
Homme et femme, il les créa. Genèse 1: 27
N’avez-vous pas lu que le créateur, au commencement, fit l’homme et la femme. (…) C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et les deux deviendront une seule chair? Ainsi ils ne sont plus deux, mais ils sont une seule chair. Que l’homme donc ne sépare pas ce que Dieu a joint. Jésus (Matthieu 19: 4-6)
L’enfant a le droit à un nom dès la naissance. Il a également le droit d’ acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, de connaître ses parents et d’être élevé par eux. Convention internationale des droits de l’enfant (article 7, 1989)
Depuis que l’ordre religieux est ébranlé – comme le christianisme le fut sous la Réforme – les vices ne sont pas seuls à se trouver libérés. Certes les vices sont libérés et ils errent à l’aventure et ils font des ravages. Mais les vertus aussi sont libérées et elles errent, plus farouches encore, et elles font des ravages plus terribles encore. Le monde moderne est envahi des veilles vertus chrétiennes devenues folles. Les vertus sont devenues folles pour avoir été isolées les unes des autres, contraintes à errer chacune en sa solitude. Chesterton
Si vous admettez qu’un homme revêtu de la toute-puissance peut en abuser contre ses adversaires, pourquoi n’admettez-vous pas la même chose pour une majorité? (…) Le pouvoir de tout faire, que je refuse à un seul de mes semblables, je ne l’accorderai jamais à plusieurs. Tocqueville
Si j’étais législateur, je proposerais tout simplement la disparition du mot et du concept de “mariage” dans un code civil et laïque. Le “mariage”, valeur religieuse, sacrale, hétérosexuelle – avec voeu de procréation, de fidélité éternelle, etc. -, c’est une concession de l’Etat laïque à l’Eglise chrétienne – en particulier dans son monogamisme qui n’est ni juif (il ne fut imposé aux juifs par les Européens qu’au siècle dernier et ne constituait pas une obligation il y a quelques générations au Maghreb juif) ni, cela on le sait bien, musulman. En supprimant le mot et le concept de “mariage”, cette équivoque ou cette hypocrisie religieuse et sacrale, qui n’a aucune place dans une constitution laïque, on les remplacerait par une “union civile” contractuelle, une sorte de pacs généralisé, amélioré, raffiné, souple et ajusté entre des partenaires de sexe ou de nombre non imposé.(…) C’est une utopie mais je prends date. Jacques Derrida
L’oppression mentale totalitaire est faite de piqûres de moustiques et non de grands coups sur la tête. (…) Quel fut le moyen de propagande le plus puissant de l’hitlérisme? Etaient-ce les discours isolés de Hitler et de Goebbels, leurs déclarations à tel ou tel sujet, leurs propos haineux sur le judaïsme, sur le bolchevisme? Non, incontestablement, car beaucoup de choses demeuraient incomprises par la masse ou l’ennuyaient, du fait de leur éternelle répétition.[…] Non, l’effet le plus puissant ne fut pas produit par des discours isolés, ni par des articles ou des tracts, ni par des affiches ou des drapeaux, il ne fut obtenu par rien de ce qu’on était forcé d’enregistrer par la pensée ou la perception. Le nazisme s’insinua dans la chair et le sang du grand nombre à travers des expressions isolées, des tournures, des formes syntaxiques qui s’imposaient à des millions d’exemplaires et qui furent adoptées de façon mécanique et inconsciente. Victor Klemperer (LTI, la langue du IIIe Reich)
On a commencé avec la déconstruction du langage et on finit avec la déconstruction de l’être humain dans le laboratoire. (…) Elle est proposée par les mêmes qui d’un côté veulent prolonger la vie indéfiniment et nous disent de l’autre que le monde est surpeuplé. René Girard
C’est le sens de l’histoire (…) Pour la première fois en Occident, des hommes et des femmes homosexuels prétendent se passer de l’acte sexuel pour fonder une famille. Ils transgressent un ordre procréatif qui a reposé, depuis 2000 ans, sur le principe de la différence sexuelle. Evelyne Roudinesco
Les enfants adoptés ou nés sous X revendiquent aujourd’hui le droit de connaître leur histoire. Nul n’échappe à son destin, l’inconscient vous rattrape toujours. (…) les enfants adoptés ou issus de la PMA ne sortent jamais indemnes des perturbations liées à leur naissance. Il faut rester ouvert, être attentif à leurs questions, s’ils en posent, et surtout ne pas chercher à cacher la vérité. L’idéal serait de trouver une position équilibrée entre le système de transparence absolue à l’américaine et le système de dissimulation à la française, lequel, ne l’oublions pas, reposait autrefois sur une intention généreuse d’égalité des droits entre les enfants issus de différentes filiations. Evelyne Roudinesco
Sauf exception – les couples d’homoparents ne sont pas infertiles. Au nom de quoi alors leur refuser la médecine de confort que l’on propose aux couples classiques? Rapport Terra Nova
Aucun maire ne pourra se soustraire à son devoir de célébrer un mariage homosexuel. C’est juridiquement impossible. (…) Il ne s’agit pas de faire plaisir à telle ou telle catégorie de Français, il s’agit d’offrir à l’ensemble des Français l’accès à un même droit sans discrimination liée à l’orientation sexuelle. Najat Vallaud-Belkacem (ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement)
Je suis personnellement favorable à ce que la PMA soit accessible à tous. Marisol Touraine (ministre de la santé)
Je me moque de ce François Hollande qui veut le mariage pour tous sauf pour lui. Gérard Longuet
La disparition de la paternité risque de générer des situations extrêmement complexes pour tous les époux, de même sexe ou non. Le texte ne dit mot par exemple de ce que devient la présomption de paternité, actuellement fondée sur l’obligation de fidélité des époux. Il en résulte une présomption que les enfants mis au monde par la femme sont les enfants du mari. Mais, comme il est possible que ce ne soit pas le cas, cette présomption peut être combattue et renversée par la preuve que le mari n’est pas le père. Dans le cas d’un conjoint du même sexe, parler de « présomption de parenté » est un non-sens juridique car il y a juste désignation. Comment le juge va-t-il départager un éventuel « conflit de parenté » entre le père et la conjointe de la mère, ou bien entre la conjointe et l’amante de la mère? (…) c’est le mot même de filiation qui change de sens. Les mots mariage et parents sont employés comme si de rien n’était alors qu’ils ne peuvent plus désigner ce que sont les époux et les parents. Pour désigner les parents, on introduit l’arbitraire avec le choix dicté par l’ordre alphabétique entre les noms des adoptants. Aude Mirkovic (maître de conférences en droit privé, Université d’Evry)
Aucune indication, en revanche, sur la refonte inévitable des livrets de famille, dans lesquels le générique de « parents » ne pourra exister: il faudra nécessairement indiquer « parent 1 » et « parent 2 ». Ce qui ouvre là encore une foule de questions symboliques et juridiques: qui décidera comment les numéros seront attribués? La Vie
La lisibilité de la filiation, qui est dans l’intérêt de l’enfant, est sacrifiée au profit du bon vouloir des adultes et la loi finit par mentir sur l’origine de la vie. Conférence des évêques
C’est au nom de l’égalité, de l’ouverture d’esprit, de la modernité et de la bien-pensance dominante qu’il nous est demandé d’accepter la mise en cause de l’un des fondements de notre société. (…) Ce n’est pas parce que des gens s’aiment qu’ils ont systématiquement le droit de se marier. Des règles strictes délimitent et continueront de délimiter les alliances interdites au mariage. Un homme ne peut pas se marier avec une femme déjà mariée, même s’ils s’aiment. De même, une femme ne peut pas se marier avec deux hommes. (…) « le mariage pour tous est uniquement un slogan car l’autorisation du mariage homosexuel maintiendrait des inégalités et des discriminations à l’encontre de tous ceux qui s’aiment, mais dont le mariage continuerait d’être interdit. (…) L’enjeu n’est pas ici l’homosexualité qui est un fait, une réalité, quelle que soit mon appréciation de Rabbin à ce sujet (…) c’est l’institution qui articule l’alliance de l’homme et de la femme avec la succession des générations. C’est l’institution d’une famille, c’est-à-dire d’une cellule qui crée une relation de filiation directe entre ses membres. C’est un acte fondamental dans la construction et dans la stabilité tant des individus que de la société. (…) résumer le lien parental aux facettes affectives et éducatives, c’est méconnaître que le lien de filiation est un vecteur psychique et qu’il est fondateur pour le sentiment d’identité de l’enfant. (…) l’enfant ne se construit qu’en se différenciant, ce qui suppose d’abord qu’il sache à qui il ressemble. Il a besoin, de ce fait, de savoir qu’il est issu de l’amour et de l’union entre un homme, son père, et une femme, sa mère, grâce à la différence sexuelle de ses parents. (…) Le droit à l’enfant n’existe ni pour les hétérosexuels ni pour les homosexuels. Aucun couple n’a droit à l’enfant qu’il désire, au seul motif qu’il le désire. L’enfant n’est pas un objet de droit mais un sujet de droit. Gilles Bernheim
Ce qui pose problème dans la loi envisagée, c’est le préjudice qu’elle causerait à l’ensemble de notre société au seul profit d’une infime minorité, une fois que l’on aurait brouillé de façon irréversible trois choses: les généalogies en substituant la parentalité à la paternité et à la maternité; le statut de l’enfant, passant de sujet à celui d’un objet auquel chacun aurait droit; les identités où la sexuation comme donnée naturelle serait dans l’obligation de s’effacer devant l’orientation exprimée par chacun, au nom d’une lutte contre les inégalités, pervertie en éradication des différences. Ces enjeux doivent être clairement posés dans le débat sur le mariage homosexuel et l’homoparentalité. Ils renvoient aux fondamentaux de la société dans laquelle chacun d’entre nous a envie de vivre. Gilles Bernheim (Grand rabbin de France)
il y a, dans la création, une volonté de différenciation des sexes». «Le “mélange” n’est pas biblique, il y a un certain “ordre” des choses, qu’on le veuille ou non. Et il y a bel et bien une différence. Prôner l’égalité à tout prix va à l’encontre de cette volonté de différenciation entre l’homme et la femme. Or, sans différenciation, il n’y a pas de ”vis-à-vis“, pas de dialogue, pas de construction. Le mariage pour tous est donc une fausse égalité. Claude Baty (président de la Fédération protestante de France)
Les prises de positions pour ou contre le mariage de personnes de même sexe ne manquent pas, mais les discours, parfois idéologiques, se croisent. Trois positions s’affirment aujourd’hui. Le discours présenté comme dominant défend l’ouverture du mariage et de l’adoption des enfants aux partenaires de même sexe en vertu du principe de non-discrimination. Il se situe dans la logique de la défense des droits individuels. Le mariage, dans ce cas, n’aurait pas une nature propre ou une finalité en soi ; il ne serait chargé que du sens que l’individu, dans son autonomie, voudrait bien lui conférer. Ce discours se réclame d’une modernité politique avec sa propre compréhension des valeurs de liberté et d’égalité. Un second discours, beaucoup plus radical et militant, souhaite supprimer le mariage traditionnel pour le remplacer par un contrat universel ouvert à deux ou plusieurs personnes, de même sexe ou de sexe différent. Pour les tenants de ce discours, il n’y aurait plus de sexes et la différence entre homme et femme ne serait que le fruit d’une culture hétérosexuelle dominante dont il conviendrait de débarrasser la société. Enfin, le troisième discours soutient que le mariage est ordonné à la fondation d’une famille et qu’il ne peut donc concerner que les couples hétérosexuels, seuls en mesure de procréer naturellement. Dans ce cas, le mariage a une nature propre et une finalité en soi, que la loi civile encadre ; le sens du mariage dépasse alors le bon vouloir des individus. Ce discours, qui a pour lui l’expérience millénaire, pose une limite à la liberté individuelle, qui est perçue aujourd’hui comme inacceptable et rétrograde aux yeux de certains.
A travers le mariage civil, la société reconnaît et protège aussi la spécificité de ce libre engagement de l’homme et de la femme dans la durée, la fidélité et l’ouverture à la vie. Quelque 250.000 mariages civils sont célébrés chaque année en France et c’est toujours un événement important pour ceux qui s’y engagent. L’élargissement du mariage aux personnes de même sexe entrainerait une modification profonde du droit du mariage et de la filiation pour tous, y compris pour les couples hétérosexuels. (…) Le Pacte Civil de Solidarité (PACS), créé en 1999, a de façon inattendue surtout été utilisé par les couples hétérosexuels qui représentent 95% des 174 523 PACS conclus en 2009 [3] . Pour ces derniers, il constitue une alternative au mariage, qui ouvre un certain nombre de droits fiscaux et sociaux, sans avoir le poids symbolique du mariage, et en conservant une totale liberté de rompre. Aujourd’hui, pour les couples hétérosexuels, les différences entre le PACS et le mariage sont importantes et mal connues. Le PACS est un contrat, le mariage est une institution. Au plan patrimonial, c’est dans le domaine du droit des successions, des régimes matrimoniaux et de la réversion de la pension au partenaire survivant que se situent les plus grandes différences. Mais ce sont cependant les effets d’ordre personnel et symbolique qui marquent le plus l’infériorité du PACS par rapport au mariage. Le PACS n’est pas conclu à la mairie mais au Tribunal ou devant notaire. Il ne produit aucun effet en matière de nom et n’entraîne aucun effet personnel. Notamment, le PACS n’impose aucune obligation de fidélité, il ne crée pas de lien d’alliance entre le pacsé et la famille de son partenaire et peut être rompu unilatéralement, par simple lettre recommandée avec accusé de réception. Aucune protection n’est prévue pour le partenaire délaissé ou les éventuels enfants nés de cette union. Bien souvent, les couples hétérosexuels pacsés en viennent au bout d’un certain temps à se marier, afin de donner plus de solidité et de solennité à leur union. Les personnes homosexuelles réclament aujourd’hui aussi une forme d’union plus solennelle, dotée d’un véritable poids symbolique et ne pouvant être rompue sans procédure ni indemnité. Dans leur revendication, la différence au regard de la procréation naturelle est mise de côté, comme un détail négligeable, pour ne garder du mariage que la sincérité et l’authenticité du lien amoureux. Il s’agit là d’une vision très individualiste du mariage qui n’est pas celle du droit français.
Une réforme du droit de la famille doit partir du droit existant et examiner en quoi celui-ci n’est plus adapté à la situation nouvelle et quelles seront les conséquences de la réforme envisagée pour les citoyens. Si le droit n’est qu’une technique humaine qui peut évoluer à tout moment, il n’en garde pas moins une fonction anthropologique : il dit quelque chose de notre vision de l’homme. Le discours en faveur de l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe part d’une vision tronquée du droit. Il choisit de ne retenir du mariage civil que le lien amoureux et fait alors valoir que refuser le mariage aux personnes de même sexe est une discrimination car elles aussi sont amoureuses. Ne pas leur ouvrir l’accès au mariage revient alors à mettre en doute la sincérité et l’authenticité de leurs sentiments, voire leur capacité d’aimer. Or, il ne s’agit pas de cela. Contrairement à ce qui est soutenu, le mariage n’a jamais été un simple certificat de reconnaissance d’un sentiment amoureux.
Le mariage a toujours eu la fonction sociale d’encadrer la transmission de la vie en articulant, dans le domaine personnel et patrimonial, les droits et devoirs des époux, entre eux et à l’égard des enfants à venir. La conception individualiste du mariage, véhiculée par le discours ambiant, ne se trouve pas dans les textes de loi. La haute valeur symbolique du mariage ne vient d’ailleurs pas du sentiment amoureux, par définition éphémère, mais de la profondeur de l’engagement pris par les époux qui acceptent d’entrer dans une union de vie totale. Cet engagement concerne la vie des conjoints (respect, fidélité, assistance, communauté de vie, contribution aux charges), la vie des familles (liens d’alliance, obligations alimentaires, empêchements au mariage), la vie des enfants (présomption de paternité, éducation, autorité parentale conjointe) et les tiers (solidarité des dettes ménagères). Compte tenu de l’importance de cet engagement, y compris à l’égard des tiers, il est régi par la loi et sa rupture est soustraite au bon vouloir des parties. Le divorce ne peut être prononcé que par le juge qui veillera à la protection des plus faibles et une répartition équitable des biens. Ce qui confère au mariage sa haute valeur symbolique, c’est donc cet engagement de toute une vie, « pour le meilleur et pour le pire », ce pari un peu fou que l’amour humain puisse surmonter tous les obstacles que la vie nous réserve. Or, l’accueil des enfants nés de cette union de vie fait partie intégrante de cet engagement.
Si le mariage a connu des variations dans l’histoire, il a toujours organisé le lien entre conjugalité et procréation. Encore aujourd’hui, en droit français, le mariage comporte une présomption de paternité, que connaissait déjà le droit romain (Pater is est quem nuptiae demonstrant). Destinée à rattacher juridiquement au mari les enfants mis au monde par la mère, cette présomption de paternité est la traduction juridique des conséquences naturelles de la promesse de fidélité et de vie commune que font les époux. Sans méconnaître que cette tradition juridique a aussi été porteuse de préjugés et d’injustices à l’égard des femmes, il convient de discerner ce qu’elle contient de sage et quelle est son importance pour la société. Le mariage, tel qu’il existe aujourd’hui en droit français, assure le lien entre conjugalité et procréation et donc la lisibilité de la filiation. C’est là, en particulier, où le droit a une fonction anthropologique. Tout d’abord, en assurant le lien entre conjugalité et procréation, le droit vient nous rappeler que la vie est un don et que chacun la reçoit. Personne ne choisit son père et sa mère, personne ne choisit son lieu ou sa date de naissance. Ce sont pourtant ces « données » qui vont, à jamais, caractériser chacun comme un être unique au monde. Ces données incontournables de la filiation, qui s’imposent à chacun, viennent rappeler à l’homme qu’il n’est pas tout-puissant, qu’il ne se construit pas tout seul, mais qu’il reçoit sa vie des autres, d’un homme et d’une femme (et pour les croyants, d’un Autre). Ensuite, faire le lien entre conjugalité et procréation est important pour la reconnaissance de l’égalité des sexes, qui sont l’un comme l’autre indispensables à la vie. Le fait d’être né d’un homme et d’une femme signe notre origine commune, notre appartenance à l’espèce humaine. La dualité sexuelle homme/femme est en effet une « propriété des vivants ».
Enfin, la lisibilité de la filiation et l’inscription dans une histoire et une lignée sont essentielles pour la construction de l’identité. La Convention des Droits de l’enfant de l’ONU stipule expressément qu’un enfant, dans la mesure du possible, a droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux. Si les circonstances de la vie peuvent empêcher cela, il ne faudra pas que le législateur prenne l’initiative d’organiser l’impossibilité pour les enfants de connaître leurs parents ou d’être élevés par eux. Ce qui sera le cas s’il accède aux demandes de parenté des personnes homosexuelles que ce soit par le biais de l’adoption ou de la procréation médicalement assistée. A côté de ces fonctions anthropologiques fondamentales, le mariage a aussi une utilité sociale. Même s’il n’est plus l’unique porte d’entrée de la vie de famille, il continue à favoriser la stabilité conjugale et familiale, qui correspond à une aspiration profonde d’une très grande majorité de la population. Celle-ci est non seulement bénéfique pour ses membres, mais elle profite à toute la société car elle permet aux familles de mieux assumer leur rôle dans le domaine de l’éducation et de la solidarité. A défaut, c’est la collectivité qui doit prendre le relais. Ces enjeux anthropologiques et sociaux ainsi que la protection des droits de l’enfant sont passés sous silence. Le discours dominant, égalitariste, choisit délibérément d’ignorer la différence entre les personnes homosexuelles et hétérosexuelles à l’égard de la procréation et veut faire croire que le lien entre conjugalité et procréation n’est pas pertinent pour la vie en société. Un coup d’œil sur les conséquences juridiques d’une telle réforme démontre le contraire.
En cas d’ouverture du mariage aux personnes de même sexe, se posera la question du sort de la présomption de paternité, actuellement prévue à l’article 312 du Code Civil. La première solution possible est de décider que cette présomption ne s’appliquerait pas aux couples de même sexe. Il y aurait alors dans les faits deux types de mariages, et il importerait que les citoyens soient clairement informés de cette distinction. Cette hypothèse, retenue aux Pays-Bas et en Belgique, ne règle pas la question du lien entre la compagne de la mère et l’enfant de celle-ci. Une deuxième solution, plus radicale, consisterait à supprimer la présomption de paternité pour tous. Cela reviendra à instaurer officiellement la dissociation entre conjugalité et procréation et viderait le mariage de son sens. Quel sens peut avoir un mariage civil qui, en refusant de régler la transmission naturelle de la vie, n’honore plus la promesse de fidélité des époux ? Une troisième solution, encore plus radicale, a été retenue au Canada. La présomption de paternité est transformée en présomption de parenté et joue aussi pour les partenaires homosexuels : la compagne de la mère sera la « co-mère » de l’enfant. Dans ce cas, la lisibilité de la filiation, qui est dans l’intérêt de l’enfant, est sacrifiée au profit du bon vouloir des adultes et la loi finit par mentir sur l’origine de la vie ! Les choses se compliquent encore davantage devant les questions d’adoption et de procréation médicalement assistée. Par exemple, comment concevoir une adoption plénière qui supprime la filiation d’origine et dit que l’enfant est « né de » ses parents adoptifs ? Faut-il faire croire à un enfant qu’il est né de deux hommes ou de deux femmes ? Les complications juridiques sont nombreuses. Tout notre système juridique est basé sur la distinction des sexes, puisque la transmission de la vie passe par la rencontre d’un homme et d’une femme. Conférence des évêques
Le projet du gouvernement est loin de faire l’unanimité au sein de la communauté gay. Contrairement à ce qu’affirment les médias, cette revendication n’est pas majoritaire chez les homosexuels. La plupart s’en moquent, mais l’influence des associations LGBT [lesbiennes, gay, bi et trans, NDLR] est telle que beaucoup n’osent pas le dire. (…) Je crois qu’elles étaient à cours de revendications et qu’il leur fallait en trouver une. (…) Je pense que ces associations sont dans une logique de surenchère permanente. (…) Dès lors que vous êtes contre le mariage, contre l’adoption, les militants LGBT jugent que vous êtes réactionnaire, voire fasciste, et forcément homophobe – ce qui, dans mon cas, est pour le moins paradoxal ! En revanche, ceux qui me connaissent me disent “C’est très bien ce que tu fais” mais ils n’osent pas encore franchir le pas. Beaucoup redoutent de perdre des amis. Ils ont peur de parler. (…) j’avais l’impression que le gouvernement se servait de ce projet comme d’un paravent, qu’il cherchait à détourner l’attention de l’opinion. Ce qui s’est passé ces derniers jours le prouve : Christiane Taubira en a reparlé juste après l’intervention télévisée de François Hollande et l’annonce de milliards d’euros d’impôts supplémentaires. Je trouve cela choquant. (…) Il est important de faire monter sur scène des personnes qui sont contre ce projet mais qui n’osent pas encore le dire. Actuellement, seuls ses partisans ont accès aux médias audiovisuels. Qu’il y ait des pour, des contre, mais surtout, qu’il y ait un débat ! Xavier Bongibault
Lisibilité de la filiation, inscription dans une histoire et une lignée, protection des plus faibles, y a-t-il un droit de la personne de l’enfant et du futur citoyen que l’égalitarisme forcené de nos nouveaux pouvoirs ne seraient prêts à sacrifier sur l’autel de la démagogie électoraliste?
A l’heure où, énième illustration de ces « idées chrétiennes devenues folles » dont parlait Chesterton et sans même avoir réussi à faire voter quoi que ce soit, nos gouvernants ont déjà commencé à menacer les maires qui refuseraient d’appliquer leurs diktats démagogiques concernant l’ouverture, avant celle de la procréation médicalement assistée (remboursée par la sécu!), du mariage et de l’adoption aux couples homosexuels …
Et, poussés par des intérêts électoralistes à court terme mais s’exposant de fait, à l’instar d’un premier recul, à l’humiliation qu’avaient subie en 1984 leurs ainés sur leur tentative de suppression des écoles privées, prétendent à présent imposer à tous (sous les ô combien réjouissantes appelations de type « parent 1″/ « parent 2 »!) ce qu’ils refusent pour eux-mêmes et, faisant du passé table rase, passer aux poubelles de l’histoire les fonctions tant sociales que juridiques, symboliques et anthropologiques de la première institution de l’histoire humaine …
Retour, avec les prises de positions officielles des instances juives et chrétiennes, sur le mensonge légal que prétendent organiser nos nouveaux apprentis sorciers de dirigeants …
Sur rien que moins que l’origine même de la vie!
Eglise catholique en France
28 septembre 2012
Note publiée par le Conseil Famille et Société de la Conférence des Évêques de France au sujet de l’élargissement du mariage civil aux personnes de même sexe et la possibilité pour elles de recourir à l’adoption.
L’élargissement du mariage civil aux personnes de même sexe et la possibilité pour elles de recourir à l’adoption, est une question grave. Une telle décision aurait des conséquences importantes sur les enfants, l’équilibre des familles et la cohésion sociale.
Il serait réducteur de fonder la modification du droit qui régit le mariage et la famille, sur le seul aspect de la non-discrimination et du principe d’égalité.
Le Conseil Famille et Société a voulu prendre en compte, avec l’aide d’experts, la complexité de la question et fournir des éléments de réflexion abordant les principaux enjeux de la décision envisagée.
La réflexion s’adresse aux catholiques, mais elle ne reflète pas qu’un point de vue religieux. Elle peut intéresser toute personne s’interrogeant sur les mesures annoncées par le gouvernement.
Cette démarche, qui se veut respectueuse des personnes, s’inscrit dans la volonté de l’Eglise de participer au débat public. Elle le fait, s’appuyant sur la tradition chrétienne, dans le souci de servir le bien commun.
Le Conseil Famille et Société
Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre, président
Mgr Yves Boivineau, évêque d’Annecy
Mgr Gérard Coliche, évêque auxiliaire de Lille
Mgr François Jacolin, évêque de Mende
Mgr Christian Kratz, évêque auxiliaire de Strasbourg
Mgr Armand Maillard, archevêque de Bourges
M. Jacques Arènes, psychologue, psychanalyste
Mme Monique Baujard, directrice du Service national Famille et Société
Mme Françoise Dekeuwer-Défossez, professeur de droit
Père Gildas Kerhuel, secrétaire général adjoint de la CEF
Sr Geneviève Médevielle, professeur de théologie morale
M. Jérôme Vignon, président des Semaines Sociales de France
Ouvrir un vrai débat
La société se trouve devant une situation nouvelle, inédite. L’homosexualité a toujours existé, mais jusqu’à récemment, il n’y avait jamais eu de revendication de la part des personnes homosexuelles de pouvoir donner un cadre juridique à une relation destinée à s’inscrire dans le temps, ni de se voir investies d’une autorité parentale. Il appartient au pouvoir politique d’entendre cette demande et d’y apporter la réponse la plus adéquate. Mais cette réponse relève d’un choix politique. L’ouverture du mariage aux personnes de même sexe n’est imposée ni par le droit européen ni par une quelconque convention internationale. Elle est une option politique parmi d’autres et un vrai débat démocratique est nécessaire pour faire émerger la meilleure réponse dans l’intérêt de tous.
Les différentes positions
Les prises de positions pour ou contre le mariage de personnes de même sexe ne manquent pas, mais les discours, parfois idéologiques, se croisent. Trois positions s’affirment aujourd’hui.
Le discours présenté comme dominant défend l’ouverture du mariage et de l’adoption des enfants aux partenaires de même sexe en vertu du principe de non-discrimination. Il se situe dans la logique de la défense des droits individuels. Le mariage, dans ce cas, n’aurait pas une nature propre ou une finalité en soi ; il ne serait chargé que du sens que l’individu, dans son autonomie, voudrait bien lui conférer. Ce discours se réclame d’une modernité politique avec sa propre compréhension des valeurs de liberté et d’égalité.
Un second discours, beaucoup plus radical et militant, souhaite supprimer le mariage traditionnel pour le remplacer par un contrat universel ouvert à deux ou plusieurs personnes, de même sexe ou de sexe différent. Pour les tenants de ce discours, il n’y aurait plus de sexes et la différence entre homme et femme ne serait que le fruit d’une culture hétérosexuelle dominante dont il conviendrait de débarrasser la société.
Enfin, le troisième discours soutient que le mariage est ordonné à la fondation d’une famille et qu’il ne peut donc concerner que les couples hétérosexuels, seuls en mesure de procréer naturellement. Dans ce cas, le mariage a une nature propre et une finalité en soi, que la loi civile encadre ; le sens du mariage dépasse alors le bon vouloir des individus. Ce discours, qui a pour lui l’expérience millénaire, pose une limite à la liberté individuelle, qui est perçue aujourd’hui comme inacceptable et rétrograde aux yeux de certains.
Les conditions du débat
Entre ces trois discours, il n’y a dans la société française, actuellement, pas de débat politique argumenté. Pour que ce débat puisse s’instaurer, il importe tout d’abord de reconnaître le conflit qui existe entre la signification du mariage hétérosexuel et l’expérience homosexuelle contemporaine. Sans prise de conscience des enjeux de ces divisions et de ces différences, un véritable travail politique est impossible [1] .
Il s’agit aussi de respecter tous les acteurs de ce débat et de permettre à chacun de réfléchir plus profondément et d’exprimer librement ses convictions. Si toute réticence ou interrogation devant cette réforme du droit de la famille est qualifiée a priori d’ « homophobe », il ne peut y avoir de débat au fond. Il en va de même lorsque la requête des personnes homosexuelles est disqualifiée a priori. Le respect de tous les acteurs du débat implique une écoute commune, une aptitude à comprendre les arguments exposés et une recherche de langage partagé.
Cette recherche d’un langage partagé suppose, de la part des catholiques, de traduire les arguments tirés de la Révélation dans un langage accessible à toute intelligence ouverte. De même, dans ce débat qui concerne le sens du mariage civil, il n’y a pas lieu de discuter du mariage religieux ni, dans un premier temps, des liens entre mariage civil et religieux. Il ne s’agit pas pour les catholiques d’imposer un point de vue religieux mais d’apporter leur contribution à ce débat en tant que citoyens en se basant sur des arguments anthropologiques et juridiques. Pour cela, il convient d’avoir bien en tête les raisons pour lesquelles l’Eglise est attachée au mariage comme union entre un homme et une femme.
Comprendre la position de l’Eglise catholique
Un amour qui donne la vie
Les chrétiens croient en un Dieu qui est Amour et qui donne la vie. Cette vie est marquée par l’altérité sexuelle : « Homme et femme, il les créa » (Genèse 1,27), qui est un des bienfaits de la Création (Gn 1,31) et qui préside à la transmission de la vie. Dans l’expérience humaine, seule la relation d’amour entre un homme et une femme peut donner naissance à une nouvelle vie. Cette relation d’amour participe ainsi à la Création de Dieu. L’homme et la femme deviennent en quelque sorte co-créateurs. Pour cette raison, cette relation garde un caractère unique et l’Eglise catholique lui reconnaît un statut particulier. C’est une relation d’amour vécue dans la liberté qui s’exprime dans le don de soi réciproque et dont le Christ a pleinement révélé la beauté. Par respect pour cet amour et pour aider les couples, l’Eglise invite, au nom du Christ, l’homme et la femme à s’engager librement dans un mariage indissoluble, vécu dans la fidélité et l’ouverture à la vie. Le mariage religieux est, pour les catholiques, un sacrement dans lequel Dieu lui-même s’engage aux côtés des époux et de leur alliance. Ainsi, ce cadre ne constitue pas tant une contrainte qu’un soutien pour pouvoir vivre cet amour. Il constitue aussi le moyen le plus simple et le plus efficace pour élever des enfants.
La fécondité sociale
Ce n’est pas parce que l’Eglise accorde un statut particulier à cette relation d’amour entre un homme et une femme, qu’elle n’accorde pas de valeur à d’autres relations d’amour ou d’amitié. Mais celles-ci ouvrent sur un autre type de fécondité, une fécondité sociale. Cela n’est pas moins important aux yeux de l’Eglise. Le Christ nous enseigne que nos relations d’amour ne sont pas faites pour nous enfermer égoïstement dans un tête-à-tête, mais doivent justement s’ouvrir aux autres. Mais seul dans le cas de l’amour d’un homme et d’une femme, cette ouverture à l’autre se traduit par la naissance d’une vie nouvelle. C’est une différence de taille, qui est occultée aujourd’hui.
L’importance du mariage civil
A travers le mariage civil, la société reconnaît et protège aussi la spécificité de ce libre engagement de l’homme et de la femme dans la durée, la fidélité et l’ouverture à la vie. Quelque 250.000 mariages civils sont célébrés chaque année en France et c’est toujours un événement important pour ceux qui s’y engagent. L’élargissement du mariage aux personnes de même sexe entrainerait une modification profonde du droit du mariage et de la filiation pour tous, y compris pour les couples hétérosexuels.
Refuser l’homophobie
Une réforme en profondeur du mariage et de la filiation concerne tous les citoyens et devrait donc pouvoir faire l’objet d’un large débat. Celui-ci se heurte aujourd’hui à l’accusation d’homophobie qui vient fustiger toute interrogation.
Le respect des personnes
Cette situation a ses raisons d’être. Pendant longtemps, les personnes homosexuelles ont été condamnées et rejetées. Elles ont fait l’objet de toutes sortes de discriminations et de railleries. Aujourd’hui, cela n’est plus toléré, le droit proscrit toute discrimination et toute incitation à la haine, notamment en raison de l’orientation sexuelle, et il faut se féliciter de cette évolution.
Du côté de l’Eglise catholique, la Congrégation pour la doctrine de la foi invitait, dès 1976, les catholiques à une attitude de respect, d’écoute et d’accueil de la personne homosexuelle au cœur de nos sociétés. Dix ans plus tard, la même Congrégation soulignait que les expressions malveillantes ou gestes violents à l’égard des personnes homosexuelles méritaient condamnation. Ces réactions « manifestent un manque de respect pour les autres qui lèse les principes élémentaires sur lesquels se fonde une juste convivialité civile. La dignité propre de toute personne doit toujours être respectée dans les paroles, dans les actions et dans les législations »[2].
La lente évolution des mentalités
Si le respect de la personne est donc clairement affirmé, il faut bien admettre que l’homophobie n’a pas pour autant disparu de notre société. Pour les personnes homosexuelles, la découverte et l’acceptation de leur homosexualité relèvent souvent d’un processus complexe. Il n’est pas toujours facile d’assumer son homosexualité dans son milieu professionnel ou son entourage familial. Les préjugés ont la vie dure et les mentalités ne changent que lentement, y compris dans nos communautés et familles catholiques. Elles sont pourtant appelées à être à la pointe de l’accueil de toute personne, quel que soit son parcours, comme enfant de Dieu. Car ce qui, pour les chrétiens, fonde notre identité et l’égalité entre les personnes, c’est le fait que nous sommes tous fils et filles de Dieu. L’accueil inconditionnel de la personne n’emporte pas une approbation de tous ses actes, il reconnaît au contraire que l’homme est plus grand que ses actes.
Le refus de l’homophobie et l’accueil des personnes homosexuelles, telles qu’elles sont, font partie des conditions nécessaires pour pouvoir sortir des réactions épidermiques et entrer dans un débat serein autour de la demande des personnes homosexuelles.
Entendre la demande des personnes homosexuelles
Une réalité diversifiée
En fait, les données statistiques qui évaluent le nombre de personnes homosexuelles, le nombre de personnes vivant une relation stable avec un partenaire de même sexe ou le nombre d’enfants élevés par deux adultes de même sexe, sont rares et difficiles à interpréter. Sous cette réserve, plusieurs études montrent que les pratiques homosexuelles ont évolué et que l’aspiration à vivre une relation affective stable se rencontre plus fréquemment aujourd’hui qu’il y a 20 ans. Cette réalité n’est pour autant pas uniforme : la cohabitation sous le même toit, la relation sexuelle ou l’exclusivité du partenaire ne font pas toujours partie des éléments d’une telle relation stable.
Une demande de reconnaissance
La diversité des pratiques homosexuelles ne doit pas empêcher de prendre au sérieux les aspirations de celles et ceux qui souhaitent s’engager dans un lien stable. Le respect et la reconnaissance de toute personne revêtent désormais une importance primordiale dans notre société. Les discussions sur le multiculturalisme, le racisme, le féminisme et l’homophobie sont sous-tendues par cette demande de reconnaissance qui s’exprime aujourd’hui sur le mode égalitariste. La non-reconnaissance est expérimentée comme oppression ou discrimination. Certains poussent très loin ce discours égalitariste. Ils estiment que toute différence ouvre sur un rapport de pouvoir et en conséquence sur un risque de domination de l’un sur l’autre : domination de l’homme sur la femme, domination du blanc sur le noir, domination de l’hétérosexuel sur l’homosexuel, etc. Selon eux, la seule solution pour combattre l’oppression ou la discrimination serait alors de gommer les différences ou, en tout cas, de leur dénier toute pertinence dans l’organisation de la vie sociale.
Une volonté de gommer les différences
C’est dans ce contexte que s’inscrit le processus de transformation du mariage pour le rendre accessible aux personnes de même sexe. La demande vise à faire reconnaître que l’amour, entre deux personnes de même sexe, a la même valeur que l’amour, entre un homme et une femme. La différence entre les deux, au regard de la procréation naturelle, est gommée ou jugée non pertinente pour la société. La richesse que représente l’altérité homme/femme tant dans les rapports individuels que collectifs est passée sous silence. Seule semble compter la reconnaissance de la personne homosexuelle et le fait de mettre fin à la discrimination dont elle s’estime victime dans une société hétéro-normée.
La valeur d’une relation affective durable
La société, tout comme l’Eglise dans le domaine qui lui est propre, entend cette demande de la part des personnes homosexuelles et peut chercher une réponse. Tout en affirmant l’importance de l’altérité sexuelle et le fait que les partenaires homosexuels se différencient des couples hétérosexuels par l’impossibilité de procréer naturellement, nous pouvons estimer le désir d’un engagement à la fidélité d’une affection, d’un attachement sincère, du souci de l’autre et d’une solidarité qui dépasse la réduction de la relation homosexuelle à un simple engagement érotique.
Mais cette estime ne permet pas de faire l’impasse sur les différences. La demande des personnes homosexuelles est symptomatique de la difficulté qu’éprouve notre société à vivre les différences dans l’égalité. Plutôt que de nier les différences en provoquant une déshumanisation des relations entre les sexes, notre société doit chercher à garantir l’égalité des personnes tout en respectant les différences structurantes qui ont leur importance pour la vie personnelle et sociale.
Connaître les limites du PACS
Le Pacte Civil de Solidarité (PACS), créé en 1999, a de façon inattendue surtout été utilisé par les couples hétérosexuels qui représentent 95% des 174 523 PACS conclus en 2009 [3] . Pour ces derniers, il constitue une alternative au mariage, qui ouvre un certain nombre de droits fiscaux et sociaux, sans avoir le poids symbolique du mariage, et en conservant une totale liberté de rompre.
Des différences mal connues
Aujourd’hui, pour les couples hétérosexuels, les différences entre le PACS et le mariage sont importantes et mal connues. Le PACS est un contrat, le mariage est une institution. Au plan patrimonial, c’est dans le domaine du droit des successions, des régimes matrimoniaux et de la réversion de la pension au partenaire survivant que se situent les plus grandes différences. Mais ce sont cependant les effets d’ordre personnel et symbolique qui marquent le plus l’infériorité du PACS par rapport au mariage. Le PACS n’est pas conclu à la mairie mais au Tribunal ou devant notaire. Il ne produit aucun effet en matière de nom et n’entraîne aucun effet personnel. Notamment, le PACS n’impose aucune obligation de fidélité, il ne crée pas de lien d’alliance entre le pacsé et la famille de son partenaire et peut être rompu unilatéralement, par simple lettre recommandée avec accusé de réception. Aucune protection n’est prévue pour le partenaire délaissé ou les éventuels enfants nés de cette union. Bien souvent, les couples hétérosexuels pacsés en viennent au bout d’un certain temps à se marier, afin de donner plus de solidité et de solennité à leur union.
La recherche symbolique
Les personnes homosexuelles réclament aujourd’hui aussi une forme d’union plus solennelle, dotée d’un véritable poids symbolique et ne pouvant être rompue sans procédure ni indemnité. Dans leur revendication, la différence au regard de la procréation naturelle est mise de côté, comme un détail négligeable, pour ne garder du mariage que la sincérité et l’authenticité du lien amoureux. Il s’agit là d’une vision très individualiste du mariage qui n’est pas celle du droit français.
Prendre en considération le droit français
Une réforme du droit de la famille doit partir du droit existant et examiner en quoi celui-ci n’est plus adapté à la situation nouvelle et quelles seront les conséquences de la réforme envisagée pour les citoyens. Si le droit n’est qu’une technique humaine qui peut évoluer à tout moment, il n’en garde pas moins une fonction anthropologique : il dit quelque chose de notre vision de l’homme.
La fonction sociale du mariage
Le discours en faveur de l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe part d’une vision tronquée du droit. Il choisit de ne retenir du mariage civil que le lien amoureux et fait alors valoir que refuser le mariage aux personnes de même sexe est une discrimination car elles aussi sont amoureuses. Ne pas leur ouvrir l’accès au mariage revient alors à mettre en doute la sincérité et l’authenticité de leurs sentiments, voire leur capacité d’aimer. Or, il ne s’agit pas de cela. Contrairement à ce qui est soutenu, le mariage n’a jamais été un simple certificat de reconnaissance d’un sentiment amoureux. Le mariage a toujours eu la fonction sociale d’encadrer la transmission de la vie en articulant, dans le domaine personnel et patrimonial, les droits et devoirs des époux, entre eux et à l’égard des enfants à venir. La conception individualiste du mariage, véhiculée par le discours ambiant, ne se trouve pas dans les textes de loi.
La valeur symbolique du don total de soi
La haute valeur symbolique du mariage ne vient d’ailleurs pas du sentiment amoureux, par définition éphémère, mais de la profondeur de l’engagement pris par les époux qui acceptent d’entrer dans une union de vie totale. Cet engagement concerne la vie des conjoints (respect, fidélité, assistance, communauté de vie, contribution aux charges), la vie des familles (liens d’alliance, obligations alimentaires, empêchements au mariage), la vie des enfants (présomption de paternité, éducation, autorité parentale conjointe) et les tiers (solidarité des dettes ménagères). Compte tenu de l’importance de cet engagement, y compris à l’égard des tiers, il est régi par la loi et sa rupture est soustraite au bon vouloir des parties. Le divorce ne peut être prononcé que par le juge qui veillera à la protection des plus faibles et une répartition équitable des biens.
Ce qui confère au mariage sa haute valeur symbolique, c’est donc cet engagement de toute une vie, « pour le meilleur et pour le pire », ce pari un peu fou que l’amour humain puisse surmonter tous les obstacles que la vie nous réserve. Or, l’accueil des enfants nés de cette union de vie fait partie intégrante de cet engagement. Si le mariage a connu des variations dans l’histoire, il a toujours organisé le lien entre conjugalité et procréation. Encore aujourd’hui, en droit français, le mariage comporte une présomption de paternité, que connaissait déjà le droit romain (Pater is est quem nuptiae demonstrant). Destinée à rattacher juridiquement au mari les enfants mis au monde par la mère, cette présomption de paternité est la traduction juridique des conséquences naturelles de la promesse de fidélité et de vie commune que font les époux. Sans méconnaître que cette tradition juridique a aussi été porteuse de préjugés et d’injustices à l’égard des femmes, il convient de discerner ce qu’elle contient de sage et quelle est son importance pour la société.
Mesurer les enjeux pour l’avenir
Le mariage, tel qu’il existe aujourd’hui en droit français, assure le lien entre conjugalité et procréation et donc la lisibilité de la filiation. C’est là, en particulier, où le droit a une fonction anthropologique.
La vie est un don
Tout d’abord, en assurant le lien entre conjugalité et procréation, le droit vient nous rappeler que la vie est un don et que chacun la reçoit. Personne ne choisit son père et sa mère, personne ne choisit son lieu ou sa date de naissance. Ce sont pourtant ces « données » qui vont, à jamais, caractériser chacun comme un être unique au monde. Ces données incontournables de la filiation, qui s’imposent à chacun, viennent rappeler à l’homme qu’il n’est pas tout-puissant, qu’il ne se construit pas tout seul, mais qu’il reçoit sa vie des autres, d’un homme et d’une femme (et pour les croyants, d’un Autre).
Les deux sexes sont égaux et indispensables à la vie
Ensuite, faire le lien entre conjugalité et procréation est important pour la reconnaissance de l’égalité des sexes, qui sont l’un comme l’autre indispensables à la vie. Le fait d’être né d’un homme et d’une femme signe notre origine commune, notre appartenance à l’espèce humaine. La dualité sexuelle homme/femme est en effet une « propriété des vivants ».
Les droits des enfants
Enfin, la lisibilité de la filiation et l’inscription dans une histoire et une lignée sont essentielles pour la construction de l’identité. La Convention des Droits de l’enfant de l’ONU stipule expressément qu’un enfant, dans la mesure du possible, a droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux. Si les circonstances de la vie peuvent empêcher cela, il ne faudra pas que le législateur prenne l’initiative d’organiser l’impossibilité pour les enfants de connaître leurs parents ou d’être élevés par eux. Ce qui sera le cas s’il accède aux demandes de parenté des personnes homosexuelles que ce soit par le biais de l’adoption ou de la procréation médicalement assistée.
L’utilité sociale
A côté de ces fonctions anthropologiques fondamentales, le mariage a aussi une utilité sociale. Même s’il n’est plus l’unique porte d’entrée de la vie de famille, il continue à favoriser la stabilité conjugale et familiale, qui correspond à une aspiration profonde d’une très grande majorité de la population. Celle-ci est non seulement bénéfique pour ses membres, mais elle profite à toute la société car elle permet aux familles de mieux assumer leur rôle dans le domaine de l’éducation et de la solidarité. A défaut, c’est la collectivité qui doit prendre le relais.
Ces enjeux anthropologiques et sociaux ainsi que la protection des droits de l’enfant sont passés sous silence. Le discours dominant, égalitariste, choisit délibérément d’ignorer la différence entre les personnes homosexuelles et hétérosexuelles à l’égard de la procréation et veut faire croire que le lien entre conjugalité et procréation n’est pas pertinent pour la vie en société. Un coup d’œil sur les conséquences juridiques d’une telle réforme démontre le contraire.
Evaluer les conséquences juridiques de la réforme envisagée
Le sort de la présomption de paternité
En cas d’ouverture du mariage aux personnes de même sexe, se posera la question du sort de la présomption de paternité, actuellement prévue à l’article 312 du Code Civil.
La première solution possible est de décider que cette présomption ne s’appliquerait pas aux couples de même sexe. Il y aurait alors dans les faits deux types de mariages, et il importerait que les citoyens soient clairement informés de cette distinction. Cette hypothèse, retenue aux Pays-Bas et en Belgique, ne règle pas la question du lien entre la compagne de la mère et l’enfant de celle-ci. Une deuxième solution, plus radicale, consisterait à supprimer la présomption de paternité pour tous. Cela reviendra à instaurer officiellement la dissociation entre conjugalité et procréation et viderait le mariage de son sens. Quel sens peut avoir un mariage civil qui, en refusant de régler la transmission naturelle de la vie, n’honore plus la promesse de fidélité des époux ? Une troisième solution, encore plus radicale, a été retenue au Canada. La présomption de paternité est transformée en présomption de parenté et joue aussi pour les partenaires homosexuels : la compagne de la mère sera la « co-mère » de l’enfant. Dans ce cas, la lisibilité de la filiation, qui est dans l’intérêt de l’enfant, est sacrifiée au profit du bon vouloir des adultes et la loi finit par mentir sur l’origine de la vie !
La loi ne doit pas mentir sur l’origine de la vie
Les choses se compliquent encore davantage devant les questions d’adoption et de procréation médicalement assistée. Par exemple, comment concevoir une adoption plénière qui supprime la filiation d’origine et dit que l’enfant est « né de » ses parents adoptifs ? Faut-il faire croire à un enfant qu’il est né de deux hommes ou de deux femmes ? Les complications juridiques sont nombreuses. Tout notre système juridique est basé sur la distinction des sexes, puisque la transmission de la vie passe par la rencontre d’un homme et d’une femme.
Conclusion
S’il appartient au pouvoir politique d’entendre la demande d’un certain nombre de personnes homosexuelles de bénéficier d’un cadre juridique solennel pour inscrire une relation affective dans le temps, c’est en fonction du bien commun dont il est garant qu’il doit chercher à y répondre.
L’Eglise catholique appelle les fidèles à vivre une telle relation dans la chasteté, mais elle reconnaît, au-delà du seul aspect sexuel, la valeur de la solidarité, de l’attention et du souci de l’autre qui peuvent se manifester dans une relation affective durable. L’Eglise se veut accueillante à l’égard des personnes homosexuelles et continuera à apporter sa contribution à la lutte contre toute forme d’homophobie et de discrimination.
La demande de l’élargissement du mariage civil ne peut être traitée sous le seul angle de la non-discrimination car cela suppose de partir d’une conception individualiste du mariage, qui n’est pas celle du droit français pour qui le mariage a une claire vocation sociale.
Prétendre régler les problèmes de domination et d’abus de pouvoir, qui existent effectivement dans la société, par l’ignorance des différences entre les personnes, semble une option idéologique dangereuse. Les différences existent et c’est une bonne chose. La différence des sexes est une heureuse nouvelle.
La demande d’élargissement du mariage aux personnes de même sexe met la société au défi de trouver des nouvelles formes pour vivre les différences dans l’égalité. Pour cela, le législateur sera amené à opérer des arbitrages délicats entre des intérêts individuels contradictoires. Le propre du pouvoir politique est en effet de défendre non seulement les droits et les libertés individuels, mais aussi et surtout le bien commun. Le bien commun n’est pas la somme des intérêts individuels. Le bien commun est le bien de la communauté tout entière. Seul le souci du bien commun peut venir arbitrer les conflits de droits individuels.
La véritable question est alors de savoir si, dans l’intérêt du bien commun, une institution régie par la loi doit continuer à dire le lien entre conjugalité et procréation, le lien entre l’amour fidèle d’un homme et d’une femme et la naissance d’un enfant, pour rappeler à tous que :
• la vie est un don
• les deux sexes sont égaux et l’un comme l’autre indispensables à la vie
• la lisibilité de la filiation est essentielle pour l’enfant
Une évolution du droit de la famille est toujours possible. Mais plutôt que de céder aux pressions de différents groupes, la France s’honorerait à instaurer un vrai débat de société et à chercher une solution originale qui fasse droit à la demande de reconnaissance des personnes homosexuelles sans pour autant porter atteinte aux fondements anthropologiques de la société.
[1] Selon Paul Ricoeur, « est démocratique, une société qui se reconnaît divisée, c’est-à-dire traversée par des contradictions d’intérêt et qui se fixe comme modalité, d’associer à parts égales, chaque citoyen dans l’expression de ces contradictions, l’analyse de ces contradictions et la mise en délibération de ces contradictions, en vue d’arriver à un arbitrage », Dictionnaire de la Langue française, « Démocratie ».
[2] Documentation catholique 1976, n°1691, §8 ; Documentation catholique 1986, n°83, p. 1160-1164.
[3] http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATTEF02327
Voir aussi:
Le grand rabbin de France s’oppose au mariage homo
Jean-Marie Guénois
Le Figaro
18/10/2012
Gilles Bernheim a envoyé à François Hollande et Jean-Marc Ayrault un document de 25 pages pour expliquer son hostilité au projet de loi.
«Il n’y aurait ni courage ni gloire à voter une loi en usant davantage de slogans que d’arguments et en se conformant à la bien-pensance dominante par crainte d’anathèmes.» Gilles Bernheim, grand rabbin de France, donc la plus haute autorité religieuse du judaïsme français, prend position contre le projet de loi sur le mariage homosexuel.
Il a envoyé un document qui explique sa position par coursier, mercredi soir, au président de la République et au premier ministre. Le texte a été également adressé à tous les ministres, à tous les parlementaires et aux instances concernés par cette question.
Gilles Bernheim, philosophe de formation, déteste la pensée slogan et l’obligation de réagir instantanément pour des besoins médiatiques. En homme de réflexion, il a donc pris le temps de rédiger un «essai» sur le sujet: vingt-cinq pages publiées virtuellement et disponibles en téléchargement sur son site.
Après les catholiques, en pointe sur le sujet, les protestants évangéliques également parmi les premiers à avoir contesté ce projet de loi, les musulmans, les orthodoxes et finalement la Fédération protestante de France, le 13 octobre dernier, c’est à présent le judaïsme qui exprime ses doutes sur le sujet. Et désormais toutes les religions en France s’opposent à cette évolution de société
Dans ce document intitulé «Mariage homosexuel, homoparentalité et adoption: ce que l’on oublie de dire», le grand rabbin de France cherche à expliquer les «véritables enjeux de la négation de la différence sexuelle», commente le rabbin Moché Lewin, son collaborateur.
Un préjudice
De fait, précise Gilles Bernheim, «à l’heure de conclure, il ressort que les arguments invoqués d’égalité, d’amour, de protection ou de droit à l’enfant se démontent et ne peuvent, à eux seuls, justifier une loi».
Il poursuit: «Ce qui pose problème dans la loi envisagée, c’est le préjudice qu’elle causerait à l’ensemble de notre société au seul profit d’une infime minorité, une fois que l’on aurait brouillé de façon irréversible trois choses:
– les généalogies en substituant la parentalité à la paternité et à la maternité;
– le statut de l’enfant, passant de sujet à celui d’un objet auquel chacun aurait droit;
– les identités où la sexuation comme donnée naturelle serait dans l’obligation de s’effacer devant l’orientation exprimée par chacun, au nom d’une lutte contre les inégalités, pervertie en éradication des différences.
Ces enjeux doivent être clairement posés dans le débat sur le mariage homosexuel et l’homoparentalité. Ils renvoient aux fondamentaux de la société dans laquelle chacun d’entre nous a envie de vivre.»
Voir aussi:
Les protestants français contre le mariage homosexuel
Jean-Marie Guénois
Le Figaro
12/10/2012
Le conseil de la Fédération protestante de France prépare une déclaration contre le projet du gouvernement. Elle s’ajoutera à celles des catholiques et des orthodoxes. Juifs et musulmans sont également contre.
Après les catholiques et les orthodoxes, les protestants français devraient prendre officiellement position samedi contre le projet de loi sur le mariage homosexuel. Le conseil de la Fédération protestante de France (FPF) est en effet réuni ce week-end à Paris et cette question figure en bonne place à l’ordre du jour.
Le pasteur Claude Baty, président de la FPF, n’a jamais caché son opposition «personnelle» à cette perspective: «le mariage pour tous est une fausse bonne idée qui a été mal évaluée». Ni sa «frustration» après son rendez-vous, il y a trois semaines, chez la ministre de la Justice, Christiane Taubira. Une impression d’avoir été consulté pour la forme mais de ne pas avoir été entendu sur le fond: «On vous demande votre avis mais on n’en tient pas compte! Cela donne l’impression que les choses sont décidées à l’avance».
Une dimension sacramentelle
Mais cette fois, c’est au nom de tous les protestants français – qui pèsent plus que leur nombre, ils sont près de deux millions – que Claude Baty va prendre position contre ce projet. Une motion en ce sens devrait être votée sans surprise, par le conseil d’administration de cette institution. Le Conseil national des évangéliques de France (CNEF) qui regroupe les Églises protestantes de type évangélique (une structure indépendante de la FPF) avait déjà pris, dès le début de la polémique, une position très nette contre cette évolution de société.
Contrairement aux catholiques ou aux orthodoxes, les protestants n’accordent toutefois pas au mariage une dimension «sacramentelle». Le mariage consiste en une simple «bénédiction». Ce n’est donc pas pour des motifs ecclésiaux que les protestants s’opposent au mariage homosexuel. Certaines Églises protestantes – note-t-on à la Fédération qui est une association d’Églises – peuvent d’ailleurs pratiquer la bénédiction d’union homosexuelle, mais cela reste exceptionnel.
À ce titre, Claude Baty précise: «le texte biblique parle peu de ce sujet. Jésus lui-même n’en a jamais parlé, ce qui ne veut pas dire qu’il approuve. Cela nous indique que nous ne devons pas nous polariser là-dessus. L’homosexualité n’est pas le centre de la foi chrétienne. Et nous ne voulons pas nous laisser enfermer dans cette problématique».
Souffrance des homosexuels
C’est encore moins par «homophobie» que les chrétiens protestants rejettent une telle loi. Déjà en 1994, ils avaient publié une analyse remarquée sur le phénomène homosexuel. Une attention à cette question que le pasteur Claude Baty explique: «Nous devons reconnaître la souffrance des homosexuels qui ont souvent été discriminés. Et les chrétiens ne sont pas absents de cette discrimination.» D’où leur appel à «être accueillant» face aux personnes homosexuelles. C’est «très important à redire», insiste Claude Baty «car nous ne devons pas nous cacher derrière notre bonne conscience, comme si nous n’avions rien à voir avec cela».
Plus fondamentalement le «non» des protestants au mariage homosexuel s’enracine dans la conscience qu’ «il y a, dans la création, une volonté de différenciation des sexes», indique Claude Baty. «Le “mélange” n’est pas biblique, il y a un certain “ordre” des choses, qu’on le veuille ou non. Et il y a bel et bien une différence. Prôner l’égalité à tout prix va à l’encontre de cette volonté de différenciation entre l’homme et la femme. Or, sans différenciation, il n’y a pas de ”vis-à-vis“, pas de dialogue, pas de construction. Le mariage pour tous est donc une fausse égalité.»
L’enjeu est certes «symbolique» mais il n’est pas anodin: «le mariage que l’on connaît aujourd’hui a perdu de sa clarté. Jusque dans les années 1970, c’était un engagement, avec tout ce qui relève de la responsabilité à l’égard de l’autre, des enfants, avec une structure sociale. Tout cela a été gommé au nom de la grande fête libertaire soixante-huitarde. On a voulu faire du mariage une sorte de célébration du sentiment, avec l’idée qu’à partir du moment où l’on ne s’aime plus, on n’est plus marié».
Les protestants sont également opposés à l’adoption d’enfants par ces couples: «Il y a une certaine naïveté, dénonce Claude Baty, à nous faire croire que le mariage entre personnes du même sexe ne posera pas de problème chez des enfants, qui devront en référer au parent 1 ou au parent 2.»
De même, la procréation médicalement assistée pour ces couples le fait bondir: «Il est absurde de remettre en cause ce qui est depuis toujours le fonctionnement normal de l’humanité, à savoir qu’il faut un homme et une femme pour faire un enfant.»
Sans illusion sur la volonté du gouvernement «d’ouvrir un débat» enfermé qu’il est dans «une promesse de campagne électorale», Claude Baty entend donc au nom des protestants français apporter sa pierre à cette question de société mais il reste «dubitatif sur le fait que cela puisse faire changer les choses».
Voir également:
L’Église de France «refuse l’homophobie»
Jean-Marie Guénois
Le Figaro
28/09/2012
Un document publié jeudi soir par la conférence des évêques affirme vouloir entendre «la demande des personnes homosexuelles» pour travailler «à une solution originale» mais sans remettre en cause le mariage traditionnel comme le prévoit le gouvernement.
«L’Église se veut accueillante à l’égard des personnes homosexuelles et continuera à apporter sa contribution à la lutte contre toute forme d’homophobie et de discrimination.» Publié par surprise, jeudi en fin d’après midi, un long document issu du «conseil famille et société» de la conférence des évêques de France affirme «refuser l’homophobie» et cherche à «entendre la demande des personnes homosexuelles» en vue d’«ouvrir un vrai débat» sur le projet de loi sur le mariage homosexuel.
Signé par les douze personnes de ce conseil (quatre évêques dont Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre, mais aussi le psychanalyste Jacques Arènes, et la religieuse Geneviève Médevielle, professeur de théologie morale), ce document ne concède toutefois rien à la position de l’Église catholique – «le discours en faveur de l’ouverture du mariage aux personnes du même sexe part d’une vision tronquée du droit» – mais cherche à approfondir comme jamais toutes les dimensions du problème posé afin d’aboutir à une «solution originale qui fasse droit à la demande de reconnaissance des personnes homosexuelles sans pour autant porter atteinte aux fondements anthropologiques de la société». Car «une évolution du droit de la famille est toujours possible».
Le premier problème soulevé est en particulier celui de l’absence de «langage partagé» sur le sujet. «Les discours, parfois idéologiques, se croisent» déplore l’Église de France dont celui consistant «à penser que le mariage est ordonné à la fondation d’une famille et qu’il ne peut donc concerner que les couples hétérosexuels»… Le texte dénonce donc l’absence de «débat politique» et regrette que «si toute réticence ou interrogation devant cette réforme du droit de la famille est qualifiée a priori “d’homophobe”, il ne peut y avoir de débat au fond. Il en va de même lorsque la requête des personnes homosexuelles est disqualifiée a priori.»
À ce titre, ce document – qui rappelle des enseignements validés par la Congrégation pour la Doctrine de la foi dès 1976 – appelle de façon très nette à «refuser l’homophobie». Il constate qu’«il n’est pas toujours facile d’assumer son homosexualité dans son milieu professionnel ou son entourage familial. Les préjugés ont la vie dure et les mentalités ne changent que lentement, y compris dans nos communautés et familles catholiques». Mais, estiment les signataires: «Le refus de l’homophobie et l’accueil des personnes homosexuelles, telles qu’elles sont, font partie des conditions nécessaires pour pouvoir sortir des réactions épidermiques et entrer dans un débat serein autour de la demande des personnes homosexuelles.» Il faut donc, insistent-ils encore, «entendre la demande des personnes homosexuelles».
S’ensuivent des considérations sur «les limites du pacs (pacte civil de solidarité)» et sur la «recherche symbolique» de la part des couples homosexuels d’une «forme d’union plus solennelle» mais qui ne cherche à «ne garder du mariage que la sincérité et l’authenticité du lien amoureux». Soit «une vision très individualiste du mariage qui n’est pas celle du droit français». Sont également étudiées les «conséquences juridiques» de la réforme envisagée dont «la présomption de paternité» et le fait que «la loi ne doit pas mentir sur l’origine de la vie».
Reste à évaluer l’autorité de ce texte. Il est qualifié dans une introduction écrite de «note de travail» par le porte-parole de l’épiscopat Mgr Bernard Podvin. Mais il est aussi extrêmement fouillé et se veut aux antipodes d’un débat déjà très clivé. De plus, alors que la polémique s’enflamme, aucune annonce officielle n’a curieusement été faite pour le présenter et le diffuser. Il a été publié, sans crier gare, sur le site de l’Église de France.
Ce qui laisse supposer, compte tenu des différentes interventions d’un autre style contre ce projet de loi, menées ces derniers temps par les cardinaux André Vingt-Trois, président de la conférence des évêques, et Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, que des divergences existent dans l’Église de France sur la méthode à appliquer pour affronter cette question.
Voir de plus:
Mariage homosexuel: aucun maire ne pourra y déroger, martèle Vallaud-Belkacem
Le Nouvel Observateur
11-10-2012
PARIS (Sipa) — Aucun maire ne pourra se soustraire à son devoir de célébrer un mariage homosexuel, a prévenu jeudi sur i>télé la ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem.
« C’est juridiquement impossible », a martelé la benjamine du gouvernement. « Je vous rappelle que chacun est censé connaître, appliquer la loi et cela vaut tout particulièrement pour ceux qui ont été élus par les Français ». Plusieurs maires UMP ont en effet déjà fait savoir que s’il était possible de faire valoir une clause de conscience, ils ne célébreraient pas personnellement de mariage entre deux personnes du même sexe.
« Il ne s’agit pas de faire plaisir à telle ou telle catégorie de Français, il s’agit d’offrir à l’ensemble des Français l’accès à un même droit sans discrimination liée à l’orientation sexuelle », a affirmé la ministre.
Alors que le projet de loi sur l’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples homosexuels sera présenté en conseil des ministres le 31 octobre, des maires font déjà savoir qu’ils refuseront de célébrer de telles unions, au risque de se mettre hors la loi.
« Je suis favorable à une clause de conscience pour les élus qui ne souhaitent pas célébrer de mariage gay », a affirmé Nadine Morano (UMP) jeudi sur son compte twitter. Interrogé sur RTL, le député-maire UMP de Nice Christian Estrosi a affirmé quant à lui qu’il serait « respectueux des lois de la République » et qu’il ne s’opposerait donc pas à la célébration d’un mariage homosexuel s’il devenait légal.
« En tant que maire, moi, personnellement, j’applique les lois de la République », a également affirmé Laurent Wauquiez sur Radio Classique. « Donc si dans le projet de loi est laissée la possibilité au maire d’avoir un droit de retrait, éventuellement je l’exercerai. Si dans la loi, ce n’est pas prévu, je l’appliquerai ».
« Je n’aime pas cette idée de maires qui se mettent en opposition avec l’ordre républicain. Donc j’appliquerai la loi », a-t-il insisté.
Le projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples homosexuels n’évoque pas la procréation médicalement assistée (PMA), a par ailleurs confirmé jeudi Mme Vallaud-Belkacem. Selon elle, la question pourrait en revanche faire l’objet de discussions au sein de l’Assemblée nationale et être comprise dans une autre loi.
Voir enfin:
L’église catholique contre le mariage homosexuel, trois arguments qui ne tiennent pas
Une tribune d’Yves Ferroul, médecin, sexologue et écrivain.
Slate
19.08.2012
L’Église catholique s’oppose au mariage homosexuel en avançant plusieurs arguments. D’abord, l’homosexualité serait, en soi, «une dépravation grave» (Catéchisme, § 2357). Ensuite, le mariage est un sacrement qui lie un homme et une femme. Enfin, un enfant a besoin d’un père et d’une mère pour s’épanouir.
Le premier argument est censé s’appuyer sur des textes de la Bible, dont le plus célèbre est l’épisode de Sodome et Gomorrhe: ces deux villes auraient été détruites par Dieu pour punir leurs habitants de leur homosexualité
Or, pour les historiens, cet épisode illustre l’impiété et un refus d’hospitalité envers l’étranger, comme le confirment l’épisode parallèle de Gidéa (Juges, XIX, 22-25) ainsi que toutes les références à Sodome dans le reste de la Bible comme dans les évangiles.
D’autres textes renvoient à des lettres de Paul, mais des erreurs de traduction les annulent. Le seul texte explicite est celui du Lévitique (XX, 13), mais il est inséré dans un ensemble de prescriptions rituelles juives dont les chrétiens se sont affranchis dès l’époque de Paul, ce qui rend curieuse la volonté de s’accrocher à tout prix à cette seule interdiction, en ignorant toutes les autres
D’ailleurs des protestants, plus conséquents, ne s’estiment pas concernés par ces malédictions, et ont accepté d’ordonner des pasteurs homosexuel(le)s et de marier des personnes de même sexe. (Pour le point de vue d’un catholique marié contraire à celui de la hiérarchie, cf. Bruno Grange, La Sexualité, chemin vers Dieu, éd. Du Signe. Pour une étude détaillée de l’épisode de Sodome).
Le deuxième argument n’est valable qu’à l’intérieur de la communauté catholique. Pour la société civile, le mariage est un contrat qui a été mis en place il y a environ 8 à 10.000 ans, quand les sociétés humaines se sont structurées autour de l’agriculture et de l’élevage.
Auparavant, on a toutes les raisons de penser que les groupes humains vivaient à peu près comme les autres chimpanzés, les macaques ou les babouins, en sociétés ignorant la paternité et dont les petits étaient élevés par les mères, les femmes de la famille de la mère, et les hommes «amis» de la mère: chaque individu devait chercher personnellement sa nourriture quotidienne, et personne ne pouvait asservir autrui.
Mais à partir du moment où du grain pouvait être stocké, que des bêtes pouvaient être accumulées, des «dominants» sont apparus qui ont pu monopoliser la nourriture et ainsi s’asservir des congénères. Le contrat définissant la répartition des biens en cas d’alliance devient nécessaire.
Accaparer les femmes qui vont donner les enfants, héritiers ou main d’œuvre, doit se faire dans les règles, par des accords entre clans de dominants. Le «mariage» n’est que ce contrat social. Cet état des choses est bien reflété dans la Bible juive, dans l’Ancien Testament chrétien.
Les Grecs et les Romains ont toujours ce contrat privé entre les familles. En Europe, c’est très tard que l’Église catholique finira par imposer un mariage devant témoin (le mariage à l’église: XVIe siècle?). La Révolution française le transforme en contrat devant l’État, qui définit ses clauses et en garantit le respect.
L’État ne s’occupe pas des raisons du mariage (si les individus s’aiment ou non, veulent des enfants ou non, ne sont mus que par l’intérêt ou pas, etc.): il prend fait que deux individus veulent lier leurs vies, et définit les conditions matérielles dans lesquelles cela peut se faire, en proposant aujourd’hui le choix entre deux types de contrats (pacs ou mariage) et en laissant la liberté de ne pas établir de contrat (concubinage).
On ne voit donc pas ce qui empêcherait, par principe, un tel contrat entre deux personnes de même sexe, ce que constataient déjà les juristes romains comme Cicéron (cf. Jared Diamond, Le Troisième chimpanzé, Folio).
Le troisième argument, qui affirme qu’un enfant a besoin d’un père et d’une mère pour se construire, ne correspond pas à la quasi-totalité de l’histoire humaine. De plus, il occulte les problèmes posés par la famille nucléaire («familles, je vous hais»), par les ruptures de couples (familles monoparentales, recomposées) ainsi que l’état de fait actuel des dizaines de milliers d’enfants élevés par des couples homosexuels.
Cet argument tient à l’évidence de l’idée reçue et du préjugé, et n’a pas de fondement dans le concret des situations réellement vécues. Et notons également le paradoxe de ces hétéros qui refusent aux homos de s’occuper d’enfants, quand on connaît le chiffre des gosses maltraités et abusés par de bons hétéros, vivant en couples hétéros.
Souvenez-vous: les catholiques objectaient déjà que la liberté d’avorter allait conduire à une prolifération infinie du massacre des fœtus; que la famille allait disparaître avec l’instauration du pacs! À force de crier «au loup!» sans que personne ne voie de loup surgir, les catholiques ont convaincu la majorité des français qu’ils étaient de piètres prédicateurs d’avenir.
N’ayons donc pas peur de l’avenir de la famille, et laissons les homosexuels qui le désirent se marier et élever des enfants: la société en sera plus humaine et plus riche dans sa diversité!
Voir enfin:
Fabrice Madouas
Valeurs actuelles
20/09/2012
Xavier Bongibault Entretien Xavier Bongibault préside l’association Plus gay sans mariage qui veut regrouper des personnes homosexuelles hostiles au projet du gouvernement.
Vous avez créé Plus gay sans mariage au mois de juillet. Dans quel but ? Nous souhaitons faire entendre la voix des personnes homosexuelles qui sont contre l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe. Le projet du gouvernement est loin de faire l’unanimité au sein de la communauté gay. Contrairement à ce qu’affirment les médias, cette revendication n’est pas majoritaire chez les homosexuels. La plupart s’en moquent, mais l’influence des associations LGBT [lesbiennes, gay, bi et trans, NDLR] est telle que beaucoup n’osent pas le dire.
Pourquoi y êtes-vous hostile ? Mes arguments sont ceux de toutes les personnes qui contestent ce projet : un enfant a besoin d’un père et d’une mère. Respectons cet équilibre familial, qui est aussi nécessaire à l’équilibre de la société : on ne peut pas tout chambouler sans plus de réflexions. Avant de trancher, qu’il y ait au moins un débat sur des questions qui engagent l’avenir de la société, pas seulement celui des couples homosexuels.
Qu’est-ce qui, selon vous, incite les associations LGBT à défendre cette cause ? Je crois qu’elles étaient à cours de revendications et qu’il leur fallait en trouver une. Leurs revendications étaient nécessaires dans les années1970 et 1980, leur combat contre les discriminations était juste.
Mais c’est une époque que je n’ai pas connue. J’ai 21 ans, je ne me sens victime d’aucune discrimination aujourd’hui. Je pense que ces associations sont dans une logique de surenchère permanente.
Vous vous engagez contre ce projet. Quelles sont les réactions au sein de la communauté homosexuelle ? Dès lors que vous êtes contre le mariage, contre l’adoption, les militants LGBT jugent que vous êtes réactionnaire, voire fasciste, et forcément homophobe – ce qui, dans mon cas, est pour le moins paradoxal ! En revanche, ceux qui me connaissent me disent “C’est très bien ce que tu fais” mais ils n’osent pas encore franchir le pas. Beaucoup redoutent de perdre des amis. Ils ont peur de parler.
Qu’est-ce qui vous a incité, vous, à franchir le pas ? D’abord, je ne supportais plus qu’on ne puisse pas s’exprimer sur ce sujet. Ensuite, j’avais l’impression que le gouvernement se servait de ce projet comme d’un paravent, qu’il cherchait à détourner l’attention de l’opinion. Ce qui s’est passé ces derniers jours le prouve : Christiane Taubira en a reparlé juste après l’intervention télévisée de François Hollande et l’annonce de milliards d’euros d’impôts supplémentaires. Je trouve cela choquant.
Les militants LGBT voient souvent la main de l’Église derrière l’opposition à ce projet. Êtes-vous croyant ? Pas du tout, je suis athée. Je ne cherche pas à préserver des traditions, juste un peu de bon sens. De quoi parle-t-on ? Du mariage civil ! C’est le mariage civil que je veux préserver, le code civil. Cela ne fait pas de moi un catholique…
Avez-vous un engagement politique ? Je suis adhérent à l’UMP, mais pas vraiment militant.
On entend peu les dirigeants de l’UMP sur ce sujet. Qu’attendez-vous d’eux ? Je souhaite qu’ils restent fidèles à la ligne qu’avait définie Nicolas Sarkozy pendant la campagne électorale : qu’ils s’opposent clairement au mariage et à l’adoption par les couples de même sexe.
Comment susciter le débat que vous appelez de vos voeux ? En mobilisant l’opinion publique par tous les moyens : la presse, évidemment, mais aussi, pourquoi pas, des happenings. Il est important de faire monter sur scène des personnes qui sont contre ce projet mais qui n’osent pas encore le dire. Actuellement, seuls ses partisans ont accès aux médias audiovisuels. Qu’il y ait des pour, des contre, mais surtout, qu’il y ait un débat !
Êtes-vous favorable à l’organisation d’un référendum ? Nous réclamons d’abord l’organisation d’états généraux contre la précarité familiale, car le lien familial ne doit pas être menacé mais au contraire consolidé. C’est notre priorité. Si nous n’obtenons pas du gouvernement la tenue de ces états généraux, l’organisation d’un référendum peut être envisagée.
Certains élus locaux voudraient bénéficier d’une clause de conscience, les dispensant de célébrer des mariages auxquels ils s’opposent. Qu’en pensez-vous ? Pratiquement, cette clause serait sans doute difficile à mettre en oeuvre, mais cette demande des élus locaux me semble légitime, dans le cadre de ce débat.
Vous êtes jeune. Avez-vous mesuré que vous allez vous retrouver au coeur d’une polémique parfois violente ? Cela ne me fait absolument pas peur. J’ai des convictions, partagées par beaucoup d’homosexuels. Dans une démocratie, il est bon qu’elles soient clairement exposées et discutées, quel que soit le prix à payer. Propos recueillis par Fabrice Madouas
Xavier Bongibault