are made in the cities, and we have to abide by them. Second, people would complain that they weren’t getting their fair share of stuff, that they weren’t getting their fair share of public resources. That often came up in perceptions of taxation. People had this sense that all the money is sucked in by Madison, but never spent on places like theirs. And third, people felt that they weren’t getting respect. They would say: The real kicker is that people in the city don’t understand us. They don’t understand what rural life is like, what’s important to us and what challenges that we’re facing. They think we’re a bunch of redneck racists. So it’s all three of these things — the power, the money, the respect. People are feeling like they’re not getting their fair share of any of that. (…) It’s been this slow burn. Resentment is like that. It builds and builds and builds until something happens. Some confluence of things makes people notice: I am so pissed off. I am really the victim of injustice here. (…) Then, I also think that having our first African American president is part of the mix, too. (…) when the health-care debate ramped up, once he was in office and became very, very partisan, I think people took partisan sides. (…) It’s not just resentment toward people of color. It’s resentment toward elites, city people. (…) Of course [some of this resentment] is about race, but it’s also very much about the actual lived conditions that people are experiencing. We do need to pay attention to both. As the work that you did on mortality rates shows, it’s not just about dollars. People are experiencing a decline in prosperity, and that’s real. The other really important element here is people’s perceptions. Surveys show that it may not actually be the case that Trump supporters themselves are doing less well — but they live in places where it’s reasonable for them to conclude that people like them are struggling. Support for Trump is rooted in reality in some respects — in people’s actual economic struggles, and the actual increases in mortality. But it’s the perceptions that people have about their reality are the key driving force here. (…) One of the key stories in our political culture has been the American Dream — the sense that if you work hard, you will get ahead. (…) But here’s where having Bernie Sanders and Donald Trump running alongside one another for a while was so interesting. I think the support for Sanders represented a different interpretation of the problem. For Sanders supporters, the problem is not that other population groups are getting more than their fair share, but that the government isn’t doing enough to intervene here and right a ship that’s headed in the wrong direction. (…) There is definitely some misinformation, some misunderstandings. But we all do that thing of encountering information and interpreting it in a way that supports our own predispositions. Recent studies in political science have shown that it’s actually those of us who think of ourselves as the most politically sophisticated, the most educated, who do it more than others. So I really resist this characterization of Trump supporters as ignorant. There’s just more and more of a recognition that politics for people is not — and this is going to sound awful, but — it’s not about facts and policies. It’s so much about identities, people forming ideas about the kind of person they are and the kind of people others are. Who am I for, and who am I against? Policy is part of that, but policy is not the driver of these judgments. There are assessments of, is this someone like me? Is this someone who gets someone like me? (…) All of us, even well-educated, politically sophisticated people interpret facts through our own perspectives, our sense of what who we are, our own identities. I don’t think that what you do is give people more information. Because they are going to interpret it through the perspectives they already have. People are only going to absorb facts when they’re communicated from a source that they respect, from a source who they perceive has respect for people like them. And so whenever a liberal calls out Trump supporters as ignorant or fooled or misinformed, that does absolutely nothing to convey the facts that the liberal is trying to convey. Katherine Cramer
Traditional political polling in America has been living on borrowed time, and the divergence of the actual votes in Tuesday’s election from what was expected in the polls may signal that its time is up. The fact that the polls apparently missed the preferences of a large portion of the American electorate indicates a larger, more systematic issue, one that’s unlikely to be fixed anytime soon. The basic problem — and the reason pollsters have been nervous about just this sort of large-scale polling failure — comes from the low response rates that have plagued even the best polls since the widespread use of caller ID technology. Caller ID, more than any other single factor, means that fewer Americans pick up the phone when a pollster calls. That means it takes more calls for a poll to reach enough respondents to make a valid sample, but it also means that Americans are screening themselves before they pick up the phone. So even as our ability to analyze data has gotten better and better, thanks to advanced computing and an increase in the amount of data available to analysts, our ability to collect data has gotten worse. And if the inputs are bad, the analysis won’t be any good either. That self-screening is enormously problematic for pollsters. A sample is only valid to the extent that the individuals reached are a random sample of the overall population of interest. It’s not at all problematic for some people to refuse to pick up the phone, as long as their refusal is driven by a random process. If it’s random, the people who do pick up the phone will still be a representative sample of the overall population, and the pollster will just have to make more calls. Similarly, it’s not a serious problem for pollsters if people refuse to answer the phone according to known characteristics. For instance, pollsters know that African-Americans are less likely to answer a survey than white Americans and that men are less likely to pick up the phone than women. Thanks to the U.S. Census, we know what proportion of these groups are supposed to be in our sample, so when the proportion of men, or African-Americans, falls short in the sample, pollsters can make use of weighting techniques to correct for the shortfall. The real problem comes when potential respondents to a poll are systematically refusing to pick up the phone according to characteristics that pollsters aren’t measuring or can’t adjust to match what’s in the population. (…) None of this would be a problem if response rates were at the levels they were at in the 1980s, or even the 1990s. But with response rates to modern telephone polls languishing below 15%, it becomes harder and harder to determine whether systematic nonresponse problems are even happening. These problems go from nagging to consequential when the characteristics that are leading people to exclude themselves from polls are correlated with the major outcome that the poll is trying to measure. For instance, if Donald Trump voters were more likely to decide not to participate in polls because they’re rigged, and did so in a way that wasn’t correlated with known characteristics like race and gender, pollsters would have no way of knowing. Of course, if unobserved nonresponse is driving poll errors, it’s necessary to ask how polls have done so well up to this point. After all, response rates have been similarly low in at least the last four presidential elections, and the polls did well enough in those. Part of the problem, and what makes this election different, is a seeming failure of likely voter models. One of the most difficult tasks facing any election pollster is determining who is and is not actually going to vote on Election Day. People tend to say they’re going to vote even when they won’t, so it’s necessary to ask more questions. Every major pollster has their own set of questions in the likely voter questions, but they typically include items about interest in the election, past vote behavior, and knowledge of where a polling place is. Using these questions to determine who is and is not going to vote is a tricky business; the failure of a complex likely voter model is why Gallup got out of the election forecasting business. (…) It may be the case that standard sampling and weighting techniques are able to correct for sampling problems in a normal election — one in which voter turnout patterns remain predictable — but fail when the polls are missing portions of the electorate who are likely to turn out in one election but not in previous ones. Imagine that there’s a group of voters who don’t generally vote and are systematically less likely to respond to a survey. So long as they continue to not vote, there isn’t a problem. But if a candidate activates these voters, the polls will systematically underestimate support for the candidate. That seems to be what happened Tuesday night. (…) At least for unusual elections, polling seems broken — and we have no way of knowing which elections are unusual until the votes actually come in. Dan Cassino
Ce qui est nouveau, c’est d’abord que la bourgeoisie a le visage de l’ouverture et de la bienveillance. Elle a trouvé un truc génial : plutôt que de parler de « loi du marché », elle dit « société ouverte », « ouverture à l’Autre » et liberté de choisir… Les Rougon-Macquart sont déguisés en hipsters. Ils sont tous très cools, ils aiment l’Autre. Mieux : ils ne cessent de critiquer le système, « la finance », les « paradis fiscaux ». On appelle cela la rebellocratie. C’est un discours imparable : on ne peut pas s’opposer à des gens bienveillants et ouverts aux autres ! Mais derrière cette posture, il y a le brouillage de classes, et la fin de la classe moyenne. La classe moyenne telle qu’on l’a connue, celle des Trente Glorieuses, qui a profité de l’intégration économique, d’une ascension sociale conjuguée à une intégration politique et culturelle, n’existe plus même si, pour des raisons politiques, culturelles et anthropologiques, on continue de la faire vivre par le discours et les représentations. (…) C’est aussi une conséquence de la non-intégration économique. Aujourd’hui, quand on regarde les chiffres – notamment le dernier rapport sur les inégalités territoriales publié en juillet dernier –, on constate une hyper-concentration de l’emploi dans les grands centres urbains et une désertification de ce même emploi partout ailleurs. Et cette tendance ne cesse de s’accélérer ! Or, face à cette situation, ce même rapport préconise seulement de continuer vers encore plus de métropolisation et de mondialisation pour permettre un peu de redistribution. Aujourd’hui, et c’est une grande nouveauté, il y a une majorité qui, sans être « pauvre » ni faire les poubelles, n’est plus intégrée à la machine économique et ne vit plus là où se crée la richesse. Notre système économique nécessite essentiellement des cadres et n’a donc plus besoin de ces millions d’ouvriers, d’employés et de paysans. La mondialisation aboutit à une division internationale du travail : cadres, ingénieurs et bac+5 dans les pays du Nord, ouvriers, contremaîtres et employés là où le coût du travail est moindre. La mondialisation s’est donc faite sur le dos des anciennes classes moyennes, sans qu’on le leur dise ! Ces catégories sociales sont éjectées du marché du travail et éloignées des poumons économiques. Cependant, cette« France périphérique » représente quand même 60 % de la population. (…) Ce phénomène présent en France, en Europe et aux États-Unis a des répercussions politiques : les scores du FN se gonflent à mesure que la classe moyenne décroît car il est aujourd’hui le parti de ces « superflus invisibles » déclassés de l’ancienne classe moyenne. (…) Face à eux, et sans eux, dans les quinze plus grandes aires urbaines, le système marche parfaitement. Le marché de l’emploi y est désormais polarisé. Dans les grandes métropoles il faut d’une part beaucoup de cadres, de travailleurs très qualifiés, et de l’autre des immigrés pour les emplois subalternes dans le BTP, la restauration ou le ménage. Ainsi les immigrés permettent-ils à la nouvelle bourgeoisie de maintenir son niveau de vie en ayant une nounou et des restaurants pas trop chers. (…) Il n’y a aucun complot mais le fait, logique, que la classe supérieure soutient un système dont elle bénéficie – c’est ça, la « main invisible du marché» ! Et aujourd’hui, elle a un nom plus sympathique : la « société ouverte ». Mais je ne pense pas qu’aux bobos. Globalement, on trouve dans les métropoles tous ceux qui profitent de la mondialisation, qu’ils votent Mélenchon ou Juppé ! D’ailleurs, la gauche votera Juppé. C’est pour cela que je ne parle ni de gauche, ni de droite, ni d’élites, mais de « la France d’en haut », de tous ceux qui bénéficient peu ou prou du système et y sont intégrés, ainsi que des gens aux statuts protégés : les cadres de la fonction publique ou les retraités aisés. Tout ce monde fait un bloc d’environ 30 ou 35 %, qui vit là où la richesse se crée. Et c’est la raison pour laquelle le système tient si bien. (…) La France périphérique connaît une phase de sédentarisation. Aujourd’hui, la majorité des Français vivent dans le département où ils sont nés, dans les territoires de la France périphérique il s’agit de plus de 60 % de la population. C’est pourquoi quand une usine ferme – comme Alstom à Belfort –, une espèce de rage désespérée s’empare des habitants. Les gens deviennent dingues parce qu’ils savent que pour eux « il n’y a pas d’alternative » ! Le discours libéral répond : « Il n’y a qu’à bouger ! » Mais pour aller où ? Vous allez vendre votre baraque et déménager à Paris ou à Bordeaux quand vous êtes licencié par ArcelorMittal ou par les abattoirs Gad ? Avec quel argent ? Des logiques foncières, sociales, culturelles et économiques se superposent pour rendre cette mobilité quasi impossible. Et on le voit : autrefois, les vieux restaient ou revenaient au village pour leur retraite. Aujourd’hui, la pyramide des âges de la France périphérique se normalise. Jeunes, actifs, retraités, tous sont logés à la même enseigne. La mobilité pour tous est un mythe. Les jeunes qui bougent, vont dans les métropoles et à l’étranger sont en majorité issus des couches supérieures. Pour les autres ce sera la sédentarisation. Autrefois, les emplois publics permettaient de maintenir un semblant d’équilibre économique et proposaient quelques débouchés aux populations. Seulement, en plus de la mondialisation et donc de la désindustrialisation, ces territoires ont subi la retraite de l’État. (…) Aujourd’hui, ce parc privé « social de fait » s’est gentrifié et accueille des catégories supérieures. Quant au parc social, il est devenu la piste d’atterrissage des flux migratoires. Si l’on regarde la carte de l’immigration, la dynamique principale se situe dans le Grand Ouest, et ce n’est pas dans les villages que les immigrés s’installent, mais dans les quartiers de logements sociaux de Rennes, de Brest ou de Nantes. (…) In fine, il y a aussi un rejet du multiculturalisme. Les gens n’ont pas envie d’aller vivre dans les derniers territoires des grandes villes ouverts aux catégories populaires : les banlieues et les quartiers à logements sociaux qui accueillent et concentrent les flux migratoires. (…) En réalité, [mixité sociale » et « mixité ethnique »] vont rarement ensemble. En région parisienne, on peut avoir un peu de mixité sociale sans mixité ethnique. La famille maghrébine en phase d’ascension sociale achète un pavillon à proximité des cités. Par ailleurs, les logiques séparatistes se poursuivent et aujourd’hui les ouvriers, les cadres de la fonction publique et les membres de la petite bourgeoisie maghrébine en ascension sociale évitent les quartiers où se concentre l’immigration africaine. Ça me fait penser à la phrase de Valls sur l’apartheid. Il devait penser à Évry, où le quartier des Pyramides s’est complètement ethnicisé : là où vivaient hier des Blancs et des Maghrébins, ne restent plus aujourd’hui que des gens issus de l’immigration subsaharienne. En réalité, tout le monde – le petit Blanc, le bobo comme le Maghrébin en phase d’ascension sociale – souhaite éviter le collège pourri du coin et contourne la carte scolaire. On est tous pareils, seul le discours change… (…) À catégories égales, la mobilité sociale est plus forte dans les grandes métropoles. C’est normal : c’est là que se concentrent les emplois. Contrairement aux zones rurales, où l’accès au marché de l’emploi et à l’enseignement supérieur est difficile, les aires métropolitaines offrent des opportunités y compris aux catégories modestes. Or ces catégories, compte tenu de la recomposition démographique, sont aujourd’hui issues de l’immigration. Cela explique l’intégration économique et sociale d’une partie de cette population. Évidemment, l’ascension sociale reste minoritaire mais c’est une constante des milieux populaires depuis toujours : quand on naît « en bas » , on meurt « en bas » . (…) les classes populaires immigrées bénéficient simplement d’un atout : celui de vivre « là où ça se passe » . Il ne s’agit pas d’un privilège résultant d’une politique volontariste. Tout ça s’est fait lentement. Il y a des logiques démographiques, foncières et économiques. Il faut avoir à l’esprit que la France périphérique n’est pas 100 % blanche, elle comporte aussi des immigrés, et puis il y a également les DOM-TOM, territoires ultrapériphériques ! (..) Notre erreur est d’avoir pensé qu’on pouvait appliquer le modèle mondialisé économique sans obtenir ses effets sociétaux, c’est-à-dire le multiculturalisme et une forme de communautarisme. La prétention française, c’était de dire : « Nous, gros malins de Français, allons faire la mondialisation républicaine ! » Il faut constater que nous sommes devenus une société américaine comme les autres. La laïcité et l’assimilation sont mortes de facto. Il suffit d’écouter les élèves d’un collège pour s’en convaincre : ils parlent de Noirs, de Blancs, d’Arabes. La société multiculturelle mondialisée génère partout les mêmes tensions et paranoïas identitaires, nous sommes banalement dans ce schéma en France. Dans ce contexte, la question du rapport entre minorité et majorité est en permanence posée, quelle que soit l’origine. Quand ils deviennent minoritaires, les Maghrébins eux-mêmes quittent les cités qui concentrent l’immigration subsaharienne. Sauf que comme en France il n’y a officiellement ni religion ni race, on ne peut pas en parler… Ceux qui osent le faire, comme Michèle Tribalat, le paient cher. (…) La création de zones piétonnières fait augmenter les prix du foncier. Et les aménagements écolos des villes correspondent, de fait, à des embourgeoisements. Tous ces dispositifs amènent un renchérissement du foncier et davantage de gentrification. Pour baisser les prix ? Il faut moins de standing. Or la pression est forte : à Paris, plus de 40 % de la population active est composée de cadres. C’est énorme ! Même le XX e arrondissement est devenu une commune bourgeoise. Et puis l’embourgeoisement est un rouleau compresseur. On avait pensé que certaines zones resteraient populaires, comme la Seine-et-Marne, mais ce n’est pas le cas. Ce système reproduit le modèle du marché mondialisé, c’est-à-dire qu’il se sépare des gens dont on n’a pas besoin pour faire tourner l’économie. (…) La politique municipale de Bordeaux est la même que celle de Lyon ou de Paris. Il y a une logique qui est celle de la bourgeoisie mondialisée, qu’elle soit de droite ou de gauche. Elle est libérale-libertaire, tantôt plus libertaire (gauche), tantôt plus libérale (droite)… (…) L’un des codes fondamentaux de la nouvelle bourgeoisie est l’ouverture. Si on lâche ce principe, on est presque en phase de déclassement. Le vote populiste, c’est celui des gens qui ne sont plus dans le système, les « ratés » , et personne, dans le milieu bobo, n’a envie d’avoir l’image d’un loser. Le discours d’ouverture de la supériorité morale du bourgeois est presque un signe extérieur de richesse. C’est un attribut d’intégration. Aux yeux de la classe dominante, un homme tolérant est quelqu’un qui a fondamentalement compris le monde. (…) Mais plus personne ne l’écoute ! Quand on regarde catégorie après catégorie, c’est un processus de désaffiliation qui s’enchaîne et se reproduit, incluant notamment le divorce des banlieues avec la gauche. Le magistère de la France d’en haut est terminé ! Électoralement, on le voit déjà avec la montée de l’abstention et du vote FN. Le FN existe uniquement parce qu’il est capable de capter ce qui vient d’en bas, pas parce qu’il influence le bas. Ce sont les gens qui influencent le discours du FN, et pas le contraire ! Ce n’est pas le discours du FN qui imprègne l’atmosphère ! Le Pen père n’était pas ouvriériste, ce sont les ouvriers qui sont allés vers lui. Le FN s’est mis à parler du rural parce qu’il a observé des cartes électorales… les campagnes sont un désert politique rempli de Français dans l’attente d’une nouvelle offre. Bref, ce système ne peut pas perdurer. (…) Si l’on regarde le dernier sondage Ipsos réalisé dans 22 pays, on y découvre que seulement 11 % des Français (dont beaucoup d’immigrés !) considèrent que l’immigration est positive pour le pays. C’est marrant, les journalistes sont 90 % à penser le contraire. En vérité, il n’y a plus de débat sur l’immigration : tout le monde est d’accord sauf des gens qui nous mentent… (…) Les ministres et gouvernements successifs sont pris dans la même contradiction : ils ont choisi un modèle économique qui crée de la richesse, mais qui n’est pas socialement durable, qui ne fait pas société. Ils n’ont de fait aucune solution, si ce n’est de gérer le court terme en faisant de la redistribution. La dernière idée dans ce sens est le revenu universel, ce qui fait penser qu’on a définitivement renoncé à tout espoir d’un développement économique de la France périphérique.Christophe Guilluy
Experts et commentateurs se sont, dans leur grande majorité, mis le doigt dans l’œil parce qu’ils pensent à l’intérieur du système. À Paris comme à Washington, on reste persuadé qu’un «outsider» n’a aucune chance face aux appareils des partis, des lobbies et des machines électorales. Que ce soit dans notre monarchie républicaine ou dans leur hiérarchie de Grands Électeurs, si l’on n’est pas un familier du sérail, on n’existe pas. Tout le dédain et la condescendance envers Trump, qui n’était jusqu’ici connu que par ses gratte-ciel et son émission de téléréalité, pouvaient donc s’afficher envers cette grosse brute qui ne sait pas rester à sa place. On connaît la suite. (…) Trump est l’un des premiers à avoir compris et utilisé la désintermédiation. Ce n’est pas vraiment l’ubérisation de la politique, mais ça y ressemble quelque peu. Quand je l’ai interrogé sur le mouvement qu’il suscitait dans la population américaine, il m’a répondu: Twitter, Facebook et Instagram. Avec ses 15 millions d’abonnés, il dispose d’une force de frappe avec laquelle il dialogue sans aucun intermédiaire. Il y a trente ans, il écrivait qu’aucun politique ne pouvait se passer d’un quotidien comme le New York Times. Aujourd’hui, il affirme que les réseaux sociaux sont beaucoup plus efficaces – et beaucoup moins onéreux – que la possession de ce journal. (…) Là-bas comme ici, l’avenir n’est plus ce qu’il était, la classe moyenne se désosse, la précarité est toujours prégnante, les attentats terroristes ne sont plus, depuis un certain 11 septembre, des images lointaines vues sur petit ou grand écran. (…) Et la fureur s’explique par le décalage entre la ritournelle de «Nous sommes la plus grande puissance et le plus beau pays du monde» et le «Je n’arrive pas à finir le mois et payer les études de mes enfants et l’assurance médicale de mes parents». Sans parler de l’écart toujours plus abyssal entre riches et modestes. (…) Il existe, depuis quelques années, un étonnant rapprochement entre les problématiques européennes et américaines. Qui aurait pu penser, dans ce pays d’accueil traditionnel, que l’immigration provoquerait une telle hostilité chez certains, qui peut permettre à Trump de percer dans les sondages en proclamant sa volonté de construire un grand mur? Il y a certes des points communs avec Marine Le Pen, y compris dans la nécessité de relocaliser, de rebâtir des frontières et de proclamer la grandeur de son pays. Mais évidemment, Trump a d’autres moyens que la présidente du Front National… De plus, répétons-le, c’est d’abord un pragmatique et un négociateur. Je ne crois pas que ce soit les qualités les plus apparentes de Marine Le Pen… (…) Son programme économique le situe beaucoup plus à gauche que les caciques Républicains et les néo-conservateurs proches d’Hillary Clinton qui le haïssent, parce que lui croit, dans certains domaines, à l’intervention de l’État et aux limites nécessaires du laisser-faire, laisser-aller. (…) Il ne ménage personne et peut aller beaucoup plus loin que Marine Le Pen, tout simplement parce qu’il n’a jamais eu à régler le problème du père fondateur et encore moins à porter le fardeau d’une étiquette tout de même controversée. Sa marque à lui, ce n’est pas la politique, mais le bâtiment et la réussite. Ça change pas mal de choses. (…) il trouve insupportable que des villes comme Paris et Bruxelles, qu’il adore et a visitées maintes fois, deviennent des camps retranchés où l’on n’est même pas capable de répliquer à un massacre comme celui du Bataclan. On peut être vent debout contre le port d’arme, mais, dit-il, s’il y avait eu des vigiles armés boulevard Voltaire, il n’y aurait pas eu autant de victimes. Pour lui, un pays qui ne sait pas se défendre est un pays en danger de mort. (…) Il s’entendra assez bien avec Poutine pour le partage des zones d’influence, et même pour une collaboration active contre Daesh et autres menaces, mais, comme il le répète sur tous les tons, l’Amérique de Trump ne défendra que les pays qui paieront pour leur protection. Ça fait un peu Al Capone, mais ça a le mérite de la clarté. Si l’Europe n’a pas les moyens de protéger son identité, son mode de vie, ses valeurs et sa culture, alors, personne ne le fera à sa place. En résumé, pour Trump, la politique est une chose trop grave pour la laisser aux politiciens professionnels, et la liberté un état trop fragile pour la confier aux pacifistes de tout poil.André Bercoff
La grande difficulté, avec Donald Trump, c’est qu’on est à la fois face à une caricature et face à un phénomène bien plus complexe. Une caricature d’abord, car tout chez lui, semble magnifié. L’appétit de pouvoir, l’ego, la grossièreté des manières, les obsessions, les tweets épidermiques, l’étalage voyant de son succès sur toutes les tours qu’il a construites et qui portent son nom. Donald Trump joue en réalité à merveille de son côté caricatural, il simplifie les choses, provoque, indigne, et cela marche parce que notre monde du 21e siècle se gargarise de ces simplifications outrancières, à l’heure de l’information immédiate et fragmentée. La machine médiatique est comme un ventre qui a toujours besoin de nouveaux scandales et Donald, le commercial, le sait mieux que personne, parce qu’il a créé et animé une émission de téléréalité pendant des années. Il sait que la politique américaine actuelle est un grand cirque, où celui qui crie le plus fort a souvent raison parce que c’est lui qui «fait le buzz». En même temps, ne voir que la caricature qu’il projette serait rater le phénomène Trump et l’histoire stupéfiante de son succès électoral. Derrière l’image télévisuelle simplificatrice, se cache un homme intelligent, rusé et avisé, qui a géré un empire de milliards de dollars et employé des dizaines de milliers de personnes. Ce n’est pas rien! Selon plusieurs proches du milliardaire que j’ai interrogés, Trump réfléchit de plus à une candidature présidentielle depuis des années, et il a su capter, au-delà de l’air du temps, la colère profonde qui traversait l’Amérique, puis l’exprimer et la chevaucher. Grâce à ses instincts politiques exceptionnels, il a vu ce que personne d’autre – à part peut-être le démocrate Bernie Sanders – n’avait su voir: le gigantesque ras le bol d’un pays en quête de protection contre les effets déstabilisants de la globalisation, de l’immigration massive et du terrorisme islamique; sa peur du déclin aussi. En ce sens, Donald Trump s’est dressé contre le modèle dominant plébiscité par les élites et a changé la nature du débat de la présidentielle. Il a remis à l’ordre du jour l’idée de protection du pays, en prétendant au rôle de shérif aux larges épaules face aux dangers d’un monde instable et dangereux. Cela révèle au minimum une personnalité sacrément indépendante, un côté indomptable qui explique sans doute l’admiration de ses partisans…Ils ont l’impression que cet homme explosif ne se laissera impressionner par rien ni personne. Beaucoup des gens qui le connaissent affirment d’ailleurs que Donald Trump a plusieurs visages: le personnage public, flashy, égotiste, excessif, qui ne veut jamais avouer ses faiblesses parce qu’il doit «vendre» sa marchandise, perpétuer le mythe, et un personnage privé plus nuancé, plus modéré et plus pragmatique, qui sait écouter les autres et ne choisit pas toujours l’option la plus extrême…Toute la difficulté et tout le mystère, pour l’observateur est de s’y retrouver entre ces différents Trump. C’est loin d’être facile, surtout dans le contexte de quasi hystérie qui règne dans l’élite médiatique et politique américaine, tout entière liguée contre lui. Il est parfois très difficile de discerner ce qui relève de l’analyse pertinente ou de la posture de combat anti-Trump. (…) à de rares exceptions près, les commentateurs n’ont pas vu venir le phénomène Trump, parce qu’il était «en dehors des clous», impensable selon leurs propres «grilles de lecture». Trop scandaleux et trop extrême, pensaient-ils. Il a fait exploser tant de codes en attaquant ses adversaires au dessous de la ceinture et s’emparant de sujets largement tabous, qu’ils ont cru que «le grossier personnage» ne durerait pas! Ils se sont dit que quelqu’un qui se contredisait autant ou disait autant de contre vérités, finirait par en subir les conséquences. Bref, ils ont vu en lui soit un clown soit un fasciste – sans réaliser que toutes les inexactitudes ou dérapages de Trump lui seraient pardonnés comme autant de péchés véniels, parce qu’il ose dire haut et fort ce que son électorat considère comme une vérité fondamentale: à savoir que l’Amérique doit faire respecter ses frontières parce qu’un pays sans frontières n’est plus un pays. Plus profondément, je pense que les élites des deux côtes ont raté le phénomène Trump (et le phénomène Sanders), parce qu’elles sont de plus en plus coupées du peuple et de ses préoccupations, qu’elles vivent entre elles, se cooptent entre elles, s’enrichissent entre elles, et défendent une version «du progrès» très post-moderne, détachée des préoccupations de nombreux Américains. Soyons clairs, si Trump est à bien des égards exaspérant et inquiétant, il y a néanmoins quelque chose de pourri et d’endogame dans le royaume de Washington. Le peuple se sent hors jeu. (…) Ce statut de milliardaire du peuple est crédible parce qu’il ne s’est jamais senti membre de l’élite bien née, dont il aime se moquer en la taxant «d’élite du sperme chanceux». Cette dernière ne l’a d’ailleurs jamais vraiment accepté, lui le parvenu de Queens, venu de la banlieue, qui aime tout ce qui brille. Il ne faut pas oublier en revanche que Donald a grandi sur les chantiers de construction, où il accompagnait son père déjà tout petit, ce qui l’a mis au contact des classes populaires. Il parle exactement comme eux! Quand je me promenais à travers l’Amérique à la rencontre de ses électeurs, c’est toujours ce dont ils s’étonnaient. Ils disaient: «Donald parle comme nous, pense comme nous, est comme nous». Le fait qu’il soit riche, n’est pas un obstacle parce qu’on est en Amérique, pas en France. Les Américains aiment la richesse et le succès. (…) L’un des atouts de Trump, pour ses partisans, c’est qu’il est politiquement incorrect dans un pays qui l’est devenu à l’excès. Sur l’islam radical (qu’Obama ne voulait même pas nommer comme une menace!), sur les maux de l’immigration illégale et maints autres sujets. Ses fans se disent notamment exaspérés par le tour pris par certains débats, comme celui sur les toilettes «neutres» que l’administration actuelle veut établir au nom du droit des «personnes au genre fluide» à «ne pas être offensés». Ils apprécient que Donald veuille rétablir l’expression de Joyeux Noël, de plus en plus bannie au profit de l’expression Joyeuses fêtes, au motif qu’il ne faut pas risquer de blesser certaines minorités religieuses non chrétiennes…Ils se demandent pourquoi les salles de classe des universités, lieu où la liberté d’expression est supposée sacro-sainte, sont désormais surveillées par une «police de la pensée» étudiante orwellienne, prête à demander des comptes aux professeurs chaque fois qu’un élève s’estime «offensé» dans son identité…Les fans de Trump sont exaspérés d’avoir vu le nom du club de football américain «Red Skins» soudainement banni du vocabulaire de plusieurs journaux, dont le Washington Post, (et remplacé par le mot R…avec trois points de suspension), au motif que certaines tribus indiennes jugeaient l’appellation raciste et insultante. (Le débat, qui avait mobilisé le Congrès, et l’administration Obama, a finalement été enterré après de longs mois, quand une enquête a révélé que l’écrasante majorité des tribus indiennes aimait finalement ce nom…). Dans ce contexte, Trump a été jugé«rafraîchissant» par ses soutiens, presque libérateur. (…) Pour moi, le phénomène Trump est la rencontre d’un homme hors normes et d’un mouvement de rébellion populaire profond, qui dépasse de loin sa propre personne. C’est une lame de fond, anti globalisation et anti immigration illégale, qui traverse en réalité tout l’Occident. Trump surfe sur la même vague que les politiques britanniques qui ont soutenu le Brexit, ou que Marine Le Pen en France. La différence, c’est que Trump est une version américaine du phénomène, avec tout ce que cela implique de pragmatisme et d’attachement au capitalisme. (…) Trump n’est pas un idéologue. Il a longtemps été démocrate avant d’être républicain et il transgresse les frontières politiques classiques des partis. Favorable à une forme de protectionnisme et une remise en cause des accords de commerce qui sont défavorables à son pays, il est à gauche sur les questions de libre échange, mais aussi sur la protection sociale des plus pauvres, qu’il veut renforcer, et sur les questions de société, sur lesquelles il affiche une vision libérale de New Yorkais, certainement pas un credo conservateur clair. De ce point de vue là, il est post reaganien. Mais Donald Trump est clairement à droite sur la question de l’immigration illégale et des frontières, et celle des impôts. Au fond, c’est à la fois un marchand et un nationaliste, qui se voit comme un pragmatique, dont le but sera de faire «des bons deals» pour son pays. Il n’est pas là pour changer le monde, contrairement à Obama. Ce qu’il veut, c’est remettre l’Amérique au premier plan, la protéger. Son instinct de politique étrangère est clairement du côté des réalistes et des prudents, car Trump juge que les Etats-Unis se sont laissé entrainer dans des aventures qui les ont affaiblis et n’ont pas réglé les crises. Il ne veut plus d’une Amérique jouant les gendarmes du monde. Mais vu sa tendance aux volte face et vu ce qu’il dit sur le rôle que devrait jouer l’Amérique pour venir à bout de la menace de l’islam radical, comme elle l’a fait avec le nazisme et le communisme, Donald Trump pourrait fort bien changer d’avis, et revenir à un credo plus interventionniste avec le temps. Ses instincts sont au repli, mais il reste largement imprévisible. (…) De nombreuses questions se posent sur son caractère, ses foucades, son narcissisme et sa capacité à se contrôler, si importante chez le président de la première puissance du monde! Je ne suis pas pour autant convaincue par l’image de «Hitler», fasciste et raciste, qui lui a été accolée par la presse américaine. Hitler avait écrit Mein Kamp. Donald Trump, lui, a écrit «L ‘art du deal» et avait envisagé juste après la publication de ce premier livre, de se présenter à la présidence en prenant sur son ticket la vedette de télévision afro-américaine démocrate Oprah Winfrey, un élément qui ne colle pas avec l’image d’un raciste anti femmes! Ses enfants et nombre de ses collaborateurs affirment qu’il ne discrimine pas les gens en fonction de leur sexe ou de la couleur de leur peau, mais en fonction de leurs mérites, et que c’est pour cette même raison qu’il est capable de s’en prendre aux représentants du sexe faible ou des minorités avec une grande brutalité verbale, ne voyant pas la nécessité de prendre des gants. Les questions les plus lourdes concernant Trump, sont selon moi plutôt liées à la manière dont il réagirait, s’il ne parvenait pas à tenir ses promesses, une fois à la Maison-Blanche. Tout président américain est confronté à la complexité de l’exercice du pouvoir dans un système démocratique extrêmement contraignant. Cet homme d’affaires habitué à diriger un empire immobilier pyramidal, dont il est le seul maître à bord, tenterait-il de contourner le système pour arriver à ses fins et prouver au peuple qu’il est bien le meilleur, en agissant dans une zone grise, avec l’aide des personnages sulfureux qui l’ont accompagné dans ses affaires? Et comment se comporterait-il avec ses adversaires politiques ou les représentants de la presse, vu la brutalité et l’acharnement dont il fait preuve envers ceux qui se mettent sur sa route? Hériterait-on d’un Berlusconi ou d’un Nixon puissance 1000? Autre interrogation, vu la fascination qu’exerce sur lui le régime autoritaire de Vladimir Poutine: serait-il prêt à sacrifier le droit international et l’indépendance de certains alliés européens, pour trouver un accord avec le patron du Kremlin sur les sujets lui tenant à cœur, notamment en Syrie? Bref, pourrait-il accepter une forme de Yalta bis, et remettre en cause le rôle de l’Amérique dans la défense de l’ordre libéral et démocratique de l’Occident et du monde depuis 1945? Autant de questions cruciales auxquelles Donald Trump a pour l’instant répondu avec plus de désinvolture que de clarté.Laure Mandeville
Après les référendums de 2005 (France et Pays-Bas) et le Brexit (2016), voici une nouvelle surprise avec l’élection de Donald Trump par une franche majorité d’Américains. À chaque fois, le suffrage universel a eu raison des médias, des sondeurs et de leurs commanditaires. On peut au moins se réjouir de cette vitalité démocratique. (…) C’est en partie en raison du libre-échange et du primat de la finance que les électeurs américains ont voté pour Donald Trump : il a su capter leur colère sourde, tout comme d’ailleurs le candidat démocrate Bernie Sanders, rival malheureux d’Hillary Clinton. L’autre motif qui a conduit à la victoire de Trump et à l’élimination de Sanders tient à l’exaspération d’une majorité de citoyens face aux tromperies de l’utopie « multiculturaliste » et de la société « ouverte ». À preuve le vote de l’Iowa en faveur de Donald Trump : dans cet État plutôt prospère, avec un faible taux de chômage, c’est évidemment l’enjeu multiculturaliste qui a fait basculer les électeurs. En effet, l’élection en 2008 d’un président noir (pas un Afro-Américain mais un métis, fils d’une blanche du Kansas et d’un Kényan) n’a pas empêché le retour à de nouvelles formes de ségrégation raciale. C’est ainsi que la candidate démocrate Hillary Clinton a tenté de jouer la carte « racialiste » en cajolant les électeurs afro-américains et latinos. Mais sans doute s’est-elle trompée dans son évaluation du vote latino : beaucoup d’Étasuniens latino-américains aspirent à leur intégration dans la classe moyenne et ne se sentent guère solidaires des Afro-Américains. Le même phénomène s’observe en Europe de l’Ouest, sous l’effet d’un emballement migratoire sans précédent dans l’Histoire. Les nouveaux arrivants font bloc avec leur « communauté » dans les quartiers et les écoles : Africains de la zone équatoriale, Sahéliens, Maghrébins, Turcs, Orientaux, Chinois etc. Il compromettent ce faisant l’intégration des immigrants plus anciennement installés. À quoi les classes dirigeantes répondent par des propos hors-contexte sur le « vivre-ensemble » et l’occultation de la mémoire. La chancelière Angela Merkel et même le pape François ont perçu les dangers de cette politique dans leurs dernières déclarations, en novembre 2016. Quant aux élus français, qui ont abandonné leur souveraineté à Bruxelles et Berlin et se tiennent désormais à la remorque des puissants, ils feraient bien de prendre à leur tour la mesure de l’exaspération populaire face au néolibéralisme financier, au multiculturalisme et à l’emballement migratoire. Ils se doivent de nommer et analyser ces phénomènes sans faux-semblants, et de préconiser des solutions respectueuses de la démocratie. Hérodote
Make no mistake about it: this election is Barack Obama’s legacy. He pushed hard for Hillary Clinton in the end because he understood that as such. And it was all for naught. No celebrity, no sports star, and no current president with a strong approval rating was enough to drag Hillary Clinton over the finish line. (…) Last night Jamelle Bouie and Van Jones voiced something I expect we will hear from many of Obama’s firmest supporters in the coming weeks – the idea that Trump represents a “whitelash” against eight years of Obama. But this dramatically oversimplifies the case, particularly if as it seems at the moment Trump won more minority votes than Mitt Romney in 2012. In fact, as Nate Cohn notes, Clinton failed in areas of the country where Obama’s support had been strongest among white Americans. She failed to keep pace with Obama in the Rust Belt states that he won repeatedly. Her vaunted GOTV machine failed to attract the votes of young people, of union members, and of minorities to the degree necessary to win. And meanwhile, Trump’s utter lack of a campaign was more than made up for by the emotional dedication of his supporters. This was about more than just race – it was a sustained rejection of the country’s ruling class. But expect the media to try to make it about two things: race, and about Hillary Clinton’s lousy campaign. (…) The majority of political reporters never seemed to get outside their bubble. They spoke to anti-Trump conservatives, and printed anti-Trump views from conservatives, but rarely would even publish the sorts of views I and others have been sounding for months about the real and rational gripes of Trump voters. Many in the media preferred the caricature to the real thing. If you are a member of the media who does not know anyone who was pro-Trump, who has no Trump voters among your family or friends, realize how thick your bubble is. Change this. Don’t stick to the old sources, who clearly didn’t know what was going on – add new ones, who offer the perspective from the ground. (…) What is clear is this: Donald Trump is the man Americans have chosen as their vehicle for the dramatic change they demand from Washington. They have utterly rejected the change offered in the eight year Barack Obama agenda as wholly insufficient. And they have given Trump the rare gift of a united government in order to make those changes happen. They have tossed aside the assumptions of an elite class of gatekeepers and commentators whose opinions they disrespect and disavow. And they have sent a message to Washington that nothing less than wholesale change will satisfy them, including a change in the fundamental character of the commander in chief.Ben Domenech
Since the 1960s, when America finally became fully accountable for its past, deference toward all groups with any claim to past or present victimization became mandatory. The Great Society and the War on Poverty were some of the first truly deferential policies. Since then deference has become an almost universal marker of simple human decency that asserts one’s innocence of the American past. (…) Since the ’60s the Democratic Party, and liberalism generally, have thrived on the power of deference. When Hillary Clinton speaks of a “basket of deplorables,“ she follows with a basket of isms and phobias—racism, sexism, homophobia, xenophobia and Islamaphobia. Each ism and phobia is an opportunity for her to show deference toward a victimized group and to cast herself as America’s redeemer. And, by implication, conservatism is bereft of deference. (…) And they have been fairly successful in this so that many conservatives are at least a little embarrassed to “come out” as it were. Conservatism is an insurgent point of view, while liberalism is mainstream. And this is oppressive for conservatives because it puts them in the position of being a bit embarrassed by who they really are and what they really believe. Deference has been codified in American life as political correctness. And political correctness functions like a despotic regime. It is an oppressiveness that spreads its edicts further and further into the crevices of everyday life. We resent it, yet for the most part we at least tolerate its demands. (…) And into all this steps Mr. Trump, a fundamentally limited man but a man with overwhelming charisma, a man impossible to ignore. The moment he entered the presidential contest America’s long simmering culture war rose to full boil. Mr. Trump was a non-deferential candidate. He seemed at odds with every code of decency. He invoked every possible stigma, and screechingly argued against them all. He did much of the dirty work that millions of Americans wanted to do but lacked the platform to do. Thus Mr. Trump’s extraordinary charisma has been far more about what he represents than what he might actually do as the president. He stands to alter the culture of deference itself. After all, the problem with deference is that it is never more than superficial. We are polite. We don’t offend. But we don’t ever transform people either. Out of deference we refuse to ask those we seek to help to be primarily responsible for their own advancement. Yet only this level of responsibility transforms people, no matter past or even present injustice. Some 3,000 shootings in Chicago this year alone is the result of deference camouflaging a lapse of personal responsibility with empty claims of systemic racism. As a society we are so captive to our historical shame that we thoughtlessly rush to deference simply to relieve the pressure. And yet every deferential gesture—the war on poverty, affirmative action, ObamaCare, every kind of “diversity” scheme—only weakens those who still suffer the legacy of our shameful history. Deference is now the great enemy of those toward whom it gushes compassion. Societies, like individuals, have intuitions. Donald Trump is an intuition. At least on the level of symbol, maybe he would push back against the hegemony of deference—if not as a liberator then possibly as a reformer. Possibly he could lift the word responsibility out of its somnambulant stigmatization as a judgmental and bigoted request to make of people. This, added to a fundamental respect for the capacity of people to lift themselves up, could go a long way toward a fairer and better America.Shelby Steele
For the past six months, one big question has loomed over the 2016 election: Is the candidacy of Donald J. Trump an amusing bit of reality TV or a terrifying and dangerous challenge to the country’s political system? At first, Trump’s popularity was easy to dismiss. It was nothing more than a phase, the result of Trump’s celebrity status and his talent for provocation. His antics made it hard to look away, but it was easy to convince yourself that Trump mania would never lead to anything serious, like the Republican nomination. It was especially easy to come to that conclusion if you were reading FiveThirtyEight, the statistics-driven news website founded by Nate Silver. Since the beginning of Trump’s campaign last June, the election guru and his colleagues have been consistently bearish on Trump’s chances. Silver, who made his name by using cold hard math to call 49 out of 50 states in the 2008 general election and all 50 in 2012, has served as a reassuring voice in the midst of Trump’s shocking rise. For those of us who didn’t want to believe we lived in a country where Donald Trump could be president, Silver’s steady, level-headed certainty felt just as soothing as his unwavering confidence in Barack Obama’s triumph over Mitt Romney four years ago. What exactly has Silver been saying? In September, he told CNN’s Anderson Cooper that Trump had a roughly 5-percent chance of beating his GOP rivals. In November, he explained that Trump’s national following was about as negligible as the share of Americans who believe the Apollo moon landing was faked. On Twitter, he compared Trump to the band Nickelback, which he described as being “[d]isliked by most, super popular with a few.” In a post titled “Why Donald Trump Isn’t A Real Candidate, In One Chart,” Silver’s colleague Harry Enten wrote that Trump had a better chance of “playing in the NBA Finals” than winning the Republican nomination. Multiple times over the past six months, Silver has reminded his readers that four years ago, daffy fly-by-nighters like Herman Cain and Michele Bachmann led the GOP field at various points. Trump’s poll numbers, he wrote, would drop just like theirs had. In one August post, “Donald Trump’s Six Stages of Doom,” Silver actually laid out a schedule for the candidate’s inevitable collapse. (…) It’s clear, now, that Silver and his fellow analysts at FiveThirtyEight underestimated Trump. Silver himself recently admitted as much, writing in a blog post published last week that he’d been too skeptical about Trump’s chances. (…) Maybe, like many people who have watched Trump’s rise with increasing horror, Silver latched onto a narrative that justified rejecting the Apprentice star’s achievements, identifying them as symptoms of a media bubble rather than a reflection of real popular sentiment. If that’s the case, Silver turns out to have a good bit in common with the pundits that he and his unemotional, numbers-driven worldview were supposed to render obsolete. Faced with uncertainty, Silver chose to go all in on an outcome that felt right, one that meshed with his preexisting beliefs about how the world is supposed to work. (…)Missing the significance of Trumpism is a different kind of failure than, say, calling the 2012 election for Mitt Romney. It also might be a more damning one. Botching your general election forecast by a couple of percentage points suggests a flawed mathematical formula. Actively denying the reality of Trump’s success suggests Silver may never have been capable of explaining the world in a way so many believed he could in 2008 and 2012, when he was telling them how likely it was that Obama would become, and remain, the president.Leon Neyfakh (Jan. 2016)
Mr Silver predicted, with an absurdly precise 71.4% chance, that Mrs Clinton would take 302 electoral votes and beat Mr Trump by 3.6% in the popular vote. He was wildly incorrect. (As of the writing of this article, Mr Trump will win 306 electoral votes but will lose the popular vote by merely 0.2%.) Even worse, Mr Silver got several key states wrong: He predicted that Clinton would win Wisconsin, Michigan, Pennsylvania, North Carolina, and Florida. In reality, Trump swept all of them. Alex Berezow
It was a big polling miss in the worst possible race. On the eve of America’s presidential election, national surveys gave Hillary Clinton a lead of around four percentage points, which betting markets and statistical models translated into a probability of victory ranging from 70% to 99%. That wound up misfiring modestly: according to the forecast from New York Times’s Upshot, Mrs Clinton is still likely to win the popular vote, by more than a full percentage point. But at the state level, the errors were extreme. The polling average in Wisconsin gave her a lead of more than five points; she is expected to lose it by two and a half. It gave Mr Trump a relatively narrow two-point edge in Ohio; he ran away with the state by more than eight. He trailed in Michigan and Pennsylvania by four, and looks likely to take both by about a point. How did it all go wrong? Every survey result is made up of a combination of two variables: the demographic composition of the electorate, and how each group is expected to vote. Because some groups—say, young Hispanic men—are far less likely to respond than others (old white women, for example), pollsters typically weight the answers they receive to match their projections of what the electorate will look like. Polling errors can stem either from getting an unrepresentative sample of respondents within each group, or from incorrectly predicting how many of each type of voter will show up. The electoral map leaves no doubt as to how Mr Trump won. In states where white voters tend to be well-educated, such as Colorado and Virginia, the polls pegged the final results perfectly. Conversely, in northern states that have lots of whites without a college degree, Mr Trump blew his polls away—including ones he is still expected to lose, but by a far smaller margin than expected, such as Minnesota. The simplest explanation for this would be that these voters preferred him by an even larger margin than pollsters foresaw—the so-called “shy Trump” phenomenon, in which people might be wary of admitting they supported him. Pre-election polls gave little evidence for this phenomenon: they showed him with a massive 30-point lead among this group. But remarkably, even that figure wound up understating Mr Trump’s appeal to them: the national exit poll put him 39 points ahead. Given that such voters make up 58% of the eligible population in Wisconsin, Michigan, Ohio and Pennsylvania—though a smaller share of those who actually turn out—this nine-point miss among them accounts for a large chunk of the overall error. It is also likely that less-educated whites, who historically have had a low propensity to vote, turned out in greater numbers than pollsters predicted.The Economist
Election polling is harder than other forms of survey research, because you must assess two things at once. Not only do you have to find out who people say they will support, you also have to estimate their likelihood of actually turning up to vote. So Trump may have been right in claiming that he’d created a new movement of people who had previously shunned political engagement. If so, pollsters who relied on prior voting behavior to predict who would turn out this time would have systematically underestimated Trump’s support. Problems with likely voter modeling could also mean that the pollsters overestimated the extent to which the “Obama coalition” of black, Latino, and younger voters would turn out for Clinton.(…) “Shy Trumpers,” who were embarrassed to admit their support for the GOP candidate, quietly delivered their verdict in the polling booths. This theory first emerged in the run-up to the Republican primaries, as pollsters noticed that Trump was doing better in online polls than in those conducted over the phone. The idea was that some of Trump’s supporters were embarrassed to admit their choice to a real person. The idea gained traction when a polling experiment run last December by Morning Consult seemed to confirm that the effect was real. In the match-up against Clinton, however, Trump’s advantage in online polls mostly evaporated. And when Morning Consult ran a poll with Politico in late October to specifically probe for the effect, it seemed to operate only among college-educated voters. “Overall, it didn’t look like it massively shifted the race,” Morning Consult’s Cartwright said. (…) Trump’s anti-establishment supporters believed the polls were rigged, and so they refused to answer the phone or respond to online surveys. For pollsters, this is a much darker possibility. The idea that the polls were rigged became a popular refrain among Trump’s supporters. So maybe these people simply refused to participate in polls, either on the phone or online. If so, all of the pollsters may have been systematically blind to many of the disaffected, mostly white voters who drove Trump to victory, especially in the Rust Belt states of the Midwest. “People who don’t like the government often perceive the polls as being part of the government,” said Johnson of the University of Illinois, who believes this is the most plausible explanation for the pollsters’ miss. BuzzFeed
L’effet Bradley (en anglais Bradley effect) (…) est le nom donné aux États-Unis au décalage souvent observé entre les sondages électoraux et les résultats des élections américaines quand un candidat blanc est opposé à un candidat non blanc (noir, hispanique, latino, asiatique ou océanien). Le nom du phénomène vient de Tom Bradley, un Afro-Américain qui perdit l’élection de 1982 au poste de gouverneur de Californie, à la surprise générale, alors qu’il était largement en tête dans tous les sondages. L’effet Bradley reflète une tendance de la part des votants, noirs aussi bien que blancs, à dire aux sondeurs qu’ils sont indécis ou qu’ils vont probablement voter pour le candidat noir ou issu de la minorité ethnique mais qui, le jour de l’élection, votent pour son opposant blanc. Une des théories pour expliquer l’effet Bradley est que certains électeurs donnent une réponse fausse lors des sondages, de peur qu’en déclarant leur réelle préférence, ils ne prêtent le flanc à la critique d’une motivation raciale de leur vote. Cet effet est similaire à celui d’une personne refusant de discuter de son choix électoral. Si la personne déclare qu’elle est indécise, elle peut ainsi éviter d’être forcée à entrer dans une discussion politique avec une personne partisane. La réticence à donner une réponse exacte s’étend parfois jusqu’aux sondages dits de sortie de bureau de vote. La façon dont les sondeurs conduisent l’interview peut être un déterminant dans la réponse du sondé. Wikipedia
Silicon Valley these days is a very intolerant place for people who do not hold so called ‘socially liberal’ ideas. In Silicon Valley, because of the high prevalence of highly smart people, there is a general stereotype that voting Republican is for dummies. So many people see considering supporting Republican candidates, particularly Donald Trump, anathema to the whole Silicon Valley ethos that values smarts and merit. A couple of friends thought that me supporting Trump made me unworthy of being part of the Silicon Valley tribe and stopped talking to me. At the end of the day, we choose our politics the way we choose our lovers and our friends — not so much out a rational analysis, but based on impressions and our own personal backgrounds. My main reason for supporting Trump is that I basically agree with the notion that unless the trend is stopped, our country is going to hell … The Silicon Valley elite is highly hypocritical on this matter. One of the reasons, I assume, they don’t like Trump is because on this area, as in many others, he is calling a spade a spade. I believe Trump is right in this case. … supporting Trump only offers [an] upside. Electing Hillary Clinton would keep the status quo. If Trump wins, there’s a whole set of new possibilities that would emerge for the nation. Even if it remains socially liberal, it would be good for it if the president were to be a Republican so that the Valley could recover a little bit of its rebel spirit (that was the case during the Bush years for instance). I believe that the increased relevance in national politics of companies like Google (whose Chairman [Eric] Schmidt has been very cozy with the Obama administration) and Apple (at the center of several political disputes) has been bad for the Valley. A Trump presidency would allow the Valley to focus on what it does best: dreaming and building the technology of the future, leaving politics for DC types. Silicon valley software engineer
Many people are saying to maybe their friends while they’re having a sip of Chardonnay in Washington or Boston, ‘Oh, I would never vote for him, he’s so – not politically correct,’ or whatever, but then they’re going to go and vote for him. Because he’s saying things that they would like to say, but they’re not politically courageous enough to say it and I think that’s the real question in this election. Trump is kind of a combination of the gun referendum, because he’s an emotional energy source for people who want to make sure that they’re voicing their concerns about all these issues – immigration, et cetera – but then I think there’s this other piece. They don’t find it to be correct or acceptable to a lot of their friends, but when push comes to shove, they’re going to vote for him.Gregory Payne (Emerson College)
Donald Trump performs consistently better in online polling where a human being is not talking to another human being about what he or she may do in the election. It’s because it’s become socially desirable, if you’re a college educated person in the United States of America, to say that you’re against Donald Trump.Kellyanne Conway (Trump campaign manager)
They’ll go ahead and vote for that candidate in the privacy of a [voting] booth But they won’t admit to voting for that candidate to somebody who’s calling them for a poll.Joe Bafumi (Dartmouth College)
Trump’s advantage in online polls compared with live telephone polling is eight or nine percentage points among likely voters. Kyle A. Dropp
It’s easier to express potentially ‘unacceptable’ responses on a screen than it is to give them to a person. Kathy Frankovic
This may be due to social desirability bias — people are more willing to express support for this privately than when asked by someone else. Douglas Rivers
In a May 2015 report, Pew Research analyzed the differences between results derived from telephone polling and those from online Internet polling. Pew determined that the biggest differences in answers elicited via these two survey modes were on questions in which social desirability bias — that is, “the desire of respondents to avoid embarrassment and project a favorable image to others” — played a role. In a detailed analysis of phone versus online polling in Republican primaries, Kyle A. Dropp, the executive director of polling and data science at Morning Consult, writes: Trump’s advantage in online polls compared with live telephone polling is eight or nine percentage points among likely voters. This difference, Dropp notes, is driven largely by more educated voters — those who would be most concerned with “social desirability.” These findings suggest that Trump will head into the general election with support from voters who are reluctant to admit their preferences to a live person in a phone survey, but who may well be inclined to cast a ballot for Trump on Election Day.The NYT (May 2016)
Les analystes politiques, les sondeurs et les journalistes ont donné à penser que la victoire d’Hillary Clinton était assurée avant l’élection. En cela, c’est une surprise, car la sphère médiatique n’imaginait pas la victoire du candidat républicain. Elle a eu tort. Si elle avait su observer la société américaine et entendre son malaise, elle n’aurait jamais exclu la possibilité d’une élection de Trump. Pour cette raison, ce n’est pas une surprise. (…) Sans doute, ils ont rejeté Donald Trump car ils le trouvaient – et c’est le cas – démagogue, populiste et vulgaire. Je n’ai d’ailleurs jamais vu une élection américaine avec un tel parti pris médiatique. Même le très réputé hebdomadaire britannique « The Economist » a fait un clin d’oeil à Hillary Clinton. Je pense que la stigmatisation sans précédent de Donald Trump par les médias a favorisé chez les électeurs américains la dissimulation de leur intention de vote auprès des instituts de sondage. En clair, un certain nombre de votants n’a pas osé admettre qu’il soutenait le candidat américain. Ce phénomène est classique en politique. Souvenez du 21 avril 2002 et de la qualification surprise de Jean-Marie Le Pen, leader du Front national, au second tour de l’élection présidentielle française. (…) A travers l’élection de Trump, certains Américains ont exprimé leur colère. Une partie de l’Amérique ne trouve pas ses gains dans la globalisation. Cette Amérique-là ne parvient pas à retrouver son niveau de vie d’avant la crise des subprimes, elle a le sentiment d’être abandonnée. Ce sentiment était particulièrement perceptible chez les ouvriers, qui voient l’industrie s’effilocher. Ne se sentant pas assez considérés, ils ont davantage choisi Donald Trump qu’Hillary Clinton. (…) Cette formule [victoire du peuple américain contre l’establishment] est très exagérée. Oui, une partie des électeurs de Donald Trump ont voté contre Washington et ses élites. Oui, certains Américains souffrent d’un mépris de classe, en particulier dans l’Amérique profonde. Mais dire que le peuple s’est tourné vers Trump est inexact. Le candidat républicain et la candidate démocrate sont au coude à coude en termes de suffrages exprimés [à 15 heures, 47,5% pour Trump et 47,6% pour Clinton , NDLR]. Au passage, nous avons affaire à deux candidats richissimes. Si ma mémoire est bonne, Donald Trump, pseudo-candidat du peuple, n’est pas issu de la classe ouvrière… (…) L’arrivée au pouvoir de dirigeants populistes s’explique avant tout par des spécificités locales. Après, il y a des effets communs. De nouvelles puissances émergent. Les gens se sentent décentrés. Il y a une surabondance d’innovations technologiques et scientifiques. Une partie de la société se sent déclassée. L’immigration accélère les mécanismes de recomposition culturelle. Aux Etats-Unis, les Blancs anglo-saxons deviennent minoritaires. Ceci induit une réaction exprimée en votant pour un candidat populiste : Donald Trump. (…) Une chose est certaine : l’élection de Trump, mais aussi le Brexit, vont peser sur le langage et le lexique employés par une partie des prétendants à la présidentielle française. Des acteurs politiques, de droite comme de gauche, seront tentés de durcir leur discours. Mais ce climat chauffé à blanc devrait avant tout profiter à Marine Le Pen, la candidate du Front national. Personne ne fait mieux qu’elle dans ce registre. Dominique Reynié
Attention: un fiasco peut en cacher un autre !
Au lendemain de la victoire aussi reaganesque qu’inattendue du candidat républicain Donald Trump …
Et partant, à une ou deux exceptions près, d’un des plus grands fiascos de l’histoire sondagière …
Comment, comme le rappelle le politologue Dominique Reynié, ne pas voir …
Derrière cette revanche des « clingers » et « deplorables » si longtemps méprisés par un establishment prêt pour se maintenir en place à tous les coups tordus …
Et à l’instar du récent référendum du Brexitoutre-manche comme de la qualification surprise du candidat frontiste au deuxième tour en France en 2002 …
LE CERCLE/INTERVIEW – Pour Dominique Reynié, directeur général de la Fondapol, les médias n’ont pas su entendre le malaise de la population américaine.
Donald Trump a été élu Président des Etats-Unis, est-ce vraiment une surprise ?
Les analystes politiques, les sondeurs et les journalistes ont donné à penser que la victoire d’Hillary Clinton était assurée avant l’élection. En cela, c’est une surprise, car la sphère médiatique n’imaginait pas la victoire du candidat républicain. Elle a eu tort. Si elle avait su observer la société américaine et entendre son malaise, elle n’aurait jamais exclu la possibilité d’une élection de Trump. Pour cette raison, ce n’est pas une surprise.
Pourquoi les médias n’ont-ils rien vu venir ?
Sans doute, ils ont rejeté Donald Trump car ils le trouvaient – et c’est le cas – démagogue, populiste et vulgaire. Je n’ai d’ailleurs jamais vu une élection américaine avec un tel parti pris médiatique. Même le très réputé hebdomadaire britannique « The Economist » a fait un clin d’oeil à Hillary Clinton.
Je pense que la stigmatisation sans précédent de Donald Trump par les médias a favorisé chez les électeurs américains la dissimulation de leur intention de vote auprès des instituts de sondage. En clair, un certain nombre de votants n’a pas osé admettre qu’il soutenait le candidat américain. Ce phénomène est classique en politique. Souvenez du 21 avril 2002 et de la qualification surprise de Jean-Marie Le Pen, leader du Front national, au second tour de l’élection présidentielle française.
L’élection de Donald Trump traduit-elle le refus de la mondialisation par les Américains ?
A travers l’élection de Trump, certains Américains ont exprimé leur colère. Une partie de l’Amérique ne trouve pas ses gains dans la globalisation. Cette Amérique-là ne parvient pas à retrouver son niveau de vie d’avant la crise des subprimes, elle a le sentiment d’être abandonnée. Ce sentiment était particulièrement perceptible chez les ouvriers, qui voient l’industrie s’effilocher. Ne se sentant pas assez considérés, ils ont davantage choisi Donald Trump qu’Hillary Clinton.
Est-ce une victoire du peuple américain contre l’establishment, comme on l’entend parfois ?
Cette formule est très exagérée. Oui, une partie des électeurs de Donald Trump ont voté contre Washington et ses élites. Oui, certains Américains souffrent d’un mépris de classe, en particulier dans l’Amérique profonde. Mais dire que le peuple s’est tourné vers Trump est inexact. Le candidat républicain et la candidate démocrate sont au coude à coude en termes de suffrages exprimés [à 15 heures, 47,5% pour Trump et 47,6% pour Clinton , NDLR]. Au passage, nous avons affaire à deux candidats richissimes. Si ma mémoire est bonne, Donald Trump, pseudo-candidat du peuple, n’est pas issu de la classe ouvrière…
Victor Orban en Hongrie, Andrzej Duda en Pologne, Trump aux Etats-Unis, pourquoi une telle vague populiste dans le monde occidental ?
L’arrivée au pouvoir de dirigeants populistes s’explique avant tout par des spécificités locales. Après, il y a des effets communs. De nouvelles puissances émergent. Les gens se sentent décentrés. Il y a une surabondance d’innovations technologiques et scientifiques. Une partie de la société se sent déclassée. L’immigration accélère les mécanismes de recomposition culturelle. Aux Etats-Unis, les Blancs anglo-saxons deviennent minoritaires. Ceci induit une réaction exprimée en votant pour un candidat populiste : Donald Trump.
L’élection de Trump est-elle une excellente nouvelle pour Marine Le Pen ?
Une chose est certaine : l’élection de Trump, mais aussi le Brexit, vont peser sur le langage et le lexique employés par une partie des prétendants à la présidentielle française. Des acteurs politiques, de droite comme de gauche, seront tentés de durcir leur discours. Mais ce climat chauffé à blanc devrait avant tout profiter à Marine Le Pen, la candidate du Front national. Personne ne fait mieux qu’elle dans ce registre.
Propos recueillis par Kévin Badeau
Just before Election Day in November 1982, according to most polls, Tom Bradley, the first African American mayor of Los Angeles, appeared poised to become governor of California. Despite leading in the polls, Bradley lost the election to Republican George Deukmejian. Instead of becoming the first African American governor of California, Bradley became the namesake of something called The Bradley Effect.
The Bradley Effect — also known as The Wilder Effect — proposed that voters that said they would vote for the African American candidate were either too embarrassed, or ashamed for fear of being labeled racist, to admit to pollsters that they wouldn’t vote for a Black man as Governor.
According to Ballotpedia, “A related concept is social desirability bias, which describes the tendency of individuals to ‘report inaccurately on sensitive topics in order to present themselves in the best possible light.’ According to New York University professor Patrick Egan, ‘Anyone who studies survey research will tell you one of the biggest problems we encounter is this notion of social desirability bias.’ Some researchers and pollsters theorize that a number of white voters may give inaccurate polling responses for fear that, by stating their true preference, they will open themselves to criticism of racial motivation.”
While most of the above appear to apply particularly to elections where African Americans are facing off again white candidates, this year’s presidential election may contain some of those same dynamics. Some pundits are claiming that a Bradley Effect-like situation might be in play with voters who support Donald Trump, but are un-willing to admit it to pollsters.
Ever since the Bradley-Wilson contest, the notion of a Bradley Effect has been raised fairly frequently. In this presidential race, it may be worth posing two countervailing questions: Are independent voters – not the hardcore who support Trump regardless of what he says or does – reluctant to admit they are going to vote for him, yet when they arrive at the polling places they will vote for him?
Or, might it be possible some voters that have declared support for Trump will, in the sanctity of the voting booth, vote for Hillary Clinton, thereby reflecting an inversion of The Bradley Effect?
In late August, Emerson College Professor Gregory Payne told Breitbart News that he sees the same Bradley Effect taking place amongst Trump voters. In 1982, Payne said: “People, when you’d ask them if they were going to vote, oftentimes they would say they were going to vote for Bradley or a Black candidate so they felt socially acceptable. Then when they went behind the curtain, they decided that they didn’t really want to vote for Bradley.”
“I think with Trump, what you have is you have the opposite,” Payne, who wrote speeches for Bradley and also wrote Tom Bradley: The Impossible Dream, said. “Many people are saying to maybe their friends while they’re having a sip of Chardonnay in Washington or Boston, ‘Oh, I would never vote for him, he’s so – not politically correct,’ or whatever, but then they’re going to go and vote for him. Because he’s saying things that they would like to say, but they’re not politically courageous enough to say it and I think that’s the real question in this election.”
“Trump is kind of a combination of the gun referendum, because he’s an emotional energy source for people who want to make sure that they’re voicing their concerns about all these issues – immigration, et cetera – but then I think there’s this other piece. They don’t find it to be correct or acceptable to a lot of their friends, but when push comes to shove, they’re going to vote for him.”
In May, The New York Times’ Thomas B. Edsall interviewed Kyle A. Dropp, the executive director of polling for Morning Consult: “Trump’s advantage in online polls compared with live telephone polling is eight or nine percentage points among likely voters. This difference, Dropp notes, is driven largely by more educated voters — those who would be most concerned with “social desirability.” These findings suggest that Trump will head into the general election with support from voters who are reluctant to admit their preferences to a live person in a phone survey, but who may well be inclined to cast a ballot for Trump on Election Day.”
Some of this might explain why after the first debate, Trump’s online unscientific poll numbers as to who won the debate far outpace his numbers done by accredited polling companies.
Trump campaign manager Kellyanne Conway has called Team Trump’s efforts the « Undercover Trump Voter » project. « Donald Trump performs consistently better in online polling where a human being is not talking to another human being about what he or she may do in the election. It’s because it’s become socially desirable, if you’re a college educated person in the United States of America, to say that you’re against Donald Trump. »
“They’ll go ahead and vote for that candidate in the privacy of a [voting] booth,” says Dartmouth College political science professor Joe Bafumi. “But they won’t admit to voting for that candidate to somebody who’s calling them for a poll.”
Jake is like many people working in Silicon Valley.
The software engineer works for a big tech company, went to a top-tier university, and loves doing innovative work.
But one thing makes him very different: He supports Donald Trump.
In Silicon Valley — which prides itself on open-mindedness, a system of meritocracy, and a thirst for innovation — Jake’s support of Trump is more than just outside the mainstream. It’s a dangerous liability.
Since he’s told people of his support, friends who he thought were close have stopped talking to him. His coworkers shirk the subject. What used to be personal relationships at work are now only professional conversations, he says.
Now Jake tries to keep his Trump support a secret. Despite supporting the candidate both financially and in person, Jake believes his entire career could be at risk if his name were publicly linked to Trump. Business Insider agreed to interview him over email on conditions of anonymity and that we change his first name in the story.
Jake points often to Brendan Eich, a millionaire and creator of the Mozilla browser, who had to step down after his financial support of Prop 8, a California measure aimed at blocking same-sex marriage, came to light a couple of years ago. And unlike Eich, Jake says he doesn’t have the millions or the untouchable public stature of Peter Thiel to be out as a Trump supporter.
The sense of risk was driven home on Thursday, when 140 Silicon Valley bigwigs, including Apple cofounder Steve Wozniak and « Shark Tank » judge Chris Sacca, came together to decry Trump in an open letter. Y Combinator President Sam Altman has compared Trump to Hitler.
« Silicon Valley these days is a very intolerant place for people who do not hold so called ‘socially liberal’ ideas, » Jake says.
The experience of the former Mozilla creator is « exhibit A of the lack of tolerance in Silicon Valley for certain ideas, ideas which [by the way] were mainstream in American society until very recently or that, in fact, ideas that continue to be divisive today, » Jake says.
No one knows how many other « Jake »s are in Silicon Valley. But his existence there shows the power of Trump’s appeal in some of the most unlikely places.
Bloomberg called a Trump supporter in tech’s cradle « rarer than unicorns » — although in Santa Clara County, home to the likes of Google and Apple, 49,771 people voted for him in the primary. Like Jake, there are others who opt for secrecy and silence over the potential repercussions.
Here is the story of one Trump supporter’s existence in Silicon Valley’s politically hostile environment.
Unworthy of the tech tribe
Jake didn’t say much at first when his colleagues at work would make jokes about Trump — after all, he initially thought Trump’s campaign was a joke. His first donation was meant as a « middle finger » to the Washington establishment.
Eventually, though, he began to see Trump as a serious candidate, and he soon revealed to his team that he was in Trump’s camp. His colleagues « couldn’t believe it, » and he said there was « lots of contempt, even from people who are right of center. »
« In Silicon Valley, because of the high prevalence of highly smart people, there is a general stereotype that voting Republican is for dummies, » he says. « So many people see considering supporting Republican candidates, particularly Donald Trump, anathema to the whole Silicon Valley ethos that values smarts and merit. »
He’s talked about his positions more with coworkers and feels as if he’s earned respect back from some, although no one has come to team Trump with him. But the collegial work atmosphere is now tense and stilted.
« The relationship with those who were more upset is different. Now it is strictly professional, whereas before we talked more about personal stuff, » he says.
Peter Thiel, a Silicon Valley billionaire who cofounded PayPal, is a delegate for Trump and speaking at the Republican National Convention.Tristan Fewings/Getty Images
Some of his friends have demonized him and stopped talking to him entirely.
« A couple of friends thought that me supporting Trump made me unworthy of being part of the Silicon Valley tribe and stopped talking to me, » Jake says. « Honestly, I couldn’t care less. This says more about them than about me. »
Even with the thinly veiled malice toward Trump by members of the tech elite, Jake has no plans to leave his job or his career. For the most part, he’s found tech employees have an indifference towards politics.
« The main reason I stay in Silicon Valley is that I love my work and doing innovative stuff. I am willing to put up with the rest. And, as I said, most people are not very ideological, so the situation is not that bad, » he said. « It is mostly the motivated few that I am concerned about that could go the extra mile to do to me what was done to Brendan Eich. »
True believer
Why does an educated, well-compensated Silicon Valley engineer support the man who is such a pariah among his Silicon Valley peers?
Brendan Eich resigned from Mozilla after backlash from his financial support for Prop 8 in California.Brave
Like many Trump supporters, Jake believes the country is in trouble, saddled with too much debt, not enough good jobs, and a political system that benefits the wealthy and the elite. In his view, it’s the very rich who have benefited from the Obama economy, including the banks that were bailed out after the financial crisis.
Jake has historically voted Republican, although he skipped the last two elections, and he describes his political views as closer to Libertarian. Government is a « necessary evil, but evil nonetheless, » he says. He’s socially conservative on some issues (particularly abortion) and is against same-sex marriage for utilitarian reasons, but fine with civil unions.
After months of studying Trump’s message, Jake says that he found himself to be a true believer.
« At the end of the day, we choose our politics the way we choose our lovers and our friends — not so much out a rational analysis, but based on impressions and our own personal backgrounds. My main reason for supporting Trump is that I basically agree with the notion that unless the trend is stopped, our country is going to hell, » Jake says.
The ‘sideshow’
Of course, much of the backlash against Trump in Silicon Valley is due to the candidate’s comments, considered by many to be xenophobic and racist, about immigrants, Muslims, and Mexicans.
Jake says he doesn’t agree with Trump on many of those points, but Jake doesn’t really take them seriously either, describing them as a « sideshow. »
On Trump’s proposed ban on Muslims? Jake thinks Trump’s perceived extremist remarks wouldn’t be backed up with actions.
« I do not agree with a blanket ban (and personally I think he never meant it), but I do agree with the notion of increasing the scrutiny of people who come from high-risk countries or zones, » he says.
Donald Trump.Sara D. Davis/Getty Images
Nor does he expect Trump to build his famous wall on the US-Mexico border and evict millions from the country. « He might complete the fence that already exists and probably make it stronger, but I have no doubt that Trump is a smart guy who won’t be deporting massively millions of people, » he says.
Jake says he is sympathetic to the idea of making it easier for highly qualified immigrants to stay legally in the US, and even finding a solution for the problem of illegal immigration that doesn’t involve deportation. But he also believes many companies abuse the H-1B program that allows skilled foreigners to come work in the US, bringing in not only highly qualified engineers, but also barely qualified service contractors to staff their data centers.
« The Silicon Valley elite is highly hypocritical on this matter. One of the reasons, I assume, they don’t like Trump is because on this area, as in many others, he is calling a spade a spade. I believe Trump is right in this case, » Jake says.
Help Silicon Valley do what it does best
From his position, « supporting Trump only offers [an] upside. » Electing Hillary Clinton would keep the status quo, he says. If Trump wins, there’s a whole set of new possibilities that would emerge for the nation.
While most tech leaders predict doom and gloom during a Trump presidency, Jake sees the opposite for Silicon Valley: a return to the contrarian spirit that has fueled it in the past.
« Even if it remains socially liberal, it would be good for it if the president were to be a Republican so that the Valley could recover a little bit of its rebel spirit (that was the case during the Bush years for instance). I believe that the increased relevance in national politics of companies like Google (whose Chairman [Eric] Schmidt has been very cozy with the Obama administration) and Apple (at the center of several political disputes) has been bad for the Valley, » he says. « A Trump presidency would allow the Valley to focus on what it does best: dreaming and building the technology of the future, leaving politics for DC types. »
Does he share our values and our principles on limited government, the proper role of the executive, adherence to the Constitution?
As the speaker of the Republican-dominated House, Ryan could have posed a harder question: Do Republican voters “share our values and our principles”?
The answer to this question, based at least on the 10.7 million votes cast for Trump in Republican primaries and caucuses so far, is “no.”
But that’s not all. There is also strong evidence that most traditional public opinion surveys inadvertently hide a segment of Trump’s supporters. Many voters are reluctant to admit to a live interviewer that they back a candidate who has adopted such divisive positions.
An aggregation by RealClearPolitics of 10 recent telephone polls gives Clinton a nine-point lead over Trump. In contrast, the combined results for the YouGov and Morning Consult polls, which rely on online surveys, place Clinton’s lead at four points.
Why is this important? Because an online survey, whatever other flaws it might have, resembles an anonymous voting booth far more than what you tell a pollster does.
In a detailed analysis of phone versus online polling in Republican primaries, Kyle A. Dropp, the executive director of polling and data science at Morning Consult, writes:
Trump’s advantage in online polls compared with live telephone polling is eight or nine percentage points among likely voters.
This difference, Dropp notes, is driven largely by more educated voters — those who would be most concerned with “social desirability.”
These findings suggest that Trump will head into the general election with support from voters who are reluctant to admit their preferences to a live person in a phone survey, but who may well be inclined to cast a ballot for Trump on Election Day.
Conflicting online and phone poll findings in response to Trump’s call on Dec. 7, 2015 — five days after two terrorists killed 14 people in San Bernardino, Calif. — for a “total and complete shutdown of Muslims entering the United States until our country’s representatives can figure out what is going on” demonstrate the difficulty gauging Trump’s strength.
At the same time, YouGov, operating online, found substantial and growing support for Trump’s proposal, with a plurality, 45-41, in support. When YouGov repeated the question on March 24-25 — just after the terrorist attacks in Brussels — support had grown to 51-40.
This December-to-March shift was strongest among independent voters, who increased their support from 42-37 in favor of the ban to 62-37 in favor. Similarly, a March 29 Morning Consult online poll found majority support for the ban, 50-38, with voters who identified themselves as independents favoring Trump’s plan 49-36.
I asked a number of experts about the disparity between online and phone polls. All of them — Alan Abramowitz, John Sides, Michael Tesler and Lynn Vavreck, political scientists who specialize in the analysis of poll data — agreed that in the case of highly contentious issues, respondents can be more willing to express their real views anonymously, to a computer rather than to a human.
Kathy Frankovic, the former CBS polling director who now works for YouGov, told me that “it’s easier to express potentially ‘unacceptable’ responses on a screen than it is to give them to a person.” Douglas Rivers, a political scientist at Stanford and the chief scientist for YouGov, agreed, noting in an email that stronger support in online polls for a ban on Muslims
may be due to social desirability bias — people are more willing to express support for this privately than when asked by someone else.
One method of ranking whites on ethnocentrism is to measure the degree to which they believe Caucasians are more trustworthy, intelligent, industrious and less violent than African-Americans, Hispanics and other minorities. These are the kinds of questions that prompt certain respondents in phone surveys to mask their views and provide socially acceptable answers instead.
The accompanying chart, which uses data provided to The Times by Marc Hetherington and Drew Engelhardt, political scientists at Vanderbilt, shows that white Republicans are the most ethnocentric of all voters, but also that there are substantial numbers of ethnocentric white Democrats and white independents..
This suggests that Trump could potentially find significant levels of support not only among Republican voters, but also among white Democrats and independents.
Now that Trump appears to have the Republican nomination in hand, the question becomes: Can he capitalize on racial resentment among Democrats and independents in the general election?
Perhaps not surprisingly, Hetherington and Engelhardt found that racial resentment follows a similar pattern to the expression of white ethnocentrism. It is highest among Republicans, but it is also present among Democrats and independents. The second chart derived from their data shows that in rankings of racial resentment, more than half of white Republicans, 58 percent, fall into the top four most resentful categories.
What should prove worrisome for Democrats is that 42 percent of white independents also fall into the four most resentful categories, as do 22 percent of white Democrats.
Even polls using traditional phone survey methods find notable support for issues high on Trump’s agenda. You can see this, for example, in attitudes toward the Chinese, Muslims and Mexicans — all of whom Trump has demonized.
Anger toward China appears to offer fertile ground for Trump in the general election. In its 2015 American Values Survey, the Public Religion Research Institute asked how responsible China is for American “economic problems.” Solid majorities of Democrats (70 percent), independents (72 percent) and Republicans (80 percent) said China is “very” or “somewhat” responsible.
Or take another Trump theme: Islam. The P.R.R.I. values survey asked whether they agreed or disagreed with the statement “the values of Islam are at odds with American values and way of life.” Among all voters, 56 percent said that they agreed. Republican were strongest at 76 percent, but independents came in at 57 percent, with Democrats trailing at a still robust 43 percent.
The Polling Report, an aggregation of public opinion surveys, presents data on immigration from multiple sources. On a basic question — what should happen to the 11 million undocumented men, women and children now living within the borders of the United States — most traditional surveys show strong support for finding ways to legalize the status of those who have not committed crimes and have paid taxes.
A March 2016 Pew study found, for example, that voters preferred allowing undocumented immigrants to stay in the United States over attempting to deport them by 74-25. It also found that a majority said immigrants strengthen the country (as opposed to adding a burden), 57-35. These are not good numbers for Trump.
For example, a September 2015 Pew survey asked a related but different set of questions about immigrants that produced results more favorable to Trump’s prospects. Voters reported (50-28) that they believe that immigrants damage the economy (as opposed to making it better), with a fifth saying that immigrants don’t have much effect. Voters also reported that they think that immigrants make crime worse rather than better (50-7), with 41 percent saying that they don’t have much effect.
There are a few conclusions to be drawn.
First, the way Trump has positioned himself outside of the traditional boundaries of politics will make it unusually difficult to gauge public support for him and for many of his positions.
Second, the allegiance of many white Democrats and independents is difficult to predict — cross-pressured as they are by the conflict between unsavory Trump positions they are drawn to and conscience or compunction. The ambivalence of many Republicans toward Trump as their party’s brazenly defiant nominee will further compound the volatility of the electorate.
Finally, the simple fact that Trump has beaten the odds so far means that it is not beyond the realm of possibility that he could beat them again. If he does take the White House, much, if not all, of his margin of victory will come from voters too ashamed to acknowledge publicly how they intend to cast their vote.
About one in eight Tories won’t even admit their support to pollsters
Alas, the tragicomic spectacle of the British Labour leader Ed Miliband going eyeball to eyeball with Vladimir Putin now belongs in a very niche sub-genre of “what if” history books.
I wonder if Miliband was surprised by the exit polls in yesterday’s general election. I certainly was, being all prepared for the “ajockalypse” and an Ed Miliband-Nicola Sturgeon government.
Despite Miliband being tipped by most pundits, last night was a disaster for Labour, both in England and Scotland, where they have as many seats as the Tories. It’s been a while since that happened.
The biggest losers, however, were the pollsters, who all had Labour and the Conservatives neck and neck, when in fact there was a six-point gap.
Why did the opinion polls get it so spectacularly wrong, worse even than in the 1992 general election?
Margaret Thatcher wrote about the phenomenon of shy Tories back in 1979. It’s the very nature of small-C conservatives that they’re wary of tribal displays. In contrast, proclaiming socialism is a good way of expressing what some call “virtue signalling”.
Part of the reason for this shyness, it has to be said, is that people don’t like other people shouting “Tory scum” at them or vandalising their cars. Such violence, which has also been known to happen to Republicans in America, is the extreme end of a more general hostility towards conservatism.
My six-year-old daughter, who happens to share the same name as our new Labour MP (she was confused that lots of people were displaying her name in their windows), asked the other day why, if there are two main parties, no one had the blue Conservative party banner outside their front door.
Although where I live is barren territory for the Tories, in American terms rather like Vermont, even in my part of town one in six vote Tory. Probably twice that number would if the Liberal Democrats were not the main anti-Labour opposition. Yet out of hundreds of placards displayed outside people’s home, not a single person dared to admit voting Conservative.
And being a conservative, both big and small-C, has become so socially unacceptable that about one in eight Conservative voters routinely lie about it even when they are guaranteed anonymity by polling companies, let alone on Facebook.
Conservative causes generally tend to suffer from their supporters being “shy” about expressing views they know to be unfashionable or unpopular, but which they feel to be right.
David Quinn is making the same point about the Irish same-sex marriage referendum, which may well also surprise the pollsters.
It doesn’t help that socially liberal people tend to have a higher status in society. They are richer, more successful and more socially sophisticated – and it’s human instinct to defer on these subjects.
The general election obviously represents a great result for the Conservatives, but in the longer term Tories may want to ask what it means for their future if being a supporter has become something to hide.
Because Conservatives don’t all come in red trousers…
Jamie Campbell
The Independent
11 May 2015
If there was one major revelation of this mad election, it’s that Conservatives don’t all come in red trousers dripping in fox blood carrying polo mallets.
2015 saw the rise of the Secret Tory, Conservatives who, whether it be because they’re genuinely embarrassed about their views or fearful of the scorn of liberal friends, keep schtum about voting blue.
Picking them out isn’t as easy as spotting the corners of broadsheet Telegraph poking out from a Guardian Berliner but here are a few tips that might just help you identify this muted majority:
Disclaimer: Instructions are not watertight. Liberals may well also play tennis.
Did they keep quiet after the election? Such was the pummelling that Labour and the Lib Dems took last week, apathy’s been off the menu for the liberals of the UK. It feels a bit like a football match where the losers are inconsolable whilst the winners are too sheepish to celebrate. No tears? Probably Tory.What sports do they play? This isn’t to say that if someone goes down to Clapham Common every weekend for a game of rugger with Hugo, Digby and Xander they definitely won’t go to anti-fox hunting protests and love Polly Toynbee, but it’s probably a good sign. Golf, cricket and even an innocent game of tennis can be clues of the furtive Tory.
What does five more years of the Tories mean for Britain?
What magazines do they read? We all know where the newspapers stand but you’ve got to know your magazines for more subtle indications of where people are voting. The Spectator and The Economist for politics and Country Life and Tatler more generally are all blue warning lights, but also look out for Esquire, OK! and GQ – the more discreet end of the Tory rag.
What do they drink? Are your friends conspicuously steering clear of continental lager beer? Do they order a Bombadier and announce “Bang on!” when it comes? Are they ordering rounds of Jagerbombs and making explosion noises after they neck each one? The testosterone fuelled machismo of the Secret Tory may only be revealed when somewhat squiffy. Of course, in vino veritas, so jump on the vulnerability of inebriation to quiz them about their views on Friedman.
Do they still love Tony Blair? He may now be better known for his slightly suspect relationships with lovely men like Nursultan Nazarbayez these days but it’s worth remembering that the father of New Labour was the best Prime Minister the Conservatives never had. Secret Torys will most likely drop in a load of “yeah but…” comments into conservations about the man who took us to war in Iraq, dragged the Labour party into an ideological and cosies up to dictators. ‘He did do a hell of a lot for the free market though.” Busted!
IT WAS a big polling miss in the worst possible race. On the eve of America’s presidential election, national surveys gave Hillary Clinton a lead of around four percentage points, which betting markets and statistical models translated into a probability of victory ranging from 70% to 99%. That wound up misfiring modestly: according to the forecast from New York Times’s Upshot, Mrs Clinton is still likely to win the popular vote, by more than a full percentage point. But at the state level, the errors were extreme. The polling average in Wisconsin gave her a lead of more than five points; she is expected to lose it by two and a half. It gave Mr Trump a relatively narrow two-point edge in Ohio; he ran away with the state by more than eight. He trailed in Michigan and Pennsylvania by four, and looks likely to take both by about a point. How did it all go wrong?
Every survey result is made up of a combination of two variables: the demographic composition of the electorate, and how each group is expected to vote. Because some groups—say, young Hispanic men—are far less likely to respond than others (old white women, for example), pollsters typically weight the answers they receive to match their projections of what the electorate will look like. Polling errors can stem either from getting an unrepresentative sample of respondents within each group, or from incorrectly predicting how many of each type of voter will show up.
The electoral map leaves no doubt as to how Mr Trump won. In states where white voters tend to be well-educated, such as Colorado and Virginia, the polls pegged the final results perfectly. Conversely, in northern states that have lots of whites without a college degree, Mr Trump blew his polls away—including ones he is still expected to lose, but by a far smaller margin than expected, such as Minnesota. The simplest explanation for this would be that these voters preferred him by an even larger margin than pollsters foresaw—the so-called “shy Trump” phenomenon, in which people might be wary of admitting they supported him. Pre-election polls gave little evidence for this phenomenon: they showed him with a massive 30-point lead among this group. But remarkably, even that figure wound up understating Mr Trump’s appeal to them: the national exit poll put him 39 points ahead. Given that such voters make up 58% of the eligible population in Wisconsin, Michigan, Ohio and Pennsylvania—though a smaller share of those who actually turn out—this nine-point miss among them accounts for a large chunk of the overall error. It is also likely that less-educated whites, who historically have had a low propensity to vote, turned out in greater numbers than pollsters predicted.
Of all the consequences of Mr Trump’s stunning victory, its impact on the public-opinion-research industry is surely among the least important. Nonetheless, it should inspire pollsters to redouble their efforts to better forecast turnout, beyond merely relying on the census and applying simple likely-voter screens. For the layman, it serves as a devastating reminder of the uncertainty in polling, and a warning about being overconfident even when the weight of surveying evidence seems overwhelming. As the physicist Niels Bohr famously quipped, “prediction is difficult—especially about the future.”
As Nov. 8 dawned, it all seemed so clear: National polls predicted that Hillary Clinton would prevail. Polls conducted at the state level, meanwhile, indicated that a “blue firewall” of Democratic-leaning states would comfortably propel her to victory in the electoral college.
Now we know better. In the final reckoning, Clinton underperformed across the board, not only losing battlegrounds like Florida and North Carolina, but also sliding to defeat in Wisconsin and Pennsylvania, long seen as safely in the Democratic corner.
In their defense, some polling firms say that they weren’t too far off on the national popular vote, in which Clinton led by about 1 percentage point.
“Our final poll had Clinton plus three, with a margin of error of three,” Jeff Cartwright, director of communications with Morning Consult, told BuzzFeed News. “We’ve had her at that number for weeks.”
But in states with close battles, where the presidential election is actually won and lost, there seems to have been a systematic polling bias in Clinton’s favor.
So, what went wrong? Here are the leading theories, from polling experts who are struggling to work out what just happened.
1. Don’t blame any one type of poll. They all got it wrong.
Before the election, traditional phone pollsters were sparring with the new breed of online survey firms, each arguing that their methods were superior.
Phone pollsters were sticking with the established method of random digit dialing to get a representative sample of voters — but that “gold standard” was getting increasingly expensive, given dwindling response rates to phone surveys.
Online pollsters, meanwhile, argued that they could piece together good samples by carefully selecting from the people who volunteer for online polls.
Neither camp has much to shout about right now. “Everybody got it wrong. Everybody missed this. Whatever the explanation, it is something that functions across all the methodologies,” Timothy Johnson, director of the Survey Research Laboratory at the University of Illinois at Chicago, told BuzzFeed News.
2. A late surge of “undecided” Republicans swung back to their traditional home at the last minute.
The idea here is that Trump’s unorthodox campaign alienated mainstream Republicans, who sat on the fence until the final reckoning.
“One significant source of polling error might have been a late break of voters,” Sam Wang of the Princeton Election Consortium told BuzzFeed News. His prediction model, based on aggregated poll results, was particularly bullish about a Clinton victory, putting her chances of prevailing at 99% certainty on the eve of the election.
As FiveThirtyEight’s Nate Silver noted in his final election forecast (which gave Clinton a 72% chance of winning), about 12% of voters were either undecided or said they’d vote for a third-party candidate in the most recent pre-election polls. That’s much more than in recent elections.
But the late-surge idea could easily be wishful thinking. “That would be the favorite of pollsters because it means there’s nothing fundamentally wrong with polling,” said Claudia Deane, vice president of research at the Pew Research Center in Washington, DC.
Deane is skeptical of the surge idea, given what people said about their voting decisions in exit polls: According to the New York Times, those who said they decided “in the last few days” went 46% for Trump, 44% for Clinton — a far smaller difference than the 51% to 37% split for those who said they’d made their minds up in October.
Also, while the Republican leadership distanced themselves from Trump at various flash points in his controversial candidacy, rank-and-file GOP voters mostly seem to have stuck with the party throughout, according to Deane. “They weren’t treating Trump differently,” she said.
3. The “likely voter” models used by pollsters were flummoxed by Trump’s movement of disaffected white people, and wrongly put them in the “not likely to vote” column.
Election polling is harder than other forms of survey research, because you must assess two things at once. Not only do you have to find out who people say they will support, you also have to estimate their likelihood of actually turning up to vote.
So Trump may have been right in claiming that he’d created a new movement of people who had previously shunned political engagement. If so, pollsters who relied on prior voting behavior to predict who would turn out this time would have systematically underestimated Trump’s support.
Problems with likely voter modeling could also mean that the pollsters overestimated the extent to which the “Obama coalition” of black, Latino, and younger voters would turn out for Clinton.
One problem with this explanation, however, is that different pollsters approach likely voter modeling in different ways. Yes, some place a lot of weight on votes in previous elections, but others place more faith in other methods, such as trying to gauge respondents’ enthusiasm about their preferred candidates. And yet on Tuesday, every method got it wrong in a similar way.
“There is such incredible variability in those models. And to see such a wide diversity of models all get it wrong seems a little implausible,” said Johnson.
4. “Shy Trumpers,” who were embarrassed to admit their support for the GOP candidate, quietly delivered their verdict in the polling booths.
This theory first emerged in the run-up to the Republican primaries, as pollsters noticed that Trump was doing better in online polls than in those conducted over the phone. The idea was that some of Trump’s supporters were embarrassed to admit their choice to a real person. The idea gained traction when a polling experiment run last December by Morning Consult seemed to confirm that the effect was real.
In the match-up against Clinton, however, Trump’s advantage in online polls mostly evaporated. And when Morning Consult ran a poll with Politico in late October to specifically probe for the effect, it seemed to operate only among college-educated voters.
“Overall, it didn’t look like it massively shifted the race,” Morning Consult’s Cartwright said.
5. Trump’s anti-establishment supporters believed the polls were rigged, and so they refused to answer the phone or respond to online surveys.
For pollsters, this is a much darker possibility. The idea that the polls were rigged became a popular refrain among Trump’s supporters. So maybe these people simply refused to participate in polls, either on the phone or online.
If so, all of the pollsters may have been systematically blind to many of the disaffected, mostly white voters who drove Trump to victory, especially in the Rust Belt states of the Midwest.
“People who don’t like the government often perceive the polls as being part of the government,” said Johnson of the University of Illinois, who believes this is the most plausible explanation for the pollsters’ miss. “This does merit close investigation.”
That would be hard, because anti-establishment voters who don’t trust pollsters are unlikely to be keen on participating in research to find out what went wrong.
The bottom line is no one knows for sure, and the post mortem will take months.
“The ‘why’ is going to take a lot of time to seriously answer,” Charles Franklin, director of the Marquette Law School Poll in Milwaukee, told BuzzFeed News.
Solving the mystery will mean poring over the voter files maintained by states that show who voted and who did not. This research could show, for example, whether polling samples systematically missed chunks of the electorate that were solidly behind Trump, or whether those people were polled and then wrongly assumed to be unlikely to cast a vote. Or it could reveal some other, novel explanation.
The American Association for Public Opinion Research has a task force that was planning to investigate the accuracy of 2016 election polls, even before last night’s upset. It is expected to take several months to deliver a verdict.
“It’s going to be very hard to develop an adequate explanation,” Michael Traugott of the Center for Political Studies at the University of Michigan in Ann Arbor told BuzzFeed News.
Après les référendums de 2005 (France et Pays-Bas) et le Brexit (2016), voici une nouvelle surprise avec l’élection de Donald Trump par une franche majorité d’Américains. À chaque fois, le suffrage universel a eu raison des médias, des sondeurs et de leurs commanditaires (*). On peut au moins se réjouir de cette vitalité démocratique.
Les lecteurs et Amis d’Herodote.net peuvent heureusement se féliciter d’avoir accès à des analyses plus fines, parce que fondées sur les enseignements de l’Histoire.
Le 23 octobre 2016, nous avons titré notre lettre sur des élections pleines de surprises aux États-Unis et évoqué un précédent largement ignoré : l’élection du candidat « populiste » et « anti-système »Andrew Jackson, en 1828.
Par bien des aspects de sa personnalité, il n’était pas sans ressembler au nouveau président des États-Unis. Et lui aussi avait été rejeté par les instances de son parti et honni par les élites de la côte Est.
Ce 3 novembre 2016, à la lumière de l’Histoire, nous avons aussi rappelé ce qu’est le libre-échange prôné par ces mêmes élites comme par les fonctionnaires de Bruxelles et les élites françaises : une utopie aussi folle que le communisme soviétique.
C’est en partie en raison du libre-échange (*) et du primat de la finance que les électeurs américains ont voté pour Donald Trump : il a su capter leur colère sourde, tout comme d’ailleurs le candidat démocrate Bernie Sanders, rival malheureux d’Hillary Clinton (*).
L’autre motif qui a conduit à la victoire de Trump et à l’élimination de Sanders tient à l’exaspération d’une majorité de citoyens face aux tromperies de l’utopie « multiculturaliste » et de la société « ouverte ».
À preuve le vote de l’Iowa en faveur de Donald Trump : dans cet État plutôt prospère, avec un faible taux de chômage, c’est évidemment l’enjeu multiculturaliste qui a fait basculer les électeurs.
En effet, l’élection en 2008 d’un président noir (pas un Afro-Américain mais un métis, fils d’une blanche du Kansas et d’un Kényan) n’a pas empêché le retour à de nouvelles formes de ségrégation raciale. C’est ainsi que la candidate démocrate Hillary Clinton a tenté de jouer la carte « racialiste » en cajolant les électeurs afro-américains et latinos. Mais sans doute s’est-elle trompée dans son évaluation du vote latino : beaucoup d’Étasuniens latino-américains aspirent à leur intégration dans la classe moyenne et ne se sentent guère solidaires des Afro-Américains.
Le même phénomène s’observe en Europe de l’Ouest, sous l’effet d’un emballement migratoire sans précédent dans l’Histoire. Les nouveaux arrivants font bloc avec leur « communauté » dans les quartiers et les écoles : Africains de la zone équatoriale, Sahéliens, Maghrébins, Turcs, Orientaux, Chinois etc. Il compromettent ce faisant l’intégration des immigrants plus anciennement installés (*). À quoi les classes dirigeantes répondent par des propos hors-contexte sur le « vivre-ensemble » et l’occultation de la mémoire.
La chancelière Angela Merkel et même le pape François ont perçu les dangers de cette politique dans leurs dernières déclarations, en novembre 2016. Quant aux élus français, qui ont abandonné leur souveraineté à Bruxelles et Berlin et se tiennent désormais à la remorque des puissants, ils feraient bien de prendre à leur tour la mesure de l’exaspération populaire face au néolibéralisme financier, au multiculturalisme et à l’emballement migratoire. Ils se doivent de nommer et analyser ces phénomènes sans faux-semblants, et de préconiser des solutions respectueuses de la démocratie.
Political correctness functions like a despotic regime. We resent it but we tolerate it.
Shelby Steele
The Wall Street Journal
Nov. 7, 2016
The current election—regardless of its outcome—reveals something tragic in the way modern conservatism sits in American life. As an ideology—and certainly as a political identity—conservatism is less popular than the very principles and values it stands for. There is a presumption in the culture that heartlessness and bigotry are somehow endemic to conservatism, that the rigors of freedom and capitalism literally require exploitation and inequality—this despite the fact that so many liberal policies since the 1960s have only worsened the inequalities they sought to overcome.
In the broader American culture—the mainstream media, the world of the arts and entertainment, the high-tech world, and the entire enterprise of public and private education—conservatism suffers a decided ill repute. Why?
The answer begins in a certain fact of American life. As the late writer William Styron once put it, slavery was “the great transforming circumstance of American history.” Slavery, and also the diminishment of women and all minorities, was especially tragic because America was otherwise the most enlightened nation in the world. Here, in this instance of profound hypocrisy, began the idea of America as a victimizing nation. And then came the inevitable corollary: the nation’s moral indebtedness to its former victims: blacks especially but all other put-upon peoples as well.
This indebtedness became a cultural imperative, what Styron might call a “transforming circumstance.” Today America must honor this indebtedness or lose much of its moral authority and legitimacy as a democracy. America must show itself redeemed of its oppressive past.
How to do this? In a word: deference. Since the 1960s, when America finally became fully accountable for its past, deference toward all groups with any claim to past or present victimization became mandatory. The Great Society and the War on Poverty were some of the first truly deferential policies. Since then deference has become an almost universal marker of simple human decency that asserts one’s innocence of the American past. Deference is, above all else, an apology.
One thing this means is that deference toward victimization has evolved into a means to power. As deference acknowledges America’s indebtedness, it seems to redeem the nation and to validate its exceptional status in the world. This brings real power—the kind of power that puts people into office and that gives a special shine to commercial ventures it attaches to.
Since the ’60s the Democratic Party, and liberalism generally, have thrived on the power of deference. When Hillary Clinton speaks of a “basket of deplorables,“ she follows with a basket of isms and phobias—racism, sexism, homophobia, xenophobia and Islamaphobia. Each ism and phobia is an opportunity for her to show deference toward a victimized group and to cast herself as America’s redeemer. And, by implication, conservatism is bereft of deference. Donald Trump supporters are cast as small grudging people, as haters who blindly love America and long for its exclusionary past. Against this she is the very archetype of American redemption. The term “progressive” is code for redemption from a hate-driven America.
So deference is a power to muscle with. And it works by stigmatization, by threatening to label people as regressive bigots. Mrs. Clinton, Democrats and liberals generally practice combat by stigma. And they have been fairly successful in this so that many conservatives are at least a little embarrassed to “come out” as it were. Conservatism is an insurgent point of view, while liberalism is mainstream. And this is oppressive for conservatives because it puts them in the position of being a bit embarrassed by who they really are and what they really believe.
Deference has been codified in American life as political correctness. And political correctness functions like a despotic regime. It is an oppressiveness that spreads its edicts further and further into the crevices of everyday life. We resent it, yet for the most part we at least tolerate its demands. But it means that we live in a society that is ever willing to cast judgment on us, to shame us in the name of a politics we don’t really believe in. It means our decency requires a degree of self-betrayal.
And into all this steps Mr. Trump, a fundamentally limited man but a man with overwhelming charisma, a man impossible to ignore. The moment he entered the presidential contest America’s long simmering culture war rose to full boil. Mr. Trump was a non-deferential candidate. He seemed at odds with every code of decency. He invoked every possible stigma, and screechingly argued against them all. He did much of the dirty work that millions of Americans wanted to do but lacked the platform to do.
Thus Mr. Trump’s extraordinary charisma has been far more about what he represents than what he might actually do as the president. He stands to alter the culture of deference itself. After all, the problem with deference is that it is never more than superficial. We are polite. We don’t offend. But we don’t ever transform people either. Out of deference we refuse to ask those we seek to help to be primarily responsible for their own advancement. Yet only this level of responsibility transforms people, no matter past or even present injustice. Some 3,000 shootings in Chicago this year alone is the result of deference camouflaging a lapse of personal responsibility with empty claims of systemic racism.
As a society we are so captive to our historical shame that we thoughtlessly rush to deference simply to relieve the pressure. And yet every deferential gesture—the war on poverty, affirmative action, ObamaCare, every kind of “diversity” scheme—only weakens those who still suffer the legacy of our shameful history. Deference is now the great enemy of those toward whom it gushes compassion.
Societies, like individuals, have intuitions. Donald Trump is an intuition. At least on the level of symbol, maybe he would push back against the hegemony of deference—if not as a liberator then possibly as a reformer. Possibly he could lift the word responsibility out of its somnambulant stigmatization as a judgmental and bigoted request to make of people. This, added to a fundamental respect for the capacity of people to lift themselves up, could go a long way toward a fairer and better America.
Mr. Steele, a senior fellow at Stanford University’s Hoover Institution, is the author of “Shame: How America’s Past Sins Have Polarized Our Country” (Basic Books, 2015).
Donald Trump is the man Americans have chosen as their vehicle for the dramatic change they demand from Washington.
The Federalist
Ben Domenech
November 9, 2016
It is not breaking the protocols of green room conversations, I think, to say that a certain prominent pollster arrived last night at CBS headquarters in New York City declaring firmly that Hillary Clinton would win by five points, the GOP would lose the Senate, and that it would not be close. I believe he said as much on Twitter. I was more skeptical. Having heard the exit polling myself, and knowing as we all do that Trump voters are less eager to talk to these youngsters with their clipboards, I had already warned The Federalist’s staff to not anticipate an early call. As the night wore on, it became abundantly clear that the exits had dramatically underestimated the support for Donald Trump in key states. And then it became clear that they had overestimated support for Clinton in several key states. And then, at some point, it became clear that this would not be a Bush-Gore close loss at all – that she was sinking to the point that her performance was comparable to Michael Dukakis. And then everyone started to lose their minds.
The strongest thought in my head as the night wore on, and Wisconsin and Pennsylvania remained uncalled despite a clear advantage for Donald Trump, was: what on earth must the conversation be like in that room with Barack and Michelle Obama, watching the returns, followed by that magnanimous speech. Make no mistake about it: this election is Barack Obama’s legacy. He pushed hard for Hillary Clinton in the end because he understood that as such. And it was all for naught. No celebrity, no sports star, and no current president with a strong approval rating was enough to drag Hillary Clinton over the finish line. What did Obama say? What epithets did he utter? And on what did he blame the result? Schadenfreude has always been part of the case for Trump, and it is particularly sharp when it comes to the feelings of the current chief executive.
Last night Jamelle Bouie and Van Jones voiced something I expect we will hear from many of Obama’s firmest supporters in the coming weeks – the idea that Trump represents a “whitelash” against eight years of Obama. But this dramatically oversimplifies the case, particularly if as it seems at the moment Trump won more minority votes than Mitt Romney in 2012. In fact, as Nate Cohn notes, Clinton failed in areas of the country where Obama’s support had been strongest among white Americans. She failed to keep pace with Obama in the Rust Belt states that he won repeatedly. Her vaunted GOTV machine failed to attract the votes of young people, of union members, and of minorities to the degree necessary to win. And meanwhile, Trump’s utter lack of a campaign was more than made up for by the emotional dedication of his supporters. This was about more than just race – it was a sustained rejection of the country’s ruling class. But expect the media to try to make it about two things: race, and about Hillary Clinton’s lousy campaign. Ah, look, they’re doing it already.
The big winners from last night, beyond Donald Trump: Reince Priebus, who gets to keep his job; The Heritage Foundation, which bit the bullet and worked with Trump’s transition team on numerous points; Nate Silver, who got pounded by the left for a month for his poll skepticism only to be proven correct; TV networks who sold ads; Republican pragmatists who backed Trump while criticizing his excesses; Republican Senators who won back their majority while keeping Trump at arm’s length; Peter Thiel; pro-lifers and federalists, who will likely get two Supreme Court seats; Breitbart and Laura Ingraham and the pro-Trump factions of cable television, who were to the hilt defenders of Trump; Claremonsters; and civil libertarians, who probably will get to work with liberals again, which they love.
The big losers, beyond the Clinton family and Barack Obama: The Democratic Party, which now looks like a leaderless husk of what was once a coalition sure of its demographic destiny; the true NeverTrumpers who hoped Trump would lose big; John Podesta and the Clinton team; TV networks who garnered a new degree of hate from a frustrated electorate; James Comey, who will get it from both sides; old media conservatives who didn’t just reject but dismissed Trump and the phenomenon as mere celebrity worship; conservatives in the foreign policy space who explicitly backed her; any consultants who specialize in expensive GOTV efforts; the GOP autopsy; Bill Weld, who pretended to be a libertarian to try and get Hillary Clinton elected; and Joe Biden, who everyone will look back to as being able to beat Trump handily had he run.
A word about the overall failure of the media this cycle: it will be very interesting to see which reporters learn from this, and which ones double down on their ignorance. The majority of political reporters never seemed to get outside their bubble. They spoke to anti-Trump conservatives, and printed anti-Trump views from conservatives, but rarely would even publish the sorts of views I and others have been sounding for months about the real and rational gripes of Trump voters. Many in the media preferred the caricature to the real thing. If you are a member of the media who does not know anyone who was pro-Trump, who has no Trump voters among your family or friends, realize how thick your bubble is. Change this. Don’t stick to the old sources, who clearly didn’t know what was going on – add new ones, who offer the perspective from the ground.
On The Federalist Radio Hour over the past several months, we’ve tried to analyze things from the perspective of the likeliest polling result – which has pretty consistently been a Hillary Clinton victory. Had the polls gone steadily in the other direction, we would’ve spent more time on the possibility of a Trump victory. The challenge in analyzing that result is Trump’s unpredictability as a chief executive. He has destroyed the GOP as we knew it and remade it as a more nationalist and populist coalition, in favor of a great deal of ideas that ring of Keynesian spending (the first agenda item mentioned in his victory speech was rebuilding infrastructure). How does he adapt to working with Mitch McConnell and Paul Ryan, assuming he even wants to do that? To whom does he listen, given that he has ignored so many of his own advisors on so many areas of policy? These are things that are inherently impossible to predict for a man who has had three campaign managers in a year’s time.
What is clear is this: Donald Trump is the man Americans have chosen as their vehicle for the dramatic change they demand from Washington. They have utterly rejected the change offered in the eight year Barack Obama agenda as wholly insufficient. And they have given Trump the rare gift of a united government in order to make those changes happen. They have tossed aside the assumptions of an elite class of gatekeepers and commentators whose opinions they disrespect and disavow. And they have sent a message to Washington that nothing less than wholesale change will satisfy them, including a change in the fundamental character of the commander in chief.
As a believer in constitutional limited government, this is an electoral result I find hopeful for more reason than one. Trump is not a believer in that, but there are those around him who do. More importantly, his attitude and character are so abrasive to the sentiments of the American elites that it almost has to result in a reassertion of the powers of other branches of government, particularly the Congress. This would be a very good thing, not just for the next four years, but for a generation that has seen the executive office expanded without any pause. It may take a change agent like Trump to necessitate a return to the limitations the Constitution demands.
So we’re doing this, America. President Donald Trump. It will be a crazy ride for the next four years. Let’s see what comes next.
For the past six months, one big question has loomed over the 2016 election: Is the candidacy of Donald J. Trump an amusing bit of reality TV or a terrifying and dangerous challenge to the country’s political system? At first, Trump’s popularity was easy to dismiss. It was nothing more than a phase, the result of Trump’s celebrity status and his talent for provocation. His antics made it hard to look away, but it was easy to convince yourself that Trump mania would never lead to anything serious, like the Republican nomination.
It was especially easy to come to that conclusion if you were reading FiveThirtyEight, the statistics-driven news website founded by Nate Silver. Since the beginning of Trump’s campaign last June, the election guru and his colleagues have been consistently bearish on Trump’s chances. Silver, who made his name by using cold hard math to call 49 out of 50 states in the 2008 general election and all 50 in 2012, has served as a reassuring voice in the midst of Trump’s shocking rise. For those of us who didn’t want to believe we lived in a country where Donald Trump could be president, Silver’s steady, level-headed certainty felt just as soothing as his unwavering confidence in Barack Obama’s triumph over Mitt Romney four years ago.
If any of you are worried about a Trump presidency just read some of Nate Silver’s stuff and you will see how unlikely it is
What exactly has Silver been saying? In September, he told CNN’s Anderson Cooper that Trump had a roughly 5-percent chance of beating his GOP rivals. In November, he explained that Trump’s national following was about as negligible as the share of Americans who believe the Apollo moon landing was faked. On Twitter, he compared Trump to the band Nickelback, which he described as being “[d]isliked by most, super popular with a few.” In a post titled “Why Donald Trump Isn’t A Real Candidate, In One Chart,” Silver’s colleague Harry Enten wrote that Trump had a better chance of “playing in the NBA Finals” than winning the Republican nomination.
Multiple times over the past six months, Silver has reminded his readers that four years ago, daffy fly-by-nighters like Herman Cain and Michele Bachmann led the GOP field at various points. Trump’s poll numbers, he wrote, would drop just like theirs had. In one August post, “Donald Trump’s Six Stages of Doom,” Silver actually laid out a schedule for the candidate’s inevitable collapse.
That collapse is running late. Here we are, a few days from the Iowa caucus, and Trump’s poll numbers haven’t gone down at all. The latest data suggest that he leads his closest rival, Ted Cruz, by about 5 points in Iowa and almost 20 points in New Hampshire. He has also recently become the top GOP contender according to the betting market Betfair. Meanwhile, members of the so-called GOP establishment, who previously expressed open contempt for Trump, now seem to be warming to him. On Jan. 16, the Washington Post quoted the former finance chairman for Mitt Romney’s 2012 campaign saying there was a “growing feeling” among many in the GOP that Trump “may be the guy.” Bob Dole praised Trump in the New York Times as a dealmaker who has the “right personality” to do business with Congress. Orrin Hatch, the most senior Republican in the Senate, told CNN he was “coming around” on Trump.
It’s clear, now, that Silver and his fellow analysts at FiveThirtyEight underestimated Trump. Silver himself recently admitted as much, writing in a blog post published last week that he’d been too skeptical about Trump’s chances. “Things are lining up better for Trump than I would have imagined,” he wrote, adding that “[i]f, like me, you expected” the show to have been over by now, “you have to revisit your assumptions.”
Everyone makes mistakes—even Nate Silver. It’s also entirely possible that the Trump collapse is still to come and that as soon as we see the actual voting process play out, the hollowness of his popularity will reveal itself. Still, Silver is right that his assumptions are worth revisiting. Maybe the Trump phenomenon is so unprecedented that no statistical model could have foreseen it. Or maybe it took a candidate as unique as Donald Trump to reveal the flaws and limitations of Silver’s prediction machine.
* * *
To understand how Silver got Trump wrong, it helps to understand what exactly he was skeptical about, and why. A look at his campaign coverage reveals that two basic beliefs guided Silver’s thinking.
The first centered on the polls showing Trump miles ahead of his rivals. These polls have been plentiful, and they have been consistent. To pick two more or less at random, CNN showed Trump’s support in Iowa grow from 22 percent in August to 37 percent this past week. According to national polls conducted by CBS and the New York Times, he has gone from polling at 24 percent nationally in August to 36 percent earlier this month.
None of this has impressed Silver. No matter what the polls said, as he wrote on FiveThirtyEight week after week, it was important to remember they were fundamentally unreliable and not at all indicative of how primary voters would ultimately cast their ballots. This has always been true of pre-primary polls, Silver argued, in part because primary voters have historically waited until the last minute to decide whom to support and in part because the people answering questions from pollsters are not necessarily the ones who will end up actually voting.
Anything Silver says about polling carries weight. Polls are his bread and butter—the raw materials he filters through his proprietary model to predict the outcomes of elections. His expertise on which polls to ignore, which ones to trust, and how much to trust them is central to his political wisdom. The early national polls showing Trump in the lead, Silver wrote, were basically worthless. As he put it in a post titled “Donald Trump Is Winning The Polls—and Losing the Nomination,” they not only “lack empirical power to predict the nomination” but “describe a fiction.”
Silver thought that it was foolish of reporters and columnists to act like Trump’s numbers were significant. The fact that pundits insisted on investing them with so much importance proved they were motivated more by the demands of the news cycle than by a commitment to truth—a tendency Silver has always taken pride in avoiding.
The problem, Silver believed, wasn’t just that the media legitimized polls that didn’t deserve people’s attention. It was worse than that: By talking about Trump’s poll numbers like they mattered, the media risked distorting future polls, thereby reinforcing the false narrative of Trump’s dominance. “Some voters may be coughing up Trump’s name in polls because he’s the only candidate they’ve been hearing about,” Silver wrote in December, noting that the media has given Trump’s campaign “more coverage than literally all the other Republicans combined.”
Silver’s error, in retrospect, was to conflate his doubts about the polls with his doubts about Trump’s viability as a candidate. In other words, it’s perfectly possible for Silver to have been correct in saying the early polls did not constitute proof of a massive Trump lead, while also being wrong about the likelihood that Trump would become the nominee. This mistake is illustrated most clearly in that post headlined “Donald Trump’s Six Stages of Doom,” in which Silver asserted that “Trump’s campaign will fail by one means or another” before ticking off a bunch of reasons to be suspicious of the early polls that showed him in the lead. While the post made brief mention of Trump’s “poor organization in caucus states, poor understanding of delegate rules,” and his lack of “support from superdelegates,” it didn’t offer much on why Silver found it so unlikely that lots and lots of people would vote for him.
This brings us to the second basic belief guiding Silver’s skepticism about Trump mania. Polls aside, the history of modern American politics made it clear to him that a “Trump-like candidate” could never win the nomination.
What is a “Trump-like candidate”? Under Silver’s definition, it’s someone who has low favorability ratings and, more important, is hated by party leaders. Citing a theory laid out in The Party Decides—an influential work of political science which says that primary candidates don’t win without the support of the party establishment—Silver has argued that Trump was an almost certain loser. Even if Trump managed to survive until the Republican National Convention, Silver wrote, “the Republican Party would go to extraordinary lengths to avoid nominating him.”
The race has not played out that way. Indications in December that GOP leaders were either powerless against Trump or unwilling to go after him struck Silver as “perplexing”—precisely the emotion you would expect from a quantitatively inclined thinker confronted with a reality that hasn’t conformed to his calculations. In a chat with colleagues published on FiveThirtyEight, Silver discussed possible reasons why GOP leaders had not been more aggressive in snuffing out Trump earlier, when he might have been an easier target. “From the get-go, they haven’t seemed to have any plan at all for how to deal with Trump,” he wrote.
What’s crucial to note here is that Silver’s confidence about how the GOP would respond to Trump was never really based on any statistical calculations. Rather, in repeatedly citing The Party Decides, he was relying on a theory about how political parties work—one that’s been embraced by some of the very same pundits that Silver has defined himself against. And while it’s true that The Party Decides was an empirical work based on historical data, the notion that GOP leaders would find a way to kill Trump’s campaign is, on some level, premised on a belief that the individual actors who control the Republican Party would all act as rationally as Nate Silver would if he were in their shoes. When news reports came out this month that influential Republican donors were starting to think Trump wouldn’t be such a bad candidate, Silver wrote, with some exasperation, “the donor class is probably wrong.”
Maybe what happened here is that Silver was the one sober guy in a room full of drunks, powerless to stop irrational party leaders from taking unreliable polling data seriously. Even if you believe that establishment figures are only giving Trump a look because they despise his closest rival, Ted Cruz, it’s undeniable that their thinking is being informed by Trump’s numbers. The fact that Silver thinks those numbers are silly doesn’t matter. They were consequential, and now that the Iowa caucus is one week away, those consequences are becoming more and more serious.
Why was Silver so confident that the “party decides” theory would hold? One reason, surely, is that it always had in the past—if you want a recent example, think back to the mavericks of the 2012 GOP contest, who were squashed like bugs until party favorite Romney was the last man standing. But it also seems possible that Silver believed the GOP would stop Trump for a simpler reason: It was what he wanted to happen.
Silver did not respond to multiple requests for comment for this story, so the best I can do is venture a guess. Maybe, like many people who have watched Trump’s rise with increasing horror, Silver latched onto a narrative that justified rejecting the Apprentice star’s achievements, identifying them as symptoms of a media bubble rather than a reflection of real popular sentiment. If that’s the case, Silver turns out to have a good bit in common with the pundits that he and his unemotional, numbers-driven worldview were supposed to render obsolete. Faced with uncertainty, Silver chose to go all in on an outcome that felt right, one that meshed with his preexisting beliefs about how the world is supposed to work.
* * *
There is another, more narrow explanation for why Trump eluded Silver. As effective as the FiveThirtyEight approach was when applied to Obama vs. McCain and Obama vs. Romney, perhaps it just doesn’t work nearly as well when applied to primaries. If Silver’s system depends largely on interpreting poll numbers, how reliable can that system be if the pre–Iowa and New Hampshire polls are basically worthless? Garbage in, garbage out.
“I think figuring out what’s going on in a primary is more of an art than a science,” says Steve Kornacki, a political analyst at MSNBC who has been covering presidential campaigns since 2002. “There’s just so much more volatility, coming from so many different levels in a primary. And there’s a lot more art involved in figuring out what’s going on than there is in a general election, especially in an era when 80 percent of the country knows whether they’re team blue or team red and which way they vote.”
Of course, Silver knows this, and he has taken certain steps to compensate for it. In a 2,800-word blog post laying out FiveThirtyEight’s methodology for forecasting primaries, he explained how he and his team use state and national polls alongside party leader endorsements. He also left room for the possibility that FiveThirtyEight’s prediction “might be totally wrong.” “Forecasting primaries and caucuses is challenging, much more so than general elections,” Silver wrote, adding that “an unusual candidate like Donald Trump tends to have especially uncertain forecasts.”
Where does all that uncertainty leave FiveThirtyEight? In the months leading up to Iowa and New Hampshire, frequent Silver critic Matt Bruenig told me the FiveThirtyEight founder is “in a situation where the only thing he’s really capable of doing—the thing that he’s exceptional at—is not really available to him, so he ends up doing what normal reporters do.” Bruenig added: “It just makes him like everyone else. … Anyone can read The Party Decides and be like, ‘Oh yeah, this is what social science says will happen.’ ”
(It may not be entirely true that this GOP primary was a hopeless exercise for data journalists. Though early polls may not be the most solid data points, it’s possible that FiveThirtyEight could have done a better job interpreting them: As Kornacki points out, Silver’s insistence on comparing Trump to Joe Lieberman and Rudy Giuliani—candidates with high name recognition who led in primary polls before imploding—failed to consider that both Lieberman and Giuliani led their respective races very early, while Trump has built his lead more gradually. RealClearPolitics, which averages multiple polls, shows Trump starting at just 6 percent last July.)
In Silver’s defense, he has occasionally given voice to self-doubt. He concluded a Jan. 6 chat with FiveThirtyEight staff by saying, “Yeah, the pundits are probably full of shit, but there’s a chance we’re full of shit too, so let’s wait and see what happens.” For the most part, though, Silver his proclaimed his skepticism about Trump loudly, repeatedly, and unequivocally. His predictions of Trump’s collapse—at an event at the 92nd Street Y in September he literally told the audience to “calm down” about his supposed march to the nomination—have not betrayed much caution or uncertainty.
As irrational as it seems for a quantitative analyst to comment so confidently on something he knows he can’t reliably predict, it’s also not all that surprising. Silver has a website to run, after all, and that means covering Trump—and making predictions about him—whether the necessary data is available or not.
The theory that Donald Trump was a real threat to the status quo was a perfect target for Silver and his colleagues. Throughout 2015 and into 2016, they set out to prove that this media sensation was being amplified by a credulous, mathematically illiterate press corps. A Trump implosion would be a classic Silver victory, one that would demonstrate the superiority of rational, data-driven analysis over the chatter of insiders and vague notions of “momentum.”
Instead, the rise of Trump might have demonstrated the limits of Silver’s powers. As Dave Weigel wrote in the Washington Post recently, Trump’s enormous popularity—a tidal wave of support that Silver has said will soon abate—has been the story of the campaign. In his piece, Weigel argued that it wasn’t the first time a primary bid turned out to signal a major shift in the political winds, from the campaign of George Wallace in 1964, which Weigel said represented “a historic moment in the politics of backlash,” to that of Pat Robertson in 1988, which “cemented the influence of the religious right in Republican electoral politics.” While none of those candidates won their party’s nomination, it would have been irresponsible for the media to ignore the significance of their campaigns, as Silver has encouraged his audience, and the press, to do with Trump.
While it’s true that “the rise of Trump” may not end with Trump becoming the nominee, it has revealed, or perhaps even caused, a profound shift in the nation’s political climate. As Kornacki put it to me, “It took Donald Trump saying all this stuff”—floating the idea of denying Muslims entry into the United States, for instance—“to reveal there was a massive constituency for it.”
Missing the significance of Trumpism is a different kind of failure than, say, calling the 2012 election for Mitt Romney. It also might be a more damning one. Botching your general election forecast by a couple of percentage points suggests a flawed mathematical formula. Actively denying the reality of Trump’s success suggests Silver may never have been capable of explaining the world in a way so many believed he could in 2008 and 2012, when he was telling them how likely it was that Obama would become, and remain, the president.
“This is an extraordinary, unusual, utterly bizarre election year, in which events that have never happened before are happening,” says Blake Zeff, the editor of the political news site Cafe and a former campaign aide to Obama and Hillary Clinton. “That’s a nightmare scenario for a projection model that is predicated on historical trends.” While Zeff cautioned it was premature to pillory Silver for missing out on Trumpism, the point stands: What was true yesterday is not necessarily true today, and that’s a problem for Silver and his team of prognosticators.
In 2008, Silver emerged as a new kind of journalist. His data-driven approach to political analysis was a necessary corrective to a media herd that too often relied on gut feelings and received wisdom. So long as punditry continues to exist, thinkers like Silver will remain essential. But the rise of FiveThirtyEight hasn’t changed the fundamental purpose of journalism: to pay attention as the world changes and to try to understand what’s driving that change.
You could argue Silver never promised he was capable of doing those things—that all he ever intended to do was predict the future, not explain it. But Trump’s campaign, which is forcing Americans to ask themselves how such a hateful, boorish candidate could capture the imagination of so many of their fellow citizens, makes it clear that truly revelatory analysis must tell us “why,” not just “what.” If only Nate Silver could give us both.
Alexander Panetta
La Presse Canadienne
09 novembre 2016
Ses amitiés ont été mises à l’épreuve, ses méthodes contestées, mais au bout du compte, il a encore eu raison. Allan Lichtman a désormais prédit avec succès les résultats de neuf élections présidentielles consécutives – incluant la victoire de Donald Trump – grâce à un modèle qu’il a créé.
M. Lichtman est très critique des sondages et des journalistes politiques qui s’en inspirent, et affirme que son questionnaire en 13 parties est beaucoup plus probant dans ses prédictions que les cartes numérisées des batailles par État.
Le professeur d’histoire à l’American University à Washington a tout de même dit, mercredi, qu’il ne tirait aucune satisfaction à avoir eu raison sur la victoire du controversé républicain Donald Trump.
M. Lichtman estime que les analystes électoraux errent en étudiant une campagne comme une série de zones de combat – le nord en opposition au sud de la Floride, l’ouest par rapport à l’est de la Pennsylvanie, etc. Il préfère voir tout cela comme un jeu de dominos, les morceaux s’abattant les uns sur les autres.
Le professeur a dit croire que les campagnes américaines étaient l’affaire d’élans insufflés à un candidat ou à l’autre.
Au début des années 1980, un collègue et lui-même ont examiné les résultats électoraux depuis la guerre civile et ont repéré des tendances. Ils ont établi 13 affirmations vraies ou fausses, et déterminé que si la réponse à six d’entre elles ou plus était «fausse», le parti au pouvoir allait subir la défaite. Parmi ces affirmations figurent «l’économie n’est pas en récession»; «il n’y a pas de course véritable pour l’investiture du parti au pouvoir»; «le parti a remporté des sièges au cours des deux précédents demi-mandats» et «le candidat est charismatique ou un héros national».
La méthode a porté ses fruits chaque fois depuis 1984.
Cette fois, le sixième et ultime domino s’est abattu sur Hillary Clinton durant les primaires – en ayant une concurrence étonnamment forte de la part du sénateur Bernie Sanders.
M. Lichtman a rapidement prédit une victoire de M. Trump dans des entrevues, et s’est attiré la foudre de certains.
«Pas de courriels haineux. Mais une tonne de critiques», a dit le professeur âgé de 69 ans, qui avait déjà brigué un siège démocrate au Sénat dans le Maryland.
«Je crois que j’ai perdu tous mes amis démocrates, à tout le moins pour un certain moment. J’ai subi beaucoup de pressions pour changer ma prédiction», a-t-il confié.
Allan Lichtman, a distinguished professor of history at American University, created his « 13 Keys to the White House » more than 30 years ago—and he’s ready to predict who will win in 2016. (Peter Stevenson/The Washington Post)
When we sat down in May, he explained how he comes to a decision. Lichtman’s prediction isn’t based on horse-race polls, shifting demographics or his own political opinions. Rather, he uses a system of true/false statements he calls the « Keys to the White House » to determine his predicted winner.
And this year, he says, Donald Trump is the favorite to win.
Party Mandate: After the midterm elections, the incumbent party holds more seats in the U.S. House of Representatives than after the previous midterm elections.
Contest: There is no serious contest for the incumbent party nomination.
Incumbency: The incumbent party candidate is the sitting president.
Third party: There is no significant third party or independent campaign.
Short-term economy: The economy is not in recession during the election campaign.
Long-term economy: Real per capita economic growth during the term equals or exceeds mean growth during the previous two terms.
Policy change: The incumbent administration effects major changes in national policy.
Social unrest: There is no sustained social unrest during the term.
Scandal: The incumbent administration is untainted by major scandal.
Foreign/military failure: The incumbent administration suffers no major failure in foreign or military affairs.
Foreign/military success: The incumbent administration achieves a major success in foreign or military affairs.
Incumbent charisma: The incumbent party candidate is charismatic or a national hero.
Challenger charisma: The challenging party candidate is not charismatic or a national hero.
Lichtman, a distinguished professor of history at American University, sat down with The Fix this week to reveal who he thinks will win in November and why 2016 was the most difficult election to predict yet. Our conversation has been lightly edited for length and clarity.
THE FIX: Can you tell me about the keys, and how you use them to evaluate the election from the point where — I assume it’s very murky a year or two out, and they start to crystallize over the course of the election.
LICHTMAN: « The Keys to the White House » is a historically based prediction system. I derived the system by looking at every American presidential election from 1860 to 1980, and have since used the system to correctly predict the outcomes of all eight American presidential elections from 1984 to 2012.
The keys are 13 true/false questions, where an answer of « true » always favors the reelection of the party holding the White House, in this case the Democrats. And the keys are phrased to reflect the basic theory that elections are primarily judgments on the performance of the party holding the White House. And if six or more of the 13 keys are false — that is, they go against the party in power — they lose. If fewer than six are false, the party in power gets four more years.
So people who hear just the surface-level argument there might say, well, President Obama has a 58 percent approval rating, doesn’t that mean the Democrats are a shoo-in? Why is that wrong?
It absolutely does not mean the Democrats are a shoo-in. First of all, one of my keys is whether or not the sitting president is running for reelection, and right away, they are down that key. Another one of my keys is whether or not the candidate of the White House party is, like Obama was in 2008, charismatic. Hillary Clinton doesn’t fit the bill.
The keys have nothing to do with presidential approval polls or horse-race polls, with one exception, and that is to assess the possibility of a significant third-party campaign.
What about Donald Trump on the other side? He’s not affiliated with the sitting party, but has his campaign been an enigma in terms of your ability to assess this election?
Donald Trump has made this the most difficult election to assess since 1984. We have never before seen a candidate like Donald Trump, and Donald Trump may well break patterns of history that have held since 1860.
We’ve never before seen a candidate who’s spent his life enriching himself at the expense of others. He’s the first candidate in our history to be a serial fabricator, making up things as he goes along. Even when he tells the truth, such as, « Barack Obama really was born in the U.S., » he adds two lines, that Hillary Clinton started the birther movement, and that he finished it, even though when Barack Obama put out his birth certificate, he didn’t believe it. We’ve never had a candidate before who not just once, but twice in a thinly disguised way, has incited violence against an opponent. We’ve never had a candidate before who’s invited a hostile foreign power to meddle in American elections. We’ve never had a candidate before who’s threatened to start a war by blowing ships out of the water in the Persian Gulf if they come too close to us. We’ve never had a candidate before who has embraced as a role model a murderous, hostile foreign dictator. Given all of these exceptions that Donald Trump represents, he may well shatter patterns of history that have held for more than 150 years, lose this election even if the historical circumstances favor it.
We’re a little bit less than seven weeks out from the election today. Who do you predict will win in November?
Based on the 13 keys, it would predict a Donald Trump victory. Remember, six keys and you’re out, and right now the Democrats are out — for sure — five keys.
Key 1 is the party mandate — how well they did in the midterms. They got crushed.
Key number 3 is, the sitting president is not running.
Key number 7, no major policy change in Obama’s second term like the Affordable Care Act.
Key number 11, no major smashing foreign policy success.
And Key number 12, Hillary Clinton is not a Franklin Roosevelt.
One more key and the Democrats are down, and we have the Gary Johnson Key. One of my keys would be that the party in power gets a « false » if a third-party candidate is anticipated to get 5 percent of the vote or more. In his highest polling, Gary Johnson is at about 12 to 14 percent. My rule is that you cut it in half. That would mean that he gets six to seven, and that would be the sixth and final key against the Democrats.
So very, very narrowly, the keys point to a Trump victory. But I would say, more to the point, they point to a generic Republican victory, because I believe that given the unprecedented nature of the Trump candidacy and Trump himself, he could defy all odds and lose even though the verdict of history is in his favor. So this would also suggest, you know, the possibility this election could go either way. Nobody should be complacent, no matter who you’re for, you gotta get out and vote.
Do you think the fact that Trump is not a traditional Republican — certainly not an establishment Republican, from a rhetorical or policy perspective — contributes to that uncertainty over where he fits in with the standard methodology for evaluating the Keys?
I think the fact that he’s a bit of a maverick, and nobody knows where he stands on policy, because he’s constantly shifting. I defy anyone to say what his immigration policy is, what his policy is on banning Muslims, or whoever, from entering the United States, that’s certainly a factor. But it’s more his history in Trump University, the Trump Institute, his bankruptcies, the charitable foundation, of enriching himself at the expense of others, and all of the lies and dangerous things he’s said in this campaign, that could make him a precedent-shattering candidate.
It’s interesting, I don’t use the polls, as I’ve just explained, but the polls have very recently tightened. Clinton is less ahead than she was before, but it’s not because Trump is rising, it’s because Clinton is falling. He’s still around 39 percent in the polls. You can’t win if you can’t crack 40 percent.
As people realize the choice is not Gary Johnson, the only choice is between Trump and Clinton, those Gary Johnson supporters may move away from Johnson and toward Clinton, particularly those millennials. And, you know, I’ve seen this movie before. My first vote was in 1968, when I was the equivalent of a millennial, and lots of my friends, very liberal, wouldn’t vote for Hubert Humphrey because he was part of the Democratic establishment, and guess what? They elected Richard Nixon.
And, of course, as I have said for over 30 years, predictions are not endorsements. My prediction is based off a scientific system. It does not necessarily represent, in any way, shape or form, an Allan Lichtman or American University endorsement of any candidate. And of course, as a successful forecaster, I’ve predicted in almost equal measure both Republican and Democratic victories.
Regardless of who wins on Election Day, we will spend the next few years trying to unpack what the heck just happened. We know that Donald Trumpvoters are angry, and we know that they are fed up. By now, there have been so many attempts to explain Trumpism that the genre has become a target of parody.
But if you’re wondering about the widening fissure between red and blue America, why politics these days have become so fraught and so emotional, Kathy Cramer is one of the best people to ask. For the better part of the past decade, the political science professor has been crisscrossing Wisconsin trying to get inside the minds of rural voters.
Well before President Obama or the tea party, well before the rise of Trump sent reporters scrambling into the heartland looking for answers, Cramer was hanging out in dairy barns and diners and gas stations, sitting with her tape recorder taking notes. Her research seeks to understand how the people of small towns make sense of politics — why they feel the way they feel, why they vote the way they vote.
There’s been great thirst this election cycle for insight into the psychology of Trump voters. J.D. Vance’s memoir “Hillbilly Elegy” offers a narrative about broken families and social decay. “There is a lack of agency here — a feeling that you have little control over your life and a willingness to blame everyone but yourself,” he writes. Sociologist Arlie Hochschild tells a tale of perceived betrayal. According to her research, white voters feel the American Dream is drifting out of reach for them, and they are angry because they believe minorities and immigrants have butted in line.
Cramer’s recent book, “The Politics of Resentment,” offers a third perspective. Through her repeated interviews with the people of rural Wisconsin, she shows how politics have increasingly become a matter of personal identity. Just about all of her subjects felt a deep sense of bitterness toward elites and city dwellers; just about all of them felt tread on, disrespected and cheated out of what they felt they deserved.
Cramer argues that this “rural consciousness” is key to understanding which political arguments ring true to her subjects. For instance, she says, most rural Wisconsinites supported the tea party’s quest to shrink government not out of any belief in the virtues of small government but because they did not trust the government to help “people like them.”
“Support for less government among lower-income people is often derided as the opinions of people who have been duped,” she writes. However, she continues: “Listening in on these conversations, it is hard to conclude that the people I studied believe what they do because they have been hoodwinked. Their views are rooted in identities and values, as well as in economic perceptions; and these things are all intertwined.”
Rural voters, of course, are not precisely the same as Trump voters, but Cramer’s book offers an important way to think about politics in the era of Trump. Many have pointed out that American politics have become increasingly tribal; Cramer takes that idea a step further, showing how these tribal identities shape our perspectives on reality.
It will not be enough, in the coming months, to say that Trump voters were simply angry. Cramer shows that there are nuances to political rage. To understand Trump’s success, she argues, we have to understand how he tapped into people’s sense of self.
Recently, Cramer chatted with us about Trump and the future of white identity politics.
(As you’ll notice, Cramer has spent so much time with rural Wisconsinites that she often slips, subconsciously, into their voice. We’ve tagged those segments in italics. The interview has also been edited for clarity and length.)
For people who haven’t read your book yet, can you explain a little bit what you discovered after spending so many years interviewing people in rural Wisconsin?
Cramer: To be honest, it took me many months — I went to these 27 communities several times — before I realized that there was a pattern in all these places. What I was hearing was this general sense of being on the short end of the stick. Rural people felt like they’re not getting their fair share.
That feeling is primarily composed of three things. First, people felt that they were not getting their fair share of decision-making power. For example, people would say: All the decisions are made in Madison and Milwaukee and nobody’s listening to us. Nobody’s paying attention, nobody’s coming out here and asking us what we think. Decisions are made in the cities, and we have to abide by them.
Second, people would complain that they weren’t getting their fair share of stuff, that they weren’t getting their fair share of public resources. That often came up in perceptions of taxation. People had this sense that all the money is sucked in by Madison, but never spent on places like theirs.
And third, people felt that they weren’t getting respect. They would say: The real kicker is that people in the city don’t understand us. They don’t understand what rural life is like, what’s important to us and what challenges that we’re facing. They think we’re a bunch of redneck racists.
So it’s all three of these things — the power, the money, the respect. People are feeling like they’re not getting their fair share of any of that.
Was there a sense that anything had changed recently? That anything occurred to harden this sentiment? Why does the resentment seem so much worse now?
Cramer: These sentiments are not new. When I first heard them in 2007, they had been building for a long time — decades.
Look at all the graphs showing how economic inequality has been increasing for decades. Many of the stories that people would tell about the trajectories of their own lives map onto those graphs, which show that since the mid-’70s, something has increasingly been going wrong.
It’s just been harder and harder for the vast majority of people to make ends meet. So I think that’s part of this story. It’s been this slow burn.
Resentment is like that. It builds and builds and builds until something happens. Some confluence of things makes people notice: I am so pissed off. I am really the victim of injustice here.
So what do you think set it all off?
Cramer: The Great Recession didn’t help. Though, as I describe in the book, people weren’t talking about it in the ways I expected them to. People were like,Whatever, we’ve been in a recession for decades. What’s the big deal?
Part of it is that the Republican Party over the years has honed its arguments to tap into this resentment. They’re saying: “You’re right, you’re not getting your fair share, and the problem is that it’s all going to the government. So let’s roll government back.”
So there’s a little bit of an elite-driven effect here, where people are told: “You are right to be upset. You are right to notice this injustice.”
Then, I also think that having our first African American president is part of the mix, too. Now, many of the people that I spent time with were very intrigued by Barack Obama. I think that his race, in a way, signaled to people that this was different kind of candidate. They were keeping an open mind about him. Maybe this person is going to be different.
But then when the health-care debate ramped up, once he was in office and became very, very partisan, I think people took partisan sides. And truth be told, I think many people saw the election of an African American to the presidency as a threat. They were thinking: Wow something is going on in our nation and it’s really unfamiliar, and what does that mean for people like me?
I think in the end his presence has added to the anxieties people have about where this country is headed.
One of the endless debates among the chattering class on Twitter is whether Trump is mostly a phenomenon related to racial resentment, or whether Trump support is rooted in deeper economic anxieties. And a lot of times, the debate is framed like it has to be one or the other — but I think your book offers an interesting way to connect these ideas.
Cramer: What I heard from my conversations is that, in these three elements of resentment — I’m not getting my fair share of power, stuff or respect — there’s race and economics intertwined in each of those ideas.
When people are talking about those people in the city getting an “unfair share,” there’s certainly a racial component to that. But they’re also talking about people like me [a white, female professor]. They’re asking questions like, how often do I teach, what am I doing driving around the state Wisconsin when I’m supposed to be working full time in Madison, like, what kind of a job is that, right?
It’s not just resentment toward people of color. It’s resentment toward elites, city people.
And maybe the best way to explain how these things are intertwined is through noticing how much conceptions of hard work and deservingness matter for the way these resentments matter to politics.
We know that when people think about their support for policies, a lot of the time what they’re doing is thinking about whether the recipients of these policies are deserving. Those calculations are often intertwined with notions of hard work, because in the American political culture, we tend to equate hard work with deservingness.
And a lot of racial stereotypes carry this notion of laziness, so when people are making these judgments about who’s working hard, oftentimes people of color don’t fare well in those judgments. But it’s not just people of color. People are like: Are you sitting behind a desk all day? Well that’s not hard work. Hard work is someone like me — I’m a logger, I get up at 4:30 and break my back. For my entire life that’s what I’m doing. I’m wearing my body out in the process of earning a living.
In my mind, through resentment and these notions of deservingness, that’s where you can see how economic anxiety and racial anxiety are intertwined.
The reason the “Trumpism = racism” argument doesn’t ring true for me is that, well, you can’t eat racism. You can’t make a living off of racism. I don’t dispute that the surveys show there’s a lot of racial resentment among Trump voters, but often the argument just ends there. “They’re racist.”It seems like a very blinkered way to look at this issue.
Cramer: It’s absolutely racist to think that black people don’t work as hard as white people. So what? We write off a huge chunk of the population as racist and therefore their concerns aren’t worth attending to?
How do we ever address racial injustice with that limited understanding?
Of course [some of this resentment] is about race, but it’s also very much about the actual lived conditions that people are experiencing. We do need to pay attention to both. As the work that you did on mortality rates shows, it’s not just about dollars. People are experiencing a decline in prosperity, and that’s real.
The other really important element here is people’s perceptions. Surveys show that it may not actually be the case that Trump supporters themselves are doing less well — but they live in places where it’s reasonable for them to conclude that people like them are struggling.
Support for Trump is rooted in reality in some respects — in people’s actual economic struggles, and the actual increases in mortality. But it’s the perceptionsthat people have about their reality are the key driving force here. That’s been a really important lesson from this election.
I want to get into this idea of deservingness. As I was reading your book it really struck me that the people you talked to, they really have a strong sense of what they deserve, and what they think they ought to have. Where does that come from?
Cramer: Part of where that comes from is just the overarching story that we tell ourselves in the U.S. One of the key stories in our political culture has been the American Dream — the sense that if you work hard, you will get ahead.
Well, holy cow, the people I encountered seem to me to be working extremely hard. I’m with them when they’re getting their coffee before they start their workday at 5:30 a.m. I can see the fatigue in their eyes. And I think the notion that they are not getting what they deserve, it comes from them feeling like they’re struggling. They feel like they’re doing what they were told they needed to do to get ahead. And somehow it’s not enough.
Oftentimes in some of these smaller communities, people are in the occupations their parents were in, they’re farmers and loggers. They say, it used to be the case that my dad could do this job and retire at a relatively decent age, and make a decent wage. We had a pretty good quality of life, the community was thriving. Now I’m doing what he did, but my life is really much more difficult.
I’m doing what I was told I should do in order to be a good American and get ahead, but I’m not getting what I was told I would get.
The hollowing out of the middle class has been happening for everyone, not just for white people. But it seems that this phenomenon is only driving some voters into supporting Trump. One theme of your book is how we can take the same reality, the same facts, but interpret them through different frames of mind and come to such different conclusions.
Cramer: It’s not inevitable that people should assume that the decline in their quality of life is the fault of other population groups. In my book I talk about rural folks resenting people in the city. In the presidential campaign, Trump is very clear about saying: You’re right, you’re not getting your fair share, and look at these other groups of people who are getting more than their fair share. Immigrants. Muslims. Uppity women.
But here’s where having Bernie Sanders and Donald Trump running alongside one another for a while was so interesting. I think the support for Sanders represented a different interpretation of the problem. For Sanders supporters, the problem is not that other population groups are getting more than their fair share, but that the government isn’t doing enough to intervene here and right a ship that’s headed in the wrong direction.
One of the really interesting parts of your book is where you discuss how rural people seem to hate government and want to shrink it, even though government provides them with a lot of benefits. It raises the Thomas Frank question — on some level, are people just being fooled or deluded?
Cramer: There is definitely some misinformation, some misunderstandings. But we all do that thing of encountering information and interpreting it in a way that supports our own predispositions. Recent studies in political science have shown that it’s actually those of us who think of ourselves as the most politically sophisticated, the most educated, who do it more than others.
So I really resist this characterization of Trump supporters as ignorant.
There’s just more and more of a recognition that politics for people is not — and this is going to sound awful, but — it’s not about facts and policies. It’s so much about identities, people forming ideas about the kind of person they are and the kind of people others are. Who am I for, and who am I against?
Policy is part of that, but policy is not the driver of these judgments. There are assessments of, is this someone like me? Is this someone who gets someone like me?
I think all too often, we put our energies into figuring out where people stand on particular policies. I think putting energy into trying to understand the way they view the world and their place in it — that gets us so much further toward understanding how they’re going to vote, or which candidates are going to be appealing to them.
All of us, even well-educated, politically sophisticated people interpret facts through our own perspectives, our sense of what who we are, our own identities.
I don’t think that what you do is give people more information. Because they are going to interpret it through the perspectives they already have. People are only going to absorb facts when they’re communicated from a source that they respect, from a source who they perceive has respect for people like them.
And so whenever a liberal calls out Trump supporters as ignorant or fooled or misinformed, that does absolutely nothing to convey the facts that the liberal is trying to convey.
If, hypothetically, we see a Clinton victory on Tuesday, a lot of people have suggested that she should go out and have a listening tour. What would be her best strategy to reach out to people?
Cramer: The very best strategy would be for Donald Trump, if he were to lose the presidential election, to say, “We need to come together as a country, and we need to be nice to each other.”
That’s not going to happen.
As for the next best approach … well I’m trying to be mindful of what is realistic. It’s not a great strategy for someone from the outside to say, “Look, we really do care about you.” The level of resentment is so high.
People for months now have been told they’re absolutely right to be angry at the federal government, and they should absolutely not trust this woman, she’s a liar and a cheat, and heaven forbid if she becomes president of the United States. Our political leaders have to model for us what it’s like to disagree, but also to not lose basic faith in the system. Unless our national leaders do that, I don’t think we should expect people to.
Maybe it would be good to end on this idea of listening. There was thisrecent interview with Arlie Hochschild where someone asked her how we could empathize with Trump supporters. This was ridiculed by some liberals on Twitter. They were like, “Why should we try to have this deep, nuanced understanding of people who are chanting JEW-S-A at Trump rallies?” It was this really violent reaction, and it got me thinking about your book.
Cramer: One of the very sad aspects of resentment is that it breeds more of itself. Now you have liberals saying, “There is no justification for these points of view, and why would I ever show respect for these points of view by spending time and listening to them?”
Thank God I was as naive as I was when I started. If I knew then what I know now about the level of resentment people have toward urban, professional elite women, would I walk into a gas station at 5:30 in the morning and say, “Hi! I’m Kathy from the University of Madison”?
I’d be scared to death after this presidential campaign! But thankfully I wasn’t aware of these views. So what happened to me is that, within three minutes, people knew I was a professor at UW-Madison, and they gave me an earful about the many ways in which that riled them up — and then we kept talking.
And then I would go back for a second visit, a third visit, a fourth, fifth and sixth. And we liked each other. Even at the end of my first visit, they would say, “You know, you’re the first professor from Madison I’ve ever met, and you’re actually kind of normal.” And we’d laugh. We got to know each other as human beings.
That’s partly about listening, and that’s partly about spending time with people from a different walk of life, from a different perspective. There’s nothing like it. You can’t achieve it through online communication. You can’t achieve it through having good intentions. It’s the act of being with other people that establishes the sense we actually are all in this together.
As Pollyannaish as that sounds, I really do believe it.
Hillary Clinton a reçu en avance des questions qui lui ont été posées lors de débats de la primaire démocrate, révèlent des emails publiés lundi par WikiLeaks, qui confirment des accusations lancées par Donald Trump.
De nouveaux emails publiés lundi par WikiLeaks embarrassent la campagne Clinton. Ils démontrent qu’Hillary Clinton avait reçu en avance des questions qui allaient lui être posés lors des débats de la primaire démocrate.
« Une des questions qui sera posée à HRC proviendra d’une femme qui a une éruption cutanée »
Un des emails rendus publics est particulièrement parlant : rédigé par l’actuelle présidente intérimaire du Parti démocrate, Donna Brazile, il est adressé à John Podesta, président de la campagne de Mme Clinton et Jennifer Palmieri, directrice de la communication de la candidate.
Le message est daté du 5 mars, veille d’un débat qui s’est déroulé dans la ville septentrionale de Flint, devenue symbole des injustices sociales aux Etats-Unis en raison de son réseau d’eau gravement contaminé au plomb. « Une des questions qui sera posée à HRC (Hillary Rodham Clinton, NDLR) proviendra d’une femme qui a une éruption cutanée », avertit Donna Brazile, qui officiait alors comme commentatrice sur la chaîne CNN.
« Sa famille a été empoisonnée au plomb et elle demandera ce qu’Hillary pourrait faire pour les gens de Flint si elle devient présidente », précise Donna Brazile. Au débat le lendemain, Hillary Clinton avait en effet été interrogée par une femme qui avait dénoncé les problèmes cutanés de sa famille, même si les termes de la question énoncée étaient sensiblement différents.
« De temps en temps j’obtiens les questions à l’avance »
Dans un message du 12 mars, veille d’un débat organisé par CNN, Donna Brazile promet à Jennifer Palmieri d’en « envoyer quelques-unes supplémentaires », en faisant très vraisemblablement référence à des questions de débat.
Enfin, dans un autre email récemment révélé, Donna Brazile avait écrit : « De temps en temps j’obtiens les questions à l’avance ». Dans ce même message, la stratège du Parti démocrate sous-entendait que Hillary Clinton se verrait poser une question sur la peine de mort.
Après ces révélations, CNN a affirmé lundi que Donna Brazile avait donné sa démission de la chaîne. « Merci CNN. Honorée d’avoir été une politologue et commentatrice démocrate sur votre chaîne », a tweeté lundi Donna Brazile.
Cela confirme des accusations lancées par Donald Trump
Depuis des semaines le candidat républicain à la présidentielle, Donald Trump, répète que sa rivale a été avantagée dans la campagne de la primaire démocrate face à son principal concurrent Bernie Sanders, notamment en bénéficiant à l’avance des questions des débats. Donald Trump n’a pas présenté de preuves à l’appui de ses affirmations mais les faits lui ont ici donné raison.
Les emails rendus publics par WikiLeaks ont été piratés sur le compte de John Podesta, par des hackers proches du pouvoir russe, selon les services de renseignement américains. Le Parti démocrate n’a pas confirmé ni infirmé leur authenticité.
Selon un sondage récent, Barack Obama pourrait perdre six points de pourcentage le jour de l’élection présidentielle du fait de sa couleur. Le prix du préjugé racial pour le candidat qui s’est pourtant toujours gardé d’apparaître comme le champion de la minorité noire.
L’Obs
06 octobre 2008
Cela relève du non-dit et peu d’Américains l’avoueront en votant le 4 novembre mais le racisme reste, lundi 6 octobre, un préjugé latent dans cette élection historique qui pourrait porter au pouvoir le premier président noir des Etats-Unis, Barack Obama.
Le candidat démocrate à la Maison Blanche s’est toujours présenté comme celui de tous les Américains. Il s’est gardé d’apparaître comme le champion de la minorité noire mais s’est affirmé fier de sa double identité, lui, né d’un père kényan et d’une mère blanche du Kansas.« Les racistes nieront »
« Le racisme est un thème que notre pays ne peut se permettre d’ignorer. C’est une impasse qui nous bloque depuis des années », avait lancé au printemps le sénateur de 47 ans.
Selon un sondage récent de l’université de Stanford, Barack Obama pourrait perdre six points de pourcentage le jour de l’élection présidentielle du fait de sa couleur. Le prix du préjugé racial.
« La race est un facteur pour ceux qui voteront pour ou contre Barack Obama », explique Gary Weaver, professeur à l’American University et directeur de l’Institut de gestion des relations interculturelles.
« Certains Blancs ne voteront jamais pour un Noir. Mais il est peu probable qu’ils l’admettront publiquement. Ils pourront le faire lors d’un sondage anonyme », explique-t-il à l’AFP.
« Les racistes nieront le plus souvent qu’ils sont influencés dans leur vote par la race car c’est inacceptable socialement. Mais, dans l’isoloir, ils voteront vraisemblablement contre Obama », poursuit Gary Weaver.
Pas un obstacle mais une question centrale
Les Américains appellent ce phénomène « l’effet Bradley », du nom d’un ancien maire noir de Los Angeles Tom Bradley, battu à l’élection de gouverneur de Californie alors que tous les sondages le donnaient gagnant.
« La race peut être un obstacle mais ce n’est pas une question primordiale pour beaucoup d’Américains. Elle reste néanmoins centrale pour quelques-uns, en particulier les ruraux blancs des Etats du sud », observe Paul Herrnson, professeur à l’université du Maryland (est).
« Beaucoup de racistes ne voteront tout simplement pas, le 4 novembre. Certains voteront pour McCain », le candidat républicain, estime Gary Weaver, universitaire blanc, marié à une Noire il y a 38 ans, quand des Etats interdisaient encore les unions mixtes.
« Plus de 90% des Noirs devraient voter Obama, ainsi qu’une majorité des Hispaniques et une proportion énorme des jeunes. Ces trois catégories d’électeurs devraient contrebalancer ceux qui ne voteront jamais pour un candidat noir », souligne-t-il.
« Très peu d’Américains admettent qu’ils sont racistes, si ce n’est quelques milliers de Néo-Nazis, ou de membres du Ku Klux Klan, qui ne sont plus que 1.000 à 2.000 dans le Sud. L’Américain moyen ne l’avouera jamais », assure Gary Weaver.
Pas de problèmes chez les jeunes
« Il y a une évolution parmi les jeunes, eux n’ont pas de problème à fréquenter ceux qui sont différents », se réjouit Bryan Monroe, rédacteur en chef adjoint d’Ebony, le plus ancien magazine noir américain.
« Le plus grand fossé se trouve entre les personnes âgées blanches et les jeunes. Si les jeunes votent, ils décideront de cette élection », renchérit M. Weaver.
« Ils ont grandi après la lutte pour les droits civiques, ont appris à l’école que l’Amérique était censée être multiculturelle, plurielle, égalitaire. Pour eux, Obama est le représentant de cette société-là », relève-t-il.
Les Noirs ne représentent plus que 13% de la population américaine (40 millions), derrière les Hispaniques (42 millions).
Concentrée dans les Etats du Nord industriel et au sud de la Virginie, la communauté noire urbaine vit le plus souvent séparée des Blancs, dans des quartiers ghettoïsés.
Les inégalités sociales sont frappantes. Dans les prisons, il y a six fois plus de Noirs que de Blancs. Un Noir sur 15 est un détenu.
Et si les préjugés racistes reculent, ils n’ont pas disparu. Ainsi, sur le campus d’une université de l’Oregon, une effigie de Barack Obama vient d’être retrouvée, pendue à un arbre. (avec AFP)
Vers 11h30 mardi soir, j’ai quitté les studios de CBS à New York et j’ai marché en téléphonant à ma femme. Nous avons parlé de l’élection. Nous avons parlé de Donald Trump président. Nous avons parlé, juste pour parler, mais nous n’avons pas parlé longtemps. Nous devions travailler. Je devais écrire et elle devait réfléchir à ce qu’elle dirait à ses étudiants, parmi lesquelles beaucoup d’Hispano-américains, et parmi ceux-ci beaucoup d’enfants d’immigrés.
En rentrant, j’ai surpris une conversation entre deux policiers. Ils étaient en dehors du bâtiment, en service. Ils étaient noirs. Et ils avaient besoin de parler encore et encore. Je me suis approché et j’ai rejoint leur conversation. Aucun d’eux ne m’a interrogé ou chassé. A la place, ils m’ont invité à partager leur peine.
L’ère de l’impunité
«J’y crois pas, je peux pas le croire», a dit un des agents, le plus jeune des deux. L’autre s’est contenté de remuer la tête. J’ai demandé au plus jeune ce qu’il pensait de tout ça, du président Donald Trump. «C’est sérieux, mon gars, c’est sérieux. Qui dois-je protéger maintenant?» Il a regardé son propre uniforme. «Pourquoi est-ce que je porte cet uniforme?» Il n’a pas eu besoin d’expliquer.
Le Donald Trump qui a gagné l’élection présidentielle ce mardi est le même Donald Trump qui a demandé l’exécution de cinq jeunes garçons accusés d’un crime qu’ils n’avaient en fait pas commis. C’est le Trump qui s’est présenté comme le candidat de la loi et de l’ordre. L’âge de Trump sera une ère où la police pourra agir en toute impunité. En tant qu’agent de police de couleur, il savait sans doute mieux que quiconque que ce sont les gens qui nous ressemblent, les basanés, les noirs, qui devront faire face à la force brute de cette impunité.
Les commentateurs et observateurs attribueront la victoire de Trump au «populisme», à son message «anti-élites». C’est un non-sens. Trump s’est présenté comme un combattant nationaliste en faveur de l’Amérique blanche. Il a promis de chasser les immigrants hispaniques. Il a promis de chasser les musulmans des Etats-Unis. Il a refusé de reconnaître la légitimité de Barack Obama, le présentant jusqu’à aujourd’hui comme une sorte d’usurpateur de l’autorité légitime. Lorsqu’il a dû faire face aux relents fétides de la réaction blanche, des suprématistes blancs aux antisémites et nationalistes, il a cligné de l’œil et ils l’ont acclamé en retour. Ils avaient en effet de bonnes raisons de le faire.
Plus que toute autre chose, Trump promet une restauration de l’autorité des blancs
Plus que toute autre chose, Trump promet une restauration de l’autorité des blancs. Après huit ans de présidence d’un noir, huit années durant lesquelles l’Amérique cosmopolite a exercé son pouvoir et son influence, huit années durant lesquelles les femmes se sont affirmées et durant lesquelles les noirs ont déclaré que leurs vies ne comptaient pas pour rien, des millions d’Américains blancs ont dit qu’ils en avaient assez. Ils en avaient assez de ce monde et voulaient retrouver celui d’avant. Et bien qu’il soit tentant de voir cela uniquement comme une partie d’un anti-élitisme aveugle, cela n’explique pas la relative unité des électeurs blancs lors de ce vote. Trump n’a pas seulement attiré les blancs des classes laborieuses mais également les riches et ceux qui avaient fait des études supérieures. Il l’a même emporté chez les jeunes blancs. Dix-sept mois après l’annonce de sa candidature, des millions d’Américains blancs se sont pressés aux urnes pour mettre Trump à la Maison-Blanche. Ils l’ont fait en tant qu’Herrenvolk blanc, peuple dominateur racialisé et radicalisé par Trump.
La politique du communautarisme blanc
Il y a alors un argument facile: comment cela pourrait-il être une question de race alors que Trump a convaincu aussi des électeurs qui avaient voté Obama ? Il y a une réponse facile: John McCain a été complaisant avec des craintes raciales et Mitt Romney a joué sur le ressentiment raciste mais tous deux ont refusé d’aller plus loin. Pour citer George Wallace, ils ont refusé de crier au «nègre». C’est important. En rejetant la politique du racisme explicite et de la réaction blanche, ils ont fait du champ de bataille politique un lieu de préoccupations officiellement aveugles aux questions raciales.
La question raciale était toujours partie intégrante des conflits, c’est inévitable, mais ni les libéraux ni les conservateurs ne s’en prenaient à l’idée d’une démocratie plurielle et multiraciale. Je pensais alors que cela signifiait que nous avions un consensus. Il semble en réalité que nous n’avions qu’une accalmie, et que Trump l’a faite voler en éclats. Par ses jérémiades contre les Hispano-américains et les musulmans, par ses visions de villes contre-utopiques et de réfugiés radicalisés, Trump a dit aux Américains que leurs peurs et leur colère étaient justifiées, que cette peur et et cette colère devaient être le fil conducteur de la politique. Trump a forgé la politique du communautarisme blanc, et les blancs se la sont appropriée.
Voilà ce que nous devons comprendre: c’est déjà arrivé par le passé. Pendant 10 ans, après la guerre d’indépendance (de 1775 à 1783), une coalition d’anciens esclaves et de fermiers blancs a tenté de forger la démocratie dans l’ancienne confédération. Avec l’aide du gouvernement fédéral, ils sont parvenus à de réelles victoires et ont obtenu des gains importants. Mais leur succès a nourri une réaction violente de la part de sudistes blancs en colère, furieux de devoir partager le pouvoir avec les noirs et leurs alliés du nord, prêts à assassiner, piqués par la seule notion d’égalité sociale. Ces blancs menèrent une guerre contre les gouvernements de la reconstruction, et lorsqu’ils l’emportèrent, ils déclarèrent le sud sauvé.
Quelques décennies plus tard, un autre groupe de noirs et de blancs, en Caroline du Nord cette fois-ci, s’unirent pour affronter les réactionnaires et établir la démocratie. Pendant une brève période, ils réussirent. Travaillant ensemble en tant que «fusionistes», ils construisirent des écoles, améliorèrent la situation, établirent un gouvernement véritablement représentatif dans le sud. La réaction ne se fit pas attendre. Certains blancs abandonnèrent la suprématie blanche. Mais pas la plupart d’entre eux. Utilisant la violence et le terrorisme, ils affrontèrent les fusionistes et établirent un régime de domination blanche qui dura jusqu’au XXème siècle, pour n’être démantelé que lors de notre seconde reconstruction, le mouvement des droits civiques.
Lorsqu’un homme noir a remporté l’élection présidentielle, le sommet symbolique du pouvoir et des prérogatives des blancs aux Etats-Unis, nous avons fêté cela en tant que Nation. C’était prématuré
Dès que la reconstruction prit fin, il y eut une réaction. Elle n’était pas aussi forte que les précédentes. Elle amena au pouvoir des leaders qui reconnaissaient les problèmes de racisme et de discrimination raciale tout en jouant sur les peurs et les anxiétés des blancs. Après des années de lutte, nous étions arrivés à un accord: nous croyions à l’égalité. Et lorsqu’un homme noir a remporté l’élection présidentielle, le sommet symbolique du pouvoir et des prérogatives des blancs aux Etats-Unis, nous avons fêté cela en tant que Nation.
Cinquante ans après que le mouvement de libération des noirs a forcé les Etats-Unis à se montrer digne de ses idéaux, du moins sur le papier, il semble bien que c’était prématuré. Presque mécaniquement, les Américains blancs ont élu un homme qui promettait une forme de suprématie blanche. Nous ne sommes pas arrivés au terme de notre cycle de progrès et de réaction. Nous sommes toujours le pays qui a tué George Wallace. Nous sommes toujours le pays qui a tué Emmett Till.
Les Américains sont obstinément, congénitalement optimistes. Et les millions de personnes qui ont soutenu Trump voient quelque chose dans son visage. Ils y voient quelque chose qui leur donne de l’espoir. Ce que j’y vois, c’est un homme qui a donné du pouvoir aux nationalistes blancs et l’a emporté. Je vois un homme qui a demandé l’expulsion des immigrés non-blancs et l’a emporté. Je vois un homme qui a promis de commettre des crimes de guerre contre des ennemis étrangers et l’a emporté. Je vois un homme qui donne du crédit à Rudy Giuliani et à d’autres qui considèrent les noirs comme des criminels potentiels à contrôler plutôt que comme des citoyens à respecter.
Après la «rédemption» du sud, les Américains noirs ou non-blancs partout dans le pays avaient touché le fond. Les blancs avaient imposé de nouvelles formes de discrimination et refusé de voir les pogroms et le terrorisme raciste qui laissaient des cicatrices dans le paysage américain. Dans quelques heures, des millions d’Américains se réveilleront et ce sera l’âge de Trump. Moi et des millions d’autres qui me ressemblent ouvriront les yeux et se trouveront face à une nouvelle «rédemption». Tout ce que nous pouvons espérer (nous ne pouvons plus que prier), c’est de ne pas à nouveau toucher le fond.
Il n’y a pas que la peur du chômage et de l’immigration: les électeurs blancs du candidat républicain espèrent qu’il rétablira la hiérarchie raciale mise à mal par l’actuel président.
«D’abord ils vous ignorent, ensuite ils vous raillent, puis ils vous combattent et enfin vous gagnez.» Cette citation est attribuée au Mahatma Gandhi. En règle générale, on la trouve affichée dans des cours de motivation ou sur des posters pour ados. Mais en février 2016, à la veille du Super Tuesday –mardi durant lequel une dizaine d’États américains ont voté pour élire le candidat républicain à l’élection présidentielle–, on a pu la trouver sur la page Instagram de Donald Trump, en légende d’une photographie le représentant lors d’un immense meeting qu’il avait donné en Alabama le jour d’avant.
Aussi pervers puisse-t-il paraître de voir un magnat de l’immobilier pro-guerre reprendre à son compte une citation, même apocryphe, de Gandhi, elle n’en est pas moins bien choisie. D’abord, nous l’avons ignoré, pensant qu’il ne s’agissait que d’un bouffon qui ne passerait pas l’été. Puis, nous nous sommes moqués de lui, pensant qu’il ne s’agissait que d’un bouffon qui ne passerait pas l’automne. Ensuite, les Républicains ont commencé à le combattre, terrorisés qu’ils étaient par l’attraction qu’il exerce sur les électeurs. Aujourd’hui, il l’emporte, avec plus de votes et de délégués que tous les autres candidats en lice et n’est plus qu’à quelques pas de l’investiture républicaine.
Nous savons désormais qu’il ne faut pas sous-estimer Donald Trump, mais nous peinons encore à comprendre son ascension. Pourquoi maintenant? Pourquoi, alors que les États-Unis sont plus puissants et plus solides qu’ils ne l’ont jamais été depuis le début de la «Grande Récession», est-ce que certains électeurs deviennent subitement sensibles à la démagogie nativiste? Comment Trump, qui a été décrit comme proto-fasciste, voire comme ouvertement fasciste, peut-il se retrouver en passe d’être le candidat du plus ancien parti des États-Unis?
Rancœurs raciales
Pour certains à gauche, Trump est le résultat de décennies de politiques divisant l’opinion –le résultat inévitable d’une stratégie politique républicaine qui a alimenté le ressentiment raciste blanc pour remporter les élections. «Pour bien comprendre la campagne de Trump, il faut le considérer non pas comme un signe mais comme la dernière manifestation de la stratégie déployée depuis un demi-siècle par le Parti républicain dans les États du Sud en misant sur le ressentiment racial et la solidarité blanche», écrit Jeet Heer dans New Republic.
Pour certains à droite, Trump est la réponse de la base aux élites républicaines, qui ont abandonné leurs électeurs de la classe ouvrière pour céder aux sirènes du libéralisme économique. «Le Parti républicain et le mouvement conservateur n’offrent quasiment rien aux membres de la classe ouvrière qui soutiennent Trump», a écrit Michael Brendan Dougherty dans Week. Aucune politique conservatrice évidente ne peut générer le type de croissance nécessaire à l’élévation du niveau de vie des électeurs des classes ouvrières.»
Ces explications ne s’excluent pas mutuellement; chacune touche à un aspect important du phénomène Trump. De la célèbre rhétorique de la «Welfare Queen» de Ronald Reagan à Newt Gingrich, qui avait qualifié Barack Obama de «food stamp president» (en référence aux coupons d’alimentation distribués aux Américains les plus démunis) lors des élections présidentielles de 2012, le Parti républicain a l’habitude de jouer avec les rancœurs raciales des blancs lorsqu’il souhaite emporter des élections. Les élites républicaines ne sont pas parvenues à offrir de solutions aux blancs pauvres, qui ont beaucoup souffert de l’effondrement du secteur industriel. Et il est vrai que la rapidité des changements économiques et culturels a poussé un nombre conséquent d’Américains à se tourner vers un candidat qui raille l’incompétence des politiciens et promet de faire retrouver au pays toute sa puissance.
Le principal catalyseur de l’ascension du magnat de l’immobilier est, je pense, Barack Obama
Néanmoins, aucune de ces théories ne répond à la question du «pourquoi maintenant?». Chacune de ces forces est en place depuis des années. Les salaires de la classe ouvrière américaine stagnent depuis longtemps et l’effondrement des offres d’emploi pour les non-diplômés est apparent depuis les années 1990, soit bien longtemps avant la crise de 2008. En outre, le déclin économique et social –ainsi que la frustration envers la concurrence internationale, que Trump n’a pas manqué d’aborder dans sa campagne– n’est pas réservé aux Américains blancs. Des millions d’Américains –en particulier les noirs et les Latino-Américains– font face depuis des années à des problèmes de baisse des perspectives économiques et de désintégration sociale sans pour autant se tourner vers des démagogues comme Trump.
L’ethnie joue un rôle dans chacune de ces analyses mais son rôle n’est pas encore assez central pour expliquer véritablement l’ascension de Trump. Non seulement son mouvement est presque exclusivement constitué de blancs mécontents mais c’est dans les États et les comtés enregistrant la plus forte polarisation raciale qu’il trouve la majeure partie de son électorat. Des sondages ont montré que, chez les électeurs blancs, le «ressentiment racial»augmentait avec le soutien à Trump.
Tout cela pour dire qu’il nous manque toujours le principal catalyseur de l’ascension du magnat de l’immobilier. Qu’est-ce qui a allumé ce feu aujourd’hui hors de contrôle? La réponse est, je pense, Barack Obama.
Stress du métissage
Plusieurs auteurs conservateurs ont essayé de lier le succès de Trump à la politique du président américain en pointant du doigt ses positions prétendument extrêmes. Toutefois, à bien des égards, Obama est un dirigeant on ne peut plus conventionnel, bien ancré au centre gauche du Parti démocrate. Ou, du moins, c’est ainsi qu’il a gouverné, sagement, sans s’écarter des sentiers battus. Des lois comme le plan de relance économique de 2009 et l’Affordable Care Act n’ont pas été imposées par l’extrême gauche; elles ont été élaborées à partir de proposions issues de la droite comme de la gauche et on été votées par une majorité de parlementaires élus pour trouver des solutions aux problèmes sociaux et économiques. On peut dire bien des choses sur Barack Obama mais, en dehors de la rhétorique conservatrice, il est loin d’être un radical.
On ne peut toutefois pas en dire autant d’Obama en tant que symbole politique. Dans ce pays formé et défini par une hiérarchie raciale rigide, son élection a été un événement radical, puisqu’elle a vu un homme issu de l’une des castes les plus basses de la nation parvenir au sommet de son paysage politique. De plus, il le fit avec le soutien appuyé des minorités: les asiatiques et les Latino-Américains formaient une partie importante des soutiens d’Obama. Et les Afro-Américains n’avaient jamais été aussi nombreux à voter en 2008.
Pour les observateurs progressistes, cela annonçait un nouvel électorat et, en théorie, une majorité durable. «L’avenir de la politique américaine appartient au parti qui pourra rassembler un électorat plus métissé, mieux éduqué et plus métropolitain, avait écrit Harold Meyerson dans le Washington Post après les élections de 2008. En d’autres termes, il appartient aux démocrates de Barack Obama.»
Pour des millions d’Américains blancs qui n’étaient pas habitués à la diversité et au cosmopolitisme, néanmoins, Obama fut un choc, une figure apparue de nulle part pour dominer la vie politique du pays. Et en parlant de «majorité démocrate émergente», il annonçait des temps où leurs voix (qui avaient élu George W. Bush, George H.W. Bush et Ronald Reagan) ne compteraient plus. Plus qu’un simple «changement», l’élection d’Obama leur apparut comme une inversion. Associée aux baisses des revenus et du niveau de vie causées par la crise de 2008, elle semblait sonner le glas d’une hiérarchie qui avait toujours placé les Américains blancs au sommet, les dotant au moins d’un statut, même s’ils n’en tiraient aucun avantage matériel.
Dans un article de 2011, Robin DiAngelo (professeur d’éducation multiculturelle à la Westfield State University) avait décrit un phénomène qu’elle avait qualifié de «fragilité blanche»:
«La fragilité blanche est un état dans lequel une quantité même minimum de stress racial apparaît intolérable et suscite toute une palette de réactions défensives, écrit-elle. Ces réactionsincluent des démonstrations ouvertes d’émotions telles que la colère, la peur ou la culpabilité, et des comportements tels que l’argumentation, le silence et la fuite de la situation ayant induit le stress. Ces comportements, à leur tour, servent à réinstaurer l’équilibre racial blanc.»
DiAngelo décrivait des comportements individuels dans le contexte de formations à la diversité au travail mais son analyse peut s’appliquer à la politique. Il est possible de considérer l’ascension d’Obama et l’avenir projeté d’une Amérique à majorité non blanche comme un stress racial donnant lieu à une réaction de la part de certains Américains blancs (réaction qui les pousse à un repli défensif).
L’ère Obama n’a pas tant annoncé une société post-races qu’une Amérique encore plus racialisée
On peut percevoir les manœuvres décrites par DiAngelo dans la croyance persistante, contre toute évidence, qu’Obama serait musulman –à l’automne 2015, ils étaient encore 29% d’Américains à le penser. C’est une manière de catégoriser Obama comme un «autre» dans une société où les insultes racistes sont publiquement inacceptables. Un autre exemple de ces peurs et anxiétés racialisées est le degré auquel les Américains blancs considèrent aujourd’hui la «discrimination inverse», ou «discrimination à rebours», comme un problème sérieux pour la vie nationale. Pour son American Values Survey (enquête sur les valeurs américaines) le Public Religion Research Institute a demandé à son panel si les «discriminations à l’encontre des blancs» constituaient un «problème significatif». Lors de l’enquête de2015, 43% des Américains sondés (parmi lesquels 60% de blancs de la classe ouvrière) avaient déclaré que la discrimination des blancs était devenue un problème aussi important que la discrimination des noirs et des autres minorités.
«Inversement majorité-minorité»
Les anxiétés décrites par DiAngelo et les peurs cataloguées par l’American Values Survey ont un véritable impact politique. Dans une étude publiée en 2014, les politologues Maureen Craig et Jennifer Richeson ont tenté de mesurer la «menace du statut perçu» par rapport aux données démographiques en étudiant comment les sondés répondaient lorsqu’on leur disait que la Californie comptait désormais plus de noirs, d’hispaniques et d’asiatiques que de blancs non hispaniques. En d’autres termes, comment les Américains blancs répondaient-ils à des questions politiques sans rapport lorsqu’on les exposait à un avenir où la majorité devenait minorité? Les résultats étaient très clairs. «Cette remarque sur l’inversement majorité-minorité en Californie a poussé les Américains blancs non politisés à tendre plus vers le Parti républicain», ont écrit Craig et Richeson. De même, «l’information sur les changements démographiques a poussé les Américains blancs (quelle que soit leur couleur politique) à soutenir plus fortement des positions politiques conservatrices liées au genre ethnique ou relativement neutres à ce sujet.»
L’ère Obama n’a pas tant annoncé une société post-races qu’une Amérique encore plus racialisée, dans laquelle des millions de blancs ont découvert leur statut racial et se sont mis à s’en préoccuper. Par exemple, durant un meeting de Marco Rubio tenu avant les primaires du New Hampshire en février, j’ai parlé avec une électrice qui, à sa manière, a exprimé cette inquiétude:
«Je pense qu’ila créé des divisions dans le pays, m’a dit Lori, une femme blanche d’un certain âge à propos d’Obama. Je trouve qu’aujourd’hui, dans plein d’endroits aux États-Unis, il y a une division entre les couleurs de peau… comme, quand je vais demander quelque chose à quelqu’un dans un magasin… Elle m’a regardé comme pour appuyer ce qu’elle voulait dire. J’ai l’impression que, eux, ils se demandent si je les aime bien ou non… Je n’avais pas cette impression avant. J’étais tolérante avec tout le monde. Je déteste qu’il ait apporté ça.»
Ce n’est pas la première fois de l’histoire américaine que les blancs ont peur de perdre leur prééminence. Au début du XXe siècle, l’immigration massive d’Européens du Sud et de l’Est, ainsi que l’arrivée de nombreux Chinois dans l’Ouest américain, alimentèrent le nativisme et le racisme blanc, ce qui finit par conduire à la résurrection du Ku Klux Klan. Le KKK fédéra ainsi des millions d’Américains blancs dans un mouvement s’opposant aux immigrés, aux noirs et aux minorités religieuses, comme les catholiques. Cela, associé à un mouvement nativiste de plus grande ampleur, eut un énorme impact sur la politique américaine: des États entiers, tels que l’Indiana, étaient aux mains de politiciens soutenus par le KKK et, au niveau national, les parlementaires votèrent des lois sur l’immigration très dures et restrictives. L’explosion de nativisme et d’anxiété raciale à laquelle nous assistons aujourd’hui semble d’
«L’élection du premier président noir du pays a eu une importance tellement iconique qu’elle a permis aux vieilles idées racistes d’influencer les préférences partisanesalors que nous pensions depuis longtemps qu’elles avaient disparu de la politique américaine», a écrit en 2013 Michael Tesler, politologue à la Brown University, dans un article intitulé «Le retour du racisme à l’ancienne dans les préférences partisanes des Américains blancs au début de l’ère Obama». Quand Tesler parle de «racisme à l’ancienne», ce n’est pas un simple terme rhétorique: il fait référence à des croyances spécifiques sur l’infériorité biologique et culturelle des Afro-Américains. Son travail suggère que certains Américains blancs sont, pour reprendre ses termes «inquiets de voir le pays dirigé par un président issu d’un groupe racial qu’ils considèrent être intellectuellement et socialement inférieur».
Comportement anti-noirs
Une autre recherche montre à quel point l’élection d’Obama semble avoir exacerbé l’animosité raciale chez les électeurs blancs. Dans un article intitulé «Impact du racisme anti-noirs sur l’approbation du bilan de Barack Obama et sur les votes lors des élections présidentielles de 2012», trois chercheurs ont montré une augmentation conséquente (de 47,6% en 2008 à 50,9% en 2012) du nombre d’électeurs ayant une attitude anti-noirs: «La proportion de personnes faisant preuve de comportements anti-noirs, disaient-ils, était de 32% chez les Démocrates, 48% chez les indépendants et 79% chez les Républicains.»
Trump s’est emparé du complot du «birtherism» (théorie qui prétend qu’Obama serait né à l’étranger et qu’il serait un président illégitime) et l’a transformé en un véritable mouvement
Qu’est-ce que le racisme anti-noirs de l’époque Obama a à voir avec Donald Trump, qui est entré avec fracas dans la campagne de 2016 avec une salve de propos anti-Latino-Américains?
Trump a lancé sa campagne en dénigrant les Latino-Américains et les musulmans mais il a fait sa première apparition durant le mandat d’Obama dans un contexte de racisme anti-noirs. En 2011, Trump s’est emparé du complot du «birtherism» (théorie qui prétend qu’Obama serait né à l’étranger et qu’il serait un président illégitime) et l’a transformé en un véritable mouvement. Aujourd’hui encore, ses supporters sont convaincus qu’Obama n’a pas de légitimité: 62% affirment qu’il est musulman et 61% qu’il est né dans un autre pays. J’ai discuté avec un électeur qui s’est fait l’écho des discours discriminants envers Obama à Las Vegas, lors d’un meeting de Trump la veille des caucus du Nevada. «À mon avis, Obama est le président le plus antiaméricain que j’ai connu. Il s’incline devant tous les autres pays. Il fait passer les autres pays avant les États-Unis», m’a expliqué Martin, fervent partisan du magnat de l’immobilier.
Plus récemment, le racisme anti-noirs est revenu sur le devant de la scène, avec des comportements attirant la population qui aimerait voir restaurée l’ancienne hiérarchie raciale. Trump partage des mèmes racistes sur Twitter et a construit des relations symbiotiques avec des nationalistes blancs, refusant de condamner David Duke, ancien dirigeant du Ku Klux Klan, lors d’une interview, et proposant une interview de son fils à un présentateur radio nationaliste blanc. Ces dernières semaines, les supporters de Trump ont même attaqué des manifestants noirs lors de ses meetings. Durant un rassemblement en Caroline du Nord, un membre de l’auditoire a donné un coup de poing au visage d’un manifestant, tandis qu’un autre lançait une insulte raciste. Par la suite, Trump a excusé ce comportement. «Il était agité, tapait les gens et le public s’est défendu», a-t-il dit, bien qu’aucune preuve n’étaye le fait que le manifestant ait attaqué le premier. «C’est plus de gens comme ça, qu’il nous faut.»
À St. Louis, dans le Missouri, un meeting de Trump a été interrompu en raison de bagarres entre les partisans et les opposants du candidat, qui ont conduit à de nombreuses arrestations. Lors d’un autre rassemblement dans le Kentucky, le jour même où Trump a promis de payer les frais d’avocat aux supporters qui avaient frappé les manifestants, deux protestataires ont été attaqués par des membres d’un groupe suprémaciste blanc. Le vendredi soir, à Chicago, des manifestants se sont rassemblés en masse pour protester contre le meeting imminent de Trump, obligeant le milliardaire à l’annuler. Trump a condamné ceux qu’il jugeait responsables des échauffourées qui ont suivi en les qualifiant de «voyous».
Ouvriers blancs
Rien de tout cela ne permet toutefois de nier les faits matériels sur lesquels repose l’attrait pour Trump des blancs de la classe ouvrière. L’effondrement de l’économie industrielle au lendemain de la Grande Récession a provoqué un véritable désespoir. La classe moyenne perd du terrain depuis un long moment et les emplois se font rares pour les personnes qui n’ont pas de diplôme universitaire. Même dans les régions où de nouvelles usines ont vu le jour, les syndicats sont rares et les salaires sont bas, à la suite d’un nivellement par le bas qui se produit dans les villes qui se battent pour conserver les derniers emplois du secteur manufacturier. Lorsque le désespoir économique se double de la perte d’espoir –comme nous l’avons vu dans les années 1980, lorsqu’une première vague de désindustrialisation a dévasté les quartiers des centres-villes–, les conséquences sont tragiques.
L’impact de ces tendances a été souligné dans une vaste étude publiée à l’automne 2015, qui montrait un taux de mortalité en pleine hausse chez les Américains des classes moyenne et ouvrière, principaux partisans de Trump. Anne Case, professeure à l’université de Princeton, et Angus Deaton, son coauteur, ont découvert que les Américains blancs de la classe ouvrière sont de plus en plus nombreux à se suicider ou à mourir d’une trop grande consommation d’alcool et de drogues. «En 1999, écrit Case pour Quartz, les personnes de ce groupe mouraient quatre fois plus que les Américains possédant un diplôme d’enseignement secondaire ou universitaire d’un empoisonnement accidentel causé par l’alcool ou la drogue. En 2013, ils étaient sept fois plus nombreux à mourir que leurs concitoyens plus instruits. En 2013, ils se suicidaient aussi deux fois plus que les personnes ayant suivi des études plus poussées, et mouraient cinq fois plus d’une maladie du foie due à l’alcoolisme ou d’une cirrhose que les diplômés de l’université.»
Ces hausses de la mortalité sont si importantes, pour les blancs ayant entre 45 et 54 ans, qu’elles ont fait baisser l’espérance de vie globale. Les jeunes blancs, quant à eux, doivent faire face à des taux de toxicomanie en augmentation et à une augmentation correspondante de la mortalité.
Organisez un meeting de Trump et vous rencontrerez des personnes qui ont vécu ces changements de près. Ce sont des enseignants, des policiers, des propriétaires de petits commerces et des fonctionnaires municipaux, qui occupent des emplois proches des professions de classe moyenne dans les villes rurales ou les banlieues anciennes, zones dans lesquelles le soutien à Trump est le plus ardent. Lors de la primaire dans le Michigan, par exemple, Trump a remporté la plupart de ses votes d’électeurs dont les revenus s’élèvent à moins de 50.000 dollars annuels. Dans le New Hampshire, il a largement séduit les électeurs gagnant moins de 100.000 dollars. En fait, quels que soient les États, Trump remporte les primaires grâce au vote des salaires modestes de la classe moyenne.
Aujourd’hui, la sécurité que fournissait le fait d’être blanc a disparu pour de nombreux Américains
Ces Américains un peu plus nantis ont vu leurs proches et leurs amis tomber dans la dépendance, que ce soit à la drogue, à l’alcool ou aux aides sociales. S’ils sont compatissants pour ceux qui souffrent de cette situation critique (ce qui explique pourquoi la demande d’aides supplémentaires que fait Trump pour les vétérans et les seniors leur parle), ils sont également frustrés et en colère. Le pays et ses dirigeants ont fait une promesse: si vous travaillez dur, vous vous en sortirez. Mais ça ne s’est pas passé ainsi. En réalité, pour des millions d’Américains, c’est l’inverse qui s’est produit: ils ont travaillé dur et sont restés sur le bord du chemin. Ils ont peur, que ce soit pour eux-mêmes ou pour leurs enfants. Et Trump parle pour eux. «Que voulons-nous tous? a demandé Trump lors d’un rassemblement à la veille du caucus du Nevada. Nous voulons la sécurité. Nous voulons un pays fort.» Ceux qui ressentent le plus l’insécurité se sont tournés en masse vers le magnat de l’immobilier pour le soutenir.
Cela étant dit, les préjugés raciaux expliquent aussi le soutien à Trump. Ces dernières années, faire partie du plus haut rang de la hiérarchie raciale n’était pas sans avantages. Historien et politologue, Ira Katznelson explique dans Lorsque l’Affirmative Action était blanche: un récit inédit des inégalités raciales dans l’Amérique du XXe siècle, qu’être blanc était traditionnellement la voie directe pour jouir de la sécurité de la classe moyenne, la clé qui permettait d’obtenir un emprunt immobilier et de bénéficier de programmes d’enseignement, le gouvernement fédéral cherchant à construire une classe moyenne blanche au milieu du XXe siècle. Même après la naissance du mouvement pour la défense des droits civils et la fin de la discrimination officielle contre les Afro-Américains, être blanc et de classe moyenne offrait toujours une protection contre les pires accidents de notre économie. La drogue, les ghettos et la dépendance existaient chez les blancs dans certaines petites zones du pays mais ils étaient communément considérés comme des problèmes touchant les populations noire et latino-américaine mais pas les blancs. Ce n’est plus vrai aujourd’hui. Aujourd’hui, les blancs de classe moyenne sont aussi touchés par la toxicomanie et la dépendance, ce qui ajoute un élément racial à l’anxiété économique, puisque la sécurité que fournissait le fait d’être blanc a disparu pour de nombreux Américains.
Peur primale
Des objections peuvent être faites à cette analyse. Il est possible, par exemple, que la décision d’Obama de faire avancer les politiques progressistes et de galvaniser une base progressiste ait entraîné un contrecoup partisan inévitable, dont fait partie Trump. Si Obama avait gouverné plus modérément, s’il avait essayé de trouver un espace dans cette coalition pour les électeurs blancs de la classe ouvrière, alors le «trumpisme» serait peut-être resté au fond de sa tanière.
Mais cette analyse ignore à quel point Trump reflète les choix spécifiques des Républicains et des élites conservatrices. Des théories du complot anti-Obama aux attaques le faisant passer pour un ennemi des États-Unis, les conservateurs ont choisi de nourrir ce ressentiment et cette anxiété. On peut établir un lien direct entre l’essor de Trump et l’hystérie raciste de certaines émissions de radio, où des personnes comme Rush Limbaugh, soutien actif de Trump, ont prévenu qu’Obama mettrait le monde sens dessus dessous. «L’époque où[les minorités] n’avaient pas de pouvoir est terminée, et elles sont en colère, avait dit Limbaugh à ses auditeurs. Elles veulent utiliser leur pouvoir pour se venger.»
Il faut aussi songer à quel point ces électeurs auraient trouvé cet hypothétique partenariat défavorable à leurs intérêts tels qu’ils les conçoivent. Même si Obama était allé vers eux, ils n’auraient été que de simples partenaires dans une coalition plus grande, alors qu’ils veulent être ceux qui dirigent. Trump s’adresse à ce désir lorsqu’il déclare (de manière plus ou moins subtile) qu’il veut «rendre sa grandeur à l’Amérique» en faisant de l’ouvrier américain blanc le centre de son univers.
Durant toute leur histoire, les États-Unis ont vu leur paysage racial et économique évoluer. Et durant toute cette histoire, une importante minorité d’Américains blancs a répondu à ces changements incessants par une peur primale d’être dominé, de se retrouver au bas de l’échelle. C’est l’une des plus grandes forces de la vie américaine. Des politiques et des démagogues de toutes sortes se sont servis de cette peur bien avant Trump. Elle est si puissante que les chercheurs ont trouvé un lien direct et fort entre la proportion d’esclaves d’un comté donné avant l’abolition et la part de votes républicains aujourd’hui. Plus une région donnée possédait d’esclaves, plus le vote républicain y est important.
La bonne nouvelle est que les mouvements comme celui de Trump finissent souvent par disparaître. La mauvaise nouvelle est que, même s’ils perdent, ils ont une influence conséquente. L’un des prédécesseurs de Trump, le gouverneur de l’Alabama George Wallace, n’a jamais remporté l’investiture démocrate. Toutefois, il a eu une influence considérable sur la direction de la politique nationale, donnant à Richard Nixon les bases pour sa «Stratégie du Sud» misant sur le ressentiment racial qui façonnera et définira la politique américaine pour les quatre décennies à venir.
Pour les Américains opposés à Trump, il est tentant de croire que sa base électorale n’est qu’une minuscule partie des États-Unis, que ce ne sont que les derniers soubresauts de vieux préjugés raciaux. En fin de compte, pense-t-on, ils finiront aussi par disparaître.
Mais c’est un vœu pieux. Les États-Unis sont un pays hétéroclite mais ce pays est essentiellement blanc. Et le phénomène Trump peut encore rassembler des millions d’électeurs. Et cet «en fin de compte» pourrait mettre longtemps à venir. Entre temps, le phénomène Trump –puissant mélange de préjugés décomplexés, d’agressions nationalistes et de politique économique hétérodoxe– pourrait prospérer. En fait, c’est ce qu’il va probablement faire, puisque les tendances qui ont produit Trump –économie fragile, classe ouvrière blanche mal en point, classe moyenne blanche précaire, population non blanche en augmentation, impasse politique et puissance politique accrue des minorités– sont toujours actuelles.
Étant donné la montée plus que difficile qui l’attendrait à une élection générale, l’homme qu’est Trump possède une date de péremption. Mais le Trumpisme entrera dans le firmament de la politique moderne, un courant puissant qui façonnera l’avenir du parti républicain, et du parti démocrate également. Trump a fait son entrée en scène comme un clown. Mais, lorsqu’il en sortira, il le fera en tant que nouvelle icône d’un mouvement familier de la vie américaine.
Traditional political polling in America has been living on borrowed time, and the divergence of the actual votes in Tuesday’s election from what was expected in the polls may signal that its time is up. The fact that the polls apparently missed the preferences of a large portion of the American electorate indicates a larger, more systematic issue, one that’s unlikely to be fixed anytime soon.
The basic problem — and the reason pollsters have been nervous about just this sort of large-scale polling failure — comes from the low response rates that have plagued even the best polls since the widespread use of caller ID technology. Caller ID, more than any other single factor, means that fewer Americans pick up the phone when a pollster calls. That means it takes more calls for a poll to reach enough respondents to make a valid sample, but it also means that Americans are screening themselves before they pick up the phone.
So even as our ability to analyze data has gotten better and better, thanks to advanced computing and an increase in the amount of data available to analysts, our ability to collect data has gotten worse. And if the inputs are bad, the analysis won’t be any good either.
That self-screening is enormously problematic for pollsters. A sample is only valid to the extent that the individuals reached are a random sample of the overall population of interest. It’s not at all problematic for some people to refuse to pick up the phone, as long as their refusal is driven by a random process. If it’s random, the people who do pick up the phone will still be a representative sample of the overall population, and the pollster will just have to make more calls.
Similarly, it’s not a serious problem for pollsters if people refuse to answer the phone according to known characteristics. For instance, pollsters know that African-Americans are less likely to answer a survey than white Americans and that men are less likely to pick up the phone than women. Thanks to the U.S. Census, we know what proportion of these groups are supposed to be in our sample, so when the proportion of men, or African-Americans, falls short in the sample, pollsters can make use of weighting techniques to correct for the shortfall.
The real problem comes when potential respondents to a poll are systematically refusing to pick up the phone according to characteristics that pollsters aren’t measuring or can’t adjust to match what’s in the population. For instance, while Census numbers can tell us how many Asian-Americans live in a particular state, they can’t reliably tell us how many Republicans, or liberals, or evangelicals are in that state. As a result, if a group like evangelicals or conservatives systematically exclude themselves from polls at higher rates than other groups, there’s no easy way to fix the problem. Often, it may not even be clear that there is a problem, especially for characteristics that aren’t commonly measured on polls or that can fluctuate, like church membership and political preferences, respectively.
None of this would be a problem if response rates were at the levels they were at in the 1980s, or even the 1990s. But with response rates to modern telephone polls languishing below 15%, it becomes harder and harder to determine whether systematic nonresponse problems are even happening. These problems go from nagging to consequential when the characteristics that are leading people to exclude themselves from polls are correlated with the major outcome that the poll is trying to measure. For instance, if Donald Trump voters were more likely to decide not to participate in polls because they’re rigged, and did so in a way that wasn’t correlated with known characteristics like race and gender, pollsters would have no way of knowing.
Of course, if unobserved nonresponse is driving poll errors, it’s necessary to ask how polls have done so well up to this point. After all, response rates have been similarly low in at least the last four presidential elections, and the polls did well enough in those. Part of the problem, and what makes this election different, is a seeming failure of likely voter models.
One of the most difficult tasks facing any election pollster is determining who is and is not actually going to vote on Election Day. People tend to say they’re going to vote even when they won’t, so it’s necessary to ask more questions. Every major pollster has their own set of questions in the likely voter questions, but they typically include items about interest in the election, past vote behavior, and knowledge of where a polling place is. Using these questions to determine who is and is not going to vote is a tricky business; the failure of a complex likely voter model is why Gallup got out of the election forecasting business. As long as voter behavior stays stable, these models should work. But in elections in which past voter behavior is upended, such as President Barack Obama’s win in 2008, they can fail catastrophically.
It may be the case that standard sampling and weighting techniques are able to correct for sampling problems in a normal election — one in which voter turnout patterns remain predictable — but fail when the polls are missing portions of the electorate who are likely to turn out in one election but not in previous ones. Imagine that there’s a group of voters who don’t generally vote and are systematically less likely to respond to a survey. So long as they continue to not vote, there isn’t a problem. But if a candidate activates these voters, the polls will systematically underestimate support for the candidate. That seems to be what happened Tuesday night.
This doesn’t mean modern political polling is doomed. If pollsters and political analysts can identify what went wrong, they may be able to stop a repeat of such errors and build models that account for them. But unless they can find some way of fixing the underlying issue of low response rates, it’s not certain that they’ll be able to. Without strong polling, the public and the markets won’t know what’s likely to happen and candidates won’t know where to most effectively put their resources. At least for unusual elections, polling seems broken — and we have no way of knowing which elections are unusual until the votes actually come in.
Dan Cassino is an associate professor of political science at Fairleigh Dickinson University, researching public opinion and political psychology. His new book, Fox News and American Politics, will be released at the end of April.