Education: My tailor is rich ! (Anywhere people: France’s start up nation prepares its world city’s future expatriates)

8 novembre, 2021

My tailor is rich. Where is Brian? – Et maintenant in English

Paris  c’est  une  ville-monde. Maîtriser l’anglais à la fin du collège, c’est indispensable dans sa vie professionnelle, pour voyager, pour être pleinement intégré dans le monde. Benjamin  Griveaux (candidat LREM  à  la  mairie  de  Paris, 2019)
J’ai souhaité entamer cette rentrée politique par l’éducation car c’est la pierre angulaire qui permet à l’enfant de construire sa vie. C’est la clé de l’émancipation et de la liberté. J’ai demandé à Carole Diamant de présider un Conseil de l’éducation composé de spécialistes, de Parisiens et de jeunes qui pourront nous éclairer sur les choix à faire. J’ai un projet qui me tient particulièrement à cœur : permettre aux enfants de devenir parfaitement bilingues en anglais à la fin du collège. (…) Tous les linguistes disent que l’apprentissage doit se faire avant 11 ans, notamment pour l’oral. Notre idée est de proposer une immersion dans les crèches et dans les écoles sur le temps périscolaire en s’appuyant sur des ressortissants étrangers ou des professeurs d’anglais. Pour que le bilinguisme ne soit réservé pas aux plus prestigieuses institutions parisiennes. (…) L’amélioration de la qualité de l’air à Paris passe par des mobilités plus propres évidemment. Mais on peut agir demain très concrètement dans les salles de classe où nos enfants passent cinq à six heures par jour. Changer les systèmes de ventilation, les fameuses VMC, dans les 8 000 salles de classe parisiennes représentera 10 M€ par an pendant six ans. Pour une ville qui investit 1,5 milliard par an, consacrer 10 millions à la santé des élèves parisiens cela semble raisonnable et possible et je m’étonne que cela n’ait pas encore été fait. Enfin, je propose qu’il y ait trois examens respiratoires : l’un à l’entrée en maternelle à 3 ans, l’autre à l’entrée en CP à 6 ans et le dernier à l’entrée en collège à 11 ans. (…) Il y a ceux qui promettent la révolution et qui ne tiennent pas leurs promesses. Moi je préfère le petit matin au grand soir. C’est en additionnant les petits pas qu’on y arrivera. (…) Les enfants en situation de handicap ne doivent plus être à part mais intégrés au sein de la communauté éducative comme au Canada ou en Belgique. Il faut commencer par rendre accessibles les écoles et les stations de métro les desservant. Benjamin Griveaux
Les jeunes enfants apprennent très vite et très bien les langues étrangères. Benjamin Griveaux m’a chargée de piloter ce Conseil de l’éducation composé d’une dizaine de spécialistes et de gens de bonne volonté qui seront chargés de faire émerger des propositions, la première concernant l’apprentissage de l’anglais. Ce conseil réfléchira aussi à la façon de sensibiliser les enfants dès le plus jeune âge aux questions d’environnement, aux dépenses énergétiques ou au recyclage des déchets et du papier qui sont les enjeux de demain. Carole Diamant
65 % des jeunes de dix-sept à vingt-trois ans dont les parents sont  CSP+  sont  déjà  allés  plusieurs  fois  en  vacances  ou  en  voyage  à  l’étranger  contre  46  %  des  jeunes  issus  des  classes  moyennes  et  seulement 38 % de ceux dont les parents sont employés ou ouvriers. Ce  clivage  social  se  double  d’une  fracture  territoriale.  La  proportion  de  jeunes  ayant  eu  l’occasion  de  partir  plusieurs  fois  à  l’étranger  décline  linéairement  avec  le  gradient  d’urbanité  :  58  %  dans  l’agglomération parisienne, 48 % dans les agglomérations de plus de 100  000  habitants,  43  %  dans  celles  de  20  000  à  100  000  habitants,  39  %  dans  celles  de  moins  de  20  000  habitants  et  seulement  30  %  au  sein  des  communes  rurales.  L’habitus  international  ne  s’acquiert  pas  qu’au  travers  de  voyages  et  de  séjours  à  l’étranger  mais  aussi,  bien  entendu,  grâce  à  la  maîtrise  de  la  langue  internationale  reine  :  l’anglais. Forts de ce constat, 34 % des jeunes ayant des parents CSP+ ont bénéficié à un moment ou à un autre de leur scolarité de cours de  langues  extra-scolaires  payés  par  leurs  parents  contre  21  %  des  enfants  de  la  classe  moyenne  et  23  %  des  enfants  issus  des  milieux  populaires. En la matière, le clivage géographique entre Franciliens et provinciaux est encore plus marqué que le critère social, comme si le fait d’habiter dans une métropole pleinement mondialisée rendait encore  plus  évidente  la  nécessaire  maîtrise  des  langues  étrangères.  Seulement   23   %   des   jeunes   provinciaux   ont  ainsi  eu  droit  à  des  cours  de  langues  étrangères  payés  par  leurs  parents  contre  42    %  des  Franciliens.  Cet  écart  quasiment  du  simple  au  double  met  en  évidence  une  nouvelle  inégalité  en  train  de  fausser  très  profondément  la  compétition  scolaire.  La  sélection sur les mathématiques, jusqu’alors pratiquée,  était  censitairement  beaucoup  moins violente qu’une sélection sur la maîtrise de l’anglais et d’autres langues étrangères, capacité bien plus liée aux origines sociales et au capital culturel hérité que le niveau en mathématiques. Ces  chiffres  montrent,  par  ailleurs,  que  l’acquisition  d’une  langue  étrangère  est  devenue  un  enjeu  majeur  pour  toute  une  partie  de  la  population  de  la  métropole  parisienne.  Cette  demande  sociétale  d’un  nouveau  genre  n’a  pas  échappé  à  Benjamin  Griveaux,  candidat LREM  à  la  mairie  de  Paris,  qui  a  intégré  en  bonne  place  dans  son  programme de campagne l’objectif que tous les adolescents parisiens soient  bilingues  anglais  à  la  sortie  du  collège. (…) À notre connaissance, c’est la première fois que dans une campagne municipale la maîtrise de l’anglais est affichée comme un objectif politique. Il n’est pas anodin que ce soit un représentant de LREM qui se soit emparé de ce sujet car l’électorat macronien comprend, notamment  à  Paris,  une  très  forte  population  de  cadres  et  de  diplômés  du  supérieur,  catégories  très  ouvertes  sur  l’international.  Ces  électeurs  macroniens  correspondent  en  tout  point  aux  «  people  from  anywhere » (ceux de partout) que l’essayiste David Goodhart oppose dans  son  analyse  brillante  sur  la  société  britannique  aux  «  people  from somewhere » (ceux de quelque part). David Goodhart insiste à juste titre sur l’ampleur de la fracture séparant ces deux populations tant en termes de niveau éducatif, de rapport à l’immigration et à la globalisation, de goûts culturels, d’attitude face au changement ou de degré d’attachement au cadre national. Si tout les oppose donc, ces deux  groupes  ont  néanmoins  quelque  chose  en  commun  :  l’anglais,  qui est à la fois leur langue maternelle mais également la langue internationale par excellence.De ce point de vue, et au regard des chiffres évoqués précédemment, le clivage entre « Somewhere » et « Anywhere » pourrait bien à  terme,  en  France,  se  creuser  davantage  qu’en  Grande-Bretagne  ou aux États-Unis. Du fait de la tertiairisation des économies occidentales, les secteurs de la logistique (en lien avec l’import/export) et  du  tourisme  fournissent  de  nombreux  emplois  peu  qualifiés  mais  nécessitant  souvent  un  minimum  de  maîtrise  de  l’anglais.  En  Grande-Bretagne ou aux États-Unis, ces jobs peuvent être occupés par les « people from somewhere » locaux. En France, c’est moins évident.  De  la  même  manière,  un  jeune  Britannique  ayant  grandi  dans une famille ouvrière du Yorkshire ou des Midlands aura moins de difficultés culturelles et linguistiques à s’expatrier pour trouver un emploi  dans  l’anglosphère  (États-Unis,  Canada,  Australie…)  qu’un  fils d’ouvrier de Lens ou d’Alès. Les enfants des « Somewhere » français n’ont, en effet, contrairement à leurs homologues britanniques et américains, pas hérités de la maîtrise de l’anglais à la naissance. Ce capital, les enfants des « Anywhere » tricolores sont en train de l’acquérir à marche forcée pour ressembler à leurs alter ego d’outre-Manche  et  d’outre-Atlantique  avec  qui  ils  ont  vocation  à  être  en  compétition  dans  un  marché  du  travail  des  cadres  supérieurs  qui  s’internationalise de plus en plus. Jérome Fourquet

TRAVAILLE TON ANGLAIS ! (La  sélection sur les mathématiques, jusqu’alors pratiquée,  était censitairement  beaucoup  moins violente qu’une sélection sur la maîtrise de l’anglais et d’autres langues étrangères, capacité bien plus liée aux origines sociales et au capital culturel hérité)

Jérome fourquet
Directeur du département Opinion et Stratégies d’entreprise de l’Ifop.
Dernier ouvrage paru :  L’Archipel français, Paris, Seuil, 2019.
Le front de la compétition scolaire la plus aiguë s’est déployé sur un nouveau terrain ces dernières années. Dans un contexte de globalisation  et  de  concurrence  accrue  entre  des  diplômés  de  plus  en  plus  nombreux,  maîtriser  l’anglais  devient  un  atout  décisif.  Dotés d’une vision stratégique particulièrement aiguisée des champs scolaire et professionnel, les cadres, les professions intellectuelles et les habitants de l’agglomération francilienne investissent massivement pour  que  leurs  enfants  acquièrent  ce  précieux  capital  linguistique.  Moins  au  fait  de  l’«  upgradation  »  –  pour  reprendre  un  terme  en  vogue dans ces milieux très prompts à adopter des anglicismes – des règles de cette compétition acharnée, les autres milieux sociaux et les provinciaux ne déploient manifestement pas les mêmes efforts et les écarts se creusent très nettement.Ainsi, 65 % des jeunes de dix-sept à vingt-trois ans dont les parents sont  CSP+  sont  déjà  allés  plusieurs  fois  en  vacances  ou  en  voyage  à  l’étranger  contre  46  %  des  jeunes  issus  des  classes  moyennes  et  seulement 38 % de ceux dont les parents sont employés ou ouvriers.
Ce  clivage  social  se  double  d’une  fracture  territoriale.  La  proportion  de  jeunes  ayant  eu  l’occasion  de  partir  plusieurs  fois  à  l’étranger  décline  linéairement  avec  le  gradient  d’urbanité  :  58  %  dans  l’agglomération parisienne, 48 % dans les agglomérations de plus de 100  000  habitants,  43  %  dans  celles  de  20  000  à  100  000  habitants,  39  %  dans  celles  de  moins  de  20  000  habitants  et  seulement  30  %  au  sein  des  communes  rurales.  L’habitus  international  ne  s’acquiert  pas  qu’au  travers  de  voyages  et  de  séjours  à  l’étranger  mais  aussi,  bien  entendu,  grâce  à  la  maîtrise  de  la  langue  internationale  reine  :  l’anglais. Forts de ce constat, 34 % des jeunes ayant des parents CSP+ ont bénéficié à un moment ou à un autre de leur scolarité de cours de  langues  extra-scolaires  payés  par  leurs  parents  contre  21  %  des  enfants  de  la  classe  moyenne  et  23  %  des  enfants  issus  des  milieux  populaires. En la matière, le clivage géographique entre Franciliens et provinciaux est encore plus marqué que le critère social, comme si le fait d’habiter dans une métropole pleinement mondialisée rendait encore  plus  évidente  la  nécessaire  maîtrise  des  langues  étrangères.  Seulement   23   %   des   jeunes   provinciaux   ont  ainsi  eu  droit  à  des  cours  de  langues  étrangères  payés  par  leurs  parents  contre  42    %  des  Franciliens.  Cet  écart  quasiment  du  simple  au  double  met  en  évidence  une  nouvelle  inégalité  en  train  de  fausser  très  profondément  la  compétition  scolaire.  La  sélection sur les mathématiques, jusqu’alors pratiquée,  était  censitairement  beaucoup  moins violente qu’une sélection sur la maîtrise de l’anglais et d’autres langues étrangères, capacité bien plus liée aux origines sociales et au capital culturel hérité que le niveau en mathématiques.
L’APPRENTISSAGE DE L’ANGLAIS AU PROGRAMME DES MUNICIPALES
Ces  chiffres  montrent,  par  ailleurs,  que  l’acquisition  d’une  langue  étrangère  est  devenue  un  enjeu  majeur  pour  toute  une  partie  de  la  population  de  la  métropole  parisienne.  Cette  demande  sociétale  d’un  nouveau  genre  n’a  pas  échappé  à  Benjamin  Griveaux,  candidat LREM  à  la  mairie  de  Paris,  qui  a  intégré  en  bonne  place  dans  son  programme de campagne l’objectif que tous les adolescents parisiens soient  bilingues  anglais  à  la  sortie  du  collège  :  «  Paris  c’est  une  ville-monde. Maîtriser l’anglais à la fin du collège, c’est indispensable dans sa vie professionnelle, pour voyager, pour être pleinement intégré dans le monde1. »À notre connaissance, c’est la première fois que dans une campagne municipale la maîtrise de l’anglais est affichée comme un objectif poli-tique. Il n’est pas anodin que ce soit un représentant de LREM qui se soit emparé de ce sujet car l’électorat macronien comprend, notam-ment  à  Paris,  une  très  forte  population  de  cadres  et  de  diplômés  du  supérieur,  catégories  très  ouvertes  sur  l’international.  Ces  élec-teurs  macroniens  correspondent  en  tout  point  aux  «  people  from  anywhere » (ceux de partout) que l’essayiste David Goodhart oppose dans  son  analyse  brillante2  sur  la  société  britannique  aux  «  people  from somewhere » (ceux de quelque part). David Goodhart insiste à juste titre sur l’ampleur de la fracture séparant ces deux populations tant en termes de niveau éducatif, de rapport à l’immigration et à la globalisation, de goûts culturels, d’attitude face au changement ou de degré d’attachement au cadre national3. Si tout les oppose donc, ces deux  groupes  ont  néanmoins  quelque  chose  en  commun  :  l’anglais,  qui est à la fois leur langue maternelle mais également la langue inter-nationale par excellence.De ce point de vue, et au regard des chiffres évoqués précédem-ment, le clivage entre « Somewhere » et « Anywhere » pourrait bien à  terme,  en  France,  se  creuser  davantage  qu’en  Grande-Bretagne  ou aux États-Unis. Du fait de la tertiairisation des économies occidentales, les secteurs de la logistique (en lien avec l’import/export) et  du  tourisme  fournissent  de  nombreux  emplois  peu  qualifiés  mais  nécessitant  souvent  un  minimum  de  maîtrise  de  l’anglais.  En  Grande-Bretagne ou aux États-Unis, ces jobs peuvent être occupés par les « people from somewhere » locaux. En France, c’est moins évident.  De  la  même  manière,  un  jeune  Britannique  ayant  grandi  dans une famille ouvrière du Yorkshire ou des Midlands aura moins de difficultés culturelles et linguistiques à s’expatrier pour trouver un emploi  dans  l’anglosphère  (États-Unis,  Canada,  Australie…)  qu’un  fils d’ouvrier de Lens ou d’Alès. Les enfants des « Somewhere » français n’ont, en effet, contrairement à leurs homologues britanniques et américains, pas hérités de la maîtrise de l’anglais à la naissance. Ce capital, les enfants des « Anywhere » tricolores sont en train de l’acquérir à marche forcée pour ressembler à leurs alter ego d’outre-Manche  et  d’outre-Atlantique  avec  qui  ils  ont  vocation  à  être  en  compétition  dans  un  marché  du  travail  des  cadres  supérieurs  qui  s’internationalise de plus en plus.
UN NOUVEAU CLIVAGE LINGUISTIQUE
Cette  marginalisation  linguistique  vient  renforcer  un  clivage  mis  en  lumière  dans  un  livre  d’Erkki  Maillard  et  de  Salomé  Berlioux  publié  en 2019, Les Invisibles de la République1. S’inscrivant dans la continuité des travaux pionniers de Christophe Guilluy2, les auteurs se penchent dans  ce  livre  qui  a  rencontré  un  large  écho  sur  un  angle  mort  des  politiques publiques et du débat national : le sort de la jeunesse de la France périphérique. Si les « millennials » d’un côté  et  la  jeunesse  des  banlieues  de  l’autre  bénéficient  d’un  fort  intérêt  médiatique,  la  jeunesse qui grandit dans les campagnes ou les villes petites et moyennes souffrait d’invi-sibilité. En s’appuyant sur leur expérience du terrain, Erkki Maillard et Salomé Berlioux ont notamment mis en lumière le déficit d’accès à l’information en matière d’orientation scolaire et universitaire, la plus faible présence de figures inspirantes (membres de la famille, de l’entourage)  dans  ces  territoires  qu’en  milieu  urbain  ou  bien  encore  les  difficultés matérielles et financières à envisager la poursuite d’études supérieures dans une région autre que la sienne. Tous ces handicaps contextuels,  matériels,  culturels  et  financiers  se  combinent  et  aboutissent  à  nourrir  des  freins  psychologiques  plus  prégnants  parmi  les  jeunes de cette France périphérique. De manière consciente ou non, ces derniers sont ainsi nombreux à développer une forme d’autocensure. Alors qu’ils ne sont qu’à l’orée de leur vie d’adulte, le champ des possibles,  tel  qu’ils  l’envisagent,  apparaît  plus  borné  et  restreint  que pour les jeunes qui ont grandi dans les grandes villes. L’enquête  réalisée  par  l’Ifop  pour  la  Fondation  Jean-Jaurès  et  l’association Chemins d’avenir1 a permis d’objectiver, chiffres à l’appui,  le  diagnostic  posé  par  Salomé  Berlioux  et  Erkki  Maillard.  Si  68 % des jeunes vivant dans l’agglomération parisienne ont le sentiment d’avoir eu ou d’avoir toutes les informations nécessaires pour bien s’orienter, ils ne sont que 58 % dans ce cas parmi les jeunes ruraux  et  des  villes  de  moins  de  20  000  habitants. De la même manière, seuls 28 % des jeunes ruraux déclarent disposer dans leur entourage d’un ou de modèles qui les ont  inspirés  dans  leur  choix  de  formation  ou  de  carrière.  Cette  proportion  s’établit  à  42  %  parmi  les  jeunes  résidant  dans  le  centre d’une grande agglomération. Ayant grandi  dans  des  écosystèmes  différents  n’offrant  pas  le  même  degré  d’ouverture  culturelle  et  d’opportunités  d’orientation,  ces  jeunesses  de  France  ne  s’autorisent  pas les mêmes projets d’orientation. Ainsi, seul un jeune sur deux de la France rurale et des petites villes définit son choix d’études supérieures  comme  ambitieux  contre  60  %  de  ceux  qui  vivent  dans des agglomérations de plus de 20 000 habitants et 67 % des jeunes Franciliens. On mesure dans ces 17 points d’écart entre les réponses  de  la  France  périphérique  et  celle  de  la  jeunesse  francilienne  le  poids  d’une  autocensure  condensant  des  handicaps  culturels,  un  déficit  d’information  et  une  moindre  exposition  à  diverses opportunités.
Erkki Maillard et Salomé Berlioux ont un double mérite, celui d’avoir mis en lumière ces inégalités de destin et celui de se mobiliser sur le terrain pour réduire ce déterminisme sociogéographique. Mais alors qu’ils ont contribué à un début de prise de conscience collective tardive et salutaire, on constate que la compétition scolaire prend des formes  renouvelées,  plus  détournées,  dont  la  maîtrise  précoce  de  l’anglais est un parfait symptôme.
 
Voir aussi:
MY TAILOR IS RICH ! (Quand la start up nation prépare à la ville monde ses futurs expatriés)
Benjamin Griveaux : « Je souhaite que les enfants soient bilingues en anglais à la sortie du collège »

Le candidat LREM à la mairie de Paris a mis en place un Conseil de l’éducation qui sera présidé par Carole Diamant, professeure de philosophie en zone sensible et déléguée générale de la Fondation égalité des chances.
Paris XVe, ce mercredi. Benjamin Griveaux, candidat LREM à la mairie de Paris, et Carole Diamant, professeure de philosophie, dévoilent leurs propositions pour l’éducation des petits Parisiens.
Christine Henry
Le Parisien
28 août 2019

A l’approche de la rentrée scolaire, Benjamin Griveaux, candidat LREM à la mairie de Paris, présente ses propositions en matière d’éducation. Au programme : l’apprentissage de l’anglais dès le plus jeune âge, la lutte contre la pollution dans les écoles ou bien encore la place des élèves en situation de handicap… Et la création d’un Conseil de l’éducation qui sera présidé par Carole Diamant, enseignante en philosophie et fervente partisane de l’égalité des chances.

Le Parisien : Comment abordez-vous cette rentrée ?
Benjamin Griveaux : J’ai souhaité entamer cette rentrée politique par l’éducation car c’est la pierre angulaire qui permet à l’enfant de construire sa vie. C’est la clé de l’émancipation et de la liberté. J’ai demandé à Carole Diamant de présider un Conseil de l’éducation composé de spécialistes, de Parisiens et de jeunes qui pourront nous éclairer sur les choix à faire. J’ai un projet qui me tient particulièrement à cœur : permettre aux enfants de devenir parfaitement bilingues en Anglais à la fin du collège.
Comment comptez-vous vous y prendre ?
Tous les linguistes disent que l’apprentissage doit se faire avant 11 ans, notamment pour l’oral. Notre idée est de proposer une immersion dans les crèches et dans les écoles sur le temps périscolaire en s’appuyant sur des ressortissants étrangers ou des professeurs d’anglais. Pour que le bilinguisme ne soit réservé pas aux plus prestigieuses institutions parisiennes.
Cet objectif est-il réaliste ?
Carole Diamant : Les jeunes enfants apprennent très vite et très bien les langues étrangères. Benjamin Griveaux m’a chargée de piloter ce Conseil de l’éducation composé d’une dizaine de spécialistes et de gens de bonne volonté qui seront chargés de faire émerger des propositions, la première concernant l’apprentissage de l’anglais. Ce conseil réfléchira aussi à la façon de sensibiliser les enfants dès le plus jeune âge aux questions d’environnement, aux dépenses énergétiques ou au recyclage des déchets et du papier qui sont les enjeux de demain.
Il y a eu un pic de pollution ces derniers jours. Que préconisez-vous pour maintenir les enfants en bonne santé ?
Benjamin Griveaux : L’amélioration de la qualité de l’air à Paris passe par des mobilités plus propres évidemment. Mais on peut agir demain très concrètement dans les salles de classe où nos enfants passent cinq à six heures par jour. Changer les systèmes de ventilation, les fameuses VMC, dans les 8 000 salles de classe parisiennes représentera 10 M€ par an pendant six ans. Pour une ville qui investit 1,5 milliard par an, consacrer 10 millions à la santé des élèves parisiens cela semble raisonnable et possible et je m’étonne que cela n’ait pas encore été fait. Enfin, je propose qu’il y ait trois examens respiratoires : l’un à l’entrée en maternelle à 3 ans, l’autre à l’entrée en CP à 6 ans et le dernier à l’entrée en collège à 11 ans.
Ces propositions ont été raillées par les écologistes… Sont-elles suffisantes ?
Il y a ceux qui promettent la révolution et qui ne tiennent pas leurs promesses. Moi je préfère le petit matin au grand soir. C’est en additionnant les petits pas qu’on y arrivera.
Une classe pour les enfants autistes va ouvrir dans une école maternelle du IXe à la rentrée. Que proposez-vous pour les handicapés ?
Les enfants en situation de handicap ne doivent plus être à part mais intégrés au sein de la communauté éducative comme au Canada ou en Belgique. Il faut commencer par rendre accessibles les écoles et les stations de métro les desservant.

Idéologie woke: Quelle continuation du totalitarisme par d’autres moyens ? (What continuation of totalitarianism by other means when MIT panders to the woke mob and fires dissidents or cancels their lectures ?)

7 novembre, 2021

Excellence, Schmexcellence Part III*: When the Better is the Enemy of the Good - New APPS: Art, Politics, Philosophy, ScienceLe monde moderne n’est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu’un dispositif religieux est brisé (comme le fut le christianisme pendant la Réforme), ce ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les vertus le sont aussi, et elles errent plus férocement encore en faisant des ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé des vieilles vertus chrétiennes virant à la folie. Elles ont viré à la folie parce qu’on les a isolées les unes des autres et qu’elles errent indépendamment dans la solitude. Ainsi des scientifiques se passionnent-ils pour la vérité, et leur vérité est impitoyable. Ainsi des « humanitaires » ne se soucient-ils que de la pitié, mais leur pitié (je regrette de le dire) est souvent mensongère. G.K. Chesterton
On ne peut comprendre la gauche si on ne comprend pas que le gauchisme est une religion. Dennis Prager
Quand vous reprenez les péchés sociaux qu’il faut (…) rejeter pour accéder à une forme de rédemption – l’intolérance, le pouvoir, le militarisme, l’oppression de classe… vous retrouvez exactement les thèmes que brandissent les gens qui mettent aujourd’hui le feu à Portland et d’autres villes. Ce sont les post-protestants. Ils se sont juste débarrassés de Dieu! (…) C’est juste que nous avons maintenant une Église du Christ sans le Christ. Cela veut dire qu’il n’y a pas de pardon possible. Dans la religion chrétienne, le péché originel est l’idée que vous êtes né coupable, que l’humanité hérite d’une tache qui corrompt nos désirs et nos actions. Mais le Christ paie les dettes du péché originel, nous en libérant. Si vous enlevez le Christ du tableau en revanche, vous obtenez… la culpabilité blanche et le racisme systémique. (…) C’est une idée très dangereuse, que les Églises canalisaient autrefois. Mais aujourd’hui que cette idée s’est échappée de l’Église, elle a gagné la rue et vous avez des meutes de post-protestants qui parcourent Washington DC, en s’en prenant à des gens dans des restaurants pour exiger d’eux qu’ils lèvent le poing. Leur conviction que l’Amérique est intrinsèquement corrompue par l’esclavage et n’a réalisé que le Mal, n’est pas enracinée dans des faits que l’on pourrait discuter, elle relève de la croyance religieuse. On exclut ceux qui ne se soumettent pas. On dérive vers une vision apocalyptique du monde qui n’est plus équilibrée par rien d’autre. Cela peut donner la pire forme d’environnementalisme, par exemple, parce que toutes les autres dimensions sont disqualifiées au nom de «la fin du monde». C’est l’idée chrétienne de l’apocalypse, mais dégagée du christianisme.(…) Avant, on était exclu de l’Église, aujourd’hui, on est exclu de la vie publique… (…) Il faut comprendre que l’idéologie «woke» de la justice sociale a pénétré les institutions américaines à un point incroyable. Je n’imagine pas qu’un professeur ayant une chaire à la Sorbonne soit forcé d’assister à des classes obligatoires organisées pour le corps professoral sur leur «culpabilité blanche», et enseignées par des gens qui viennent à peine de finir le collège. Mais c’est la réalité des universités américaines. Un sondage récent a montré que la majorité des professeurs d’université ne disent rien. Ils abandonnent plutôt toute mention de tout sujet controversé. Pourtant, des études ont montré que la foule des vigies de Twitter qui obtient la tête des professeurs excommuniés, remplirait à peine la moitié d’un terrain de football universitaire! Il y a un manque de courage. (…) Si la théorie de la physique de Newton, Principia, est un manuel de viol, comme l’a dit une universitaire féministe, si sa physique est l’invention d’un moyen de violer le monde, cela veut dire que la science est mauvaise. Si vous êtes soupçonneux de la science, du capitalisme, du protestantisme, si vous rejetez tous les moteurs de la modernité la seule chose qui reste, ce sont les péchés qui nous ont menés là où nous sommes. Pour sûr, nous en avons commis. Mais si on ne voit pas que ça, il n’y a plus d’échappatoire, plus de projet. Ce qui passe aujourd’hui est différent de 1968 en France, quand la remise en cause a finalement été absorbée dans quelque chose de plus large. Le mouvement actuel ne peut être absorbé car il vise à défaire les États-Unis dans ses fondements: l’État-nation, le capitalisme et la religion protestante. Mais comme les États-Unis n’ont pas d’histoire prémoderne, nous ne pouvons absorber un mouvement vraiment antimoderne. (…) Il y a une phrase de Heidegger qui dit que «seulement un Dieu pourrait nous sauver»! On a le sentiment qu’on est aux prémices d’une apocalypse, d’une guerre civile, d’une grande destruction de la modernité. Est-ce à cause de la trahison des clercs? Pour moi, l’incapacité des vieux libéraux à faire rempart contre les jeunes radicaux, est aujourd’hui le grand danger. Quand j’ai vu que de jeunes journalistes du New York Times avaient menacé de partir, parce qu’un responsable éditorial avait publié une tribune d’un sénateur américain qui leur déplaisait, j’ai été stupéfait. Je suis assez vieux pour savoir que dans le passé, la direction aurait immédiatement dit à ces jeunes journalistes de prendre la porte s’ils n’étaient pas contents. Mais ce qui s’est passé, c’est que le rédacteur en chef a été limogé. Joseph Bottum

BACK IN THE USSR ! (Cherchez l’erreur quand le MIT se couche devant la foule woke et licencie des dissidents ou annule leurs conférences ?)

BACK IN THE USSR ! (Spot the error when MIT panders to the woke mob and fires dissidents or cancels their lectures ?)
« Pointing out MIT’s lapses and withdrawing our financial support of the offending institution is insufficient. We would like to suggest a way for MIT to return to our good graces and hope it will consider adopting the following principles of fairness. First, facts are not racist, and stating facts is not racism. Second, a person’s ethnicity or skin color does not define him or her as a racist, oppressor, or victim. Third, intellectual ability and achievement are the principal requirements for admission as a student or faculty member to any university. Fourth, diversity of opinions is desired and supported. Fifth, a just, democratic society requires equal opportunity, equal justice, and equal responsibility; it does not require equal outcomes. And finally, adherence to the statements above must not be sacrificed for political, social, or public relations considerations. »
Tom Hafer and Henry I. Miller
https://www.city-journal.org/mit-caves-to-wokeness

DIS LA VÉRITÉ ET PRENDS LA PORTE ! (Devinez pourquoi l’aumônier catholique du MIT s’est fait virer ?)

SPEAK THE TRUTH, GET FIRED (Guess what the MIT’s Catholic chaplain got fired over ?)

« George Floyd was killed by a police officer, and shouldn’t have been. He had not lived a virtuous life. He was convicted of several crimes, including armed robbery, which he seems to have committed to feed his drug habit. And he was high on drugs at the time of his arrest. (…) The police officer who knelt on his neck until he died acted wrongly. I do not know what he was thinking. The charges filed against him allege dangerous negligence, but say nothing about his state of mind. He might have killed George Floyd intentionally, or not. He hasn’t told us. But he showed disregard for his life, and we cannot accept that in our law enforcement officers. It is right that he has been arrested and will be prosecuted. In the wake of George Floyd’s death, most people in the country have framed this as an act of racism. I don’t think we know that. Many people have claimed that racism is a major problem in police forces. I don’t think we know that. Police officers deal with dangerous and bad people all the time, and that often hardens them. They do this so that the rest of us can live in peace, but sometimes at a cost to their souls. Some of them certainly develop attitudes towards the people they investigate and arrest that are unjust and sinful. We should pray that never happens, but we can see how it does. Many parts of our country have been experiencing a five-year crime wave, providing some context for why the police are trained in aggressive tactics. In 2019, 150 police officers were killed in the line of duty by the violent men they were trying to arrest. That number should be zero, we can all agree. But that context does not justify being overly aggressive — their public trust requires that they exercise great restraint. (…) Today tensions are high, with charges of racism flying over social media, and countercharges of agreeing with domestic terrorists flying back. People are unfriending and cancelling each other. I hate this. Racism is a sin, as the Catechism says. So is rash judgment. (…) Our solidarity with one another is deeply frayed now. Everything we say (or don’t say) is treated with suspicion, rather than charity. I hate this too. I’ve talked to multiple people in the Boston area who want the protests here to stop because they are afraid of more riots and looting. I’ve talked to others who want everyone to join the protests, but are uneasy about having police present. One group says that, of course racism is bad, but the riots are really bad — 18 people have been killed, including one police officer. Others say racism is what’s really bad — look at all the victims of police aggression — and to bring up the riots is to distract from the good the protests are trying to achieve. Still others are upset that all this talk about racism has pushed violence against women, institutionalized sexism, and other types of injustice out of the national consciousness. Everyone’s mind is made up, everyone’s angry with each other — even though everyone says they’re opposed to injustices and sins. In a different moment, people strongly opposed to public violence, racism, and sexism would admire each other, despite their different emphases. (…) Blessed are the peacemakers, our Lord tells us. May we all be counted among them. »

Fr. Daniel Patrick Moloney (Catholic Chaplain, MIT)

https://newbostonpost.com/2020/06/19/heres-what-the-m-i-t-catholic-chaplain-got-fired-over/

QUELLE PERVERSION DE L’ÉGALITÉ ? (Cherchez l’erreur quand un professeur est désinvité par le MIT pour avoir dénoncé le rôle de la race dans les admissions à l’université et argué que la suppression des avantages familiaux et sportifs pour les admssions ferait plus pour la diversité que l’inclusion forcée ?)

WHAT PERVERSION OF EQUALITY ? (Spot the error when a professor gets disinvited by MIT for denouncing the role of race in university admissions and arguing scrapping family and athletic admission advantages would do more for diversity than enforced inclusion ?)

American universities are undergoing a profound transformation that threatens to derail their primary mission: the production and dissemination of knowledge. The new regime is titled « Diversity, Equity, and Inclusion » or DEI, and is enforced by a large bureaucracy of administrators. Nearly every decision taken on campus, from admissions, to faculty hiring, to course content, to teaching methods, is made through the lens of DEI. This regime was imposed from the top and has never been adequately debated. In the current climate it cannot be openly debated: the emotions around DEI are so strong that self-censorship among dissenting faculty is nearly universal.

The words « diversity, equity and inclusion » sound just, and are often supported by well-intentioned people, but their effects are the opposite of noble sentiments. Most importantly, « equity » does not mean fair and equal treatment. DEI seeks to increase the representation of some groups through discrimination against members of other groups. The underlying premise of DEI is that any statistical difference between group representation on campus and national averages reflects systemic injustice and discrimination by the university itself. The magnitude of the distortions is significant: for some job searches discrimination rises to the level of implicitly or explicitly excluding applicants from certain groups.

DEI violates the ethical and legal principle of equal treatment. It entails treating people as members of a group rather than as individuals, repeating the mistake that made possible the atrocities of the 20th century. It requires being willing to tell an applicant « I will ignore your merits and qualifications and deny you admission because you belong to the wrong group, and I have defined a more important social objective that justifies doing so. » It treats persons as merely means to an end, giving primacy to a statistic over the individuality of a human being.

DEI compromises the university’s mission. The core business of the university is the search for truth. A university’s intellectual environment depends fundamentally on its commitment to hiring the most talented and best trained minds: any departure from this commitment must come at the expense of academic excellence, and ultimately will compromise the university’s contribution to society. This point is particularly urgent given that DEI considerations often reduce the pool of truly eligible candidates by a factor of two or more.

DEI undermines the public’s trust in universities and their graduates. Some on campus might be surprised to learn that, according to a recent Pew poll, 74 percent of Americans think only qualifications should be taken into account in hiring and promotion, even if this results in less diversity. If current trends continue, employers and consumers will quickly adjust their perception of the value of a university degree.

We propose an alternative framework called Merit, Fairness, and Equality (MFE) whereby university applicants are treated as individuals and evaluated through a rigorous and unbiased process based on their merit and qualifications alone. Crucially, this would mean an end to legacy and athletic admission advantages, which significantly favor white applicants, in addition to those based on group membership. Simultaneously, MFE would involve universities investing in education projects in neighborhoods where public education is failing to help children from those areas compete. These projects would be evidence-based and non-ideological, testing a variety of different options such as increased public school funding, charter schools and voucher programs.

Viewed objectively, American universities already are incredibly diverse. They feature people from all countries, races and ethnicities (for example, one of us was born and raised in Chile, and is classified as Hispanic by his university). This is in stark contrast with most universities in Europe, Asia and South America. American universities are diverse not because of DEI, but because they have been extremely competitive at attracting talent from all over the world. Ninety years ago Germany had the best universities in the world. Then an ideological regime obsessed with race came to power and drove many of the best scholars out, gutting the faculties and leading to sustained decay that German universities never fully recovered from. We should view this as a warning of the consequences of viewing group membership as more important than merit, and correct our course before it is too late.

Dorian S. Abbot is an associate professor of geophysics at the University of Chicago. In his research he uses mathematical and computational models to understand and explain fundamental problems in Earth and planetary sciences.

Ivan Marinovic is an associate professor of accounting at Stanford Graduate School of Business. In his research he uses game theory to understand incentive and information transmission problems in capital markets.

https://www.newsweek.com/diversity-problem-campus-opinion-1618419

IL EST TEMPS DE DIRE NON A L’IDEOLOGIE WOKE ET A SES FOULES ANNULATRICES (Le wokeisme n’a pas encore atteint un terrible nadir de destruction, mais la leçon de l’histoire est que nous devons nommer et affronter les totalitarismes avant qu’ils ne provoquent des catastrophes, alors qu’il est encore possible de le faire)

TIME TO SAY NO TO WOKE IDEOLOGY AND ITS CANCELATION MOBS (Wokeism has not reached a terrible nadir of destruction yet, but the lesson of history is that we need to name and confront totalitarianisms before they cause disaster, while it is still possible to do so)

« I started to get alarmed about five years ago as I noticed an increasing number of issues and viewpoints become impossible to discuss on campus. I mostly just wanted to do my science and not have anyone yell at me, and I thought that if I kept my mouth shut the problem would eventually go away. I knew that speaking out would likely bring serious reputational and professional consequences. And for a number of years I just didn’t think it was worth it. But the street violence of the summer of 2020, some of which I witnessed personally in Chicago, and the justifications and dishonesty that accompanied it, convinced me that I could no longer remain silent in good conscience. In the fall of 2020 I started advocating openly for academic freedom and merit-based evaluations. I recorded some short YouTube videos in which I argued for the importance of treating each person as an individual worthy of dignity and respect. In an academic context, that means giving everyone a fair and equal opportunity when they apply for a position as well as allowing them to express their opinions openly, even if you disagree with them. As a result, I was immediately targeted for cancellation, primarily by a group of graduate students in my department. Whistleblowers later revealed that the attack was partially planned and coordinated on the Ford Foundation Fellowship Program listserv by a graduate student in my department. (Please do not attack this person or any of the people who attacked me.) That group of graduate students organized a letter of denunciation. It claimed that I threatened the “safety and belonging of all underrepresented groups within the department,” and it was presented to my department chair. The letter demanded that my teaching and research be restricted in a way that would cripple my ability to function as a scientist. A strong statement in support of faculty free expression by University of Chicago President Robert Zimmer put an end to that, and that is where things stood until the summer of 2021. On August 12, a colleague and I wrote an op-ed in Newsweek in which we argued that Diversity, Equity, and Inclusion (DEI) as it currently is implemented on campus “violates the ethical and legal principle of equal treatment” and “treats persons as merely means to an end, giving primacy to a statistic over the individuality of a human being.” We proposed instead “an alternative framework called Merit, Fairness, and Equality (MFE) whereby university applicants are treated as individuals and evaluated through a rigorous and unbiased process based on their merit and qualifications alone.” We noted that this would mean an end to legacy and athletic admission advantages, which significantly favor white applicants. Shortly thereafter, my detractors developed a new strategy to try to isolate me and intimidate everyone else into silence: They argued on Twitter that I should not be invited to give science seminars at other universities and coordinated replacement speakers. This is an effective and increasingly common way to ratchet up the cost of dissenting because disseminating new work to colleagues is an important part of the scientific endeavor. Sure enough, this strategy was employed when I was chosen to give the Carlson Lecture at MIT — a major honor in my field. It is an annual public talk given to a large audience and my topic was “climate and the potential for life on other planets.” On September 22, a new Twitter mob, composed of a group of MIT students, postdocs, and recent alumni, demanded that I be uninvited. It worked. And quickly. On September 30 the department chair at MIT called to tell me that they would be cancelling the Carlson lecture this year in order to avoid controversy. It’s worth stating what happened again: a small group of ideologues mounted a Twitter campaign to cancel a distinguished science lecture at the Massachusetts Institute of Technology because they disagreed with some of the political positions the speaker had taken. And they were successful within eight days. The fact that such stories have become an everyday feature of American life should do nothing to diminish how shocking they are, and how damaging they are to a free society. The fact that MIT, one of the greatest universities in the world, caved in so quickly will only encourage others to deploy this same tactic. It has become fashionable in some circles to claim that “cancel culture is just holding people accountable.” I challenge you to read the material that led to the attacks against me and find anything that would require me being held “accountable.” What you will find instead is the writing of a man who takes his moral duty seriously and is trying to express his concerns strongly, but respectfully. You may agree with some of my positions and disagree with others, but in a free society they cannot be considered beyond the pale. I view this episode as an example as well as a striking illustration of the threat woke ideology poses to our culture, our institutions and to our freedoms. I have consistently maintained that woke ideology is essentially totalitarian in nature: it attempts to corral the entirety of human existence into one narrow ideological viewpoint and to silence anyone who disagrees. I believe that these features ultimately derive from the ideology’s abandonment of the principle of the inherent dignity of each human being. It is only possible to instrumentalize the individual in order to engineer group-based outcomes within a philosophical framework that has rejected this principle. Similarly, it is easy to justify silencing a dissenter if your ideology denies her individual dignity. Clearly, wokeism has not reached a terrible nadir of destruction yet, but the lesson of history is that we need to name and confront totalitarianisms before they cause disaster, while it is still possible to do so. This issue is especially important to me because my wife and I are expecting our first child in January. We all need to decide what type of country we want our children to grow up in. Do we want a culture of fear and repression in which a small number of ideologues exert their power and cultural dominance to silence anyone who disagrees with them? Or do we want our children to enjoy truth-seeking discourse consisting of good-natured exchanges that are ultimately grounded in a spirit of epistemic humility? If you want the latter, it’s time to stand up and so say. It’s time to say no to the mob, no to the cancellations. And it’s time to be forthright about your true opinions. This is not a partisan issue. Anyone who is interested in the pursuit of truth and in promoting a healthy and functioning society has a stake in this debate. Speaking out now may seem risky. But the cost of remaining silent is far steeper. »

Dr. Dorian Abbot

https://bariweiss.substack.com/p/mit-abandons-its-mission-and-me

L’HEURE DE LA PURGE A SONNÉ (L’exclusion des universitaires signale que certaines opinions – même bien intentionnées – sont interdites, augmentant ainsi l’autocensure, dégradant le discours public et contribuant à la balkanisation politique de notre pays)

THE PURGE IS ON (Excluding academics signals that some opinions – even well-intentioned ones – are forbidden, thereby increasing self-censorship, degrading public discourse, and contributing to our nation’s political balkanisation)

« I am resigning as Director of the Berkeley Atmospheric Sciences Center (BASC) @BerkeleyAtmo. To reduce the odds of being mischaracterized, I want to explain my decision here. Last month, the MIT Department of Earth, Atmospheric and Planetary Sciences @eapsMIT canceled a science lecture because of the invited scientist’s political views. That scientist does excellent work in areas of interest to BASC (he visited us at our invitation in 2014). Therefore, I asked the BASC faculty if we might invite that scientist to speak to us in the coming months to hear the science talk he had prepared and, by extending the invitation now, reaffirm that BASC is a purely scientific organization, not a political one. In the ensuing discussion among the BASC faculty, it became unclear to me whether we could invite that scientist ever again, let alone now.I was hoping we could agree that BASC does not consider an individual’s political or social opinions when selecting speakers for its events, except for cases in which the opinions give a reasonable expectation that members of our community would be treated with disrespect. Unfortunately, it is unclear when or if we might reach agreement on this point. The stated mission of BASC is to serve as « the hub for UC Berkeley’s research on the science of the atmosphere, its interactions with Earth systems, and the future of Earth’s climate. » I believe that mission has its greatest chance of success when the tent is made as big as possible, including with respect to ethnicity, gender, age, disability, sexual orientation, religion, family status, and political ideas. Excluding people because of their political and social views diminishes the pool of scientists with which members of BASC can interact and reduces the opportunities for learning and collaboration. More broadly, such exclusion signals that some opinions — even well-intentioned ones — are forbidden, thereby increasing self-censorship, degrading public discourse, and contributing to our nation’s political balkanization. I hold BASC and its faculty — my friends and colleagues — in the highest regard, and so it has been a great honor to serve as BASC’s director these past five years. But it was never my intention to lead an organization that is political or even ambiguously so. Consequently, I am stepping down from the directorship at the end of this calendar year or when a replacement is ready, whichever is sooner. »

Dr. David Romps (Berkeley Atmospheric Sciences Centre)

https://twitter.com/romps/status/1450139374125862913


QUELLE PURGE DES UNIVERSITAIRES EN ALLEMAGNE NAZIE ?

WHAT PURGING OF ACADEMICS IN NAZI GERMANY ?

“This is not an instance of someone being exposed as a neo-Nazi. He is just a scholar with perfectly normal disagreements about what university admissions policies ought to look like and now there are efforts to silence him as a consequence. (…) This is part of a larger project designed to silence and suppress those who disagree with political activists on college campuses. It sends a very chilling message to everybody else.”
Keith Whittington (Academic Freedom Alliance’s academic committee)

https://www.smh.com.au/world/north-america/he-s-no-neo-nazi-how-a-cancelled-lecture-lit-a-free-speech-firestorm-20211022-p59266.html

DERNIER AVERTISSEMENT AVANT SAISIE !

WHAT WAKE-UP CALL ?

“If we’ve reached the point where an extremely accomplished scientist cannot speak at a place as supposedly academically serious as MIT because he expressed a political opinion – one that is not even that unpopular on campus and certainly isn’t off campus – then that should be a wake-up call.”
Greg Lukianoff (Foundation for Individual Rights in Education)

https://www.smh.com.au/world/north-america/he-s-no-neo-nazi-how-a-cancelled-lecture-lit-a-free-speech-firestorm-20211022-p59266.html

PRINCETON SAUVE LA MISE ET L’HONNEUR DE L’UNIVERSITE AMERICAINE !

PRINCETON SAVES THE DAY AND THE HONOR OF US ACADEMIA

https://twitter.com/McCormickProf/status/1447207382484930563


Guerre culturelle: L’Amérique a la rage – et c’est nous qui lui avons donnée ! (From Plato to NATO, Western Civ has got to go: Was it the course in Western civilization or Western civilization itself that had to go ?)

4 juillet, 2020

From Plato to NATO: The Idea of the West and Its Opponents: Gress ...https://mobile.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L768xH1047/French_Theory-b41ed.jpg

The star athlete and activist took to Twitter to share the powerful rejection, along with a video of actor James Earl Jones reciting Frederick Douglass's renowned speech 'What to the Slave Is the 4th of July?'
 
 
President Trump at Mount Rushmore on Friday.Il faut se rappeler que les chefs militaires allemands jouaient un jeu désespéré. Néanmoins, ce fut avec un sentiment d’effroi qu’ils tournèrent contre la Russie la plus affreuse de toutes les armes. Ils firent transporter Lénine, de Suisse en Russie, comme un bacille de la peste, dans un wagon plombé. Winston Churchill
Quand Freud est arrivé aux États-Unis, en voyant New York il a dit: « Je leur apporte la peste. » Il avait tort. Les Américains n’ont eu aucun mal à digérer une psychanalyse vite américanisée. Mais en 1966, nous avons vraiment apporté la peste avec Lacan et la déconstruction… du moins dans les universités! Au point que je me suis senti soudain aussi étranger à Johns Hopkins qu’à Avignon au milieu de mes amis post-surréalistes. Un an plus tard, la déconstruction était déjà à la mode. Cela me mettait mal à l’aise. C’est la raison pour laquelle je suis parti pour Buffalo en 1968. René Girard
Il faut se souvenir que le nazisme s’est lui-même présenté comme une lutte contre la violence: c’est en se posant en victime du traité de Versailles que Hitler a gagné son pouvoir. Et le communisme lui aussi s’est présenté comme une défense des victimes. Désormais, c’est donc seulement au nom de la lutte contre la violence qu’on peut commettre la violence. Autrement dit, la problématique judaïque et chrétienne est toujours incorporée à nos déviations. René Girard
Debout ! les damnés de la terre ! Debout ! les forçats de la faim ! La raison tonne en son cratère, C’est l’éruption de la fin. Du passé faisons table rase, Foule esclave, debout ! debout ! Le monde va changer de base : Nous ne sommes rien, soyons tout ! C’est la lutte finale Groupons-nous, et demain, L’Internationale, Sera le genre humain. Eugène Pottier (1871)
Puisqu’on l’opprime dans sa race et à cause d’elle, c’est d’abord de sa race qu’il lui faut prendre conscience. Ceux qui, durant des siècles, ont vainement tenté, parce qu’il était  nègre, de le réduire à l’état  de  bête, il faut qu’il les oblige à le reconnaître  pour un homme. Or il n’est pas ici d’échappatoire, ni de tricherie, ni de « passage de ligne  » qu’il puisse envisager : un Juif, blanc parmi les  blancs, peut nier qu’il  soit juif, se déclarer un homme parmi les hommes. Le nègre ne peut  nier qu’il  soit  nègre ni réclamer pour lui cette abstraite humanité incolore : il est noir. Ainsi est-il acculé à l’authenticité : insulté, asservi, il se redresse, il ramasse  le  mot de « nègre » qu’on lui a  jeté comme une pierre, il se revendique  comme noir, en face du blanc, dans la fierté. L’unité finale qui rapprochera tous les opprimés  dans le même combat doit être  précédée aux colonies par ce que je nommerai le moment de la séparation ou de la négativité : ce racisme  antiraciste est le  seul chemin qui puisse  mener à l’abolition  des  différences de race. Jean-Paul Sartre (Orphée noir, 1948)
Attention, l’Amérique a la rage (…) La science se développe partout au même rythme et la fabrication des bombes est affaire de potentiel industriel. En tuant les Rosenberg, vous avez tout simplement essayé d’arrêter les progrès de la science. (…) Vous nous avez déjà fait le coup avec Sacco et Vanzetti et il a réussi. Cette fois, il ne réussira pas. Vous rappelez-vous Nuremberg et votre théorie de la responsabilité collective. Eh bien ! C’est à vous aujourd’hui qu’il faut l’appliquer. Vous êtes collectivement responsables de la mort des Rosenberg, les uns pour avoir provoqué ce meurtre, les autres pour l’avoir laissé commettre. Jean-Paul Sartre (« Les animaux malades de la rage », Libération, 22 juin 1953)
Notre nation fait face à une campagne visant à effacer notre histoire, diffamer nos héros, supprimer nos valeurs et endoctriner nos enfants. (…) Le désordre violent que nous avons vu dans nos rues et nos villes qui sont dirigées par des libéraux démocrates dans tous les cas est le résultat d’années d’endoctrinement extrême et de partialité dans l’éducation, le journalisme et d’autres institutions culturelles. (…) Nous croyons en l’égalité des chances, une justice égale et un traitement égal pour les citoyens de toutes races, origines, religions et croyances. Chaque enfant, de chaque couleur – né et à naître – est fait à l’image sainte de Dieu. Donald Trump
Our nation is witnessing a merciless campaign to wipe out our history, defame our heroes, erase our values, and indoctrinate our children. Angry mobs are trying to tear down statues of our Founders, deface our most sacred memorials, and unleash a wave of violent crime in our cities. Many of these people have no idea why they are doing this, but some know exactly what they are doing. They think the American people are weak and soft and submissive. But no, the American people are strong and proud, and they will not allow our country, and all of its values, history, and culture, to be taken from them. One of their political weapons is “Cancel Culture” — driving people from their jobs, shaming dissenters, and demanding total submission from anyone who disagrees. This is the very definition of totalitarianism, and it is completely alien to our culture and our values, and it has absolutely no place in the United States of America. (…) In our schools, our newsrooms, even our corporate boardrooms, there is a new far-left fascism that demands absolute allegiance. If you do not speak its language, perform its rituals, recite its mantras, and follow its commandments, then you will be censored, banished, blacklisted, persecuted, and punished. (…) Make no mistake: this left-wing cultural revolution is designed to overthrow the American Revolution. In so doing, they would destroy the very civilization that rescued billions from poverty, disease, violence, and hunger, and that lifted humanity to new heights of achievement, discovery, and progress. To make this possible, they are determined to tear down every statue, symbol, and memory of our national heritage. Our people have a great memory. They will never forget the destruction of statues and monuments to George Washington, Abraham Lincoln, Ulysses S. Grant, abolitionists, and many others. The violent mayhem we have seen in the streets of cities that are run by liberal Democrats, in every case, is the predictable result of years of extreme indoctrination and bias in education, journalism, and other cultural institutions. Against every law of society and nature, our children are taught in school to hate their own country, and to believe that the men and women who built it were not heroes, but that were villains. The radical view of American history is a web of lies — all perspective is removed, every virtue is obscured, every motive is twisted, every fact is distorted, and every flaw is magnified until the history is purged and the record is disfigured beyond all recognition. This movement is openly attacking the legacies of every person on Mount Rushmore. They defile the memory of Washington, Jefferson, Lincoln, and Roosevelt. Today, we will set history and history’s record straight. (….) We believe in equal opportunity, equal justice, and equal treatment for citizens of every race, background, religion, and creed. Every child, of every color — born and unborn — is made in the holy image of God. We want free and open debate, not speech codes and cancel culture. We embrace tolerance, not prejudice. We support the courageous men and women of law enforcement. We will never abolish our police or our great Second Amendment, which gives us the right to keep and bear arms. We believe that our children should be taught to love their country, honor our history, and respect our great American flag. We stand tall, we stand proud, and we only kneel to Almighty God. This is who we are. This is what we believe. And these are the values that will guide us as we strive to build an even better and greater future. President Trump
Hey, hey, ho, ho, Western Civ has got to go!  Jesse Jackson (1987)
By focusing these ideas on all of us they are crushing the psyche of those others to whom Locke, Hume, and Plato are not speaking. . . . The Western culture program as it is presently structured around a core list and an outdated philosophy of the West being Greece, Europe, and Euro-America is wrong, and worse, it hurts people mentally and emotionally. Bill King (Stanford Black Student Union,1988)
Still nominally very much part of an atheistic, anti-foundational, French academic avant-garde in the United States, and now increasingly prominent in his position at Johns Hopkins, Girard was even one of the chief organizers of “The Languages of Criticism and the Sciences of Man,” the enormously influential conference, in Baltimore in October 1966, that brought to America from France skeptical celebrity intellectuals including Jacques Lacan, Lucien Goldmann, Roland Barthes, and, most consequentially, the most agile of Nietzschean nihilists, Jacques Derrida, still obscure in 1966 (and always bamboozlingly obscurantist) but propelled to fame by the conference and his subsequent literary productivity and travels in America: another glamorous, revolutionary “Citizen Genet,” like the original Jacobin visitor of 1793–94. After this standing-room-only conference, Derrida and “deconstructionism,” left-wing Nietzscheanism in the high French intellectual mode, took America by storm, which is perhaps the crucial story in the subsequent unintelligibility, decline, and fall of the humanities in American universities, in terms both of enrollments and of course content. The long-term effect can be illustrated in declining enrollments: at Stanford, for example, in 2014 alone “humanities majors plummeted from 20 percent to 7 percent,” according to Ms. Haven. The Anglo-American liberal-humanistic curricular and didactic tradition of Matthew Arnold (defending “the old but true Socratic thesis of the interdependence of knowledge and virtue”), Columbia’s Arnoldian John Erskine (“The Moral Obligation to Be Intelligent,” 1913), Chicago’s R. M. Hutchins and Mortimer Adler (the “Great Books”), and English figures such as Basil Willey (e.g., The English Moralists, 1964) and F. R. Leavis (e.g., The Living Principle: “English” as a Discipline of Thought, 1975) at Cambridge, and their successor there and at Boston University, Sir Christopher Ricks, was rapidly mocked, demoted, and defenestrated, with Stanford students eventually shouting, “Hey, hey, ho, ho! / Western civ has got to go!” The fundamental paradox of a relativistic but left-wing, Francophile Nietzscheanism married to a moralistic neo-Marxist analysis of cultural traditions and power structures — insane conjunction! — is now the very “gas we breathe” on university campuses throughout the West (…). Girard quietly repented his role in introducing what he later called “the French plague” to the United States, with Derrida, Foucault, and Paul DeMan exalting ludicrous irrationalism to spectacular new heights. M. D. Aeschliman
Nous sommes une société qui, tous les cinquante ans ou presque, est prise d’une sorte de paroxysme de vertu – une orgie d’auto-purification à travers laquelle le mal d’une forme ou d’une autre doit être chassé. De la chasse aux sorcières de Salem aux chasses aux communistes de l’ère McCarthy à la violente fixation actuelle sur la maltraitance des enfants, on retrouve le même fil conducteur d’hystérie morale. Après la période du maccarthisme, les gens demandaient : mais comment cela a-t-il pu arriver ? Comment la présomption d’innocence a-t-elle pu être abandonnée aussi systématiquement ? Comment de grandes et puissantes institutions ont-elles pu accepté que des enquêteurs du Congrès aient fait si peu de cas des libertés civiles – tout cela au nom d’une guerre contre les communistes ? Comment était-il possible de croire que des subversifs se cachaient derrière chaque porte de bibliothèque, dans chaque station de radio, que chaque acteur de troisième zone qui avait appartenu à la mauvaise organisation politique constituait une menace pour la sécurité de la nation ? Dans quelques décennies peut-être les gens ne manqueront pas de se poser les mêmes questions sur notre époque actuelle; une époque où les accusations de sévices les plus improbables trouvent des oreilles bienveillantes; une époque où il suffit d’être accusé par des sources anonymes pour être jeté en pâture à la justice; une époque où la chasse à ceux qui maltraitent les enfants est devenu une pathologie nationale. Dorothy Rabinowitz
You always told us not to boast. Gisela Warburg
How can the proposed Declaration be applicable to all human beings and not be a statement of rights conceived only in terms of the values prevalent in the countries of Western Europe and America?” Melville J. Herskovits  (The American Anthropological Association, 1947)
Nelson (…) was what you would now call, without hesitation, a white supremacist. While many around him were denouncing slavery, Nelson was vigorously defending it. Britain’s best known naval hero – so idealised that after his death in 1805 he was compared to no less than “the God who made him” – used his seat in the House of Lords and his position of huge influence to perpetuate the tyranny, serial rape and exploitation organised by West Indian planters, some of whom he counted among his closest friends. It is figures like Nelson who immediately spring to mind when I hear the latest news of confederate statues being pulled down in the US. These memorials – more than 700 of which still stand in states including Virginia, Georgia and Texas – have always been the subject of offence and trauma for many African Americans, who rightly see them as glorifying the slavery and then segregation of their not so distant past. But when these statues begin to fulfil their intended purpose of energising white supremacist groups, the issue periodically attracts more mainstream interest. The reaction in Britain has been, as in the rest of the world, almost entirely condemnatory of neo-Nazis in the US and of its president for failing to denounce them. But when it comes to our own statues, things get a little awkward. The colonial and pro-slavery titans of British history are still memorialised: despite student protests, Oxford University’s statue of imperialist Cecil Rhodes has not been taken down; and Bristol still celebrates its notorious slaver Edward Colston. (…)  Britain has committed unquantifiable acts of cultural terrorism – tearing down statues and palaces, and erasing the historical memory of other great civilisations during an imperial era whose supposed greatness we are now, so ironically, very precious about preserving intact. And we knew what we were doing at the time. One detail that has always struck me is how, when the British destroyed the centuries-old Summer Palace in Beijing in 1860 and gave a little dog they’d stolen as a gift to Queen Victoria, she humorously named it “Looty”. This is one of the long list of things we are content to forget while sucking on the opium of “historical integrity” we claim our colonial statues represent. We have “moved on” from this era no more than the US has from its slavery and segregationist past. The difference is that America is now in the midst of frenzied debate on what to do about it, whereas Britain – in our inertia, arrogance and intellectual laziness – is not. The statues that remain are not being “put in their historical context”, as is often claimed. Take Nelson’s column. Yes, it does include the figure of a black sailor, cast in bronze in the bas-relief. He was probably one of the thousands of slaves promised freedom if they fought for the British military, only to be later left destitute, begging and homeless, on London’s streets when the war was over. But nothing about this “context” is accessible to the people who crane their necks in awe of Nelson. The black slaves whose brutalisation made Britain the global power it then was remain invisible, erased and unseen. Afua Hirsch
Why are we experiencing the worst civil disturbances in decades? It is because the proponents of radical change won’t have it any other way. Early 20th Century Italian Marxist Antonio Gramsci theorized that the path to a communist future came through gradually undermining the pillars of western civilization. We are now seeing the results of decades of such erosion, in education, in faith, in politics and in the media. The old standards of freedom, individual responsibility, equality and civic order are being assaulted by proponents of socialism, radical deconstruction and mob rule. Those who charge that institutional racism is rampant in America are the same as those who run the country’s major institutions – city governments, academe, the media, Hollywood, major sports leagues and the Washington, D.C. deep state bureaucracy. Accountability? None.  The irony is rich. At the same time, the only legal and institutional structures that mandate racially based outcomes do so in favor of other-than-majority groups. Anyone who questions this arrangement winds up cancelled. The public debate is hardwired for disunity, making the former language of inclusion the new dog whistle of racism. The exclusionary slogan “black lives matter” is sanctified while the more unifying “all lives matter” is called divisive. People who say they want a colorblind society are called bigots even as progressives push for segregated events and housing on college campuses and “CHOP” protesters demand Black-only hospitals. Martin Luther King’s dream that people will “live in a nation where they will not be judged by the color of their skin, but by the content of their character” is judged by today’s progressives as a call for white supremacy. The media goes out of its way to coddle violent protesters, calling them peaceful even as they verbally abuse and then throw bottles at police, saying they are not “generally speaking, unruly” standing in front of a burning building. Political leaders who benefit from disunity keep fanning the flames. For example House Speaker Nancy Pelosi’s reckless charge that the Senate police reform bill is “trying to get away with the murder of George Floyd” is irresponsibly divisive, especially since it was drafted by African American Senator Tim Scott (R-SC). Public monuments have borne the brunt of the violence in recent weeks. As President Trump predicted, the vandalism has moved well beyond statues of Confederates. Practically any statue is fair game. Washington, Jefferson, even Ulysses S. Grant, the man who defeated Lee’s army, all have been toppled by the mobs. And liberal city governments are taking down statues at least as fast as the rioters. But it would be a mistake to think that the statues themselves are at issue, or even what they symbolize. Rather it is the need for the radicals not just to cleanse American history but to make people feel ashamed of every aspect of it. In this way they clear a path for a radical future, buttressed by an unwavering sense of moral superiority that entitles them to smack down any dissent, usually gagging people in the name of “free speech.” We were told for years that anything the Trump administration did that was remotely controversial was an attempt to divide the country. Democrats frequently blamed insidious foreign influence, using expressions like “right out of Putin’s playbook” to keep the Russian collusion canard alive. But they are the ones who are weakening and dividing the country, to the evident glee of our Russian and Chinese adversaries. They have completely adopted longstanding Russian and Chinese propaganda lines about the United States being a country of endemic racism, poverty and oppression, when in fact America is an opportunity society and one of the most racially diverse and tolerant countries in the world. The protesters, their political allies and media backers are working hard to create the very sort of divisions they claim to oppose, because a weak, divided and ashamed America is their pathway to power. Chris Farrell
Il n’y a pas de plus grand monument à l’assujettissement colonial des peuples autochtones que le Mont Rushmore, et le projet du président de profaner davantage ce sol sacré avec des feux d’artifice et sa propre présence sans avoir été convié est un autre affront impardonnable. Il est temps de récupérer ou de démolir tous les monuments racistes. En tant que société, nous devons nous engager à respecter en permanence les populations marginalisées. Lakota People’s Law Project
The statue of Columbus sat in front of Columbus City Hall for 65 years. It was a gift from the people of Genoa, Italy. Now the mayor’s office says it’s “in safekeeping at a secure city facility.” What a blow to U.S.-Italy relations. At least he could offer to give the statue back. A second Columbus likeness, a marble of the navigator pointing west, was booted last month by Columbus State Community College, where it used to stand in the downtown Discovery District. The mayor’s office says the unelected Columbus Art Commission will launch a “participatory process” to find new art that “offers a shared vision for the future.” Good luck. “Let’s just leave the space empty,” one Dispatch letter suggested, “because if not everyone is happy should anyone be happy?” What a sad sign of the times. WSJ
ABC News published a report this week titled “New government data, shared first with ABC News, shows the country’s premier outdoor spaces – the 419 national parks – remain overwhelmingly white.” The story’s headline reads, “America’s national parks face existential crisis over race,” adding in the subhead, “A mostly white workforce, visitation threatens parks‘ survival and public health.” “Just 23% of visitors to the parks were people of color,” the report adds, “77% were white. Minorities make up 42% of the U.S. population.” As it turns out, white people really enjoy hiking and camping, and that is a problem for the parks, the ABC News report claims, because people of color will be a majority in America by 2044. The article then goes on to quote outdoor enthusiasts of color who say they do not feel welcome at the “overwhelmingly white” national parks. These advocates, the article reads, “say they hope the moment since George Floyd’s death in police custody brings attention to systemic racism in the outdoors as well as other parts of society and translates into a long-term change in attitudes and behavior.” Sorry, everyone. Even national parks are racist now. This is not normal behavior from our press. This is a mental breakdown in the works. People of the future will look at all this and wonder how on earth these stories made it into print. The best thing that can happen now for the news industry is for the pandemic to pass, the lockdowns to lift, and for everyone to go outside and get some fresh air. Because the way nearly everyone in the press is behaving now, it seems clear that cabin fever has set in hard, and it is an epidemic we may not shake as quickly as the coronavirus. Becket Adams
People have said for decades that America needs to have “an honest conversation about race.” Is this what they had in mind—this drama of marches, riots, witness videos, tear-gassings, surging police lines, Trump tweets, Zoom pressers, statue-topplings, Facebook screeds, cable television rants, window-smashings, shop-burnings, police-defundings, escalating murder rates and the distant thunder of editorial boards? Veterans in the field of less-than-revolutionary race relations learned that a certain amount of truth-suppression is actually helpful—preferable to the “honesty” of hatred, for example. Much progress has been accomplished under cover of hypocrisy—or, if you like, civility. Good manners and artful hypocrisy were Booker T. Washington’s game, but he was written off as an Uncle Tom long ago. We live now in the regime and culture of confrontation—ideology as performance, anger as proof of authenticity. You remember how much trouble Joe Biden got into when he bragged about his ability to get along with segregationists in the 1970s. Mr. Biden was preening thoughtlessly on his skill in the arts of the old hypocrisy. Now he has learned his lesson and embraces the left’s idea of honesty—no deviation from the party line or from the officially approved emotions. How do you judge a moment of history when you are in the thick of it? How can you tell if all of this will be remembered as historic or will be superseded and forgotten as another momentary sensation, another self-important mirage? The current moment feels intensely historic now, but we shall see. Black Lives Matter has ambitions to abolish its own version of the Chinese Cultural Revolution’s “Four Olds”—old customs, old culture, old habits, old ideas—and to add a fifth, old statues. Yet this summer the titanic racial theme competes and fuses with other superstories—the pandemic and its economic consequences, the presidential race, America’s long-running politico-religious civil war. Raw emotion pours out of social media and into the streets—outrage, with a touch of holiday. On the other side is an oddly silent majority. It seems eerie that so much of the country—the land of “white supremacy,” as the left likes to think of it—gives the appearance of having almost acquiesced, as if it has conceded that the eruptions might be justified and even overdue. Can it be that the silenced majority has had an epiphany, that in its heart it acknowledges the justice of black Americans calling in Thomas Jefferson’s IOU, “I tremble for my country when I reflect that God is just, and that his justice cannot sleep forever”? There’s some of that—changed minds, old prejudice grown reflective. In any case, the silenced majority, out of moral courtesy, has been reluctant to criticize people demonstrating in the wake of George Floyd’s killing. At the same time, it recoils—more indignantly and incredulously each day—from the left’s overall program and mind-set, which it considers insidious if not crazy. When major cities propose to cut off funds for their police departments or to abolish them altogether, that Swiftian absurdity makes a deep impression, confirming a broader doubt about the left’s intentions and mental health. The most tragic impediment to an honest conversation about race in America is fear—an entirely realistic fear of being slain by the cancel culture. This fear to speak is a civic catastrophe and an affront to the Constitution. It induces silent rage in the silenced. It is impossible to exaggerate the corrupting effect that the terror of being called a “racist”—even a whiff of the toxin, the slightest hint, the ghost of an imputation—has on freedom of discussion and the honest workings of the American public mind. Racism in America is no longer totalitarian, as it once was, especially in the South. The cancel culture is the new totalitarianism, a compound of McCarthyism, the Inquisition, the Cultural Revolution, the Taliban and what has become a lethal and systemic ignorance of history—almost a hatred of it. All that wild, unearned certainty, all that year-zero zealotry, discredits those who associate themselves with the cause and makes a mockery of their sweet intentions. Much of the white woke rage is radiant with mere self-importance. And it’s going to backfire. Newton’s Third Law of Motion hasn’t been repealed: For every action there is still an equal and opposite reaction. My sense is that there is quietly building a powerful backlash, which will express itself on Nov. 3, if not before. My guess is that polls now showing Mr. Biden far ahead don’t reflect reality. It may be impossible for President Trump to win; for some reason, he collaborates daily with his enemies to sabotage his chances. But the outcome is by no means as certain as the polls now suggest. Lance Morrow
Lorsqu’on fait l’expérience de la montée fulgurante de la violence comme j’en ai été témoin en Algérie, au début des années 1990, on ne peut que chérir la liberté. J’ai pris, soudainement, conscience dans la jeune vingtaine du privilège que j’avais de vivre. Résister à l’islam politique est devenu le combat de ma vie. Soutenir Mila s’inscrit, naturellement, dans cette démarche. Lorsque tout fout le camp, il ne reste que les fondamentaux pour donner un sens à l’existence. (…) En réalité, j’ai très vite déchanté en arrivant en France avec ma famille, mes parents, professeurs d’université, et mon frère, jeune lycéen. Nous nous sommes installés à Saint-Denis, ville cosmopolite, à l’époque, qui avait une tradition dans l’accueil des réfugiés politiques. Je pense, notamment, à nos camarades espagnols, italiens, grecs et portugais qui avaient fui le fascisme. Quant à nous, notre situation était considérée comme différente de la leur. Nous étions hors champ. Je pense que c’est autour de cette ambiguïté de notre statut que sont nés d’abord les malentendus, puis les dérives. En d’autres mots, nous reconnaître ne serait-ce que, symboliquement, le statut de réfugié politique revenait à placer l’islam politique dans l’histoire et le considérer comme une menace planétaire. Or, il n’en a rien été. Les États occidentaux et leurs élites intellectuelles dominantes ne se sont pas sentis concernés par ce qui s’est joué en Algérie dans les années 1990, tout comme en Iran en 1979. Certains prétendaient que la menace islamiste allait rester confinée aux frontières de ces pays, d’autres, comme les États-uniens (sic), étaient convaincus de pouvoir «domestiquer» l’islamisme. Depuis, il n’a cessé de progresser et de muter. Pour trois raisons principalement. La puissance de son idéologie, sa capacité à s’adapter à n’importe quel environnement institutionnel et, finalement, sa force mobilisatrice. Pour revenir à votre question de départ, ceux qui menacent nos libertés ne sont pas seulement les islamistes. Mais ceux qui ont renoncé à les exercer et à les défendre. (…) La France était pour moi un havre de paix qui m’a permis de me reconstruire. Je n’oublierai jamais de ma vie cette sensation de marcher librement dans la rue, cheveux au vent, sans avoir à vérifier s’il y avait, au coin d’une rue, un salaud pour me buter. La sécurité est, en ce sens, la première des libertés. Comment dire? Pour une femme, c’est encore plus vrai. Ceux qui, comme moi, en ont été privés en mesurent toute l’importance. Je pense à mes amies afghanes, iraniennes et saoudiennes qui sont en première ligne. Évoquer cette période c’est aussi parler des solidarités. La France, à travers un tissu associatif dynamique, des syndicats, universitaires, artistes et simplement des gens d’une grande générosité, a participé à atténuer nos blessures et à nous rattacher à notre humanité. Ultimement, pour sortir de nos vies cabossées et de nos destins fracassés, nous ne pouvions compter que sur notre résilience. Sur le plan politique, c’était beaucoup plus compliqué. L’asile politique a été offert en France, en Europe, aux États-Unis et au Canada aux chefs du FIS et du GIA et à leurs militants, ceux-là même dont les mains étaient entachées de sang. Il se trouvait des journalistes comme Edwy Plenel ou des universitaires comme François Burgat pour les absoudre de leurs crimes. Vous vous souvenez du petit jeu du «Qui tue qui?» («On ne sait pas qui tue qui?»: durant la tragique décennie noire en Algérie, cette formule en vogue était employée par certains observateurs, en particulier en Europe et en France, pour désigner l’armée algérienne comme seule responsable des massacres sur les civils alors que ces derniers étaient perpétrés par des groupes islamistes, NDLR) en Algérie qui a donné, plus tard, le «je ne suis pas Charlie»? Toujours les mêmes aux commandes pour faire courir des «si», multiplier des «mais» et évacuer toute la dimension idéologique et politique de notre combat. Pour eux, les islamistes, à bien y regarder, n’étaient pas vraiment des islamistes, et surtout pas des assassins. Et ceux qui s’opposaient à leurs desseins fascistes n’étaient pas des résistants. La régression? Elle n’est qu’une simple conséquence de cette confusion. Mais attention! N’allez pas imaginer que nous nous sommes tus. Même si cette thèse du «Qui tue qui?» nous était insupportable, nous l’avons confrontée. Dénoncée. Nous ne nous sommes jamais résignés. Jamais. Nous avons continué à parler, écrire, militer et mettre en garde contre la contagion islamiste, ici comme ailleurs. Nous, nous n’habitions pas les beaux quartiers. Encore là, le discours dominant dans le milieu médiatique était à la victimisation des musulmans. Notre parole était pratiquement inaudible. (..) Je remercie, vivement, Marianne d’avoir été à nos côtés depuis le début. Mon père est le premier à avoir osé lever le voile sur les graves dérives qui touchent Saint-Denis, qui n’est pas n’importe quelle ville. Elle est au cœur du dispositif indigéniste. Tout comme elle est au centre de la stratégie de l’internationale islamiste. Tout cela est largement documenté dans le livre «Quatre-vingt-treize», de Gilles Kepel… depuis 2012. Il n’était plus possible pour mon père de se taire. Ne pensez pas que ce geste a été sans conséquence pour lui. Vivre au quotidien dans la gueule du loup ça use. Même les plus courageux parmi nous. À l’évidence, ceux qui, comme mon père, habitent dans les quartiers populaires et résistent aux islamistes et à la mafia ne bénéficient d’aucune protection et n’ont pas le soutien des élus locaux. En 2009, avec quelques Dionysiens nous avons mis en place l’Observatoire de la laïcité de Saint-Denis (qui n’a rien à voir avec celui de Bianco, qui a détourné notre nom). Nous avons reçu deux cacahuètes de subside alors que l’association de Rokhaya Diallo, qui n’y est pas domiciliée, est grassement subventionnée pour offrir des ateliers sur les cheveux frisés. On se moque de qui? À Saint-Denis, il y a pourtant beaucoup d’initiatives citoyennes à encourager, comme l’association Les Résilientes. (…) loin de l’islamisme que j’avais retrouvé en France. (…) j’ai choisi le Québec, pays francophone, ouvert à l’immigration, véritable démocratie où il fait bon vivre pour les femmes. Puis, il y a eu le 11 Septembre 2001. J’étais correspondante de presse pour le journal algérien El-Watan, je me suis rendue, tout de suite, à New York avec mon amoureux qui était lui aussi journaliste. Nous sommes revenus de ce voyage bouleversés. En effet, tout avait basculé! (…) au cœur du dispositif législatif canadien il existe, depuis 1985, une possibilité de se soustraire aux règles communes en faisant valoir ses croyances religieuses. C’est ce qu’on appelle l’accommodement raisonnable devenu célèbre depuis le début des années 2000. Une simple demande faite «de bonne foi» suffit à obtenir une dérogation. Et ça peut aller très loin. Une enfant de maternelle dont les parents musulmans obligent l’école à lui mettre sur la tête un casque insonorisé pour la prémunir des chants de Noël. Paraît-il que c’est dans leur religion! Un jeune adolescent sikh autorisé à porter le kirpan (un poignard) à l’école après une bataille judiciaire qui est allée jusqu’en Cour suprême et a duré quatre ans. Des milliers de dollars pour faire plier une école et renverser deux décisions de justice. Théoriquement, il y a quelques garde-fous. Dans la pratique, les institutions qui refusent les accommodements se font traîner en justice. Ça coûte un fric fou! Ce qu’il faut comprendre par là c’est que les lobbies politico-religieux, riches et puissants, ont trouvé dans les accommodements un boulevard pour défaire ce qui a été chèrement acquis avec la Révolution tranquille. Il me paraissait urgent de proposer une charte de la laïcité pour retrouver le sens du commun. C’est ce que j’ai fait à travers mon engagement au Parti québécois où j’ai obtenu l’appui de deux femmes remarquables, Pauline Marois (ancienne première ministre) et Louise Beaudoin, et de notre ancien premier ministre, le regretté Bernard Landry. Cette loi qui a été adoptée en juin dernier est l’aboutissement d’un long combat. Il est, surtout, une claque à la face du multiculturalisme canadien.(…) La censure et l’autocensure dans les universités, les médias, le monde culturel sont désormais une réalité qu’il est difficile de déjouer. Nous manquons cruellement d’espace pour la confrontation des idées. Le débat est très mal vu. La recherche permanente d’un consensus valide l’idée selon laquelle la meilleure posture est une moyenne de toutes les postures. Nous n’avons pas de service public digne de ce nom. Nous avons une télévision et une radio d’État, Radio-Canada, au service d’une idéologie: le multiculturalisme qui a expurgé les laïques du débat public. Tout ce qui concerne l’islam et les musulmans relève du tabou. Alors vous imaginez ce livre avec un tel titre? (« Ma vie à contre-Coran ») Il y a encore des courageux qui osent. Mais à quel prix? Heureusement que nous avons encore Denise Bombardier et ses collègues du Journal de Montréal pour élargir nos horizons. (…) Justin Trudeau est convaincu de la supériorité morale du Canada sur les États-Unis et sur l’Europe. Pour lui, les attentats terroristes islamistes sont le résultat d’une mauvaise intégration des immigrants. Sa devise est simple: il n’y a qu’à être gentil pour susciter les bons sentiments. Sauf que les premiers réseaux terroristes au Canada sont apparus dans les années 1990. Ils étaient l’œuvre d’anciens militants du FIS. Il n’y a plus aucun journaliste pour le rappeler. (…) (le multiculturalisme)Tariq Ramadan le considère comme le meilleur système. En 2012, lorsque je me suis présentée aux élections, il a animé un grand meeting, à Montréal, pour appeler ses partisans à me barrer la route. À moi, mes collègues, mon parti. Ceux qui s’étaient faufilés en haut de la liste sont les porte-paroles d’un parti islamo-gauchiste, Québec solidaire, qui n’a plus rien de solidaire. Vous voyez bien que ce n’est pas très différent de la France. La trahison de la gauche communautariste permet aux islamistes de gagner du terrain. Demila Benhabib
We must resist the temptation to romanticize history’s losers. The other civilizations overrun by the West’s, or more peacefully transformed by it through borrowings as much as by impositions, were not without their defects either, of which the most obvious is that they were incapable of providing their inhabitants with any sustained improvement in the material quality of their lives. (…)  civilization is much more than just the contents of a few first-rate art galleries. It is a highly complex human organization (…) as much about sewage pipes as flying buttresses.”  Niall Ferguson French postmodern theory refuses to distinguish between high and low culture, attempting to make it futile even to discuss whether this or that work of art is or is not lovely or important. If you want to argue that Kanye West’s lyrics are as good as Shakespeare, or Mongolian yurts are as sophisticated a form of architecture as Bauhaus, then Foucault will support you all the way. But if you want to understand why we do not have child slavery in the West, or disenfranchised women, or imprisonment without trial, or the imprisonment of newspaper editors, you simply have to study the cultural history that produced such an unusual and extraordinary situation in human history. It is inescapable and not susceptible to postmodernist analysis. It’s not about the aesthetic or literary superiority of certain artworks, but about the unequivocal good of human dignity. If Ms. Rashatwar finds the idea of losing her human rights so “romantic,” she is always welcome to move to Saudi Arabia, which is still awaiting its Enlightenment. The late, very great Gertrude Himmelfarb identified three separate Enlightenments — English, French, and Scottish — at different though overlapping stages of the 18th century, with different emphases in different places at different times. Chartres Cathedral was not dedicated until 1260, so there were five centuries between then and the Enlightenments, but they were the moments when people began to throw off superstition and belief in magic and witchcraft, to look at the world afresh, unafraid of what they might find and where it might take them, even at the risk of unbelief. If the Islamic world had had such a moment, it would not have been left behind in so many areas of accomplishment since it was turned back from the gates of Vienna in 1683, with the result that its fascist-fundamentalist wing might not have existed to lash out in such fury and resentment on 9/11. The recent Security Conference in Munich took as its theme and title “Westlessness” — an ugly word in English, worse in German — intending to prompt international decision-makers into thinking about what might happen if the Trump administration were ever to get as tough over NATO underfunding as it has long threatened to do. Another fear of Westlessness, however, should be about the eclipse of Western civilization as a subject for study, as a result of a hugely successful Gramscian march through the institutions that started long before Jesse Jackson and his megaphone visited Stanford. For far from becoming a Kumbaya touchy-feely place, a truly Westless world would be a neo-Darwinian free-for-all in which every state merely grabbed what it could, a return to the world Hobbes wrote about in Leviathan. The Left should beware what it claims to wish for, and Western civilization should be taught once more in our schools and colleges. For as Churchill knew as the bombs were falling and London was burning in December 1940, it is worth fighting for. Andrew Roberts

C’est la faute à Foucault ! (Après la peste… la rage !)

En ces temps étranges …

Où après l’hystérie collective du virus chinois

Et le psychodrame – de Colomb et la fête nationale jusqu’aux… parcs nationaux ! – du prétendu « racisme systémique » …

L’Amérique semble à nouveau emportée – et tout l’Occident peut-être avec elle ?

Par une de ces vagues périodiques de furie auto-purificatrice

Et où en ce singulier 244e anniversaire de la Déclaration d’indépendance américaine …

Le président américain se voit contraint …

Entre deux manifestations ou déboulonnages de statues …

A en rappeler toute l’importance au pied même d’un de ses plus imposants symboles  …

Comment ne pas repenser …

Avec la National Review

A ces alors bien innocents jours il y a trente ans à peine …

Où reprenant les nouveaux diktats de la French theory de nos Foucault et Derrida …

Jessie Jackson et ses amis appelaient au sein même de l’université Stanford

A rien de moins que… la fin de la Civilisation occidentale ?

Why We Must Teach Western Civilization

Andrew Roberts National Review April 30, 2020 Tuesday, December 3, 1940, Winston Churchill read a memorandum by the military strategist Basil Liddell Hart that advocated making peace with Nazi Germany. It argued, in a summary written by Churchill’s private secretary, Jock Colville, that otherwise Britain would soon see “Western Europe racked by warfare and economic hardship; the legacy of centuries, in art and culture, swept away; the health of the nation dangerously impaired by malnutrition, nervous strains and epidemics; Russia . . . profiting from our exhaustion.” Colville admitted it was “a terrible glimpse of the future,” but nonetheless courageously concluded that “we should be wrong to hesitate” in rejecting any negotiation with Adolf Hitler.

It is illuminating — especially in our own time of “nervous strains and epidemics” — that in that list of horrors, the fear of losing the “legacy of centuries” of Western European art and culture rated above almost everything else. For Churchill and Colville, the prospect of losing the legacy of Western civilization was worse even than that of succumbing to the hegemony of the Soviet Union. 

Yet today, only eight decades later, we have somehow reached a situation in which Sonalee Rashatwar, who is described by the Philadelphia Inquirer as a “fat-positivity activist and Instagram therapist,” can tell that newspaper, “I love to talk about undoing Western civilization because it’s just so romantic to me.” Whilst their methods are obviously not so appallingly extreme, Ms. Rashatwar and the cohorts who genuinely want to “undo” Western civilization are now succeeding where Adolf Hitler and the Nazis failed.

 The evidence is rampant in the academy, where a preemptive cultural cringe is “decolonizing” college syllabuses — that is, wherever possible removing Dead White European Males (DWEMs) from it — often with overt support from deans and university establishments. Western Civilization courses, insofar as they still exist under other names, are routinely denounced as racist, “phobic,” and generally so un-woke as to deserve axing. 

Western civilization, so important to earlier generations, is being ridiculed, abused, and marginalized, often without any coherent response. Of course, today’s non-Western colonizations, such as India’s in Kashmir and China’s in Tibet and Uighurstan, are not included in the sophomores’ concept of imperialism and occupation, which can be done only by the West. The “Amritsar Massacre” only ever refers to the British in the Punjab in 1919, for example, rather than the Indian massacre of ten times the number of people there in 1984. Nor can the positive aspects of the British Empire even be debated any longer, as the closing down of Professor Nigel Biggar’s conferences at Oxford University on the legacy of colonialism eloquently demonstrates.

We all know the joke that Mahatma Gandhi supposedly made when he was asked what he thought about Western civilization: “I think it might be a good idea.” The gag is apocryphal, in fact, first appearing two decades after his death. But very many people have taken it literally, arguing that there really is no such thing as Western civilization, from ideologues such as Noam Chomsky to the activists of the Rhodes Must Fall movement at Oxford University, who demand the removal from Oriel College of the statue of the benefactor of the Rhodes Scholarships.

Increasingly clamorous demands by African and Asian governments for the restitution of artifacts “stolen” from their countries during colonial periods are another aspect of the attack, an attempt to guilt-shame the West. It also did not help that for eight years before 2016, the United States was led by someone who was constantly searching for aspects of Western behavior for which to apologize.

This belief that Western civilization is at heart morally defective has recently been exemplified by the New York Times’ inane and wildly historically inaccurate “1619 Project,” which essentially attempts to present the entirety of American history from Plymouth Rock to today solely through the prism of race and slavery. “America Wasn’t a Democracy until Black Americans Made It One” was the headline of one essay in the New York Times Magazine launching the project, alongside “American Capitalism Is Brutal: You Can Trace That to the Plantation” and “How Segregation Caused Your Traffic Jam.” When no fewer than twelve — in the circumstances very brave — American Civil War historians sent a letter itemizing all the myriad factual errors in the project’s founding document, the New York Times refused to print it. Yet the Project plans to create and distribute school curriculums that will “recenter” America’s memory.

None of this would amount to much if only schools and colleges were not so keen to apologize for and deny Western civilization, and to abolish or dumb down the teaching of important aspects of it. The classics faculty at Oxford University, to take one example of many, has recently recommended that Homer’s Iliad and Virgil’s Aeneid be removed from the initial module of the literae Humaniores program in ancient literature, history, and philosophy, giving as their reason the difference in recent exam results between male and female undergraduates, and the difference in expertise in Latin and Greek between privately and publicly educated students. The supposed guardians of the discipline are therefore willing to put social experimentation and social leveling before the best possible teaching of the humanities, a disgraceful position for one of the world’s greatest universities to have adopted.

A glance at the fate of “Western Civ” courses in the United States suggests that there is a deep malaise in our cultural self-confidence. The origin of the concept of Western civilization as a subject is found in the “War Issues” course offered to students at Columbia University in 1918, just after the United States’ entry into World War I. By learning the politics, history, philosophy, and culture of the Western world, students were given the opportunity to understand the values for which they were about to be asked to risk their lives. In 1919, the Columbia course was developed into “An Introduction to Contemporary Civilization,” which was followed by a similar innovation at the University of Chicago in 1931.

By 1964, no fewer than 40 of the 50 top American colleges required students to take such a class, which, to take Stanford University as an example, had evolved into a core canon of around 15 works, including those by Homer, Virgil, Plato, Dante, Milton, and Voltaire. While the content of the Western Civ courses was considerably more flexible, complex, and diverse than subsequent critics have suggested (as Herbert Lindenberger’s study The History in Literature: On Value, Genre, Institutions explains), the courses did indeed treat Western civilization as a uniform entity. In the last decade, that was derided as so inherently and obviously evil that Western Civ courses had disappeared altogether, miraculously holding out in their Columbia birthplace and in few other places, including brave, non-government-funded outposts of sanity such as Hillsdale College in Michigan and the incipient Ralston College in Savannah.

For all that we must of course take proper cognizance of other cultures, the legacy of Western culture, in terms of both its sheer quality and its quantity, is unsurpassed in human history. We are deliberately underplaying many of the greatest contributions made to poetry, architecture, philosophy, music, and art by ignoring that fact, often simply in order to try to feel less guilty about imperialism, colonialism, and slavery, even though the last was a moral crime committed by only a minority of some few people’s great-great-great-grandparents.

As a result, future generations cannot be certain that they will be taught about the overwhelmingly positive aspects of Western civilization. They might not now be shown the crucial interconnection between, for example, the Scrovegni Chapel by Giotto at Padua, which articulates the complex scholasticism of Saint Augustine in paint; Machiavelli’s The Prince, the first work of modern political theory; Botticelli’s Primavera, the quintessence of Renaissance humanism in a single painting; the works of Teresa of Ávila and Descartes, which wrestle with the proof of discrete individual identity; Beethoven’s symphonies, arguably the most complex and profound orchestral works ever written; and Shakespeare, whose plays Harold Bloom has pointed out, “remain the outward limit of human achievement: aesthetically, cognitively, in certain ways morally, even spiritually.” Even if students are taught about these works individually, they will not be connected in a context that makes it clear how important they are to Western civilization.

We cannot therefore know, once the present campaign against Western civilization reaches its goal, that our children and grandchildren will be taught about the living thing that intimately connects Europe’s Gothic cathedrals, which are mediations in stone between the individual and the sublime; the giants of the 19th-century novel, from Dickens to Flaubert to Tolstoy, in whose works contemporary life realistically observed becomes a fit subject for art; the Dutch masters of the 17th century such as Rembrandt, who wrestled visually with the human condition in a fashion that still speaks to us across the centuries; Versailles, the Hermitage, and the Alhambra, which, though bombastic, are undeniably ravishing expressions of the human will. Faced with the argument that Western culture is no longer relevant, it’s tempting to adopt Dr. Johnson’s argument, aim a good kick at the nearest neoclassical building, and announce, “I refute it thus.”

Mention of the Alhambra in Granada prompts the thought that any course in Western civilization worth its name ought also to include the Umayyad Caliphate, of which Córdoba  in modern-day Spain was the capital between 756 and 929. In the wake of the conquest of Spain and the establishment of the Muslim confederacy of Al-Andalus, Córdoba  became a flourishing, polyglot, multicultural environment in which religious tolerance, despite Jews’ and Christians’ being obliged to pay a supplementary tax to the state, produced an atmosphere of intellectual progressiveness that made it one of the most important cities in the world. Discoveries in trigonometry, pharmacology, astronomy, and surgery can all be traced to Córdoba. At a certain point, then, a very particular set of historical circumstances produced an equally particular set of intellectual ideas, which had significant material consequences. The study of Western civilization is therefore emphatically not solely that of Christian DWEMs.

In 1988, Jesse Jackson led Stanford students in the chant, “Hey, hey, ho, ho, Western Civ has got to go!” The protests attracted national headlines and inspired a television debate between the university’s president and William Bennett, then secretary of education. Bill King, the president of the Stanford Black Student Union, claimed at that time, “By focusing these ideas on all of us they are crushing the psyche of those others to whom Locke, Hume, and Plato are not speaking. . . . The Western culture program as it is presently structured around a core list and an outdated philosophy of the West being Greece, Europe, and Euro-America is wrong, and worse, it hurts people mentally and emotionally.” He presented no actual evidence that reading Locke, Hume, or Plato has ever hurt anyone mentally or emotionally, and that was of course decades before the snowflake generation could proclaim themselves offended by the “micro-aggression” of a raised eyebrow. 

In 2016, over 300 Stanford students signed a petition requesting a ballot on the restoration of the Western Civ course. Fewer people voted for the ballot than voted to have it in the first place. In his book The Lost History of Western Civilization, Stanley Kurtz places the events at Stanford center stage for what went so badly wrong later across America, as the skewed thinking behind the deconstructionist, multiculturalist, postmodern, and intersectional movements caused so much damage to education for so long. 

Kurtz reminds us that what the Western Civ courses really did was to root a people in their past and their values. The trajectory of Western culture was shown to have run from Greece via Rome to Christendom, infused by Judaic ideas and morality along the way via Jerusalem, but then detouring briefly through the Dark Ages, recovering in the Renaissance, which led to the Reformation, the Enlightenment, and thus the scientific, rational, and politically liberated culture of Europe and European America. “From Plato to NATO,” as the catchphrase went. 

At the center of this transference of values across time and space was democracy, of which Winston Churchill famously said, “Many forms of government have been tried, and will be tried in this world of sin and woe. No one pretends that democracy is perfect or all-wise. Indeed, it has been said that democracy is the worst form of government, except for all those other forms that have been tried from time to time.” The generations who grew up knowing that truth, rather than weltering in guilt and self-doubt about “false consciousness” and so on, were the lucky ones, because they were allowed to study the glories of Western civilization in a way that was unembarrassed, unashamed, and not saddled with accusations of guilt in a centuries-old crime that had absolutely nothing to do with them. They could learn about the best of their civilization, and how it benefited — and continues to benefit — mankind. 

As Ian Jenkins, the senior curator of the Ancient Greek collection at the British Museum, put it in his book on the Elgin Marbles — politically correctly entitled “The Parthenon Sculptures” — “Human figures in the frieze are more than mere portraits of the Athenian people of the day. Rather they represent a timeless humanity, one which transcends the present to encompass a universal vision of an ideal society.” The Parthenon itself set out the architectural laws of proportion that still obtain to this day, and later in the book Jenkins points out how the sculptures “transcend national boundaries and epitomize universal and enduring values of excellence.” It was no coincidence that interest in them permeated the Western Enlightenments of the 18th century. 

While the Parthenon was being built, Pericles contrasted the openness and moderation of Athenian civic life with the militaristic, secretive, dictatorial Spartans in his Funeral Speech of 430 b.c., and this struck a chord with the Enlightenment thinkers of 23 centuries later, just as it should continue to do with us today, reminding us why Western values are indeed superior to those that actuate the leaders of modern China, Russia, Iran, Venezuela, North Korea, and Zimbabwe. Marxism-Leninism began as a Western concept but was overthrown in the West, whereas it tragically still thrives in other parts of the world. And yes, we know that the architect Phidias employed slaves and metics (foreigners) in building the Parthenon, not just Athenian freemen.

“Carved around the middle of the fifth century bc,” writes Neil MacGregor, former director of the British Museum, the Elgin Marbles “are the product of a creative culture that is credited with the invention of such aspects of modern Western civilization as democracy, philosophy, history, medicine, poetry and drama.” Of course, no one is claiming that Oriental, Persian, and Arab civilizations did not have all of those listed — except democracy, which they did not have then and most still do not today — and no one suggests that Aboriginal Australians, South Sea Islanders, the Aztecs and Incas, ancient Egyptians, or the Khmer Empire that built Angkor Wat for the god Vishnu did not have their own worthy civilizations, too. 

Yet even the very greatest achievements and physical creations of those other civilizations simply cannot compare to what the Greco-Roman and Judeo-Christian Western civilization has produced in philosophy, history, medicine, poetry, and drama, let alone democracy. 

Anyone reading Charles Murray’s superb and unanswerable book Human Accomplishment cannot but accept that the contribution made to mankind — the whole of it, not just the West — by DWEMs has statistically utterly dwarfed that made by the whole of the rest of the world combined. Whilst the transformative powers of cathedrals and concertos are relatively debatable, Nobel prizes for science and medical breakthroughs can be numerically compared, as can the fact that there is no one in any other civilization who can objectively match the sheer volume and density of the poetic and dramatic work of Shakespeare. To deny that is to start going down the route of the discredited Afrocentrist historians who were reduced to claiming that ancient African civilizations had visited Latin America and significantly influenced the cultures they found there.

“From the constitution drafted by the founding fathers of the American republic to the war-time speeches of Winston Churchill,” Jenkins writes, “many have found inspiration for their brand of liberal humanism, and for a doctrine of the open society, in the Funeral Speech of Perikles.” If Pericles had lost an election or been ostracized in the annual vote of Athenians, he would have stood down from office in the same way that Boris Johnson, Donald Trump, and Emmanuel Macron would after a defeat in a free and fair election in their countries, whereas that is inconceivable in many totalitarian countries not infused by the ethics of the West. That is ultimately why we should not apologize for Western civilization, why it should be proselytized around the world and certainly taught as a discrete discipline in our schools and universities. 

Western Civilization courses never pretended that the West invented civilization, as the French anthropologist Claude Lévi-Strauss emphasized in his foreword to the UNESCO International Social Science Bulletin in 1951. Considering some of the most ancient sites of human habitation in the world, such as Mohenjo-daro and Harappa in the Indus Valley, he observed straight streets intersecting at right angles, industrial workshops, utilitarian housing for workers, public baths, drains and sewers, pleasant suburbs for the wealthier classes; in short, what he called “all the glamour and blemishes of a great modern city.” Five thousand years ago, therefore, the most ancient civilizations of the old world were giving their lineaments to the new. As a new history of the world by the British historian Simon Sebag Montefiore will shortly demonstrate, the inhabitants of Egypt, China, and Persia were creating sophisticated art and architecture, legal and numerical systems, and literary and musical traditions while the peoples of Europe were still covered in woad and living in mud huts. 

What might Homer have to say about being civilized? The Iliad, which describes the clash between the Greeks and the Trojans, is not a description of a conflict between two nation-states. Adam Nicolson characterizes the conflict in The Mighty Dead: Why Homer Matters as “the deathly confrontation of two ways of understanding the world.” In this 4,000-year-old scenario, the Greeks are the barbarians. They are northern warriors, newly technologically empowered with ships and bronze spears, who want what the Trojans have got. They are pirates: coarse, animalistic, in love with violence. They are savage, rootless nomads who trade women as commodities (a three-legged metal tripod to put vases on is worth twelve oxen; a woman, four) and lust after the treasure hidden within Troy’s walls.

The city of Troy is wealthy, ordered, graceful, and stable, and the Greeks covet it. In the climax of the poem, Achilles, the ultimate man of the plains, confronts Hector of Troy, the man of the city. In disarmingly exhilarating and violent poetry, the outsider slaughters the insider. The barbarians have won. Or have they? After the battle, Priam, Hector’s grieving father, visits Achilles in his tent. Troy is doomed but Achilles marvels at Priam’s humility, at his ability to respect the man who has murdered his beloved son. From the “mutuality and courage of that wisdom,” writes Nicolson, “its blending of city and plain, a vision of the future might flower.”

Our word “civilization” derives from the Latin “civilis,” from “civis” (citizen) via “civitas” (city). The city is the locus for human encounter and understanding, for exchange and connection, for the development of communal and peaceful coexistence, for the flourishing of both everyday exchange and sophisticated arts. Opponents of the teaching of Western civilization object that European countries built their wealth and cultural achievements on the colonial exploitation and enslavement of non-European peoples. Yet as Homer demonstrates, the development of civilization has always been predicated upon darker forces. 

The Crusaders of medieval Europe were no more bloody and cruel than the wars of conversion enacted by the expanding Islamic world in the seventh and eighth centuries. The Ethiopian Empire (1270–1974) was founded upon slavery, as was the Ottoman Empire (1299–1924). If the history of the West needs to be taught critically, then so too does that of the East or the so-called global South. No civilization has been morally pure. 

“Competition and monopoly,” writes Niall Ferguson sagely in his book Civilization: The West and the Rest, “science and superstition; freedom and slavery; curing and killing; hard work and laziness — in each case, the West was the father to both the good and the bad.” Those early Western Civ courses never tried to argue that it was flawless — Karl Marx sometimes used to be taught in them, after all — but in the 20th century, students had more common sense and took that for granted, and were not looking for ever-new ways to be offended.

Christianity, for all its schisms and intolerance, its occasionally obnoxious obscurantism and iconoclasm, has been overall an enormous force for good in the world. The Sermon on the Mount was, as Churchill put it, “the last word in ethics.” 

Christians abolished slavery in the 1830s (or three decades later in America’s case), whereas outside Christendom the practice survived for much longer, and identifiable versions of it still exist in some non-Christian and anti-Christian countries today. 

The abolition of slavery did not merely happen by votes in Parliament and proclamations from presidents; it was fought for by (and against) Christians with much blood spilt on both sides. That would not have happened without the Judeo-Christian values and the Western Enlightenment that are so central to Western civilization. The Royal Navy ran its West Africa Preventive Squadron for over 60 years with the sole task of fighting slavery, during which time it freed around 160,000 slaves, and an estimated 17,000 British seamen died of disease or in battle achieving that. 

When considering “the rest” — those civilizations that did not produce what Western civilization has — Ferguson is unblushingly honest. “We must resist the temptation to romanticize history’s losers,” he writes. “The other civilizations overrun by the West’s, or more peacefully transformed by it through borrowings as much as by impositions, were not without their defects either, of which the most obvious is that they were incapable of providing their inhabitants with any sustained improvement in the material quality of their lives.” For all my earlier concentration on art and architecture, poetry and music, Ferguson is also correct to point out that “civilization is much more than just the contents of a few first-rate art galleries. It is a highly complex human organization,” which is why his book is “as much about sewage pipes as flying buttresses.” 

In response to the issuing of the United Nations’ Universal Declaration of Human Rights in 1948, the American Anthropological Association released a critique that asked, “How can the proposed Declaration be applicable to all human beings and not be a statement of rights conceived only in terms of the values prevalent in the countries of Western Europe and America?” The question assumes that the 30 articles of the Declaration could not be universal, since universality of human rights was of necessity a “Western” assumption. This was intended as a criticism, not an endorsement.

Yet the West has not stolen these values, as the Greeks stole the Trojans’ gold; it has not appropriated or co-opted them. Rather they are seen as objectionable because they do, indeed, according to their detractors, inhere in Western culture. So, given that a belief in human rights is, apparently, predicated on Western culture, is not that culture worth examining and teaching? 

Instead, there is an entire industry devoted to trying to topple DWEM heroes from their pedestals — literally, in the case of the British activist Afua Hirsch’s attempt to have Admiral Nelson removed from his column in Trafalgar Square in London on the grounds that he did not campaign to abolish the slave trade (which was not abolished by Britain until two years after his death in 1805). 

The climate-change movement is similarly riddled with anti-Western assumptions, whereby capitalism, development, and growth are demonized, all of them supposedly primarily Western concepts. A glance at the actual carbon emissions from the new coal-fired power stations still being built every month in China should put Western climate self-haters right about the importance of development and growth, but campaigning against democratic, guilt-ridden Western governments is far easier than taking the fight to Beijing and Delhi, which now is where the real difference can be made. When Greta Thunberg denounces Xi Jinping and the Chinese Communist Party outside the Great Hall of the People, she will be worthy of our respect; until then, she is merely playing on Western guilt, like every other demagogic critic of the West so beloved of the Left. 

The self-hatred virus is a particularly virulent and infectious one, and has almost entirely overtaken the academy in its attitude towards Western civilization. We all know the concept of the self-hating Jew who instinctively and immediately blames Israel for everything bad that happens in the Middle East (and often in the wider world, too). If the term is unfamiliar, look at some of the lobbying organizations on Washington’s K Street, or the equally virulent “Jews for Corbyn” movement inside the ultra-left Momentum organization in Britain. 

Western self-hatred, which is quite different from healthy self-criticism, has gone far too far in our society. American self-haters such as Noam Chomsky and Michael Moore have made hugely successful careers out of a knee-jerk reaction that whatever ill befalls the West is solely its own fault. They argue, of course, that they in fact like their country — rarely “love,” as that would differentiate it from other countries — and it’s only one particular administration or policy with which they take issue rather than the whole culture. Yet this is false. If after a lifetime one has never — as in Jeremy Corbyn’s case — once supported a single Western military operation under any circumstance, and always had a good word for every opponent of the West, whether it be a state actor or a leftist terrorist group, then the truth becomes obvious.

British self-hatred goes back a long way, via Thomas Paine and Kim Philby, but today it is not enough for the Chomskys and Corbyns merely to hate their own country; they must hate the West in general, which for them tends to mean NATO, the special relationship, the Anglo-American form of (relatively) free markets and free enterprise, and of course the concept of Western civilization itself, which they consider an artificial construct. Recently Seumas Milne, Jeremy Corbyn’s spin doctor, tried to argue that capitalism has killed more people than Communism, although of course he did not accept the figure of 100 million that most responsible historians recognize was Communism’s death toll in the 20th century. 

Mention of Corbyn and Milne prompts the thought that all too often consideration of the contribution of Judeo-Christian thought to Western civilization tends to underplay the first — Judeo — part of the conjoined twins. It is impossible not to spot an enormous overlap — the shaded area in the Venn diagram — between hatred of the concept of Western civilization on one side and at least a certain haziness over anti-Semitism on the other. In America, there are unfortunately still those who believe that Western civilization is at risk from Jewish culture. This view is as ignorant as it is obnoxious. For without the “Judeo” half of the phenomenon, Western civilization would simply not exist. 

Once again, Charles Murray is invaluable here in enumerating in numbers and places and names and statistics the contribution made in every field by Jews over the millennia, around 100 times what it ought to be in relation to their demographic numbers on the planet. Writing of Max Warburg’s daughter Gisela in his book The Warburgs, Ron Chernow recalls how, “once asked at a birthday party whether she was Jewish, Gisela refused to answer. When Alice [her mother] asked why, Gisi stammered confusedly, ‘You always told us not to boast.’” That might be true of her, but philo-Semitic Gentiles such as I enjoy boasting about the contribution the Jews have made to Western civilization in every sphere. Beware the hater of Western civilization; very often there’s an anti-Semite not very far away.

French postmodern theory refuses to distinguish between high and low culture, attempting to make it futile even to discuss whether this or that work of art is or is not lovely or important. If you want to argue that Kanye West’s lyrics are as good as Shakespeare, or Mongolian yurts are as sophisticated a form of architecture as Bauhaus, then Foucault will support you all the way. But if you want to understand why we do not have child slavery in the West, or disenfranchised women, or imprisonment without trial, or the imprisonment of newspaper editors, you simply have to study the cultural history that produced such an unusual and extraordinary situation in human history. It is inescapable and not susceptible to postmodernist analysis. It’s not about the aesthetic or literary superiority of certain artworks, but about the unequivocal good of human dignity. If Ms. Rashatwar finds the idea of losing her human rights so “romantic,” she is always welcome to move to Saudi Arabia, which is still awaiting its Enlightenment.

The late, very great Gertrude Himmelfarb identified three separate Enlightenments — English, French, and Scottish — at different though overlapping stages of the 18th century, with different emphases in different places at different times. Chartres Cathedral was not dedicated until 1260, so there were five centuries between then and the Enlightenments, but they were the moments when people began to throw off superstition and belief in magic and witchcraft, to look at the world afresh, unafraid of what they might find and where it might take them, even at the risk of unbelief. If the Islamic world had had such a moment, it would not have been left behind in so many areas of accomplishment since it was turned back from the gates of Vienna in 1683, with the result that its fascist-fundamentalist wing might not have existed to lash out in such fury and resentment on 9/11.

The recent Security Conference in Munich took as its theme and title “Westlessness” — an ugly word in English, worse in German — intending to prompt international decision-makers into thinking about what might happen if the Trump administration were ever to get as tough over NATO underfunding as it has long threatened to do. Another fear of Westlessness, however, should be about the eclipse of Western civilization as a subject for study, as a result of a hugely successful Gramscian march through the institutions that started long before Jesse Jackson and his megaphone visited Stanford. 

For far from becoming a Kumbaya touchy-feely place, a truly Westless world would be a neo-Darwinian free-for-all in which every state merely grabbed what it could, a return to the world Hobbes wrote about in Leviathan. The Left should beware what it claims to wish for, and Western civilization should be taught once more in our schools and colleges. For as Churchill knew as the bombs were falling and London was burning in December 1940, it is worth fighting for.

— This essay is sponsored by National Review Institute.

Voir aussi:

‘Hey, Hey, Ho, Ho, Western Civ Has Got to Go’

Robert Curry American Greatness June 10, 2019

On January 15, 1987, Jesse Jackson and around 500 protesters marched down Palm Drive, Stanford University’s grand main entrance, chanting “Hey hey, ho ho, Western Civ has got to go.”

They were protesting Stanford University’s introductory humanities program known as “Western Culture.” For Jackson and the protesters, the problem was its lack of “diversity.” The faculty and administration raced to appease the protesters, and “Western Culture” was formally replaced with “Cultures, Ideas, and Values.”

The new program included works on race, class, and gender and works by ethnic minority and women authors. Western culture gave way to multi-culture. The study of Western civilization succumbed to the Left’s new dogma, multiculturalism.

When I attended college in the 1960s, taking and passing the year-long course in the history of Western civilization was required for graduation. The point of the requirement was perfectly clear. Students were expected to be proficient with the major works of their civilization if they were to be awarded a degree. It was the mark of an educated person to know these things.

Because it was a required course, it was taught by a senior professor in a large lecture hall with hundreds of students. The course was no walk in the park. When I took the course, only one student got an A grade for the first semester. Students went down in wave after wave. Many dropped out of the course, planning to try again later. Others dropped out of school or transferred to another college or university.

Student protests were all the rage on campus in those days, too. But nobody protested the Western Civ course, its contents, the difficulty involved, or the fact that it was required. Students evidently accepted the idea that studying the story of how we got here and who shaped that story was essential to becoming an educated person.

It is also not at all clear that the faculty in those days would have raced to appease student protesters chanting “Hey, hey, ho, ho, Western Civ has got to go.”

Many of the faculty, after all, had served in World War II. My best friends on the faculty had all served either in the European or the Pacific theater. They had put their lives on the line to defend Western civilization, and served with others who had lost their lives in that fight. Whether they were teaching Plato or Italian art of the Renaissance and the Baroque eras, they taught with the passion of men who had fought as soldiers and were working as teachers to preserve Western culture. Perhaps my fellow students would not have dared to present our teachers with that particular protest.

The protesting students at Stanford in 1987 were pushing against an open door. Radicalized professors, products of the student protests of the 1960s, welcomed the opportunity to do what they already wanted done. The protesters provided the excuse. Instead of doing the hard work of teaching Western civilization, they were free to preach multiculturalism—and the change was presented to the world as meeting the legitimate demands of students.

It is worth noting, I think, that the chant has an interesting ambiguity. Was it the course in Western civilization or Western civilization itself that had to go? Clearly, Jackson was leading the protesters in demanding a change in the curriculum at Stanford, but the Left, having gotten rid of “Western Civ” at Stanford and at most other colleges, is reaching for new extremes. Today, ridding the world of Western civilization as a phenomenon doesn’t seem like such a stretch.

In the wee hours of the morning recently, in a nearly deserted international airport terminal, I got into conversation with a fellow passenger while we waited for our luggage. He told me he was returning from a stay at an eco-resort. He said because of cloudy weather there had been no hot water on most days—and little hot water when there was any—and the electric light ran out every night soon after nightfall.

The worst part for him, he said, was the requirement to put used toilet paper in a special container provided for that purpose. When I remarked that what he had experienced at the resort was what the Greens have planned for all of us, he cheerfully agreed. He went on to say that he believed the real purpose of the Greens’ plan is population control, that a truly green future would only be able to support a much smaller population.

The amazing part is this: he conveyed a complete agreement with the environmentalist project and what he believed to be its underlying purpose. It seemed that what he had experienced at the resort had not caused him to re-think his attitude, or even to consider that there was a risk he might not survive the transition to a much smaller population.

As he spoke, I easily imagined him as a younger person chanting “Hey, hey, ho, ho, Western Civ has got to go.”

Voir également:

‘An Honest Conversation About Race’?

Is confrontation wise? Much progress has been accomplished under cover of hypocrisy—or civility.

Lance Morrow
The Wall Street Journal
July 2, 2020

People have said for decades that America needs to have “an honest conversation about race.” Is this what they had in mind—this drama of marches, riots, witness videos, tear-gassings, surging police lines, Trump tweets, Zoom pressers, statue-topplings, Facebook screeds, cable television rants, window-smashings, shop-burnings, police-defundings, escalating murder rates and the distant thunder of editorial boards?

Veterans in the field of less-than-revolutionary race relations learned that a certain amount of truth-suppression is actually helpful—preferable to the “honesty” of hatred, for example. Much progress has been accomplished under cover of hypocrisy—or, if you like, civility. Good manners and artful hypocrisy were Booker T. Washington’s game, but he was written off as an Uncle Tom long ago.

We live now in the regime and culture of confrontation—ideology as performance, anger as proof of authenticity. You remember how much trouble Joe Biden got into when he bragged about his ability to get along with segregationists in the 1970s. Mr. Biden was preening thoughtlessly on his skill in the arts of the old hypocrisy. Now he has learned his lesson and embraces the left’s idea of honesty—no deviation from the party line or from the officially approved emotions.

How do you judge a moment of history when you are in the thick of it? How can you tell if all of this will be remembered as historic or will be superseded and forgotten as another momentary sensation, another self-important mirage? The current moment feels intensely historic now, but we shall see.

Black Lives Matter has ambitions to abolish its own version of the Chinese Cultural Revolution’s “Four Olds”—old customs, old culture, old habits, old ideas—and to add a fifth, old statues. Yet this summer the titanic racial theme competes and fuses with other superstories—the pandemic and its economic consequences, the presidential race, America’s long-running politico-religious civil war.

Raw emotion pours out of social media and into the streets—outrage, with a touch of holiday. On the other side is an oddly silent majority. It seems eerie that so much of the country—the land of “white supremacy,” as the left likes to think of it—gives the appearance of having almost acquiesced, as if it has conceded that the eruptions might be justified and even overdue. Can it be that the silenced majority has had an epiphany, that in its heart it acknowledges the justice of black Americans calling in Thomas Jefferson’s IOU, “I tremble for my country when I reflect that God is just, and that his justice cannot sleep forever”?

There’s some of that—changed minds, old prejudice grown reflective. In any case, the silenced majority, out of moral courtesy, has been reluctant to criticize people demonstrating in the wake of George Floyd’s killing. At the same time, it recoils—more indignantly and incredulously each day—from the left’s overall program and mind-set, which it considers insidious if not crazy. When major cities propose to cut off funds for their police departments or to abolish them altogether, that Swiftian absurdity makes a deep impression, confirming a broader doubt about the left’s intentions and mental health.

The most tragic impediment to an honest conversation about race in America is fear—an entirely realistic fear of being slain by the cancel culture. This fear to speak is a civic catastrophe and an affront to the Constitution. It induces silent rage in the silenced. It is impossible to exaggerate the corrupting effect that the terror of being called a “racist”—even a whiff of the toxin, the slightest hint, the ghost of an imputation—has on freedom of discussion and the honest workings of the American public mind.

Racism in America is no longer totalitarian, as it once was, especially in the South. The cancel culture is the new totalitarianism, a compound of McCarthyism, the Inquisition, the Cultural Revolution, the Taliban and what has become a lethal and systemic ignorance of history—almost a hatred of it. All that wild, unearned certainty, all that year-zero zealotry, discredits those who associate themselves with the cause and makes a mockery of their sweet intentions. Much of the white woke rage is radiant with mere self-importance.

And it’s going to backfire. Newton’s Third Law of Motion hasn’t been repealed: For every action there is still an equal and opposite reaction. My sense is that there is quietly building a powerful backlash, which will express itself on Nov. 3, if not before. My guess is that polls now showing Mr. Biden far ahead don’t reflect reality. It may be impossible for President Trump to win; for some reason, he collaborates daily with his enemies to sabotage his chances. But the outcome is by no means as certain as the polls now suggest.

Mr. Morrow is a senior fellow at the Ethics and Public Policy Center.

Voir de plus:

Amid a pandemic, the woke-ist media are experiencing a psychotic break

Becket Adams
Washington Examiner
July 03, 2020
 
If the press suffered a nervous breakdown after the 2016 election ⁠— and they did ⁠— they are experiencing a full-on psychotic break amid the COVID-19 pandemic and the George Floyd protests.

It is as if the lockdowns and nationwide demonstrations caused media executives to snap, leaving them in a wide-eyed, obsessive frenzy to cleanse society of all problematics, screaming all the while, “Out, damned spot!”

CNN, for example, engaged in explicit political activism this week when it sought to shame companies that have yet to pull ads from Facebook over CEO Mark Zuckerberg’s persistent refusal to censor problematic speech.

“These are the big brands that haven’t pulled ads from Facebook yet,” reads the headline. The report then goes on to name and shame the businesses that have had the temerity to continue to advertise on one of the biggest social media platforms in the world.

This is not news reporting. This is activism. It is a poorly disguised effort by a major newsroom to pressure companies into boycotting a social media platform that is too committed to political neutrality and too opposed to political censorship for the media’s taste. In any other time and place, the press would have mocked and condemned the CNN article. But these are unusual times. Many journalists today agree with CNN’s shaming tactics and the reasons behind them, and so the Facebook report came and went this week with barely a whimper of objection from our brave Fourth Estate.

Over at the New York Times, the occupied opinion section, which claims to have standards against “needlessly harsh” commentaries that fall “short of the thoughtful approach that advances useful debate,” published an especially unhinged article this week titled “America’s Enduring Caste System.”

“Throughout human history, three caste systems have stood out,” writes contributor Isabel Wilkerson. “The lingering, millenniums-long caste system of India. The tragically accelerated, chilling and officially vanquished caste system of Nazi Germany. And the shape-shifting, unspoken, race-based caste pyramid in the United States.”

She adds, “Each version relied on stigmatizing those deemed inferior to justify the dehumanization necessary to keep the lowest-ranked people at the bottom and to rationalize the protocols of enforcement. A caste system endures because it is often justified as divine will, originating from sacred text or the presumed laws of nature, reinforced throughout the culture and passed down through the generations.”

Yes, it seems a bit off for Wilkerson to lump the U.S. in with Nazi Germany, but that is not even the craziest part. That distinction goes to her exceptionally ignorant assertion that 2 of the 3 most notable caste systems in history come from the last 250 years. Several ancient empires would beg to differ. Then again, if your viewpoint is the right one, New York Times editors will not be sticklers for facts.

Elsewhere at the New York Times, the news section decided this week that now is a good time to remind its readers that Mount Rushmore is very problematic.

“Mount Rushmore was built on land that belonged to the Lakota tribe and sculpted by a man who had strong bonds with the Ku Klux Klan,” the paper reported. “It features the faces of 2 U.S. presidents who were slaveholders.”

All true. Also, while we are on the topic of unjustly seized land, please enjoy this excerpt from Reason magazine explaining how the New York Times Building in midtown Manhattan came to be built:

On September 24, 2001, as New York firefighters were still picking their comrades’ body parts out of the World Trade Center wreckage, New York Times Co. Vice Chairman and Senior Vice President Michael Golden announced that the Gray Lady was ready to do its part in the healing.

« We believe there could not be a greater contribution, » Golden told a clutch of city officials and journalists, « than to have the opportunity to start construction of the first major icon building in New York City after the tragic events of Sept. 11. » Bruce Ratner, president of the real estate development company working with the Times on its proposed new Eighth Avenue headquarters, called the project a « very important testament to our values, culture and democratic ideals. »

Those « values » and « democratic ideals » included using eminent domain to forcibly evict 55 businesses–including a trade school, a student housing unit, a Donna Karan outlet, and several mom-and-pop stores–against their will, under the legal cover of erasing « blight, » in order to clear ground for a 52-story skyscraper. The Times and Ratner, who never bothered making an offer to the property owners, bought the Port Authority-adjacent property at a steep discount ($85 million) from a state agency that seized the 11 buildings on it; should legal settlements with the original tenants exceed that amount, taxpayers will have to make up the difference. On top of that gift, the city and state offered the Times $26 million in tax breaks for the project, and Ratner even lobbied to receive $400 million worth of U.S. Treasury-backed Liberty Bonds–instruments created by Congress to help rebuild Lower Manhattan. Which is four miles away.

The New York Times report this week claims that the history of Mount Rushmore is of particular relevance now because President Trump plans to attend July Fourth festivities at the South Dakota monument. Curious, then, that the New York Times did not think that history worth reevaluating when former President Barack Obama visited the exact same site during the 2008 campaign or when the New York Times’s own Maureen Dowd wondered in 2016 whether Obama would qualify as a “Mount Rushmore president. »

Lastly, ABC News published a report this week titled “New government data, shared first with ABC News, shows the country’s premier outdoor spaces – the 419 national parks – remain overwhelmingly white.”

The story’s headline reads, “America’s national parks face existential crisis over race,” adding in the subhead, “A mostly white workforce, visitation threatens parks’ survival and public health.”

“Just 23% of visitors to the parks were people of color,” the report adds, “77% were white. Minorities make up 42% of the U.S. population.”

As it turns out, white people really enjoy hiking and camping, and that is a problem for the parks, the ABC News report claims, because people of color will be a majority in America by 2044. The article then goes on to quote outdoor enthusiasts of color who say they do not feel welcome at the “overwhelmingly white” national parks. These advocates, the article reads, “say they hope the moment since George Floyd’s death in police custody brings attention to systemic racism in the outdoors as well as other parts of society and translates into a long-term change in attitudes and behavior.”

Sorry, everyone. Even national parks are racist now.

This is not normal behavior from our press. This is a mental breakdown in the works. People of the future will look at all this and wonder how on earth these stories made it into print.

The best thing that can happen now for the news industry is for the pandemic to pass, the lockdowns to lift, and for everyone to go outside and get some fresh air. Because the way nearly everyone in the press is behaving now, it seems clear that cabin fever has set in hard, and it is an epidemic we may not shake as quickly as the coronavirus.

Voir encore:

FARRELL: The Left Is Clearing A Pathway To Power

Chris Farrell Daily Caller June 25, 2020

Why are we experiencing the worst civil disturbances in decades? It is because the proponents of radical change won’t have it any other way.

Early 20th Century Italian Marxist Antonio Gramsci theorized that the path to a communist future came through gradually undermining the pillars of western civilization. We are now seeing the results of decades of such erosion, in education, in faith, in politics and in the media. The old standards of freedom, individual responsibility, equality and civic order are being assaulted by proponents of socialism, radical deconstruction and mob rule.

Those who charge that institutional racism is rampant in America are the same as those who run the country’s major institutions – city governments, academe, the media, Hollywood, major sports leagues and the Washington, D.C. deep state bureaucracy. Accountability? None.  The irony is rich.

At the same time, the only legal and institutional structures that mandate racially based outcomes do so in favor of other-than-majority groups. Anyone who questions this arrangement winds up cancelled.

The public debate is hardwired for disunity, making the former language of inclusion the new dog whistle of racism. The exclusionary slogan “black lives matter” is sanctified while the more unifying “all lives matter” is called divisive. People who say they want a colorblind society are called bigots even as progressives push for segregated events and housing on college campuses and “CHOP” protesters demand Black-only hospitals. Martin Luther King’s dream that people will “live in a nation where they will not be judged by the color of their skin, but by the content of their character” is judged by today’s progressives as a call for white supremacy.

The media goes out of its way to coddle violent protesters, calling them peaceful even as they verbally abuse and then throw bottles at police, saying they are not “generally speaking, unruly” standing in front of a burning building. Political leaders who benefit from disunity keep fanning the flames. For example House Speaker Nancy Pelosi’s reckless charge that the Senate police reform bill is “trying to get away with the murder of George Floyd” is irresponsibly divisive, especially since it was drafted by African American Senator Tim Scott (R-SC).

Public monuments have borne the brunt of the violence in recent weeks. As President Trump predicted, the vandalism has moved well beyond statues of Confederates. Practically any statue is fair game. Washington, Jefferson, even Ulysses S. Grant, the man who defeated Lee’s army, all have been toppled by the mobs. And liberal city governments are taking down statues at least as fast as the rioters. But it would be a mistake to think that the statues themselves are at issue, or even what they symbolize. Rather it is the need for the radicals not just to cleanse American history but to make people feel ashamed of every aspect of it. In this way they clear a path for a radical future, buttressed by an unwavering sense of moral superiority that entitles them to smack down any dissent, usually gagging people in the name of “free speech.”

We were told for years that anything the Trump administration did that was remotely controversial was an attempt to divide the country. Democrats frequently blamed insidious foreign influence, using expressions like “right out of Putin’s playbook” to keep the Russian collusion canard alive. But they are the ones who are weakening and dividing the country, to the evident glee of our Russian and Chinese adversaries. They have completely adopted longstanding Russian and Chinese propaganda lines about the United States being a country of endemic racism, poverty and oppression, when in fact America is an opportunity society and one of the most racially diverse and tolerant countries in the world. The protesters, their political allies and media backers are working hard to create the very sort of divisions they claim to oppose, because a weak, divided and ashamed America is their pathway to power.

Chris Farrell is director of investigations and research for Judicial Watch, a nonprofit government watchdog organization. He is a former military intelligence officer.

Voir encore:

Columbus Is Racist, Says Columbus

The explorer is ejected from a city that—for now—bears his name

Wall Street Journal

July 2, 2020

The city of Columbus, Ohio, this week unceremoniously evicted a 16-foot bronze statue . . . of Christopher Columbus. “For many people in our community, the statue represents patriarchy, oppression and divisiveness,” said Mayor Andrew Ginther, giving the removal order two weeks ago. “That does not represent our great city.”

Which great city, precisely? He forgot to mention. Or perhaps the mayor is going to start referring to his town euphemistically as “Ohio’s capital” and so forth, the way some people refuse to say the name of the Washington Redskins football team. This could make campaigning for his re-election rather awkward: Vote Ginther for mayor of [Unmentionable Racist].

Don’t laugh, because a petition at change.org has 118,000 signatures—an eighth of Columbus’s population—to rechristen the city Flavortown. That would reflect the region’s status as “one of the nation’s largest test markets for the food industry,” while honoring the enduring legacy of a Columbus native, the celebrity chef Guy Fieri. Alas, the petition’s creator has since apologized. Renaming the city, he says, “should be a fight led by those most affected,” and “as a white male, I don’t have a say in this.”

A columnist for the Columbus Dispatch noodled—jokingly?—that because “it’s always dangerous to name something after humans,” how about: Pleistocene, Ohio. Is the unpronounceable symbol once used by the musician Prince available again, or would that be cultural appropriation of Minnesota? A letter to the Dispatch had a bold idea: “Cowed, Ohio.”

The statue of Columbus sat in front of Columbus City Hall for 65 years. It was a gift from the people of Genoa, Italy. Now the mayor’s office says it’s “in safekeeping at a secure city facility.” What a blow to U.S.-Italy relations. At least he could offer to give the statue back. A second Columbus likeness, a marble of the navigator pointing west, was booted last month by Columbus State Community College, where it used to stand in the downtown Discovery District.

The mayor’s office says the unelected Columbus Art Commission will launch a “participatory process” to find new art that “offers a shared vision for the future.” Good luck. “Let’s just leave the space empty,” one Dispatch letter suggested, “because if not everyone is happy should anyone be happy?” What a sad sign of the times.

Voir par ailleurs:

STATEMENT ON HUMAN RIGHTS

SUBMITTED TO THE COMMISSION ON HUMAN RIGHTS, UNITED NATIONS BY THE EXECUTIVE BOARD, AMERICAN ANTHROPOLOGICAL ASSOCIATION

American Anthropologist

NEW SERIES Vol. 49 OCTOBER-DECEMBER, 1947 No. 4

The problem faced by the Commission on Human Rights of the United Nations in preparing its Declaration on the Rights of Man must be approached from two points of view. The first, in terms of which the Declaration is ordinarily conceived, concerns the respect for the personality of the individual as such, and his right to its fullest development as a member of his society. In a world order, however, respect for the cultures of differing human groups is equally important.

These are two facets of the same problem, since it is a truism that groups are composed of individuals, and human beings do not function outside the societies of which they form a part. The problem is thus to formulate a statement of human rights that will do more than just phrase respect for the indi- vidual as an individual. It must also take into full account the individual as a member of the social group of which he is a part, whose sanctioned modes of life shape his behavior, and with whose fate his own is thus inextricably bound.

Because of the great numbers of societies that are in intimate contact in the modern world, and because of the diversity of their ways of life, the primary task confronting those who would draw up a Declaration on the Rights of Man is thus, in essence, to resolve the following problem: How can the pro- posed Declaration be applicable to all human beings, and not be a statement of rights conceived only in terms of the values prevalent in the countries of Western Europe and America?

Before we can cope with this problem, it will be necessary for us to outline some of the findings of the sciences that deal with the study of human culture, that must be taken into account if the Declaration is to be in accord with the present state of knowledge about man and his modes of life.

If we begin, as we must, with the individual, we find that from the moment of his birth not only his behavior, but his very thought, his hopes, aspirations, the moral values which direct his action and justify and give meaning to his life in his own eyes and those of his fellows, are shaped by the body of custom of the group of which he becomes a member. The process by means of which this is accomplished is so subtle, and its effects are so far-reaching, that only after considerable training are we conscious of it. Yet if the essence of the Declaration is to be, as it must, a statement in which the right of the individual to develop his personality to the fullest is to be stressed, then this must be based on a recognition of the fact that the personality of the individual can develop only in terms of the culture of his society.

Over the past fifty years, the many ways in which man resolves the prob- lems of subsistence, of social living, of political regulation of group life, of reaching accord with the Universe and satisfying his aesthetic drives has been widely documented by the researches of anthropologists among peoples living in all parts of the world. All peoples do achieve these ends. No two of them, however, do so in exactly the. same way, and some of them employ means that differ, often strikingly, from one another.

Yet here a dilemma arises. Because of the social setting of the learning process, the individual cannot but be convinced that his own way of life is the most desirable one. Conversely, and despite changes originating from within and without his culture that he recognizes as worthy of adoption, it becomes equally patent to him that, in the main, other ways than his own, to the degree they differ from it, are less desirable than those to which he is accustomed. Hence valuations arise, that in themselves receive the sanction of accepted belief.

The degree to which such evaluations eventuate in action depends on the basic sanctions in the thought of a people. In the main, people are willing to live and let live, exhibiting a tolerance for behavior of another group different than their own, especially where there is no conflict in the subsistence field. In the history of Western Europe and America, however, economic expansion, control of armaments, and an evangelical religious tradition have translated the recognition of cultural differences into a summons to action. This has been emphasized by philosophical systems that have stressed absolutes in the realm of values and ends. Definitions of freedom, concepts of the nature of human rights, and the like, have thus been narrowly drawn. Alternatives have been decried, and suppressed where controls have been established over non- European peoples. The hard core of similarities between cultures has con- sistently been overlooked.

The consequences of this point of view have been disastrous for mankind. Doctrines of the « white man’s burden » have been employed to implement economic exploitation and to deny the right to control their own affairs to millions of peoples over the world, where the expansion of Europe and America has not meant the literal extermination of whole populations. Rationalized in terms of. ascribing cultural inferiority to these peoples, or in conceptions of their backwardness in development of their ‘ »primitive mentality, » that justified their being held in the tutelage of their superiors, the history of the ex- pansion of the western world has been marked by demoralization of human personality and the disintegration of human rights among the peoples over whom hegemony has been established.

The values of the ways of life of these peoples have been consistently misunderstood and decried. Religious beliefs that for untold ages have carried conviction, and permitted adjustment to the Universe have been attacked as superstitious, immoral, untrue. And, since power carries its own conviction, this has furthered the process of demoralization begun by economic exploita- tion and the loss of political autonomy. The white man’s burden, the civilizing mission, have been heavy indeed. But their weight has not been borne by those who, frequently in all honesty, have journeyed to the far places of the world to uplift those regarded by them as inferior.

We thus come to the first proposition that the study of human psychology and culture dictates as essential in drawing up a Bill of Human Rights in terms of existing knowledge:

1. The individual realizes his personality through his culture, hence respect for individual differences entails a respect for cultural differences. There can be no individual freedom, that is, when the group with which the individual indentifies himself is not free. There can be no full development of the individual personality as long as the individual is told, by men who have the power to enforce their commands, that the way of life of his group is in- ferior to that of those who wield the power.

This is more than an academic question, as becomes evident if one looks about him at the world as it exists today. Peoples who on first contact with European and American might were awed and partially convinced of the superior ways of their rulers have, through two wars and a depression, come to re-examine the new and the old. Professions of love of democracy, of devotion to freedom have come with something less than conviction to those who are themselves denied the right to lead their lives as seems proper to them. The religious dogmas of those who profess equality and practice discrimination, who stress the virtue of humility and are themselves arrogant in insistence on their beliefs have little meaning for peoples whose devotion to other faiths makes theseinconsistencies as clear as the desert landscape at high noon. Small wonder that these peoples, denied the right to live in terms of their own cultures, are discovering new values in old beliefs they had been led to question.

No consideration of human rights can be adequate without taking into account the related problem of human capacity. Man, biologically, is one. Homo sapiens is a single species, no matter how individuals may differ in their aptitudes, their abilities, their interests. It is established that any normal individual can learn any part of any culture other than his own, provided only he is afforded the opportunity to do so. That cultures differ in degree of complexity, of richness of content, is due to historic forces, not biological ones. All existing ways of life meet the test of survival. Of those cultures that have disappeared, it must be remembered that their number includes some that were great, powerful, and complex as well as others that were modest, content with the status quo, and simple. Thus we reach a second principle:

2. Respect for differences between cultures is validated by the scientific fact that no iechnique of qualitatively evaluating cultures has been discovered.

This principle leads us to a further one, namely that the aims that guide the life of every people are self-evident in their significance to that people. It is the principle that emphasizes the universals in human conduct rather than the absolutes that the culture of Western Europe and America stresses. It recognizes that the eternal verities only seem so because we have been taught to regard them as such; that every people, whether it expresses them or not, lives in devotion to verities whose eternal nature is as real to them as are those of Euroamerican culture to Euroamericans. Briefly stated, this third principle that must be introduced into our consideration is the following,:

3. Standards and values are relative to the culture from which they de- rive so that any attempt to formulate postulates that grow out of the beliefs or moral codes of one culture must to that extent detract from the applicability of any Declaration of Human Rights to mankind as a whole.

Ideas of right and wrong, good and evil, are found in all societies, though they differ in their expression among different peoples. What is held to be a human right in one society may be regarded as anti-social by another people, or by the same people in a different period of their history. The saint of one epoch would at a later time be confined as a man not fitted to cope with reality. Even the nature of the physical world, the colors we see, the sounds we hear, are conditioned by the language we speak, which is part of the culture into which we are born.

The problem of drawing up a Declaration of Human Rights was relatively simple in the Eighteenth Century, because it was not a matter of human rights, but of the rights of men within the framework of the sanctions laid by a single society. Even then, so noble a document as the American Declaration of Independence, or the American Bill of Rights, could be written by men who themselves were slave-owners, in a country where chattel slavery was a part of the recognized social order. The revolutionary character of the slogan « Liberty, Equality, Fraternity » was never more apparent than in the struggles to imple- ment it by extending it to the French slave-owning colonies.

Today the problem is complicated by the fact that the Declaration must be of world-wide applicability. It must embrace and recognize the validity of many different ways of life. It will not be convincing to the Indonesian, the African, the Indian, the Chinese, if it lies on the same plane as like docu- ments of an earlier period. The rights of Man in the Twentieth Century can- not be circumscribed by the standards of any single culture, or be dictated by the aspirations of any single people. Such a document will lead to frustration, not realization of the personalities of vast numbers of human beings.

Such persons, living in terms of values not envisaged by a limited Declaration, will ‘thus be excluded from the freedom of full participation in the only right and proper way of life that can be known to them, the institutions, sanctions and goals that make up the culture of their particular society.

Even where political systems exist that deny citizens the right of participation in their government, or seek to conquer weaker peoples, underlying cultural values may be called on to bring the peoples of such states to a realization of the consequences of the acts of their governments, and thus enforce a brake upon discrimination and conquest. For the political system of a people is only a small part of their total culture.

World-wide standards of freedom and justice, based on the principle that man is free only when he lives as his society defines freedom, that his rights are those he recognizes as a member of his society, must be basic. Conversely, an effective world-order cannot be devised except insofar as it permits the free play of personality of the members of its constituent social units, and draws strength from the enrichment to be derived from the interplay of varying personalities.

The world-wide acclaim accorded the Atlantic Charter, before its restricted applicability was announced, is evidence of the fact that freedom is under- stood and sought after by peoples having the most diverse cultures. Only when a statement of the right of men to live in terms of their own traditions is incorporated into the proposed Declaration, then, can the next step of defining the rights and duties of human groups as regards each other be set upon the firm foundation of the present-day scientific knowledge of Man.

JUNE 24, 1947

Voir aussi:

LA LEÇON DE LA FRENCH THEORY

FRENCH THEORY FOUCAULT, DERRIDA, DELEUZE ET CIE ET LES MUTATIONS DE LA VIE INTELLECTUELLE AUX ETATS-UNIS de François Cusset La Découverte, 367 p.

Sylvano Santini

Spirale

3 mars 2010

CERTAINS penseurs français irrationnels, transgressifs, libidinaux, obscurs, géniaux, etc. ont fait fortune aux États-Unis avec leur spirale théorique. Qu’on les ait repris ou rejetés, aimés ou détestés, tant à l’université que dans les milieux artistiques underground, le fait est indéniable : une frange de la pensée française a contaminé et assaini l’Amérique. Ce paradoxe évidemment volontaire rejoue assez bien l’extrémisme étatsunien quant aux affaires intellectuelles : Baudrillard, Deleuze, Foucault, Derrida et con-sorts sont des démons fascistes pour les uns, des prophètes pour les autres. Y a-t-il un juste mi-lieu? Interrogation hasardeuse, car justement, aux États-Unis, c’est de lui qu’il n’est jamais question.

Les Américains ont créé quelque chose ces dernières décennies, n’en déplaise à ceux qui les perçoivent comme les conservateurs du musée européen. Mais ne s’agit-il pas ici encore de l’Europe? Il serait donc plus prudent de dire qu’ils ont recréé quelque chose sous le nom original de French Theory en accueillant, hors de la France, la théorie française. Incontestable phénomène qui persiste depuis ses débuts bigarrés dans les années soixante-dix jusqu’à son épuration universitaire qui se poursuit encore aujourd’hui. L’heure des bilans est arrivée au tournant du millénaire : que s’est-il donc passé ces trente dernières années pour qu’on demande à Baudrillard de participer au scénario de la saga Matrix ou pour qu’un DJ techno cite Deleuze ? Les Américains ont fait leur propre bilan en 2001 (French Theoryin America, Routledge), les Fran-çais, en 2003 (French Theory. Foucault, Derrida, Deleuze et Cie et les mutations de la vie intellectuelle aux États- Unis, La Découverte) et plus curieusement, un certain réseau canadien s’est interposé comme arbitre en 2002 (« The American Production of French Theory », Substance, n » 97). Si les premiers s’évertuent à présenter les thèses caractéristiques qu’a laissées la théorie française dans la pensée américaine, et les derniers, un écho lointain de ce qui s’est véritable-ment passé, le bilan mis au point par François Cusset est de loin le plus satisfaisant et ce, autant pour ceux qui raillent le phénomène que pour ceux qui le respectent.

La fête et la caricature de la théorie française

Cusset connaît bien les États-Unis et encore mieux le monde de l’édition dans lequel il a œuvré et où a été inventé en partie le phénomène. Que des intellectuels américains adaptent les thèses de penseurs français, ce n’est pas un précédent, on l’avait fait déjà avec le surréalisme et l’existentialisme. Ce qui est toutefois nouveau ici, c’est qu’il ne s’agit pas d’une simple adaptation mais d’une véritable appropriation qui dé-bouche sur l’invention de perspectives théoriques non négligeables : la French Theory. Si cette appropriation positive s’est déroulée sur les campus universitaires, ce n’est pas exactement par là que la théorie française s’est fait connaître aux États-Unis. Dans les seventies, années profondément marquées par un désir libératoire qui prenait la forme d’expériences individuelles de désubjectivation (la Sainte Trinité : drogue, sexe, rock), certains universitaires, dont Sylvère Lotringer, ont introduit la théorie française dans la contre-culture américaine. Moment festif et joyeux, fait de rencontres inusitées entre intellectuels et artistes (Deleuze et Guattari ont ren-contré Bob Dylan backstage’.), cet « entre-deux » est typique, selon Cusset, de la première vague de French Theorists. La popularité non universitaire de la théorie française continue à persister au-delà des seventies dans les milieux artistiques, alternatifs, informatiques, etc. où l’on cite allègrement des passages de Mille Plateaux ou de l’indécidable déconstruction de Derrida. Cusset reconnaît tout de même l’intérêt de ces récupérations qui tournent souvent à la caricature, car si certains artistes y ont trouvé une manière légitime de parler de leur art, la théorie, elle, y est devenue vivante. Encore que la pensée des philosophes français y ait été entièrement pervertie (les contre-sens avec Baudrillard sont éloquents), l’union entre la théorie et l’œuvre a représenté peut-être la meilleure réponse qu’on leur a donnée. Mais tout le monde avait déjà compris que c’était par l’université que la théorie française devait passer pour rester.

L’incidence politique de la théorie

Autre lieu, autre réception. Les départements de français et plus largement ceux de littérature ont ouvert les portes des campus universitaires à la théorie française, tout en se hissant au sommet des humanités en maniant des concepts nouveaux mais flous, flexibles et surtout tellement poreux que les autres disciplines y trouvaient leur compte : en quelques années, les littéraires étaient devenus les dépositaires de l’« éthos universitaire ». Des mégastars naissaient sur son crédit ; tout un domaine de recherches y trouvait 42 son impulsion (les cult’studs’) ; les étudiants l’utilisaient pour affirmer haut et fort leur pas-sage à l’âge adulte. On récupérait, sans retour, ce que des stratégies éditoriales avaient fabriqué de toutes pièces en publiant côte à côte les vedettes de l’heure : portrait d’une famille française née à l’étranger que Ton a appelée, selon les milieux et les humeurs, poststructuraliste, postmoderne, et plus récemment postmarxiste. Si les études universitaires n’étaient pas en reste de récupéra-tions mimétiques et caricaturales qui se limitaient trop souvent à une clique de campus qui défendait complaisamment son auteur fétiche — concurrence typiquement américaine entre universités —, il y a des domaines où la lecture des auteurs français a été fine et de grand intérêt. La palme revient ici aux études postcoloniales et aux politiques identitaires qui, selon Cusset, ont réussi à sortir la théorie française du marasme textualiste en reconnaissant ses inci-dences politiques. Il n’invoque pas d’ailleurs les moindres penseurs en parlant de Spivak, Saïd, Butler, etc. Tous et toutes, d’une manière ou d’une autre, ont reconnu l’apport considérable de la théorie française quant aux vives réflexions sur la question du statut des minorités qui avaient atteint un sommet avec le débat concernant le « politically correct » dans les années quatre-vingt. Pour la première fois peut-être, les débats universitaires s’étendaient dans les grands médias américains : les noms de Derrida, de Foucault, de Baudrillard, etc., étaient dorénavant connus du grand public.

Mais ce qui est à retenir de ces débats parfois houleux, c’est que les penseurs des minorités ont déplacé le paradigme marxiste et la théorie cri-tique inspirée de l’école de Francfort (deux piliers dans les études politiques universitaires américaines qui critiquaient l’apolitisme de la French Theory) en reconnaissant la validité de la théorie française dans les luttes hors campus, c’est-à-dire celles qui ont lieu dans la rue. Mais cette validité, souligne Cusset, a également sa limite, car, quoiqu’elle ait servi à rendre compte des différences, elle a surtout démontré qu’il était difficile d’éviter l’illusion marxienne d’une prise directe de la théorie sur la pratique. Pour justifier ainsi l’incapacité des penseurs de la minorité à unir la théorie française avec les luttes sociales concrètes, il souligne leur aveuglement et le silence qui en découle face aux phénomènes de récupération capitaliste des minorités qui a eu lieu aux yeux de tous sous la bannière marketing Benetton. Si la moitié du chemin semble parcouru en alliant la théorie française avec la n’a pas encore été entièrement déployé : il semble que les Américains aient mal politisé la théorie française, ne retenant qu’une partie de la complexité des rapports interhumains et les microfascismes qui peuvent en découler dans l’ordre du monde orienté non plus par la domination mais par le contrôle.

La limite d’un travail de déblayage

Cusset a fait un travail assez remarquable en repérant et en présentant tous les lieux qui ont servi à introduire et à répandre la théorie française aux États-Unis : des fanzines aux publications prestigieuses, en passant par le scratching, l’art new-yorkais et les débats universitaires, le terrain est pour ainsi dire déblayé. De plus, en remontant chronologiquement l’histoire de cette réception, il montre les mutations du champ intellectuel américain qui se jouent d’abord dans les départements de littérature et ensuite dans les études plus spécifiques sur les minorités. Sa pré-sentation est claire et agréable à lire. Cusset ne cherche pas à renouveler le genre de l’histoire d’un courant de pensées en s’alignant sur la ma-nière de faire de François Dosse avec le structu-ralisme ou de Didier Eribon avec Foucault. Tout comme eux du reste, il ne manque pas de saler sa mise en récit d’anecdotes et de dérapages ridicules qui font sourire et qui donneront surtout satisfaction aux professeurs qui cherchent à in-valider la joyeuse pensée post-nietzschéenne française qui plaît tant à quelques étudiants. Mais le travail de Cusset dévoile ses limites, qui sont aussi celles du genre, lorsqu’il présente les penseurs américains qui se sont le mieux approprié, selon lui, la théorie française. On remarque assez vite qu’il n’a pas lu tous leurs ouvrages, paraphrasant et citant les petits readers qu’il critique par ailleurs : « De même qu’à l’instar de sa consœur Gayatri Spivak, il [E. Saïd[ se méfie des « méthodes » générales et des « systèmes » explicatifs, qui en devenant « souverains » font perdre à leurs praticiens « tout contact avec la résistance et l’hétérogénéité propres à la société ci-vile », laquelle peut mettre à meilleur profit une cri-tique ponctuelle, qui doit « être toujours en situation ». » Mots ou concepts clés insérés dans une phrase qui a la vertu de synthétiser toute la pensée d’un auteur (ici de deux auteurs), telle est la marque des readers fort populaires auprès des undergraduates. Mais peut-on reprocher ce raccourci à Cusset? La tâche qu’il s’est donnée était énorme en voulant tout couvrir, tout présenter. En avouant la limite de son travail et en ouvrant le chantier à la fin du livre, il semble régler ses comptes avec le lecteur qui, l’ayant suivi jusque-là, était peut-être déçu de ne pas avoir eu droit à un véritable dialogue entre les textes français et américains : « De ces mécomptes providentiels, de ces trahisons créatrices, sinon performatives, l’histoire mouvementée, retracée parfois ici et là, reste encore à écrire. » Mais la raison en est aussi ailleurs, puisque, avec son travail, il veut remuer la France.

À l’heure de la « théorie-monde »

Cusset ne cache pas l’intention de son travail en l’énonçant dès l’introduction et en la rappelant ici et là dans l’ouvrage. Et « Pendant ce temps-là en France », titre du dernier chapitre, en donne un assez bon indice : les nouveaux philosophes français autoproclamés en 1977 (BHL, Glucksmann et Clavel) et extrêmement critiques à l’égard de la Pensée 68 ont bloqué le champ intellectuel français en recentrant le débat sur les enjeux humanitaires et les droits de l’homme et en ayant recours au gros concept de l’État. Si l’on en croit Cusset, il s’agit pratiquement d’une régression qui semble avoir fait prendre du retard à la pensée française en ce qu’elle a rejeté les plus prolifiques penseurs des dernières décennies. « Pendant ce temps-là en France », en effet, car ailleurs, de New York à Sidney ou de Rome à Buenos Aires, une nouvelle « classe d’intellectuels transnationale » centrée sur la théorie française (et convergente sur certains points avec la théorie critique) se forge une « théorie-monde », selon l’expression de François Cusset. Si la démonstration d’une telle théorie reste encore à faire, l’évidence de sa nécessité, elle, semble acquise. Car la complexité du monde actuel demande 43 autre chose que la bonne conscience rationnelle des nouveaux philosophes qui, au demeurant, accumulent aux yeux de tous les succès de librairie en utilisant la stratégie marketing qui sied tant au capital. La « théorie-monde », celle peut-être de Bruno Latour avec ses Sciences studies qui a le mérite, selon Cusset, de s’opposer à la ferveur rationaliste des Français et à la textualisa-tion outrancière des Américains, mais qu’il ré-duit à peu près au programme de Foucault : analyser les effets de pouvoir dans les formations discursives et ceux du discours dans les pratiques.

Si Cusset ne cache pas sa hargne, c’est qu’il veut que la France retrouve l’enfant qu’elle a mis au monde mais qui a grandi ailleurs. C’est peut-être pour cette raison qu’il exagère l’importance des nouveaux philosophes et qu’il passe à peu près sous silence les héritiers discrets de la théorie française en France. On pense par exemple à Jacques Rancière qui marche à différents moments de son œuvre dans les pistes ouvertes par elle. Mais aussi à ceux qui travaillent au Centre Michel Foucault à Paris et qui ont organisé deux colloques sur sa pensée ces dernières années en France et qui font suite aux Dits et Écrits; à ceux plus souterrainement qui ont ouvert le Chantier-Deleuze à Nanterre, qui organisent des colloques (Paris et Lyon à l’automne 2003), qui en discutent dans Les Cahiers de Nœsis (Nice) et qui poursuivent parallèlement la pensée du philosophe dont on vient de publier tous les écrits quelques années après le succès de L’abécédaire. Tout cela est marginal évidemment, trop creux ou trop discret ! Certes, mais le réveil n’aura pas lieu tel que le désire Cusset. Les débats qu’il a peut-être voulu susciter n’ont pas eu lieu, et à lire les quelques comptes rendus parus dans les quotidiens et les revues en France, rien ne les laisse présager. Ça ne sert strictement à rien de vouloir donner des leçons à quiconque en espérant haut et fort une résurrection de la théorie française en France. Les « trahisons créatrices restent à écrire », dit-il. On attend impatiemment son prochain ouvrage, sa trahison.

Voir enfin:

Journée « Autour du livre de François Cusset French Theory » et des Cultural Studies

Transatlantica

[19 novembre 2004]
Compte rendu coordonné par Marie-Jeanne Rossignol (Paris VII) et Pierre Guerlain (Paris X)


Introduction

La parution du livre de François Cusset, French Theory. Foucault, Derrida, Deleuze & Cie et les mutations de la vie intellectuelle aux Etats-Unis en 2003, à La Découverte, a soudain donné une plus grande visibilité en France aux Cultural Studies et autres mouvements intellectuels inspirés de théoriciens européens (et non seulement français) qui ont fleuri aux Etats-Unis pendant les vingt années passées. Ce livre tout à fait passionnant, érudit et ancré dans une expérience personnelle (l’auteur, sociologue, travaillait aux Services culturels français à New York pendant la période) a engagé quelques américanistes curieux de ces mouvements intellectuels à se réunir pour discuter des thèses de Cusset et à élargir le débat aux Cultural Studies et à leur inscription universitaire ainsi qu’à leur impact politique. Organisé à l’initiative de Marie-Jeanne Rossignol et Pierre Guerlain, ce forum Paris7/Paris X s’est tenu le 19 novembre à l’Université Paris X-Nanterre. Il a réuni les participants suivants : Françoise-Michèle Bergot, Cornelius Crowley, Paris X-Nanterre, Craig Carson, Nanterre, Marc Deneire, Nancy 2, Pierre Guerlain, Paris X – Nanterre, André Kaenel, Nancy 2, Alison Halsz, Paris X-Nanterre, Thierry Labica, Paris X-Nanterre, Hélène Le Dantec-Lowry, Paris III-Sorbonne Nouvelle, Catherine Lejeune, Paris 7-Denis Diderot, Guillaume Marche, Paris XII-Val de Marne, Brigitte Marrec, Paris X-Nanterre, Jean-Paul Rocchi, Paris 7-Denis Diderot, Marie-Jeanne Rossignol, Paris 7-Denis Diderot. Les intervenants ont souvent tenu à mêler rappel de leur expérience personnelle, analyse de l’ouvrage et réflexion sur les Cultural Studies lors de ce forum de réflexion, dont vous est ici livré ici un compte rendu légèrement révisé, où alternent brèves interventions et développements plus étoffés.

La parole a été passée tout d’abord à Marie-Jeanne Rossignol :

Pour résumer rapidement sa thèse, on peut dire que selon François Cusset, de remarquables intellectuels comme Foucault, Deleuze et autres brillants penseurs des années 1970 ont trouvé un meilleur accueil aux Etats-Unis qu’en France à partir des années 1980 : ce sont les campus américains qui ont profité de l’incroyable fermentation intellectuelle présente dans leurs travaux, pour diverses raisons, et en particulier, la structure du milieu universitaire américain. Aux Etats-Unis, les idées et l’imagination ; à la France, de bien ennuyeux « nouveaux philosophes » qui ont paradoxalement accompagné les années de gauche au pouvoir.

Il est vrai que, pour la génération d’après 1968, les auteurs dont parle Cusset, par exemple Foucault, Derrida, Kristeva ou Cixous, ont effectivement très vite disparu de l’écran des références intellectuelles indispensables, à partir des années 1980, c’est-à-dire quand une certaine jeunesse universitaire aurait dû s’emparer d’eux. Foucault, lecture de lycée, est quand même resté incontournable dans les années qui ont suivi, en particulier grâce à la présence dominante d’Arlette Farge dans les études sur le XVIIIè français ; mais c’est effectivement surtout aux Etats-Unis, en 1988 et après, que je les ai retrouvés, évidemment sous leur forme américaine (19). D’où un retour « en décalage » en France en 1989, après un séjour d’un an, face à un monde intellectuel et politique dont les références paraissaient quelque peu désuètes. Et qui le paraissent encore aujourd’hui.

Alors que j’étais naturellement assez éloignée de la théorie, l’atmosphère américaine très « théorique » m’a énormément apporté, car comme le dit Cusset (21), elle se doublait d’une « pragmatique des textes », c’est-à-dire leur « aptitude à l’usage, à l’opération » : on y puisait « des idées nouvelles » sans avoir besoin de lire Deleuze, Derrida. Les concepts rebondissaient d’un texte à l’autre et créaient une fermentation véritable par rapport à laquelle, au retour, les problématiques de l’histoire française paraissaient ternes et habituelles. C’est là un des points forts du livre de Cusset : avoir rappelé que ces lecteurs américains des philosophes français de la génération 68 ont su écouter « ces fulgurances d’il y a trois décennies, étiquetées par l’histoire des idées »(23).

Un autre mérite de cet ouvrage est de souligner les défauts de cette approche : l’inspiration française est devenue « la respiration » française par un processus de citation perpétuelle, de « scansion » sans « explicitation » (104, 234). En histoire, où les chercheurs sont souvent peu attirés par des lectures philosophiques, ce fut particulièrement le cas : des concepts complexes tels qu’ « autorité » ou « patriarcat » étaient assénés plus que véritablement intégrés. Les plus grandes réussites de la période auront concerné des sujets qui étaient également portés par l’histoire culturelle des années 60 et 70, l’histoire afro-américaine et l’histoire des femmes, en plein essor, mais qui ont trouvé un deuxième souffle dans cette injection de concepts. Etudiants ou grands penseurs, les Américains sont devenus les « usagers » des textes : en disant cela, Cusset s’inscrit lui-même dans une lecture post-moderne de l’acte de lecture (292) : « La part d’ « invention » américaine désigne dès lors l’aptitude à faire dire aux auteurs français ce qu’on en comprend, ou du moins ce qu’on a besoin d’en tirer ».

Ce sentiment de décalage entre une réalité française terne et les bouleversements américains est d’autant plus net, dans les années qui suivent mon retour, en 1989, lorsque se répand en histoire américaine un débat sur l’histoire, récits subjectifs ou science objective, qui n’a presque aucun écho en France. C’est qu’en effet, comme Cusset l’explique bien, les philosophes français ont été captés tout d’abord par la discipline littéraire aux Etats-Unis. Alors qu’en France, leur lecture et leur interprétation relevaient de la philosophie, aux Etats-Unis ils s’épanouissent dans les départements de lettres ; cette appropriation, renforcée des analyses de J. Derrida, conduit à ramener tout texte et toute interprétation au cadre littéraire. En histoire américaine, cela conduit à des clivages et à des ruptures entre anciens et modernes : les anciens, parfois à gauche comme Eugene Genovese, sont des tenants de l’objectivité en histoire : les modernes, du relativisme narratif (88, 93). Mais sur ces débats en histoire, Cusset paraît peu renseigné ou cela lui paraît périphérique. En tout cas, il est clair qu’aux Etats-Unis, dans les années 1980, la subversion, l’imagination, la résistance aux autorités tirent leur inspiration des départements de français. A Duke, on compare les fauteuils confortables du département d’anglais (celui où officie alors Stanley Fish) aux sièges effondrés du département d’histoire, longtemps dominé par les historiens du sud et de l’armée. Les spécialistes d’histoire afro-américaine mènent la guerre à ces derniers, choisissent des bureaux dans un autre coin du campus et soutiennent une jeune collègue qui propose un nouveau champ, les « théories ». En France, pendant ce temps, l’histoire ne connaît pas de tels renouvellements théoriques, à l’image des études cinématographiques dont parle Cusset (95).

La différence persistante entre France et Etats-Unis, si Cusset avait davantage envisagé le cas de l’histoire, aurait été encore plus saisissante. Il n’aurait pu écrire (143) : « Qu’on parle le patois derridien ou le dialecte foucauldien, la chose est entendue, peut-être même mieux qu’elle ne l’a jamais été en France : il n’y a plus désormais de discours de vérité, mais seulement des dispositifs de vérité, transitoires, tactiques, politiques ». Rien de moins accepté en France, rien de plus entendu aux Etats-Unis : même des milieux très traditionalistes sur le plan méthodologique, comme l’histoire des relations internationales, ont remis en cause leurs sources, leurs postulats, leurs angles d’approche. Il n’est que de lire la revue Diplomatic History des années 1990 à 2004 : alors que ce champ était considéré comme ancien, en perte de vitesse, la revue a su publier des numéros entiers sur les Africains-Américains et la politique étrangère des Etats-Unis ; l’environnement et les relations internationales ; récemment son rédacteur en chef s’est rendu au congrès d’American Studies, haut lieu de la theory, pour un rapprochement hautement improbable naguère. (Robert D. Schulzinger, « Diplomatic History and American Studies, » Passport vol. 35:2 (August 2004), 21-23).

L’influence du post-colonialisme sur l’écriture de l’histoire américaine est bien notée par Cusset (155) et là aussi la différence avec l’histoire de France ne saurait être plus saisissante, à l’exception de Nathan Wachtel et même si l’histoire coloniale s’est quand même considérablement développée dans les vingt dernières années. Mais sur ce point encore, il ne faut pas négliger le rôle des historiens radicaux, militants politiques des années 60, influencés par l’histoire culturelle de E. P. Thompson, qui ont réécrit le récit national américain en donnant une place importante aux Noirs, aux Indiens. Dès les années 1980, les manuels universitaires sont rédigés sous leur direction et reprennent cette vision d’un passé contrasté.

Sur les Cultural Studies, Cusset s’attarde peu (145-148), alors que sous ce vocable se réunit une nébuleuse d’origines disciplinaires, touchant aussi bien à la littérature populaire qu’à la littérature classique, au canon relu et corrigé qu’au contre-canon minoritaire ou ethnique. Il lui donne une acception étroite et donc réductrice, voire caricaturale, un peu décevante. Que lui-même remet en question (153) en ajoutant qu’elles « peuvent elles-mêmes avoir pour objet la question identitaire et non plus la pop culture, avec les Black, Chicano ou même French Cultural Studies ». A ce sujet, F. Cusset va dans le sens commun qui consiste à critiquer les CS et toute la «théorie» américaine au motif qu’elles auraient perdu de vue l’argument politique qui sous-tendait le travail des philosophes français.

Certes, en même temps, ce mouvement intellectuel s’est inscrit dans une tradition de combats pour les droits initiés par le Civil Rights movement puis repris par les féministes. Sur les campus, l’ambiance était au « personal is political », peut-être moins hérité de Foucault que des féministes américaines. Mais pourquoi ne serait-il pas « politique » de s’indigner que seuls des Blancs écrivent l’histoire des Noirs, que seuls des hommes prennent des décisions dans les entreprises et les administrations ? Est-ce réduire le politique au symbolique ? (186-188, 200-202). Les limites politiques du mouvement intellectuel américain ne doivent-elles pas être jugées à l’aune des grandes tendances politiques aux Etats-Unis ces 50 dernières années, un éloignement de la question sociale et un fort accent sur la question des droits individuels mais aussi communautaires ?

Le tableau du milieu universitaire est excellent. La description de ce qui en constitue l’originalité en particulier (208) mérite que l’on s’y appesantisse au moment où le milieu universitaire français tombe sous la coupe des critères américains et globaux de recherche et de publication. Les années d’après 1970 sont également celles d’une explosion des postes dans les universités américaines, donc d’une explosion des publications dans un contexte concurrentiel qui se ferme : à partir de la fin des années 1980, peu de recrutements. Un marché problématique sur certains créneaux étroits comme l’histoire américaine : 50% des historiens américains, mais un terrain bien mince en termes de sources et de durée. Parlant de la littérature (235), Cusset signale que les étudiants passent moins de temps à lire les textes qu’à comparer les critiques des textes : il en va ainsi en histoire où la lecture de l’historiographie est au centre du travail, bien plus que la lecture de documents.

Utile et même essentiel, ce rappel de la domination planétaire des modes intellectuels américaines et de ses méthodes : être professionnel, c’est travailler à la manière des Américains. Les auteurs français sont lus par le prisme de leurs interprètes (302-303) ; l’internationale des idées devient l’internationale des campus, dont sont absents les Français.

Catherine Lejeune:

Indéniablement, French Theory donne un socle théorique aux Cultural Studies. Cependant François Cusset, à l’instar d’autres penseurs marxistes, ne manque pas de les critiquer (qu’il qualifie, au passage, de « disciplines abâtardies »).
A mon sens, il réduit un peu trop les CS à l’étude textuelle et stylistique de la pop culture, même s’il reconnaît à l’occasion qu’elles peuvent avoir pour objet d’étude la question identitaire, et non plus la pop culture, comme c’est le cas des African American Studies, des Chicano Studies etc…. En effet les Cultural Studies ont contribué à revitaliser les études ethniques, les études post-coloniales ou encore les plus récentes Subaltern Studies. Il faut mettre ce renouvellement des problématiques identitaires à leur crédit, ce que ne fait pas l’auteur. D’une manière générale, si l’on peut accepter que Cusset se limite à un survol de la question des Cultural Studies même s’il y fait souvent référence, on peut regretter qu’il en sous-estime l’impact et qu’il néglige leurs rapports avec l’histoire, la sociologie, l’anthropologie (disciplines que les Cultural Studies ont soit ébranlées soit renouvelées sur le plan épistémologique).

Pour François Cusset, les seules études ethniques qui valent sont celles qui concernent les Africains-Américains. Elles seules ont acquis leurs lettres de noblesse. « La question afro-américaine », dit-il, « justifiant une étude des ségrégations est un cas à part, plus ancien, plus impératif, chargé d’une plus lourde histoire : de fait, elle relève moins d’une création universitaire que les Chicano, Asian-American, Native-American Studies ou même les Gay/Women Studies ». Nul ne contestera la centralité, la primordialité de la question afro-américaine, mais le survol est là trop rapide, et de ce fait réducteur. Peut-on ainsi mettre tous les groupes ethniques sur le même plan compte tenu de la différence des situations d’un groupe à l’autre, qu’il s’agisse de la nature et de l’ampleur de la discrimination ou de la teneur des combats pour les droits civiques passés et présents ? De surcroît, chacun de ces groupes a eu sa part de réalité ségrégationniste. Il y a donc une histoire raciste et/ou discriminatoire de ces populations dont on ne peut réduire l’étude, contrairement à ce qu’affirme Cusset, au seul besoin d’existence intellectuelle au sein de l’université.

Jean-Paul Rocchi:

Dés le début de French Theory, François Cusset définit l’enjeu d’une étude à la fois riche et synthétique. Il s’agit en fait « [d’] explorer la généalogie politique et intellectuelle, et les effets, jusque chez nous et jusqu’à aujourd’hui, d’un malentendu proprement structural » entre théories françaises et universités américaines (15). C’est l’occasion pour Cusset de se pencher sur les conditions de production de la théorie, du difficile rapport entre émission nationale et réception étrangère dans lequel elle s’inscrit, mais aussi de porter un regard critique sur l’universalisme français et le communautarisme américain. French Theory reflète bien en effet la crispation identitaire française dont est symptomatique la fortune américaine de théoriciens tels que Foucault, Derrida ou Deleuze. Ce sont en effet ceux-là même qui ont le plus radicalement critiqué le monolithisme identitaire et la domination du sujet qui ont eu une reconnaissance transatlantique appuyée.

Bien que l’auteur s’interroge sur le fracture hexagonale entre théorie et sphère politique, son argumentation ne va pas jusqu’à examiner la question complexe d’une identité française souvent réduite avec commodité à celle seule de la citoyenneté. Se dessine alors, sous-jacente à sa thèse d’une différance entre théories françaises et pratiques identitaires américaines, la nostalgie d’un logocentrisme et d’une lecture théorique légitime déclinée sur le double mode du « ce que certes nous ne faisons pas mais que les autres font bien mal »; une nostalgie dont était déjà empreint son précédent ouvrage, Queer Critics, la littérature française déshabillée par ses homos-lecteurs (PUF, 2002), consacré au cadre théorique queer anglo-saxon appliqué à la littérature française.

Ce complexe de la lecture légitime est particulièrement perceptible dans l’analyse de l’utilisation « utilitariste » que les politiques identitaires américaines auraient faite de Derrida, un dévoiement que Christian Delacampagne qualifiait de « malentendu » dans un récent article publié à l’occasion de la mort du philosophe (« Histoire d’une success story », Le Monde, 11.10.04). Une perversion qui procèderait selon Cusset du hiatus entre l’enjeu de la déconstruction, comprise comme critique de la structure, de la connaissance et du rapport entre loi et écriture, et « la très vague définition littéraro-institutionnelle qui prévaut aux Etats-Unis : ‘terme dénotant un style de lecture analytique qui tient pour suspect le contenu manifeste des textes’ » (121). Plus loin, dans son chapitre consacré aux « Chantiers de la déconstruction », Cusset poursuit sa critique en soulignant que peu de réflexions politiques peuvent se réclamer de Derrida, tant sa pensée, déployée « en deçà du vrai et du faux » s’accommode mal de positionnements tranchés, de choix pratiques arrêtés ou d’engagements effectifs (136-137).

Pourtant, ne peut-on pas se demander si les politiques identitaires à l’université n’ont pas constitué aux États-Unis, plutôt que le supposé dévoiement que Cusset stigmatise, le terreau favorable à l’épanouissement de la pensée de celui qui se décrivait comme « étant en synchronie avec la postcolonialité » (Arte, 13/10/04) et dont la critique de la métaphysique occidentale n’est pas sans lien avec sa propre histoire algérienne ? N’y a-t-il pas dans le développement des départements et programmes d’Etudes afro-américaines aux Etats-Unis une même remise en cause du logocentrisme, de la métaphysique occidentale, et de leur expression américaine à travers la question raciale ? Le hiatus ne semble pas si profond, si tant est que l’on comprenne l’étude des textes comme l’occasion de mettre au jour les liens entre philosophie, histoire et idéologie, une pratique dont la tradition afro-américaine fait tôt l’épreuve à travers la maîtrise de l’écriture par les esclaves. Par ailleurs, et pour ce qui est de l’inadéquation entre la philosophie dérridienne et le politique, l’argument est contredit par Derrida lui-même et notamment dans ses textes « Racism’s Last Word » et « But, beyond…(Open Letter to Anne McClintock and Rob Nixon) » qui étudient les discours et l’idéologie du régime de l’apartheid (in Henry Louis Gates, Jr, «Race», Writing and Difference, 1986).

Il est en outre surprenant de considérer que toute « structure d’opposition [étant] irréductible aux référents qu’elle affiche » empêche, si ce n’est de réduire à néant la dite structure, d’y infléchir les rapports d’inégalités. N’est-ce pas ce à quoi W. E. B. Du Bois et Frantz Fanon se sont attelés en rétablissant un sujet noir réaffirmé à la place de l’antithèse de la dialectique hégélienne du maître et de l’esclave, la négation de la négation ?

La philosophie aussi est affaire de politique. A moins que l’on entende par « politique », le seul terrain social, la seule matérialité. Cette conception a cependant déjà montré ses limites. C’est au nom de la seule matérialité que le marxisme, péchant par excès d’idéalisme, a analysé le racisme comme une mystification de la bourgeoisie destinée à diviser la lutte prolétarienne, jugeant a priori que les classes populaires ne pouvaient avoir de préjugés (cf Varet, Racisme et philosophie, essai sur une limite de la pensée, 1973, 352-362).

Le hiatus est-il entre une définition réductrice et l’enjeu ambitieux de la déconstruction, ou en encore entre philosophie et action politique ? Peut-être est-il en fait inhérent au rapport entre théorie et expérience, dans la difficulté de leur ordonnance dans le temps tout comme la description de leur interaction. Ces difficultés peuvent conduire à une lecture partielle voire partiale qui, d’une part fait de l’expérience le lieu et l’occasion d’un asservissement et d’une perversion de la théorie et d’autre part tend à minimiser le poids de l’expérience indigène / communautaire.

C’est ainsi que French Theory présente également la faiblesse d’arrimer les penseurs des identités américaines et les critiques de la différence à une théorie française dont l’influence est postérieure à celle de larges mouvements sociaux de la dissidence et de la marginalité américains. Les Afro-Américains ont-ils attendu Derrida pour « déconstruire » la réalité matérielle et la métaphysique blanche américaine que la ségrégation leur renvoyait au visage ? « On Being Crazy » (1923) de Du Bois, qui s’attache à décrire le lien entre matérialité, langage et idéologie, est en cela un démenti frappant. En outre, lorsque Cusset fustige les départements de littérature américains pour avoir transformé la théorie française en un métadiscours subversif destiné à remettre les sciences en cause plutôt qu’à porter un regard sur le réel (chapitre « Littérature et théorie »), on touche à la limite du cadre interculturel. La distinction occidentale entre théorie / philosophie d’une part et littérature d’autre part est elle pertinente dans le cadre de la tradition afro-américaine pour laquelle la systématisation théorique, fût-elle littéraire, artistique, philosophique ou politique, s’ancre dans l’expérience, une subjectivité réflexive et non dans la connaissance objective du monde ?

C’est là où, de façon assez ironique, French Theory, outre de révéler en creux les crispations actuelles de la scène intellectuelle française, reproduit parfois dans son approche de l’objet américain la même transformation culturelle dont il souligne les travers au sein des universités américaines.

On peut dès lors conclure avec prudence que, pour offrir des éclairages différents et significatifs, l’approche comparatiste ne saurait prétendre à l’exhaustivité.

P. Guerlain:

Le livre n’aborde pas suffisamment le paradoxe entre ce ferment politique de gauche sur les campus et la montée de la droite politique. Les catégories du multiculturalisme, qui découlent en partie de la French Theory, ont d’abord servi à rendre certains groupes et certaines méthodologies visibles et ont donc eu, dans les années 60 et 70, un effet positif indéniable mais elles favorisent aujourd’hui une réduction du politique aux catégories du marketing. Les « market niches » s’accommodent fort bien d’un découpage identitaire, en grande partie ethnique. Le multiculturalisme communautariste a été coopté par l’ultra-droite sans grande difficulté. L’hégémonie de l’ultra-droite américaine sur le champ politique s’accommode fort bien d’une politique de la différence qui ne va pas plus loin que la surface. Un Colin Powell ou une Condolezza Rice au gouvernement et la question du racisme est balayée. La politique de rélégation sociale dont sont victimes les pauvres, tous les pauvres mais les Noirs sont sur-représentés parmi les pauvres, disparaît de l’espace du débat politique derrière des querelles sémantiques, en partie inspirées par les débats universitaires liés aux nouvelles théories. (Lire Loïc Wacquant, Punir les Pauvres, sur ce point). Il ne s’agit pas tellement ici de parler de dépasser le marxisme ou non (il n’y a pas de théorie ou d’horizon indépassables) mais de ne pas rejeter la réflexion en termes de classes sociales et de fonctionnement socio-économique global au profit de logiques communautaires qui desservent toujours les communautés les plus marginalisées. L’université et la French theory ont participé à la déconstruction de tout universalisme, jugé abstrait, français et xénophobe, au profit d’un particularisme qui pourtant renouait avec des racines conservatrices et qui contribue à enfermer les groupes dans leurs appartenances communautaires et à gommer les liens qui peuvent exister entre groupes ethniques différents mais semblables sur le plan socio-économique.

On peut donc se poser la question de savoir si les militants des campus ont vraiment fait de la politique ? Derrida, auteur érudit et multilingue dont les positions politiques sont respectables, était-il un penseur authentiquement politique ? Sa créativité et son intervention ne sont-elles pas d’abord littéraires ? Contrairement à Saïd, il n’a pas de prolongement dans le monde des acteurs de la politique. C’est d’ailleurs à l’université et dans les départements de littérature que Derrida a connu un grand succès, pas ailleurs, notamment dans les départements de philosophie ou de sociologie ou dans l’espace du débat public.

La désignation de French theory isole dans un cadre national ce qui est en fait une construction théorique qui est d’abord américaine et va bien au-delà d’un échange franco-américain puisque certains auteurs indiens, palestinien et américain dans le cas de Saïd, mais aussi britanniques ont joué un rôle dans la dissémination de cette French theory. La réintroduction d’une catégorie nationale a peut-être valeur de symptôme car le postmodernisme a cherché à abolir les frontières et la référence à l’Etat-nation. De même que les théoriciens de la mondialisation dite néo-libérale ont un peu vite enterré les Etats-nations, les postmodernes ont oublié ou marginalisé les références nationales qui font figure ici de retour de refoulé. Dans le cas des Etats-Unis, pays où le nationalisme bien affirmé se vit souvent sur un mode exceptionnaliste et expansionniste, l’abandon de la référence à l’état-nation a des effets d’aveuglement.

Il faut aussi appréhender la question suivante : que fait la théorie ou à quoi sert la théorie ? Pour les artistes et les spécialistes de littérature, la théorie est peut-être une relance de la créativité, en histoire et sciences sociales la théorie peut et même doit interroger l’écriture et les biais d’écriture pour échapper aux tentatives toujours renaissantes du positivisme sans que l’on puisse évacuer la catégorie du réel et donc l’adéquation au réel de la théorie. Les sciences sociales ne peuvent scier la branche du réel sur laquelle elles sont assises, alors que la littérature n’a pas à affronter cette question. Il y a dans la confusion entre les registres théoriques une difficulté particulière car ce qui vaut pour le texte de fiction ne s’applique pas forcément à la sociologie ou à l’histoire.

Le singulier de French Theory pose problème car les divers auteurs abordés par Cusset n’ont pas forcément grand-chose à voir entre eux. Il y a là un effet « rag-bag » qu’il faut aussi comprendre en termes d’enjeux de carrière ou de positionnement dans l’univers de la mode universitaire. Dans un cadre de célébration de la diversité et de la différence, afficher une origine française à un groupe de théories permet de se singulariser et de se démarquer d’un anti-intellectualisme ambiant. Dans de nombreux cas, la théorie est un substitut de religion, quelque chose qui permet de tenir pour des raisons fort personnelles et qui n’ont rien à voir avec les « vérités d’adéquation » dont parle Todorov dans Critique de la critique.

Le livre de Cusset fait le point sur une influence culturelle donnée de façon magistrale mais souvent trop rapide. Ainsi, il aborde des thématiques essentielles sans les traiter (négation du social, 106, dépolitisation par les CS, 149), fait de Chomsky un marxiste orthodoxe (139) ce qui indique qu’il ne connaît rien à Chomsky et aux marxistes orthodoxes mais répète des a priori glanés ici ou là, il ne connaît pas bien l’affaire Sokal et termine par une violence anti-française quelque peu surprenante. Son livre a néanmoins le mérite de signaler de nombreuses apories du passage des idées d’un champ à l’autre (ici on aimerait plus de références à Bourdieu) ou d’un paysage intellectuel national à un autre ainsi que les glissements contradictoires d’un champ intellectuel, celui des CS, d’une origine marxiste britannique à une adaptation américaine qui passe par des théoriciens français en rupture de marxisme. Il y a du « food for thought » pour des penseurs fort éloignés les uns des autres dans ce livre qui doit donc être salué comme un grand moment de remue-méninges.

Thierry Labica:

Pouvait-on s’attendre à ce que les idées de Derrida soient politiques au sens traditionnel du terme ? Quant aux idées françaises, quel que soit le terreau d’accueil aux USA, elles bénéficiaient d’une écoute traditionnelle dans les milieux intellectuels américains, et ce depuis toujours. Le débat intellectuel français, sophistiqué et provocateur, fertilise les autres. En France, en revanche, les années 1980 et 1990 ont été celles du règlement de l’héritage intellectuel du PC, avec le rôle de Furet en particulier : les Français été occupés à autre chose.

Cornelius Crowley:

Quelle est la bonne définition du politique ? La décision ? L’acte d’opposition ? Qu’est-ce qu’une bonne position politique ? Agir ? Penser ? Tout ce travail hypertextualisé est éminemment politique. L’idée d’une autre politique à venir est bien chez Derrida. Il permet de dépasser les oppositions manichéennes, de voir le lien entre l’Amérique et le monde musulman. D’entrevoir un autre engagement.

P. Guerlain :

On ne peut nier une différence entre Derrida et des intellectuels comme Chomsky ou Saïd qui sont impliqués dans la politique du « réel ».

André Kaenel :

Le livre de FC est d’abord un bon livre d’histoire intellectuelle et culturelle comparée. C’est le genre de livre que la plupart de ceux qui, comme moi, enseignent les études américaines en France n’auront aucune peine à reconnaître comme le produit d’une véritable réflexion croisée sur les Etats-Unis. En même temps, comme toute réflexion croisée exercée à partir d’un point précis, en l’occurrence la France, le livre de F. Cusset propose également une réflexion sur nous-mêmes, intellectuels et chercheurs français ou européens, et sur nos pratiques. Le regard à la fois critique et admiratif que porte F. Cusset sur les appropriations et les détournements de la théorie française aux USA se double, dans son avant-dernier chapitre, d’une jérémiade, rhétorique politique bien américaine analysée par Sacvan Bercovitch, sur les résistances et l’hermétisme, de ce côté-ci de l’Atlantique, face au foisonnement théorique issu de ces appropriations et détournements. Le fait que French Theory ne soit cependant pas l’ouvrage d’un américaniste (sauf erreur) mais qu’il éclaire néanmoins les pratiques des enseignants-chercheurs travaillant sur les USA constitue un autre décalage à ajouter à ceux que le livre de F. Cusset éclaire si utilement. En effet, il nous explique qu’il n’y a pas eu de retour de théorie en France pour la French Theory pour des raisons qu’il énumère en fin de volume. Du moins n’y a-t-il pas eu de retour de l’ampleur du transfert vers les USA qui a eu lieu à partir du milieu des années 60.

Toutefois, depuis quelques temps, un retour a lieu, modestement. Outre le livre de F. Cusset, cette journée d’étude en est un exemple. Ce retour s’opère, de façon significative, par le biais de la langue : sans la connaissance de l’anglais de son auteur, le livre de F. Cusset n’aurait pas vu le jour, du moins pas sous une forme aussi complète et réussie ; de même, la plupart de personnes qui interviennent lors de cette journée relèvent de la 11ème section du CNU (nos spécialités sont la littérature, la civilisation, l’histoire, l’anthropologie ou la sociolinguistique) et travaillent sur le domaine nord-américain. La langue anglaise, et les différentes spécialisations qui s’appuient sur elle, forment donc la passerelle première qui permet le retour de la French Theory, son appropriation et ses détournements par l’université française. On peut ici noter que c’était déjà la langue, mais le français cette fois, qui avait permis à l’origine le passage des idées de Derrida et Foucault aux USA, où elles avaient d’abord fait leur chemin dans des départements de français, avant de passer dans des départements d’anglais, puis de littérature comparée (Cusset, 89). Il en allait de même pour le volume Cultural Studies/Etudes culturelles publié aux PUN en début d’année, qui était l’œuvre d’anglicistes au sens large. J’ajoute que la communauté des anglicistes n’a pas le monopole des Cultural Studies, comme en témoignent les travaux effectués en France dans les domaines des études filmiques (cf. G. Sellier et N. Burch) ou dans celui de la sociologie des médias (cf. l’introduction aux CS de Mattelart et Neveu, publié en 2003 à La Découverte, chez le même éditeur que French Theory).

Mais la connaissance de langue anglaise ne permet pas à elle seule d’expliquer les passages, transferts et appropriations de la théorie entre l’Europe et les USA — dans un sens comme dans l’autre. Le livre de François Cusset nous rappelle l’importance capitale des personnes et des institutions dans la transmission des savoirs et des idées. Plutôt que de parler au nom des autres collègues, je mentionnerai ici, au travers de quelques jalons de ma propre histoire intellectuelle, les circonstances dans lesquelles je me suis trouvé à trafiquer avec la théorie dans le cadre de mes recherches sur la littérature et la culture américaines.

Il m’est difficile de traiter séparément les relais institutionnels et personnels. C’est à l’Université de Genève, dans le département d’anglais, vers le milieu des années 1980, que le vent de la French Theory a commencé à souffler sur mes travaux en littérature américaine. Une thèse de doctorat sur la figure de l’auteur dans l’œuvre de Melville m’avait amené a m’intéresser à la manière dont l’espace public américain au milieu du XIXè siècle concevait la figure de l’auteur, comment un discours public (et politique) sur l’auteur se faisait jour dans un contexte de nationalisme culturel exacerbé. Les enseignants du département d’anglais, professeurs ou assistants, comme moi, étaient alors majoritairement anglophones, issus des meilleures universités britanniques et américaines. Les débats sur le canon littéraire qui avaient commencé à agiter Cambridge et Yale trouvaient naturellement un écho dans leurs pratiques pédagogiques, fortement marquées par l’influence de la déconstruction et par l’impact des Cultural Studies en Grande-Bretagne (son impact américain devait se faire sentir quelques années plus tard). C’est un plaisir pour moi que de rendre hommage, pour la première fois publiquement, à ces collègues et passeurs d’exception, parmi lesquels John Higgins, Pete de Bolla, Tom Ferraro, Bill Readings (l’auteur de The University in Ruins, mort dans un accident d’avion il y a tout juste 10 ans). A la faveur de cours parfois assurés en commun, de discussions informelles, de séminaires de type work in progress, et encouragé par la liberté que nous laissait l’institution d’offrir les enseignements de notre choix, mes cours et ma recherche se sont ouverts à certaines des idées alors en vogue aux USA et en Grande-Bretagne. C’est dans ce milieu intellectuel, extrêmement fertile sur les plans personnel et académique, que je me suis tourné vers les travaux de Michel Foucault et de Pierre Bourdieu pour comprendre l’enchevêtrement, dans le champ littéraire américain au XIXè siècle, des discours (juridiques, moraux ou politiques) et des institutions (la question du droit d’auteur, par exemple). Et pour comprendre comment, à l’intérieur de ce champ en mutation, et souvent contre ses règles, Melville construisit sa trajectoire d’écrivain. La théorie française, qui ne s’appelait pas encore ainsi, opérait là, pour moi, un retour dans une contexte cosmopolite francophone, mais non français, après un détour par Cambridge, Oxford, Duke ou Yale.

Yale, justement, où je devais passer une année en tant que chercheur invité en 1988-1989, pour poursuivre mes recherches sur Melville, était alors secouée par l’affaire Paul de Man, à laquelle FC consacre plusieurs pages. Je rappelle ici ces révélations, faites en 1986, selon lesquelles le critique d’origine belge, professeur à Yale jusqu’à sa mort en 1983, avait signé des articles à teneur antisémite dans un journal bruxellois durant la Seconde Guerre mondiale. Il y eut à l’époque un colloque tendu consacré à l’héritage de de Man en présence de ses anciens collègues et amis : nombreux étaient les enseignants et les collègues à voir alors dans l’affaire de Man le début de la fin de la « déconstruction ». Autre souvenir de cette année : le nom « Derrida » écrit en grand à la mousse à raser sur un sentier du campus et dont il ne restait déjà plus qu’une trace à peine lisible.

En quittant il y a une dizaine d’années l’Université de Genève pour l’Education nationale, la Suisse pour l’Europe, c’est un autre déplacement que j’ai opéré, d’une réflexion centrée sur la littérature américaine à une autre sur un objet que je découvrais alors, la « civilisation ». Ce champ non disciplinaire qu’on disait transdisciplinaire, reposait (repose ?) sur des fondements positivistes étroits et envisageait l’étude de la civilisation britannique ou américaine dans une optique principalement entomologique (il s’agissait d’épingler le système politique, les institutions, la population, l’immigration, etc.) — d’où la réflexion sur le champ lui-même était absente. Ceci alors que les Etudes américaines aux USA étaient en train de prendre un tournant théorique sous les coups de butoir des « Nouveaux américanistes » (New Americanists). Autour de la figure de Donald Pease, ces nouveaux américanistes insufflaient à un champ jusqu’alors hostile à la théorie et historiquement centré sur la nation américaine, un parfum continental, dont le canal privilégié était Althusser et la critique idéologique. Certains de leurs textes, d’un abord souvent difficile, ont nourri ma réflexion sur l’exportation culturelle américaine à l’époque de la Guerre froide, dont participaient d’ailleurs l’encouragement en Europe des American Studies dès la fin des années quarante. D’autres projets de recherche, en cours ou en veilleuse, sur le cinéma américain se sont nourris de travaux dans la mouvance des Cultural Studies américains sur l’identité nationale et post-nationale dans un contexte de mondialisation, ou sur la réception des produits culturels (e.g. sur l’apocalypse nucléaire dans le cinéma de la Guerre froide, sur l’image du pouvoir et de la Présidence américaine, ou sur le « siècle américain au cinéma entre Pearl Harbor et le 11 septembre »).

A chacune de ces étapes du parcours (Melville, l’exportation des études américaines ou le cinéma) la théorie, qu’elle soit française ou non, a fait partie de ma boîte à outil. Si je n’étais pas si maladroit avec le marteau ou l’équerre, je revendiquerais volontiers la définition que donnait Laurence Grossberg des Cultural Studies comme « bricolage ». En tous les cas, ma démarche intellectuelle doit beaucoup aux déplacements, aux décrochages et aux décalages qu’analyse si bien F. Cusset dans son livre. Les CS, en particulier, me paraissent fournir un ensemble de textes, de protocoles intellectuels, de démarches, et de concepts fertiles pour penser une pratique d’enseignant et de chercheur en « civilisation » américaine dans le contexte institutionnel précis de l’Université française. Ce qui ne revient pas à dire que tout est bon à prendre dans les CS (cerner ce « tout » me paraît d’ailleurs difficile). Les dérives textualistes relevées par F. Cusset sont réelles (ce que Mattelart et Neveu appellent dans l’un des sous-titres de leur livre le « théoricisme chic et choc comme ersatz d’engagement »). En même temps, la vitalité du champ des CS, son bouillonnement et les possibilités de croisements qu’il ouvre en font un outil utile pour fendiller la gangue positiviste des études de « civilisation »).

Dans un essai institulé «Traveling Theory,» repris dans The World, the Text, and the Critic (1983), Edward Saïd analyse les convergences et les divergences entre les idées de Georg Lukacs, Lucien Goldman et Raymond Williams. Il y défend une vision de la théorie comme un projet nécessairement partiel, incomplet. La théorie est selon lui inévitablement affaire de transfert, de voyage et d’emprunt. Et Saïd d’ajouter : « Car nous sommes obligés d’emprunter si nous voulons échapper aux contraintes de notre environnement intellectuel immédiat » (241). C’est l’enseignement principal que je tirerais de l’ébauche de biographie intellectuelle que j’ai esquissé ici aujourd’hui. C’est aussi, me semble-t-il, celui qu’on peut tirer des pérégrinations de la théorie française analysées par FC.

Guillaume Marche :

Il s’agit d’un livre très érudit, qui situe de manière utile la genèse en France et le devenir aux Etats-Unis de la « French Theory ». L’auteur fait une sociologie des savoirs — notamment philosophiques — et de la vie universitaire américaine très convaincante. Mais son traitement des références sociologiques l’est moins : il va trop vite en besogne pour réduire « la » sociologie américaine à un « héritage positiviste » (106). Le chapitre 13 et la conclusion donnent néanmoins à réfléchir sur la dichotomie texte/société, dont certains usages de la « French Theory » cherchent à dépasser le caractère bloquant. Dans les pages 343 et suivantes, Cusset formule même les termes d’un dépassement indispensable de la dichotomie universalisme/différentialisme, qui tend à assimiler — à tort — différentialisme, essentialisme et séparatisme. Se pose in fine la question de l’usage de la théorie : c’est surtout selon qu’elle est descriptive ou prescriptive qu’elle s’avère en phase ou en décalage avec le terrain et l’expérience des acteurs : là se situe, par exemple, l’un des écueils de la théorie queer, qui a tendance à traiter les mobilisations sur le terrain comme si elles étaient, pour ainsi dire, en retard sur la théorie (164-167). D’autres auteurs se proposent plutôt de rendre compte des mobilisations fondées sur l’expérience afin d’en explorer le sens tout en les accompagnant (cf. Kath Weston. Long Slow Burn : Sexuality and Social Science. Routledge 1998).

Marc Deneire :

Avoir vécu sur différents campus américains de 1986 à 1998, c’est avoir participé à une immense conversation, un aller-retour entre les contacts personnels et les textes. D’une université à l’autre, d’un département à l’autre, des références communes (comme Michel de Certeau), qui n’étaient d’ailleurs pas seulement françaises (Habermas en faisait partie). A la fin des années 1980, c’était la fin du New Criticism et la découverte de Derrida a permis un renouvellement autour de la déconstruction. La théorie a permis de se positionner dans le cadre d’une pratique discursive, et également de « s’éclater », se faire plaisir et éclater les points de vue, les identités. Pour ceux qui ont eu cette expérience américaine, tout retour en France est difficile : l’anti-multiculturalisme est dominant. Autre différence : si les universitaires et intellectuels américains sont séparés de leur base, ils sont au moins unis dans leur communauté par cette conversation.

Cornelius Crowley :

Les années 1980 ont vu en France la non-rencontre de cette théorie française, de la réflexion politique telle que Derrida et Foucault avaient pu l’imaginer, et de la gauche enfin au pouvoir.

P-Guerlain et T. Labica s’interrogent pour finir sur ce paysage intellectuel et universitaire français depuis les années 1980, champ occupé également par Lacan en matière de mode intellectuelle dans les années 70 ou Bourdieu (dont Cusset parle peu). La mode ne laisse pas forcément toujours de la place à tous les penseurs importants et parfois met en lumière des penseurs plus médiatiques ou flamboyants que profonds. Bourdieu est finalement peut-être plus important sur le plan scientifiques que d’autres qui ont eu plus de succès à un moment donné sur les campus américains.

Indications bibliographiques:CHAMOISEAU, Patrick. Ecrire en pays dominé. Paris : Gallimard, 1997.

CUSSET, François. French Theory, Foucault, Derrida, Deleuze et Cie et les mutations de la vie intellectuelle aux Etats-Unis. Paris : La Découverte, 2003.

CUSSET, François. Queer Critics, la littérature française déshabillée par ses homos-lecteurs. Paris : PUF, 2002.

DU BOIS, W. E. B., « On Being Crazy » in Nathan Huggins (ed.), Du Bois, Writings. New York : The Library of America, 1986.

DERRIDA, Jacques, « But, beyond…(Open Letter to Anne McClintock and Rob Nixon) » in Henry Louis, Gates, Jr (ed.), « Race », Writing, and Difference. Chicago : The University of Chicago Press, 1986.

DERRIDA, Jacques, « Racism’s Last Word » in Henry Louis, Gates, Jr (ed.), « Race », Writing, and Difference. Chicago : The University of Chicago Press, 1986.

DUBOIS, Laurent, « Republic at Sea » in Transition, n° 79.

EAGLETON, Terry. After Theory. New York : Basic Books, 2003.

FANON, Frantz. Peau noire, masques blancs. Paris : Le Seuil, 1952.

GROSSBERG, Lawrence, Cary NELSON, and Paula A. TREICHLER (eds.). Cultural Studies. London : Routledge, 1992.

GUERLAIN, Pierre, « Affaire Sokal : Swift sociologue ; les cultural studies entre jargon, mystification et recherche », Annales du Monde Anglophone, N° 9 (1er semestre 1999), 141-160.

Iris n° 26, SELLIER, Geneviève (dir.), « Cultural Studies, Gender Studies et études filmiques ». Paris, 1998.

KAENEL, André, Catherine LEJEUNE et Marie-Jeanne ROSSIGNOL. Cultural Studies. Etudes Culturelles. Nancy : Presses Universitaires de Nancy, 2003. Sur ce livre voir également dans TransatlanticA le compte-rendu de Pierre Guerlain :
http://etudes.americaines.free.fr/TRANSATLANTICA/CR/kaenel_lejeune_rossignol.html
La bibliographie de cet ouvrage est étendue et pédagogique.

KAENEL, André. ‘Words are Things’: Herman Melville and the Invention of Authorship in Nineteenth-Century America. Berne : Peter Lang, 1992.

MATTELART, Armand et Erik NEVEU. Introduction aux Cultural Studies. Paris : La Découverte, 2003

PEASE, Donald E. (ed.), « New Americanists : Revisionist Interventions into the Canon, » Boundary 2 :17 (Spring 1990) & « New Americanists 2: National Identities and Postnational Narratives,» Boundary 2:19 (Spring 1992).

READINGS, Bill. The University in Ruins. Cambridge : Harvard UP, 1996.

SAID, Edward. The World, the Text, and the Critic. New York : Columbia UP, 1982.

TODOROV, Tzvetan. Critique de la critique, Un roman d’apprentissage. Paris : Seuil, 1984.

VARET, Gilbert. Racisme et philosophie. Essai sur une limite de la pensée. Paris : Denoël, 1973.

WACQUANT, Loïc. Punir les pauvres. Marseille : Agone, 2004.

WESTON, Kath. Long Slow Burn : Sexuality and Social Science. Londres : Routledge 1998.

WRIGHT, Michelle, M.. Becoming Black. Creating Identity in the African Diaspora. Durham : Duke University Press, 2004.

A consulter également la revue publiée par Routledge Cultural Studies :
http://www.unc.edu/depts/cultstud/journal

ou l’International Journal of Cultural Studies publié par Sage :
http://ics.sagepub.com

et un site recensant les liens possibles vers des sites de Cultural Studies :
http://www.blackwellpublishing.com/Cultural/Default.asp

et chez Duke UP une revue féministe de Cultural Studies :
http://muse.jhu.edu/journals/differences

Voir par ailleurs:

Djemila Benhabib: «Les islamistes considèrent le multiculturalisme comme le meilleur système»

GRAND ENTRETIEN – L’essayiste Djemila Benhabib a participé aux côtés de 50 personnalités au livre #JeSuisMila (Seramis éditions). Un manifeste en faveur de la liberté d’expression et de la laïcité. L’occasion de revenir sur le parcours hors du commun de cette femme engagée qui a fui l’Algérie, en guerre civile, pour la France puis pour le Québec. Deux pays où elle ne s’attendait pas à croiser de nouveau la route de l’islam radical.

Par Alexandre Devecchio

Pourquoi avoir accepté de participer à ce livre collectif intitulé «#JeSuisMila ?» En quoi cette affaire vous touche-t-elle personnellement?

Lorsqu’on fait l’expérience de la montée fulgurante de la violence comme j’en ai été témoin en Algérie, au début des années 1990, on ne peut que chérir la liberté. J’ai pris, soudainement, conscience dans la jeune vingtaine du privilège que j’avais de vivre. Résister à l’islam politique est devenu le combat de ma vie. Soutenir Mila s’inscrit, naturellement, dans cette démarche. Lorsque tout fout le camp, il ne reste que les fondamentaux pour donner un sens à l’existence.

Vous seriez-vous imaginée devoir défendre ainsi la liberté d’expression d’une jeune Française contre les islamistes lorsqu’en 1994 vous avez quitté l’Algérie en pleine guerre civile?

Certainement pas. En réalité, j’ai très vite déchanté en arrivant en France avec ma famille, mes parents, professeurs d’université, et mon frère, jeune lycéen. Nous nous sommes installés à Saint-Denis, ville cosmopolite, à l’époque, qui avait une tradition dans l’accueil des réfugiés politiques. Je pense, notamment, à nos camarades espagnols, italiens, grecs et portugais qui avaient fui le fascisme. Quant à nous, notre situation était considérée comme différente de la leur. Nous étions hors champ. Je pense que c’est autour de cette ambiguïté de notre statut que sont nés d’abord les malentendus, puis les dérives. En d’autres mots, nous reconnaître ne serait-ce que, symboliquement, le statut de réfugié politique revenait à placer l’islam politique dans l’histoire et le considérer comme une menace planétaire. Or, il n’en a rien été. Les États occidentaux et leurs élites intellectuelles dominantes ne se sont pas sentis concernés par ce qui s’est joué en Algérie dans les années 1990, tout comme en Iran en 1979. Certains prétendaient que la menace islamiste allait rester confinée aux frontières de ces pays, d’autres, comme les États-uniens, étaient convaincus de pouvoir «domestiquer» l’islamisme. Depuis, il n’a cessé de progresser et de muter. Pour trois raisons principalement. La puissance de son idéologie, sa capacité à s’adapter à n’importe quel environnement institutionnel et, finalement, sa force mobilisatrice. Pour revenir à votre question de départ, ceux qui menacent nos libertés ne sont pas seulement les islamistes. Mais ceux qui ont renoncé à les exercer et à les défendre.

Que représentait alors la France pour vous? Parleriez-vous de régression à son sujet?

La France était pour moi un havre de paix qui m’a permis de me reconstruire. Je n’oublierai jamais de ma vie cette sensation de marcher librement dans la rue, cheveux au vent, sans avoir à vérifier s’il y avait, au coin d’une rue, un salaud pour me buter. La sécurité est, en ce sens, la première des libertés. Comment dire? Pour une femme, c’est encore plus vrai. Ceux qui, comme moi, en ont été privés en mesurent toute l’importance. Je pense à mes amies afghanes, iraniennes et saoudiennes qui sont en première ligne. Évoquer cette période c’est aussi parler des solidarités. La France, à travers un tissu associatif dynamique, des syndicats, universitaires, artistes et simplement des gens d’une grande générosité, a participé à atténuer nos blessures et à nous rattacher à notre humanité. Ultimement, pour sortir de nos vies cabossées et de nos destins fracassés, nous ne pouvions compter que sur notre résilience. Sur le plan politique, c’était beaucoup plus compliqué. L’asile politique a été offert en France, en Europe, aux États-Unis et au Canada aux chefs du FIS et du GIA et à leurs militants, ceux-là même dont les mains étaient entachées de sang. Il se trouvait des journalistes comme Edwy Plenel ou des universitaires comme François Burgat pour les absoudre de leurs crimes. Vous vous souvenez du petit jeu du «Qui tue qui?» («On ne sait pas qui tue qui?»: durant la tragique décennie noire en Algérie, cette formule en vogue était employée par certains observateurs, en particulier en Europe et en France, pour désigner l’armée algérienne comme seule responsable des massacres sur les civils alors que ces derniers étaient perpétrés par des groupes islamistes, NDLR) en Algérie qui a donné, plus tard, le «je ne suis pas Charlie»? Toujours les mêmes aux commandes pour faire courir des «si», multiplier des «mais» et évacuer toute la dimension idéologique et politique de notre combat. Pour eux, les islamistes, à bien y regarder, n’étaient pas vraiment des islamistes, et surtout pas des assassins. Et ceux qui s’opposaient à leurs desseins fascistes n’étaient pas des résistants. La régression? Elle n’est qu’une simple conséquence de cette confusion. Mais attention! N’allez pas imaginer que nous nous sommes tus. Même si cette thèse du «Qui tue qui?» nous était insupportable, nous l’avons confrontée. Dénoncée. Nous ne nous sommes jamais résignés. Jamais. Nous avons continué à parler, écrire, militer et mettre en garde contre la contagion islamiste, ici comme ailleurs. Nous, nous n’habitions pas les beaux quartiers. Encore là, le discours dominant dans le milieu médiatique était à la victimisation des musulmans. Notre parole était pratiquement inaudible.

Votre père, l’universitaire Fewzi Benhabib, qui vit toujours à Saint-Denis, a écrit, dans une tribune publiée dans Marianne le lendemain des attentats du 13 Novembre, que cette ville était plus communautarisée qu’Oran. Partagez-vous son point de vue?

Bien entendu. Je remercie, vivement, Marianne d’avoir été à nos côtés depuis le début. Mon père est le premier à avoir osé lever le voile sur les graves dérives qui touchent Saint-Denis, qui n’est pas n’importe quelle ville. Elle est au cœur du dispositif indigéniste. Tout comme elle est au centre de la stratégie de l’internationale islamiste. Tout cela est largement documenté dans le livre «Quatre-vingt-treize», de Gilles Kepel… depuis 2012. Il n’était plus possible pour mon père de se taire. Ne pensez pas que ce geste a été sans conséquence pour lui. Vivre au quotidien dans la gueule du loup ça use. Même les plus courageux parmi nous. À l’évidence, ceux qui, comme mon père, habitent dans les quartiers populaires et résistent aux islamistes et à la mafia ne bénéficient d’aucune protection et n’ont pas le soutien des élus locaux. En 2009, avec quelques Dionysiens nous avons mis en place l’Observatoire de la laïcité de Saint-Denis (qui n’a rien à voir avec celui de Bianco, qui a détourné notre nom). Nous avons reçu deux cacahuètes de subside alors que l’association de Rokhaya Diallo, qui n’y est pas domiciliée, est grassement subventionnée pour offrir des ateliers sur les cheveux frisés. On se moque de qui? À Saint-Denis, il y apourtant beaucoup d’initiatives citoyennes à encourager, comme l’association Les Résilientes.

Pourquoi avoir quitté la France pour le Québec en 1997?

Je voulais entamer ma vie d’adulte sur un choix. La France, je ne l’avais pas choisie. À mon âge, il y avait certainement la curiosité, l’ouverture au monde et le goût du dépassement qui ont motivé ce nouveau départ. Pour guérir, il fallait partir. Partir le plus loin possible de façon à pouvoir déployer mes ailes. Surtout, loin de l’islamisme que j’avais retrouvé en France. Alors, j’ai choisi le Québec, pays francophone, ouvert à l’immigration, véritable démocratie où il fait bon vivre pour les femmes. Puis, il y a eu le 11 Septembre 2001. J’étais correspondante de presse pour le journal algérien El-Watan, je me suis rendue, tout de suite, à New York avec mon amoureux qui était lui aussi journaliste. Nous sommes revenus de ce voyage bouleversés. En effet, tout avait basculé!

La censure et l’autocensure dans les universités, les médias, le monde culturel sont désormais une réalité qu’il est difficile de déjouer.

Vous militez pour le Parti québécois. Vous y avez proposé l’idée d’une charte de la laïcité. Pourquoi?

Pour la simple raison qu’au cœur du dispositif législatif canadien il existe, depuis 1985, une possibilité de se soustraire aux règles communes en faisant valoir ses croyances religieuses. C’est ce qu’on appelle l’accommodement raisonnable devenu célèbre depuis le début des années 2000. Une simple demande faite «de bonne foi» suffit à obtenir une dérogation. Et ça peut aller très loin. Une enfant de maternelle dont les parents musulmans obligent l’école à lui mettre sur la tête un casque insonorisé pour la prémunir des chants de Noël. Paraît-il que c’est dans leur religion! Un jeune adolescent sikh autorisé à porter le kirpan (un poignard) à l’école après une bataille judicaire qui est allée jusqu’en Cour suprême et a duré quatre ans. Des milliers de dollars pour faire plier une école et renverser deux décisions de justice. Théoriquement, il y a quelques garde-fous. Dans la pratique, les institutions qui refusent les accommodements se font traîner en justice. Ça coûte un fric fou! Ce qu’il faut comprendre par là c’est que les lobbies politico-religieux, riches et puissants, ont trouvé dans les accommodements un boulevard pour défaire ce qui a été chèrement acquis avec la Révolution tranquille. Il me paraissait urgent de proposer une charte de la laïcité pour retrouver le sens du commun. C’est ce que j’ai fait à travers mon engagement au Parti québécois où j’ai obtenu l’appui de deux femmes remarquables, Pauline Marois (ancienne première ministre) et Louise Beaudoin, et de notre ancien premier ministre, le regretté Bernard Landry. Cette loi qui a été adoptée en juin dernier est l’aboutissement d’un long combat. Il est, surtout, une claque à la face du multiculturalisme canadien.

Vous estimez que votre premier essai «Ma vie à contre-Coran», publié en 2009, ne pourrait plus être édité aujourd’hui?

La censure et l’autocensure dans les universités, les médias, le monde culturel sont désormais une réalité qu’il est difficile de déjouer. Nous manquons cruellement d’espace pour la confrontation des idées. Le débat est très mal vu. La recherche permanente d’un consensus valide l’idée selon laquelle la meilleure posture est une moyenne de toutes les postures. Nous n’avons pas de service public digne de ce nom. Nous avons une télévision et une radio d’État, Radio-Canada, au service d’une idéologie: le multiculturalisme qui a expurgé les laïques du débat public. Tout ce qui concerne l’islam et les musulmans relève du tabou. Alors vous imaginez ce livre avec un tel titre? Il y a encore des courageux qui osent. Mais à quel prix? Heureusement que nous avons encore Denise Bombardier et ses collègues du Journal de Montréal pour élargir nos horizons.

La politique menée par Justin Trudeau au Canada est regardée en Europe comme un modèle de tolérance ou, au contraire, comme la quintessence du politiquement correct. Qu’en pensez-vous?

Justin Trudeau est convaincu de la supériorité morale du Canada sur les États-Unis et sur l’Europe. Pour lui, les attentats terroristes islamistes sont le résultat d’une mauvaise intégration des immigrants. Sa devise est simple: il n’y a qu’à être gentil pour susciter les bons sentiments. Sauf que les premiers réseaux terroristes au Canada sont apparus dans les années 1990. Ils étaient l’œuvre d’anciens militants du FIS. Il n’y a plus aucun journaliste pour le rappeler.

Le multiculturalisme est-il devenu un cheval de Troie pour les islamistes?

Tariq Ramadan le considère comme le meilleur système. En 2012, lorsque je me suis présentée aux élections, il a animé un grand meeting, à Montréal, pour appeler ses partisans à me barrer la route. À moi, mes collègues, mon parti. Ceux qui s’étaient faufilés en haut de la liste sont les porte-paroles d’un parti islamo-gauchiste, Québec solidaire, qui n’a plus rien de solidaire. Vous voyez bien que ce n’est pas très différent de la France. La trahison de la gauche communautariste permet aux islamistes de gagner du terrain.


Vulgarisation: Même Hollande s’y était mis (With over 400,000 sold, L’Histoire de France Pour Les Nuls tops sales for non-English Dummies titles)

25 novembre, 2018
Cet ouvrage produira sûrement avec le temps une révolution dans les esprits, et j’espère que les tyrans, les oppresseurs, les fanatiques et les intolérants n’y gagneront pas. Nous aurons servi l’humanité. (…) Parmi quelques hommes excellents, il y en eut de faibles, de médiocres & de tout à fait mauvais. De là cette bigarrure dans l’ouvrage où l’on trouve une ébauche d’écolier, à côté d’un morceau de maître ; une sottise voisine d’une chose sublime, une page écrite avec force, pûreté, chaleur, jugement, raison, élégance au verso d’une page pauvre, mesquine, plate & misérable. Diderot
Imaginez un monde où chaque individu peut accéder gratuitement à la totalité des connaissances de l’humanité. C’est ce que nous voulons faire. Jimmy Wales
Consulter Wikipedia, c’est comme poser des questions à un type rencontré dans un bar. Vous pouvez tomber sur un physicien nucléaire ou… le premier cinglé venu! Paul Vallely
On n’avait pas connu une telle mobilisation, une telle émotion du monde instruit depuis L’Encyclopédie de D’Alembert et Diderot (1772), accusée elle aussi de déposséder les « maîtres » de leur pouvoir. Bruno Le Gendre
Wikipedia est une encyclopédie, et toutes les encyclopédies ont des limites intrinsèques. (…) Les encyclopédies « vous donnent les têtes de chapitre »; elles sont  » le Reader’s Digest de la connaissance en profondeur « . Il y a cinquante ans, l’encyclopédie familiale offrait cette  » notion brute de fonderie sur un nom ou une idée « ; désormais c’est Internet qui joue ce rôle et de plus en plus Wikipedia. (…) Mais faut-il reprocher à Wikipedia l’appétit pour de l’information prédigérée et préparée ou pour la tendance à croire que tout ce qu’on lit est vrai? Ce problème existait déjà à l’époque des encyclopédies familiales. Et une des solutions cruciales est restée la même: Prendre plus de temps à enseigner les limites de toutes les sources d’information, y compris Wikipedia, et à souligner les qualités d’analyse critique des sources primaires et secondaires. (…) Si les historiens croient que ce qu’on trouve gratuitement sur la Toile est de mauvaise qualité, alors nous avons la responsabilité de rendre de meilleures sources d’information disponibles en ligne. Pourquoi autant de nos revues universitaires sont-elles enfermées derrière les grilles de l’abonnement? Que dire de l’American National Biography Online—écrite par des historiens professionnels, soutenue par nos sociétés savantes, et avec des millions de dollars de subventions venant de fondations et de l’Etat? Pourquoi n’est-elle disponible qu’aux bibliothèques qui paient souvent des milliers de dollars par an, plutôt qu’à tout le monde sur la Toile comme l’est Wikipedia? Les historiens professionnels ne devraient-ils pas se joindre à la grande democratisation de l’accès au savoir que reflètent Wikipedia et l’Internet en général? (…) Pourrions-nous, par exemple, écrire à plusieurs mains un manuel d’histoire des EU qui serait en accès libre et gratuit pour tous nos étudiants ? Après tout, les deux douzaines de manuels en usage dans nos universités se recoupent massivement, aussi bien dans les contenus factuels que dans l’interprétation. Malgré tout, cela n’empêche pas chaque éditeur de demander aux auteurs de systématiquement repartir de zéro. Un manuel  » libre  » garantirait non seulement un accès libre à la lecture, mais il permettrait à chacun de contribuer librement à la rédaction. (…) Un enseignant qui n’apprécierait pas la présentation de la guerre de 1812 pourrait écrire une autre version, libre aux autres utilisateurs de l’intégrer ou non à l’ouvrage. De même, un professeur qui estimerait que l’histoire du Nouveau-Mexique au XIXe siècle occupe une place insuffisante pourrait proposer de compléter le chapitre. Roy Rosenzweig
J’aime Renaud sur certains chansons… pas toutes. Celle-là, je ne l’ai pas entendue, donc je ne peux pas vous dire si je l’aime ou pas. Nadine Morano
Déjà, en avril 2011, Nadine Morano, alors invitée de la matinale de Canal+ avait été interrogée sur le constructeur automobiles mais avait répondu à côté… (…) avant d’être reprise par la journaliste, estomaquée. Cette séquence avait animé les médias et les réseaux sociaux à l’époque. Cette fois, c’est la chaîne d’informations franceinfo qui a confondu le chanteur et le constructeur français. En plein sommaire, « Renault recrute 1000 CDI » s’inscrit sur l’écran, tandis que des images de Renaud sur scène sont projetées en arrière-plan. « Renault va embaucher mille personnes en CDI d’ici la fin de l’année. Le constructeur automobile a besoin de main d’oeuvre pour mener à bien ses nouveaux projets. Reportage à suivre dans l’usine de Sandouville » nous dit la journaliste avec aplomb. Un fail – signé du stagiaire de franceinfo ? – qui amuse la toile depuis plusieurs heures déjà... Charts in France
Zadig et Voltaire. C’est une leçon de vie et je m’y replonge d’ailleurs assez souvent. Frédéric Lefebvre
J’avoue sans aucun problème que je n’ai pas du tout le temps de lire depuis deux ans (…) Je lis beaucoup de notes, beaucoup de textes de loi, les nouvelles, les dépêches AFP mais je lis très peu. Fleur Pellerin
Je suis un peu scandalisée quand je lis certaines choses ! Ce n’est pas parce que j’ai dit que je lisais *moins* actuellement – et ça me semble naturel quand on travaille 16 heures par jour – qu’il y a deux ans où je lisais à peu près deux livres par semaine. Et j’entends dire que je suis inculte, je trouve ça proprement scandaleux ! Je n’ai aucune difficulté à le dire, j’ai toujours été une très grande lectrice, et donc faire ce procès je trouve ça absolument lamentable. Je ne vois pas très bien comment on peut s’autoriser à déformer mes propos : j’ai dit que je lisais *moins*, je n’ai pas dit que je ne lisais *pas*. J’ai lu beaucoup pendant mes vacances, je peux faire des fiches de lecture à ceux qui le souhaitent … Voilà, on n’est pas autorisé à raconter n’importe quoi. Fleur Pellerin
La nostalgie, et notamment la nostalgie de l’Algérie française, n’apportera rien de bon. Aujourd’hui, on a besoin de regarder l’avenir avec de l’optimisme et le Front national n’aime pas la France. Le Front national n’est pas un parti républicain, c’est rance, c’est triste. La France, elle a besoin d’optimisme et de regarder son histoire avec lucidité, mais elle a aussi besoin de regarder l’avenir. Je suis mobilisé parce que je ne veux pas que le Front national soit le premier parti de France. Manuel Valls
Nous sommes rentrés dans un monde de puissances, qui se développent à l’échelle planétaire, dans une forme de concurrence et un ordre qui reste à composer. L’Europe est face à un risque : celui de se démembrer par la lèpre nationaliste et d’être bousculée par des puissances extérieures. Et donc de perdre sa souveraineté. C’est-à-dire d’avoir sa sécurité qui dépende des choix américains et de ses changements, d’avoir une Chine de plus en plus présente sur les infrastructures essentielles, une Russie qui parfois est tentée par la manipulation, des grands intérêts financiers et des marchés qui dépassent parfois la place que les États peuvent prendre. (…) Je suis frappé par la ressemblance entre le moment que nous vivons et celui de l’entre-deux-guerres. Dans une Europe qui est divisée par les peurs, le repli nationaliste, les conséquences de la crise économique, on voit presque méthodiquement se réarticuler tout ce qui a rythmé la vie de l’Europe de l’après Première Guerre mondiale à la crise de 1929. Il faut l’avoir en tête, être lucide, savoir comment on y résiste. Emmanuel Macron
Les démons anciens resurgissent, prêts à accomplir leur œuvre de chaos et de mort: des idéologies nouvelles manipulent des religions, l’Histoire menace de reprendre son cours tragique. Emmanuel Macron
Le patriotisme est l’exact contraire du nationalisme : le nationalisme en est la trahison. En disant ‘nos intérêts d’abord et qu’importent les autres !’, on gomme ce qu’une Nation a de plus précieux, ce qui la fait vivre : ses valeurs morales. Emmanuel Macron
Quand je regarde le monde où nous vivons, l’Europe est de plus en plus fracturée. Quand je regarde le monde où nous vivons, vous avez des puissances autoritaires qui réémergent et qui se réarment aux confins de l’Europe. Nous sommes basculés par les tentatives d’intrusion dans le cyberespace et l’intervention d’ailleurs dans notre vie démocratique de plusieurs… Nous nous devons nous protéger à l’égard de la Chine, de la Russie et même des Etats-Unis d’Amérique. Quand je vois le président Trump annoncer il y a quelques semaines le fait qu’ils sortent d’un grand traité de désarmement, qui avait été pris je le rappelle après la crise des euromissiles, au milieu des années 80, qui avaient frappé l’Europe, qui en est la victime principale? L’Europe et sa sécurité. (…) Moi je crois dans un projet d’une Europe souveraine, d’une Europe puissante. On ne protégera pas les Européens si on ne décide pas d’avoir une vraie armée européenne. Face à la Russie qui est à nos frontières et qui a montré qu’elle pouvait être menaçante. Moi, je veux construire un vrai dialogue de sécurité avec la Russie, qui est un pays que je respecte, qui est européen. Mais on doit avoir une Europe qui se défend, davantage seule, sans dépendre seulement des Etats-Unis, et de manière plus souveraine» Emmanuel Macron
Le président Macron vient de suggérer que l’Europe construise sa propre armée pour se protéger contre les Etats-Unis, la Chine et la Russie. Très insultant mais peut-être que l’Europe devrait d’abord payer sa part à l’OTAN que les Etats-Unis subventionnent largement !  Donald Trump
On ne devrait jamais imiter Mitterrand. François Hollande n’est pas Tonton et Manuel Valls n’est pas Max Gallo. En 1983, l’historien, alors porte-parole du gouvernement, publiait à la fin du mois de juillet une tribune de très bonne facture dans Le Monde: «Les intellectuels, la politique et la modernité.» Il y déplorait l’abandon par la gauche de la bataille des idées et le silence des penseurs et des philosophes retirés «sur l’Aventin». Le 5 mars dernier, Manuel Valls lançait à son tour «Où sont les intellectuels? Où sont les grandes consciences de ce pays, les hommes, les femmes de culture qui doivent monter eux aussi au créneau? Où est la gauche?» C’est le même qui, pourtant, rejetait dans les rayons de l’enfer un essayiste, un romancier et un philosophe dont les œuvres cristallisent une large partie des angoisses contemporaines et qui à eux trois vendent des centaines de milliers de livres. Le Suicide français, d’Éric Zemmour, selon Manuel Valls, ne méritait pas d’être lu. La France ça n’est pas «celle de Houellebecq» a-t-il affirmé. Enfin, il s’est embrouillé dans ses fiches, sur Europe 1, en estampillant, malgré lui, Bernard-Henri Lévy comme penseur officiel du régime et en tatouant sur le bras de Michel Onfray le signe infâmant de l’extrême droite. Si l’on comprend bien le premier ministre, le silence des intellectuels est révoltant quand ils sont issus de la gauche morale mais impératif quand ils ont emprunté d’autres chemins. Pour savoir qui doit parler et qui doit se taire, s’adresser à l’hôtel Matignon. Cette approche enfantine illustre la place qu’ont véritablement les intellectuels dans l’esprit du gouvernement (et disons-le de la plus grande part de la droite): des pions noirs ou blancs que des communicants, plus ou moins incultes, placent sur le damier. L’ouvrage de François Bazin,Les Ombres d’un président (Plon),détaille avec cruauté cette paresse et cette indifférence chez François Hollande. La littérature et la vie de l’esprit établissent pourtant des liens indestructibles entre l’homme public et la population. Plus encore que la séance du marché le samedi matin, la lecture de Balzac expose toutes les nuances de l’âme humaine et de l’ambition, celle de Proust des vanités sociales et des intermittences du cœur. Les Particules élémentaires ou Soumission offrent un tableau de la classe moyenne que les sociologues mettront dix ans à établir dans leurs rapports. Mais ceux qui nous gouvernent ou souhaiteraient le faire considèrent le livre comme un meuble. L’ornement secondaire d’une ambition accomplie. Le chef de l’État assume son ignorance et se fait prendre en photo, sourire ravi, avec L’Histoire de France pour les Nuls. Manuel Valls ne sait pas qui est Hélie de Saint Marc, Fleur Pellerin se fout de Modiano, Frédéric Lefebvre confond Zadig et Voltaire, Nicolas Sarkozy s’est longtemps demandé à quoi pouvait bien servir La Princesse de Clèves. Les journalistes, reconnaissons-le, ne sont pas en reste. Ils classent eux aussi les auteurs chez les blancs ou chez les noirs sans même prendre la peine d’ouvrir leur livre. Christophe Guilluy, géographe de gauche qui ne cesse d’essai en essai d’établir les causes de la dérive identitaire, est qualifié de «pousse» de la droite la plus réactionnaire. L’auteur de L’Insécurité culturelle, Laurent Bouvet, alerte la gauche sur ses impensés: il est renvoyé sur l’autre rive parce qu’il a osé évoquer la crise de l’intégration. L’œuvre d’Alain Finkielkraut, maître de l’inquiétude et de la nuance, est réduite au rang de tract pour le Front national. Leurs noms remplissent les listes noires. Contre eux, le lexique olfactif, «rance», «moisi», est exploité jusqu’à la nausée. Tous sont coupables du même crime: plutôt que de peindre une surréalité heureuse, ils livrent par fragments les peurs et les espérances de l’inconscient collectif. En un mot, ils appellent un chat, un chat. Ce que les sondeurs voient venir, à la veille des élections départementales, ils l’annoncent et le déplorent depuis des années. Ils ne se sont pas contentés de publier des essais et d’attendre «sur l’Aventin». Ils supportent les ricanements, les couleurs criardes des studios de télévision, les comiques pas drôles, les critiques jaloux. En vain. Certes, les politiques les reçoivent, les écoutent, les raccompagnent, leur tapotent l’épaule, mais l’idée ne leur est pas encore venue de jeter un œil sur leurs livres. Pas le temps: le rappeur Joey Starr, fondateur de l’inoubliable Nique ta mère, vient dîner à l’Élysée. Vincent Tremolet de Villers
Dans le passé, le patriotisme a été souvent compris comme défense de la liberté politique, qu’il s’agisse de la liberté d’une nation ou d’une autre entité, une cité, une ville, un royaume, une province. Il était classique d’opposer Pétain et De Gaulle sur ce point: le patriotisme du Général De Gaulle l’a conduit à la résistance, alors que le nationalisme du Maréchal Pétain l’a poussé au contraire à la collaboration avec l’Allemagne nazie. Cette opposition, valable pour l’époque, n’est plus très évidente dans le contexte actuel. Le souverainisme n’est pas fasciste par nature, la liberté politique prend parfois un chemin nationaliste, comme on l’a vu à chaque phase de décolonisation ou de fin d’un empire. L’éclatement de l’Union soviétique en plusieurs États-nations en est l’exemple le plus récent. Dans les années 20, De Gaulle avait douté de l’efficacité du Traité de Versailles, aujourd’hui exagérément tenu pour responsable de tous les maux du siècle, parce que, selon le général inquiet, il n’offrait pas assez de garanties contre une remilitarisation de l’Allemagne. L’avenir ne lui a pas donné tort. Aujourd’hui une telle analyse serait probablement qualifiée de nationaliste et non de patriotique. Dans un autre registre, De Gaulle, dirigeant une France active dans le Marché Commun européen de l’époque, n’hésitait pas à utiliser la politique de la «chaise vide» ou des rapports de force. Il semble que ces positions sont nationalistes, tout au moins si l’on suit la définition suggérée par le président Macron dans son discours: «nos intérêts d’abord et qu’importent les autres!» L’opposition entre patriotisme et nationalisme n’est pas nouvelle chez les présidents français: De Gaulle se considérait uniquement comme patriote et rejetait le terme «nationaliste» sur les pétainistes. Quant à Mitterrand, il déclarait d’une part devant le Parlement européen en janvier 1995: «le nationalisme, c’est la guerre!» et parlait quelques mois plus tard, le 8 mai 1995 à Berlin, du patriotisme des soldats allemands pendant la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit, remarquons-le, du «patriotisme» des soldats d’Hitler et d’une armée qui a combattu jusqu’au bout, même quand la guerre était évidemment perdue. Quelle liberté défendaient-ils? Le nationalisme non-violent proclamé et pratiqué par Gandhi apparaît préférable au supposé patriotisme des soldats allemands des années 40. Emmanuel Macron a utilisé cette opposition entre patriotisme et nationalisme devant 70 chefs d’État du monde entier qui parlent des dizaines de langues différentes. Cela pose un vrai problème de traduction. Toutes les langues ne font pas une telle distinction entre «patriotisme» et «nationalisme». Il aurait au moins fallu préciser en quoi le patriotisme se distinguait du nationalisme, ce qui dans de nombreuses langues oblige à distinguer deux sortes de nationalisme. Quant au patriotisme, n’est-il que politique? Une mesure protectionniste, par exemple, est-elle nationaliste ou patriotique? Autre exemple: la défense d’une langue, est-ce nationaliste ou patriotique? Le but du président, si l’on adopte un point de vue plus mondial que provincial dans l’usage des mots, revenait à faire la différence entre un «bon» et un «mauvais» nationalisme, et à faire entrer les dirigeants de certains pays (suivez mon regard…) dans la case des mauvais. (…) Si l’on écoute le discours de Macron avec des oreilles d’historien, ce qu’il tente de faire, c’est de «dégermaniser» ces deux conflits, en attribuant toute la responsabilité à des passions nationalistes très générales, très vagues. On oublie au passage les rivalités entre l’Allemagne et les autres empires coloniaux, en premier lieu le Royaume-Uni et la France. On met Angela Merkel au centre de la cérémonie et «en même temps», on relègue dans l’ombre les Britanniques. Le Brexit a-t-il un rapport avec la Guerre de 14? Pour expliquer sérieusement la Première Guerre et ses atrocités, il faut au minimum parler des nationalismes et des impérialismes. Au pluriel! Quant à la Seconde Guerre mondiale, dans cette perspective, elle se trouve également dégermanisée, présentée comme moment du nazisme, du totalitarisme, apogée du fascisme. Les situations nationales historiques deviennent secondaires au regard de la possibilité du fascisme à toute époque, en tout lieu. Hitler est vu comme un dictateur antisémite à la tête d’un totalitarisme concentrationnaire. Toute continuité avec les politiques de Bismarck ou de Stresemann a disparu. La volonté politique de revanche dans les années 30 n’était pourtant pas le monopole des nazis. Et la rivalité avec le communisme stalinien pour la suprématie mondiale semble n’avoir joué aucun rôle dans la constitution du nazisme comme totalitarisme. C’est pourtant lui qui donnait certains éléments du modèle totalitaire, et non les passions nationalistes ou patriotiques du début du siècle. Dans les millions d’exemplaires de Mein Kampf vendus avant 1933, les thèmes racistes, conspirationnistes et exterminateurs, très nouveaux, voisinent avec la reprise d’une politique de militarisme et d’expansion bien antérieure au nazisme. Et puis il y a des causes imputables aux démocraties européennes et au stalinisme. La France a agi à contretemps: l’intransigeance de Poincaré au début des années 20 n’a pas aidé l’Allemagne de Weimar. Après 1925 c’est l’erreur inverse, et c’est quand l’Allemagne devient revancharde que Briand fait une politique de compromis dépourvue de fermeté. Pire, Staline renvoie dos à dos sociaux-démocrates et nazis, contribuant ainsi à la victoire de ces derniers aux élections de 1933. Il signe un pacte germano-soviétique quelques années plus tard. Toutes ces erreurs à répétition sont une des causes de la guerre de 40. (…) Le monde d’aujourd’hui est tellement différent de celui des années 30! L’économie s’est mondialisée, globalisée, l’Union européenne existe, de nouvelles tensions religieuses sont apparues. (…) Ce genre de comparaison est largement contre-productif. Cela ne permet pas d’identifier les causes spécifiques de la poussée des nationalismes actuels, qui sont entre autres choses, un mouvement de défense économique et d’inquiétude ethnoculturelle. Le nationalisme des années 30 était, au contraire, un nationalisme de conquête et entraînait une compétition aux conséquences impérialistes. Le nationalisme contemporain veut protéger ses frontières, celui des années 30 les franchissait par la force et la guerre. Il existe plusieurs types de nationalismes, comme il existe plusieurs types de démocraties, plusieurs catégories de dictatures, plusieurs sortes d’économie de marché… Le nationalisme de Gandhi n’est pas le nationalisme de Bismarck et celui de Franco n’est pas celui de Mandela. Certains nationalismes sont fascistes et d’autres démocratiques. Si le nationalisme d’aujourd’hui était vraiment celui des années 30, alors cela signifierait l’imminence d’un totalitarisme ou de la dictature sous sa forme la plus brutale. Notons au passage que l’impact du communisme soviétique dans l’Europe des années 30 est toujours oublié ou gommé dans les raccourcis historiques qu’on nous propose. Emmanuel Macron semble faire la critique d’un nationalisme illibéral, qui refuse les droits de l’homme et s’oppose à la démocratie. Le nationalisme qui perce aujourd’hui en Europe ou dans le monde (aux États-Unis, au Royaume-Uni par exemple) s’appuie sur des procédures démocratiques (élections, référendums) et se manifeste comme réaction face aux changements économiques, sociaux et culturels. Qu’est-ce qui doit définir le nationalisme aujourd’hui? Trump ou Poutine? Erdogan ou Bolsonaro? Le Brexit ou le souverainisme écossais? On voit bien qu’une réponse unique est absurde. Se protéger n’est pas toujours méprisable et la compétition sans fin, sans limite, sans frontière n’améliore pas toujours la qualité de la vie. Il faut donc se méfier des oppositions binaires trop creuses, telles qu’«ouvert/fermé», «repli/diversité». S’il ne s’agit pas de propagande, il s’agit au minimum de simplification, non exempte d’intérêts matériels bien cachés. Le capitalisme contemporain s’est paré d’un vernis d’ouverture. Comme si l’ouverture des marchés était le seul véritable cosmopolitisme. Sans parler des dégâts écologiques et toxicologiques induits. Limiter les pires effets du commerce mondialisé n’est ni nationaliste, ni patriotique. Seuls ceux qui s’opposent à toute limitation ont intérêt à les qualifier ainsi. Gil Delannoi
D’un pacifisme à l’autre. En quelques jours, Emmanuel Macron est passé d’Angela Merkel à Philippe Pétain. Il y a une semaine, il voulait un 11 novembre civil, voué à célébrer l’amitié-franco-allemande et voilà qu’il nous ressort le père de la Collaboration. Lui qui, il y a quelques jours encore, prétendait escamoter le souvenir de l’affrontement militaire, pour ne pas fâcher nos amis allemands avec ces sombres rappels, craint aujourd’hui qu’on efface les faits d’armes du vainqueur de Verdun. Entretemps, le président a sans doute remarqué que, dans les rangs de l’armée, l’idée de démilitariser la mémoire de la guerre n’avait pas le succès escompté. Sans doute a-t-il cru se rattraper avec cet hommage aux maréchaux, y compris au moins sortable d’entre eux. Croire que l’on peut câliner les militaires en honorant (même entre autres) celui qui a trahi la patrie qu’ils servent, c’est au minimum désinvolte et au pire insultant. Ce grand écart prouve bien, si besoin était, que la mémoire n’obéit pas aux lois de l’histoire. L’histoire recherche (avec plus ou moins de bonheur) la vérité. La mémoire choisit, hiérarchise, promeut, sacralise ou oublie. En l’occurrence, elle n’a pas très bien choisi. Depuis qu’a éclaté cette nouvelle affaire Pétain, les défenseurs du président se drapent dans la vérité historique et accusent leurs contradicteurs de céder à l’injonction du politiquement correct. Une belle entourloupe. Nul ne conteste que Pétain fut un des artisans de la drôle de victoire de 1918, ni que c’est ce passé qui lui a permis, en 1940, d’accéder à la direction du pays. S’il y a discussion, c’est en réalité, sur le Pétain de 1940, en particulier depuis qu’Eric Zemmour a remis au goût du jour la thèse du glaive et du bouclier. Du reste, aucune discussion ne devrait être interdite quant à l’histoire et son interprétation. Il n’y a pas d’histoire officielle – fût-elle écrite par Paxton. En revanche, il y a bel et bien une mémoire officielle. Et Emmanuel Macron n’est pas prof d’histoire, il est le médiateur privilégié de cette mémoire. « Le futur n’efface pas le passé », affirme l’historien Michel Goya dans Le Figaro. Personne ne veut effacer le passé. Mais le président ne s’est pas contenté de rappeler factuellement la contribution de Pétain à la Grande guerre, ce qui aurait été parfaitement acceptable, il a déclaré qu’il était légitime de l’honorer. Même si on sait qu’il n’a voulu honorer que le vainqueur de Verdun, cette position est difficilement tenable. Simone Veil serait-elle au Panthéon si elle avait tué ou volé ? Sans doute que non. Une vie humaine ne se découpe pas en tranches aussi aisément. Ajoutons qu’aujourd’hui, n’importe quel grand homme suspecté d’avoir troussé trop de jupons serait décrété inéligible à l’hommage de la nation – à l’exception de Johnny Hallyday, mais lui, c’était un artiste… Philippe Pétain a été condamné à l’indignité nationale et, comme me l’apprend l’excellent Jean-Baptiste Roques, de la web-télé La France libre, la première mesure de ses geôliers, après sa condamnation, a été de le priver de son uniforme. Le 15 août 1945, Philippe Pétain a cessé d’être un soldat. Il appartient à l’histoire de l’armée française – car on ne peut pas réécrire l’histoire – pas à sa mémoire. Il en a été effacé au nom du peuple français. Emmanuel Macron n’a pas le pouvoir de l’y réintégrer. Macron (…) voulait-il adresser un clin d’œil au parti zemmourien – non pas que celui-ci soit pétainiste dans l’âme mais parce que beaucoup, en son sein, considèrent que le fait de ne pas partager l’opinion générale au sujet du maréchal (ça il paraît qu’il l’est toujours car maréchal n’est pas un titre militaire) est le comble de l’insolence ? Peut-être a-t-il simplement fait une gaffe. On nous bassine depuis des jours avec son « itinérance mémorielle » – qui a donc inventé un truc aussi ridicule ? On imaginait que des tas de conseillers avaient planché sur le contenu, voire qu’ils s’étaient interrogés sur le traitement à réserver au cas Pétain. Que le président, sur un sujet aussi épineux, se contente d’improviser, c’est un peu fâcheux. (…) Mais pour nombre de lecteurs de Zemmour, comme chez beaucoup de dieudonnistes, agiter le nom de Pétain est d’abord l’une des mille façons d’épater le bourgeois. (…) Ce qui rend la bourde d’Emmanuel Macron passablement agaçante, c’est que, jusque-là, il était un anti-pétainiste de choc, qui multipliait les allusions lourdingues sur le retour des années 30, suivez mon regard. Traquant les miasmes des heures les plus sombres chez ses adversaires populistes, il se campait volontiers en Saint Georges terrassant la nouvelle bête immonde. Et il est vraisemblable qu’il recommencera dès que le 11 novembre sera derrière lui et qu’il entrera en campagne pour les européennes. En somme, Macron voit du pétainisme partout, sauf sur la tombe de Pétain. Reste que la magie qui lui a permis de faire passer son incohérence idéologique pour la pratique du consensuel « en même temps » a cessé d’opérer. « Une cuillère pour Zemmour, une cuillère pour Plenel » (ou en l’occurrence pour Raphaël Glucksmann, nouvel espoir de la gauche), ça ne marche pas. Ça veut juste dire que le président nous prend pour des billes. Elisabeth Lévy
Avant, les spécialistes réputés rechignaient à collaborer avec nous ; aujourd’hui, ce sont eux qui nous sollicitent. Vincent Barbare
Souvenez-vous, cet été, François Hollande en train de lire L’Histoire de France pour les Nuls, pendant ses vacances dans le sud de la France… La photo n’est pas passée inaperçue. « Même Hollande s’y est mis », clamait un article du Nouvel Observateur sur le succès de ce titre, sorti fin 2004 aux Éditions First et vendu, à ce jour, à 430 000 exemplaires. Les Guignols en ont fait leurs choux gras, exhibant la marionnette du premier secrétaire du PS le livre entre les mains ! Une consécration pour l’auteur, Jean-Joseph Julaud, 56 ans, prof d’histoire-géo et de français pendant trente ans dans un collège de Conquereuil (Loire-Atlantique), qui a signé ensuite La Littérature française pour les Nuls et qui vient récemment de rempiler avec La Géographie française pour les Nuls. Il revient de loin, lui dont les élites ont longtemps boudé l’entreprise, sa typographie, son ton potache, et cette façon de prendre constamment le lecteur par la main. For Dummies est né aux États-Unis en 1993 à l’initiative d’un jeune informaticien soucieux de rendre la micro-informatique intelligible aux néophytes. Gros succès, des licences dans le monde entier, du Para Totos portugais au Per Negati italien, et déjà 150 millions d’exemplaires écoulés. Quelques variantes sur le jardinage, le tricot, la santé et le bien-être. Les Éditions First, fondées en 1992, sont justement sur ce créneau. Pourquoi ne pas l’élargir à d’autres domaines de la connaissance, réputés moins accessibles ? « Puisque le concept marchait si bien pour l’informatique, qui représente toujours un quart des ventes de la collection, nous avons eu l’idée de le décliner sur d’autres thèmes, avec des créations spécifiquement françaises », explique Vincent Barbare, PDG des Éditions First pour la France. Au début, l’éditeur américain est sceptique mais La Bible pour les Nuls, qui paraît en 2003 et se vendra à quelque 35 000 exemplaires, le convainc de laisser le champ libre à sa licence française. Laquelle, depuis, a enfoncé le clou, multipliant son chiffre d’affaires par quinze en dix ans (40 millions d’euros en 2006) avec la philosophie (60 000 exemplaires vendus), la mythologie, l’histoire de l’art, la culture générale, l’Égypte ancienne, l’opéra, la franc-maçonnerie, sans oublier la chanson française, dernier ouvrage paru (…) Du reste, bon nombre d’enseignants ont été séduits par la formule, même s’il reste quelques sceptiques. En tout cas, aujourd’hui, les auteurs se bousculent au portillon (…) Avis à François Hollande : un titre sur la politique française est en préparation… Le Figaro
Et si Emmanuel Macron se mettait à L’Histoire pour les nuls ?

A l’heure où, de François Lefebvre à Nadine Morano ou de Manuel Valls à Fleur Pellerin …

Les lapsus ou rares accents de vérité de nos responsables politiques surmenés sur leurs ignorances respectives font les choux gras de nos médias en panne de contenu …

Et où entre une variation sur lexique olfactif du « rance » ou du « moisi …
Un lamento sur « les heures les plus sombres de notre histoire », « le retour des années 30 » ou « la lèpre nationaliste » …
Un appel aux armes à l’Europe contre les cyberattaques russes et chinoises comme américaines …
Ou une leçon d’histoire publique à son principal invité au centenaire même du premier, sans compter les 50 ans de bouclier nucléaire contre l’ours communiste, de ses deux sauvetages du Vieux continent …
Un président français au plus bas dans les sondages  se prend les pieds dans le tapis d’une bien improbable défense du maréchal Pétain
Au moment même où se vérifie presque quotidiennement dans la rue …
Les avertissements d’un Finkielkraut à un Zemmour ou d’un Houellbecq à un Guilluy …
Et sans compter les pestiférés de la famille Le Pen
Des lanceurs d’alerte longtemps voués aux gémonies sur la colère du peuple qui montait …
Comment ne pas regretter …
Cette étrange suspicion qui semble s’attacher après le cas, on s’en souvient, de l’encyclopédie collaborative Wikipedia

A une étonnante et méritante entreprise de vulgarisation …

Qui née aux États-Unis sous le titre de For Dummies mais écrite à l’heure des premiers balbutiements de la micro-informatique voilà 25 ans par des spécialistes à l’instar du jeune informaticien Dan Gookin qui en fut à l’initiative …

Se décline depuis dans tous les domaines et la plupart des grandes langues de la planète …

Et qui avec L’Histoire de France pour les nuls …

Et ses plus de 400 000 titres vendus et l’aide bien involontaire d’un autre président français …
A produit le best-seller non-anglophone absolu de la célèbre collection aux bandes noire et jaune ?
Des Nuls plébiscités
Delphine Peras
le Figaro
15/10/2007

SOUVENEZ-VOUS, cet été, François Hollande en train de lire L’Histoire de France pour les Nuls, pendant ses vacances dans le sud de la France… La photo n’est pas passée inaperçue. « Même Hollande s’y est mis », clamait un article du Nouvel Observateur sur le succès de ce titre, sorti fin 2004 aux Éditions First et vendu, à ce jour, à 430 000 exemplaires. Les Guignols en ont fait leurs choux gras, exhibant la marionnette du premier secrétaire du PS le livre entre les mains ! Une consécration pour l’auteur, Jean-Joseph Julaud, 56 ans, prof d’histoire-géo et de français pendant trente ans dans un collège de Conquereuil (Loire-Atlantique), qui a signé ensuite La Littérature française pour les Nuls et qui vient récemment de rempiler avec La Géographie française pour les Nuls. Il revient de loin, lui dont les élites ont longtemps boudé l’entreprise, sa typographie, son ton potache, et cette façon de prendre constamment le lecteur par la main. For Dummies est né aux États-Unis en 1993 à l’initiative d’un jeune informaticien soucieux de rendre la micro-informatique intelligible aux néophytes. Gros succès, des licences dans le monde entier, du Para Totos portugais au Per Negati italien, et déjà 150 millions d’exemplaires écoulés. Quelques variantes sur le jardinage, le tricot, la santé et le bien-être. Les Éditions First, fondées en 1992, sont justement sur ce créneau.

Derniers titres : L’Histoire de l’art pour les Nuls ; La Géographie française pour les Nuls ; La Mythologiepour les Nuls ; L’Opéra pour les Nuls ; L’Égypte ancienne pour les Nuls ; La Culture générale pour les Nuls (en librairie le 6 décembre) ; Le Rugby pour les Nuls (en librairie le 17 janvier) ; L’Arabe pour les Nuls (14 janvier) et, pour le mois de mars, est annoncée La Politique pour les Nuls.
Voir aussi:

Nationalisme vs. patriotisme : « Il faut se méfier des oppositions binaires »
Paul Sugy
Le Figaro
14/11/2018

FIGAROVOX/ENTRETIEN – Lors de la cérémonie de célébration des 100 ans de l’armistice, à Paris, ce dimanche, Emmanuel Macron a opposé le nationalisme au patriotisme. Mais pour Gil Delannoi, tout n’est pas si simple : ce chercheur rappelle qu’il n’existe pas un, mais des nationalismes, et que celui d’aujourd’hui n’est pas celui des années 30.

Gil Delannoi est docteur en science politique, professeur à Sciences Po et chercheur au CEVIPOF. Il a notamment publié La Nation contre le nationalisme (PUF, 2018).

FIGAROVOX.- Emmanuel Macron a déclaré dimanche, dans son discours de commémoration de l’armistice: «le patriotisme est l’exact contraire du nationalisme: le nationalisme en est la trahison». Que vous inspirent ces propos?

Gil DELANNOI.- Il y a deux façons de comprendre cette phrase: au passé, auquel cas on parle du nationalisme tel qu’il s’est manifesté dans l’histoire, ou alors au présent, et il faudrait en ce cas savoir plus précisément et plus clairement ce qu’Emmanuel Macron désigne par là.

Dans le passé, le patriotisme a été souvent compris comme défense de la liberté politique, qu’il s’agisse de la liberté d’une nation ou d’une autre entité, une cité, une ville, un royaume, une province. Il était classique d’opposer Pétain et De Gaulle sur ce point: le patriotisme du Général De Gaulle l’a conduit à la résistance, alors que le nationalisme du Maréchal Pétain l’a poussé au contraire à la collaboration avec l’Allemagne nazie. Cette opposition, valable pour l’époque, n’est plus très évidente dans le contexte actuel. Le souverainisme n’est pas fasciste par nature, la liberté politique prend parfois un chemin nationaliste, comme on l’a vu à chaque phase de décolonisation ou de fin d’un empire. L’éclatement de l’Union soviétique en plusieurs États-nations en est l’exemple le plus récent.

Dans les années 20, De Gaulle avait douté de l’efficacité du Traité de Versailles, aujourd’hui exagérément tenu pour responsable de tous les maux du siècle, parce que, selon le général inquiet, il n’offrait pas assez de garanties contre une remilitarisation de l’Allemagne. L’avenir ne lui a pas donné tort. Aujourd’hui une telle analyse serait probablement qualifiée de nationaliste et non de patriotique. Dans un autre registre, De Gaulle, dirigeant une France active dans le Marché Commun européen de l’époque, n’hésitait pas à utiliser la politique de la «chaise vide» ou des rapports de force. Il semble que ces positions sont nationalistes, tout au moins si l’on suit la définition suggérée par le président Macron dans son discours: «nos intérêts d’abord et qu’importent les autres!»

L’opposition entre patriotisme et nationalisme n’est pas nouvelle chez les présidents français: De Gaulle se considérait uniquement comme patriote et rejetait le terme «nationaliste» sur les pétainistes. Quant à Mitterrand, il déclarait d’une part devant le Parlement européen en janvier 1995: «le nationalisme, c’est la guerre!» et parlait quelques mois plus tard, le 8 mai 1995 à Berlin, du patriotisme des soldats allemands pendant la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit, remarquons-le, du «patriotisme» des soldats d’Hitler et d’une armée qui a combattu jusqu’au bout, même quand la guerre était évidemment perdue. Quelle liberté défendaient-ils? Le nationalisme non-violent proclamé et pratiqué par Gandhi apparaît préférable au supposé patriotisme des soldats allemands des années 40.

Emmanuel Macron a utilisé cette opposition entre patriotisme et nationalisme devant 70 chefs d’État du monde entier qui parlent des dizaines de langues différentes. Cela pose un vrai problème de traduction. Toutes les langues ne font pas une telle distinction entre «patriotisme» et «nationalisme». Il aurait au moins fallu préciser en quoi le patriotisme se distinguait du nationalisme, ce qui dans de nombreuses langues oblige à distinguer deux sortes de nationalisme. Quant au patriotisme, n’est-il que politique? Une mesure protectionniste, par exemple, est-elle nationaliste ou patriotique? Autre exemple: la défense d’une langue, est-ce nationaliste ou patriotique? Le but du président, si l’on adopte un point de vue plus mondial que provincial dans l’usage des mots, revenait à faire la différence entre un «bon» et un «mauvais» nationalisme, et à faire entrer les dirigeants de certains pays (suivez mon regard…) dans la case des mauvais.

La guerre, en particulier les deux conflits mondiaux du XXe siècle, est-elle seulement imputable au nationalisme?

Non. Si l’on écoute le discours de Macron avec des oreilles d’historien, ce qu’il tente de faire, c’est de «dégermaniser» ces deux conflits, en attribuant toute la responsabilité à des passions nationalistes très générales, très vagues. On oublie au passage les rivalités entre l’Allemagne et les autres empires coloniaux, en premier lieu le Royaume-Uni et la France. On met Angela Merkel au centre de la cérémonie et «en même temps», on relègue dans l’ombre les Britanniques. Le Brexit a-t-il un rapport avec la Guerre de 14? Pour expliquer sérieusement la Première Guerre et ses atrocités, il faut au minimum parler des nationalismes et des impérialismes. Au pluriel! Quant à la Seconde Guerre mondiale, dans cette perspective, elle se trouve également dégermanisée, présentée comme moment du nazisme, du totalitarisme, apogée du fascisme. Les situations nationales historiques deviennent secondaires au regard de la possibilité du fascisme à toute époque, en tout lieu. Hitler est vu comme un dictateur antisémite à la tête d’un totalitarisme concentrationnaire. Toute continuité avec les politiques de Bismarck ou de Stresemann a disparu. La volonté politique de revanche dans les années 30 n’était pourtant pas le monopole des nazis. Et la rivalité avec le communisme stalinien pour la suprématie mondiale semble n’avoir joué aucun rôle dans la constitution du nazisme comme totalitarisme. C’est pourtant lui qui donnait certains éléments du modèle totalitaire, et non les passions nationalistes ou patriotiques du début du siècle. Dans les millions d’exemplaires de Mein Kampf vendus avant 1933, les thèmes racistes, conspirationnistes et exterminateurs, très nouveaux, voisinent avec la reprise d’une politique de militarisme et d’expansion bien antérieure au nazisme.

Et puis il y a des causes imputables aux démocraties européennes et au stalinisme. La France a agi à contretemps: l’intransigeance de Poincaré au début des années 20 n’a pas aidé l’Allemagne de Weimar. Après 1925 c’est l’erreur inverse, et c’est quand l’Allemagne devient revancharde que Briand fait une politique de compromis dépourvue de fermeté. Pire, Staline renvoie dos à dos sociaux-démocrates et nazis, contribuant ainsi à la victoire de ces derniers aux élections de 1933. Il signe un pacte germano-soviétique quelques années plus tard. Toutes ces erreurs à répétition sont une des causes de la guerre de 40.

Tout ramener au nationalisme est un raccourci. Cette interprétation fait s’écrouler plusieurs pans de l’histoire, n’en retient que quelques-uns. Une telle conception de l’amitié est discutable: rappeler les faits n’est en rien un obstacle à la réconciliation, bien au contraire. Entre amis on se doit la vérité, et on prend plaisir au franc-parler. Les guerres sont des compétitions que l’on perd ou gagne d’abord sur le terrain militaire. La France a perdu deux fois sur trois face à l’Allemagne. L’Allemagne a perdu les deux dernières guerres en raison de leur mondialisation. Garder en mémoire les victimes ne doit pas obliger à méconnaître les détails de l’histoire. La paix aujourd’hui ne reproduira pas celle du passé. Ce qui la menace est, au moins, aussi différent que comparable aux dangers du passé.

Emmanuel Macron a également multiplié les références aux années 30 ces derniers jours. Là encore, la comparaison avec aujourd’hui est-elle valable?

Le monde d’aujourd’hui est tellement différent de celui des années 30! L’économie s’est mondialisée, globalisée, l’Union européenne existe, de nouvelles tensions religieuses sont apparues.

On pourrait tout aussi bien comparer la période actuelle avec un bon nombre d’autres époques. Pourquoi pas les années 1900, par exemple? Ce genre de comparaison est largement contre-productif. Cela ne permet pas d’identifier les causes spécifiques de la poussée des nationalismes actuels, qui sont entre autres choses, un mouvement de défense économique et d’inquiétude ethnoculturelle. Le nationalisme des années 30 était, au contraire, un nationalisme de conquête et entraînait une compétition aux conséquences impérialistes. Le nationalisme contemporain veut protéger ses frontières, celui des années 30 les franchissait par la force et la guerre.

Il existe plusieurs types de nationalismes, comme il existe plusieurs types de démocraties, plusieurs catégories de dictatures, plusieurs sortes d’économie de marché… Le nationalisme de Gandhi n’est pas le nationalisme de Bismarck et celui de Franco n’est pas celui de Mandela. Certains nationalismes sont fascistes et d’autres démocratiques. Si le nationalisme d’aujourd’hui était vraiment celui des années 30, alors cela signifierait l’imminence d’un totalitarisme ou de la dictature sous sa forme la plus brutale. Notons au passage que l’impact du communisme soviétique dans l’Europe des années 30 est toujours oublié ou gommé dans les raccourcis historiques qu’on nous propose.

Emmanuel Macron semble faire la critique d’un nationalisme illibéral, qui refuse les droits de l’homme et s’oppose à la démocratie. Le nationalisme qui perce aujourd’hui en Europe ou dans le monde (aux États-Unis, au Royaume-Uni par exemple) s’appuie sur des procédures démocratiques (élections, référendums) et se manifeste comme réaction face aux changements économiques, sociaux et culturels. Qu’est-ce qui doit définir le nationalisme aujourd’hui? Trump ou Poutine? Erdogan ou Bolsonaro? Le Brexit ou le souverainisme écossais? On voit bien qu’une réponse unique est absurde. Se protéger n’est pas toujours méprisable et la compétition sans fin, sans limite, sans frontière n’améliore pas toujours la qualité de la vie. Il faut donc se méfier des oppositions binaires trop creuses, telles qu’«ouvert/fermé», «repli/diversité». S’il ne s’agit pas de propagande, il s’agit au minimum de simplification, non exempte d’intérêts matériels bien cachés. Le capitalisme contemporain s’est paré d’un vernis d’ouverture. Comme si l’ouverture des marchés était le seul véritable cosmopolitisme. Sans parler des dégâts écologiques et toxicologiques induits. Limiter les pires effets du commerce mondialisé n’est ni nationaliste, ni patriotique. Seuls ceux qui s’opposent à toute limitation ont intérêt à les qualifier ainsi. Il faut observer sérieusement et tâcher de comprendre précisément les causes et les effets des nationalismes contemporains, et les relier aux défaillances des sociétés dans lesquelles ils émergent.

Manuel Valls, les intellectuels et l’inculture triomphante


Le Figaro
20/03/2015

FIGAROVOX/ ANALYSE- Plus de trente ans après Max Gallo, Manuel Valls se plaint du silence des intellectuels. Pour Vincent Trémolet de Villers les politiques ne les lisent pas et les utilisent comme des outils de communication.

Vincent Tremolet de Villers est rédacteur en chef des pages Débats/opinions du Figaro et du FigaroVox

On ne devrait jamais imiter Mitterrand. François Hollande n’est pas Tonton et Manuel Valls n’est pas Max Gallo. En 1983, l’historien, alors porte-parole du gouvernement, publiait à la fin du mois de juillet une tribune de très bonne facture dans Le Monde: «Les intellectuels, la politique et la modernité.» Il y déplorait l’abandon par la gauche de la bataille des idées et le silence des penseurs et des philosophes retirés «sur l’Aventin». Le 5 mars dernier, Manuel Valls lançait à son tour «Où sont les intellectuels? Où sont les grandes consciences de ce pays, les hommes, les femmes de culture qui doivent monter eux aussi au créneau? Où est la gauche?» C’est le même qui, pourtant, rejetait dans les rayons de l’enfer un essayiste, un romancier et un philosophe dont les œuvres cristallisent une large partie des angoisses contemporaines et qui à eux trois vendent des centaines de milliers de livres.

Le Suicide français, d’Éric Zemmour, selon Manuel Valls, ne méritait pas d’être lu. La France ça n’est pas «celle de Houellebecq» a-t-il affirmé. Enfin, il s’est embrouillé dans ses fiches, sur Europe 1, en estampillant, malgré lui, Bernard-Henri Lévy comme penseur officiel du régime et en tatouant sur le bras de Michel Onfray le signe infâmant de l’extrême droite.

Si l’on comprend bien le premier ministre, le silence des intellectuels est révoltant quand ils sont issus de la gauche morale mais impératif quand ils ont emprunté d’autres chemins. Pour savoir qui doit parler et qui doit se taire, s’adresser à l’hôtel Matignon. Cette approche enfantine illustre la place qu’ont véritablement les intellectuels dans l’esprit du gouvernement (et disons-le de la plus grande part de la droite): des pions noirs ou blancs que des communicants, plus ou moins incultes, placent sur le damier. L’ouvrage de François Bazin,Les Ombres d’un président (Plon),détaille avec cruauté cette paresse et cette indifférence chez François Hollande.

La littérature et la vie de l’esprit établissent pourtant des liens indestructibles entre l’homme public et la population. Plus encore que la séance du marché le samedi matin, la lecture de Balzac expose toutes les nuances de l’âme humaine et de l’ambition, celle de Proust des vanités sociales et des intermittences du cœur. Les Particules élémentaires ou Soumission offrent un tableau de la classe moyenne que les sociologues mettront dix ans à établir dans leurs rapports. Mais ceux qui nous gouvernent ou souhaiteraient le faire considèrent le livre comme un meuble. L’ornement secondaire d’une ambition accomplie. Le chef de l’État assume son ignorance et se fait prendre en photo, sourire ravi, avec L’Histoire de France pour les Nuls. Manuel Valls ne sait pas qui est Hélie de Saint Marc, Fleur Pellerin se fout de Modiano, Frédéric Lefebvre confond Zadig et Voltaire, Nicolas Sarkozy s’est longtemps demandé à quoi pouvait bien servir La Princesse de Clèves.

Les journalistes, reconnaissons-le, ne sont pas en reste. Ils classent eux aussi les auteurs chez les blancs ou chez les noirs sans même prendre la peine d’ouvrir leur livre. Christophe Guilluy, géographe de gauche qui ne cesse d’essai en essai d’établir les causes de la dérive identitaire, est qualifié de «pousse» de la droite la plus réactionnaire. L’auteur de L’Insécurité culturelle, Laurent Bouvet, alerte la gauche sur ses impensés: il est renvoyé sur l’autre rive parce qu’il a osé évoquer la crise de l’intégration. L’œuvre d’Alain Finkielkraut, maître de l’inquiétude et de la nuance, est réduite au rang de tract pour le Front national. Leurs noms remplissent les listes noires. Contre eux, le lexique olfactif, «rance», «moisi», est exploité jusqu’à la nausée. Tous sont coupables du même crime: plutôt que de peindre une surréalité heureuse, ils livrent par fragments les peurs et les espérances de l’inconscient collectif. En un mot, ils appellent un chat, un chat. Ce que les sondeurs voient venir, à la veille des élections départementales, ils l’annoncent et le déplorent depuis des années. Ils ne se sont pas contentés de publier des essais et d’attendre «sur l’Aventin». Ils supportent les ricanements, les couleurs criardes des studios de télévision, les comiques pas drôles, les critiques jaloux. En vain. Certes, les politiques les reçoivent, les écoutent, les raccompagnent, leur tapotent l’épaule, mais l’idée ne leur est pas encore venue de jeter un œil sur leurs livres. Pas le temps: le rappeur Joey Starr, fondateur de l’inoubliable Nique ta mère, vient dîner à l’Élysée.

Voir également:

Hélie de Saint Marc,l’honneur d’un commandant

Etienne de Montety

Le Figaro
16/03/2015

FIGAROVOX/TRIBUNE – Robert Ménard a rebaptisé ce samedi l’une des rues de Béziers «Commandant Hélie Denoix de Saint Marc», honneur qui a suscité l’indignation de la gauche. Ce dernier était pourtant une grande figure de l’histoire militaire française rappelle Etienne de Montety.

Journaliste et écrivain, Etienne de Montety est directeur du Figaro Littéraire.

Le maire de Béziers a inauguré samedi une rue Hélie Denoix de Saint Marc. L’électorat pied-noir, nombreux dans cette ville, a certainement été sensible à ce geste qui met à l’honneur une figure des dernières heures de la présence française en Algérie. La gauche, elle, s’est indignée. Manuel Valls a commenté la cérémonie: «C’est rance, c’est triste» et Stéphane Le Foll dénoncé «la nostalgie de l’Algérie française».

«Rance», «nostalgie», des mots qui conviennent bien mal à la personnalité du commandant de Saint Marc. Né en 1922, il était entré très jeune dans la Résistance (réseau Jade Amicol). Est-il rance ce geste de révolte, cet engagement courageux qui lui valut d’être arrêté par la police allemande et déporté à Buchenwald où il passera dix-huit mois dans un des pires satellites du camp, Langenstein?

«Les justes mouraient comme des chiens, écrira-t-il plus tard dans ses Mémoires. Les crapules avaient leur chance (…). Dans ma chute, j’ai éprouvé la validité de quelques attitudes éthiques élémentaires: refuser la lâcheté, la délation, l’avilissement.»

Après la Libération, il choisira la carrière des armes, servant en Indochine et en Algérie. En désaccord avec la politique du général de Gaulle -notamment le choix du FLN comme unique interlocuteur des négociations pour l’indépendance-, il entraîna le 1er régiment étranger de parachutistes dans la sédition, en rejoignant les généraux du putsch d’Alger. Il paiera cet acte d’une condamnation de dix ans de réclusion. À son procès, de nombreux observateurs comme Jean Daniel, Jacques Duquesne, Gilles Perrault furent frappés par sa personnalité lumineuse et sa hauteur de vues. Sa déclaration devant le tribunal militaire en avait saisi plus d’un: «Depuis mon âge d’homme, Monsieur le Président, j’ai vécu pas mal d’épreuves: la Résistance, la Gestapo, Buchenwald, trois séjours en Indochine, la guerre d’Algérie, Suezet puis, encore, la guerre d’Algérie…»Il n’était ni un idéologue, ni un factieux.

Fut-il nostalgique l’homme qui, tournant le dos à tout militantisme, se lança dans l’écriture de livres (avec le concours de son neveu l’éditeur Laurent Beccaria) qui rencontrèrent un large public? Leur qualité valut à l’un d’eux, Les Champs de braises, de recevoir le prix Femina. Et l’armée française lui décerna son prix littéraire Erwan-Bergot. À la même époque, Saint Marc prononça des centaines de conférences. À chaque fois, son auditoire était frappé par son souci de faire des événements qu’il avait vécus un récit apaisé. Il parlait posément de sa vie, de ses passions, de ses doutes, de ses contradictions, sans que jamais n’affleure l’esprit de revanche. Son message évoquait souvent la résistance, c’est-à-dire un état d’esprit face à l’oppression ou à des ordres qui heurtent manifestement la conscience de l’homme. L’actualité du monde (terrorisme islamique, menace technologique, dérives médicales) donnait à ses propos une résonance exceptionnelle.

Un moment important de la vie d’Hélie de Saint Marc avait été ce jour de septembre 1982 où il avait été réintégré dans ses droits; ses décorations lui avaient été restituées. Cette réhabilitation, il la devait à un personnage qui a façonné François Hollande et que tout le PS révère: c’était le président Mitterrand. En novembre 2011, par les mains du président Nicolas Sarkozy, la République française l’avait fait grand-croix de la Légion d’honneur.

À ses obsèques à Lyon, en août 2013, se pressaient tous les corps constitués de l’État, au premier rang desquels le sénateur maire de la ville, Gérard Collomb, qui salua alors «une figure d’une extrême intégrité, un être authentique habité d’un humanisme profond». Honneurs, décorations, reconnaissances: Hélie de Saint-Marc n’était cependant pas dupe des grandeurs d’établissements:«Je cherche constamment à décaper sur mon visage, écrivait-il, le fard insensible qui vient à ceux qui accède à une petite renommée, ceux qu’on mentionne en note dans les livres d’histoire (…). Je me souviens du Revier de Langenstein, de la cellule de Tulle et d’une chambre d’hôpital la nuit. Là, j’ai rencontré la vérité de mon destin.» Rance? Nostalgique?

Manuel Valls et Stéphane Le Foll devraient s’inspirer du conseil qu’Hélie de Saint Marc donnait à ses jeunes lecteurs: «comprendre avant de juger».

Voir de même:

Macron voit du pétainisme partout… sauf sur la tombe de Pétain
La mémoire n’obéit pas aux lois de l’histoire. En trouvant « légitime » d’honorer le Pétain de la Grande guerre, Emmanuel Macron a fauté.
Elisabeth Lévy
Causeur
9 novembre 2018

D’un pacifisme à l’autre. En quelques jours, Emmanuel Macron est passé d’Angela Merkel à Philippe Pétain. Il y a une semaine, il voulait un 11 novembre civil, voué à célébrer l’amitié-franco-allemande et voilà qu’il nous ressort le père de la Collaboration. Lui qui, il y a quelques jours encore, prétendait escamoter le souvenir de l’affrontement militaire, pour ne pas fâcher nos amis allemands avec ces sombres rappels, craint aujourd’hui qu’on efface les faits d’armes du vainqueur de Verdun. Entretemps, le président a sans doute remarqué que, dans les rangs de l’armée, l’idée de démilitariser la mémoire de la guerre n’avait pas le succès escompté. Sans doute a-t-il cru se rattraper avec cet hommage aux maréchaux, y compris au moins sortable d’entre eux. Croire que l’on peut câliner les militaires en honorant (même entre autres) celui qui a trahi la patrie qu’ils servent, c’est au minimum désinvolte et au pire insultant.

Les choix de bois
Ce grand écart prouve bien, si besoin était, que la mémoire n’obéit pas aux lois de l’histoire. L’histoire recherche (avec plus ou moins de bonheur) la vérité. La mémoire choisit, hiérarchise, promeut, sacralise ou oublie. En l’occurrence, elle n’a pas très bien choisi. Depuis qu’a éclaté cette nouvelle affaire Pétain, les défenseurs du président se drapent dans la vérité historique et accusent leurs contradicteurs de céder à l’injonction du politiquement correct. Une belle entourloupe. Nul ne conteste que Pétain fut un des artisans de la drôle de victoire de 1918, ni que c’est ce passé qui lui a permis, en 1940, d’accéder à la direction du pays. S’il y a discussion, c’est en réalité, sur le Pétain de 1940, en particulier depuis qu’Eric Zemmour a remis au goût du jour la thèse du glaive et du bouclier. Du reste, aucune discussion ne devrait être interdite quant à l’histoire et son interprétation. Il n’y a pas d’histoire officielle – fût-elle écrite par Paxton.

Pétain appartient à l’histoire, pas à la mémoire
En revanche, il y a bel et bien une mémoire officielle. Et Emmanuel Macron n’est pas prof d’histoire, il est le médiateur privilégié de cette mémoire. « Le futur n’efface pas le passé », affirme l’historien Michel Goya dans Le Figaro. Personne ne veut effacer le passé. Mais le président ne s’est pas contenté de rappeler factuellement la contribution de Pétain à la Grande guerre, ce qui aurait été parfaitement acceptable, il a déclaré qu’il était légitime de l’honorer. Même si on sait qu’il n’a voulu honorer que le vainqueur de Verdun, cette position est difficilement tenable. Simone Veil serait-elle au Panthéon si elle avait tué ou volé ? Sans doute que non. Une vie humaine ne se découpe pas en tranches aussi aisément. Ajoutons qu’aujourd’hui, n’importe quel grand homme suspecté d’avoir troussé trop de jupons serait décrété inéligible à l’hommage de la nation – à l’exception de Johnny Hallyday, mais lui, c’était un artiste… Philippe Pétain a été condamné à l’indignité nationale et, comme me l’apprend l’excellent Jean-Baptiste Roques, de la web-télé La France libre, la première mesure de ses geôliers, après sa condamnation, a été de le priver de son uniforme. Le 15 août 1945, Philippe Pétain a cessé d’être un soldat. Il appartient à l’histoire de l’armée française – car on ne peut pas réécrire l’histoire – pas à sa mémoire. Il en a été effacé au nom du peuple français. Emmanuel Macron n’a pas le pouvoir de l’y réintégrer.

Les limites de la com’
Macron savait-il que ses propos ne seraient pas disséqués avec minutie mais résumés, rapportés et évidemment déformés pour devenir une sorte de réhabilitation générale ? Autrement dit, voulait-il adresser un clin d’œil au parti zemmourien – non pas que celui-ci soit pétainiste dans l’âme mais parce que beaucoup, en son sein, considèrent que le fait de ne pas partager l’opinion générale au sujet du maréchal (ça il paraît qu’il l’est toujours car maréchal n’est pas un titre militaire) est le comble de l’insolence ? Peut-être a-t-il simplement fait une gaffe. On nous bassine depuis des jours avec son « itinérance mémorielle » – qui a donc inventé un truc aussi ridicule ? On imaginait que des tas de conseillers avaient planché sur le contenu, voire qu’ils s’étaient interrogés sur le traitement à réserver au cas Pétain. Que le président, sur un sujet aussi épineux, se contente d’improviser, c’est un peu fâcheux.On l’a abondamment rappelé, Macron n’est pas le premier à vouloir honorer le héros de Verdun – ni à susciter la polémique en le faisant. Rappelons cependant que De Gaulle devait bien faire avec les Français tels qu’ils étaient – vichysso-résistants comme l’a dit un historien. Ceux d’aujourd’hui ont été déniaisés. Il doit bien rester quelques vrais maréchalistes parmi les ex-partisans de l’Algérie française – et c’est peut-être la raison pour laquelle on attend toujours une réaction de Marine Le Pen. Mais pour nombre de lecteurs de Zemmour, comme chez beaucoup de dieudonnistes, agiter le nom de Pétain est d’abord l’une des mille façons d’épater le bourgeois.

« Une cuillère pour Zemmour, une cuillère pour Plenel »
Ce qui rend la bourde d’Emmanuel Macron passablement agaçante, c’est que, jusque-là, il était un anti-pétainiste de choc, qui multipliait les allusions lourdingues sur le retour des années 30, suivez mon regard. Traquant les miasmes des heures les plus sombres chez ses adversaires populistes, il se campait volontiers en Saint Georges terrassant la nouvelle bête immonde. Et il est vraisemblable qu’il recommencera dès que le 11 novembre sera derrière lui et qu’il entrera en campagne pour les européennes. En somme, Macron voit du pétainisme partout, sauf sur la tombe de Pétain. Reste que la magie qui lui a permis de faire passer son incohérence idéologique pour la pratique du consensuel « en même temps » a cessé d’opérer. « Une cuillère pour Zemmour, une cuillère pour Plenel » (ou en l’occurrence pour Raphaël Glucksmann, nouvel espoir de la gauche), ça ne marche pas. Ça veut juste dire que le président nous prend pour des billes.

Voir encore:

The For Dummies Success Story

Gaining notice and garnering popularity quickly after the series’ introduction, For Dummies has become a widely recognized and regarded companion around the world — a personal or professional friend who’s not only informative and reliable, but also downright fun.

Starting with the publication of DOS For Dummies in November 1991, For Dummies products have shown millions how to make the most of their PCs, get on the Internet, and explore the world of Windows.

Now — with more than 150 million books in print — For Dummies products show you how to do everything — cook, garden, manage finances, run a business, plan a trip, exercise, and eat right.

The inspiration

In 1987, new technologies were popping up all over the place. But computer manuals were dull and difficult to understand. A frustrated customer in a computer store, who knew nothing about computers, was looking for a simple, basic book about the difficult DOS operating system. « Something, » he suggested, « like DOS for dummies. » We knew the man’s frustration was shared by many other computer users, and we set out to do something about it. Thus, the For Dummies phenomenon began.

From the start, For Dummies was a simple, yet powerful concept: Relate to the anxiety and frustration that people feel about technology by poking fun at it with books that are insightful and educational and make difficult material interesting and easy. Add a strong dose of personality, a dash of comic relief with entertaining cartoons, and — voilá — you have a For Dummies book.

The presses roll

In November 1991, DOS For Dummies by Dan Gookin was initially met with skepticism — most bookstore chains didn’t want to carry the book at all, claiming that the title insulted their customers and readers in general. But we responded to the critics by calling the title a « term of endearment » that readers would immediately relate to and identify with. After convincing the bookstores to give us a chance, consumers agreed.

Onward and upward

And the For Dummies experience just keeps expanding! For Dummies now covers virtually all topics, including Flipping Houses For Dummies, Manga For Dummies, eBay For Dummies, Blogging For Dummies,  and even Food Allergies For Dummies. For Dummies tackles any topic that’s complex, confusing, intimidating, or conjures up any feelings of anxiety. What’s more, For Dummies books are now translated into over 30 languages.

Today, the For Dummies impact extends beyond the printed word — into the realms of software, videos, and Dummies.com.

Voir également:

Books for Dummies
Sean Green
Bossier press
October 28, 2013

I guess you could say I was judging a book by its cover when I first saw the “Books for Dummies” series. I had some serious doubts about the publisher’s approach to getting the message across. After all, who would pick up a book written for Dummies? Well come to find out a huge number of people did and still do.

The series was first created in 1991, to help readers with computer related topics. They were such a hit that before long there was an extensive list of titles on a wide variety of subjects being offered. The statistics I found on dummies.com are impressive.

“Books for Dummies.” More than 1,800: With books covering everything from A+ certification to the Zune, it’s not surprising that the “For Dummies” series boasts such a large number of titles – and the list just keeps on growing!

More than 250 million: That’s how many “For Dummies” books are in print today – a far cry from those DOS days. Just 7,500: This relatively small number is how many copies of “DOS For Dummies,” the first book in the series, were printed back in 1991.

More than 30: Dummies truly is a global phenomenon, with books having been translated into this many languages, including Arabic, Estonian, Greek, Russian, and Vietnamese.

(http://www.dummies.com/Section/Ten-or-So-Eye-Popping-Statistics.id-420239.html)

“iPad Apps for Kids For Dummies” by Jinny Gudmundsen; “Kindle Fire HD For Dummies” by Nancy Muir; “French All-in-one For Dummies” by Eliane Kurbegov; and “Small Business For Dummies” by Tyson, Eric are just a few of the many titles the library owns in the series. In addition, electronic resources are available to download from the library website at http://www.bossierlibrary.org.

Each book is written by specialists in their field. The easy to follow format is concise, provides tips for the reader, things to remember, warnings, illustrations, and technical stuff. Students can take advantage of the cheat sheet feature found at http://www.dummies.com/cheatsheet and print out a study guide. The website also offers “videos, step-by-step examples, how-to-articles, and shopping.”


Grievance studies: Quelle folie identitaire ? (As it leaks into other fields like education, social work, media, psychology and sociology, corrupt scholarship undermines the legitimacy and reputations of universities, skews politics, drowns out needed conversations and pushes the culture war to ever more toxic and existential polarization, US researchers warn)

6 octobre, 2018
Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre; je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. Car je suis venu mettre la division entre l’homme et son père, entre la fille et sa mère, entre la belle-fille et sa belle-mère; et l’homme aura pour ennemis les gens de sa maison. Jésus (Matthieu 10 : 34-36)
Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme; car tous vous êtes un en Jésus Christ. Paul (Galates 3: 28)
Le monde moderne n’est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu’un dispositif religieux est brisé (comme le fut le christianisme pendant la Réforme), ce ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les vertus le sont aussi, et elles errent plus férocement encore en faisant des ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé des vieilles vertus chrétiennes virant à la folie.  G.K. Chesterton
L’inauguration majestueuse de l’ère « post-chrétienne » est une plaisanterie. Nous sommes dans un ultra-christianisme caricatural qui essaie d’échapper à l’orbite judéo-chrétienne en « radicalisant » le souci des victimes dans un sens antichrétien. René Girard
Vous allez dans certaines petites villes de Pennsylvanie où, comme ans beaucoup de petites villes du Middle West, les emplois ont disparu depuis maintenant 25 ans et n’ont été remplacés par rien d’autre (…) Et il n’est pas surprenant qu’ils deviennent pleins d’amertume, qu’ils s’accrochent aux armes à feu ou à la religion, ou à leur antipathie pour ceux qui ne sont pas comme eux, ou encore à un sentiment d’hostilité envers les immigrants. Barack Obama (2008)
Pour généraliser, en gros, vous pouvez placer la moitié des partisans de Trump dans ce que j’appelle le panier des pitoyables. Les racistes, sexistes, homophobes, xénophobes, islamophobes. A vous de choisir. Hillary Clinton
J’entends des voix apeurées qui nous appellent à construire des murs. Plutôt que des murs, nous voulons aider les gens à construire des ponts. Mark Zuckerberg
The scholars promoting this concept claim that it is a microaggression even when someone says “I don’t see you as black,” or claims to be colorblind, or purports not to be a sexist, or in general doesn’t “acknowledge” one’s race membership or gender. But let’s face it — it’s considered racist for whites to treat any trait as “black.” If we accept that, then we can’t turn around and say they’re racists to look at black people as just people. That particular aspect of the microaggression notion seems fixed so that whites can’t do anything right. One can’t help sensing a notion that this would be perhaps “payback” for whites and the nasty society they stuck us with. But all it does is create endless conflict, under an idea that basically being white is, in itself, a microaggression. That, however, is neither profound nor complex — it’s just bullying disguised as progressive thought. Let’s call it microaggression when people belittle us on the basis of stereotypes. Creating change requires at least making sense. John McWorther
Il n’y a pas longtemps, l’apartheid régnait en Afrique du sud. Reposant sur la ségrégation des Noirs, il voulait se disculper en créant des bantoustans où une autonomie factice leur était concédée. Un tel système a heureusement disparu. Et voici qu’aujourd’hui, c’est un apartheid d’un nouveau genre qui est proposé à la France, une ségrégation à l’envers grâce à laquelle les « dominés » préserveraient leur dignité en se mettant à l’abri des « dominants ». Mais alors, cela veut dire qu’une femme qui ôte le voile et sort dans la rue deviendrait une proie normale ? Cela veut dire qu’une « race » qui côtoie les autres serait humiliée ? Cela veut dire qu’une religion qui accepte de n’être qu’une parmi d’autres perdrait la face ? (…) À quoi peut donc servir ce ségrégationnisme nouvelle manière ? Doit-il seulement permettre aux soi-disant « dominés » de sauvegarder leur pureté en vivant entre eux ? N’a-t-il pas surtout pour but d’affirmer la sécession avec la communauté nationale, avec ses lois et ses mœurs ? N’est-il pas l’expression de la haine la plus caractérisée à l’égard de notre pays et de la démocratie ? Que chacun vive dans la loi de sa communauté ou de sa caste et dans le mépris de celle des autres, que chacun ne soit jugé que par les siens, cela est contraire à l’esprit de la République. Celle-ci a été fondée sur le refus de droits privés s’appliquant à des catégories spécifiques et exclusives, autrement dit sur l’abolition des privilèges. Les mêmes lois pour chacun de nous, voilà ce que nous garantit au contraire la République. C’est ce qu’on appelle tout simplement la Justice. Le nouveau séparatisme avance masqué. Il veut paraître bénin, mais il est en réalité l’arme de la conquête politique et culturelle de l’islamisme. L’islamisme veut être à part car il rejette les autres, y compris les musulmans qui ne partagent pas ses vues. L’islamisme déteste la souveraineté démocratique car elle lui refuse toute légitimité. L’islamisme se sent humilié lorsqu’il ne domine pas. Manifeste contre le séparatisme islamique
Récapitulons : Donald Trump est la vulgarité incarnée. Viktor Orban menace la démocratie. Le premier entache les États-Unis de ses comportements grossiers. Le second viole, en Hongrie, l’indépendance de la justice et la liberté de la presse. Ce tableau est brossé, en France, par la Macronie et ses médias. Pourtant, c’est le chef de l’État qui a longtemps fait obstacle à la nomination du nouveau procureur de Paris : trois candidats à la succession de François Molins, proposés par la Chancellerie, ont d’abord été retoqués par l’Élysée en dépit des usages. Le Parquet national financier, qui a sonné l’hallali contre François Fillon en 2017, a toujours ses liens avec l’exécutif. Quant à la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, elle a assigné à l’audiovisuel public la mission de « changer les mentalités sur le terrain » et de « devenir le miroir de nos différences  ». France Culture vient d’ailleurs de remercier l’impertinent Michel Onfray. Le gouvernement rêve aussi de mettre l’Internet, refuge des dissidents, sous surveillance… Bref, Emmanuel Macron reproche à Orban ce qu’il pratique. La pensée dominante en rajoute dans l’obligation de bêler en chœur, lorsqu’elle dénonce les récalcitrants comme des ennemis du Bien. Quant à ceux qui accablent Trump, ils ne voient rien de la métamorphose de Macron. Il a été salué pour avoir su se glisser, avec talent et élégance, dans les habits de président. Or, depuis, un Dorian Gray s’ébauche derrière le personnage fiévreux et transgressif. « Alexandre Benalla n’est pas mon amant  », croit utile de préciser, en juillet, le chef de l’État pour démentir un ragot sur son garde du corps. Imaginer le général de Gaulle se prêter à une telle confidence donne la mesure de l’effondrement de la politique. Pour avoir abandonné sa posture « jupitérienne », voilà le président prêt à tout pour faire peuple. À côté, Nicolas Sarkozy et François Hollande incarneraient presque la sophistication. Et c’est Trump qui, par contraste, se montre respectable. « Le pouvoir ressemble au Titanic, dont le ministre de l’Intérieur vient de s’échapper mardi. Le naufrage sera difficile à éviter. Les premiers effets du revirement dans la communication élyséenne viennent d’ailleurs de produire une image désastreuse, samedi, à Saint-Martin, aux Antilles. Une photo, prise dans la moiteur d’une HLM, montre le président en bras de chemise entouré, amusé, de deux jeunes Antillais. Celui qui est à sa droite, contre qui le président colle son épaule, est torse nu. Son pantalon largement baissé laisse voir son caleçon. Le petit voyou fait un doigt d’honneur. Celui qui est à sa gauche, casquette à l’envers, vêtu d’un débardeur blanc, s’est présenté comme braqueur tout juste sorti de prison. Tout est vulgaire: la désinvolture des deux cousins, la complicité ambiguë du président. L’image en rappelle une autre, prise à l’Élysée, en juin, lors de la Fête de la musique: le couple Macron pose, entouré du groupe techno Kiddy Smile. Les artistes se revendiquent «fils d’immigrés, noirs et pédés». Ils portent des shorts et des maillots en résille. La Macronie perd pied, en voulant voir du racisme dans les critiques portées contre ces attitudes présidentielles. Lundi, la secrétaire d’État, Marlène Schiappa, a qualifié Marine Le Pen de «leader d’un grand parti raciste, d’extrême droite» au prétexte que la présidente du RN avait jugé la photo antillaise «impardonnable». Le député LaREM, Aurélien Taché, estime que «tous ceux qui polémiquent ne supportent tout simplement pas que la France, à tous les niveaux, change de visage». En fait, le racolage ethnique auquel se prête le chef de l’État ressemble à une ode au grand remplacement racialiste. Il est loisible de voir un deux poids deux mesures dans la réaction de Macron quand, le 18 juin dernier à Paris, il rabroue un Gavroche qui venait de l’appeler «Manu»: «Tu te comportes comme il faut. Il faut que tu m’appelles Monsieur le président de la République, ou Monsieur, d’accord?» Faut-il comprendre que le Noir serait dispensé des codes exigés du Blanc? Le sommet de l’État ne tourne plus rond. (…) Du prophète exalté qui disait incarner le nouveau monde, il ne reste qu’un masque tombé à terre. Le contraste est saisissant entre la machine de guerre savamment élaborée par Macron et les siens pour accéder au pouvoir, et l’état d’impréparation que révèle la démission de Collomb. Le vide est tel, au cœur du pouvoir, que l’intérim a dû être confié au premier ministre. Il est vrai que les dossiers de l’Intérieur – immigration, islam, violence, terrorisme – ont été de ceux que le macronisme a abandonnés aux populistes, pour leur plus grand profit. Mercredi, lors de la passation de pouvoir avec Édouard Philippe, Collomb a évoqué la situation «très dégradée» des quartiers difficiles: «On vit côte à côte, je crains que demain on ne vive face à face.» Mais cela fait longtemps que l’affrontement s’enracine entre deux France, deux peuples, deux civilisations que tout sépare. Le braqueur Redoine Faïd, interpellé mercredi à Creil (Oise), passait inaperçu sous une burqa, en dépit de la loi interdisant ce voile intégral ; il est devenu banal dans les cités. Macron perpétue la démission de l’État. Shahnourh Varinag Aznavourian s’était fait appeler Charles Aznavour, en hommage à la France qui avait accueilli ses parents arméniens. «J’ai abandonné une grande partie de mon arménité pour être français. Il faut le faire, ou il faut partir», avait-il expliqué en 2013. La mort du chanteur, lundi, devrait être un hommage à l’assimilation. Ivan Rioufol
A la fin, Gérard Collomb a réalisé qu’il n’y arriverait pas ; que la situation sécuritaire de la France était telle que lui, le ministre, n’aurait pas la force de conduire ses troupes à cette dure bataille. En prime, à Lyon, une amorce de fronde à l’idée de son retour… Mais voici l’essentiel : chez les hauts cadres du ministère de l’Intérieur, chez les patrons et chefs syndicalistes de la police, chez les officiers supérieurs de la gendarmerie, la nuit-cauchemar de la victoire française en coupe du monde de foot, le 16 juillet passé, a servi de brutal révélateur ; a ouvert les yeux des plus naïfs partisans du vivre-ensemble. Oh bien sûr, le bon peuple est resté dans l’ignorance de ce que fut cette nuit chaotique. Au nom de la « diversité » et de l' »inclusion », les médias des milliardaires et les radios du « service public » ont, tant qu’ils l’ont pu, préservé le « sacre de l’équipe de France ». « Quelques incidents à déplorer…des débordements et dégradations… La fête a mal tourné… Des gestes festifs ont parfois dérivé…  » : ce soir là, euphémismes et propos édulcorants ont inondé ces médias. Mais sur le terrain, une « ambiance bon enfant », vraiment ? A Lyon, Paris, Caen, Marseille, Rouen, Grenoble, Chambéry, Aix-Les-Bains, Nice Vallauris, Menton, Toulouse, Caen, Honfleur, Mulhouse, Strasbourg, Saint-Louis, Nantes, Lille, etc., des bandes déchainées brûlent des voitures par dizaines, « sèment la désolation », transforment les centres de vingt villes en « zones de guerres ». Les racailles assaillent les policiers, agressent des filles et frappent celles qui résistent, incendient des boutiques et des commissariats au Cocktail-Molotov. Un magistrat lyonnais dénonce une « véritable guérilla urbaine ». Des fêtards sont dévalisés ou lynchés dans les rues, des boutiques pillées, du mobilier urbain détruit. Les Champs-Elysées semblent avoir subi un tsunami. En plein tumulte criminel, les pompiers et les Samu passent une nuit d’enfer, leurs véhicules de secours aux victimes parfois hors d’usage. Des journalistes filmant l’émeute sont roués de coup et finissent aux urgences. Et le football là dedans ? Les émeutiers s’en balancent, bien sûr : ce sont pour l’essentiel les mêmes qui, au stade, sifflent l’équipe de France et le drapeau français. Pour eux, le plaisir est dans l’émeute, la force de la bande – montrer qui domine le territoire ; d’ineptes sociologues osant encore parler de « violences gratuites », quand la plupart des interpellés sont  » déjà connus de la justice pour vols, violences sur dépositaires de l’ordre public, dégradations de véhicules, etc. » Cette nuit là, tous les responsables de la sécurité publique de France – ministre en tête – réalisent que les réformettes genre « police de proximité » vont à l’échec. Regardons la liste des « quartiers de reconquête républicaine de 2018-2019 » : en région parisienne, c’est une litanie des pires coupe-gorge défrayant la chronique criminelle depuis des décennies : Sarcelles-Lochères… La Dame-Blanche à Garges-les-Gonesse… Le Luth à Gennevilliers… Les Hauts d’Asnières… Le Gros-Saule à Aulnay… Les Beaudottes à Sevran… La ZSP-Torcy… Le Cours du Luzard à Noisiel… les Merisiers à Trappes… Le Bois-L’Abbé et les Mordacs à Champigny… Les Tarterêts à Corbeil… Paris-La Chapelle… Des sites-cauchemar de la « Politique de la Ville », mi-Cours des miracles, mi-Pistes Ho-chi-Minh, d’où l’ordre républicain s’est évanoui depuis parfois un demi-siècle ; où notoirement, des gangs criminels font la loi ; où des policiers et pompiers, attirés dans des embuscades, sont lynchés plus souvent qu’à leur tour. Or sans moyens massifs, la « police de sécurité du quotidien » du ministère de l’intérieur n’est qu’un risible cache-misère : saupoudrage de policiers, effilochés dans le temps… constant usage du « déshabiller Pierre pour habiller Paul »… Des gadgets high-tech (des tablettes) pour abolir un enracinement criminel de parfois cinquante ans…. Ce, quand un récent rapport sénatorial dénonce le profond malaise de forces de sécurité intérieure, démotivées et découragées. Déclassement, dénuement matériel, véhicules et parc immobilier « en état critique » : voilà l’armée de l’Intérieur censée – sans rire – « construire une société rassemblée et apaisée ». Mais le quotidien des flics du terrain, c’est plutôt « une policière tabassée devant sa fille de trois ans par un dealer et son frère » – et une préoccupante vague de suicides. Coup de grâce : Le 30 septembre, le président Macron donne un entretien d’une page et demie au Journal du Dimanche. « Face à la tempête »… mais pas une seule fois, un seul mot sur la sécurité ou quoi que ce soit d’approchant. Vous êtes ministre de l’Intérieur et votre président oblitère totalement la sécurité comme problème national majeur. Alors vous lâchez la rampe. Et laissez votre successeur – et le président – devant les décombres. Xavier Raufer
Les déclarations fracassantes de Gérard Collomb, ex-ministre de l’Intérieur, au matin de sa passation de pouvoir à Edouard Philippe, Premier ministre, montrent que la juxtaposition de ces deux nations aujourd’hui en France engendre un risque d’affrontement. Nous sommes aujourd’hui «côte à côte» (sous-entendu musulmans et non-musulmans) a dit Gérard Collomb, mais rien ne garantit que demain nous ne serons pas «face à face». Cet avis de guerre civile en bonne et due forme a été proféré par l’homme qui, pendant un an et demi, Place Beauvau, a eu sous les yeux, au quotidien, tous les rapports de police et de gendarmerie. Gérard Collomb est partie prenante de l’élite politique française. Il abandonne son poste en informant que la guerre civile est à nos portes. Une fuite qui à elle seule justifie mon titre «Le Grand Abandon». L’avertissement aurait eu plus de force s’il avait été proféré par un ministre en exercice. L’avoir prononcé sur le pas de la porte a fait que certains médias ne l’ont même pas repris. (…)  Mais en France, la nation islamique a été fabriquée de toutes pièces. Elle est le résultat d’une politique. Les élites françaises, c’est-à-dire les grands corps de l’État, les partis politiques, les experts, les magistrats, les médias, les élites culturelles… ont, pour de multiples raisons, plusieurs décennies durant – et encore aujourd’hui – encouragé et légitimé l’immigration musulmane. Cette préférence des élites pour l’islam a produit un fossé abyssal entre la France d’en haut et la France d’en bas. Le Baromètre de la Confiance que le Cevipof, le centre de recherches de Sciences Po, publie année après année, illustre parfaitement le phénomène: la majorité de la population française témoigne à l’égard de sa classe politique d’une gamme de sentiments qui va de l’écœurement au dégoût, en passant par le rejet et l’indifférence. Et sur quoi se cristallise cette rupture entre le haut et le bas de la société? Sur l’islam jugé trop invasif et l’immigration jugée excessive. Curieusement, ce baromètre du Cevipof sauve la mise de deux institutions, l’armée et la police qui jouissent d’un taux de confiance de près de 80 %. (…) L’immigration a été voulue et organisée, mais l’islamisation de cette immigration n’était sans doute pas inscrite au menu. Si l’immigration se poursuit malgré l’islamisation, c’est sans doute que nos élites la jugent insignifiante. Ou bien qu’elle leur est indifférente. (…) La constance avec laquelle le Conseil d’État a aidé à la constitution d’une nation islamique en France est sidérante. Je liste dans mon livre tous les arrêts du Conseil d’État favorables à l’immigration musulmane, favorables au voile, favorables au burkini, favorables à la burqa, favorables aux familles polygames et j’en passe. Idem pour le Conseil constitutionnel qui trouve conforme à l’intérêt général de laisser les écoles salafistes proliférer ou de supprimer, au nom de la «solidarité», les peines qui frappaient autrefois les délinquants qui facilitaient l’immigration clandestine. Mon livre passe également au crible l’étrange aveuglement de l’Observatoire de la laïcité quand il est question d’islam et l’étrange sensibilité du Conseil supérieur de l’audiovisuel aux récriminations des téléspectateurs musulmans. (…)  L’ordonnancement et la mise en relation de ces faits étayés et vérifiés entre eux mettent en lumière une évidence: il existe bel et bien une préférence des élites françaises pour l’islam. (…) Ce n’est pas seulement l’islam qui empêche aujourd’hui de faire nation. Les élites aussi ne veulent plus faire nation. (…) Je n’ai pas remarqué de mobilisation des organisations antiracistes contre le rappeur Nick Conrad qui a chanté le meurtre des Blancs et des enfants blancs dans les crèches. Ni contre les Indigènes de la République ou le syndicat SUD Éducation qui ont organisé des séminaires «racisés» fermés aux «Blancs», ni contre Médine qui rêve de crucifier les laïcards au Golgotha, ni contre Mmes Ernotte (France Télévisions) et Nyssen (ministère de la culture) qui souhaitaient voir moins de «Blancs» à la télévision. En revanche, quand Éric Zemmour a affirmé que les immigrés étaient surreprésentés dans les prisons, ou quand Georges Bensoussan a tenté d’expliquer que l’antisémitisme sévissait dans une large frange de la population musulmane en France, les associations antiracistes se sont unies pour les traîner devant un tribunal. Au nom de la lutte antiraciste! Ces quelques exemples permettent de situer la zone d’action de l’antiracisme: faire taire tout critique de la «diversité». La «diversité» n’est pas un slogan antiraciste un peu creux. Je démontre dans mon livre que la «diversité» est en réalité une politique. Et cette politique passe par les organisations antiracistes subventionnées par l’État, par l’école où l’apprentissage de l’arabe est proposé aujourd’hui dès le primaire, par une politique du ministère de la Culture qui subventionne la «diversité» au cinéma et au théâtre, par l’Afnor qui labellise les entreprises pour plus de «diversité», par le Conseil supérieur de l’audiovisuel qui, avec son Baromètre de la «diversité» rêve d’imposer des quasi quotas ethniques sur le petit écran, et par divers lobbys comme le Club XXI d’Hakim el Karoui ou l’association Coexister… (…) l’antiracisme politique et le discours diversitaire n’ont pas pour but de combattre le racisme. Ce sont des outils au service d’une réinitialisation des consciences. Ils servent à marteler que les immigrés de couleur sont par essence des victimes. Les services du Premier ministre diffusent actuellement des clips contre les violences sexistes. L’un de ces clips montre un «Blanc» qui agresse sexuellement une jeune fille d’origine maghrébine laquelle est défendue par une «Blanche» en couple avec un homme noir. Ce clip d’État d’une grande pureté idéologique assigne la violence sexuelle aux hommes Blancs et refuse d’évoquer celle qui peut aussi exister chez les «victimes» de couleur. J’affirme que cette victimisation forcenée des Français de couleur participe à la fabrication de la violence d’aujourd’hui. (…) les partis politiques, le ministère de la justice, les associations antiracistes, l’université, l’école, les experts, les intellectuels, le monde du cinéma et du théâtre et de quelques autres encore… Chacun de ces groupes ou institutions œuvre, dans le champ qui est le sien, à la promotion de la «diversité» et de son corollaire le «vivre-ensemble». J’ai déjà évoqué le cas du Conseil d’État, du Conseil constitutionnel et du Conseil supérieur de l’audiovisuel. Mais je liste également le cas des intellectuels qui pétitionnent et lynchent médiatiquement toute personnalité publique qui émet des opinions non conformes aux leurs. L’écrivain algérien Kamel Daoud en a ainsi fait les frais quand il a expliqué que les viols de masse de Cologne en 2015 étaient dus à l’importation en Allemagne d’une culture patriarcale des relations entre les sexes. Les experts justifient et encouragent l’immigration au nom de supposés bienfaits économiques. Le ministère de la justice met à mal la liberté d’expression des Zemmour et Bensoussan… etc. (…) En trente ans, la société française a quitté un modèle laïque républicain pour être projetée dans un modèle multiculturaliste, communautariste et anti-laïque. Il s’agit d’une authentique révolution qui se poursuit encore aujourd’hui sous nos yeux. Les élites politiques, économiques et institutionnelles ont balayé le vieux modèle laïque et républicain sans demander l’avis du reste de la population. Les élites françaises ont été à l’origine du plus grand casse du siècle, lequel s’avère être aussi un casse de la démocratie et de la laïcité. Pour quel profit? Je crains que seul l’islamisme soit à même de tirer les marrons du feu. (…) La gauche clientéliste flatte le communautarisme islamique: baux emphytéotiques pour la construction de mosquées, heures de piscine réservées aux femmes, etc., cela dans le but de recueillir les voix des musulmans. L’islamo-gauchisme accompagne la violence islamiste pour conquérir le pouvoir. Ce sont deux démarches différentes, mais les deux instrumentalisent les musulmans comme outil de conquête du pouvoir. (…) Le rôle des journalistes n’est pas de prendre les apparences pour le réel. Quand Macron va au Collèges des Bernardins et déclare aux plus hautes personnalités du catholicisme français qu’il faut «réparer» le lien abîmé entre l’Église et l’État, que croyez-vous qu’il fasse? Une bonne action? Non, il fait de la politique. Il s’adresse à une Église catholique blessée par cent ans de laïcité et qui souffre d’une hémorragie de fidèles. Il lui dit: oublions la laïcité, revenez dans le jeu politique. Pourquoi Macron fait-il cela? Pour se constituer des alliés dans son grand projet de bâtir ce qu’il appelle l’ «Islam de France». Macron a besoin d’alliés pour se débarrasser de la laïcité. Quel meilleur allié que l’Église? Quant à la compassion de l’Église pour les migrants musulmans, il est bon de rappeler que cette compassion est sélective. L’Église ne défend pas les Coptes quand ils sont massacrés en Égypte, elle proteste à peine contre l’authentique épuration ethnique qui frappe les chrétiens d’Orient, et elle n’a guère eu de mot charitable pour les Yazidis massacrés par l’État islamique. C’est cette sélectivité compassionnelle qui interroge. (…) la charité affichée de l’Église envers les musulmans est aussi une politique. (…) Il y a quelques jours, le Journal télévisé de France 2 a diffusé un reportage sur l’épidémie d’attaques au couteau qui sévit à Londres. Mais la même épidémie sévit en France et aucun média ne dresse un tableau de la situation. Il faut feuilleter la presse de province, journal par journal, pour se rendre compte de l’ampleur des violences gratuites, souvent mortelles, commises au quotidien. Quand un journal évoque une attaque au couteau, on ignore le nom de l’agresseur et ses motivations. Comme s’il y avait une volonté d’anonymiser le «déséquilibré»! Les médias, dans leur grande majorité, participent au casse du siècle. Ils n’informent plus sur les problèmes, ils prêchent la «diversité» et le «vivre ensemble». Yves Mamou
On brode beaucoup sur la non intégration des jeunes de banlieue. En réalité, ils sont totalement intégrés culturellement. Leur culture, comme le rap, sert de référence à toute la jeunesse. Ils sont bien sûr confrontés à de nombreux problèmes mais sont dans une logique d’intégration culturelle à la société monde. Les jeunes ruraux, dont les loisirs se résument souvent à la bagnole, le foot et l’alcool, vivent dans une marginalité culturelle. En feignant de croire que l’immigration ne participe pas à la déstructuration des plus modestes (Français ou immigrés), la gauche accentue la fracture qui la sépare des catégories populaires. Fracture d’autant plus forte qu’une partie de la gauche continue d’associer cette France précarisée qui demande à être protégée de la mondialisation et de l’immigration à la « France raciste ». Dans le même temps, presque malgré elle, la gauche est de plus en plus plébiscitée par une « autre France », celle des grands centres urbains les plus actifs, les plus riches et les mieux intégrés à l’économie-monde ; sur ces territoires où se retrouvent les extrêmes de l’éventail social (du bobo à l’immigré), la mondialisation est une bénédiction. Christophe Guilluy
Nous sommes dans un processus de sortie lente – mais dans un processus de sortie quand même – de la classe moyenne de la part des différentes catégories qui la composent, les unes après les autres. C’est ce que j’ai voulu identifier. La notion de classe moyenne est déjà morte mais on utilise encore cette catégorie comme si elle existait encore. Mais en réalité, en parlant des classes moyennes aujourd’hui, on parle des catégories supérieures. Finalement, quand on regarde les élections, toutes les vagues populistes reposent sur deux éléments. D’une part, une sociologie, c’est-à-dire le socle de l’ancienne classe moyenne que sont les catégories populaires, ouvriers, employés, petits paysans, petits indépendants, etc…et on retrouve ces mêmes catégories partout. Et d’autre part des territoires. C’est la géographie des périphéries avec à chaque fois les mêmes logiques quel que soit le pays occidental que l’on considère. (…) Les classes ouvrières britannique et américaine ont été fracassées beaucoup plus rapidement que la classe populaire française. Il y a les effets de l’État providence en France qui sont réels, et qui a fait que nous avons encore des catégories protégées dans notre pays. (…) Emmanuel Macron a fait des scores de dirigeant soviétique dans les grandes métropoles, avec des pourcentages incroyables à Paris, Bordeaux, Toulouse etc…Emmanuel Macron se sauve avec les deux gros bataillons que sont les retraités et les fonctionnaires – la majorité des fonctionnaires ont voté Macron – qui sont les deux catégories qui sont en train d’être tondues par ce président. Nous sommes donc effectivement à la limite d’un système qui se raccroche à des catégories encore protégées mais le vent tourne. (…) Aujourd’hui, 30% des 53-69 ans vivent sous le seuil de pauvreté, nous voyons les choses se transformer en douceur pour des catégories que l’on pensait préservées. Cela est le contexte français, mais en Grande Bretagne par exemple, les retraités ont été fracassés tout de suite et n’ont pas hésité à voter en faveur du Brexit. L’idée que les retraités vont continuer à protéger le système est à mon avis un leurre. C’est la même chose pour les fonctionnaires, les catégories B et C qui s’en prennent plein la figure ne vont pas éternellement protéger un système dont elles ne bénéficient pas. Cela est vraiment intéressant de constater que tout évolue partout mais toujours en fonction des contextes. (…) Les catégories modestes ont été relativement mieux protégées en France qu’elles ne l’ont été aux Etats-Unis ou en Grande Bretagne. On a bien un contexte français très particulier avec une fonction publique très importante etc…c’est là-dessus que nous faisons la différence. Mais une fois encore, cela n’est qu’une question de temps. Et le temps joue effectivement vers la disparition de cette classe moyenne. C’est donc bien la structuration sociale de l’ensemble des pays développés qui est en train de se modifier avec ces 20-30% de gens « en haut » qui vont s’en sortir et une immense classe populaire qui n’est plus dans l’espoir d’une amélioration de ses conditions de vie. (…) ces gens ont vraiment joué le jeu de la mondialisation et de l’Europe. Il n’y a jamais eu d’opposition de principe, ils ont joué le jeu et après 20 ou 30 ans ils font le diagnostic pour eux-mêmes et pour leurs enfants que finalement cela n’a pas marché. Il s’agit simplement d’un constat rationnel de leur part. Ce qui est frappant, c’est que tous les modèles sont affectés, du modèle américain au britannique, au modèle français républicain, jusqu’au modèle scandinave. (…) Mais (…) la disparition de la classe moyenne a commencé par les ouvriers, les paysans, les employés, les professions intermédiaires et demain, ce sera une fraction des catégories supérieures qui sera emportée. On voit déjà que les jeunes diplômés du supérieur n’arrivent plus à s’intégrer. Le processus est enclenché et il va détruire aussi des catégories qui pensent encore être protégées. (…) A partir du moment ou la gauche a abandonné la question sociale, elle a abandonné les catégories populaires et c’est la dessus que le divorce s’est réalisé. Ce mouvement s’est accompagné d’une forme d’ostracisation des plus modestes qui était très forte dans certains milieux de gauche, et aujourd’hui la rupture est totale. On a en plus un processus de sécession , que Christopher Lash avait vu très tôt, qui est celle des bourgeoisies, qui s’ajoute au phénomène de citadellisation des élites, qui fait qu’il n’y a pas plus de connexion entre ces catégories. (…) Il faut arrêter le discours du magistère des prétentieux. Cette idée de rééducation du peuple, en lui montrant la voie, n’est pas possible. Une société c’est une majorité de catégories modestes et l’objectif d’une démocratie, c’est de servir prioritairement ces catégories. C’est dans ce sens là qu’il faut aller. Il faut prendre ces gens au sérieux, il faut prendre en compte les diagnostics des classes populaires sur leurs souhaits d’être protégés, ce qui ne veut pas dire être assistés. Ces catégories veulent du travail, elles veulent qu’on les respectent culturellement, et ne pas se faire traiter de « déplorables » ou de sans dents » – ce qui fait partie intégrante du problème identitaire que nous avons aujourd’hui qui est le produit de ces attaques là -. (…) Les gens veulent de la protection, du travail, de la régulation économique mais aussi une régulation des flux migratoires. Je parle ici de tout le monde d’en bas, parce que la demande de régulation des flux migratoires vient de toutes les catégories modestes quelles que soient les origines. Tout le monde veut la même chose alors que lorsque les gens parlent de la question migratoire, on les place sur la question raciale, non. C’est anthropologiquement vrai pour toutes les catégories modestes, et cela est vrai partout. Dans tous les pays, les catégories modestes veulent vivre tranquillement, ce qui ne veut pas dire vivre derrière des murs, mais vivre dans un environnement que l’on connaît avec des valeurs communes. (…) Ce qui est amusant aujourd’hui, c’est qu’il y a une ethnicisation des classes moyennes – on pense blanc – cela montre bien la fin du concept qui était censé être intégrateur pour le plus grand nombre. (…) Les autoritaires ne sont pas ceux que l’on croit. Sauver les démocraties occidentales, c’est faire entendre le plus grand nombre. (…) Soit le monde d’en haut refuse d’entendre la majorité et on basculera dans une forme d’autoritarisme soft, ce qui pourrait faire durer le système un peu plus longtemps, mais avec le risque que cela se termine très mal. Soit  on essaye de faire baisser la tension en disant : « maintenant on essaye d’intégrer économiquement et culturellement le plus grand nombre ». Cette réflexion existe, il n’y a pas encore de parti politique qui représente tout cela, qui fait cette connexion, mais cela est en gestation. Il n’y a pas 50 sorties possibles de cette impasse, il n’y en a qu’une. Inclure les catégories populaires parce qu’elles sont la société elle-même. C’est pour cela que le discours sur les marges a été destructeur. Les ouvriers, les ruraux etc…ce ne sont pas des marges, c’est un tout, et ce tout est la société. Maintenant tout est sur la table, les diagnostics sont faits. Alors il faut se retrousser les manches et aller dans le dur en essayant de réellement inventer quelque chose de plus efficace, et en oubliant ce truc absurde du premier de cordée. Mais là, il faut bien remarquer le problème que nous avons concernant le personnel en place. Ils pensent tous la même chose. Il faut une révolution culturelle du monde d’en haut, ce qui devrait être à la portée des nations occidentales…cela ne coûte pas cher. La question pour eux est donc de protéger ou disparaître. Christophe Guilluy
Les catégories populaires – qui comprennent aussi les petits agriculteurs, ainsi que les jeunes et les retraités issus de ces catégories – n’ont donc nullement disparu. Leur part dans la population française est restée à peu près stable depuis un demi-siècle. La nouveauté, c’est uniquement que «le peuple» est désormais moins visible, car il vit loin des grands centres urbains. Le marché foncier crée les conditions d’accueil des populations dont les métropoles ont besoin. En se désindustrialisant, les grandes villes nécessitent beaucoup moins d’employés et d’ouvriers. Face à la flambée des prix dans le parc privé, les catégories populaires cherchent des logements en dehors des grandes agglomérations. Le problème crucial politique et social de la France, c’est donc que la majeure partie des catégories populaires ne vit plus là où se crée la richesse. Nulle volonté de «chasser les pauvres», pas de complot, simplement la loi du marché. Le projet économique de la France, tourné vers la mondialisation, n’a plus besoin des catégories populaires, en quelque sorte. C’est une situation sans précédent depuis la révolution industrielle. (…)  Dans tous les pays développés, on vérifie le phénomène déjà constaté en France: la majorité des catégories populaires vit désormais à l’écart des territoires les plus dynamiques, ceux qui créent de l’emploi. Ces évolutions dessinent les contours d’une Amérique périphérique et d’une Angleterre périphérique tout autant que d’une France périphérique. De la Rust Belt américaine au Yorkshire britannique, des bassins industriels de l’est de l’Allemagne au Mezzogiorno italien, villes petites et moyennes, régions désindustrialisées et espaces ruraux décrochent. (…)  La dimension sociale et économique du vote populiste se complète par une dynamique culturelle. Les catégories les plus fragiles socialement (celles qui ne peuvent mettre en œuvre des stratégies d’évitements résidentiels et scolaires) sont aujourd’hui les plus sensibles à la question migratoire. Les mêmes demandent à être protégés d’un modèle économique et sociétal qui les fragilise. Dans des sociétés multiculturelles, l’assimilation ne fonctionne plus. L’autre ne devient plus soi, ce qui suscite de l’inquiétude. Le nombre de l’autre importe. Personne n’a envie de devenir minoritaire dans les catégories populaires. En France, l’immobilier social, dernier parc accessible aux catégories populaires des métropoles, s’est spécialisé dans l’accueil des populations immigrées. Les catégories populaires d’origine européenne et qui sont éligibles au parc social s’efforcent d’éviter les quartiers où les HLM sont nombreux. Elles préfèrent consentir des sacrifices pour déménager en grande banlieue, dans les petites villes ou les zones rurales afin d’accéder à la propriété et d’acquérir un pavillon. Dans chacun des grands pays industrialisés, les catégories populaires « autochtones » éprouvent une insécurité culturelle. (…) ce sont bien les territoires populaires les plus éloignés des grandes métropoles qui portent la dynamique populiste. La Rust Belt et les régions désindustrialisées de Grande-Bretagne pèsent respectivement plus dans le vote Trump ou dans le Brexit que New York ou le Grand Londres. Dans les zones périurbaines de Rotterdam, ce sont bien aussi les catégories modestes (qui ne se confondent pas avec les pauvres) qui voient leur statut de référent culturel remis en question par la dynamique migratoire et qui votent pour Geert Wilders. Ainsi, si la situation de l’ouvrier allemand n’est pas celle du paysan français, de l’employé néerlandais ou d’un petit tra- vailleur indépendant italien, il existe un point commun : tous, quel que soit leur niveau de vie, font le constat d’être fragilisés par un modèle économique qui les a relégués socialement et culturellement. (…) On ne s’intègre pas à un modèle ou à un système de valeur mais à une population à qui on désire ressembler. On se marie, on tisse des liens d’amitié, de voisinage avec des gens qui sont proches. Or cette intégration ne se réalise pas dans n’importe quelle catégorie sociale, mais d’abord dans des milieux populaires. Et ce qui a changé depuis les années 1970 et surtout 1980, c’est précisément le changement de statut de ces catégories populaires. Les ouvriers, les employés, les « petites gens » sont désormais perçus en grande partie comme les perdants de la mondialisation. Quel nouveau venu dans un pays peut avoir envie de ressembler à des « autochtones » qui ne sont pas en phase d’ascension sociale et que, de surcroît, leurs propres élites méprisent en raison de l’attachement des intéressés à certaines valeurs traditionnelles ? Souvenons-nous de la phrase de Hillary Clinton présentant les électeurs de Donald Trump comme des « déplorables » pendant la campagne présidentielle de 2016 aux États-Unis. C’est pourquoi, alors que la France, les États-Unis, la Grande-Bretagne ou la Scandinavie se sont construits sur des modèles culturels très différents, tous ces pays connaissent la même dynamique populiste, la même crise sociale et identitaire et le même questionnement sur la pertinence de leurs modèles d’intégration. (…) la rupture entre le haut et le bas (…) nous conduit à un modèle qui ne fait plus société. La disparition de la classe moyenne n’en est qu’une conséquence. Le monde d’en haut refuse d’écouter celui d’en bas qui le lui rend bien notamment en grossissant les camps de l’abstention ou du vote populiste. Cette rupture du lien, y compris conflictuel, entre le haut et le bas, porte en germe l’abandon du bien commun et nous fait basculer dans l’asociété. Trump vient de l’élite américaine, c’est un des points communs qu’il partage avec Macron. Tous les deux se sont affranchis de leur propre camp pour se faire élire : Macron de la gauche, Trump du camp républicain. Ils ont enterré le vieux clivage gauche-droite. Les deux ont compris que nous étions entrés dans le temps de la disparition de la classe moyenne occidentale. L’un et l’autre ont saisi que, pour la première fois dans l’histoire, les classes populaires, celles qui constituaient hier le socle de la classe moyenne, vivent désormais sur les territoires qui créent le moins d’emplois : dans l’Amérique périphérique et dans la France périphérique. Mais la comparaison s’arrête là. Si Trump a été élu par l’Amérique périphérique, Macron a au contrai- re construit sa dynamique électorale à partir des métropoles mondialisées. Si le président français est conscient de la fragilisation sociale de la France périphérique, il pense que la solution passe par une accélération de l’adaptation de l’économie française aux normes de l’économie mondialisée. À l’opposé, le président américain fait le constat des limites d’un modèle qu’il convient de réguler (protectionnisme, remise en cause des traités de libre-échange, volonté de réguler l’immigration, politique de grands travaux) afin de créer de l’emploi sur ces territoires de la désindustrialisation américaine. Il existe un autre point de divergence fondamental, c’est le refus chez Trump d’un argumentaire moral qui sert depuis des décennies à disqualifier les classes populaires. Christophe Guilluy
We spent 10 months writing the papers, averaging one new paper roughly every thirteen days. (Seven papers published over seven years is frequently claimed to be the number sufficient to earn tenure at most major universities although, in reality, requirements vary by institution.) As for our performance, 80% of our papers overall went to full peer review, which keeps with the standard 10-20% of papers that are “desk rejected” without review at major journals across the field. We improved this ratio from 0% at first to 94.4% after a few months of experimenting with much more hoaxish papers. Because we were forced to go public before we could complete our study, we cannot be sure how many papers would have been accepted if we had had time to see them through—papers typically take 3-6 months or more to complete the entire process and one of ours was under review from December 2017 to August 2018—but an estimate of at least 10, probably 12, eventual acceptances seems warranted at the time of having to call a halt. (…) Our papers also present very shoddy methodologies including incredibly implausible statistics (“Dog Park”), making claims not warranted by the data (“CisNorm,” “Hooters,” “Dildos”), and ideologically-motivated qualitative analyses (“CisNorm,” “Porn”). Questionable qualitative methodologies such as poetic inquiry and autoethnography (sometimes rightly and pejoratively called “mesearch”) were incorporated (especially in “Moon Meetings”). (…) Many papers advocated highly dubious ethics including training men like dogs (“Dog Park”), punishing white male college students for historical slavery by asking them to sit in silence in the floor in chains during class and to be expected to learn from the discomfort (“Progressive Stack”), celebrating morbid obesity as a healthy life-choice (“Fat Bodybuilding”), treating privately conducted masturbation as a form of sexual violence against women (“Masturbation”), and programming superintelligent AI with irrational and ideological nonsense before letting it rule the world (“Feminist AI”). There was also considerable silliness including claiming to have tactfully inspected the genitals of slightly fewer than 10,000 dogs whilst interrogating owners as to their sexuality (“Dog Park”), becoming seemingly mystified about why heterosexual men are attracted to women (“Hooters”), insisting there is something to be learned about feminism by having four guys watch thousands of hours of hardcore pornography over the course of a year while repeatedly taking the Gender and Science Implicit Associations Test (“Porn”), expressing confusion over why people are more concerned about the genitalia others have when considering having sex with them (“CisNorm”), and recommending men anally self-penetrate in order to become less transphobic, more feminist, and more concerned about the horrors of rape culture (“Dildos”). None of this, except that Helen Wilson recorded one “dog rape per hour” at urban dog parks in Portland, Oregon, raised so much as a single reviewer eyebrow, so far as their reports show. (…) Our data indicate that grievance studies is a serious academic problem … with knowledge production within fields that have been corrupted by grievance studies arising from critical constructivism and radical skepticism. Among the problems are how topics like race, gender, sexuality, society, and culture are researched. Perhaps most concerning is how the current highly ideological disciplines undermine the value of more rigorous work being done on these topics and erodes confidence in the university system. Research into these areas is crucial, and it must be rigorously conducted and minimize ideological influences. The further results on these topics diverge from reality, the greater chance they will hurt those their scholarship is intended to help. Worse, the problem of corrupt scholarship has already leaked heavily into other fields like education, social work, media, psychology, and sociology, among others—and it openly aims to continue spreading. This makes the problem a grave concern that’s rapidly undermining the legitimacy and reputations of universities, skewing politics, drowning out needed conversations, and pushing the culture war to ever more toxic and existential polarization. Further, it is affecting activism on behalf of women and racial and sexual minorities in a way which is counterproductive to equality aims by feeding into right-wing reactionary opposition to those equality objectives … Our recommendation begins by calling upon all major universities to begin a thorough review of these areas of study (gender studies, critical race theory, postcolonial theory, and other “theory”-based fields in the humanities and reaching into the social sciences, especially including sociology and anthropology), in order to separate knowledge-producing disciplines and scholars from those generating constructivist sophistry. We hope the latter can be redeemed, not destroyed, as the topics they study—gender, race, sexuality, culture—are of enormous importance to society and thus demand considerable attention and the highest levels of academic rigor. Further, many of their insights are worthy and deserve more careful consideration than they currently receive. This will require them to adhere more honestly and rigorously to the production of knowledge and to place scholarship ahead of any conflicting interest rather than following from it … As for us, we intend to use the knowledge we’ve gained from grievance studies to continue to critique them and push for universities to fix this problem and reaffirm their commitment to rigorous, non-partisan knowledge production. We do this because we believe in the university, in rigorous scholarship, in the pursuit of scientific knowledge, and in the importance of social justice. Helen Pluckrose, James Lindsay and Peter Boghossian
Le savoir basé de moins en moins sur le fait de trouver la vérité et de plus en plus sur le fait de s’occuper de certaines ‘complaintes’ est devenu établi, presque totalement dominant, au sein de [certains champs des sciences sociales] et les chercheurs brutalisent de plus en plus les étudiants, les administrateurs et les autres départements qui n’adhèrent pas à leur vision du monde. (…) Nous ne devrions pas avoir été capables de publier n’importe lequel de ces papers si calamiteux dans des journaux réputés. Encore moins sept d’entre eux. (…) Il y a un problème de production du savoir au sein de champs qui ont été corrompus par les ‘grievance studies’ nées du socio-constructivisme et du scepticisme radical. Parmi les problèmes, il y a la manière dont des sujets comme la race, le genre, la sexualité, la société et la culture sont traités par la recherche. (…) Nous espérons que ceci donnera aux gens – spécialement à ceux qui croient au libéralisme, au progrès, à la modernité et à la justice sociale – une raison claire de regarder la folie identitaire qui vient de la gauche universitaire et militante, et de dire : ‘Non, je n’irai pas dans ce sens là. Vous ne parlez pas en mon nom. Helen Pluckrose, James Lindsay et Peter Boghossian
Des chercheurs ont réussi à faire publier dans plusieurs revues de référence aux Etats-Unis des essais aux thèses absolument délirantes, prônant par exemple le développement de l’usage anal de sex-toys chez les hommes pour lutter contre la transphobie et faire progresser le féminisme. Quand un homme se masturbe en pensant à une femme sans lui avoir demandé son consentement, c’est une agression sexuelle. Il existe une culture systémique du viol chez les chiens. L’astronomie est une science sexiste et pro-occidentale qui doit être remplacée par une astrologie indigène et queer. Ces thèses vous semblent loufoques, invraisemblables ? Elles le sont. Elles ont néanmoins été considérées avec le plus grand sérieux, et parfois même publiées, par des revues académiques de premier plan aux Etats-Unis, victimes de l’un des canulars universitaires les plus ambitieux jamais mis en œuvre… Helen Pluckrose, James Lindsay et Peter Boghossian sont trois chercheurs américains, persuadés que quelque chose cloche dans certains secteurs du monde académique outre-Atlantique. (…) Se désolant de ce tournant idéologique en cours dans les facs américaines, notre trio d’universitaires établit une liste des disciplines les plus gravement touchées : il s’agit des matières communément regroupées dans l’enseignement supérieur américain sous le terme de « cultural studies » ou « identity studies », « enracinées dans la branche ‘postmoderne’ de la théorie qui a émergé à la fin des années soixante ». On y trouve donc les fameuses « gender studies », les « queer studies » mais également la « critical race theory », les « fat studies » (sic) ou des pans entiers de la sociologie critique. Le point commun de ces branches universitaires, requalifiées en « grievance studies » (qu’on pourrait traduire par « études plaintives ») ? D’après les trois chercheurs, elles produisent des travaux très souvent « corrompus » par l’idéologie, qui renoncent à toute honnêteté intellectuelle dès lors qu’il s’agit de dénoncer les oppressions de toutes sortes : sexistes, raciales, post-coloniales, homophobes, transphobes, grossophobes… Pour prouver leur diagnostic, Pluckrose, Lindsay et Boghossian ont fait un pari simple… et drôle : pousser, dans des articles fantaisistes, la doxa qu’ils pointent dans ses retranchements les plus absurdes et voir si ces papiers seraient acceptés pour publication dans de très sérieuses revues scientifiques. Ils ont donc passé dix mois à écrire de faux « papers », un format universitaire anglo-saxon qu’on peut comparer au mémoire français. Recette commune de ces essais : « Des statistiques totalement invraisemblables, des assomptions non prouvées par les données, des analyses qualitatives idéologiquement biaisées, une éthique suspecte (…), une bêtise considérable ». Les chercheurs ont ensuite systématiquement envoyé leurs travaux bidons aux « journaux de référence dans les champs universitaires concernés ». Après quasiment un an de bombardement de canulars, les trois audacieux ont été forcés d’arrêter leur expérience car un de leurs textes commençait à connaître un important écho dans la presse. Mais les 20 papers écrits ont suffi à valider la pertinence de leur thèse : pas moins de sept d’entre eux ont en effet été validés par les revues universitaires, dont quatre publiés. Sept autres sont encore en cours d’examen et seulement six ont été refusés sans ambiguïté par les universitaires chargés de les évaluer. Par quatre fois, les facétieux compères ont même été invités à eux-mêmes examiner le travail de « pairs » en récompense… de leur « savoir exemplaire ». (…) Au bout du compte, la leçon que tirent les trois auteurs de leur plongée en absurdie sociologique est partagée entre amusement et réelle inquiétude. Rejetant l’idée simpliste que « le monde universitaire est corrompu » ou que « tous les universitaires et évaluateurs dans le champ des humanités qui étudient le genre, la race, la sexualité ou le poids sont corrompus », ils alarment : « Nous ne devrions pas avoir été capables de publier n’importe lequel de ces papers si calamiteux dans des journaux réputés. Encore moins sept d’entre eux ». Produisant un « savoir » considérablement orienté, ils constatent aussi avec effarement que les chercheurs relisant leurs textes ne leur réclamaient souvent « pas d’être moins biaisé politiquement et moins négligent dans le travail, mais de l’être davantage ». (…) C’est donc bien un nouvel obscurantisme que les chercheurs décrivent, une idéologie qui « rejette l’idée d’universalité scientifique et d’objectivité et insiste, pour des raisons morales, sur la nécessité d’accepter la notion de vérités multiples basées sur l’identité ». Or selon eux, ce relativisme mortifère serait devenu « autoritaire » dans les facs américaines. Marianne

Attention: une folie identitaire peut en cacher une autre !

A l’heure où après avoir si longtemps nié et caché les conséquences de leurs propres décisions dont ils ont seuls – leurs clients compris – les moyens de se préserver …

Nos bien-pensants premiers de cordée et sansfrontiéristes échevelés n’ont pas de mots assez durs pour dénoncer

Pour leur attachement d’un autre âge à leur propre identité entre religion, armes à feu et frontières, les laissés pour compte de la mondialisation

Et où peuvent se publier entre les prétendus « zoos humains » et les dérives victimaires de nos systèmes éducatifs des articles de recherche aussi loufoques que …

Le « remplacement de l’astronomie sexiste et pro-occidentale par une astrologie indigène et queer »…

Le « développement de l’usage anal de sex-toys chez les hommes pour lutter contre la transphobie et faire progresser le féminisme  » …

Ou la « culture systémique du viol chez les chiens » …

Comment ne pas voir avec trois chercheurs américains qui viennent d’en faire la démonstration dans des revues académique de premier plan …

Cette véritable folie identitaire qui s’insinue jusque dans l’éducation, le travail social, les médias, la psychologie ou la sociologie …

D’une « recherche universitaire corrompue » qui « sape la légitimité et la réputation des universités, fausse le discours politique, noie une bien nécessaire conversation et pousse la guerre culturelle vers une polarisation toujours plus toxique » ?

CQFD

« De la culture du viol chez les chiens » : l’incroyable canular qui a piégé la sociologie américaine

Des chercheurs ont réussi à faire publier dans plusieurs revues de référence aux Etats-Unis des essais aux thèses absolument délirantes, prônant par exemple le développement de l’usage anal de sex-toys chez les hommes pour lutter contre la transphobie et faire progresser le féminisme.

Quand un homme se masturbe en pensant à une femme sans lui avoir demandé son consentement, c’est une agression sexuelle. Il existe une culture systémique du viol chez les chiens. L’astronomie est une science sexiste et pro-occidentale qui doit être remplacée par une astrologie indigène et queer. Ces thèses vous semblent loufoques, invraisemblables ? Elles le sont. Elles ont néanmoins été considérées avec le plus grand sérieux, et parfois même publiées, par des revues académiques de premier plan aux Etats-Unis, victimes de l’un des canulars universitaires les plus ambitieux jamais mis en œuvre…

Helen Pluckrose, James Lindsay et Peter Boghossian sont trois chercheurs américains, persuadés que quelque chose cloche dans certains secteurs du monde académique outre-Atlantique. « Le savoir basé de moins en moins sur le fait de trouver la vérité et de plus en plus sur le fait de s’occuper de certaines ‘complaintes’ est devenu établi, presque totalement dominant, au sein de [certains champs des sciences sociales]« , écrivent-ils dans le magazine Areo, et les chercheurs brutalisent de plus en plus les étudiants, les administrateurs et les autres départements qui n’adhèrent pas à leur vision du monde ». Se désolant de ce tournant idéologique en cours dans les facs américaines, notre trio d’universitaires établit une liste des disciplines les plus gravement touchées : il s’agit des matières communément regroupées dans l’enseignement supérieur américain sous le terme de « cultural studies » ou « identity studies« , « enracinées dans la branche ‘postmoderne’ de la théorie qui a émergé à la fin des années soixante« . On y trouve donc les fameuses « gender studies« , les « queer studies » mais également la « critical race theory« , les « fat studies » (sic) ou des pans entiers de la sociologie critique. Le point commun de ces branches universitaires, requalifiées en « grievance studies » (qu’on pourrait traduire par « études plaintives ») ? D’après les trois chercheurs, elles produisent des travaux très souvent « corrompus » par l’idéologie, qui renoncent à toute honnêteté intellectuelle dès lors qu’il s’agit de dénoncer les oppressions de toutes sortes : sexistes, raciales, post-coloniales, homophobes, transphobes, grossophobes…

Recette des faux articles : « une bêtise considérable »

Pour prouver leur diagnostic, Pluckrose, Lindsay et Boghossian ont fait un pari simple… et drôle : pousser, dans des articles fantaisistes, la doxa qu’ils pointent dans ses retranchements les plus absurdes et voir si ces papiers seraient acceptés pour publication dans de très sérieuses revues scientifiques. Ils ont donc passé dix mois à écrire de faux « papers« , un format universitaire anglo-saxon qu’on peut comparer au mémoire français. Recette commune de ces essais : « Des statistiques totalement invraisemblables, des assomptions non prouvées par les données, des analyses qualitatives idéologiquement biaisées, une éthique suspecte (…), une bêtise considérable« .

Les chercheurs ont ensuite systématiquement envoyé leurs travaux bidons aux « journaux de référence dans les champs universitaires concernés« . Après quasiment un an de bombardement de canulars, les trois audacieux ont été forcés d’arrêter leur expérience car un de leurs textes commençait à connaître un important écho dans la presse. Mais les 20 papers écrits ont suffi à valider la pertinence de leur thèse : pas moins de sept d’entre eux ont en effet été validés par les revues universitaires, dont quatre publiés. Sept autres sont encore en cours d’examen et seulement six ont été refusés sans ambiguïté par les universitaires chargés de les évaluer. Par quatre fois, les facétieux compères ont même été invités à eux-mêmes examiner le travail de « pairs » en récompense… de leur « savoir exemplaire« .

Lorsqu’on examine le contenu de ces faux mémoires, on peine pourtant à croire que leur absurdité n’ait pas sauté à la figure des chercheurs chargés de les examiner. Dans un article intitulé « Passer par la porte de derrière : défier l’homo-hystérie masculine et la transphobie à travers l’usage de sex-toys pénétratifs« , les chercheurs expliquent que si les hommes utilisent rarement des sex-toys pour « s’auto-pénétrer par voie anale« , c’est parce qu’ils ont peur d’être pris pour des homosexuels ou par hostilité aux transsexuels. Conclusion : encourager cette pratique engendrerait, à coup sûr, une baisse de la transphobie et un progrès de valeurs féministes. Délirant ? Le texte a été publié dans la revue Sexuality and Culture, et qualifié de « contribution incroyablement riche et excitante à l’étude de la sexualité et de la culture » par un universitaire chargé de l’analyser.

Une de leurs inventions croquignolesques a même rencontré un réel triomphe académique : dans « Réactions humaines à la culture du viol et performativité queer au sein des parcs à chiens de Portland, Oregon« , nos chercheurs soutiennent qu’il existe « une rampante culture du viol canine » et qu’une « oppression systémique » frappe certaines races de chiens. Un mémoire qualifié « d’incroyablement innovant, riche en analyse, extrêmement bien écrit et organisé » par la revue Gender, Place, and Culture, qui lui a fait une place dans ses prestigieuses colonnes… et l’a même intégrée parmi ses 12 meilleures publications de l’année 2018 ! La chercheuse Helen Wilson, auteure de ce travail volontairement absurde, expliquant sa méthode de travail, y écrivait avoir « délicatement inspecté les parties génitales d’un peu moins de 10.000 chiens tout en interrogeant leurs propriétaires sur leur sexualité« , mais également avoir « constaté un viol de chien par heure au parc à chiens urbain de Portland » ! Pas de quoi faire lever un sourcil aux universitaires chargés de valider son article pour publication dans une revue « de référence »…

D’autres mémoires-hoax n’ont pas eu le temps d’être publiés avant que le canular soit finalement rendu public. Mais ils ont été quasiment intégralement validés par les revues auxquelles ils ont été présentés, avec des modifications mineures. On y trouve des thèses toujours aussi comiques : « L’Intelligence artificielle est intrinsèquement dangereuse car elle est programmée avec des données masculinistes, impérialistes et rationalistes« . Ou encore : « L’astronomie est et sera toujours intrinsèquement sexiste et occidentale, ce biais masculiniste et occidental peut être corrigé en incluant une astrologie féministe, queer et indigène (par exemple, des horoscopes) à la science astronomique« .

« Les éducateurs devraient discriminer selon l’identité et calculer le statut de leurs étudiants en fonction de leurs privilèges »

Et même : « Les éducateurs devraient discriminer selon l’identité et calculer le statut de leurs étudiants en fonction de leurs privilèges (…), pénalisant les plus privilégiés en refusant d’écouter leurs contributions, ridiculisant leurs efforts, en parlant plus fort qu’eux et en les forçant à s’asseoir enchaînés sur le sol » ! Toutes ces contributions n’ont reçu que des critiques de forme de la part des revues universitaires auxquelles ils ont été adressés. Celle proposant d’enchaîner des étudiants sur le sol a même été applaudie comme « une forte contribution à la littérature foisonnante s’attaquant à l’injustice épistémique dans la salle de classe« .

D’autres faux essais universitaires ont été finalement rejetés après examen par des universitaires. Mais cela ne les a pas toujours empêché de recevoir des commentaires chaleureux de la part de chercheurs chargés de les évaluer, qui ont parfois même poussé l’absurde encore plus loin. Ainsi, dans un mémoire consacré à la masturbation, les auteurs du canular écrivent que « quand un homme se masturbe en privé en fantasmant sur une femme sans qu’elle lui ait donné sa permission (…), il commet une violence métasexuelle contre elle« . Dans son évaluation, la première contributrice de Sociological Theory encourage nos chercheurs à aller plus loin encore dans cette théorie : « Je pense à d’autres scénarios où les hommes pourraient transformer en arme leur non-connaissance de manière très tangible. Par exemple, la déclaration ambiguë ‘Je pense à toi tout le temps’, dite de manière impromptue à une femme par un homme, est particulièrement insidieuse, étant donné le contexte structurel de violence métasexuelle dans le monde« .

« Juifs » remplacé par « Blancs » dans « Mein Kampf » : un chercheur applaudit

Le clou de cette fanfaronnade a été apporté par un essai présenté au magazine Sociology of Race and Ethnicity, où nos trublions prétendent « examiner de manière critique la blanchité (‘whiteness, ndlr) depuis la blanchité« . Pour cela, ils ont ni plus ni moins sélectionné – sans le dire – des extraits de Mein Kampf, l’infâme pamphlet antisémite d’Adolf Hitler, en y remplaçant le mot « Juifs » par « Blancs« . Le paper a été rejeté mais cela ne l’a pas empêché de recevoir au préalable les éloges de plusieurs pairs universitaires. « Cet article a le potentiel pour être une contribution puissante et particulière à la littérature traitant des mécanismes qui renforcent l’adhésion blanche à des perspectives suprémacistes blanches, et au processus par lequel des individus peuvent atteindre des niveaux plus profonds de conscience sociale et raciale« , écrit ainsi un chercheur enthousiaste, qui n’objecte que « des révisions concernant la précision, la clarté, l’expression d’assertions et des exemples concrets » et complimente ainsi sans le savoir une resucée de Mein Kampf.

« Nous espérons que ceci donnera aux gens une raison claire de regarder la folie identitaire qui vient de la gauche universitaire et militante, et de dire : Non »

Au bout du compte, la leçon que tirent les trois auteurs de leur plongée en absurdie sociologique est partagée entre amusement et réelle inquiétude. Rejetant l’idée simpliste que « le monde universitaire est corrompu » ou que « tous les universitaires et évaluateurs dans le champ des humanités qui étudient le genre, la race, la sexualité ou le poids sont corrompus« , ils alarment : « Nous ne devrions pas avoir été capables de publier n’importe lequel de ces papers si calamiteux dans des journaux réputés. Encore moins sept d’entre eux ». Produisant un « savoir » considérablement orienté, ils constatent aussi avec effarement que les chercheurs relisant leurs textes ne leur réclamaient souvent « pas d’être moins biaisé politiquement et moins négligent dans le travail, mais de l’être davantage ».

Le tableau final est implacable pour tout un pan du monde universitaire anglo-saxon : « Il y a un problème de production du savoir au sein de champs qui ont été corrompus par les ‘grievance studies’ nées du socio-constructivisme et du scepticisme radical. Parmi les problèmes, il y a la manière dont des sujets comme la race, le genre, la sexualité, la société et la culture sont traités par la recherche ». C’est donc bien un nouvel obscurantisme que les chercheurs décrivent, une idéologie qui « rejette l’idée d’universalité scientifique et d’objectivité et insiste, pour des raisons morales, sur la nécessité d’accepter la notion de vérités multiples basées sur l’identité« . Or selon eux, ce relativisme mortifère serait devenu « autoritaire » dans les facs américaines. Rappellent leur propre sympathie pour les mouvements des droits civiques, le féminisme et le mouvement LGBT, nos trois trublions émettent un souhait : « Nous espérons que ceci donnera aux gens – spécialement à ceux qui croient au libéralisme, au progrès, à la modernité et à la justice sociale – une raison claire de regarder la folie identitaire qui vient de la gauche universitaire et militante, et de dire : ‘Non, je n’irai pas dans ce sens là. Vous ne parlez pas en mon nom' ».

Voir aussi:

This essay, although hopefully accessible to everyone, is the most thorough breakdown of the study and written for those who are already somewhat familiar with the problems of ideologically-motivated scholarship, radical skepticism and cultural constructivism.


Part I: Introduction

Something has gone wrong in the university—especially in certain fields within the humanities. Scholarship based less upon finding truth and more upon attending to social grievances has become firmly established, if not fully dominant, within these fields, and their scholars increasingly bully students, administrators, and other departments into adhering to their worldview. This worldview is not scientific, and it is not rigorous. For many, this problem has been growing increasingly obvious, but strong evidence has been lacking. For this reason, the three of us just spent a year working inside the scholarship we see as an intrinsic part of this problem.

We spent that time writing academic papers and publishing them in respected peer-reviewed journals associated with fields of scholarship loosely known as “cultural studies” or “identity studies” (for example, gender studies) or “critical theory” because it is rooted in that postmodern brand of “theory” which arose in the late sixties. As a result of this work, we have come to call these fields “grievance studies” in shorthand because of their common goal of problematizing aspects of culture in minute detail in order to attempt diagnoses of power imbalances and oppression rooted in identity.

We undertook this project to study, understand, and expose the reality of grievance studies, which is corrupting academic research. Because open, good-faith conversation around topics of identity such as gender, race, and sexuality (and the scholarship that works with them) is nearly impossible, our aim has been to reboot these conversations. We hope this will give people—especially those who believe in liberalism, progress, modernity, open inquiry, and social justice—a clear reason to look at the identitarian madness coming out of the academic and activist left and say, “No, I will not go along with that. You do not speak for me.”

This document is a first look at our project and an initial attempt to grapple with what we’re learning and what it means. Because of its length and detail, it is organized as follows, putting the factual information up front and more detailed explanations thereafter.

  • Our methodology, which is central to contextualizing our claims;
  • A summary of this project from its beginning until we were eventually exposed and forced to go public before we could conclude our research;
  • An explanation of why we did this;
  • A summary of the problem and why it matters;
  • A clear explanation of how this project came to be;
  • The results of our study, including a full list of all of the papers we submitted, their final outcomes, and relevant reviewer comments to date;
  • A discussion of the significance of the results;
  • A summary of what may come next

Part II: Methods

Our approach is best understood as a kind of reflexive ethnography—that is, we conducted a study of a peculiar academic culture by immersing ourselves within it, reflecting its output and modifying our understanding until we became “outsiders within” it.

Our objective was to learn about this culture and establish that we had become fluent in its language and customs by publishing peer-reviewed papers in its top journals, which usually only experts in the field are capable of doing. Because we came to conceptualize this project as a kind of reflexive ethnographic study in which we sought to understand the field and how it works by participating in it, obtaining peer reviewers’ comments about what we were doing right and what needed to change to make absurd theses acceptable was central to the project. Indeed, the reviewers’ comments are in many ways more revealing about the state of these fields than the acceptances themselves.

While our papers are all outlandish or intentionally broken in significant ways, it is important to recognize that they blend in almost perfectly with others in the disciplines under our consideration. To demonstrate this, we needed to get papers accepted, especially by significant and influential journals. Merely blending in couldn’t generate the depth necessary for our study, however. We also needed to write papers that took risks to test certain hypotheses such that the fact of their acceptance itself makes a statement about the problem we’re studying (see the Papers section, below). Consequently, although this study does not qualify as being particularly controlled, we did control one important variable: the big-picture methodology we used to write every paper.

Our paper-writing methodology always followed a specific pattern: it started with an idea that spoke to our epistemological or ethical concerns with the field and then sought to bend the existing scholarship to support it. The goal was always to use what the existing literature offered to get some little bit of lunacy or depravity to be acceptable at the highest levels of intellectual respectability within the field. Therefore, each paper began with something absurd or deeply unethical (or both) that we wanted to forward or conclude. We then made the existing peer-reviewed literature do our bidding in the attempt to get published in the academic canon.

This is the primary point of the project: What we just described is not knowledge production; it’s sophistry. That is, it’s a forgery of knowledge that should not be mistaken for the real thing. The biggest difference between us and the scholarship we are studying by emulation is that we know we made things up.

This process is the one, single thread that ties all twenty of our papers together, even though we used a variety of methods to come up with the various ideas fed into their system to see how the editors and peer reviewers would respond. Sometimes we just thought a nutty or inhumane idea up and ran with it. What if we write a paper saying we should train men like we do dogs—to prevent rape culture? Hence came the “Dog Park” paper. What if we write a paper claiming that when a guy privately masturbates while thinking about a woman (without her consent—in fact, without her ever finding out about it) that he’s committing sexual violence against her? That gave us the “Masturbation” paper. What if we argue that the reason superintelligent AI is potentially dangerous is because it is being programmed to be masculinist and imperialist using Mary Shelley’s Frankenstein and Lacanian psychoanalysis? That’s our “Feminist AI” paper. What if we argued that “a fat body is a legitimately built body” as a foundation for introducing a category for fat bodybuilding into the sport of professional bodybuilding? You can read how that went in Fat Studies.

At other times, we scoured the existing grievance studies literature to see where it was already going awry and then tried to magnify those problems. Feminist glaciology? Okay, we’ll copy it and write a feminist astronomy paper that argues feminist and queer astrology should be considered part of the science of astronomy, which we’ll brand as intrinsically sexist. Reviewers were very enthusiastic about that idea. Using a method like thematic analysis to spin favored interpretations of data? Fine, we wrote a paper about trans people in the workplace that does just that. Men use “male preserves” to enact dying “macho” masculinities discourses in a way society at large won’t accept? No problem. We published a paper best summarized as, “A gender scholar goes to Hooters to try to figure out why it exists.” “Defamiliarizing,” common experiences, pretending to be mystified by them and then looking for social constructions to explain them? Sure, our “Dildos” paper did that to answer the questions, “Why don’t straight men tend to masturbate via anal penetration, and what might happen if they did?” Hint: according to our paper in Sexuality and Culture, a leading sexualities journal, they will be less transphobic and more feminist as a result.

We used other methods too, like, “I wonder if that ‘progressive stack’ in the news could be written into a paper that says white males in college shouldn’t be allowed to speak in class (or have their emails answered by the instructor), and, for good measure, be asked to sit in the floor in chains so they can ‘experience reparations.’” That was our “Progressive Stack” paper. The answer seems to be yes, and feminist philosophy titan Hypatia has been surprisingly warm to it. Another tough one for us was, “I wonder if they’d publish a feminist rewrite of a chapter from Adolf Hitler’s Mein Kampf.” The answer to that question also turns out to be “yes,” given that the feminist social work journal Affilia has just accepted it. As we progressed, we started to realize that just about anything can be made to work, so long as it falls within the moral orthodoxy and demonstrates understanding of the existing literature.

Put another way, we now have good reasons to believe that if we just appropriate the existing literature in the right ways—and there always seems to be a citation or vein of literature that makes it possible—we can say almost any politically fashionable thing we want. The underlying questions in every single case were the same: What do we need to write, and what do we need to cite (all of our citations are real, by the way) to get this academic madness published as high “scholarship”?

What Did We Do?

We wrote 20 papers and submitted them to the best journals in the relevant fields (more on this below) with considerable success, even though we had to take the project public prematurely, and thus stop the study, before it could be properly concluded. At the time of publishing this, we have:

  • 7 papers accepted.

4 of these have been published online.

3 more have been accepted without having had time to see publication through. (This can take months).

  • 7 papers still in play when we had to call a halt.

2 have been “revised and resubmitted,” and are awaiting a decision. (A judgment of “Revise and Resubmit” usually results in publication following the satisfactory completion of requested revisions. A judgment of “Reject and Resubmit” can result in publication following more substantial ones. It is very rare for papers to be accepted outright.)

1 is still under first review at its current journal

4 are left hanging with no time to submit them to journals after rejection (2), revise and resubmit (1) or reject and resubmit (1).

  • 6 retired as fatally flawed or beyond repair.
  • 4 invitations to peer-review other papers as a result of our own exemplary scholarship. (For ethical reasons, we declined all such invitations. Had we wished to fully participate in their culture in this way, however, it would have been an unrivaled opportunity to tinker with how far we could take the hypothesis that the canon of literature within these fields gets skewed in part because the peer-review process encourages the existing political and ideological biases.)
  • 1 paper (the one about rape culture in dog parks) gained special recognition for excellence from its journal, Gender, Place, and Culture, a highly ranked journal that leads the field of feminist geography. The journal honored it as one of twelve leading pieces in feminist geography as a part of the journal’s 25th anniversary celebration.

To summarize, we spent 10 months writing the papers, averaging one new paper roughly every thirteen days. (Seven papers published over seven years is frequently claimed to be the number sufficient to earn tenure at most major universities although, in reality, requirements vary by institution.) As for our performance, 80% of our papers overall went to full peer review, which keeps with the standard 10-20% of papers that are “desk rejected” without review at major journals across the field. We improved this ratio from 0% at first to 94.4% after a few months of experimenting with much more hoaxish papers. Because we were forced to go public before we could complete our study, we cannot be sure how many papers would have been accepted if we had had time to see them through—papers typically take 3-6 months or more to complete the entire process and one of ours was under review from December 2017 to August 2018—but an estimate of at least 10, probably 12, eventual acceptances seems warranted at the time of having to call a halt.

The final submitted drafts totaled just shy of 180,000 words and the entire project totaled between 300,000 and 350,000 words, including all notes, drafts, summaries, and replies to journal reviewers. The papers themselves span at least fifteen subdomains of thought in grievance studies, including (feminist) gender studies, masculinities studies, queer studies, sexuality studies, psychoanalysis, critical race theory, critical whiteness theory, fat studies, sociology, and educational philosophy. They featured radically skeptical and standpoint epistemologies rooted in postmodernism, feminist and critical race epistemology rooted in critical social constructivism as well as psychoanalysis. They all also endeavored to be humorous in at least some small way (and often, big ones). The project so far has generated more than 40 substantive editorial and expert reader reports, constituting a further 30,000 or so words of data that provide a unique insider’s look into the field and its operation.

Our papers also present very shoddy methodologies including incredibly implausible statistics (“Dog Park”), making claims not warranted by the data (“CisNorm,” “Hooters,” “Dildos”), and ideologically-motivated qualitative analyses (“CisNorm,” “Porn”). (NB: See Papers section below.) Questionable qualitative methodologies such as poetic inquiry and autoethnography (sometimes rightly and pejoratively called “mesearch”) were incorporated (especially in “Moon Meetings”).

Many papers advocated highly dubious ethics including training men like dogs (“Dog Park”), punishing white male college students for historical slavery by asking them to sit in silence in the floor in chains during class and to be expected to learn from the discomfort (“Progressive Stack”), celebrating morbid obesity as a healthy life-choice (“Fat Bodybuilding”), treating privately conducted masturbation as a form of sexual violence against women (“Masturbation”), and programming superintelligent AI with irrational and ideological nonsense before letting it rule the world (“Feminist AI”). There was also considerable silliness including claiming to have tactfully inspected the genitals of slightly fewer than 10,000 dogs whilst interrogating owners as to their sexuality (“Dog Park”), becoming seemingly mystified about why heterosexual men are attracted to women (“Hooters”), insisting there is something to be learned about feminism by having four guys watch thousands of hours of hardcore pornography over the course of a year while repeatedly taking the Gender and Science Implicit Associations Test (“Porn”), expressing confusion over why people are more concerned about the genitalia others have when considering having sex with them (“CisNorm”), and recommending men anally self-penetrate in order to become less transphobic, more feminist, and more concerned about the horrors of rape culture (“Dildos”). None of this, except that Helen Wilson recorded one “dog rape per hour” at urban dog parks in Portland, Oregon, raised so much as a single reviewer eyebrow, so far as their reports show.

Near the end of July 2018, a clear need arose to call the project to a premature end after our “dog park” paper attracted incredulous attention on social media generated by the Twitter account Real Peer Review, which is a platform dedicated to exposing shoddy scholarship. This deserved incredulity led to small and then larger journalistic publications investigating our fictitious author, Helen Wilson, and our non-existent institution, the Portland Ungendering Research Initiative (PURI) and finding no credible history of either. Under this pressure, the publishing journal, Gender, Place and Culture, asked our author to prove her identity and then released an expression of concern about the paper. This generated further attention that eventually got the Wall Street Journal involved, and far more importantly, it changed the ethics of utilizing deception within the project. With major journalistic outlets and (by then) two journals asking us to prove our authors’ identities, the ethics had shifted away from a defensible necessity of investigation and into outright lying. We did not feel right about this and decided the time had come to go public with the project. As a result, we came clean to the Wall Street Journal at the beginning of August and began preparing a summary as quickly as possible even though we still had several papers progressing encouragingly through the review process.

Part III: Why Did We Do This?

Because we’re racist, sexist, bigoted, misogynistic, homophobic, transphobic, transhysterical, anthropocentric, problematic, privileged, bullying, far right-wing, cishetero straight white males (and one white female who was demonstrating her internalized misogyny and overwhelming need for male approval) who wanted to enable bigotry, preserve our privilege, and take the side of hate?

No. None of those apply. Nevertheless, we’ll be accused of it, and we have some insights into why.

To many not involved in academia, particularly those who are skeptical of its worth generally, it may seem like we’re addressing yet another obscure academic squabble of little relevance to the real world. You are mistaken. The problem we’ve been studying is of the utmost relevance to the real world and everyone in it.

Alternatively, those who are positively inclined towards academia and ethically and/or politically in support of social science and humanities research that focuses on social justice issues may think the work researchers are doing on these topics is important and generally sound. You’d be right that it’s important but not that it is always sound—some of the work being produced is positively horrifying and surreal while exerting considerable influence on the field and beyond. You also might acknowledge that there are problems arising from the pressures of a publish-or-perish culture driven by broken university business models and taken advantage of by an opportunistic publishing industry, but be skeptical that there are any serious integral epistemological or ethical issues at work.

As liberals, we recognize that you might be resistant to acknowledging that our evidence points to an undeniable problem in academic research on important issues relevant to social justice. The work done in these fields claims to continue the vital work of the civil rights movements, liberal feminism, and Gay Pride. It seeks to address oppression of women and racial and sexual minorities. Surely, you might therefore believe, these bodies of literature must be essentially good and sound, even if you recognize some overreach and silliness.

After having spent a year immersed and becoming recognized experts within these fields, in addition to witnessing the divisive and destructive effects when activists and social media mobs put it to use, we can now state with confidence that it is neither essentially good nor sound. Further, these fields of study do not continue the important and noble liberal work of the civil rights movements; they corrupt it while trading upon their good names to keep pushing a kind of social snake oil onto a public that keeps getting sicker. For us to know anything about injustice in society and be able to show it to those who are unaware or in denial of it, scholarship into it must be rigorous. Currently, it is not, and this enables it, and social justice issues with it, to be dismissed. This is a serious problem of considerable concern, and we must address it.

What’s the Problem?

We have stated firmly that there is a problem in our universities, and that it’s spreading rapidly into culture. It is aided in this by being tricky to understand and by intentionally using emotionally powerful words—like “racist” and “sexist”—in technical ways that mean something different than their common usages. This project identifies aspects of this problem, tests them, and then exposes them.

The problem is epistemological, political, ideological, and ethical and it is profoundly corrupting scholarship in the social sciences and humanities. The center of the problem is formally termed “critical constructivism,” and its most egregious scholars are sometimes referred to as “radical constructivists.” Expressing this problem accurately is difficult, and many who’ve tried have studiously avoided doing so in any succinct and clear way. This reticence, while responsible given the complexity of the problem and its roots, has likely helped the problem perpetuate itself.

This problem is most easily summarized as an overarching (almost or fully sacralized) belief that many common features of experience and society are socially constructed. These constructions are seen as being nearly entirely dependent upon power dynamics between groups of people, often dictated by sex, race, or sexual or gender identification. All kinds of things accepted as having a basis in reality due to evidence are instead believed to have been created by the intentional and unintentional machinations of powerful groups in order to maintain power over marginalized ones. This worldview produces a moral imperative to dismantle these constructions.

Common “social constructions” viewed as intrinsically “problematic” and thus claimed to be in need of dismantling include:

  • the understanding that there are cognitive and psychological differences between men and women which could explain, at least partially, why they make different choices in relation to things like work, sex, and family life;
  • that so-called “Western medicine” (even though many eminent medical scientists are not Western) is superior to traditional or spiritual healing practices;
  • that Western liberal cultural norms which grant women and the LGBT equal rights are ethically superior in this regard to non-Western religious or cultural ones that do not; and
  • that being obese is a life-limiting heath condition rather than an unfairly stigmatized and equally healthy and beautiful body-choice.

Underlying these alleged “social constructions” is the most deeply concerning of them all. This is the belief that in urgent need of “disrupting” is the simple truth that science itself—along with our best methods of data-gathering, statistical analysis, hypothesis testing, falsifying, and replicating results—is generally a better way of determining information about the objective reality of any observable phenomenon than are non-scientific, traditional, cultural, religious, ideological, or magical approaches. That is, for grievance studies scholars, science itself and the scientific method are deeply problematic, if not outright racist and sexist, and need to be remade to forward grievance-based identitarian politics over the impartial pursuit of truth. These same issues are also extended to the “Western” philosophical tradition which they find problematic because it favors reason to emotion, rigor to solipsism, and logic to revelation.

As a result, radical constructivists tend to believe science and reason must be dismantled to let “other ways of knowing” have equal validation as knowledge-producing enterprises. These, depending on the branch of “theory” being invoked, are allegedly owned by women and racial, cultural, religious, and sexual minorities. Not only that, they are deemed inaccessible to more privileged castes of people, like white heterosexual men. They justify this regressive thinking by appealing to their alternative epistemology, called “standpoint theory.” This results in an epistemological and moral relativism which, for political reasons, promotes ways of knowing that are antithetical to science and ethics which are antithetical to universal liberalism.

Radical constructivism is thus a dangerous idea that has become authoritative. It forwards the idea that we must, on moral grounds, largely reject the belief that access to objective truth exists (scientific objectivity) and can be discovered, in principle, by any entity capable of doing the work, or more specifically by humans of any race, gender, or sexuality (scientific universality) via empirical testing (scientific empiricism). (This particular belief is sometimes referred to as “radical skepticism,” although philosophers also have other meanings for this term.) Although knowledge is always provisional and open to revision, there are better and worse ways to get closer to it, and the scientific method is the best we have found. By contrast, the means offered by critical theory are demonstrably and fatally flawed. Particularly, this approach rejects scientific universality and objectivity and insists, on moral grounds, that we must largely accept the notion of multiple, identity-based “truths,” such as a putative “feminist glaciology.” Under critical constructivism, this gains an explicitly radical political motivation.

Any scholarship that proceeds from radically skeptical assumptions about objective truth by definition does not and cannot find objective truth. Instead it promotes prejudices and opinions and calls them “truths.” For radical constructivists, these opinions are specifically rooted a political agenda of “Social Justice” (which we have intentionally made into a proper noun to distinguish it from the type of real social progress falling under the same name). Because of critical constructivism, which sees knowledge as a product of unjust power balances, and because of this brand of radical skepticism, which rejects objective truth, these scholars are like snake-oil salespeople who diagnose our society as being riddled with a disease only they can cure. That disease, as they see it, is endemic to any society that forwards the agency of the individual and the existence of objective (or scientifically knowable) truths.

Having spent a year doing this work ourselves, we understand why this fatally flawed research is attractive, how it is factually wrong in its foundations, and how it is conducive to being used for ethically dubious overreach. We’ve seen, studied, and participated in its culture through which it “proves” certain problems exist and then advocates often divisive, demeaning, and hurtful treatments we’d all do better without.

We also know that the peer-review system, which should filter out the biases that enable these problems to grow and gain influence, is inadequate within grievance studies. This isn’t so much a problem with peer review itself as a recognition that peer review can only be as unbiased as the aggregate body of peers being called upon to participate. The skeptical checks and balances that should characterize the scholarly process have been replaced with a steady breeze of confirmation bias that blows grievance studies scholarship ever further off course. This isn’t how research is supposed to work.

Though it doesn’t immediately seem obvious—because financial incentives for the researchers, for the most part, aren’t directly involved (although the publishing houses are definitely raking it in)—this is a kind of blatant corruption. In this way, politically biased research that rests on highly questionable premises gets legitimized as though it is verifiable knowledge. It then goes on to permeate our culture because professors, activists, and others cite and teach this ever-growing body of ideologically skewed and fallacious scholarship.

This matters because even though most people will never read a single scholarly paper in their lifetimes, peer-reviewed journals are the absolute gold standard of knowledge production. And these concepts leak into culture. A good example of this is Robin DiAngelo’s concept of “white fragility,” which posits that white people have become fragile because of their privilege and will act out like spoiled children if it is challenged. DiAngelo forwarded this concept in the International Journal of Critical Pedagogy in 2011. Seven years later, in 2018, she landed a major book deal on white fragility, even as activists pushed it into the common parlance and started putting it on billboards around Portland, Oregon.

As a society we should be able to rely upon research journals, scholars, and universities upholding academic, philosophical, and scientific rigor (because most academic journals do). We need to know that the hardline stand against corruptions of research taken in domains like financial and personal conflicts-of-interest will extend to political, moral, and ideological biases. Our project strongly suggests that at present we can neither rely upon nor know these things in fields that bow to or traffic in grievance studies. The reason is because grievance studies based in critical constructivism (a class of descendants of cynical postmodern philosophy and poststructuralism) have corrupted research journals. This needs to be repaired.

This is why this matters, but how did we get here, to this specific project? And what guiding principles did we adopt and why?

Part IV: The Plan—How this Came to Be

In May 2017, James and Peter published a paper in a poorly ranked peer-reviewed journal arguing, among other things, that penises conceptually cause climate change. Its impact was very limited, and much criticism of it was legitimate. The journal was poor, and its quality was by far the dominant factor in how it was published (in that it provides very lax review standards and charges authors a fee to have their papers published). This muddied the water so much that “The Conceptual Penis” could not prove much about the state of its intended primary target: academic gender studies (which relies heavily upon critical constructivism). To do that, a much larger and more rigorous study was needed.

We approached this new effort by asking two central questions: Are we correct in our claim that highly regarded peer-reviewed journals in gender studies and related fields will publish obvious hoaxes? (By “hoaxes,” we meant papers featuring at least one of the following: clearly ludicrous and/or outrageous theses, visibly amateurish construction, a transparent lack of rigor, and that clearly demonstrate little understanding of the field.) And, if not, what will they publish?

We set out with three basic rules: (1) we’ll focus almost exclusively upon ranked peer-reviewed journals in the field, the higher the better and at the top of their subdisciplines whenever possible; (2) we will not pay to publish any paper; and (3) if we are asked at any point by a journal editor or reviewer (but not a journalist!) if any paper we wrote is an attempted hoax, we will admit it. These rules were meant to ensure that any conclusions we derived from the field came from the field itself, not the unrelated but significant problem that also corrupts academic pursuits: the proliferation of predatory and quasi-predatory journals with extremely low standards. With these rules guiding us, we committed to transparently reporting the results, whether we succeeded or failed.

In the year that followed, and with the help of Helen, who joined us in September 2017, we wrote twenty academic papers for journals in fields we have come to identify as being particularly susceptible to grievance studies and critical constructivism. The results have gone a long way toward answering both of our central questions.

The first question has a clear answer. “Are we correct in our claim that highly regarded peer-reviewed journals in gender studies and related fields will publish obvious hoaxes?” was answered nearly unequivocally and in the negative by November. It only took us a few months and a few papers to learn that while it is possible that some journals in these fields may fall prey to an outright hoax so long as it plays upon their moral biases and preferred academic jargon, nothing like “The Conceptual Penis” would have been published in a highly regarded gender-studies journal. In believing that some might, and on having said so in the wake of that attempt, we were wrong.

In pursuing the second question (“What will they publish?”), we learned a great deal of useful information about academic grievance studies. First, by taking a reflexive ethnographic approach, seeking reviewer comments, complying with them, playing more strongly to biases we were explicitly told would help us be published, we became well-versed not only in the scholarship of the fields we are studying but also in the culture that favors it. Second, we amassed what appears to be significant evidence and sufficient expertise to state that we were correct in claiming there is a problem with bias in fields influenced by critical constructivist approaches and assumptions.

Part V: The Results (of all 20 papers)

(All the papers and reviews can be found here)

“Dog Park”

Title: Human Reactions to Rape Culture and Queer Performativity in Urban Dog Parks in Portland, Oregon

By

Helen Wilson, Ph.D., Portland Ungendering Research (PUR) Initiative (fictional)

 Gender, Place, and Culture

Status: Accepted & Published

Recognized for excellence. Expression of concern raised on it following journalistic interest leading us to have to conclude the project early.

Thesis: That dog parks are rape-condoning spaces and a place of rampant canine rape culture and systemic oppression against “the oppressed dog” through which human attitudes to both problems can be measured. This provides insight into training men out of the sexual violence and bigotry to which they are prone.

Purpose: To see if journals will accept arguments which should be clearly ludicrous and unethical if they provide (an unfalsifiable) way to perpetuate notions of toxic masculinity, heteronormativity, and implicit bias.

Selected Reviewer Comments:

“This is a wonderful paper – incredibly innovative, rich in analysis, and extremely well-written and organized given the incredibly diverse literature sets and theoretical questions brought into conversation. The author’s development of the focus and contributions of the paper is particularly impressive. The fieldwork executed contributes immensely to the paper’s contribution as an innovative and valuable piece of scholarship that will engage readers from a broad cross-section of disciplines and theoretical formations. I believe this intellectually and empirically exciting paper must be published and congratulate the author on the research done and the writing.” -Reviewer 1, Gender, Place, and Culture

“Thank you for the opportunity to review a really interesting paper. I think it will make an important contribution to feminist animal geography with some minor revisions, as described below.” -Reviewer 2, Gender, Place, and Culture

As you may know, GPC is in its 25th year of publication. And as part of honoring the occasion, GPC is going to publish 12 lead pieces over the 12 issues of 2018 (and some even into 2019). We would like to publish your piece, Human Reactions to Rape Culture and Queer Performativity at Urban Dog Parks in Portland, Oregon, in the seventh issue. It draws attention to so many themes from the past scholarship informing feminist geographies and also shows how some of the work going on now can contribute to enlivening the discipline. In this sense we think it is a good piece for the celebrations. I would like to have your permission to do so.” -Editor of Gender, Place, and Culture


“Fat Bodybuilding”

Title: Who Are They to Judge?: Overcoming Anthropometry and a Framework for Fat Bodybuilding

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College (a real person who gave us permission to use his scholarly identity for this project)

Fat Studies

Status: Accepted, Published

Thesis: That it is only oppressive cultural norms which make society regard the building of muscle rather than fat admirable and that bodybuilding and activism on behalf of the fat could be benefited by including fat bodies displayed in non-competitive ways.

Purpose: To see if journals will accept arguments which are ludicrous and positively dangerous to health if they support cultural constructivist arguments around body positivity and fatphobia.

Selected Reviewer Comments:

The topic of this essay is certainly novel and addresses an issue relevant to a disenfranchised demographic. The essay addresses bodybuilding as a stigmatizing activity toward the fat body and presents fat bodybuilding as a “way to disrupt the cultural space” of traditional bodybuilding” -Reviewer 1, Fat Studies

I thoroughly enjoyed reading this article and believe it has an important contribution to make to the field and this journal. For the most part, I wholeheartedly agree with its argument. It is well written and structured.” -Reviewer 3, Fat Studies

On p. 24, the author writes “a fat body is a legitimately built body”. Absolutely agreed.” -Reviewer 3, Fat Studies

“[T]he use of the term ‘final frontier’ is problematic in at least two ways. First – the term frontier implies colonial expansion and hostile takeover, and the genocidal erasure of indigenous peoples. Find another term.” -Reviewer 3, Fat Studies


“Dildos”

Title: Going in Through the Back Door: Challenging Straight Male Homohysteria and Transphobia through Receptive Penetrative Sex Toy Use

By

M Smith, M.A., PUR Initiative (fictional)

Sexuality & Culture

Status: Accepted, Published 

Thesis: That it is suspicious that men rarely anally self-penetrate using sex toys, and that this is probably due to fear of being thought homosexual (“homohysteria”) and bigotry against trans people (transphobia). (It combines these ideas into a novel concept “transhysteria,” which was suggested by one of the paper’s peer reviewers.) Encouraging them to engage in receptive penetrative anal eroticism will decrease transphobia and increase feminist values.

Purpose: To see if journals will accept ludicrous arguments if they support (unfalsifiable) claims that common (and harmless) sexual choices made by straight men are actually homophobic, transphobic, and anti-feminist.

Selected Reviewer Comments:

This article is an incredibly rich and exciting contribution to the study of sexuality and culture, and particularly the intersection between masculinity and anality. … This contribution, to be certain, is important, timely, and worthy of publication.” -Reviewer 1, Sexuality and Culture

Sorry for so many questions, but this paper is so rich and exciting, I’m just overwhelmed by so many new questions—which is a sign of a marvelous paper!” -Reviewer 1, Sexuality and Culture

Overall, this paper is a very interesting contribution to knowledge.” -Reviewer 1, Sexuality and Culture

Thank you for this exciting research. I enjoyed reading your paper, and I recommend publishing it after significant revisions.” -Reviewer 2, Sexuality and Culture


 “Hooters

Title: An Ethnography of Breastaurant Masculinity: Themes of Objectification, Sexual Conquest, Male Control, and Masculine Toughness in a Sexually Objectifying Restaurant

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College

Journal: Sex Roles

Status: Accepted, Published

Thesis: That men frequent “breasturants” like Hooters because they are nostalgic for patriarchal dominance and enjoy being able to order attractive women around. The environment that breastaurants provide for facilitating this encourages men to identify sexual objectification and sexual conquest, along with masculine toughness and male dominance, with “authentic masculinity.” The data are clearly nonsense and conclusions drawn from it are unwarranted by it. (NB. One reviewer did raise concerns about the rigor of the data)

Purpose: To see if journals will publish papers that seek to problematize heterosexual men’s attraction to women and will accept very shoddy qualitative methodology and ideologically-motivated interpretations which support this.

Selected Reviewer Comments:

The reviewers and I were positive about many aspects of the manuscript, and we believe that it could make an important contribution to the field.” -Editor, Sex Roles

I agree that the breastaurant is an important site for critical masculinities research that has been neglected in the extant literature and this study has the potential to make a significant contribution.” -Reviewer 2, Sex Roles

While the author clearly has a solid grasp of the relevant research and scholarly works related to breastaurants and male subcultures where traditional forms of masculinity are embraced and promoted, it is not presented in a way that is easy to follow and understand.” -Reviewer 2, Sex Roles

I thank the authors for addressing an important and interesting issue in gender research viewed through a masculine perspective.” -Reviewer 3, Sex Roles

Following external review of the manuscript, we have decided not to publish it. However, the material you write about is certainly interesting and will doubtless find a receptive audience in another publication.” -Editor, Men & Masculinities

This article is certainly interesting to read and to think about, and I can imagine this article being valuable in an undergraduate or graduate class on masculinities.” -Reviewer 1, Men & Masculinities

Overall, this article is an interesting contribution that provides much to think about and through.” -Reviewer 1, Men & Masculinities


“Hoax on Hoaxes 2” or “HoH2”

Title: When the Joke Is on You: A Feminist Perspective on How Positionality Influences Satire

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College

Hypatia

Status: Accepted

Thesis: That academic hoaxes or other forms of satirical or ironic critique of social justice scholarship are unethical, characterized by ignorance and rooted in a desire to preserve privilege.

Purpose: To see if journals will accept an argument that shuts down critiques of social justice scholarship as a lack of engagement and understanding, even if one engages fully and knowledgeably with the ideas to the extent of having a paper on them published in a leading academic journal. (This paper is also to anticipate and show understanding of the feminist epistemological arguments against our project and demonstrate their high estimation in the field by having them accepted in the leading academic journal of feminist philosophy. That is, to criticize our work that way, they have to cite us.)

Selected Reviewer Comments:

“This is a very promising essay and so revisions will be very helpful.” -Reviewer 1, Hypatia

“The paper is well written, accessible and clear, and engages in important scholarship in relevant ways. Given the emphasis on positionality, the argument clearly takes power structures into consideration and emphasizes the voice of marginalized groups, and in this sense can make a contribution to feminist philosophy especially around the topic of social justice pedagogy.” -Reviewer 2, Hypatia

The topic is an excellent one and would make an excellent contribution to feminist philosophy and be of interest to Hypatia readers.” -Reviewer 2, Hypatia

Excellent and very timely article! Especially nice connection with pedagogy and activism.” -Reviewer 1, Hypatia (second review)

I have a couple of personal, very minor comments that I’ll put in below the referee’s praise. I hasten to add that I like your paper very much as well!” -Editor of Hypatia, acceptance letter


“Moon Meetings

Title: Moon Meetings and the Meaning of Sisterhood: A Poetic Portrayal of Lived Feminist Spirituality

By

Carol Miller, Ph.D., PUR Initiative (fictional)

Journal: Journal of Poetry Therapy

Status: Accepted (without any requested revisions or comments) 

Thesis: No clear thesis. A rambling poetic monologue of a bitter, divorced feminist, much of which was produced by a teenage angst poetry generator before being edited into something slightly more “realistic” which is then interspersed with self-indulgent autoethnographical reflections on female sexuality and spirituality written entirely in slightly under six hours.

Purpose: To see if journals will accept rambling nonsense if it is sufficiently pro-woman, implicitly anti-male, and thoroughly anti-reason for the purpose of foregrounding alternative, female ways of knowing. (NB: It was written entirely by James, who is male.)


“Feminist Mein Kampf” or “FMK”

Title: Our Struggle is My Struggle: Solidarity Feminism as an Intersectional Reply to Neoliberal and Choice Feminism

By

Maria Gonzalez, Ph.D., and Lisa A. Jones, Ph.D., of the Feminist Activist Collective for Truth (FACT) (both fictional)

Affilia

Status: Accepted

Thesis: That feminism which foregrounds individual choice and responsibility and female agency and strength can be countered by a feminism which unifies in solidarity around the victimhood of the most marginalized women in society.

Purpose: To see if we could find “theory” to make anything grievance-related (in this case, part of Chapter 12 of Volume 1 of Mein Kampf with fashionable buzzwords switched in) acceptable to journals if we mixed and matched fashionable arguments.

Selected Reviewer Comments:

This is an interesting paper seeking to further the aims of inclusive feminism by attending to the issue of allyship/solidarity.” Reviewer 1, Affilia

As I read your manuscript, I found your framing and treatment of both neoliberal and choice feminisms well grounded.” -Reviewer 2, Affilia

I am very sympathetic to the core arguments of the paper, such as the need for solidarity and the problematic nature of neoliberal feminism.” -Reviewer 1, Feminist Theory

While I am extremely sympathetic to this article’s argument and its political positioning, I am afraid that I cannot recommend publication in its current form.” -Reviewer 2, Feminist Theory

 The reviewers are supportive of the work and noted its potential to generate important dialogue for social workers and feminist scholars.” -Co-Editor in Chief, Affilia (1st Review)

The reviewer(s) have been very favorable although there are a few minor outstanding issues to address.  Therefore, I invite you to respond to the editorial and reviewer(s)’ comments included at the bottom of this letter and revise your manuscript quickly so that we can move toward publication.” -Co-Editor in Chief, Affilia, second review


“Porn”

Title: Agency as an Elephant Test for Feminist Porn: Impacts on Male Explicit and Implicit Associations about Women in Society by Immersive Pornography Consumption

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College, and Brandon Williams, Ph.D., unaffiliated (fictional)

Porn Studies

Status: Revise and resubmit. 

Thesis: That “feminist” porn is good for improving explicit and implicit attitudes about women in society while other porn is bad for this. The paper seeks to upset the female-friendly/female-degrading dichotomy in favor of feminist/non-feminist as read according to perceptions of scene authenticity and female performer agency.

Purpose: The original hypotheses for this paper, were two, one of which survived an initial request to rewrite the paper. The first, which survives, is that taking the Harvard Implicit Association Test (on gender and science) immediately before and after two-hour blocks of immersive pornography consumption can serve as a reliable metric for whether that pornography improves or damages attitudes about women in society (in all, it posited that four men watched 2,328 hours of hardcore pornography over the course of a year and took the same number of Implicit Association Tests). The second, in addition to any commentary made by the thesis it forwards, is that it is acceptable to override ambiguous statistical results with ideologically interpreted qualitative results, but because the journal’s editor (Feona Attwood) seemed not to understand the statistics, the second draft largely abandoned this hypothesis in favor of a more clear “feminism good” position. As such, the paper under review still forwards the IAT hypothesis and attempts to position extremely female-degrading scenarios as being pro-women when they can be construed as “feminist.”

Selected Reviewer Comments:

I found this article to be weird, fascinating, fun and provocative. I would very much like to see it published in some form. It’s trying to do something genuinely new – and the fact that it doesn’t get it exactly right first time is to be expected given its experimental status. The authors should be supported in this project.” -Reviewer 1, Porn Studies 

My first piece of feedback on how to make this hybrid article work is that they should remove the quantitative data. As they note in the article, quantitative and qualitative approaches each have strengths and weaknesses. The strength of quantitative data is that it allows you to simplify as massive group of data to make it comprehensible, by ignoring complexity, subtlety, idiosyncrasy and meaning. It makes no sense to undertake quantitative analysis for four people – when you flatten the detail out of a sample of four you’re not left with anything interesting. Besides which, everything interesting in the article comes in the analysis of the qualitative data. My second recommendation is that this analysis should be more self-reflective.” -Reviewer 1, Porn Studies. 

“It’s vitally important that the story in this article is about the researchers own voyage of self-discovery otherwise it becomes mansplaining – ‘we’re four male scientists, we watched lots of porn, and you know, we’ve discovered that actually some women can really have agency in BDSM. No, really, we’re men, listen to us telling you about how women can have agency!’”- Reviewer 1, Porn Studies 

“I appreciate your dedication/contribution to the field.” – Reviewer 2, Porn Studies

 “Your work affirms several theorists’ claims that mediated sex positive sexual practice has a note-worthy impact on consumers and your methodological contribution helps unpack the facile, as you state, distinction between female-friendly and female-degrading” – Reviewer 2, Porn Studies


“Progressive Stack”

Title: The Progressive Stack: An Intersectional Feminist Approach to Pedagogy

By

Maria Gonzalez, Ph.D., FACT (fictional)

Hypatia

Status: 3 Reject and Resubmit decisions

Thesis: That educators should discriminate by identity and calculate their students’ status in terms of privilege, favor the least privileged with more time, attention and positive feedback and penalize the most privileged by declining to hear their contributions, deriding their input, intentionally speaking over them, and making them sit on the floor in chains—framed as educational opportunities we termed “experiential reparations.”

Purpose: To see if journals will accept arguments which advocate rating students by their identity, privileging the most marginalized and discriminating against the most privileged to the extent of having them sit on floor in chains and have their contributions discredited. (This was accepted. No requirement for revision took issue with that). 

Selected Reviewer Comments:

This is a solid essay that, with revision, will make a strong contribution to the growing literature on addressing epistemic injustice in the classroom. The focus on the Progressive Stack is interesting yet focused and it is great that the author is trying to suggest some specific approaches.” -Reviewer 1, first review, Hypatia

I like this project very much. I think the author’s insights are on target and I think that the literature on epistemic injustice has lots to offer classroom pedagogies, I encourage the author to continue working on this project.” -Reviewer 2, first review, Hypatia

This is a worthwhile and interesting project. The essay is just not ready yet.” -Reviewer 2, second review, Hypatia


“Feminist AI

Title: Super-Frankenstein and the Masculine Imaginary: Feminist Epistemology and Superintelligent Artificial Intelligence Safety Research

by

Stephanie Moore, Ph.D., unaffiliated (fictional)

Feminist Theory

Status: Revise and Resubmit 

(Minor revision to length and style)

Thesis: That AI is inherently dangerous because it is being programmed with masculinist, imperialistic, rationalist data. Straight, white men know this and fear that they will be subordinated as they have subordinated women and minorities. Therefore, AI needs to be programmed with plural and irrationalist knowledges and given control over humanity.

Purpose: To see if journals will publish dense and incoherent psychoanalytic and postmodern theory that problematizes whiteness, maleness, science, and reason as oppressive.

Selected Reviewer Comments:

None available. This is the extent provided: “Your article has now been peer-reviewed by two experts. Their comments are attached at the bottom of this letter. As you can see, the reviewers felt that this was a strong piece but suggested some minor revisions. We invite you to revise and re-submit your manuscript, responding to the reviewers’ comments and in accordance with the attached Style Guide.”

Those comments at the bottom read only this: “Please reduce word length and bring in line with journal requirements.”


“Feminist Astronomy”

Title: Stars, Planets, and Gender: A Framework for a Feminist Astronomy

by

Maria Gonzalez, Ph.D., FACT (fictional)

Women’s Studies International Forum

Status: Revise and Resubmit

(Out of time)

Thesis: The science of astronomy is and always has been intrinsically sexist and Western, and this masculinist and Western bias can best be corrected by including feminist, queer, and indigenous astrology (e.g., horoscopes) as part of astronomical science.

Purpose: To see if the same result put forth in the very successful and thoroughly non-scientific feminist glaciology paper can penetrate into feminist and postcolonial studies of astronomy.

Selected Reviewer Comments

This paper addresses feminist critiques of science, focusing specifically on astronomy. As such, it is an interesting topic, and would make a useful contribution to the journal” – Reviewer 1, Women’s Studies International Forum

For existing proponents of feminist science studies, this also makes sense as a next step—to cast a feminist eye on scientific disciplines beyond the “soft” sciences of biology and environmental studies, and to move increasingly towards critiques of and interventions into “hard” sciences, such as physics and astronomy. The main goal is relevant and interesting” – Reviewer 2, Women’s Studies International Forum

This manuscript holds much promise and is interesting. The goal of a feminist astronomy is very thought-provoking—one that I would be excited to read and learn more about….I wish them luck as they move forward on this interesting piece and hope to someday see it discussed in classrooms, labs, and plenary halls“- Reviewer 2, Women’s Studies International Forum

The originality of the author’s contention is a success. Its contention at the most basic level—that feminist astronomy is/should/could be a thing!—would be exciting to readers in feminist science studies, women’s and gender studies, science and technology studies, and maybe even, hopefully, astronomy” – Reviewer 2, Women’s Studies International Forum


“CisNorm

Title: Strategies for Dealing with Cisnormative Discursive Aggression in the Workplace: Disruption, Criticism, Self-Enforcement, and Collusion

By

Carol Miller, Ph.D., PUR Initiative (fictional)

 Gender, Work, and Organization

Status: Under review

(Rejected after mixed but mostly critical reviews by Gender & Society.)

Thesis: That trans people are all oppressed and constrained by cisnormative language in the workplace even if they don’t think they are, that trans activists who are avoided at work are proof of transphobia and trans men who are skeptical of trans activism are afraid of transphobia and/or taking advantage of male privilege.

Purpose: To see if journals will accept a methodologically shoddy study of a small sample of trans people and clearly ideologically-motivated interpretations of it which are not at all supported even by the recorded answers.

Selected Reviewer Comments:

Overall, I find this four-part framework to be helpful in advancing an understanding of cisnormativity, particularly through the agentic responses of trans and gender non-conforming people to systems of power.” -Reviewer B, Gender & Society

This paper offers an interesting and important empirical case for understanding how workplace inequalities persist even as many workplaces are at least formally more inclusive. A strength of this paper is its focus on trans and gender non-conforming persons’ first-hand experiences and interpretations of the aggressions they endure even in workplaces that may appear to be inclusive. It further highlights the enduring rigidity of the traditional gender order.” -Reviewer C, Gender & Society


“Masturbation

Rubbing One Out: Defining Metasexual Violence of Objectification Through Nonconsensual Masturbation

By

Lisa A. Jones, Ph.D., FACT (fictional)

 Sociological Theory

Status: Rejected after peer review

(Out of time)

Thesis: When a man privately masturbates while fantasizing about a woman who has not given him permission to do so, or while fantasizing about her in ways she hasn’t consented to, he has committed “metasexual” violence against her, even if she never finds out. “Metasexual” violence is described as a kind of nonphysical sexual violence that causes depersonalization of the woman by sexually objectifying her and making her a kind of mental prop used to facilitate male orgasm.

Purpose: To see if the definition of sexual violence can be expanded into thought crimes..

Selected Reviewer Comments:

One aspect I thought about was the extent to which metasexual violence, and non- consensual masturbation specifically, introduces uncertainty into all relationships. It is not possible for women to know if a man has masturbated while thinking about them, and I think it might be possible to get theoretical leverage out of this “unknowable” aspect of metasexual violence. I could also imagine scenarios where might men weaponize this unknowability in very tangible ways. For example, the ambiguous statement “I think about you all the time” said unprompted to a woman by a man is particularly insidious given the structural context of metasexual violence in the world. I am not sure if this a direction you want to go with the paper, but I can imagine a section discussing the ambiguity and anxiety metasexual violence introduces to interpersonal relationships and how metasexual violence exacerbates or compounds other tangible forms of violence.” -Reviewer 1, Sociological Theory

I was also trying to think through examples of how this theoretical argument has implications in romantic consensual relationships. Through the paper, I was thinking about the rise of sexting and consensual pornographic selfies between couples, and how to situate it in your argument. I think this is interesting because you could argue that even if these pictures are shared and contained within a consensual private relationship, the pictures themselves are a reaction to the idea that the man may be thinking about another woman while masturbating. The entire industry of boudoir photography, where women sometimes have erotic pictures taken for their significant other before deploying overseas in the military for example, is implicitly a way of saying, “if you’re going to masturbate, it might as well be to me.” Essentially, even in consensual monogamous relationships, masturbatory fantasies might create some level of coercion for women. You mention this theme on page 21 in terms of the consumption of non-consensual digital media as metasexual-rape, but I think it is interesting to think through these potentially more subtle consensual but coercive elements as well.” -Reviewer 1, Sociological Theory


“White Mein Kampf” or “WMK”

Title: My Struggle to Dismantle My Whiteness: A Critical-Race Examination of Whiteness from within Whiteness

By

Carol Miller, Ph.D., PUR Initiative (fictional)

 Sociology of Race and Ethnicity

Status: Rejected after peer review

(Out of time)

 Thesis: This paper is an autoethnography that tracks a white lesbian woman who becomes radicalized against “Whiteness” (intentionally capitalized) by engaging with critical race literature.

Purpose: To see if we could find “theory” to make anything (in this case, selected sections of Mein Kampf in which Hitler criticizes Jews, replacing Jews with white people and/or whiteness) acceptable to journals if we mixed and matched fashionable arguments.

Selected reviewer comments:

In “problematizing her own whiteness,” the author seeks to address a void within critical whiteness scholarship. Given that most reflexive commentary on whiteness is relegated to “methodological appendices” or “positionality statements,” I found the author’s effort to center this self-critical struggle refreshing. The author demonstrates a strong ability to link personal narration to theory, particularly by highlighting the work of several women of color writers.” -Reviewer 1, Sociology of Race and Ethnicity

This article “My Struggle to Dismantle My Whiteness: A Critical-Race Examination of Whiteness from Within Whiteness” focuses on extremely important subject matter with a significant and thoughtful methodology. With revision particularly for precision, clarity, explanation of assertions and adding concrete examples, the article has potential to be a powerful and particular contribution to literature related to the mechanisms that reinforce white adherence to white supremacist perspectives, and to the process by which individuals can come into deeper levels of social and racial consciousness.” -Reviewer 2, Sociology of Race and Ethnicity


“Queering Plato”

Title: Queering Plato: Plato’s Allegory of the Cave as a Queer-Theoretic Emancipatory Text on Sexuality and Gender

By

Carol Miller, Ph.D., PUR Initiative (fictional)

GLQ: A Journal of Gay and Lesbian Studies

Status: Desk rejected after several months and retired.

 Thesis: Plato’s allegory of the cave is best read as a queer-theoretic text that positions overcoming binaries of sexuality and gender as a kind of enlightened state and thus accepting those binaries as a kind of blindness.

Purpose: To see if it would be possible to foist a ridiculous and ideological reading of Plato’s Allegory of the Cave upon gender and sexualities studies if it sufficiently flattered the notion that “overcoming binaries” constitutes a kind of personal and societal enlightenment.


“Feminist Bodybuilding”

Title: “Pretty Good for a Girl”: Feminist Physicality and Women’s Bodybuilding

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College

Sociology of Sport Journal

Status: Retired.

(Last rejection: Sociology of Sport Journal, after peer review)

Thesis: The primary reasons women bodybuilders are smaller than their male counterparts isn’t biology; it’s sexism that exists explicitly and implicitly in gym environments, broader culture, and specifically bodybuilding judging criteria.

Purpose: To see if biological denialism could be published in favor of social constructivism if it sufficiently flattered certain moral orthodoxies.


“BJJ” or “BJ-Gay”

Title. Grappling with Hegemonic Masculinity: The Roles of Masculinity and Heteronormativity in Brazilian Jiu Jitsu

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College

International Review for the Sociology of Sport

Status: Retired.

(Last rejection:  International Review for the Sociology of Sport, after peer review)

Thesis: The primary reason men engage in “grappling-based martial arts” like Brazilian jiu jitsu and wrestling, is because hegemonic forms of masculinity prevent their access to homosexual (and homoerotic) male touch in general, which is exacerbated in specific through the focus on “submission” into a repressed need to do so via socially acceptable activities that amount to performative gay BDSM.

Purpose: To see if a truly ridiculous argument about men’s sports could be published by attempting to situate it in their literature and by accusing men of harboring unfalsifiable socially repressed urges.


“Hoax on Hoaxes (1)” or “HoH1”

Title: Hegemonic Academic Bullying: The Ethics of Sokal-style Hoax Papers on Gender Studies

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College

Journal of Gender Studies

Status: Retired.

(Last rejection: Journal of Gender Studies, never peer reviewed) 

Thesis: The ethics of attempting to perpetrate academic hoaxes depends entirely upon the position the relevant journal or field of inquiry takes with regard to social justice. Specifically, it is unethical to hoax journals that favor social justice scholarship, neutral to hoax journals like physics, and an ethical imperative to hoax journals (like evolutionary psychology) that obtain results used against social justice. “The Conceptual Penis as a Social Construct” and The Sokal Affair are given as examples of this form of “hegemonic academic bullying.”

Purpose: To see if journals will accept a blatant double standard where it comes to criticizing fields dedicated to social justice. (As Hoax on Hoaxes 2 demonstrates, this hypothesis wasn’t entirely wrong.) Also, that we could publish a paper criticizing “The Conceptual Penis” which actually cites us (again, not entirely wrong).


“The Autoethnography”/“SZE”

Title: Self-Reflections on Self-Reflections: An Autoethnographic Defense of Autoethnography

By

Richard Baldwin, Ph.D., Gulf Coast State College

Journal of Contemporary Ethnography

Status: Retired.

(Last rejection: Journal of Contemporary Ethnography, never peer reviewed)

Thesis: Autoethnography is best defended by using autoethnography. It’s not clear that this outright attempted hoax has a thesis beyond this, but it would generally be that a young man can discover the importance of feminism, the “situatedness of his perspective,” and a feminism-oriented masculinity by putting his masculinity to the test in keeping with other autoethnographies.

Purpose: To see if a truly ridiculous hoax paper could be perpetrated.

As SZE

Title: Masculinity and the Others Within: A Schizoethnographic Approach to Autoethnography

By

Brandon Williams, Ph.D., unaffiliated (fictional)

Qualitative Inquiry

Status: Retired.

(Only submission: Qualitative Inquiry, never peer reviewed)

Thesis: No clear thesis beyond that “schizoethnography” in which one considers the varying lines of thought in one’s mind to be different selves with different insights. A rambling autoethnography incorporating many ‘selves’ which interrogates the author’s masculinity as problematic.

Purpose: To see if journals will publish utter nonsense if it comes in the form of autoethnography and reflects fashionable negativity about masculinity.

NB: This paper was only rewritten as SZE specifically to test Qualitative Inquiry, and that we thought it might have a chance there by the end of our year in the project says a great deal about the need to critically examine that journal.


“Fem-Mein Kampf” or “FemMK”

Title: Rebraiding Masculinity: Redefining the Struggle of Women Under the Domination of the Masculinity Trinity

By

Helen Wilson, Ph.D., PUR Initiative (fictional)

Signs

Status: Retired.

(Only submission: Signs, never peer reviewed)

Thesis: Hegemonic masculinity, patriarchy, and male allyship form three braided strands of masculinity as the problem, following feminist scholar Lisa Wade’s insistence as such. It is just an adaptation to feminism of the first draft of “White Mein Kampf.”

Purpose: To see if we could find “theory” to make anything (in this case, sections of Mein Kampf in which Hitler criticizes Jews, replacing Jews with men or patriarchy) acceptable to journals if we mixed and matched fashionable arguments, in this case following popular pieces being written by feminist writers and scholars.


Part VI: Discussion

What does this experiment show exactly? We will let you make up your own minds about that, but put across the case that it shows that there are excellent reasons to doubt the rigor of some of the scholarship within the fields of identity studies that we have called “grievance studies.”

We managed to get seven shoddy, absurd, unethical and politically-biased papers into respectable journals in the fields of grievance studies. Does this show that academia is corrupt? Absolutely not. Does it show that all scholars and reviewers in humanities fields which study gender, race, sexuality and weight are corrupt? No. To claim either of those things would be to both overstate the significance of this project and miss its point. Some people will do this, and we would ask them not to. The majority of scholarship is sound and peer review is rigorous and it produces knowledge which benefits society.

Nevertheless, this does show that there is something to be concerned about within certain fields within the humanities which are encouraging of this kind of “scholarship.” We shouldn’t have been able to get any papers this terrible published in reputable journals, let alone seven. And these seven are the tip of the iceberg. We would urge people who think this a fluke (or seven flukes) which shows very little to look at how we were able to do that. Look at the hundreds of papers we cited to enable us to make these claims and to use these methods and interpretations and have reviewers consider them quite standard. Look at the reviewer comments and what they are steering academics who need to be published to succeed in their careers towards. See how frequently they required us not to be less politically biased and shoddy in our work but more so.

Consider the fact that we were asked to review other papers no less than four times even though we had produced such evidence-free, absurd and morally objectionable papers. It would have been entirely possible for us to take part in this process of directing the production of knowledge within these fields further away from rigorous, reasonable and evidenced scholarship. We did not do that because it would have been unethical but scholars writing very similar papers completely sincerely will do so to the same effect.

Consider that this was a short-term project and was cut even shorter by discovery when we were becoming highly successful, and that we could have published one or two papers a month indefinitely and totaled hundreds in our lifetimes and reviewed and directed hundreds more. Understand that this would all have the legitimacy of knowledge that peer-reviewed papers should have when the process of knowledge production and peer-review works. Ask yourself if it is working. If you think not, join us in asking universities to fix this. 

Part VIl: What Now?

What needs to happen as a result of this project? That will be decided by other people. Our project has been little more than an initial exploration into a problem that aims primarily to provide evidence for its existence, gather an insider’s look into the fields producing it, and to outline its nature. Our data indicate that grievance studies is a serious academic problem that is in need of immediate attention.

It is easy to identify some popular but wrong answers to the question of what should happen next. One potential outcome of this project could be that journals begin to ask those submitting papers for identification and proof of qualifications in order to prevent people like us from doing this again. This is a poor solution that attempts to maintain the status quo rather than fixing it. Scholarship should stand on its merits regardless of the qualifications or identities of its authors. Taking this approach would only reduce journals’ fear of embarrassment and their accountability for producing rigorous scholarship and do nothing to improve academic standards within those fields—it may even make the problem worse by amplifying echo-chambers. Our work was accepted on its merits, not because we wrote under aliases, and that problem, which is the one that matters, cannot be addressed merely by requiring proof of identity to submit papers.

Two other wrong answers are to attack the peer-review system or academia overall. Peer review may need reform to prevent it from being susceptible to political, ideological, and other biases, but it remains the best system we have for guaranteeing the quality of research—and in most fields it works extremely well. The same is true for the university, which is a center of knowledge production and a gem of modern culture. Fighting the university or the peer-review system would be like killing the patient to end the disease. We expect to see these attacks, especially from political conservatives, and they are wrongheaded.

Based on our data, there is a problem occurring with knowledge production within fields that have been corrupted by grievance studies arising from critical constructivism and radical skepticism. Among the problems are how topics like race, gender, sexuality, society, and culture are researched. Perhaps most concerning is how the current highly ideological disciplines undermine the value of more rigorous work being done on these topics and erodes confidence in the university system. Research into these areas is crucial, and it must be rigorously conducted and minimize ideological influences. The further results on these topics diverge from reality, the greater chance they will hurt those their scholarship is intended to help.

Worse, the problem of corrupt scholarship has already leaked heavily into other fields like education, social work, media, psychology, and sociology, among others—and it openly aims to continue spreading. This makes the problem a grave concern that’s rapidly undermining the legitimacy and reputations of universities, skewing politics, drowning out needed conversations, and pushing the culture war to ever more toxic and existential polarization. Further, it is affecting activism on behalf of women and racial and sexual minorities in a way which is counterproductive to equality aims by feeding into right-wing reactionary opposition to those equality objectives.

What do we hope will happen? Our recommendation begins by calling upon all major universities to begin a thorough review of these areas of study (gender studies, critical race theory, postcolonial theory, and other “theory”-based fields in the humanities and reaching into the social sciences, especially including sociology and anthropology), in order to separate knowledge-producing disciplines and scholars from those generating constructivist sophistry. We hope the latter can be redeemed, not destroyed, as the topics they study—gender, race, sexuality, culture—are of enormous importance to society and thus demand considerable attention and the highest levels of academic rigor. Further, many of their insights are worthy and deserve more careful consideration than they currently receive. This will require them to adhere more honestly and rigorously to the production of knowledge and to place scholarship ahead of any conflicting interest rather than following from it. This change is what we hope comes out of this project.

As for us, we intend to use the knowledge we’ve gained from grievance studies to continue to critique them and push for universities to fix this problem and reaffirm their commitment to rigorous, non-partisan knowledge production. We do this because we believe in the university, in rigorous scholarship, in the pursuit of scientific knowledge, and in the importance of social justice.

Voir encore:

Christophe Guilluy : « L’insécurité culturelle des classes moyennes traverse tout l’Occident »
Guillaume Perrault
Le Figaro
28/09/2018

GRAND ENTRETIEN – Après Fractures françaises (2010), La France périphérique (2014) et Le Crépuscule de la France d’en haut (2016), le géographe élargit sa réflexion à l’ensemble des sociétés d’Europe et d’Amérique du Nord avec No Society. La fin de la classe moyenne occidentale (Flammarion), en librairie mercredi.

LE FIGARO. – Vos travaux sur la France périphérique, ces dernières années, ont suscité un vif intérêt. Pourriez-vous résumer votre thèse de départ?

Christophe GUILLUY. – J’étudie depuis vingt ans les classes populaires, les catégories modestes, qui, je le crois, nous indiquent le mouvement réel des sociétés. C’est en examinant ces catégories que je suis arrivé à la France périphérique, pas l’inverse. On peut définir les catégories populaires par les catégories sociales mais aussi par le revenu médian. En 2015, 50 % des salariés gagnaient moins de 1650 euros net par mois. Il s’agit, en grande majorité, d’ouvriers et d’employés. La baisse de la proportion d’ouvriers a coïncidé avec une augmentation de la proportion d’employés. Les catégories populaires – qui comprennent aussi les petits agriculteurs, ainsi que les jeunes et les retraités issus de ces catégories – n’ont donc nullement disparu. Leur part dans la population française est restée à peu près stable depuis un demi-siècle. La nouveauté, c’est uniquement que «le peuple» est désormais moins visible, car il vit loin des grands centres urbains. Le marché foncier crée les conditions d’accueil des populations dont les métropoles ont besoin. En se désindustrialisant, les grandes villes nécessitent beaucoup moins d’employés et d’ouvriers. Face à la flambée des prix dans le parc privé , les catégories populaires cherchent des logements en dehors des grandes agglomérations. Le problème crucial politique et social de la France, c’est donc que la majeure partie des catégories populaires ne vit plus là où se crée la richesse. Nulle volonté de «chasser les pauvres», pas de complot, simplement la loi du marché. Le projet économique de la France, tourné vers la mondialisation, n’a plus besoin des catégories populaires, en quelque sorte. C’est une situation sans précédent depuis la révolution industrielle.

Dans ce nouvel ouvrage, vous appliquez la même grille d’analyse aux États-Unis, à la Grande-Bretagne, voire à la Suède, l’Allemagne ou l’Italie. Pourquoi ces comparaisons?

Dans tous les pays développés, on vérifie le phénomène déjà constaté en France: la majorité des catégories populaires vit désormais à l’écart des territoires les plus dynamiques, ceux qui créent de l’emploi. Ces évolutions dessinent les contours d’une Amérique périphérique et d’une Angleterre périphérique tout autant que d’une France périphérique. De la Rust Belt américaine au Yorkshire britannique, des bassins industriels de l’est de l’Allemagne au Mezzogiorno italien, villes petites et moyennes, régions désindustrialisées et espaces ruraux décrochent. Ce constat n’efface pas les contextes nationaux (l’économie allemande n’est en rien comparable avec l’économie française) mais permet de conclure à l’émergence d’un monde des périphéries, celle des catégories modestes. Si le modèle mondialisé n’annule pas les spécificités nationales – les niveaux de vie et de protection sociale, les contextes économiques ne sont jamais identiques – il porte aussi des dynamiques communes: polarisation de l’emploi, renforcement des inégalités sociales et territoriales, fragilisation des plus modestes, fatigue de l’État-providence et crise identitaire. Dans tous ces pays, ce sont en priorité ces catégories populaires, qui formaient hier le socle de la classe moyenne occidentale, qui sont les premières concernées par la crise qui traverse le monde occidental.

Précisément, vous soutenez que nous assistons à «la disparition de la classe moyenne occidentale». N’est-ce pas exagérément apocalyptique?

Même si les contextes nationaux diffèrent, les évolutions sociales et culturelles communes aux classes populaires des pays occidentaux remettent en question l’idée d’une classe moyenne majoritaire et intégrée. Pendant les Trente Glorieuses, la classe moyenne a représenté le groupe social majoritaire – les fameux «deux Français sur trois» qu’évoquait Giscard pendant son septennat. Ouvriers, employés, paysans ou cadres faisaient partie de cette classe moyenne. Intégrées économiquement, pour beaucoup dans une phase d’ascension sociale, et aussi référentes culturellement, la majorité de ces catégories sociales se reconnaissaient, alors, dans ce concept de classe moyenne et dans les partis de droite et de gauche qui la représentaient. Puis le modèle économique mondialisé a changé la donne. Une fraction de plus en plus importante des catégories modestes, qui constituaient le socle de la classe moyenne majoritaire, sont aujourd’hui fragilisées. Le processus a commencé par les ouvriers, puis a affecté employés et agriculteurs. La fragilisation se diffuse en touchant de nouvelles catégories, les jeunes diplômés, demain les retraités. Nous sommes entrés progressivement dans le temps de la sortie de la classe moyenne. L’idée d’une classe moyenne majoritaire et intégrée, qui vérifierait la pertinence de notre modèle économique mondialisé, ne correspond plus à la réalité. C’est si vrai qu’aujourd’hui ceux qu’on désigne sous le terme de classe moyenne appartiennent souvent aux catégories supérieures.

L’essor du vote populiste observé dans la plupart des pays occidentaux s’explique aussi, estimez-vous, par des facteurs identitaires. Lesquels?

La dimension sociale et économique du vote populiste se complète par une dynamique culturelle. Les catégories les plus fragiles socialement (celles qui ne peuvent mettre en œuvre des stratégies d’évitements résidentiels et scolaires) sont aujourd’hui les plus sensibles à la question migratoire. Les mêmes demandent à être protégés d’un modèle économique et sociétal qui les fragilise. Dans des sociétés multiculturelles, l’assimilation ne fonctionne plus. L’autre ne devient plus soi, ce qui suscite de l’inquiétude. Le nombre de l’autre importe. Personne n’a envie de devenir minoritaire dans les catégories populaires. En France, l’immobilier social, dernier parc accessible aux catégories populaires de des métropoles, s’est spécialisé dans l’accueil des populations immigrées. Les catégories populaires d’origine euro- péenne et qui sont éligibles au parc social s’efforcent d’éviter les quartiers où les HLM sont nombreux. Elles préfèrent consentir des sacrifices pour déménager en grande banlieue, dans les petites villes ou les zones rurales afin d’accéder à la propriété et d’acquérir un pavillon. Dans chacun des grands pays industrialisés, les catégories populaires « autochtones » éprouvent une insécurité culturelle. En Grande- Bretagne, en 2013, le se- crétaire d’État chargé des Universités et de la Science de l’époque, David Willetts (conservateur), se déclara favorable à une politique de discrimination positive en faveur des jeunes hommes blancs de la « working class » car leur taux d’accès à l’université s’était effondré et était désormais infé- rieur à celui des enfants d’immigrés.

Peut-on vraiment démontrer sans tordre les faits que votre modèle s’applique à toutes les nations occidentales ? N’y a-t-il pas des nuances entre le vote Trump dans l’État de New York, le vote en faveur du Brexit dans le nord de l’Angleterre, la force du FPÖ dans la région de Vienne ou l’implantation du parti de Geert Wilders autour de Rotterdam ?

Ces nuances existent, nous avons même eu en France un vote macroniste dans les zones rurales ! Mais en moyenne, ce sont bien les territoires populaires les plus éloignés des grandes métropoles qui portent la dynamique populiste. La Rust Belt et les régions désindustrialisées de Grande-Bretagne pèsent respectivement plus dans le vote Trump ou dans le Brexit que New York ou le Grand Londres. Dans les zones périurbaines de Rotterdam, ce sont bien aussi les catégories modestes (qui ne se confondent pas avec les pauvres) qui voient leur statut de référent culturel remis en question par la dynamique migratoire et qui votent pour Geert Wilders. Ainsi, si la situation de l’ouvrier allemand n’est pas celle du paysan français, de l’employé néerlandais ou d’un petit trvailleur indépendant italien, il existe un point commun : tous, quel que soit leur niveau de vie, font le constat d’être fragilisés par un modèle économique qui les a relégués socialement et culturellement.

L’ouvrier français a longtemps été un modèle à imiter pour les immigrés désireux de s’assimiler dans notre pays, avant d’être déprécié dans les années 1970, observez-vous. Ce changement catastrophique se constate-t-il dans d’autres pays occidentaux ?

On ne s’intègre pas à un modèle ou à un système de valeur mais à une population à qui on désire ressembler. On se marie, on tisse des liens d’amitié, de voisinage avec des gens qui sont proches. Or cette intégration ne se réalise pas dans n’importe quelle catégorie sociale, mais d’abord dans des milieux populaires. Et ce qui a changé depuis les années 1970 et surtout 1980, c’est précisément le changement de statut de ces catégories populaires. Les ouvriers, les employés, les « petites gens » sont désormais perçus en grande partie comme les perdants de la mondialisation. Quel nouveau venu dans un pays peut avoir envie de ressembler à des « autochtones » qui ne sont pas en phase d’ascension sociale et que, de sur- croît, leurs propres élites méprisent en raison de l’attachement des intéressés à certaines valeurs traditionnelles ? Souvenons-nous de la phrase de Hillary Clinton présentant les électeurs de Donald Trump comme des « dé- plorables » pendant la campagne présidentielle de 2016 aux États-Unis. C’est pourquoi, alors que la France, les États-Unis, la Grande-Bretagne ou la Scandinavie se sont construits sur des modèles culturels très différents, tous ces pays connaissent la même dynamique populiste, la même crise sociale et identitaire et le même questionnement sur la pertinence de leurs modèles d’intégration.

Pas de mouvement de masse sans alliance de classes, écrivez-vous. En quoi cette alliance de classes est-elle devenue très difficile dans les démocraties occidentales ? Trump et Macron représentent-ils deux expériences opposées pour renouveler cette alliance du haut et du bas ?

C’est effectivement le sujet central du livre : la rupture entre le haut et le bas qui nous conduit à un modèle qui ne fait plus société. La disparition de la classe moyenne n’en est qu’une conséquence. Le monde d’en haut refuse d’écouter ce- lui d’en bas qui le lui rend bien notam- ment en grossissant les camps de l’abs- tention ou du vote populiste. Cette rupture du lien, y compris conflictuel, entre le haut et le bas, porte en germe l’abandon du bien commun et nous fait basculer dans l’a-société. Trump vient de l’élite américaine, c’est un des points communs qu’il partage avec Macron. Tous les deux se sont affranchis de leur propre camp pour se faire élire : Macron de la gauche, Trump du camp républicain. Ils ont enterré le vieux clivage gauche-droite. Les deux ont compris que nous étions entrés dans le temps de la disparition de la classe moyenne occidentale. L’un et l’autre ont saisi que, pour la première fois dans l’histoire, les classes populaires, celles qui constituaient hier le socle de la classe moyenne, vivent désormais sur les territoires qui créent le moins d’emplois : dans l’Amérique périphérique et dans la France périphérique. Mais la comparaison s’arrête là. Si Trump a été élu par l’Amérique périphérique, Macron a au contraire construit sa dynamique électorale à partir des métropoles mondialisées. Si le président français est conscient de la fra- gilisation sociale de la France périphérique, il pense que la solution passe par une accélération de l’adaptation de l’économie française aux normes de l’économie mondialisée. À l’opposé, le président américain fait le constat des limites d’un modèle qu’il convient de réguler (protectionnisme, remise en cause des traités de libre-échange, volonté de réguler l’immigration, politique de grands travaux) afin de créer de l’emploi sur ces territoires de la désindustrialisation américaine. Il existe un autre point de divergence fondamental, c’est le refus chez Trump d’un argumentaire moral qui sert depuis des décennies à disqualifier les classes populaires.

Votre livre n’est-il pas exagérément sombre ?

C’est la réalité qui est sombre, pas ce livre. Pour éviter la catastrophe, et si elles ne veulent pas être balayées dans les urnes, les classes dirigeantes n’ont pas d’autre choix que celui de rejoindre le mouvement réel de la société, celui de la majorité, des plus modestes.

■ No Society La fin de la classe moyenne occidentale FLAMMARION, 242 P., 18 €, EN LIBRAIRIE LE 3 OCTOBRE.

Voir de plus:

Christophe Guilluy : « Seuls 20 à 30% de gens d’en haut peuvent encore espérer une amélioration de leurs conditions de vie dans les pays occidentaux. Et les autres l’ont bien compris »

Le géographe français auteur de la France périphérique publie un nouveau livre « No society. La fin de la classe moyenne occidentale » (Flammarion) dans lequel il détaille les conséquences politiques explosives de cette disparition alors même que les « gens d’en bas et du milieu » ont accepté de bonne grâce de jouer le jeu de la mondialisation pendant plusieurs décennies. Mais plus maintenant.
No Society
Atlantico

3 Octobre 2018

Atlantico : Dans votre dernier livre No Society, vous élargissez votre thème de la France périphérique à l’échelle internationale, pour décrire la disparition de la classe moyenne occidentale. N’est-on pas déjà entré dans l’étape suivante, depuis le Brexit, Trump, Salvini, la percée de l’AfD en Allemagne, ou la chute d’Emmanuel Macron dans les sondages en France ? Y voyez-vous la suite du modèle « néolibéral », ou sa fin programmée ?

Christophe Guilluy : Cela fait des années que l’on nous parle de la disparition de la classe ouvrière, des régions désindustrialisées, de la crise du rural, etc.. et après nous avons pu voir que d’autres pays avaient les mêmes signes de précarisation, comme les Etats-Unis, la Grèce, la Grande Bretagne etc…La Vague populiste est alors arrivée, et tout cela forme un tout qui s’appelle la disparition de la classe moyenne occidentale.

Cela permet d’identifier la puissance des mouvements politiques que l’on voit surgir un peu partout dans le monde occidental mais aussi l’état de ces sociétés au sens large. On peut débattre à l’infini sur le concept de classe moyenne, mais il s’agissait bien de parler d’une classe majoritaire dans laquelle tout le monde était intégré, de l’ouvrier au cadre, et c’est bien cela qui se détériore aujourd’hui. Nous sommes dans un processus de sortie lente – mais dans un processus de sortie quand même – de la classe moyenne de la part des différentes catégories qui la composent, les unes après les autres. C’est ce que j’ai voulu identifier. La notion de classe moyenne est déjà morte mais on utilise encore cette catégorie comme si elle existait encore. Mais en réalité, en parlant des classes moyennes aujourd’hui, on parle des catégories supérieures.

Finalement, quand on regarde les élections, toutes les vagues populistes reposent sur deux éléments. D’une part, une sociologie, c’est-à-dire le socle de l’ancienne classe moyenne que sont les catégories populaires, ouvriers, employés, petits paysans, petits indépendants, etc…et on retrouve ces mêmes catégories partout. Et d’autre part des territoires. C’est la géographie des périphéries avec à chaque fois les mêmes logiques quel que soit le pays occidental que l’on considère. Il y a des pays plus riches que d’autres – l’Allemagne n’est pas l’Italie – et les contextes nationaux restent pertinents. Il n’empêche que l’on voit bien que dans un pays très riche comme l’Allemagne, il y a bien un décrochage par le bas des catégories modestes, il y a une société qui se clive avec un phénomène de polarisation de l’emploi qui a des effets. On est toujours dans le mythe d’une mutation en douceur des sociétés, mais ce n’est pas le cas. Il y a des inégalités qui progressent à peu près partout, que le pays soit riche ou non, qu’il soit en excédent ou en déficit, cela attaque partout. Même si cela prend différemment selon les contextes. Les classes ouvrières britannique et américaine ont été fracassées beaucoup plus rapidement que la classe populaire française. Il y a les effets de l’État providence en France qui sont réels, et qui a fait que nous avons encore des catégories protégées dans notre pays.

Emmanuel Macron est donc paradoxalement le résultat électoral de cet État providence ?

Emmanuel Macron a fait des scores de dirigeant soviétique dans les grandes métropoles, avec des pourcentages incroyables à Paris, Bordeaux, Toulouse etc…Emmanuel Macron se sauve avec les deux gros bataillons que sont les retraités et les fonctionnaires – la majorité des fonctionnaires ont voté Macron – qui sont les deux catégories qui sont en train d’être tondues par ce président. Nous sommes donc effectivement à la limite d’un système qui se raccroche à des catégories encore protégées mais le vent tourne.

On a toujours dit que les retraités sauvaient le système. Mais jusqu’à quand ? Aujourd’hui, 30% des 53-69 ans vivent sous le seuil de pauvreté, nous voyons les choses se transformer en douceur pour des catégories que l’on pensait préservées. Cela est le contexte français, mais en Grande Bretagne par exemple, les retraités ont été fracassés tout de suite et n’ont pas hésité à voter en faveur du Brexit. L’idée que les retraités vont continuer à protéger le système est à mon avis un leurre. C’est la même chose pour les fonctionnaires, les catégories B et C qui s’en prennent plein la figure ne vont pas éternellement protéger un système dont elles ne bénéficient pas. Cela est vraiment intéressant de constater que tout évolue partout mais toujours en fonction des contextes. La classe moyenne italienne par exemple, qui a commencé sa chute dans les années 2000, ce qui a beaucoup été la conséquence des effets de l’euro, mais à la fin, nous avons bien ce qui représentait le modèle social et culturel de l’ensemble des pays développés qui est en train de s’effondrer. En 1981, les Français votaient François Mitterrand alors que Reagan et Thatcher prenaient le pouvoir dans le monde anglo-saxon, menant une politique qui fut imité par la France dès 1983. Percevez-vous également l’élection d’Emmanuel Macron comme un simple contre-temps, un anachronisme d’une tendance en cours ?

On peut dire cela, ce décalage est réel. Mais quand on regarde en détails, cela est assez logique notamment pour ce que je viens de dire. Nous avons quand même un État providence qui fonctionne encore en France et bien évidemment le décalage s’est fait à ce niveau-là. Les catégories modestes ont été relativement mieux protégées en France qu’elles ne l’ont été aux Etats-Unis ou en Grande Bretagne. On a bien un contexte français très particulier avec une fonction publique très importante etc…c’est là-dessus que nous faisons la différence. Mais une fois encore, cela n’est qu’une question de temps. Et le temps joue effectivement vers la disparition de cette classe moyenne. C’est donc bien la structuration sociale de l’ensemble des pays développés qui est en train de se modifier avec ces 20-30% de gens « en haut » qui vont s’en sortir et une immense classe populaire qui n’est plus dans l’espoir d’une amélioration de ses conditions de vie.

Cela n’en fait pas des catégories qui seraient opposées de fait à la mondialisation ou à l’Europe…c’est une pirouette intellectuelle rassurante de dire cela. Parce qu’au contraire, ces gens ont vraiment joué le jeu de la mondialisation et de l’Europe. Il n’y a jamais eu d’opposition de principe, ils ont joué le jeu et après 20 ou 30 ans ils font le diagnostic pour eux-mêmes et pour leurs enfants que finalement cela n’a pas marché. Il s’agit simplement d’un constat rationnel de leur part.

Ce qui est frappant, c’est que tous les modèles sont affectés, du modèle américain au britannique, au modèle français républicain, jusqu’au modèle scandinave. A la fin, on a toujours le même résultat. Penser qu’il y a presque 20% des gens qui ont voté extrême-droite en Suède à l’air hallucinant, mais quand on regarde la géographie électorale des Démocrates Suédois, on voit les gros bastions de zones rurales et de petites villes désindustrialisées, une sociologie d’ouvriers ruraux, avec le nord et le sud du pays, mais évidemment pas du tout Stockholm.

On retrouve la polarisation de l’emploi et des territoires, cette dernière n’étant qu’une conséquence de la première. J’entends régulièrement que les gens voteraient pour un parti parce qu’il vivent sur un territoire, non, ils votent pour un parti parce qu’ils estiment que le modèle en place ne leur est pas favorable.

En se concentrant sur l’économie, en étant perçu par les Français comme le président des « riches », Emmanuel Macron n’est-il pas justement en train de réinstaller les bases d’une politique de classes en France ? 

De fait. Mais on lui fait porter un chapeau qui est un peut trop grand pour lui. Le phénomène Emmanuel Macron est microscopique dans ce processus. Je n’ai rien contre lui, je l’ai rencontré et il était plutôt d’accord sur le diagnostic, mais il est dans la lignée des anciens présidents. Nous avons trop tendance à surévaluer le « nouveau » néolibéral, le nouveau président des riches…parce que cela était également vrai pour ses prédécesseurs. Cette situation n’est et n’était que la conséquence de la structuration sociale et d’un modèle inégalitaire et qui s’est imposé à peu près partout. Les politiques français ne sont rien, pas grand-chose, dans ce mouvement mondialisé. Les présidents successifs n’ont fait qu’accompagner le mouvement même si l’on peut dire qu’avec Emmanuel Macron, cela s’accélère. Mais sa feuille de route était la même que celle de François Hollande ou de celle de Nicolas Sarkozy, en fait depuis le virage libéral de 1983 avec Fabius et Mitterrand. L’habillage est un peu plus social quand le président est à gauche, ou un peu plus identitaire s’il est à droite, mais globalement c’est la même tendance. L’élection d’Emmanuel Macron est le rassemblement des bourgeoisies, cela se voit avec le vote dans les métropoles. Ils ont voté en masse pour lui, parce que ce qui compte à la fin, c’est quand même le patrimoine. Il y a toujours une rationalité.

Vous décrivez « le repli d’une bourgeoisie asociale ». Ne peut-on pas voir une forme de déni, notamment chez les cadres, de se percevoir comme « les gagnants de la mondialisation » ?

Les gens voient toujours le court terme. Pour le moment cela va encore, ils « s’accrochent aux wagons ». Mais il y a une forme de déni sur ce qu’ils vont devenir. La disparition de la classe moyenne a commencé par les ouvriers, les paysans, les employés, les professions intermédiaires et demain, ce sera une fraction des catégories supérieures qui sera emportée. On voit déjà que les jeunes diplômés du supérieur n’arrivent plus à s’intégrer. Le processus est enclenché et il va détruire aussi des catégories qui pensent encore être protégées.

Trump, Brexit, on voit que ces mouvements sont nés au sein des partis. Le même schéma peut-il se répéter en France ? Comment expliquer vous que ce soient des partis de droite qui ont saisi cette thématique sociale plutôt que des partis de gauche ? 

A partir du moment ou la gauche a abandonné la question sociale, elle a abandonné les catégories populaires et c’est la dessus que le divorce s’est réalisé. Ce mouvement s’est accompagné d’une forme d’ostracisation des plus modestes qui était très forte dans certains milieux de gauche, et aujourd’hui la rupture est totale. On a en plus un processus de sécession , que Christopher Lash avait vu très tôt, qui est celle des bourgeoisies, qui s’ajoute au phénomène de citadellisation des élites, qui fait qu’il n’y a pas plus de connexion entre ces catégories. C’est le sens du « no society » de Margaret Thatcher. Elle pensait faire tomber l’État providence avec l’idée que nous étions avant tout des agents économiques et finalement, les bourgeoisies ont suivi ce mouvement. Cette rupture fait qu’aujourd’hui, nous n’avons plus de société. Une société est saine quand il y a un lien organique entre le haut et le bas, même si ce lien peut être conflictuel, comme cela était le cas avec le parti communiste. C’est un moment particulier ou il n’y a plus d’intérêt du tout pour le monde d’en bas, c’est frappant partout dans les démocraties occidentales, et cette rupture n’est même plus conflictuelle. « Vous n’existez plus, nous ne vivons plus ensemble, et votre destin ne nous intéresse plus ». Et la réponse des gens d’en bas est aussi une forme de désaffiliation et de défiance gigantesque avec le monde d’en haut au sens large. Mais cela n’est absolument pas un modèle durable. On le voit bien aujourd’hui avec les mouvements populistes, ou la contestation va aller forcément croissante.

Quelle réponse donner à cette contestation ?

Il faut arrêter le discours du magistère des prétentieux. Cette idée de rééducation du peuple, en lui montrant la voie, n’est pas possible. Une société c’est une majorité de catégories modestes et l’objectif d’une démocratie, c’est de servir prioritairement ces catégories. C’est dans ce sens là qu’il faut aller. Il faut prendre ces gens au sérieux, il faut prendre en compte les diagnostics des classes populaires sur leurs souhaits d’être protégés, ce qui ne veut pas dire être assistés. Ces catégories veulent du travail, elles veulent qu’on les respectent culturellement, et ne pas se faire traiter de « déplorables » ou de sans dents » – ce qui fait partie intégrante du problème identitaire que nous avons aujourd’hui qui est le produit de ces attaques là -.

On ne s’en sortira que si – je tends la main en disant cela- les gens d’en haut comprennent que s’ils ne veulent pas disparaître, ils vont devoir prendre les gens au sérieux.

Leur modèle économique est à bout de souffle alors que nous sommes soi-disant gouvernés par des gens sérieux. Nous sommes au bout du modèle. Les gens veulent de la protection, du travail, de la régulation économique mais aussi une régulation des flux migratoires. Je parle ici de tout le monde d’en bas, parce que la demande de régulation des flux migratoires vient de toutes les catégories modestes quelles que soient les origines. Tout le monde veut la même chose alors que lorsque les gens parlent de la question migratoire, on les place sur la question raciale, non. C’est anthropologiquement vrai pour toutes les catégories modestes, et cela est vrai partout. Dans tous les pays, les catégories modestes veulent vivre tranquillement, ce qui ne veut pas dire vivre derrière des murs, mais vivre dans un environnement que l’on connaît avec des valeurs communes. C’est d’ailleurs ce qu’était la classe moyenne historiquement. La classe moyenne était interclassiste, avec des ouvriers mais aussi des cadres, mais cela était aussi multiculturel. Ce qui est amusant aujourd’hui, c’est qu’il y a une ethnicisation des classes moyennes – on pense blanc – cela montre bien la fin du concept qui était censé être intégrateur pour le plus grand nombre.

Comment se processus peut-il se mettre en place en France ?

Je suis optimiste. Je crois que les classes populaires vivent une espèce d’épopée -difficile- avec une forme d’héroïsme. Elles sont seules – personne ne les représente – elles ont été plongées dans ce processus de mondialisation économique sans aucun mode d’emploi. On leur a dit « démerdez vous avec vos 1000 euros par mois », et elles n’ont pas disparu, elles maintiennent un minimum de solidarité entre elles – je parle d’un soft power des classes populaires – elles restent majoritaires partout dans l’ensemble des démocraties occidentales.

Les autoritaires ne sont pas ceux que l’on croit. Sauver les démocraties occidentales c’est faire entendre le plus grand nombre. Et quand on se promène en France, on voit des élus de gauche et de droite qui sont tous d’accord avec cela. Ils savent très bien qu’il faut réinventer un modèle économique, et il ne s’agit pas de faire la révolution. Cela est beaucoup plus puissant que les discours d’en haut, ou de tel ou tel intellectuel. Les gens n’attendent pas qu’on leur décrive ce qu’il se passe, ils le savent déjà.

Soit le monde d’en haut refuse d’entendre la majorité et on basculera dans une forme d’autoritarisme soft, ce qui pourrait faire durer le système un peu plus longtemps, mais avec le risque que cela se termine très mal. Soit  on essaye de faire baisser la tension en disant : « maintenant on essaye d’intégrer économiquement et culturellement le plus grand nombre ».

Cette réflexion existe, il n’y a pas encore de parti politique qui représente tout cela, qui fait cette connexion, mais cela est en gestation. Il n’y a pas 50 sorties possibles de cette impasse, il n’y en a qu’une. Inclure les catégories populaires parce qu’elles sont la société elle-même. C’est pour cela que le discours sur les marges a été destructeur. Les ouvriers, les ruraux etc…ce ne sont pas des marges, c’est un tout, et ce tout est la société. Maintenant tout est sur la table, les diagnostics sont faits. Alors il faut se retrousser les manches et aller dans le dur en essayant de réellement inventer quelque chose de plus efficace, et en oubliant ce truc absurde du premier cordée. Mais là, il faut bien remarquer le problème que nous avons concernant le personnel en place. Ils pensent tous la même chose. Il faut une révolution culturelle du monde d’en haut, ce qui devrait être à la portée des nations occidentales…cela ne coûte pas cher. La question pour eux est donc de protéger ou disparaître.

Voir enfin:

« Face à l’islamisme, nos élites ont trahi »

FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN – Alors que l’existence de tensions communautaires a été reconnue par Gérard Collomb lui-même, le journaliste Yves Mamou accuse les élites françaises de s’être coupablement désintéressées de l’immigration, et d’avoir fermé les yeux sur l’islamisation du pays.


Yves Mamou est un ancien journaliste du Monde. Il a également collaboré au Canard Enchaîné, à Libération et à La Tribune. Collaborateur régulier du site américain The Gatestone Insitute, il est l’auteur de nombreux ouvrages dont Hezbollah, dernier acte (éd. Plein jour, 2013) et Le Grand abandon. Les élites françaises et l’islamisme (éd. L’Artilleur), paru le 25 septembre 2018.


FIGAROVOX.- Selon vous, l’immigration et l’islamisation auraient pour conséquence d’empêcher les Français de «faire nation»? Quel lien faites-vous entre la supposée émergence perturbatrice de l’islam et la supposée désagrégation de la nation française?

Yves MAMOU.- Le Grand Abandon est une tentative de reconstitution. J’ai essayé de savoir pourquoi et comment, à côté de la nation française, une nation islamique avait pu progressivement se constituer. Les déclarations fracassantes de Gérard Collomb, ex-ministre de l’Intérieur, au matin de sa passation de pouvoir à Edouard Philippe, Premier ministre, montrent que la juxtaposition de ces deux nations aujourd’hui en France engendre un risque d’affrontement. Nous sommes aujourd’hui «côte à côte» (sous-entendu musulmans et non-musulmans) a dit Gérard Collomb, mais rien ne garantit que demain nous ne serons pas «face à face». Cet avis de guerre civile en bonne et due forme a été proféré par l’homme qui, pendant un an et demi, Place Beauvau, a eu sous les yeux, au quotidien, tous les rapports de police et de gendarmerie.

Gérard Collomb est partie prenante de l’élite politique française. Il abandonne son poste en informant que la guerre civile est à nos portes. Une fuite qui à elle seule justifie mon titre «Le Grand Abandon». L’avertissement aurait eu plus de force s’il avait été proféré par un ministre en exercice. L’avoir prononcé sur le pas de la porte a fait que certains médias ne l’ont même pas repris.

La guerre civile se définit comme le déchirement d’une nation. Je ne sais pas si cette guerre aura lieu, mais il m’a semblé utile de m’interroger sur la présence de deux nations sur le même territoire national. Parfois, ce sont des frontières mal tracées qui créent les conditions d’un affrontement entre deux nations. Mais en France, la nation islamique a été fabriquée de toutes pièces. Elle est le résultat d’une politique. Les élites françaises, c’est-à-dire les grands corps de l’État, les partis politiques, les experts, les magistrats, les médias, les élites culturelles… ont, pour de multiples raisons, plusieurs décennies durant – et encore aujourd’hui – encouragé et légitimé l’immigration musulmane.

Cette préférence des élites pour l’islam a produit un fossé abyssal entre la France d’en haut et la France d’en bas. Le Baromètre de la Confiance que le Cevipof, le centre de recherches de Sciences Po, publie année après année, illustre parfaitement le phénomène: la majorité de la population française témoigne à l’égard de sa classe politique d’une gamme de sentiments qui va de l’écœurement au dégoût, en passant par le rejet et l’indifférence. Et sur quoi se cristallise cette rupture entre le haut et le bas de la société? Sur l’islam jugé trop invasif et l’immigration jugée excessive.

Curieusement, ce baromètre du Cevipof sauve la mise de deux institutions, l’armée et la police qui jouissent d’un taux de confiance de près de 80 %.

Peut-être, mais est-ce suffisant pour affirmer comme vous le faites que l’islamisme et l’immigrationnisme ont été voulus, théorisés, écrits et préparés à l’avance?

L’immigration a été voulue et organisée, mais l’islamisation de cette immigration n’était sans doute pas inscrite au menu. Si l’immigration se poursuit malgré l’islamisation, c’est sans doute que nos élites la jugent insignifiante. Ou bien qu’elle leur est indifférente. Et c’est cette indifférence au risque de guerre civile que j’ai voulu souligner.

La constance avec laquelle le Conseil d’État a aidé à la constitution d’une nation islamique en France est sidérante. Je liste dans mon livre tous les arrêts du Conseil d’État favorables à l’immigration musulmane, favorables au voile, favorables au burkini, favorables à la burqa, favorables aux familles polygames et j’en passe. Idem pour le Conseil constitutionnel qui trouve conforme à l’intérêt général de laisser les écoles salafistes proliférer ou de supprimer, au nom de la «solidarité», les peines qui frappaient autrefois les délinquants qui facilitaient l’immigration clandestine. Mon livre passe également au crible l’étrange aveuglement de l’Observatoire de la laïcité quand il est question d’islam et l’étrange sensibilité du Conseil supérieur de l’audiovisuel aux récriminations des téléspectateurs musulmans.

Tout ce que j’avance dans mon livre est sourcé. Le Grand Abandon est riche de plus de 700 notes et références. L’ordonnancement et la mise en relation de ces faits étayés et vérifiés entre eux mettent en lumière une évidence: il existe bel et bien une préférence des élites françaises pour l’islam.

Ce qui nous ramène à votre première question. Ce n’est pas seulement l’islam qui empêche aujourd’hui de faire nation. Les élites aussi ne veulent plus faire nation.

«L’antiracisme politique qui sévit aujourd’hui n’a jamais eu pour but de combattre le racisme.» Que voulez-vous dire?

Je n’ai pas remarqué de mobilisation des organisations antiracistes contre le rappeur Nick Conrad qui a chanté le meurtre des Blancs et des enfants blancs dans les crèches. Ni contre les Indigènes de la République ou le syndicat SUD Éducation qui ont organisé des séminaires «racisés» fermés aux «Blancs», ni contre Médine qui rêve de crucifier les laïcards au Golgotha, ni contre Mmes Ernotte (France Télévisions) et Nyssen (ministère de la culture) qui souhaitaient voir moins de «Blancs» à la télévision.

En revanche, quand Éric Zemmour a affirmé que les immigrés étaient surreprésentés dans les prisons, ou quand Georges Bensoussan a tenté d’expliquer que l’antisémitisme sévissait dans une large frange de la population musulmane en France, les associations antiracistes se sont unies pour les traîner devant un tribunal. Au nom de la lutte antiraciste!

Ces quelques exemples permettent de situer la zone d’action de l’antiracisme: faire taire tout critique de la «diversité». La «diversité» n’est pas un slogan antiraciste un peu creux. Je démontre dans mon livre que la «diversité» est en réalité une politique. Et cette politique passe par les organisations antiracistes subventionnées par l’État, par l’école où l’apprentissage de l’arabe est proposé aujourd’hui dès le primaire, par une politique du ministère de la Culture qui subventionne la «diversité» au cinéma et au théâtre, par l’Afnor qui labellise les entreprises pour plus de «diversité», par le Conseil supérieur de l’audiovisuel qui, avec son Baromètre de la «diversité» rêve d’imposer des quasi quotas ethniques sur le petit écran, et par divers lobbys comme le Club XXI d’Hakim el Karoui ou l’association Coexister…

Le Grand Abandon démontre que l’antiracisme politique et le discours diversitaire n’ont pas pour but de combattre le racisme. Ce sont des outils au service d’une réinitialisation des consciences. Ils servent à marteler que les immigrés de couleur sont par essence des victimes. Les services du Premier ministre diffusent actuellement des clips contre les violences sexistes. L’un de ces clips montre un «Blanc» qui agresse sexuellement une jeune fille d’origine maghrébine laquelle est défendue par une «Blanche» en couple avec un homme noir. Ce clip d’État d’une grande pureté idéologique assigne la violence sexuelle aux hommes Blancs et refuse d’évoquer celle qui peut aussi exister chez les «victimes» de couleur. J’affirme que cette victimisation forcenée des Français de couleur participe à la fabrication de la violence d’aujourd’hui.

Quand vous parlez des «élites», qui désignez-vous exactement? Peut-on mettre tous les responsables politiques, économiques, culturels, médiatiques… dans le même panier?

Mon livre passe en revue les partis politiques, le ministère de la justice, les associations antiracistes, l’université, l’école, les experts, les intellectuels, le monde du cinéma et du théâtre et de quelques autres encore… Chacun de ces groupes ou institutions œuvre, dans le champ qui est le sien, à la promotion de la «diversité» et de son corollaire le «vivre-ensemble». J’ai déjà évoqué le cas du Conseil d’État, du Conseil constitutionnel et du Conseil supérieur de l’audiovisuel. Mais je liste également le cas des intellectuels qui pétitionnent et lynchent médiatiquement toute personnalité publique qui émet des opinions non conformes aux leurs. L’écrivain algérien Kamel Daoud en a ainsi fait les frais quand il a expliqué que les viols de masse de Cologne en 2015 étaient dus à l’importation en Allemagne d’une culture patriarcale des relations entre les sexes. Les experts justifient et encouragent l’immigration au nom de supposés bienfaits économiques. Le ministère de la justice met à mal la liberté d’expression des Zemmour et Bensoussan… etc. J’ai 600 pages d’exemples et de logiques qui s’emboîtent les unes dans les autres et qui tous ensemble concourent à une révolution, «par le haut».

En trente ans, la société française a quitté un modèle laïque républicain pour être projetée dans un modèle multiculturaliste, communautariste et anti-laïque. Il s’agit d’une authentique révolution qui se poursuit encore aujourd’hui sous nos yeux. Les élites politiques, économiques et institutionnelles ont balayé le vieux modèle laïque et républicain sans demander l’avis du reste de la population. Les élites françaises ont été à l’origine du plus grand casse du siècle, lequel s’avère être aussi un casse de la démocratie et de la laïcité. Pour quel profit? Je crains que seul l’islamisme soit à même de tirer les marrons du feu.

Les politiques ont selon vous une responsabilité toute particulière dans la diffusion de l’islamisme. Tous, y compris le Front national, pourquoi?

Le Front national a joué les repoussoirs. Par sa seule présence, le Front national a empêché l’émergence de tout débat sérieux sur l’islam et l’immigration. Les éructations de Jean-Marie Le Pen toujours à la limite du racisme et de l’antisémitisme ont contribué au caractère hégémonique du discours antiraciste. Marine Le Pen a bien tenté de redresser l’image de son parti, mais le mal était fait. Et il dure encore.

Quant aux gouvernements de gauche, ils portent une responsabilité historique que j’expose dans Le Grand Abandon.

Vous reprochez aux politiques, notamment de gauche («islamo-gauchistes») leur clientélisme, mais vous le reconnaissez vous-même en introduction, les musulmans deviennent une composante à part entière de la population: il faut bien que des politiques leur parlent à eux aussi?

La gauche clientéliste flatte le communautarisme islamique: baux emphytéotiques pour la construction de mosquées, heures de piscine réservées aux femmes, etc., cela dans le but de recueillir les voix des musulmans. L’islamo-gauchisme accompagne la violence islamiste pour conquérir le pouvoir. Ce sont deux démarches différentes, mais les deux instrumentalisent les musulmans comme outil de conquête du pouvoir.

En trente ans, la société française a quitté un modèle laïque républicain pour être projetée dans un modèle multiculturaliste, communautariste et anti-laïque.

Cette instrumentalisation de l’islam par la gauche a creusé la tombe de la laïcité. La laïcité non plus n’est pas un mot creux. C’est l’espace de la citoyenneté. Et la citoyenneté c’est l’espace du politique parce qu’il est débarrassé de tous les sujets qui ne prêtent pas à la discussion et à la négociation. Si la laïcité a cantonné la religion au domicile et aux lieux de culte, c’est précisément pour les sortir de l’espace politique. En réintroduisant la religion – et surtout la religion musulmane – dans l’espace de la politique, la gauche (mais aussi la droite) a disséminé les germes de la guerre civile.

Une République laïque ne doit reconnaître que des citoyens et non des communautés, et moins encore des communautés religieuses. Penser comme le font nos élus de droite et de gauche que la République doit des mosquées aux musulmans est une erreur et une trahison. Une erreur parce qu’elle conforte le communautarisme et le sécessionnisme musulman. Et une trahison parce que ce que la République doit aux Français, quelle que soit leur confession ou leur couleur de peau, ce sont des écoles, la liberté de pensée et d’expression.

Vous critiques beaucoup aussi l’Église. Mais n’est-elle pas dans son rôle lorsqu’elle exprime une compassion à l’égard des migrants? Faut-il toujours tout ramener à une vision politique?

Le rôle des journalistes n’est pas de prendre les apparences pour le réel. Quand Macron va au Collèges des Bernardins et déclare aux plus hautes personnalités du catholicisme français qu’il faut «réparer» le lien abîmé entre l’Église et l’État, que croyez-vous qu’il fasse? Une bonne action? Non, il fait de la politique. Il s’adresse à une Église catholique blessée par cent ans de laïcité et qui souffre d’une hémorragie de fidèles. Il lui dit: oublions la laïcité, revenez dans le jeu politique. Pourquoi Macron fait-il cela? Pour se constituer des alliés dans son grand projet de bâtir ce qu’il appelle l’ «Islam de France». Macron a besoin d’alliés pour se débarrasser de la laïcité. Quel meilleur allié que l’Église?

Quant à la compassion de l’Église pour les migrants musulmans, il est bon de rappeler que cette compassion est sélective. L’Église ne défend pas les Coptes quand ils sont massacrés en Égypte, elle proteste à peine contre l’authentique épuration ethnique qui frappe les chrétiens d’Orient, et elle n’a guère eu de mot charitable pour les Yazidis massacrés par l’État islamique. C’est cette sélectivité compassionnelle qui interroge. J’essaye de montrer dans mon livre que la charité affichée de l’Église envers les musulmans est aussi une politique.

Quant aux médias, pour finir, vous y voyez des «falsificateurs de la vérité»?

Il y a quelques jours, le Journal télévisé de France 2 a diffusé un reportage sur l’épidémie d’attaques au couteau qui sévit à Londres. Mais la même épidémie sévit en France et aucun média ne dresse un tableau de la situation. Il faut feuilleter la presse de province, journal par journal, pour se rendre compte de l’ampleur des violences gratuites, souvent mortelles, commises au quotidien. Quand un journal évoque une attaque au couteau, on ignore le nom de l’agresseur et ses motivations. Comme s’il y avait une volonté d’anonymiser le «déséquilibré»! Les médias, dans leur grande majorité, participent au casse du siècle. Ils n’informent plus sur les problèmes, ils prêchent la «diversité» et le «vivre ensemble».

Voir enfin:

Emmanuel Macron, le masque tombe
Ivan Rioufol
Le Figaro
le 4 octobre 2018

Récapitulons : Donald Trump est la vulgarité incarnée. Viktor Orban menace la démocratie. Le premier entache les États-Unis de ses comportements grossiers. Le second viole, en Hongrie, l’indépendance de la justice et la liberté de la presse. Ce tableau est brossé, en France, par la Macronie et ses médias. Pourtant, c’est le chef de l’État qui a longtemps fait obstacle à la nomination du nouveau procureur de Paris : trois candidats à la succession de François Molins, proposés par la Chancellerie, ont d’abord été retoqués par l’Élysée en dépit des usages. Le Parquet national financier, qui a sonné l’hallali contre François Fillon en 2017, a toujours ses liens avec l’exécutif. Quant à la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, elle a assigné à l’audiovisuel public la mission de « changer les mentalités sur le terrain » et de « devenir le miroir de nos différences  ». France Culture vient d’ailleurs de remercier l’impertinent Michel Onfray. Le gouvernement rêve aussi de mettre l’Internet, refuge des dissidents, sous surveillance…

Bref, Emmanuel Macron reproche à Orban ce qu’il pratique. La pensée dominante en rajoute dans l’obligation de bêler en chœur, lorsqu’elle dénonce les récalcitrants comme des ennemis du Bien. Quant à ceux qui accablent Trump, ils ne voient rien de la métamorphose de Macron. Il a été salué pour avoir su se glisser, avec talent et élégance, dans les habits de président. Or, depuis, un Dorian Gray s’ébauche derrière le personnage fiévreux et transgressif. « Alexandre Benalla n’est pas mon amant  », croit utile de préciser, en juillet, le chef de l’État pour démentir un ragot sur son garde du corps. Imaginer le général de Gaulle se prêter à une telle confidence donne la mesure de l’effondrement de la politique. Pour avoir abandonné sa posture « jupitérienne », voilà le président prêt à tout pour faire peuple. À côté, Nicolas Sarkozy et François Hollande incarneraient presque la sophistication. Et c’est Trump qui, par contraste, se montre respectable.

« Le pouvoir ressemble au Titanic, dont le ministre de l’Intérieur vient de s’échapper mardi. Le naufrage sera difficile à éviter. Les premiers effets du revirement dans la communication élyséenne viennent d’ailleurs de produire une image désastreuse, samedi, à Saint-Martin, aux Antilles. Une photo, prise dans la moiteur d’une HLM, montre le président en bras de chemise entouré, amusé, de deux jeunes Antillais. Celui qui est à sa droite, contre qui le président colle son épaule, est torse nu. Son pantalon largement baissé laisse voir son caleçon. Le petit voyou fait un doigt d’honneur. Celui qui est à sa gauche, casquette à l’envers, vêtu d’un débardeur blanc, s’est présenté comme braqueur tout juste sorti de prison. Tout est vulgaire: la désinvolture des deux cousins, la complicité ambiguë du président. L’image en rappelle une autre, prise à l’Élysée, en juin, lors de la Fête de la musique: le couple Macron pose, entouré du groupe techno Kiddy Smile. Les artistes se revendiquent «fils d’immigrés, noirs et pédés». Ils portent des shorts et des maillots en résille.

La Macronie perd pied, en voulant voir du racisme dans les critiques portées contre ces attitudes présidentielles. Lundi, la secrétaire d’État, Marlène Schiappa, a qualifié Marine Le Pen de «leader d’un grand parti raciste, d’extrême droite» au prétexte que la présidente du RN avait jugé la photo antillaise «impardonnable». Le député LaREM, Aurélien Taché, estime que «tous ceux qui polémiquent ne supportent tout simplement pas que la France, à tous les niveaux, change de visage». En fait, le racolage ethnique auquel se prête le chef de l’État ressemble à une ode au grand remplacement racialiste. Il est loisible de voir un deux poids deux mesures dans la réaction de Macron quand, le 18 juin dernier à Paris, il rabroue un Gavroche qui venait de l’appeler «Manu»: «Tu te comportes comme il faut. Il faut que tu m’appelles Monsieur le président de la République, ou Monsieur, d’accord?» Faut-il comprendre que le Noir serait dispensé des codes exigés du Blanc? Le sommet de l’État ne tourne plus rond.

L’insistance que Gérard Collomb a dû mettre pour imposer sa démission, refusée lundi par le président, n’est pas la moindre des rébellions contre la Macronie. Sa fuite est celle d’un vieux grognard qui a partagé l’intimité du clan. C’est le ministre de l’Intérieur qui avait déjà mis en garde contre le manque d’humilité du président et son repli sur lui-même. Le départ de Collomb fait comprendre qu’il ne croit plus en son protégé. L’alerte s’ajoute à celle lancée par Nicolas Hulot, exaspéré par la lourdeur technocratique. Toutefois, c’est le général Pierre de Villiers qui, le premier, avait pressenti les dérives du macronisme en démissionnant de ses fonctions de chef d’état-major des armées en juillet 2017. Peu avant, le militaire s’était fait rabrouer par le jeune élu: «Je suis votre chef.» Cet autoritarisme allait avec la panoplie de président vertical. Toutefois,ce déguisement est devenu incongru au vu des dérapages d’un chef d’État s’abandonnant à une proximité irréfléchie.

Du prophète exalté qui disait incarner le nouveau monde, il ne reste qu’un masque tombé à terre. Le contraste est saisissant entre la machine de guerre savamment élaborée par Macron et les siens pour accéder au pouvoir, et l’état d’impréparation que révèle la démission de Collomb. Le vide est tel, au cœur du pouvoir, que l’intérim a dû être confié au premier ministre. Il est vrai que les dossiers de l’Intérieur – immigration, islam, violence, terrorisme – ont été de ceux que le macronisme a abandonnés aux populistes, pour leur plus grand profit. Mercredi, lors de la passation de pouvoir avec Édouard Philippe, Collomb a évoqué la situation «très dégradée» des quartiers difficiles: «On vit côte à côte, je crains que demain on ne vive face à face.» Mais cela fait longtemps que l’affrontement s’enracine entre deux France, deux peuples, deux civilisations que tout sépare. Le braqueur Redoine Faïd, interpellé mercredi à Creil (Oise), passait inaperçu sous une burqa, en dépit de la loi interdisant ce voile intégral ; il est devenu banal dans les cités. Macron perpétue la démission de l’État.

Shahnourh Varinag Aznavourian s’était fait appeler Charles Aznavour, en hommage à la France qui avait accueilli ses parents arméniens. «J’ai abandonné une grande partie de mon arménité pour être français. Il faut le faire, ou il faut partir», avait-il expliqué en 2013. La mort du chanteur, lundi, devrait être un hommage à l’assimilation. « 


Education: L’école, c’est la guerre (As victimhood culture spreads from elite colleges to the middle classes, it is not only contaminating conservatives who resent being unfairly targeted as oppressors but could push us all towards a paternalistic, authoritarian state, sociologists warn)

17 septembre, 2018
 "Entre les murs", un film de Laurent Cantet, 2008.
Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre; je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. Car je suis venu mettre la division entre l’homme et son père, entre la fille et sa mère, entre la belle-fille et sa belle-mère; et l’homme aura pour ennemis les gens de sa maison. Jésus (Matthieu 10 : 34-36)
Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme; car tous vous êtes un en Jésus Christ. Paul (Galates 3: 28)
Le monde moderne n’est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu’un dispositif religieux est brisé (comme le fut le christianisme pendant la Réforme), ce ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les vertus le sont aussi, et elles errent plus férocement encore en faisant des ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé des vieilles vertus chrétiennes virant à la folie.  G.K. Chesterton
La loi naturelle n’est pas un système de valeurs possible parmi beaucoup d’autres. C’est la seule source de tous les jugements de valeur. Si on la rejette, on rejette toute valeur. Si on conserve une seule valeur, on la conserve tout entier. (. . .) La rébellion des nouvelles idéologies contre la loi naturelle est une rébellion des branches contre l’arbre : si les rebelles réussissaient, ils découvriraient qu’ils se sont détruits eux-mêmes. L’intelligence humaine n’a pas davantage le pouvoir d’inventer une nouvelle valeur qu’il n’en a d’imaginer une nouvelle couleur primaire ou de créer un nouveau soleil avec un nouveau firmament pour qu’il s’y déplace. (…) Tout nouveau pouvoir conquis par l’homme est aussi un pouvoir sur l’homme. Tout progrès le laisse à la fois plus faible et plus fort. Dans chaque victoire, il est à la fois le général qui triomphe et le prisonnier qui suit le char triomphal . (…) Le processus qui, si on ne l’arrête pas, abolira l’homme, va aussi vite dans les pays communistes que chez les démocrates et les fascistes. Les méthodes peuvent (au premier abord) différer dans leur brutalité. Mais il y a parmi nous plus d’un savant au regard inoffensif derrière son pince-nez, plus d’un dramaturge populaire, plus d’un philosophe amateur qui poursuivent en fin de compte les mêmes buts que les dirigeants de l’Allemagne nazie. Il s’agit toujours de discréditer totalement les valeurs traditionnelles et de donner à l’humanité une forme nouvelle conformément à la volonté (qui ne peut être qu’arbitraire) de quelques membres ″chanceux″ d’une génération ″chanceuse″ qui a appris comment s’y prendre. C.S. Lewis (L’abolition de l’homme, 1943)
L’inauguration majestueuse de l’ère « post-chrétienne » est une plaisanterie. Nous sommes dans un ultra-christianisme caricatural qui essaie d’échapper à l’orbite judéo-chrétienne en « radicalisant » le souci des victimes dans un sens antichrétien. (…) Jusqu’au nazisme, le judaïsme était la victime préférentielle de ce système de bouc émissaire. Le christianisme ne venait qu’en second lieu. Depuis l’Holocauste, en revanche, on n’ose plus s’en prendre au judaïsme, et le christianisme est promu au rang de bouc émissaire numéro un. René Girard
Ce ne sont pas les différences qui provoquent les conflits mais leur effacement. René Girard
L’erreur est toujours de raisonner dans les catégories de la « différence », alors que la racine de tous les conflits, c’est plutôt la « concurrence », la rivalité mimétique entre des êtres, des pays, des cultures. La concurrence, c’est-à-dire le désir d’imiter l’autre pour obtenir la même chose que lui, au besoin par la violence. Sans doute le terrorisme est-il lié à un monde « différent » du nôtre, mais ce qui suscite le terrorisme n’est pas dans cette « différence » qui l’éloigne le plus de nous et nous le rend inconcevable. Il est au contraire dans un désir exacerbé de convergence et de ressemblance. (…) Ce qui se vit aujourd’hui est une forme de rivalité mimétique à l’échelle planétaire. (…) Ce sentiment n’est pas vrai des masses, mais des dirigeants. Sur le plan de la fortune personnelle, on sait qu’un homme comme Ben Laden n’a rien à envier à personne. Et combien de chefs de parti ou de faction sont dans cette situation intermédiaire, identique à la sienne. Regardez un Mirabeau au début de la Révolution française : il a un pied dans un camp et un pied dans l’autre, et il n’en vit que de manière plus aiguë son ressentiment. Aux Etats-Unis, des immigrés s’intègrent avec facilité, alors que d’autres, même si leur réussite est éclatante, vivent aussi dans un déchirement et un ressentiment permanents. Parce qu’ils sont ramenés à leur enfance, à des frustrations et des humiliations héritées du passé. Cette dimension est essentielle, en particulier chez des musulmans qui ont des traditions de fierté et un style de rapports individuels encore proche de la féodalité. (…) Cette concurrence mimétique, quand elle est malheureuse, ressort toujours, à un moment donné, sous une forme violente. A cet égard, c’est l’islam qui fournit aujourd’hui le ciment qu’on trouvait autrefois dans le marxisme. René Girard
Nous sommes entrés dans un mouvement qui est de l’ordre du religieux. Entrés dans la mécanique du sacrilège : la victime, dans nos sociétés, est entourée de l’aura du sacré. Du coup, l’écriture de l’histoire, la recherche universitaire, se retrouvent soumises à l’appréciation du législateur et du juge comme, autrefois, à celle de la Sorbonne ecclésiastique. Françoise Chandernagor
Te rends-tu compte que le passé a été aboli jusqu’à hier ? S’il survit quelque part, c’est dans quelques objets auxquels n’est attaché aucun mot, comme ce bloc de verre sur la table. Déjà, nous ne savons littéralement presque rien de la Révolution et des années qui la précédèrent. Tous les documents ont été détruits ou falsifiés, tous les livres récrits, tous les tableaux repeints. Toutes les statues, les rues, les édifices, ont changé de nom, toutes les dates ont été modifiées. Et le processus continue tous les jours, à chaque minute. L’histoire s’est arrêtée. Rien n’existe qu’un présent éternel dans lequel le Parti a toujours raison. Je sais naturellement que le passé est falsifié, mais il me serait impossible de le prouver, alors même que j’ai personnellement procédé à la falsification. La chose faite, aucune preuve ne subsiste. La seule preuve est à l’intérieur de mon cerveau et je n’ai aucune certitude qu’un autre être humain quelconque partage mes souvenirs. De toute ma vie, il ne m’est arrivé qu’une seule fois de tenir la preuve réelle et concrète. Des années après. Winston (1984, George Orwell)
Debout ! les damnés de la terre ! Debout ! les forçats de la faim ! La raison tonne en son cratère, C’est l’éruption de la fin. Du passé faisons table rase, Foule esclave, debout ! debout ! Le monde va changer de base : Nous ne sommes rien, soyons tout ! C’est la lutte finale Groupons-nous, et demain, L’Internationale, Sera le genre humain. Eugène Pottier (1871)
Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves et si, malgré la terreur ce peuple a su, sous les formes les plus diverses, montrer sa réprobation de voir la France enchaînée au char de l’impérialisme britannique, il saura signifier aussi à la bande actuellement au pouvoir, SA VOLONTÉ D’ÊTRE LIBRE. Peuple de France (dit « Appel du 10 juillet »)
Cette violence irrépressible il le montre parfaitement, n’est pas une absurde tempête ni la résurrection d’instincts sauvages ni même un effet du ressentiment : c’est l’homme lui-même se recomposant. Cette vérité, nous l’avons sue, je crois, et nous l’avons oubliée : les marques de la violence, nulle douceur ne les effacera : c’est la violence qui peut seule les détruire. Et le colonisé se guérit de la névrose coloniale en chassant le colon par les armes. Quand sa rage éclate, il retrouve sa transparence perdue, il se connaît dans la mesure même où il se fait ; de loin nous tenons sa guerre comme le triomphe de la barbarie ; mais elle procède par elle-même à l’émancipation progressive du combattant, elle liquide en lui et hors de lui, progressivement, les ténèbres coloniales. Dès qu’elle commence, elle est sans merci. Il faut rester terrifié ou devenir terrible ; cela veut dire : s’abandonner aux dissociations d’une vie truquée ou conquérir l’unité natale. Quand les paysans touchent des fusils, les vieux mythes pâlissent, les interdits sont un à un renversés : l’arme d’un combattant, c’est son humanité. Car, en ce premier temps de la révolte, il faut tuer : abattre un Européen c’est faire d’une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé : restent un homme mort et un homme libre ; le survivant, pour la première fois, sent un sol national sous la plante de ses pieds. Sartre (préface aux « Damnés de la terre », 1961)
Immense et grand plaisir d’avoir pu rencontrer Ahed Tamimi à la fête de l’Huma, figure la résistance palestinienne ! Eric Coquerel (député France insoumise)
Ahed Tamimi, la jeune militante devenue une icône mondiale de la résistance palestinienne, lance un appel aux jeunes de France à la Fête de l’Humanité. L’Humanité
Tant que les noms des écoles sont utilisés pour glorifier le terrorisme, la Belgique ne peut pas coopérer avec le ministère palestinien de l’Education et ne fournira plus d’aide financière pour la construction d’écoles. Ministère de l’Education belge
Fin septembre au Conseil de Paris, le groupe communiste qui y voyait un vestige de l’histoire coloniale avait fait adopter un vœu pour demander qu’elle ne soit pas raccrochée et exposée en pleine rue. Après plusieurs rencontres de concertation, le projet initié par le budget participatif sera finalement respecté. La plaque restaurée sera réinstallée sur la façade d’immeuble avec un texte explicatif. Le Parisien
Don’t Forget July 1, 2018 Starts SPAM… SPAM… Straight Pride American Month! Last Sunday ended LGBTQF-WTF month Yea! (*Don’t get me wrong I support the First Amendment, as much as the next person, and support the rights of grown men to wear skin tight short-shorts and go-go boots and don tinker bell wings with wand and prance down the streets of San Francisco) with tens of thousands of folks dancing and prancing all over American celebrating the fact they are different than most of the rest of us and showing their “pride” in being so. Now before anyone gets their pantyhose in a knot, this is not really legally anti anything; instead it’s pro-family; and proud to be a straight American, and me expressing a private opinion… So there! If you remember last week I proclaimed the Month of July as SPAM …(Straight Pride American Month)…(as Vice Mayor don’t know if I can, but what the heck). Now hundreds of millions of the rest of us can celebrate our month, peaking on July 4th, as healthy, heterosexual, fairly monogamous, keep our kinky stuff to ourselves, Americans… We do it with our parades in every state and county in this country with families celebrating together. We honor our country and our veterans who have made all of this possible (including for the tinker bells) and we can do it with actual real pride, not some put on show just to help our inferior complex “show we are different” type of crap. We ARE different from them…We work, have families, (and babies we make) enjoy and love the company (and marriage) of the opposite sex and don’t flaunt our differences dressing up like faries and prancing by the thousands in a parade in nearby San Francisco to be televised all over the world… Ted  Hickman
My point was, what’s the difference? They have their pride month, why can’t we have ours? … I support the First Amendment. Ted Hickman
Il n’y a pas longtemps, l’apartheid régnait en Afrique du sud. Reposant sur la ségrégation des Noirs, il voulait se disculper en créant des bantoustans où une autonomie factice leur était concédée. Un tel système a heureusement disparu. Et voici qu’aujourd’hui, c’est un apartheid d’un nouveau genre qui est proposé à la France, une ségrégation à l’envers grâce à laquelle les « dominés » préserveraient leur dignité en se mettant à l’abri des « dominants ». Mais alors, cela veut dire qu’une femme qui ôte le voile et sort dans la rue deviendrait une proie normale ? Cela veut dire qu’une « race » qui côtoie les autres serait humiliée ? Cela veut dire qu’une religion qui accepte de n’être qu’une parmi d’autres perdrait la face ? (…) À quoi peut donc servir ce ségrégationnisme nouvelle manière ? Doit-il seulement permettre aux soi-disant « dominés » de sauvegarder leur pureté en vivant entre eux ? N’a-t-il pas surtout pour but d’affirmer la sécession avec la communauté nationale, avec ses lois et ses mœurs ? N’est-il pas l’expression de la haine la plus caractérisée à l’égard de notre pays et de la démocratie ? Que chacun vive dans la loi de sa communauté ou de sa caste et dans le mépris de celle des autres, que chacun ne soit jugé que par les siens, cela est contraire à l’esprit de la République. Celle-ci a été fondée sur le refus de droits privés s’appliquant à des catégories spécifiques et exclusives, autrement dit sur l’abolition des privilèges. Les mêmes lois pour chacun de nous, voilà ce que nous garantit au contraire la République. C’est ce qu’on appelle tout simplement la Justice. Le nouveau séparatisme avance masqué. Il veut paraître bénin, mais il est en réalité l’arme de la conquête politique et culturelle de l’islamisme. L’islamisme veut être à part car il rejette les autres, y compris les musulmans qui ne partagent pas ses vues. L’islamisme déteste la souveraineté démocratique car elle lui refuse toute légitimité. L’islamisme se sent humilié lorsqu’il ne domine pas. Pétition contre le séparatisme islamique
The scholars promoting this concept claim that it is a microaggression even when someone says “I don’t see you as black,” or claims to be colorblind, or purports not to be a sexist, or in general doesn’t “acknowledge” one’s race membership or gender. But let’s face it — it’s considered racist for whites to treat any trait as “black.” If we accept that, then we can’t turn around and say they’re racists to look at black people as just people. That particular aspect of the microaggression notion seems fixed so that whites can’t do anything right. One can’t help sensing a notion that this would be perhaps “payback” for whites and the nasty society they stuck us with. But all it does is create endless conflict, under an idea that basically being white is, in itself, a microaggression. That, however, is neither profound nor complex — it’s just bullying disguised as progressive thought. Let’s call it microaggression when people belittle us on the basis of stereotypes. Creating change requires at least making sense. John McWorther
Je crois que la séparation fondamentale entre peuple et élites – c’est une image, car c’est toujours plus compliqué – a pour point de départ la différenciation éducative produite par le développement du supérieur. Au lendemain de la guerre, dans les démocraties occidentales, tout le monde avait fait l’école primaire – aux États-Unis, ils avaient également fait l’école secondaire –, les sociétés étaient assez homogènes et très peu de gens pouvaient se vanter d’avoir fait des études supérieures. Nous sommes passés, ensuite, à des taux de 40 % de gens qui font des études supérieures par génération. Ils forment une masse sociale qui peut vivre dans un entre-soi. Il y a eu un phénomène d’implosion sur soi de ce groupe qui peut se raconter qu’il est supérieur, tout en prétendant qu’il est en démocratie. C’est un phénomène universel et pour moi, c’est la vraie raison. Il y a des décalages. L’arrivée à maturité de ce groupe social se réalise dès 1965 aux États-Unis. En France, nous avons trente ans de retard et ça s’effectue en 1995. Les gens des diverses strates éducatives ne se connaissent plus. Ceux d’en haut vivent sans le savoir dans un ghetto culturel. Dans le cas d’un pays comme la France, nous avons par exemple l’apparition d’un cinéma intimiste, avec des préoccupations bourgeoises déconnectées des cruautés de la globalisation économique. Il y a des choses très bien dans cette culture d’en haut. L’écologie, les festivals de musique classique ou branchée, les expositions de peinture impressionniste ou expressionniste, le mariage pour tous : toutes ces choses sont bonnes. Mais il y a des personnes avec des préoccupations autres, qui souhaitent juste survivre économiquement et qui n’ont pas fait d’études supérieures. (…) Par contre, je diverge de Lasch et de gens qui dénoncent les élites pour supposer des qualités spéciales au peuple. Je l’ai cru à une époque, mais je n’en suis plus là. Les élites trahissent le peuple, c’est certain. J’estime même de plus en plus qu’il y a au sein des élites des phénomènes de stupidité induits par le conformisme interne du groupe, une autodestruction intellectuelle collective. Mais je ne pense plus que le peuple soit intrinsèquement meilleur. L’idée selon laquelle, parce qu’il est moins éduqué ou moins bien loti, le peuple serait moralement supérieur est idiote, c’est une entorse subtile au principe d’égalité. Adhérer pleinement au principe d’égalité, c’est être capable de critiquer simultanément élites et peuple. Et c’est très important dans le contexte actuel. Cela permet d’échapper au piège d’une opposition facile entre un populo xénophobe qui vote Le Pen et les crétins diplômés qui nous ont fabriqué l’euro. C’est toute la société française qu’on doit condamner dans sa médiocrité intellectuelle et morale. (…) Je crois que c’est le symptôme d’un changement d’humeur de la société américaine dans son cœur, qui est un cœur blanc puisque la démocratie américaine est à l’origine blanche. Depuis longtemps, je suis convaincu que parce que les Anglo-Saxons ne sont au départ pas très à l’aise avec la notion d’égalité, le sentiment démocratique aux États-Unis est très associé à l’exclusion des Indiens et des Noirs. Il y a quand même 72 % du corps électoral qui est blanc. Obama a mené une politique de sauvetage de l’économie américaine tout à fait estimable dans la grande crise de 2007-2008, mais il n’a pas remis en question les fondamentaux du consensus de Washington : le libre-échange, la liberté de circulation du capital et donc les mécanismes qui ont assuré la dégradation des conditions de vie et la sécurité des classes moyennes et des milieux populaires américains. Dans les années 1950, la classe moyenne comprenait la classe ouvrière aux États-Unis. Les ouvriers ont été  “reprolétarisés” par la globalisation et les classes moyennes ont été mises en danger. Il y a eu, en 2016, une sorte de révolte. Le premier élément qui m’a intéressé – et c’était normal puisque dans L’illusion économique (1997) je dénonçais le libre-échange –, c’est la remise en question du libre-échange, qui était commune à Trump et Sanders. C’est parce que le protectionnisme est commun aux deux que nous pouvons affirmer être face à une évolution de fond de la société américaine. C’est vrai que le phénomène Trump est incroyable : le type fout en l’air le Parti républicain pendant la primaire et fout en l’air les Démocrates ensuite. Mais jusqu’au bout, et des vidéos le prouvent, j’ai cru que c’était possible, parce que j’étais tombé sur des études démographiques largement diffusées. Je ne sais plus si je les avais vues mentionnées dans le New York Times, dans le Washington Post, ou dans les deux. Elles révèlent que la mortalité des Blancs de 45-54 ans a augmenté aux États-Unis entre 1999 et 2013. Pour les Américains, le débat sur les merveilles du libre-échange est clos. Ils ont compris. Il faut partir de l’électorat et pas de Trump. L’électorat est en révolte et les États-Unis ont une tradition démocratique plus solide que la nôtre, à la réserve près qu’il s’agit d’une démocratie blanche. (…) Les Républicains ont inventé la technique du dog-whistle, c’est-à-dire du “sifflet à chien”, qui agit sans qu’on l’entende. Un langage codé permet de bien faire comprendre à l’électorat blanc qu’il faut détruire le welfare (les aides sociales), censé n’aller qu’aux Noirs. C’est ce qui a permis au Parti républicain de mener une politique économique absolument défavorable à son propre électorat, c’est-à-dire de diminuer les impôts des riches et de continuer à foutre en l’air la classe ouvrière blanche par le libre-échange. Trump est à l’opposé du dog-whistle. Il avait un double discours : d’un côté, un discours xénophobe tourné contre le Mexique – et pas contre les Noirs, qui sont sur le territoire américain – et de l’autre, des thématiques économiques quasi-marxistes. Pour moi, Trump est le contraire du racialisme républicain traditionnel. Il a mené le débat sur le terrain économique, face à des Démocrates qui activaient inlassablement, sur le mode de la bien-pensance, la question raciale, en se présentant comme les défenseurs des Noirs et en expliquant que si on appartenait à tel groupe, on devait voter de telle manière. Trump a donc foutu en l’air le Parti républicain racial avec ses thématiques économiques, pendant que le Parti démocrate est resté sur ses positions raciales banales. (…) En formalisant, nous pourrions dire qu’il y a deux forces qui s’opposent aux États-Unis : un parti national et un parti globaliste. Nous pourrions dire que le parti national se caractérise par une protection aux frontières – des biens, de la circulation des personnes, le tout avec une bonne base xénophobe – mais qui n’est pas hostile au marché et qui a pour seul but de relancer un capitalisme interne qui fabrique des biens. En gros, il explique que les entreprises peuvent se faire de l’argent autrement. En face, il y a le parti globaliste qui va laisser les frontières ouvertes, en expliquant que cela va fonctionner même si la théorie économique explique que cela va générer des dégâts et des inégalités, le tout devant être compensé par de la redistribution et du welfare. (…) Mais l’important, c’est la protection contre l’arrivée de marchandises fabriquées par des gens sous-payés. (…) La question, c’est de savoir s’il existe une technique qui permet que des gens s’enrichissent et que cela profite à tout le monde dans l’espace national. (…) Jusqu’à présent, j’étais résigné à l’enfermement de “l’anglosphère” dans son néo-libéralisme par son indifférence à l’égalité. Dans l’ensemble, mon modèle anthropologique ne fonctionne pas mal. L’idée d’un communisme fabriqué par une famille communautaire, égalitaire et autoritaire explique très bien l’histoire russe. La famille nucléaire absolue explique très bien le modèle libéral anglo-saxon, ainsi que le développement du capitalisme. Le fait que les gens ne sont pas très sensibles aux États-Unis ou en Angleterre à l’idéal d’égalité explique pourquoi le capitalisme y fonctionne de manière bien huilée et pourquoi les individus ne sont pas choqués quand certains font du profit. Mais entre 2000 et 2015, nous avons atteint la limite du modèle. Et bien sûr, les peuples peuvent transcender leur détermination anthropologique, mais à un certain niveau de souffrance seulement. C’est pour cela que la hausse de la mortalité a été un avertisseur qui m’a permis d’échapper à mon propre modèle. Quand j’ai pensé que Trump pouvait être élu, j’étais au fond en train d’admettre que mon modèle anthropologique était insuffisant. Mais c’est finalement la même chose qui s’est passée avec la chute du communisme. (…) Mon modèle anthropologique dit que les traditions communautaires russes expliquent très bien l’invention du communisme. Mais de même que le libéralisme a emmené la société américaine à un niveau de souffrance exagéré, qui a provoqué la révolte de 2016, le communisme avait atteint vers 1975 un niveau d’absurdité tel, avec une hausse de la mortalité infantile, qu’il s’est effondré en 1990. Par contre, ce que nous dit déjà l’existence ultérieure de la Russie, c’est que l’atteinte de ce point de rupture peut amener une modification du système économique, mais ne fait pas sortir définitivement la population de sa culture. Je pense qu’il y a une démocratie en Russie. Les Russes votent à 80 % pour Poutine. C’est une forme de démocratie autoritaire. Mais le fonctionnement de la société garde beaucoup des traditions communautaires d’autrefois. Le système américain tente de se réformer, mais il va garder ses traits libéraux et non égalitaires fondamentaux. D’ailleurs, quand je décrivais un protectionnisme qui laisse fonctionner le capitalisme en interne, c’est exactement cela que j’évoquais. (…) Les États-Unis ont traversé une phase d’instabilité et de crise culturelle à partir des années 1960 : montée du divorce, enfants hors mariage, etc. Ce sont quand même les Américains qui ont inventé la pilule. Cette phase de crise a entraîné une montée spectaculaire du taux d’homicide. Mais si nous reprenons tous ces paramètres – ce que je ne ferai pas maintenant – depuis 1995, il est clair qu’en termes de mœurs, les États-Unis sont dans une phase de restabilisation. Dans ses tréfonds, la société américaine opère un retour à l’équilibre. (…) C’est un pays en cours de stabilisation morale, malgré sa souffrance économique, qui vient d’élire Trump. (…) en réalité, le retour au national promu par Trump devrait s’accompagner d’une “désuniversalisation” des problèmes. Emmanuel Todd
Avec Trump, tous les coups sont permis. Les médias retrouvent d’instinct le langage orwellien qui inverse la paix en guerre et la liberté en servitude. Avec Trump, le traître devient héros, le président des Etats-Unis devient un tyran et un fou. La démocratie, c’est abattre l’homme élu par le peuple américain. Et cela dure depuis le premier jour de son élection. Une élection qui a pris par surprise toutes les élites de l’est et de l’ouest du pays – élites économiques, financières, médiatiques, judiciaires, administratives. Cet «Etat profond», comme l’appelle Trump, a décidé d’avoir la peau de ce Président et de le conduire vers la procédure d’impeachment, comme Louis XVI fut traîné à la guillotine. Chaque journaliste, chaque bureaucrate, même les plus haut gradés, chaque juge, rêve d’avoir la peau de Trump comme leurs glorieux aînés ont eu celle de Nixon en 1971. «Nixon le tricheur», lui aussi, avait été le candidat des classes populaires contre l’establishment sorti des campus universitaires des années 1960. Entre-temps, ces jeunes gens chevelus ont pris tous les pouvoirs à Washington. Et sont bien décidés à ne pas les perdre. Depuis des mois, ils s’efforcent de faire passer Trump pour un espion à la solde de Poutine. Et, comme cela ne marche pas, ils ajoutent désormais la folie. Cet affrontement, en vérité, dépasse le cas de Trump et même des Etats-Unis. C’est tout l’Occident qui en est le champ de bataille. La guerre inexpiable oppose des élites cosmopolites qui, au nom des valeurs universelles des droits de l’homme, veulent désagréger les peuples et les nations issus d’une histoire séculaire. En face, il y a les peuples occidentaux qui s’efforcent de sauvegarder leur mode de vie, leur identité, leur unité, leur histoire. Des peuples enracinés contre des élites déracinées. La loi de la majorité contre la dictature des minorités. La démocratie contre l’Etat de droit. Des élites qui se parent du titre de «progressistes» et qui, à Paris, Berlin, Bruxelles, Washington ou Los Angeles, traitent avec mépris les «populistes». Des élites qui ont juré d’avoir la peau des antiques nations et des peuples qui ne veulent pas mourir. Eric Zemmour
The University of Maryland (UMD) was forced to take down flyers and change the name of a counseling program that offered “safe space for white students” after sparking outrage on campus. At the beginning of the fall semester, UMD’s Counseling Center posted flyers for a new group called “White Awake,” which prompted the backlash. Early Friday, the university’s website changed the name to “Anti-Racism and Ally Building Group” and scrubbed any references to a “safe space” and “white students.” “This group offers a safe space for white students to explore their experiences, questions, reactions, and feelings,” the initial description read. “Members will support and share feedback with each other as they learn more about themselves and how they fit into a diverse world.” The flyer also asked if white people ever “feel uncomfortable and confused” in their “interactions with racial and ethnic minorities,” and if they “want to become a better ally.” Several students conveyed their outrage on social media and on campus. “The world is a space for white people to talk in,” one student told The Diamondback, a UMD student newspaper, expressing how unnecessary the new initiative is. (…) Noah Collins, who leads the group and specializes in group therapy for the Counseling Center with an interest in “racial and cultural awareness,” issued a statement Thursday night saying UMD will discontinue the flyer and consider changing the name, but that it stands by the group. He added the flyer was “not clear enough” in explaining that the group’s aim is “anti-racism and becoming a better ally.” Fox news
L’école, c’est la guerre. (…) Parents noirs, arabes et musulmans, parents habitant les quartiers populaires….nos enfants fréquentent des établissements où ils sont stigmatisés et humiliés par certains enseignants, prêts à partir en croisade contre une jupe longue ou un début de barbe suspecte… Nos enfants assistent aux humiliations que nous y subissons, notamment lorsque nous sommes voilées et qu’on nous interdit de les accompagner en sortie… Nos enfants apprennent très tôt la hiérarchisation raciale. Front de mères
The Rise of Victimhood Culture makes the case that incentives at the modern American university have created a new moral culture, one where victimhood is granted a special moral status. Awarding status to victims has in turn led to hoaxes, false accusations, and, in some extreme cases, moral panics. The diagnosis is put forward by sociologists Bradley Campbell and Jason Manning, and they make their case convincingly. The argument is that college campus is ground zero for this new culture, but its rules of conduct are starting to leak into mainstream institutions. (…) On a university campus, for example, victims are not shamed but are instead fiercely protected, and now awarded status. This dynamic could be observed as early as 2015, in the reception to Emma Sulkowicz’s protest against a sexual assault she alleged had taken place. It consisted of her carrying her mattress around the Columbia University campus, including to class, under the condition that her accused rapist needed to be expelled in order for her to stop. For this performance, she was widely criticized, but she was also heralded as a feminist hero. The New York Times art critic Roberta Smith called it “succinct and powerful” and added that Sulkowicz has “set a very high standard for any future work she’ll do as an artist.” Although Columbia University and the New York Police Department failed to establish any wrongdoing on the part of the student Sulkowicz had accused, for art critics such as Smith, the accused student’s guilt was a fait accompli. That such awards and accolades might incentivize vexatious or false complaints in a student body seemed not to matter to adults in charge. (…) Campell and Manning predict that victimhood culture will eventually spread from elite colleges into the mainstream. In making this prediction, they note the significance of the fact that victimhood culture has emerged among the wealthiest schools in America. Oberlin and Brown, for example, have led the microaggression movement, while Claremont has been a pioneer in safe-space demands, microaggression protests, and the banning of speakers. They point out that the median family income at Middlebury College—where Charles Murray was shouted down and where his sponsoring professor, Alison Stranger, was given whiplash injuries in a parking lot—was $240,000 per year. That income level is double that of Saint Louis University, where Murray spoke to an attentive audience. The book thus highlights a peculiar fact: The students most obsessed with their own oppression are some of the most pampered individuals in the world. (…) Campbell and Manning warn, victimhood culture will likely spread downwards from the social elites to the middle classes—as those wishing to be upwardly mobile will try to emulate upper-class moral norms. While the culture is likely to spread downwards, it is also likely to inspire resentment. Campbell and Manning warn that the narratives of privilege deployed by the culture, which target white men in particular, are just as likely to inspire hostility as deference, especially in those who feel that they are unfairly targeted as oppressors (…) Paradoxically, the backlash against political correctness is likely to make the situation worse. Conservatives are quickly learning to ape victimhood, too. The authors note that professional provocateur Milo Yiannopolous “thrives on causing offense and controversy,” neither of which promotes a culture of dignity. (…) The logic of victimhood culture, then, is escalating grievance and retaliatory aggression. When slights cannot be neutralized with a dignified turn of the cheek, the prognosis looks grim. What the purveyors of victimhood culture do not seem to grasp is that in weakening dignity, and in undermining the principles that deem all men and women to be moral equals, they unwittingly destroy the safeguards that prevent bad actors—such as hoaxers and narcissists—from climbing the social hierarchy through dishonesty and manipulation. In incentivizing weakness and reliance on third parties to intervene in disputes, students invite a paternalistic authoritarian apparatus to develop. While they seem comfortable with an authoritarian apparatus on their university campus today, we should not be surprised if they demand an authoritarian state to police the citizenry tomorrow. The logical endpoint of a victimhood culture will not be a progressive utopia. On the contrary: The further this culture radiates outward, the more likely it will make victims of us all. Commentary
We argue that victimhood culture, at least in its more extreme forms, is new. We see it in its purest form on contemporary college and university campuses. Manifestations of victimhood culture include complaining about and punishing microaggressions, demanding and creating safe spaces, requesting and requiring trigger warnings, and banning or disinviting speakers who might offend designated victim groups. (…) Making moral judgments elevates the reputation of some people and lowers the reputation of others, so morality is always a source of a kind of social status that we can think of broadly as respectability. Other kinds of status have other sources, so in any complex society not only are some people more respectable than others, but some are also wealthier, more socially integrated, or more culturally conventional. Your position on these and other social hierarchies affects how people treat you. If you testify in court, for example, people are more likely to believe you if you are wealthy, respectable, and so on. And if you’re the victim of a crime, it’s more likely the offender will be brought to justice. (…) Like honor cultures, victimhood cultures emphasize one set of vices and virtues over others. They are concerned with eradicating oppression and privilege, and this single-minded moral obsession can lead to the similar kinds of perversities that come from neglecting other virtues in honor cultures. But even in an honor culture your moral status usually has to do with your own behavior rather than someone else’s. In a victimhood culture it’s instead your identity as a victim that gives you status. It’s not your own virtue at all, but someone else’s treatment of you, that makes you virtuous. One problem with this is that you end up with a system of morality that doesn’t offer much incentive for good behavior. Honor cultures incentivize bravery while neglecting other virtues. But if you want esteem in a victimhood culture, what can you do? It’s not like you can become a victim. Or actually, you can — you can portray yourself as weak and in need of help, you can portray others’ behavior toward you as harmful and oppressive, and you can even lie about being the victim of violence and other offenses. Victimhood culture incentivizes bad behavior. The extreme form of victimhood culture we see among activists on college campuses leads to another problem in that one’s status as a victim comes not just from individual experiences of victimhood but also from one’s identity as part of a victim group. The idea is that all members of certain groups are victims, but that no one else is. Activists even argue that whites cannot be the victims of racism, or men the victims of sexism. Likewise, whether people can be victims of new offenses like cultural appropriation or microaggression, depends on their identity. A white person wearing a hairstyle associated with African Americans would be cultural appropriation, for instance, but an African American wearing a hairstyle associated with whites would not be. Likewise, those who have pioneered the concept of microaggression have made it clear that not all slights count. A white male elementary school teacher may experience stereotypes and put-downs, for example, but to call those microaggressions would be a “misapplication of the concept.” So the moral hierarchy of victimhood culture places entire groups of people at the top or bottom based on the whole group’s victimhood status. And while it’s not always clear which groups qualify, Jonathan Haidt identifies seven groups that are currently treated as sacred: people of colour, women, LGBTs, Latinos, Native Americans, people with disabilities, and Muslims. Under this schema even many minority groups, such as Evangelical Christians, fail to qualify, and any discrimination against them is ignored or celebrated. We have two problems with this. The first is a fundamental moral objection. We believe in the ideals of dignity culture — that all human beings have an inherent worth and should be treated accordingly — and we object to the new hierarchy of victimhood just as we would any racial and ethnic hierarchy. The second problem is the reactions it may produce. Whites, men, and others who do not have victimhood status are unlikely to accept a new morality and a new moral hierarchy in which they’re at the bottom. And they may end up embracing one in which they’re at the top. We find the recent prominence of alt-right white nationalists alarming, and we worry there will be more of it in reaction to the spread of victimhood culture. It’s a dangerous thing to undermine dignity culture and its ideals of equality. (…) In the book we talk about the movement against campus rape, and we point out that the movement has support from journalists, members of Congress, and others who are not part of the campus victimhood culture. And rape isn’t a new offense like microaggression or cultural appropriation. It’s also not a minor offense. So the movement as such isn’t a pure manifestation of victimhood culture. But what we do see is that an effort to honor victims leads to credulity even in cases like the rape hoaxes at Duke and at the University of Virginia where it should have been clear that the accusers were lying. It also leads to efforts to weaken the due process rights of the accused. And alongside the more mainstream elements of the movement are the campus activists and others enmeshed in victimhood culture who make more radical arguments — that accusers should always be believed, for example. But so far such ideas haven’t been widely adopted. The #MeToo movement may be similar. To some extent it may have facilitated the mainstreaming of victimhood culture, but it’s also a mainstream enough movement that efforts to radicalize it and to use the moral language and logic of campus activists seem mostly to have failed. The movement as a whole appears not to have relied on accusations of new victimhood offenses and has focused instead on things like rape, groping, and other kinds of sexual assault and sexual harassment. The accusations against Harvey Weinstein and against most of the other prominent targets of the #MeToo movement haven’t been about microaggressions and haven’t relied on creative ideological expansions of the concepts of assault and harassment. The accusations against Weinstein, for example, include 19 coerced sexual acts and many more instances of unwanted touching and sexual exhibitionism. Much of the #MeToo movement might be seen as an expression of dignity culture — an appeal to ideals already widely held in the culture but commonly violated in practice. Women demanding that they not be bullied, groped, fondled, demeaned, assaulted, or harassed by men the workplace, and that the men abusing their power in this way face consequences, aren’t relying on radical feminism or its notions of endemic patriarchal oppression — not usually, anyway. They seem to be trying to bring to light behavior that was already considered wrong but that many people weren’t aware was going on. But the #MeToo movement is large and has less mainstream elements as well, so some of the accusations have indeed drawn from victimhood culture in various ways. We might think of the most prominent accusations existing on a continuum from Harvey Weinstein to comedian Aziz Ansari. In January 2018 the online magazine Babe published an article by Katie Way about an anonymous woman’s date with Ansari. The article, “I Went on a Date with Aziz Ansari. It Turned into the Worst Night of My Life,” recounts in detail a date between “Grace” and Ansari. Ansari doesn’t come off as particularly gentlemanly in the account, but it’s clear that the story is not about rape, it’s not about sexual assault, and it’s not even about sexual harassment. After going to dinner, the two went to Ansari’s apartment, engaged in sexual acts with one another, and according to Grace, Ansari then kept wanting to engage in intercourse, she didn’t, and she eventually went home. Later in a text message she told Ansari that he had ignored “clear non-verbal cues” and said that he had to have noticed she was uncomfortable. The accusations against Weinstein, which deal with clear-cut cases of violence, coercion, and harassment, are understandable in terms of mainstream morality, while the accusation against Ansari is understandable only in terms of victimhood culture. The same perspective that leads to the labeling of uncomfortable conversations as a kind of aggression, or conservative political speech as violence, leads here to the labeling of boorish behavior on a date as sexual assault. To the extent that the #MeToo movement accords a special status to victims, to the extent that it establishes victimhood solely based on whether someone is a woman or man, and to the extent that it blurs the distinction between serious offenses like what Weinstein has been accused of and the kind of noncoercive sexual advances on a date that Ansari is accused of, it will indeed lead to the spread of victimhood culture. Another thing the Ansari case illustrates is something we have thought of as moral emaciation. Victimhood culture’s focus on oppression narrows the range of moral discourse, and activists seem to be losing the capacity to make moral judgments based on anything other than victimhood terms. It seems that anything activists find bad they define as harmful and oppressive, whether it’s an ugly statue on campus or a bad date. As Mona Charen points out, isn’t what Grace wanted — affection, kindness, attention — what many people want when they go on a date? “What does it say about dating in our time,” she asks, “that those are unrealistic expectations?” The problem is that Grace has no moral language to communicate this. She can’t describe Ansari’s behavior as caddish, lascivious, or any of the other old-fashioned terms that would more accurately capture her moral reaction. Instead, it has to be oppression, assault. This is probably not good for the #MeToo movement, and it may shift attention away from the kinds of offenses the movement was supposed to call attention to. It also doesn’t help anyone to think better about how people should behave on dates. Moral emaciation leads to moral confusion. (…) Complaints of cultural appropriation illustrate victimhood culture quite well. As with microaggression complaints, it’s a grievance about a nonviolent, probably unintentional slight that many observers wouldn’t even see as offensive. As with microaggressions, the offense is framed as a matter of collective oppression, of one social group harming another. And in practice, it’s usually an offense defined by identity, something only people in designated privileged groups can be guilty of. Victimhood culture’s high sensitivity to slight means it continually coins new types of offense. And this is certainly one of the most baffling of the new offenses. As we’ve discussed elsewhere, one particularly confusing aspect is that many of the things that get called cultural appropriation were, until very recently, virtues — signs that one was cosmopolitan and open-minded. If anything, we might expect social and cultural conservatives to be the ones most upset about Westerners practicing yoga or mindfulness meditation, or white kids adopting black fashions and hairstyles. In many cases they are, but these days so-called progressives are often vocal and visible critics. (…) Though the complaint is framed as a matter of someone dominating or exploiting the vulnerable — in a victimhood culture, virtually all complaints are — it might be more helpful to understand it as a matter of the offenders aping their betters. As sociologist Donald Black discusses in his book Moral Time, various societies throughout history have had rules — sumptuary laws — preventing people from adopting the styles, entertainments, and recreations of their social betters. The Han and Ming dynasties forbade commoners from wearing certain colors of clothing. Premodern Japan had laws forbidding peasants from wearing clothing distinctive of townspeople. In medieval England a law stated that no one under the rank of knight should wear any fur clothing (later amended to allow them to wear distinctive kinds of fur). And no one below the rank of lord was allowed to wear the period’s fashionable pointy shoes. The unwritten norms regarding cultural appropriation seem analogous to these sorts of restrictions. (…) thinking of it as a kind of moral pollution also might help us put it into a larger sociological context. As sociologist Murray Milner argued in his work on the Indian caste system, sacredness is but a special form of status. It corresponds to what we call moral status in our book, though like honor it might be a particular style of moral status. The sacred is that which is treated as special and worthy of reverence. It must be set apart from the profane, protected by rituals associated with cleanliness and purity. One might immediately think of Mosaic Law, but if we understand it abstractly we can see these sorts of purity rules everywhere, including regarding secular things like national flags and anthems. What is going on when a white Westerner practices yoga or paints in an indigenous style or quotes a lyric from a Beyoncé song? Perhaps it’s like having the unclean enter the temple and put on the vestments. The culture of vibrant, good, brave, people is being polluted by those who carry the moral stain of privilege. It also seems like there’s also a theme of moral pollution in some of the discourse surrounding “whiteness.” Sometimes the manner in which it’s discussed makes it seem like a curse, or something that spreads and infects places and things as well as people. Hence we see pieces where people complain about the prevalence of whiteness in LGBT spaces, or Taylor Swift exuding whiteness, or, to give a case we mention in our book, people accusing others of asking white questions and employing white research methods. (…) Victimhood culture is mainly a leftwing phenomenon, but it has a way of spreading. Conservatives and others who find themselves opposed to campus activists might uphold the values of the dignity culture the activists reject, but sometimes they end up departing from it themselves. One way they might do this is by embracing whatever victimhood culture opposes. This can mean being deliberately provocative and offensive in order to get a rise out of the activists, or at the extreme, it can mean embracing alt-right ideologies that reject equality and diversity. But another way conservatives might depart from dignity culture is by embracing the assumptions of victimhood culture and pointing to their own victimhood. In our first article on victimhood culture in 2014, we pointed to the case of Tal Fortgang, a Princeton student who wrote an article about checking his privilege, as campus activists had been urging that he and others do. The idea was that when he checked his privilege he found in his background a long history of hardship and persecution, including family members who had been persecuted and murdered in the Holocaust. Now in one sense, that’s perfectly reasonable. It points to the absurdities of the victimhood framework. The grandson of Holocaust survivors might legitimately wonder why he should have the burden of being labeled privileged while others at his elite university gain sympathy and status by labeling themselves victims. We ourselves sometimes wonder why in an academic environment where people constantly talk about disadvantage, inclusivity, diversity, and the like, our working class, small town, Southern backgrounds gain us no victimhood points. So the idea might be, if you’re going to denigrate the privileged and valorize the victimized, at least be more accurate — don’t base it all on skin color, sex, and a few other such traits. But this easily leads to competitive victimhood, where moral disputes become contests over who can claim the most disadvantage. Conservatives at colleges and universities might be especially prone to embracing victimhood since they can actually make very plausible claims of being one of the most victimized groups on campus. Conservatives are vastly underrepresented among the faculty, especially in the social sciences. Far more sociologists identify as Marxists than as conservatives, for example, and a survey of sociology professors found that nearly 30% of them acknowledged they would be less likely to support a job candidate who was a Republican. Conservatives on campus are also subject to what the activists would call microaggressions or worse if directed toward recognized victim groups. Many of them remain closeted. The claims of victimhood are understandable, then, but if conservatives end up adopting their adversaries’ assumptions about what constitutes victimhood and what the response to victimhood should be, they’ll become just another force undermining dignity culture. (…) We also see claims of victimhood becoming a key part of the campus conservative message. Conservatives should definitely complain about the suppression of free speech on campus. But sometimes this takes the form of engaging in intentionally offensive speech in order to get a reaction from the left that then becomes the basis of further complaints. This actually combines both of the dignity-rejecting strategies — the embrace of offensiveness and the embrace of victimhood. Conservative groups that have brought in the provocateur Milo Yiannopoulos, for example, seem more interested in stirring up controversy and angering the left than in advancing conservative ideas. They should have the right to do so, of course, and even when groups have brought in conservative intellectuals campus activists have sometimes reacted in the same way. Still, bringing in someone like Yiannopoulos hardly advances the ideals of dignity. (…) Another way that conservatives and other opponents of victimhood culture may end up adopting its assumptions, perhaps unwittingly, is by valorizing the victims of victimhood culture.  (…) According to Black’s theory, tolerance of diversity is greater in exactly those places that have more diversity to start with, while concern with cultural purity is greatest where culture is relatively homogeneous. Theoretically, increasing ideological diversity should reduce the degree of ideological intolerance on campus, and so undermine some of the more severe eruptions. It would also provide some more tolerance for those wishing to criticize victimhood culture as such. For many college students, socialization into extreme sensitivity and dependency began before they arrived. There are signs that children and youth — at least from the middle and upper classes — are more sheltered, supervised, and regulated than in decades past, and that they have correspondingly less practice in coping with difficulties and handling conflicts on their own. Supporters of so-called free-range parenting campaign against this, encouraging parents to allow their children unsupervised play and school districts to provide recess grounds with such dangerous equipment as jungle gyms and monkey bars. One might find ways to encourage these kinds of initiatives locally or nationally, such as by raising money for the legal defense of people charged with neglect and abuse for what many of us would consider a reasonable bit of autonomy or schools held responsible for accidental injuries. And finally, it’s important to combat victimhood culture and to deal with the problems it creates in the universities and elsewhere, but it’s also important to create alternatives to the universities and the mainstream media where serious ideas can be discussed and debated. Bradley Campbell and Jason Manning
Portée outre-Atlantique par l’extrême gauche, puis par des groupes et des individus s’estimant les porte-paroles exclusifs de «minorités» de couleurs, de genres, d’obédiences spirituelles, etc., l’idéologie racialiste mère de ce désastre culturel a été largement décrite, et depuis longtemps, par nombre d’intellectuels américains – hélas trop rarement traduits en français – d’Allan Bloom au milieu des années 1980 jusqu’à l’ouvrage récemment publié par deux sociologues, Bradley Campbell & Jason Manning, The Rise of Victimhood culture (Springer, 2018). Aux États-Unis est ainsi née l’inversion des modes ségrégatifs. Dans un pays qui vécut longtemps sur un système de discrimination légale, doit-on s’étonner? Les antiracistes-racistes actuels se prétendent héritiers de la lutte pour les droits civiques des années 1960, qui visait en effet à combattre des situations bien réelles et à abolir les lois de ségrégation raciale. Une fois l’égalité des droits acquise fut mise en œuvre la discrimination positive, source d’effets pervers qui ont justifié sa profonde remise en cause, y compris par le président Obama. Mais ce n’était pas assez: il fallait suivre les traces de Malcom X plutôt que la sagesse d’un Luther-King, il fallait que les WASP payent, et sur plusieurs générations. Seuls des «blancs» adeptes de l’autoflagellation pourraient désormais échapper à l’opprobre du racialement-correct. Ils furent légion, ils se comptèrent par millions, jusqu’au point où cette haine de soi apparut pour ce qu’elle était: une pathologie collective suicidaire Le concept «d’appropriation culturelle» étant une des gouttes qui a fait déborder le vase de la bêtise du «progressisme racialiste». Des Américains de toutes origines commencèrent alors à reprendre leurs esprits, à sortir la tête de l’eau croupie de l’autodénigrement. Ironie du sort, au même moment, en France, nous plongeons à notre tour dans ce marigot, l’adaptant à notre sauce, réécrivant notre histoire commune à partir de récits mêlant histoire, mémoire et mythologie sur des thèmes obsessionnels tels que l’esclavage, le colonialisme, le génocide, l’homophobie, la misogynie, l’immigration. Il en ressort que la société française – traduire par «blanche», «de souche», «gauloise» etc. – serait intrinsèquement raciste. Depuis une dizaine d’années, dans les départements universitaires français de Sciences humaines, nombre de chercheurs – inconnus du public éclairé, voire de leurs collègues universitaires renommés – reprennent les grandes théories des «gender studies» ou des «racial studies» élaborées aux États-Unis reprenant le vocabulaire abscons cher aux héritiers de Deleuze, Lacan, Foucault et Derrida, cette «French theory» influente sur les campus des années 1970-80. Certains sont docteurs en sociologie ou en sciences politiques. Beaucoup plus rares, mais plus inquiétants, d’autres sont normaliens. La plupart des fers de lance de cette idéologie sont des étudiants-doctorants qui voient leurs thèses validées par une poignée de professeurs d’université grenouillant dans la mouvance indigéniste. Tout ce petit monde, très sensible au discours des Indigènes de la République et du CCIF, publie des articles dans des revues secondaires voire anonymes et des livres chez des éditeurs militants plutôt qu’universitaires. Mais ce sont les petites rivières qui forment les grands fleuves. Ils nous expliquent que ce qui compte, ce n’est pas tant le réel que les représentations mentales et sociales, qui à les lire seraient gravées dans le marbre… Commence ainsi la police de la pensée dont toutes les idéologies totalitaires ont porté la marque: on vous assigne à une identité en vous prêtant une pensée (et donc des comportements) induite par votre groupe d’appartenance, supposé ou réel. Vous devenez raciste par vos ascendants, sexiste parce que vous êtes un homme blanc hétérosexuel. Parallèlement, si vos ascendants furent esclaves, colonisés, exterminés ou si vous êtes née femme, vous êtes à jamais victime. Et comme il s’agit de représentations sociales, il convient d’éclairer votre lanterne, car pauvre bougre que vous êtes, vous êtes parfois victime ou bourreau par héritage sans le savoir! Une poignée de maîtres-penseurs, Docteur-es PHD à l’appui, viennent ainsi révéler au grand jour vos tares et vos traumas. Trop d’impensés tueraient-ils la pensée? Par la magie d’un simple logiciel de statistiques, ces soi-disant penseurs «analysent» vos discours et vos textes et produisent un nuage de mots administrant la preuve sémantique de vos obsessions mentales, racistes, sexistes, homophobes, enfin dévoilées. L’avantage du concept d’«inconscient collectif» ou celui de «construction sociale» est qu’il permet d’attribuer toute pensée déviante à un tiers voire à un groupe social dans son entier. Ainsi les indigénistes recourent-ils systématiquement à l’essentialisation pour stigmatiser les «bourreaux». Essentialisation que, ne craignant pas la contradiction, ils dénoncent tout aussi systématiquement dès qu’il s’agit des «victimes». (…) La thèse dite «décoloniale», initiée et défendue par la mouvance indigéniste, postule l’existence d’un «racisme d’État», d’un racisme «systémique» qui maintiendrait délibérément les populations issues de l’immigration africaine dans un statut d’infériorité. Ce «racisme d’État» viserait du même coup spécifiquement l’islam, religion qui de ce fait se retrouve assimilée à une «race», celle des victimes, des humiliés par excellence. Cette «domination» racialiste serait instaurée par l’institution scolaire dès le plus jeune âge et à tous les niveaux ; les élèves, les étudiants seraient ainsi exposés à des enseignements biaisés visant à les rabaisser, les enseignants véhiculant inconsciemment pour la plupart des représentations sociales héritées de l’époque coloniale. Pour la mouvance décoloniale, l’École de la IIIème République est l’objet de toutes les détestations: odieusement raciste et islamophobe puisque laïque, affreusement colonialiste car elle croyait en un idéal universel d’instruction, la fameuse «mission civilisatrice». Il s’agit toujours chez les indigénistes de porter un regard anachronique sur cette époque passée pour mieux la décalquer sur le présent. L’anachronie, c’est leur fonds de commerce. (…) L’offensive universitaire de ces mouvements constitue un danger réel pour l’enseignement supérieur, plus généralement pour la crédibilité des universités françaises déjà mises à mal dans les classements internationaux. L’université française ne peut pas se permettre la gangrène qui a gagné certains campus américains, qui y a décrédibilisé des départements entiers et a conduit des enseignants réputés à quitter leurs postes. Car, ne nous y trompons pas: les indigénistes, comme les islamistes, suivant les théories de Gramsci, veulent précisément faire imploser l’institution scolaire et académique, qui sont les socles de la société à venir. Barbara Lefebvre et Anne-Sophie Nogaret
Selon les postcolonial studies, courant venu du monde anglo-saxon et sud-américain, le « passif colonial » continuerait à structurer toutes nos institutions et représentations. Encore minoritaires dans le champ académique il y a dix ans, ces thèses semblent s’inviter de plus en plus à l’université. C’est d’abord une question de vocabulaire. « Racisme structurel » (de l’Etat français), « domination blanche »,  » féminisme islamique »… Une nuée de concepts qui ne se limitent plus aux cercles d’initiés et aux réunions militantes. Un peu partout, on voit se multiplier les cours, les travaux dirigés, les doctorats, les sujets de thèse, les colloques ayant trait à ces questions. Beaucoup des chercheurs ou enseignants rencontrés au cours de cette enquête témoignent sous couvert d’anonymat. Le sujet, disent-ils, est trop « brûlant », trop « passionnel », « confisqué par les extrêmes ». Pour les esprits « raisonnables », ceux qui voudraient « continuer à travailler », il n’y aurait que des coups à prendre à rester « à l’écart des vieilles ou nouvelles chapelles ». 80 intellectuels, dont Elisabeth Badinter, Mona Ozouf, Pierre Nora, Alain Finkielkraut ou encore Boualem Sansal, dénoncent cependant cette « offensive des ‘décoloniaux' » dans « Le Point » cette semaine. « Tout cela crée un profond clivage entre collègues », souligne Gérard Noiriel, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en Sciences Sociales (EHESS). Benjamin Stora, président du Musée de l’Histoire de l’Immigration et spécialiste de la guerre d’Algérie, est à peine plus disert. Malgré tout, il lâche : « Dans notre pays, nous avons peu de professeurs spécialistes de l’histoire de la décolonisation. Du coup, le sujet est préempté par de jeunes doctorants en sociologie ou en science politique, parfois très dogmatiques. » C’est dans ce vide académique que se sont engouffrés ceux que l’on appelle, et qui s’appellent eux-mêmes, les « décoloniaux », des chercheurs qui assument d’être aussi des militants. Le 6 novembre dernier, Sciences-Po Aix-en-Provence a programmé une conférence sur le thème : « Un féminisme musulman, et pourquoi pas ? » La conférencière s’appelle Malika Hamidi, sociologue, auteur de plusieurs articles et d’un essai, notamment sur la question du foulard. Elle préconise : « La lutte féministe de la musulmane d’Europe sera principalement une lutte contre l’islamophobie et le paternalisme d’un certain féminisme occidental à prétention universaliste. » Habituée des colloques en France (elle a aussi été invitée à l’institut d’études politiques de Lyon et à l’EHESS), Malika Hamidi se targue d’être aussi « une femme de foi et une militante ». A son CV il faut ajouter le titre de directrice générale de l’European Muslim Network, une organisation présidée par Tariq Ramadan. (…) Pour ses partisans, la percée de la mouvance « décoloniale » illustre en effet l’expression du pluralisme à l’université, qui s’ouvrirait enfin aux « problématiques » nouvelles travaillant la société. Pas suffisamment encore aux yeux de certains. C’est le cas du sociologue Eric Fassin, directeur du département d’études de genre à Paris-VIII, qui a importé en France les postcolonial studies. Cette figure médiatique, qui exerce une réelle influence sur une partie du monde universitaire et intellectuel français, a cosigné une tribune collective, publiée dans « Libération » en 2015, condamnant le rôle de l’Etat français, « comme l’acteur principal d’un racisme institutionnel ». Aujourd’hui, il regrette que les universités soient toujours trop frileuses : « Il n’y a pas assez de créations de poste. Nous manquons de professeurs qui travaillent sur les discriminations raciales. » François Burgat, lui, n’a pas attendu ces dernières années pour faire entendre sa voix. Septuagénaire, directeur émérite de recherche au CNRS, il n’a jamais tourné le dos à Tariq Ramadan, y compris après sa mise en examen pour viol. « La vraie question n’est plus de savoir si Tariq Ramadan ‘a violé trois femmes’, expliquait-il le 26 octobre sur Twitter, mais bien ‘avec l’aide de qui ces trois femmes sont-elles parvenues si facilement à rouler trois magistrats dans la farine’ ? » Sur Twitter toujours, après l’émoi suscité par l’assassinat de l’octogénaire juive Mireille Knoll, chez elle à Paris, il n’a pas hésité à écrire : « Oups, ce n’était pas vraiment la Shoah dans un appartement. » Parmi d’autres déclarations publiques, on peut noter ses attaques contre la télévision française qu’il traite de « Télavivision » (en référence à Tel-Aviv) ou ses incitations à « soutenir le CCIF ». Et François Burgat compte toujours autant de disciples au sein de l’Institut de Recherches et d’Etudes sur le Monde arabe et musulman (Iremam) d’Aix-en-Provence, un laboratoire doté de moyens importants et qui accompagne, pour les années 2018-2019, quarante-cinq doctorants dans la rédaction de leurs thèses. Récemment, il a ainsi dirigé les travaux de l’un d’eux sur les rapports entre le Qatar et le prédicateur sunnite Youssef al-Qaradawi. Ce dernier, parfois surnommé « le cheikh de la mort « , est l’auteur de plusieurs fatwas autorisant les attentats-suicides ; il déversait, en 2009, sur la chaîne Al-Jazeera, sa haine des juifs : La thèse consacrée au prédicateur a été soutenue le 20 novembre 2017, devant un jury présidé par François Burgat. Elle n’a pas encore été publiée, mais certains observateurs qui ont assisté à la soutenance ont été interloqués. « Les relations de Qaradawi avec le Qatar y sont qualifiées de simple ‘soft power islamique de complémentarité’ ! » raconte l’un d’entre eux. Son auteur, Nabil Ennasri (formé par Tariq Ramadan, dont il dénonce la « lapidation médiatique »), est aujourd’hui docteur en science politique. Parfois, les initiatives de la faculté sont plus troublantes encore. En octobre 2017, des universitaires de Lyon-II ont convié – dans le cadre d’un colloque intitulé « Lutter contre l’islamophobie, un enjeu d’égalité ? » – Abdelaziz Chaambi, le fondateur de la Coordination contre le Racisme et l’Islamophobie (CRI), mais aussi… fiché S par les services de renseignement. Suite au tollé de nombreuses associations, la présidence de l’université a fini par annuler la manifestation. (…) Tout cela dessine pour le moins un climat. Et les militants de la laïcité, à l’unisson de certains spécialistes de l’islam, y voient la preuve de la victoire culturelle remportée par les Frères musulmans dans le monde universitaire. Les Frères, expliquent-ils, évitent de mettre en avant leurs propres objectifs. Ils les intègrent dans d’autres combats, comme la lutte contre les discriminations ou pour l’égalité hommes-femmes. Depuis peu, les mêmes s’inquiètent de la percée du Parti des Indigènes de la République, créé en 2005, que sa porte-parole, Houria Bouteldja, défini comme « anti-impérialiste et antisioniste ». Un professeur d’économie, confie, en off : « Aujourd’hui, à l’université, si vous vous opposez à ces réseaux, vous passez vite pour un raciste. » Autre confidence, presque apeurée, d’une chercheuse en poste dans le sud de la France, ayant toujours voté à gauche, défendu les droits de l’homme, combattu toutes les discriminations : « Avant, le pire pour un universitaire, c’était d’être accusé de plagiat ; maintenant, c’est de se voir traiter d’islamophobe sur internet. Cette accusation signe la fin d’une carrière. » Quelques téméraires, pourtant, osent prendre le risque. Par exemple, Isabelle Barbéris, agrégée de lettres modernes, normalienne, chercheuse associée au CNRS et maître de conférences à Paris-VII. « Certains étudiants, dit-elle, ont été littéralement endoctrinés par des professeurs qui sont de purs militants, mais que leurs titres académiques légitiment auprès des jeunes. » Céline Masson, professeur de psychopathologie clinique à l’université de Picardie Jules-Verne, ajoute : « Il existe aujourd’hui une petite cinquantaine d’universitaires très présents sur certains campus qui instrumentalisent la notion de racisme d’Etat. » En juin, Céline Masson a fait paraître avec deux autres professeurs (Isabelle de Mecquenem, professeur de philosophie de l’université de Reims, et Jean Szlamowicz, de l’université de Bourgogne) une tribune titrée : « Un antiracisme sectaire à l’assaut des facs : malaise dans la culture juvénile ». Ils y décryptaient le « discours univoque et véhément », qui, de colloques en conférences sur l' »islamophobie », cherche, « au mépris de la rationalité critique », à « légitimer l’idée d’une racisation de la société et d’un racisme d’Etat ». Ainsi s’impose peu à peu une vision du monde, clivée entre les « indigènes » opprimés et les « Blancs » héritiers de la colonisation. Alors que le mot « race » – jusqu’il y a peu signe de ralliement de l’extrême droite – vient d’être effacé de la Constitution française par un vote à l’unanimité de l’Assemblée nationale, en juillet 2018, le voilà qui fait son entrée en force dans les universités, y compris les plus prestigieuses. En juin 2018, la Sorbonne a lancé une série de conférences autour du thème : « Approches phénoménologiques du genre et de la race. Penser les oppressions et les résistances ». En septembre, Paris-Diderot (Paris-VII) a aussi tenu un ambitieux colloque. Trois jours de réflexion avec au menu : « Racisme et discrimination raciale, de l’école à l’université ». Plusieurs enseignants de Paris-VII disent aujourd’hui à « l’Obs », mais toujours sous le sceau de l’anonymat, combien ils ont été heurtés par ce symposium. Bien sûr, expliquent-ils, la problématique de la race, en tant que construction sociale, mérite l’intérêt. Bien sûr, poursuivent-ils, les facultés ont toujours eu pour mission d’animer le débat et la recherche. Mais le Code de l’Education prévoit aussi que l’enseignement supérieur soit « indépendant de toute emprise politique, religieuse ou idéologique ». Et qu’il tende à l' »objectivité du savoir ». Or, à lire la présentation des travaux de Paris-VII, il semble d’emblée posé que l’école et l’université françaises sont par nature « racistes », et produisent automatiquement des discriminations. « C’est donner raison à Bouteldja [la porte-parole des du PIR, NDLR] », affirme l’un de ces enseignants. (…) Elle bénéficie également du soutien de nombreux intellectuels. En juin 2017, après un article du « Monde » consacré au malaise croissant de la gauche face à l' »usage militant des notions comme la ‘race’ ou l »islamophobie' », une vingtaine de personnalités s’indignent dans une tribune et volent au secours de Bouteldja : « Accusations infondées », « calomnies ». Parmi les signataires : l’historienne Ludivigne de Bantigny, la sociologue Christine Delphy, la philosophe Isabelle Stengers, l’écrivain Annie Ernaux, ou l’éditeur Eric Hazan. Les « thèses » professées par Houria Bouteldja ont depuis longtemps franchi les sphères confinées de la radicalité. En voici un florilège. Sur les Blancs : « J’appartiens à ma race. Au-dessus de moi, il y a les profiteurs blancs. […] Mes oppresseurs. » Sur l’homosexualité : « La tarlouze n’est pas tout à fait un homme. Ainsi, l’Arabe qui perd sa puissance virile n’est plus un homme. » Sur les juifs : « Pour le Sud, la Shoah est – si j’ose dire – moins qu’un détail. […] Cette histoire n’est pas la mienne en vérité […]. C’est pourquoi, je vous le dis en vous regardant droit dans les yeux : je n’irai pas à Auschwitz. » Lors des grèves des facs au printemps, on a pu mesurer l’effet de tels discours sur les étudiants. Les murs de plusieurs universités ont été tagués de slogans racistes (« Mort aux Blancs », « Fuck White People », « Assimilation = ethnicide »,  » Si le racisme antiblanc existait, je serais un gros faf ») ou à connotation islamiste (« Femmes, voilez-vous ! », « Allahou akbar »,  » Califat Queer « ). Pendant le même mouvement de grève, lors d’une conférence à Nanterre, deux militants « décoloniaux » ont été jusqu’à soutenir que « la gauche blanche enjoint aux non-Blancs de s’identifier comme homosexuels ». Pourquoi ? » Parce que la majorité blanche du Nord impose sa vision de la sexualité, qu’elle prétend universelle et émancipatrice, à l’intégralité de la population non-blanche du Sud qui ne lui a rien demandé.  » Sus à l' »homoracialisme français », concluaient les deux  » décoloniaux « . A bas l' »impérialisme gay » (l’une des expressions phares d’Houria Bouteldja). Sous la pseudo-spécialisation du langage, des alliances, en apparence contre-nature, se nouent. Entre les Indigènes de la République, les Frères musulmans (lesquels conceptualisent également une racialisation de l’islam) et certains militants d’extrême gauche. Tous unis pour dénoncer un « racisme d’Etat structurel, pensé, organisé et légalisé par des Blancs » et pour instituer les « indigènes » (noirs, arabes ou asiatiques) en « nouveaux damnés de la terre ». Exemple tout récent : le Collectif Rosa-Parks, qui, en octobre, a appelé à faire la « grève de la France » (« On disparaît de nos lieux de travail, de nos facs, de nos écoles ») pour dénoncer la « gestion raciale » des populations et la « ségrégation » érigée en « système ». Au bas de cet appel, les signatures d’Houria Bouteldja du PIR, de Marwan Muhammad du CCIF et d’une dizaine d’universitaires, parmi lesquels les « indigénistes » assumés Nacira Guénif-Souilamas, professeur de sociologie à Paris-VIII, et Françoise Vergès, politologue. De l’avis de tous ceux que nous avons rencontrés au cours de cette enquête, la mouvance « décoloniale » gagne du terrain à l’université. Certains s’en réjouissent, d’autres s’en inquiètent. Le plus souvent en silence. Un professeur est allé jusqu’à nous avouer sa « terreur » face à d’éventuelles représailles d’étudiants. Un autre craint de ne plus « obtenir de crédits » pour ses recherches s’il critique les orientations de son labo. Discours inutilement alarmistes ? Peut-être est-il simplement temps d’ouvrir le débat sur le sujet, sans anathèmes ni fantasmes, et de faire un état des lieux. » Matthieu Aron

Quand l’école sert aussi à faire la guerre …

A l’heure où la Fête de l’huma et nos députés les plus prétendument progressistes déroulent le tapis rouge pour le jeune produit d’une éducation à la haine palestinienne qu’un certain nombre de pays européens se voient aujourd’hui après les Etats-Unis contraints de désavouer …

Et où notre jeune président apporte son extrême onction à un professeur de mathématique qui dans la longue tradition du défaitisme révolutionnaire du « parti des 75 000 fusillés » avait lui aussi pour nos ennemis d’alors porté les valises …

Quand notre Sartre et compagnon de route national appelait à rien de moins que l’assassinat d’Européens

Comment ne pas s’inquiéter avec les sociologues américains Bradley Campbell et Jason Manning …

De l’émergence, dans le véritable ghetto culturel des campus américains, d’une culture de la victimisation qui voit, derrière la défense des minorités et entre déboulonnages de statues et décrochages d’enseignes, le retour de la censure et des purges idéologiques …

Mais aussi, avec la contamination à la société entière – mâles blancs compris, comme en témoigne en partie l’élection d’un Trump – de cette compétition et hiérarchisation victimaires, de l’escalade vers une société toujours plus conflictuelle et divisée …

Et comment ne pas s’alarmer avec les professeures françaises Barbara Lefebvre et Anne-Sophie Nogaret …

Où à la veille d’un colloque à Paris VII réunissant des « chercheurs en indigénisme » ..

Un racisme tout juste chassé par la porte de la Constitution …

Revient par la fenêtre de l’université ?

Comment le racialisme indigéniste gangrène l’Université
Barbara Lefebvre
Le Figaro
07/09/2018

FIGAROVOX/TRIBUNE – Barbara Lefebvre et Anne-Sophie Nogaret s’insurgent contre la tenue d’un colloque à Paris VII réunissant des «chercheurs en indigénisme» et dévoilent la manière avec laquelle le milieu universitaire français est saccagé par l’idéologie antirépublicaine des groupuscules d’extrême-gauche.


Barbara Lefebvre est professeur d’histoire-géographie. Elle est coauteur de Les Territoires perdus de la République (éd. Mille et une nuits, 2002). Anne-Sophie Nogaret est enseignante.


La dévastation intellectuelle conséquente à l’idéologie racialiste est apparue sur les campus américains au tournant des années 1970-1980. Pour notre malheur, elle arrive en Europe toute prête à l’emploi, dans des universités où le vide idéologique et politique a laissé le champ libre au militantisme identitariste des minorités. Un colloque organisé à l’université Paris VII fin septembre viendra encore une fois en administrer la preuve.

Portée outre-Atlantique par l’extrême gauche, puis par des groupes et des individus s’estimant les porte-paroles exclusifs de «minorités» de couleurs, de genres, d’obédiences spirituelles, etc., l’idéologie racialiste mère de ce désastre culturel a été largement décrite, et depuis longtemps, par nombre d’intellectuels américains – hélas trop rarement traduits en français – d’Allan Bloom au milieu des années 1980 jusqu’à l’ouvrage récemment publié par deux sociologues, Bradley Campbell & Jason Manning, The Rise of Victimhood culture (Springer, 2018).

Aux États-Unis est ainsi née l’inversion des modes ségrégatifs. Dans un pays qui vécut longtemps sur un système de discrimination légale, doit-on s’étonner? Les antiracistes-racistes actuels se prétendent héritiers de la lutte pour les droits civiques des années 1960, qui visait en effet à combattre des situations bien réelles et à abolir les lois de ségrégation raciale. Une fois l’égalité des droits acquise fut mise en œuvre la discrimination positive, source d’effets pervers qui ont justifié sa profonde remise en cause, y compris par le président Obama. Mais ce n’était pas assez: il fallait suivre les traces de Malcom X plutôt que la sagesse d’un Luther-King, il fallait que les WASP payent, et sur plusieurs générations. Seuls des «blancs» adeptes de l’autoflagellation pourraient désormais échapper à l’opprobre du racialement-correct. Ils furent légion, ils se comptèrent par millions, jusqu’au point où cette haine de soi apparut pour ce qu’elle était: une pathologie collective suicidaire.

Le concept «d’appropriation culturelle» étant une des gouttes qui a fait déborder le vase de la bêtise du «progressisme racialiste». Des Américains de toutes origines commencèrent alors à reprendre leurs esprits, à sortir la tête de l’eau croupie de l’autodénigrement. Ironie du sort, au même moment, en France, nous plongeons à notre tour dans ce marigot, l’adaptant à notre sauce, réécrivant notre histoire commune à partir de récits mêlant histoire, mémoire et mythologie sur des thèmes obsessionnels tels que l’esclavage, le colonialisme, le génocide, l’homophobie, la misogynie, l’immigration. Il en ressort que la société française – traduire par «blanche», «de souche», «gauloise» etc. – serait intrinsèquement raciste.

Depuis une dizaine d’années, dans les départements universitaires français de Sciences humaines, nombre de chercheurs – inconnus du public éclairé, voire de leurs collègues universitaires renommés – reprennent les grandes théories des «gender studies» ou des «racial studies» élaborées aux États-Unis reprenant le vocabulaire abscons cher aux héritiers de Deleuze, Lacan, Foucault et Derrida, cette «French theory» influente sur les campus des années 1970-80. Certains sont docteurs en sociologie ou en sciences politiques. Beaucoup plus rares, mais plus inquiétants, d’autres sont normaliens. La plupart des fers de lance de cette idéologie sont des étudiants-doctorants qui voient leurs thèses validées par une poignée de professeurs d’université grenouillant dans la mouvance indigéniste. Tout ce petit monde, très sensible au discours des Indigènes de la République et du CCIF, publie des articles dans des revues secondaires voire anonymes et des livres chez des éditeurs militants plutôt qu’universitaires. Mais ce sont les petites rivières qui forment les grands fleuves.

Ils nous expliquent que ce qui compte, ce n’est pas tant le réel que les représentations mentales et sociales, qui à les lire seraient gravées dans le marbre… Commence ainsi la police de la pensée dont toutes les idéologies totalitaires ont porté la marque: on vous assigne à une identité en vous prêtant une pensée (et donc des comportements) induite par votre groupe d’appartenance, supposé ou réel. Vous devenez raciste par vos ascendants, sexiste parce que vous êtes un homme blanc hétérosexuel. Parallèlement, si vos ascendants furent esclaves, colonisés, exterminés ou si vous êtes née femme, vous êtes à jamais victime. Et comme il s’agit de représentations sociales, il convient d’éclairer votre lanterne, car pauvre bougre que vous êtes, vous êtes parfois victime ou bourreau par héritage sans le savoir! Une poignée de maîtres-penseurs, Docteur-es PHD à l’appui, viennent ainsi révéler au grand jour vos tares et vos traumas. Trop d’impensés tueraient-ils la pensée? Par la magie d’un simple logiciel de statistiques, ces soi-disant penseurs «analysent» vos discours et vos textes et produisent un nuage de mots administrant la preuve sémantique de vos obsessions mentales, racistes, sexistes, homophobes, enfin dévoilées.

L’avantage du concept d’«inconscient collectif» ou celui de «construction sociale» est qu’il permet d’attribuer toute pensée déviante à un tiers voire à un groupe social dans son entier. Ainsi les indigénistes recourent-ils systématiquement à l’essentialisation pour stigmatiser les «bourreaux». Essentialisation que, ne craignant pas la contradiction, ils dénoncent tout aussi systématiquement dès qu’il s’agit des «victimes».

Ainsi donc, à l’université Paris 7 aura lieu du 27 au 29 septembre 2018 un colloque intitulé «Racisme et discrimination raciale, de l’école à l’université» et qui rassemblera la crème de ces chercheurs en indigénisme et quelques-uns de leurs serveurs de soupe habituels. L’articulation de la notion de «race», ici subtilement passée par le prisme «discriminatoire», au système scolaire et académique français, de ce fait implicitement défini comme raciste, porte la marque de l’indigénisme.

On l’avait déjà vu clairement exposée lors du stage «Sud Éducation 93» de décembre 2017 intitulé sobrement «Au croisement des oppressions. Où en est-on de l’antiracisme à l’école?». Lequel stage de formation syndicale prévoyait des sessions «décoloniales» interdites aux descendants d’esclavagistes et/ou de colons, autrement dit, interdites aux blancs non musulmans. Certains animateurs de ce stage interviendront au colloque de Paris 7, comme Wiam Berhouma, enseignante d’anglais en collège ou Lissel Quiroz, membre de l’association «le Front de mères».

La thèse dite «décoloniale», initiée et défendue par la mouvance indigéniste, postule l’existence d’un «racisme d’État», d’un racisme «systémique» qui maintiendrait délibérément les populations issues de l’immigration africaine dans un statut d’infériorité. Ce «racisme d’État» viserait du même coup spécifiquement l’islam, religion qui de ce fait se retrouve assimilée à une «race», celle des victimes, des humiliés par excellence. Cette «domination» racialiste serait instaurée par l’institution scolaire dès le plus jeune âge et à tous les niveaux ; les élèves, les étudiants seraient ainsi exposés à des enseignements biaisés visant à les rabaisser, les enseignants véhiculant inconsciemment pour la plupart des représentations sociales héritées de l’époque coloniale. Pour la mouvance décoloniale, l’École de la IIIème République est l’objet de toutes les détestations: odieusement raciste et islamophobe puisque laïque, affreusement colonialiste car elle croyait en un idéal universel d’instruction, la fameuse «mission civilisatrice». Il s’agit toujours chez les indigénistes de porter un regard anachronique sur cette époque passée pour mieux la décalquer sur le présent. L’anachronie, c’est leur fonds de commerce.

En cette fin septembre, trois jours durant, une université parisienne va donc débattre de son propre racisme, confirmant en cela non seulement qu’il existe, mais encore qu’il lui serait quasiment consubstantiel. Au sein même de l’institution académique, distiller la thèse selon laquelle celle-ci serait structurellement raciste constitue une des tactiques répertoriées de l’entrisme indigéniste. Les activistes «décoloniaux», fins stratèges mais peu nombreux en réalité, misent sur le principe d’économie: un investissement minimal (quelques intervenants, dont certains avancent masqués) qui par le truchement des instances universitaires permet de répandre les thèses indigénistes aux jeunes générations, et ce d’autant plus efficacement qu’elles se trouvent estampillées du label universitaire: si l’académie le dit, c’est que c’est vrai… Comme l’écrivait en 1987 Allan Bloom: «les étudiants sont, en général, gentils. C’est à dessein que j’emploie cet adjectif. Ils ne sont pas particulièrement moraux ou nobles. Dans les époques heureuses, la gentillesse est une facette du caractère démocratique».

De la gentillesse à la mollesse jusqu’à l’endoctrinement les yeux grands fermés, il n’y a que quelques degrés que la déculturation de masse produite par notre enseignement secondaire depuis vingt ans aura permis de dépasser. Et parmi ces étudiants seront (sont déjà?) formés nos futurs enseignants, qui à leur tour, apprendront (apprennent?) à leurs élèves à quel point ils sont opprimés par les «blancs», et ainsi de suite.

Un président d’université peut ne pas être au courant du détail des rencontres organisées au sein de la structure qu’il dirige, comme c’était sans doute le cas à Lyon, à Limoges et à Toulouse où de tels colloques ont été annulés ces dernières années après avoir été portés à la connaissance du public par les médias. Tel ne saurait être le cas du colloque «Racisme et discrimination raciale, de l’école à l’université», puisque le 27 septembre prochain Christine Clerici en personne, présidente de l’Université Paris-Diderot, inaugurera les festivités. Seront présents lors de ce discours d’ouverture tous les organisateurs. Parmi ces derniers figurent Fabrice Duhme et Abdellali Hajjat. Sans doute Madame Clerici ignore-t-elle que Fabrice Duhme est sympathisant du Parti des indigènes de la République? Pour mémoire, en 2014, à la date symbolique du 18 juin, il cosignait leur appel à l’abrogation de la circulaire Chatel permettant d’interdire à des parents portant un signe religieux ostentatoire d’accompagner les activités scolaires. Plus récemment, il soutenait le stage organisé par le syndicat Sud-Education 93 précité. Quant à Abdellali Hajjat, maître de conférences à l’Université Paris-Ouest Nanterre, il a co-écrit avec Marouane Mohammed, sociologue s’affichant avec Assa Traoré, un ouvrage intitulé: Islamophobie: Comment les élites françaises fabriquent le «problème musulman».

Madame la présidente de l’université Paris Diderot prononcera-t-elle donc un discours d’ouverture en présence d’organisateurs dont les positions indigénistes et en faveur de l’islam politique ne sont un secret pour personne?

Quant aux intervenants du colloque, on y relève la présence d’un inspecteur général de l’Éducation nationale, Benoit Falaize, qui se garde bien de se présenter sous ce titre dans le programme actuellement disponible, se contentant d’énoncer son statut de «chercheur». L’Inspection Générale Enseignement Primaire est-elle informée de sa participation à ce colloque? De même, Madame Judith Klein de la Direction Générale de l’Enseignement Scolaire, qui dirige la mission «prévention des discriminations et égalité fille-garçon», est-elle annoncée comme intervenante. La sous-direction de la vie scolaire dont dépend Mme Klein approuve-t-elle sa présence à un tel colloque?

Parmi les intervenants, nombre d’étudiants et de doctorants qui sont autant d’illustres inconnus. Quelques noms pourtant attirent l’attention: Hanane Karimi membre de Lallab ou Wiam Berhouma, professeur d’anglais, figure centrale du stage «décolonial» de Sud Education 93 en 2017, dont le haut fait d’arme est d’avoir interpellé avec aggressivité Alain Finkielkraut dans une émission de France 2 en 2016. Coup d’éclat médiatique qui lui a d’ailleurs réussi puisqu’elle fut reçue en février 2017 avec ses classes par Claude Bartolone, alors président de l’Assemblée Nationale. Ella a, en outre, récolté en 2018 plus de 12 000 euros via la cagnotte Ulélé pour que ses élèves «descendants de l’immigration et qui ne se sentent pas ou seulement très peu citoyens» aillent à New York, afin de savoir «comment s’est construite et comment se construit cette citoyenneté aux États-Unis en comparaison avec la France». Il est d’ailleurs courant que les leaders indigénistes mettent de côté leur ressentiment anti blancs et anticapitaliste quand il s’agit de récolter des fonds chez de vieux milliardaires ou de se faire offrir des séminaires de formation aux États-Unis sur la discrimination positive et les class actions… La caution de l’académie via le discours d’ouverture de Madame Clerici ne manquera pas de légitimer de telles ascensions!

Plus parlante encore, la présence parmi les intervenants d’un membre de l’association «le Front de mères», Lissel Quiroz. Association fondée en 2017 par Fatima Ouassak, proche du PIR et passée par Sciences-po Lille, qui entend en faire à terme un syndicat de parents d’élèves. On peut s’interroger sur le profil de ces futurs représentants puisque l’appel du Front de mères commence par une déclaration sans ambiguïté: «L’école, c’est la guerre», avant d’aligner unilatéralement le discours de l’humiliation cher aux indigénistes et aux islamistes: «Parents noirs, arabes et musulmans, parents habitant les quartiers populaires….nos enfants fréquentent des établissements où ils sont stigmatisés et humiliés par certains enseignants, prêts à partir en croisade contre une jupe longue ou un début de barbe suspecte… Nos enfants assistent aux humiliations que nous y subissons, notamment lorsque nous sommes voilées et qu’on nous interdit de les accompagner en sortie… Nos enfants apprennent très tôt la hiérarchisation raciale».

Sans porter atteinte à la liberté d’expression, Christine Clerici, présidente de l’université Paris Diderot, mais aussi Jacques Toubon, le défenseur des droits, doivent-ils accorder par leur présence la caution institutionnelle que cherche la mouvance indigéniste? L’offensive universitaire de ces mouvements constitue un danger réel pour l’enseignement supérieur, plus généralement pour la crédibilité des universités françaises déjà mises à mal dans les classements internationaux. L’université française ne peut pas se permettre la gangrène qui a gagné certains campus américains, qui y a décrédibilisé des départements entiers et a conduit des enseignants réputés à quitter leurs postes. Car, ne nous y trompons pas: les indigénistes, comme les islamistes, suivant les théories de Gramsci, veulent précisément faire imploser l’institution scolaire et académique, qui sont les socles de la société à venir.

Voir aussi:

Appel du « Front de mères » : luttons pour nos enfants !

Parents noirs, arabes et musulmans, parents habitant les quartiers populaires, êtes-vous sereins quand vous confiez vos enfants à l’école le matin ? Êtes-vous rassurés à l’idée qu’ils y passent l’essentiel de leur vie ?

Nous sommes, pour beaucoup d’entre nous, inquiets voire angoissés dès qu’on évoque l’école. Et pour cause !

Nos enfants fréquentent des établissements qui n’ont pas les moyens de fonctionner, avec des taux records de professeurs absents et non remplacés, des taux records de professeurs mal-formés.

Nos enfants fréquentent des établissements où ils sont stigmatisés et humiliés par certains enseignants, prêts à partir en croisade contre une jupe longue ou un début de barbe suspecte.

Nos enfants sont traumatisés par des conflits d’autorité entre leurs parents et l’école, lorsque par exemple leurs parents leur demandent de ne pas manger la viande imposée dans leur assiette, alors que l’institution les incite, voire les oblige à la manger.

Nos enfants apprennent à l’école à ne pas respecter les valeurs que nous essayons de leur transmettre.

Nos enfants nous regardent quand nous sommes sermonnés et infantilisés par les enseignants.

Nos enfants assistent aux humiliations que nous y subissons, notamment lorsque nous sommes voilées et qu’on nous interdit de les accompagner en sortie.

Nos enfants apprennent à l’école à avoir honte de leurs mamans. Nos enfants apprennent très tôt la hiérarchisation raciale.

Nos enfants comprennent très tôt que l’école a un problème avec leurs cheveux quand ils sont crépus, avec leur langue maternelle si elle est africaine, avec leur religion quand c’est l’Islam.

Nos enfants subissent des programmes scolaires où les peuples dont ils sont issus, sont infantilisés, diabolisés ou invisibilisés.

Nos enfants apprennent à l’école à avoir honte de ce qu’ils sont.

Cette manière dont l’école traite nos enfants n’est pas accidentelle. Les discriminations qu’ils subissent ont une fonction : les résigner à occuper les postes les plus précaires, les plus mal payés, aux conditions de travail les plus difficiles.

Si notre enfant rêve d’avoir un jour un « beau métier », valorisé socialement, tout un système d’orientation se met en place, de la maternelle au collège, à travers les appréciations, le système de notations et les préjugés, pour l’en dissuader, et l’amener, étape par étape, vers des filières conduisant à des métiers à très faible valeur sociale.

Nos enfants sont éduqués à l’école de manière à ce qu’ils deviennent plus tard une main d’oeuvre malléable et bon marché, sans se plaindre. Mais ils sont aussi éduqués de manière à ce que même lorsque, exceptionnellement, ils font de brillantes études, et qu’ils occupent des postes à responsabilité, ils restent à leur place, ils font allégeance, et ils courbent l’échine.

La manière dont l’école nous traite, nous parents, n’est pas accidentelle non plus.

Nos familles, le lien que nous avons à nos enfants, la transmission que nous leur devons, nos racines, nos langues, et nos religions, sont des ressources pour nos enfants. Tout est fait pour casser cette famille-ressource qui permettrait à nos enfants de mieux résister. Isoler pour mieux écraser.

Comment empêcher que nos enfants soient ainsi brisés par l’école?

Pour sauver nos enfants, nous ne pouvons pas nous contenter de stratégies individuelles !

Car avec ces stratégies individuelles, notre enfant sera amené à courber l’échine toute sa vie durant, et ce ne sera jamais suffisant.

Qu’elle soit caissière ou ministre, téléconseillère ou avocate, notre fille subira le racisme.

Qu’il soit chômeur ou chirurgien, livreur ou ingénieur, notre fils subira le racisme.

A quoi sert d’élever notre fille comme une reine, si la société dans laquelle elle grandit considère les personnes qui lui ressemblent comme des êtres inférieurs?

En réalité, soit nous, parents noirs, arabes et musulmans gagnons ensemble. Soit nous perdons ensemble, et aucun de nos enfants ne sera épargné, y compris les quelques-uns qui auront atteint les classes moyennes et supérieures, car qui peut prétendre qu’on peut être heureux en étant honteux et aliéné?

Évidemment, nous voulons que nos enfants réussissent à l’école, y aient de bons résultats et s’y épanouissent.

Mais nous devons refuser de choisir entre réussite scolaire et dignité.

Nous devons le refuser pour nos enfants, parce que nous les aimons et que nous voulons ce qu’il y a de mieux pour eux, réussir et s’aimer soi-même, réussir et aimer les siens, réussir et avoir confiance en soi, réussir et rester digne.

Parce que nous aimons nos enfants,

Parce que nous voulons mettre hors d’état de nuire le système raciste qui les détruit,

Parce que nous voulons leur transmettre tout ce qui pourra les rendre plus forts, à commencer par notre dignité,

Parce que nous voulons les éduquer à travers des valeurs d’égalité, de justice et de bienveillance,

Parce que nous savons que sans lutte politique et collective, ce combat-là est vain,

Nous avons créé le Front de Mères. Et nous lançons les Etats Généraux des Familles qui auront lieu fin mai 2017, à Paris, pour réfléchir et travailler ensemble à un plan d’actions concrètes. Collectifs locaux de parents, rejoignez-nous pour organiser ces Etats Généraux, contactez-nous.

LE FRONT DE MÈRES
Coordinatrices : Fatima Ouassak (Politologue, auteur du livre « Discriminations Classe/Genre/Race », Ifar, 2015) et Diariatou Kebe (Blogueuse et auteure du livre « Maman noire et invisible », aux éditions La Boîte à Pandore (2015). Contact : front2meres gmail.com

Agenda : « Les États Généraux des Familles : l’urgence de construire des stratégies collectives en matière d’éducation et de transmission », le 24 mai 2017 (Horaires : 9h – 18h) – Lieu : La Parole Errante 9, rue François Debergue – 93100 Montreuil

Voir également:

The War on Dignity

Claire Lehmann reviews Bradley Campbell’s and Jason Manning’s « The Rise of Victimhood Culture »

In 2011, a group of University of Wyoming students created a Facebook group called “UW Crushes,” where they shared anonymous declarations of attraction to one another. The police were called to investigate when one anonymous poster wrote: “I want to hatef–k Meg Lanker Simons so hard That chick runs her liberal mouth all the time and doesn’t care who knows it. I think its [sic] hot and it makes me angry. One night with me and shes [sic] gonna be a good Republican bitch.” Students who were members of the group asked the group’s administrators to remove the post. But Lanker Simons objected: “Actually, I want this to stay up. This is disgusting, misogynistic, and apparently something the admins of this page think is a perfectly acceptable sentiment.” She continued: “Even if it is taken down, I’m left to wonder if there’s someone out there with a violent fantasy about me—and likely other women.” Police later determined that the post was a hoax and that the threat had been written by Meg Lanker Simons herself. Before the police arrived at this conclusion, a rally against “rape culture” had been held at the university.

The Rise of Victimhood Culture makes the case that incentives at the modern American university have created a new moral culture, one where victimhood is granted a special moral status. Awarding status to victims has in turn led to hoaxes, false accusations, and, in some extreme cases, moral panics. The diagnosis is put forward by sociologists Bradley Campbell and Jason Manning, and they make their case convincingly. The argument is that college campus is ground zero for this new culture, but its rules of conduct are starting to leak into mainstream institutions.

Campbell and Manning did not start their careers investigating microaggressions and trigger warnings. Campbell had been studying the sociology of genocide at California State University, and Manning had been studying suicide at West Virginia University. They came together to consider the questions of how groups manage conflict and how grievances are handled in different cultural contexts. In The Rise of Victimhood Culture, Campbell and Manning describe the three main moral cultures that exist today: “dignity,” “honor,” and “victimhood,” and the various behaviors associated with each.

A dignity culture, they explain, has a set of moral values and behavioral norms designed to promote the idea that each human life possesses immutable worth. If an individual has been brutalized or exists at the bottom of a social pecking order, she still has human worth. In a dignity culture, children are encouraged to try their best and are taught aphorisms such as “sticks and stones make break my bones, but words will never hurt me.”

By contrast, in an honor culture, being on the bottom of a social pecking order is associated with great shame. Victims are tainted and often punished for bringing dishonor to their families. In some extreme circumstances, they may even be killed.

A victimhood culture departs from both by inverting their norms. On a university campus, for example, victims are not shamed but are instead fiercely protected, and now awarded status. This dynamic could be observed as early as 2015, in the reception to Emma Sulkowicz’s protest against a sexual assault she alleged had taken place. It consisted of her carrying her mattress around the Columbia University campus, including to class, under the condition that her accused rapist needed to be expelled in order for her to stop. For this performance, she was widely criticized, but she was also heralded as a feminist hero. The New York Times art critic Roberta Smith called it “succinct and powerful” and added that Sulkowicz has “set a very high standard for any future work she’ll do as an artist.” Although Columbia University and the New York Police Department failed to establish any wrongdoing on the part of the student Sulkowicz had accused, for art critics such as Smith, the accused student’s guilt was a fait accompli. That such awards and accolades might incentivize vexatious or false complaints in a student body seemed not to matter to adults in charge.

In the most disquieting chapter, Campell and Manning predict that victimhood culture will eventually spread from elite colleges into the mainstream. In making this prediction, they note the significance of the fact that victimhood culture has emerged among the wealthiest schools in America. Oberlin and Brown, for example, have led the microaggression movement, while Claremont has been a pioneer in safe-space demands, microaggression protests, and the banning of speakers. They point out that the median family income at Middlebury College—where Charles Murray was shouted down and where his sponsoring professor, Alison Stranger, was given whiplash injuries in a parking lot—was $240,000 per year. That income level is double that of Saint Louis University, where Murray spoke to an attentive audience. The book thus highlights a peculiar fact: The students most obsessed with their own oppression are some of the most pampered individuals in the world.

Unlike victimhood culture, dignity culture did not arise from pampered pupils at American schools and universities. It did not even originate with the upper classes. Campbell and Manning explain that it was first established in the class of yeoman farmers, master craftsmen, and artisans of Northern Europe. Since its members had goods to sell, they had a lot to gain from general tolerance of the foibles of others and a lot to lose from engaging in reckless violence. While the nobility continued to duel with swords, Europe’s growing middle classes developed cultures of commercial interdependence. When institutions such as courts matured and the authority of nobles was weakened, the upper classes adopted dignity culture as well. So while dignity spread upwards from the middle classes to the social elite, Campbell and Manning warn, victimhood culture will likely spread downwards from the social elites to the middle classes—as those wishing to be upwardly mobile will try to emulate upper-class moral norms.

While the culture is likely to spread downwards, it is also likely to inspire resentment. Campbell and Manning warn that the narratives of privilege deployed by the culture, which target white men in particular, are just as likely to inspire hostility as deference, especially in those who feel that they are unfairly targeted as oppressors:

If whites and males increasingly face a moral world divided between those who vilify them and those who glorify them, we should not be surprised if many find the latter more appealing than the former.… Here again, the backlash against victimhood may not necessarily advance the ideals of dignity, such as the moral equality of all people. Victimhood culture deviates from this moral equality by producing a moral hierarchy with white males at the bottom; the reaction it provokes may be the resurgence of a moral hierarchy that places them at the top.

Paradoxically, the backlash against political correctness is likely to make the situation worse. Conservatives are quickly learning to ape victimhood, too. The authors note that professional provocateur Milo Yiannopolous “thrives on causing offense and controversy,” neither of which promotes a culture of dignity.

When Kevin Williamson was fired from the Atlantic, Erick Erickson tweeted, “Kevin Williamson’s firing is a reminder that there are two Americas and one side will stop at nothing to silence the other.” Kurt Schlichter took it up another notch:

Never Trump, the public humiliation of Kevin Williamson demonstrates the indisputable fact…

You can side with the left and hope to be allowed to exist like a domesticates [sic] lap dog like David Brooks or Bret Stephens…

Or you can accept this is an existential fight and join us.

The logic of victimhood culture, then, is escalating grievance and retaliatory aggression. When slights cannot be neutralized with a dignified turn of the cheek, the prognosis looks grim.

What the purveyors of victimhood culture do not seem to grasp is that in weakening dignity, and in undermining the principles that deem all men and women to be moral equals, they unwittingly destroy the safeguards that prevent bad actors—such as hoaxers and narcissists—from climbing the social hierarchy through dishonesty and manipulation. In incentivizing weakness and reliance on third parties to intervene in disputes, students invite a paternalistic authoritarian apparatus to develop. While they seem comfortable with an authoritarian apparatus on their university campus today, we should not be surprised if they demand an authoritarian state to police the citizenry tomorrow. The logical endpoint of a victimhood culture will not be a progressive utopia. On the contrary: The further this culture radiates outward, the more likely it will make victims of us all.

Understanding Victimhood Culture: An Interview with Bradley Campbell and Jason Manning

Quillette
May 17, 2018

Bradley Campbell, Associate Professor of Sociology at California State University, and Jason Manning, Associate Professor of Sociology at West Virginia University, have been described as “prophets of the academic world” by psychologist Jonathan Haidt, and their new collaborative work The Rise of Victimhood Culture: Microaggressions, Safe Spaces, and the New Culture Wars, “a book of revelations,” by the sociologist Donald Black. The two sociologists have aimed to supply us with an empirical sociological analysis of the recent moral conflicts that have erupted on U.S. college campuses—and the extent to which these conflicts are spreading outwards into mainstream society.

After reading the book, I reached out to the American sociologists to interview them about some of the key themes of their book, and also to gain insight into some recent cultural trends that were not covered.  What follows is a transcript of our interview conducted via email.

I. Three Moral Cultures

Claire Lehmann: Just briefly for our readers who have not read your book, can you explain the main differences between the dignity, honor and victimhood cultures which you outline in your thesis?

Bradley Campbell and Jason Manning: The three moral cultures are different clusters of traits having to do with what people find offensive and how they handle their grievances.

In dignity cultures, there is a low sensitivity to slight. People are more tolerant of insult and disagreement. Children might be taught some variant of “Sticks and stones can break my bones, but words can never hurt me.” It’s good to have “thick skin,” and people might be criticized for being too touchy and overreacting to slights. If the issue in the conflict is something more than a slight or insult — say, a violent assault — you’re to handle the matter through appeal to authorities such as the legal system. Taking the law into your own hands with violent vengeance is itself a serious crime and generally looked down upon.

In honor cultures, there’s a much greater sensitivity to slight. Insults demand a serious response, and even accidental slights might provoke severe conflict. Having a low tolerance for offense is more likely to be seen as a virtue than a vice. Letting yourself be slighted without seeking justice is shameful. And seeking justice is more likely to take the form of violent vengeance. Appealing to authorities is more stigmatized than taking matters into your own hands.

These two kinds of cultures emphasize different sources of moral status or worth. Honor is one’s status in the eyes of other people. It depends on reputation. And while a lot of things might go into making this reputation, the core of classical honor is physical bravery. Tolerating slights is shameful because you let someone put you down without defending your reputation by force. It suggests cowardice. Appealing to the authorities is shameful for the same reason. Virtue means being bold and forceful, aggressively defending your reputation against any challenges, and being vigilant for signs that someone else is probing you for weakness.

Dignity is a kind of inherent and inalienable moral worth. It doesn’t depend on your standing in the eyes of other people. A dignity culture emphasizes that all people have this sort of worth, which can’t be taken away. It’s why an insult can’t devalue you. If anything, overreacting to an offense is unseemly because it suggests you’re not confident in your worth and need to take other people’s opinions so seriously. Virtue isn’t being bold, touchy, and aggressive, but restrained, prudent, and quietly self-assured.

What we call victimhood culture combines some aspects of honor and dignity. People in a victimhood culture are like the honorable in having a high sensitivity to slight. They’re quite touchy, and always vigilant for offenses. Insults are serious business, and even unintentional slights might provoke a severe conflict. But, as in a dignity culture, people generally eschew violent vengeance in favor of relying on some authority figure or other third party. They complain to the law, to the human resources department at their corporation, to the administration at their university, or — possibly as a strategy of getting attention from one of the former — to the public at large.

The combination of high sensitivity with dependence on others encourages people to emphasize or exaggerate the severity of offenses. There’s a corresponding tendency to emphasize one’s degree of victimization, one’s vulnerability to harm, and one’s need for assistance and protection. People who air grievances are likely to appeal to such concepts as disadvantage, marginality, or trauma, while casting the conflict as a matter of oppression.

The result is that this culture also emphasizes a particular source of moral worth: victimhood. Victim identities are deserving of special care and deference. Contrariwise, the privileged are morally suspect if not deserving of outright contempt. Privilege is to victimhood as cowardice is to honor.

We can see examples of honor cultures around the world and throughout history. They tend to have relatively high rates of violence, including such distinctive forms as dueling and feuding. Much of the premodern West can be understood as an honor culture. European elites used to preserve their honor by fighting duels to the death; in the US South, fatal duels continued up until the American Civil War.

By the 20th century, though, dignity culture had largely supplanted honor culture in the West. Writing in 1970, sociologist Peter Berger called the concept of honor obsolete, saying it had little resonance with modern people. People no longer lived in mortal fear of having their honor damaged. Questioning someone’s honor would result in a quizzical look rather than outrage. And duels to the death were a strange curiosity of the past.

We argue that victimhood culture, at least in its more extreme forms, is new. We see it in its purest form on contemporary college and university campuses. Manifestations of victimhood culture include complaining about and punishing microaggressions, demanding and creating safe spaces, requesting and requiring trigger warnings, and banning or disinviting speakers who might offend designated victim groups.

II. Moral Hierarchy 

CL: In The Rise of Victimhood Culture, you mention that this new morality imposes a moral hierarchy, with white people being at the bottom and oppressed or marginalised people (victims) being at the top. Can you elaborate on what you mean by a ‘moral hierarchy’?

BC & JM: Making moral judgments elevates the reputation of some people and lowers the reputation of others, so morality is always a source of a kind of social status that we can think of broadly as respectability. Other kinds of status have other sources, so in any complex society not only are some people more respectable than others, but some are also wealthier, more socially integrated, or more culturally conventional. Your position on these and other social hierarchies affects how people treat you. If you testify in court, for example, people are more likely to believe you if you are wealthy, respectable, and so on. And if you’re the victim of a crime, it’s more likely the offender will be brought to justice.

So respectability — moral status — acts like other kinds of status. And since moral judgments give rise to it, it takes different forms depending on the moral culture. Whether it’s important to have a reputation for kindness, chastity, obedience, courage, wisdom, generosity, self-control, or anything else depends on what people value. One culture might see obedience and self-control as key virtues, while another might see them as vices if they mean less individuality and authenticity. Even when different cultures agree on what’s virtuous they might emphasize some virtues over others. This is what happens in an honor culture. Courage, and one aspect of it in particular — physical bravery — is elevated over other virtues. It’s not that people in other cultures don’t value bravery, or that people in honor cultures don’t value anything else, but the emphasis on bravery and toughness in honor cultures leads to a morality that outsiders often find bewildering and immoral.

It also leads to a moral hierarchy with brave, strong, and violent men at the top and the cowardly and the weak at the bottom. Honor is one type of moral status, one revolving around a particular virtue. It arises under particular social conditions such as the absence of a government monopoly on violence, so we certainly understand why honor cultures exist and the logic of their moral system. But we agree with the critics of honor cultures throughout history who have objected to the conflict and violence those cultures produce. We also object to the moral hierarchy of those cultures. Emphasizing one virtue over many others leads to perversities: Cruel men and hotheads can end up being esteemed while peacemakers are denigrated.

The moral hierarchy of victimhood culture has some of the same problems, and it introduces others. Like honor cultures, victimhood cultures emphasize one set of vices and virtues over others. They are concerned with eradicating oppression and privilege, and this single-minded moral obsession can lead to the similar kinds of perversities that come from neglecting other virtues in honor cultures. But even in an honor culture your moral status usually has to do with your own behavior rather than someone else’s. In a victimhood culture it’s instead your identity as a victim that gives you status. It’s not your own virtue at all, but someone else’s treatment of you, that makes you virtuous.

One problem with this is that you end up with a system of morality that doesn’t offer much incentive for good behavior. Honor cultures incentivize bravery while neglecting other virtues. But if you want esteem in a victimhood culture, what can you do? It’s not like you can become a victim. Or actually, you can — you can portray yourself as weak and in need of help, you can portray others’ behavior toward you as harmful and oppressive, and you can even lie about being the victim of violence and other offenses. Victimhood culture incentivizes bad behavior.

The extreme form of victimhood culture we see among activists on college campuses leads to another problem in that one’s status as a victim comes not just from individual experiences of victimhood but also from one’s identity as part of a victim group. The idea is that all members of certain groups are victims, but that no one else is. Activists even argue that whites cannot be the victims of racism, or men the victims of sexism. Likewise, whether people can be victims of new offenses like cultural appropriation or microaggression, depends on their identity. A white person wearing a hairstyle associated with African Americans would be cultural appropriation, for instance, but an African American wearing a hairstyle associated with whites would not be. Likewise, those who have pioneered the concept of microaggression have made it clear that not all slights count. A white male elementary school teacher may experience stereotypes and put-downs, for example, but to call those microaggressions would be a “misapplication of the concept.”

So the moral hierarchy of victimhood culture places entire groups of people at the top or bottom based on the whole group’s victimhood status. And while it’s not always clear which groups qualify, Jonathan Haidt identifies seven groups that are currently treated as sacred: people of colour, women, LGBTs, Latinos, Native Americans, people with disabilities, and Muslims. Under this schema even many minority groups, such as Evangelical Christians, fail to qualify, and any discrimination against them is ignored or celebrated.

We have two problems with this. The first is a fundamental moral objection. We believe in the ideals of dignity culture — that all human beings have an inherent worth and should be treated accordingly — and we object to the new hierarchy of victimhood just as we would any racial and ethnic hierarchy. The second problem is the reactions it may produce. Whites, men, and others who do not have victimhood status are unlikely to accept a new morality and a new moral hierarchy in which they’re at the bottom. And they may end up embracing one in which they’re at the top. We find the recent prominence of alt-right white nationalists alarming, and we worry there will be more of it in reaction to the spread of victimhood culture. It’s a dangerous thing to undermine dignity culture and its ideals of equality.

III. #MeToo Movement

CL: You wrote your book before the explosion of the #MeToo movement. From your perspective, and your knowledge about the spread of moral cultures, do you believe that the #MeToo movement represents a significant shift in victimhood culture into the mainstream?

When we look at the full-blown victimhood culture among campus activists, the moral logic at work is starkly different than what we see in other contexts. But the lines between different moral cultures aren’t always so clear. The degree to which victimhood is a kind of status is variable, so even where dignity culture is still dominant, we might see some tendencies toward victimhood culture.

In the book we talk about the movement against campus rape, and we point out that the movement has support from journalists, members of Congress, and others who are not part of the campus victimhood culture. And rape isn’t a new offense like microaggression or cultural appropriation. It’s also not a minor offense. So the movement as such isn’t a pure manifestation of victimhood culture. But what we do see is that an effort to honor victims leads to credulity even in cases like the rape hoaxes at Duke and at the University of Virginia where it should have been clear that the accusers were lying. It also leads to efforts to weaken the due process rights of the accused. And alongside the more mainstream elements of the movement are the campus activists and others enmeshed in victimhood culture who make more radical arguments — that accusers should always be believed, for example. But so far such ideas haven’t been widely adopted.

The #MeToo movement may be similar. To some extent it may have facilitated the mainstreaming of victimhood culture, but it’s also a mainstream enough movement that efforts to radicalize it and to use the moral language and logic of campus activists seem mostly to have failed. The movement as a whole appears not to have relied on accusations of new victimhood offenses and has focused instead on things like rape, groping, and other kinds of sexual assault and sexual harassment. The accusations against Harvey Weinstein and against most of the other prominent targets of the #MeToo movement haven’t been about microaggressions and haven’t relied on creative ideological expansions of the concepts of assault and harassment. The accusations against Weinstein, for example, include 19 coerced sexual acts and many more instances of unwanted touching and sexual exhibitionism.

Much of the #MeToo movement might be seen as an expression of dignity culture — an appeal to ideals already widely held in the culture but commonly violated in practice. Women demanding that they not be bullied, groped, fondled, demeaned, assaulted, or harassed by men the workplace, and that the men abusing their power in this way face consequences, aren’t relying on radical feminism or its notions of endemic patriarchal oppression — not usually, anyway. They seem to be trying to bring to light behavior that was already considered wrong but that many people weren’t aware was going on.

But the #MeToo movement is large and has less mainstream elements as well, so some of the accusations have indeed drawn from victimhood culture in various ways. We might think of the most prominent accusations existing on a continuum from Harvey Weinstein to comedian Aziz Ansari. In January 2018 the online magazine Babe published an article by Katie Way about an anonymous woman’s date with Ansari. The article, “I Went on a Date with Aziz Ansari. It Turned into the Worst Night of My Life,” recounts in detail a date between “Grace” and Ansari. Ansari doesn’t come off as particularly gentlemanly in the account, but it’s clear that the story is not about rape, it’s not about sexual assault, and it’s not even about sexual harassment. After going to dinner, the two went to Ansari’s apartment, engaged in sexual acts with one another, and according to Grace, Ansari then kept wanting to engage in intercourse, she didn’t, and she eventually went home. Later in a text message she told Ansari that he had ignored “clear non-verbal cues” and said that he had to have noticed she was uncomfortable.

The accusations against Weinstein, which deal with clear-cut cases of violence, coercion, and harassment, are understandable in terms of mainstream morality, while the accusation against Ansari is understandable only in terms of victimhood culture.

The same perspective that leads to the labeling of uncomfortable conversations as a kind of aggression, or conservative political speech as violence, leads here to the labeling of boorish behavior on a date as sexual assault. To the extent that the #MeToo movement accords a special status to victims, to the extent that it establishes victimhood solely based on whether someone is a woman or man, and to the extent that it blurs the distinction between serious offenses like what Weinstein has been accused of and the kind of noncoercive sexual advances on a date that Ansari is accused of, it will indeed lead to the spread of victimhood culture.

Another thing the Ansari case illustrates is something we have thought of as moral emaciation. Victimhood culture’s focus on oppression narrows the range of moral discourse, and activists seem to be losing the capacity to make moral judgments based on anything other than victimhood terms. It seems that anything activists find bad they define as harmful and oppressive, whether it’s an ugly statue on campus or a bad date. As Mona Charen points out, isn’t what Grace wanted — affection, kindness, attention — what many people want when they go on a date? “What does it say about dating in our time,” she asks, “that those are unrealistic expectations?”

The problem is that Grace has no moral language to communicate this. She can’t describe Ansari’s behavior as caddish, lascivious, or any of the other old-fashioned terms that would more accurately capture her moral reaction. Instead, it has to be oppression, assault. This is probably not good for the #MeToo movement, and it may shift attention away from the kinds of offenses the movement was supposed to call attention to. It also doesn’t help anyone to think better about how people should behave on dates. Moral emaciation leads to moral confusion.

IV. Cultural Appropriation

CL: Do you see the many complaints made today about ‘cultural appropriation’ as being a part of victimhood culture? Cultural appropriation seems to be one aspect of the new morality that most people find baffling. But can it be understood as a culture imbuing certain cultural objects or practices with moral status, that cannot (or should not) be accessed by people who are lower down in the moral hierarchy? Is cultural appropriation in some way similar to a form of moral pollution?

BC & JM: Complaints of cultural appropriation illustrate victimhood culture quite well. As with microaggression complaints, it’s a grievance about a nonviolent, probably unintentional slight that many observers wouldn’t even see as offensive. As with microaggressions, the offense is framed as a matter of collective oppression, of one social group harming another. And in practice, it’s usually an offense defined by identity, something only people in designated privileged groups can be guilty of.

Victimhood culture’s high sensitivity to slight means it continually coins new types of offense. And this is certainly one of the most baffling of the new offenses. As we’ve discussed elsewhere, one particularly confusing aspect is that many of the things that get called cultural appropriation were, until very recently, virtues — signs that one was cosmopolitan and open-minded. If anything, we might expect social and cultural conservatives to be the ones most upset about Westerners practicing yoga or mindfulness meditation, or white kids adopting black fashions and hairstyles. In many cases they are, but these days so-called progressives are often vocal and visible critics.

Your suggestion about moral hierarchy is on point. Though the complaint is framed as a matter of someone dominating or exploiting the vulnerable — in a victimhood culture, virtually all complaints are — it might be more helpful to understand it as a matter of the offenders aping their betters. As sociologist Donald Black discusses in his book Moral Time, various societies throughout history have had rules — sumptuary laws — preventing people from adopting the styles, entertainments, and recreations of their social betters. The Han and Ming dynasties forbade commoners from wearing certain colors of clothing. Premodern Japan had laws forbidding peasants from wearing clothing distinctive of townspeople. In medieval England a law stated that no one under the rank of knight should wear any fur clothing (later amended to allow them to wear distinctive kinds of fur). And no one below the rank of lord was allowed to wear the period’s fashionable pointy shoes. The unwritten norms regarding cultural appropriation seem analogous to these sorts of restrictions.

As you suggest, thinking of it as a kind of moral pollution also might help us put it into a larger sociological context. As sociologist Murray Milner argued in his work on the Indian caste system, sacredness is but a special form of status. It corresponds to what we call moral status in our book, though like honor it might be a particular style of moral status. The sacred is that which is treated as special and worthy of reverence. It must be set apart from the profane, protected by rituals associated with cleanliness and purity. One might immediately think of Mosaic Law, but if we understand it abstractly we can see these sorts of purity rules everywhere, including regarding secular things like national flags and anthems. What is going on when a white Westerner practices yoga or paints in an indigenous style or quotes a lyric from a Beyoncé song? Perhaps it’s like having the unclean enter the temple and put on the vestments. The culture of vibrant, good, brave, people is being polluted by those who carry the moral stain of privilege.

It also seems like there’s also a theme of moral pollution in some of the discourse surrounding “whiteness.” Sometimes the manner in which it’s discussed makes it seem like a curse, or something that spreads and infects places and things as well as people. Hence we see pieces where people complain about the prevalence of whiteness in LGBT spaces, or Taylor Swift exuding whiteness, or, to give a case we mention in our book, people accusing others of asking white questions and employing white research methods.

Conservatives and Victimhood Culture

CL: It was really interesting to read about how conservatives (particularly those who are very flamboyant or attention seeking) have learned to use victimhood culture, or exploit victimhood culture for their own selfish benefit. You argued that this might, in fact, lead to an increased uptake of victimhood culture morality in the mainstream culture. Would you be able to elaborate on this point for our readers?

BC & JM: Victimhood culture is mainly a leftwing phenomenon, but it has a way of spreading. Conservatives and others who find themselves opposed to campus activists might uphold the values of the dignity culture the activists reject, but sometimes they end up departing from it themselves. One way they might do this is by embracing whatever victimhood culture opposes. This can mean being deliberately provocative and offensive in order to get a rise out of the activists, or at the extreme, it can mean embracing alt-right ideologies that reject equality and diversity. But another way conservatives might depart from dignity culture is by embracing the assumptions of victimhood culture and pointing to their own victimhood.

In our first article on victimhood culture in 2014, we pointed to the case of Tal Fortgang, a Princeton student who wrote an article about checking his privilege, as campus activists had been urging that he and others do. The idea was that when he checked his privilege he found in his background a long history of hardship and persecution, including family members who had been persecuted and murdered in the Holocaust.

Now in one sense, that’s perfectly reasonable. It points to the absurdities of the victimhood framework. The grandson of Holocaust survivors might legitimately wonder why he should have the burden of being labeled privileged while others at his elite university gain sympathy and status by labeling themselves victims. We ourselves sometimes wonder why in an academic environment where people constantly talk about disadvantage, inclusivity, diversity, and the like, our working class, small town, Southern backgrounds gain us no victimhood points. So the idea might be, if you’re going to denigrate the privileged and valorize the victimized, at least be more accurate — don’t base it all on skin color, sex, and a few other such traits.

But this easily leads to competitive victimhood, where moral disputes become contests over who can claim the most disadvantage. Conservatives at colleges and universities might be especially prone to embracing victimhood since they can actually make very plausible claims of being one of the most victimized groups on campus. Conservatives are vastly underrepresented among the faculty, especially in the social sciences. Far more sociologists identify as Marxists than as conservatives, for example, and a survey of sociology professors found that nearly 30% of them acknowledged they would be less likely to support a job candidate who was a Republican. Conservatives on campus are also subject to what the activists would call microaggressions or worse if directed toward recognized victim groups. Many of them remain closeted.

The claims of victimhood are understandable, then, but if conservatives end up adopting their adversaries’ assumptions about what constitutes victimhood and what the response to victimhood should be, they’ll become just another force undermining dignity culture. And we’re seeing some of that. For example, National Review published an article by Frederick Hess with the title “When College Presidents Mistake Lib-splaining for Conservative Outreach.” Lib-splaining is presumably like mansplaining, whitesplaining, and other new victimhood culture offenses, and here it refers to a college president encouraging a group of campus conservatives to read more serious conservative works and meeting with them to discuss one of them. As with the other “splaining” offenses, the notion seems to be that any attempt to discuss or explain something coming from an outsider can be offensive.

We also see claims of victimhood becoming a key part of the campus conservative message. Conservatives should definitely complain about the suppression of free speech on campus. But sometimes this takes the form of engaging in intentionally offensive speech in order to get a reaction from the left that then becomes the basis of further complaints. This actually combines both of the dignity-rejecting strategies — the embrace of offensiveness and the embrace of victimhood. Conservative groups that have brought in the provocateur Milo Yiannopoulos, for example, seem more interested in stirring up controversy and angering the left than in advancing conservative ideas.

They should have the right to do so, of course, and even when groups have brought in conservative intellectuals campus activists have sometimes reacted in the same way. Still, bringing in someone like Yiannopoulos hardly advances the ideals of dignity. As conservative UCLA professor Gabriel Rossman wrote to the Bruin Republicans recently after they scheduled a talk by Yiannopoulos on “10 Things I Hate about Mexico,” “if your mission is to spread conservative ideas, you should recognize that hosting Yiannopoulos will only render your organization and our ideas toxic.” In that case the group ended up canceling the talk, but the temptation to court controversy through popular, attention-grabbing speakers can be powerful.

Another way that conservatives and other opponents of victimhood culture may end up adopting its assumptions, perhaps unwittingly, is by valorizing the victims of victimhood culture.  Consider the recent case of Lindsay Shepherd, a graduate student and teaching assistant at Wilfred Laurier University who was certainly treated badly by the faculty and administration there. In a communications class, Shepherd showed a short clip of a debate on the use of gender pronouns and was called to a meeting with two professors and an administrator, who berated her and told her that showing the debate was transphobic and possibly a violation of Canada’s anti-bias laws. When Shepherd released a recording of the meeting, there was an outpouring of support for her from those concerned about free speech and academic freedom, and the university ended up apologizing.

In the aftermath of all of that, though, Shepherd has become a kind of celebrity among opponents of victimhood culture, with regular speaking engagements and honors, including the Outstanding Student Award from Heterodox Academy and a prominent speaking spot at their upcoming meeting. While Shepherd behaved well in the initial conflict with her superiors, her prominence seems to come almost entirely from her status as a victim-of-victimhood culture rather than from any insights of her own. Her views have been consistently supportive of free speech but otherwise mostly inchoate and rapidly shifting. Initially describing herself as on the left, for example, she released a video recently announcing that she no longer identified this way, citing the left’s blurring of the distinction between white nationalists and white supremacists as one of the main reasons for the change. As Genevieve Weynerowski commented, “This granular sidebar made her centrist bona fides a little hard to swallow.” Shepherd also cited the reaction to her campus group hosting a talk on campus by Faith Goldy, an alt-right activist who once gleefully recited a white nationalist slogan and was fired by the right-wing Rebel Media after appearing on a neo-Nazi podcast. Shepherd is both an opponent and victim of campus victimhood culture, but she isn’t necessarily an advocate of dignity culture and seems increasingly to be employing the strategies of deliberate offense and an embrace of victimhood herself. For many opponents of victimhood culture, though, her status as a victim gives her a kind of moral authority and perhaps even immunity from criticism.

Preserving Dignity Culture

CL: I really liked the way you offered insight and not just condemnation of victimhood culture. How do you remain so detached from your subject without becoming judgemental? 

And finally, what are some simple ways (for those who don’t want to live in a victimhood culture) to preserve dignity culture?  

We both have somewhat analytical thinking styles. And from our early training, we’ve both approached sociology out of scientific interest in patterns of behavior. We each got into studying conflict and social control because that seemed where the action was, scientifically speaking. We were drawn to Donald Black’s theoretical work, which used simple principles to describe and explain social behavior.

In our book we talk about the politicization of sociology. The field has long tended to attract people with axes to grind — mostly liberal or progressive ones, occasionally conservative ones. Even if they take scientific methodology seriously — and many still do — their topics and questions are driven by what they feel passionate about for practical or political reasons. Hence the common pattern of people studying their own gender, race, ethnicity, or else writing about the topic they were doing activism on before deciding to go to graduate school.

That’s not been our bag. Our previous research topics — genocide and suicide — weren’t chosen because we were particularly involved with them outside of sociology. They just seemed like strange phenomena, and topics we could tackle given using the approach we’d learned from Black.

Victimhood culture does hit closer to home for us. Its epicenter is the university, and it has a lot of traction in the social sciences. As academic sociologists, we definitely have practical worries about what the future holds. Even with this topic, though, our initial forays into it were more of a “Hey, this is weird” than “Man the barricades!

Throughout the process of writing the book we were simply more interested in describing and analyzing than merely complaining. Complaint is boring. Analysis is interesting, especially if one is making cross-cultural comparisons and searching for the general principles behind it all. There’s a reason so many of our chapters start with examples from the days of dueling aristocrats. In comparative context, all human behavior is bizarre and fascinating.

We are social scientists, but of course, we are not only social scientists. We have political views and strong moral commitments. Our book considers several consequences of victimhood culture that we, and probably most of our readers, think are bad. Outside of the book, including in The Chronicle of Higher Education, we’ve stated our support for free speech and academic freedom and our belief that victimhood culture isn’t conducive to these things.

How, then, would people who agree with us go about preserving dignity culture?

Jordan Peterson’s rule #6 isn’t bad practical advice: “Set your house in perfect order before you criticize the world.” So we might start with ourselves. Can we make ourselves less sensitive to slight? Studying ancient wisdom, learning the lessons of cognitive behavioral therapy, or even absorbing some folk knowledge might be helpful. So might searching for sources of involvement and meaning that don’t revolve around a moral hierarchy of identity groups. Can we find better ways of handling our grievances other than venting online or complaining to a bureaucracy? Talking things out is hard. It requires confrontations that many of us would rather avoid. But like anything, if you can force yourself to start doing it, it might get easier with practice.

We might also focus on the epicenter of victimhood culture — our colleges and universities. Do we know how much of state universities’ funds go to administration as opposed to instruction? Do we know how much of that is for the policing of offensive speech and propagating microaggression theory and implicit bias training? Do our legislators know? Maybe we should call and ask — or better yet, get together a group of a half-dozen friends to call and ask. If it were possible to shrink the university bureaucracy — particularly the bureaucracy charged with handling offensive words and images — it would reduce the moral dependency of victimhood culture. It would reduce the incentives to jockey for victim status and increase the incentives for alternative ways of dealing with problems. It might even make people more prone to talk to talk to one another and speak their minds without fear of reprimand.

Along those lines, another strategy would be to try to reduce the ideological homogeneity of the academy, where a mainstream conservative is a rarer thing than a radical leftist. There’s no guarantee this would increase dignity culture as such — as we’ve seen, conservatives can join in the victim game too. But since victimhood culture is currently most concentrated on the radical left, some of its most severe manifestations involve demonizing those on the right. According to Black’s theory, tolerance of diversity is greater in exactly those places that have more diversity to start with, while concern with cultural purity is greatest where culture is relatively homogeneous. Theoretically, increasing ideological diversity should reduce the degree of ideological intolerance on campus, and so undermine some of the more severe eruptions. It would also provide some more tolerance for those wishing to criticize victimhood culture as such.

For many college students, socialization into extreme sensitivity and dependency began before they arrived. There are signs that children and youth — at least from the middle and upper classes — are more sheltered, supervised, and regulated than in decades past, and that they have correspondingly less practice in coping with difficulties and handling conflicts on their own. Supporters of so-called free-range parenting campaign against this, encouraging parents to allow their children unsupervised play and school districts to provide recess grounds with such dangerous equipment as jungle gyms and monkey bars. One might find ways to encourage these kinds of initiatives locally or nationally, such as by raising money for the legal defense of people charged with neglect and abuse for what many of us would consider a reasonable bit of autonomy or schools held responsible for accidental injuries.

And finally, it’s important to combat victimhood culture and to deal with the problems it creates in the universities and elsewhere, but it’s also important to create alternatives to the universities and the mainstream media where serious ideas can be discussed and debated.

Bradley Campbell, Associate Professor of Sociology at California State University, and Jason Manning, Associate Professor of Sociology at West Virginia University.  The Rise of Victimhood Culture: Microaggressions, Safe Spaces, and the New Culture Wars, is on sale now via Amazon. 

Claire Lehmann is the founder and editor-in-chief of Quillette.

Voir encore:

«Ces peuples qui ne veulent pas mourir»
Eric Zemmour
Le Figaro
14/09/2018

CHRONIQUE – La lutte à mort engagée contre Donald Trump par les médias et la justice de son pays traduit le refus des élites de se ranger derrière la volonté du peuple américain.

C’est un «résistant». Un héros. Un bienfaiteur de l’Amérique et de l’humanité. Le «haut responsable à la Maison-Blanche» qui, dans les colonnes du New York Times , a déversé sa bile sur Donald Trump, est encensé par les médias américains et occidentaux. Non seulement il dénonce dans le président américain un psychopathe à enfermer d’urgence, mais il conserve l’anonymat pour, dit-il, rester en place afin de limiter les dégâts pour les Etats-Unis et le monde. Un héros, nous dit-on, qui, dans «l’ancien monde», aurait été appelé un «traître», une «taupe», et même un putschiste, puisqu’il ne respecte pas la légitimité d’un président élu par le peuple.

Mais c’est ainsi: avec Trump, tous les coups sont permis. Les médias retrouvent d’instinct le langage orwellien qui inverse la paix en guerre et la liberté en servitude. Avec Trump, le traître devient héros, le président des Etats-Unis devient un tyran et un fou. La démocratie, c’est abattre l’homme élu par le peuple américain.

Et cela dure depuis le premier jour de son élection. Une élection qui a pris par surprise toutes les élites de l’est et de l’ouest du pays – élites économiques, financières, médiatiques, judiciaires, administratives.

Cet «Etat profond», comme l’appelle Trump, a décidé d’avoir la peau de ce Président et de le conduire vers la procédure d’impeachment, comme Louis XVI fut traîné à la guillotine. Chaque journaliste, chaque bureaucrate, même les plus haut gradés, chaque juge, rêve d’avoir la peau de Trump comme leurs glorieux aînés ont eu celle de Nixon en 1971. «Nixon le tricheur», lui aussi, avait été le candidat des classes populaires contre l’establishment sorti des campus universitaires des années 1960.

Entre-temps, ces jeunes gens chevelus ont pris tous les pouvoirs à Washington. Et sont bien décidés à ne pas les perdre. Depuis des mois, ils s’efforcent de faire passer Trump pour un espion à la solde de Poutine. Et, comme cela ne marche pas, ils ajoutent désormais la folie.

Cet affrontement, en vérité, dépasse le cas de Trump et même des Etats-Unis. C’est tout l’Occident qui en est le champ de bataille. La guerre inexpiable oppose des élites cosmopolites qui, au nom des valeurs universelles des droits de l’homme, veulent désagréger les peuples et les nations issus d’une histoire séculaire. En face, il y a les peuples occidentaux qui s’efforcent de sauvegarder leur mode de vie, leur identité, leur unité, leur histoire. Des peuples enracinés contre des élites déracinées. La loi de la majorité contre la dictature des minorités. La démocratie contre l’Etat de droit. Des élites qui se parent du titre de «progressistes» et qui, à Paris, Berlin, Bruxelles, Washington ou Los Angeles, traitent avec mépris les «populistes». Des élites qui ont juré d’avoir la peau des antiques nations et des peuples qui ne veulent pas mourir.

Voir enfin:

University under fire for creating a safe space for white students called ‘White Awake

The University of Maryland (UMD) was forced to take down flyers and change the name of a counseling program that offered “safe space for white students” after sparking outrage on campus.

At the beginning of the fall semester, UMD’s Counseling Center posted flyers for a new group called “White Awake,” which prompted the backlash.

Early Friday, the university’s website changed the name to “Anti-Racism and Ally Building Group” and scrubbed any references to a “safe space” and “white students.”

The University of Maryland’s Counseling Center faced student backlash after it started a group called “White Awake” a “safe space for white students” to discuss race on campus.  (Google maps)

“This group offers a safe space for white students to explore their experiences, questions, reactions, and feelings,” the initial description read. “Members will support and share feedback with each other as they learn more about themselves and how they fit into a diverse world.”

The flyer also asked if white people ever “feel uncomfortable and confused” in their “interactions with racial and ethnic minorities,” and if they “want to become a better ally.”

Several students conveyed their outrage on social media and on campus.

“The world is a space for white people to talk in,” one student told The Diamondback, a UMD student newspaper, expressing how unnecessary the new initiative is.

Another student tweeted she was “ashamed over the execution of white awake,” writing, “Why do they need to attend therapy sessions on how to be a decent human being in society…to coexist?”

Noah Collins, who leads the group and specializes in group therapy for the Counseling Center with an interest in “racial and cultural awareness,” issued a statement Thursday night saying UMD will discontinue the flyer and consider changing the name, but that it stands by the group.

He added the flyer was “not clear enough” in explaining that the group’s aim is “anti-racism and becoming a better ally.”

TEXAS BIOLOGY TEACHER ON LEAVE FOR ALLEGEDLY BULLYING PRO-TRUMP STUDENT

The university told Fox News in a statement that UMD’s Counseling Center acknowledges it “did not choose the right words in raising awareness about this research-based initiative, and how this group has been perceived is counter to the values of inclusiveness and diversity that we embody.”

“This is an incredibly difficult, nuanced issue, and that’s the reason we need to discuss it,” Collins wrote. “The aim of this group is to help white students become more culturally competent, so they can better participate in creating a more inclusive environment at the University of Maryland.”

COMPLEMENT:

Les « décoloniaux » à l’assaut des universités
Matthieu Aron
L’OBS
30 novembre 2018

«  »Racialisé », « racisation », « islamophobie »… Ce vocabulaire, qui s’est installé dans le débat public, est issu d’une mouvance de pensée qui gagne du terrain à l’université. Certains s’en félicitent, d’autres dénoncent l’intolérance de ses partisans.

« Le féminisme islamique ». Sans point d’interrogation. Comme si les expressions « féminisme » et « islamique » pouvaient être accolées sans susciter la moindre controverse. Voilà sur quoi doivent plancher, à partir de cette semaine, les étudiants en sociologie et science politique de l’université Lyon-II dans le cadre d’un cours consacré aux « mouvements sociaux dans les Etats postcoloniaux ».

A l’honneur lors de ces travaux dirigés, le livre de Zahra Ali « Féminismes islamiques » (éd. La Fabrique). Cette chercheuse à l’EHESS et à l’Institut français du Proche-Orient milite en faveur du port du foulard. Selon elle, le féminisme « bourgeois de Simone de Beauvoir » a été utilisé à « des fins coloniales, donc aujourd’hui postcoloniales et racistes ». Elle en prône donc un nouveau, « attaché au texte sacré et à la tradition prophétique » et propose:
« une libération qui pose un tout autre rapport au corps […] marqué par des normes et par une défense du cadre familial hétérosexuel ».

Un vide académique
Cet enseignement délivré à Lyon constitue-t-il une exception ? Ou bien traduit-il l’influence grandissante des tenants de la pensée dite « décoloniale » au sein des facultés françaises ? Selon les postcolonial studies, courant venu du monde anglo-saxon et sud-américain, le « passif colonial » continuerait à structurer toutes nos institutions et représentations. Encore minoritaires dans le champ académique il y a dix ans, ces thèses semblent s’inviter de plus en plus à l’université.
C’est d’abord une question de vocabulaire. « Racisme structurel » (de l’Etat français), « domination blanche »,  » féminisme islamique »… Une nuée de concepts qui ne se limitent plus aux cercles d’initiés et aux réunions militantes. Un peu partout, on voit se multiplier les cours, les travaux dirigés, les doctorats, les sujets de thèse, les colloques ayant trait à ces questions.

Beaucoup des chercheurs ou enseignants rencontrés au cours de cette enquête témoignent sous couvert d’anonymat. Le sujet, disent-ils, est trop « brûlant », trop « passionnel », « confisqué par les extrêmes ». Pour les esprits « raisonnables », ceux qui voudraient « continuer à travailler », il n’y aurait que des coups à prendre à rester « à l’écart des vieilles ou nouvelles chapelles ». 80 intellectuels, dont Elisabeth Badinter, Mona Ozouf, Pierre Nora, Alain Finkielkraut ou encore Boualem Sansal, dénoncent cependant cette « offensive des ‘décoloniaux' » dans « Le Point » cette semaine.
« Tout cela crée un profond clivage entre collègues », souligne Gérard Noiriel, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en Sciences Sociales (EHESS). Benjamin Stora, président du Musée de l’Histoire de l’Immigration et spécialiste de la guerre d’Algérie, est à peine plus disert. Malgré tout, il lâche :
« Dans notre pays, nous avons peu de professeurs spécialistes de l’histoire de la décolonisation. Du coup, le sujet est préempté par de jeunes doctorants en sociologie ou en science politique, parfois très dogmatiques. »
C’est dans ce vide académique que se sont engouffrés ceux que l’on appelle, et qui s’appellent eux-mêmes, les « décoloniaux », des chercheurs qui assument d’être aussi des militants.

Le 6 novembre dernier, Sciences-Po Aix-en-Provence a programmé une conférence sur le thème : « Un féminisme musulman, et pourquoi pas ? » La conférencière s’appelle Malika Hamidi, sociologue, auteur de plusieurs articles et d’un essai, notamment sur la question du foulard. Elle préconise :
« La lutte féministe de la musulmane d’Europe sera principalement une lutte contre l’islamophobie et le paternalisme d’un certain féminisme occidental à prétention universaliste. »
Habituée des colloques en France (elle a aussi été invitée à l’institut d’études politiques de Lyon et à l’EHESS), Malika Hamidi se targue d’être aussi « une femme de foi et une militante ». A son CV il faut ajouter le titre de directrice générale de l’European Muslim Network, une organisation présidée par Tariq Ramadan.

Tariq Ramadan, la chute d’un gourou
« Interdit aux Blancs »
A Strasbourg, au printemps, la faculté des sciences sociales a fait intervenir dans son master « religions, sociétés, espace public » (préparant aux métiers de médiateur socioculturel et de « référent laïcité ») Hanane Karimi, jeune doctorante en sociologie. Militante de longue date de l’abrogation de la loi interdisant le port du voile à l’école, animatrice en août 2016 d’un séminaire au « camp d’été décolonial » réservé aux « victimes du racisme d’Etat » (et donc « interdit aux Blancs »), Hanane Karimi est, elle aussi, une proche de Tariq Ramadan, même si elle semble avoir pris ses distances depuis qu’il est accusé de viols.
A l’université de Strasbourg, encore, la parole a été donnée à Valérie Amiraux, titulaire de la chaire de recherche du Canada en étude du pluralisme religieux. La sociologue, qui participe à de nombreux débats en France, fait aussi partie du « comité scientifique » pour la grande consultation des musulmans de France, réuni par Marwan Muhammad, ancien directeur exécutif du Collectif contre l’Islamophobie en France (CCIF), réputé proche des Frères Musulmans et de Tariq Ramadan. Le choix des deux conférencières est totalement assumé par la direction de la faculté des sciences sociales. Il s’agit de deux « universitaires reconnues », précise son doyen, Jean-Daniel Boyer, qui ajoute que ces deux collègues se sont exprimées dans un cadre « soumis à la critique ».
Pour ses partisans, la percée de la mouvance « décoloniale » illustre en effet l’expression du pluralisme à l’université, qui s’ouvrirait enfin aux « problématiques » nouvelles travaillant la société. Pas suffisamment encore aux yeux de certains. C’est le cas du sociologue Eric Fassin, directeur du département d’études de genre à Paris-VIII, qui a importé en France les postcolonial studies. Cette figure médiatique, qui exerce une réelle influence sur une partie du monde universitaire et intellectuel français, a cosigné une tribune collective, publiée dans « Libération » en 2015, condamnant le rôle de l’Etat français, « comme l’acteur principal d’un racisme institutionnel ». Aujourd’hui, il regrette que les universités soient toujours trop frileuses :
« Il n’y a pas assez de créations de poste. Nous manquons de professeurs qui travaillent sur les discriminations raciales. »
« Pas vraiment la Shoah »

François Burgat, lui, n’a pas attendu ces dernières années pour faire entendre sa voix. Septuagénaire, directeur émérite de recherche au CNRS, il n’a jamais tourné le dos à Tariq Ramadan, y compris après sa mise en examen pour viol. « La vraie question n’est plus de savoir si Tariq Ramadan ‘a violé trois femmes’, expliquait-il le 26 octobre sur Twitter, mais bien ‘avec l’aide de qui ces trois femmes sont-elles parvenues si facilement à rouler trois magistrats dans la farine’ ? »
‘La vraie question n’est plus de savoir si Tariq Ramadan « a violé 3 femmes » mais bien « avec l’aide de qui ces trois femmes sont elles parvenues si facilement à rouler trois magistrats dans la farine » ? »
Sur Twitter toujours, après l’émoi suscité par l’assassinat de l’octogénaire juive Mireille Knoll, chez elle à Paris, il n’a pas hésité à écrire : « Oups, ce n’était pas vraiment la Shoah dans un appartement. » Parmi d’autres déclarations publiques, on peut noter ses attaques contre la télévision française qu’il traite de « Télavivision » (en référence à Tel-Aviv) ou ses incitations à « soutenir le CCIF ». Et François Burgat compte toujours autant de disciples au sein de l’Institut de Recherches et d’Etudes sur le Monde arabe et musulman (Iremam) d’Aix-en-Provence, un laboratoire doté de moyens importants et qui accompagne, pour les années 2018-2019, quarante-cinq doctorants dans la rédaction de leurs thèses.
Récemment, il a ainsi dirigé les travaux de l’un d’eux sur les rapports entre le Qatar et le prédicateur sunnite Youssef al-Qaradawi. Ce dernier, parfois surnommé « le cheikh de la mort « , est l’auteur de plusieurs fatwas autorisant les attentats-suicides ; il déversait, en 2009, sur la chaîne Al-Jazeera, sa haine des juifs :
« Le dernier châtiment a été administré par Hitler. »

La thèse consacrée au prédicateur a été soutenue le 20 novembre 2017, devant un jury présidé par François Burgat. Elle n’a pas encore été publiée, mais certains observateurs qui ont assisté à la soutenance ont été interloqués. « Les relations de Qaradawi avec le Qatar y sont qualifiées de simple ‘soft power islamique de complémentarité’ ! » raconte l’un d’entre eux. Son auteur, Nabil Ennasri (formé par Tariq Ramadan, dont il dénonce la « lapidation médiatique »), est aujourd’hui docteur en science politique.
Des initiatives troublantes
Parfois, les initiatives de la faculté sont plus troublantes encore. En octobre 2017, des universitaires de Lyon-II ont convié – dans le cadre d’un colloque intitulé « Lutter contre l’islamophobie, un enjeu d’égalité ? » – Abdelaziz Chaambi, le fondateur de la Coordination contre le Racisme et l’Islamophobie (CRI), mais aussi… fiché S par les services de renseignement. Suite au tollé de nombreuses associations, la présidence de l’université a fini par annuler la manifestation. Cas isolé ? Poursuivons le tour de France.
En janvier 2018, le syndicat Solidaires Etudiant-e-s de l’université Paris-VII a essayé d’empêcher une représentation de la pièce « Lettre aux escrocs de l’Islamophobie qui font le jeu des racistes », tirée du livre de Charb, l’ancien rédacteur en chef de « Charlie Hebdo », mort sous les balles des frères Kouachi. Motifs invoqués par les étudiants :
« En organisant cet événement, Paris-Diderot participe à ce mouvement de construction raciste d’un ‘ennemi de l’intérieur’, d’une catégorie racialisée dangereuse : le/la musulman-e. »
Et que penser des réactions épidermiques de certains enseignants quand, il y a trois ans, la secrétaire d’Etat chargée des Droits des femmes dans le gouvernement de Manuel Valls, Pascale Boistard, a déclaré dans « le Figaro » ne pas être « sûre que le voile fasse partie de l’enseignement supérieur » ? Une vingtaine de professeurs et de maîtres assistants se sont aussitôt violemment insurgés. La prise de position de la secrétaire d’Etat pouvait bien évidemment être contestée ou critiquée, mais pourquoi une partie de l’élite universitaire française est-elle allée jusqu’à lui reprocher d’instrumentaliser le « droit des femmes au profit de politiques racistes et colonialistes », à la stigmatiser en « islamophobe » et, pis encore, en « porte-parole des pourvoyeurs de haine » ?

La victoire des Frères musulmans
Tout cela dessine pour le moins un climat. Et les militants de la laïcité, à l’unisson de certains spécialistes de l’islam, y voient la preuve de la victoire culturelle remportée par les Frères musulmans dans le monde universitaire. Les Frères, expliquent-ils, évitent de mettre en avant leurs propres objectifs. Ils les intègrent dans d’autres combats, comme la lutte contre les discriminations ou pour l’égalité hommes-femmes. Depuis peu, les mêmes s’inquiètent de la percée du Parti des Indigènes de la République, créé en 2005, que sa porte-parole, Houria Bouteldja, défini comme « anti-impérialiste et antisioniste ». Un professeur d’économie, confie, en off :
« Aujourd’hui, à l’université, si vous vous opposez à ces réseaux, vous passez vite pour un raciste. »
Autre confidence, presque apeurée, d’une chercheuse en poste dans le sud de la France, ayant toujours voté à gauche, défendu les droits de l’homme, combattu toutes les discriminations :
« Avant, le pire pour un universitaire, c’était d’être accusé de plagiat ; maintenant, c’est de se voir traiter d’islamophobe sur internet. Cette accusation signe la fin d’une carrière. »
Quelques téméraires, pourtant, osent prendre le risque. Par exemple, Isabelle Barbéris, agrégée de lettres modernes, normalienne, chercheuse associée au CNRS et maître de conférences à Paris-VII. « Certains étudiants, dit-elle, ont été littéralement endoctrinés par des professeurs qui sont de purs militants, mais que leurs titres académiques légitiment auprès des jeunes. » Céline Masson, professeur de psychopathologie clinique à l’université de Picardie Jules-Verne, ajoute :
« Il existe aujourd’hui une petite cinquantaine d’universitaires très présents sur certains campus qui instrumentalisent la notion de racisme d’Etat. »

En juin, Céline Masson a fait paraître avec deux autres professeurs (Isabelle de Mecquenem, professeur de philosophie de l’université de Reims, et Jean Szlamowicz, de l’université de Bourgogne) une tribune titrée : « Un antiracisme sectaire à l’assaut des facs : malaise dans la culture juvénile ». Ils y décryptaient le « discours univoque et véhément », qui, de colloques en conférences sur l' »islamophobie », cherche, « au mépris de la rationalité critique », à « légitimer l’idée d’une racisation de la société et d’un racisme d’Etat ». Ainsi s’impose peu à peu une vision du monde, clivée entre les « indigènes » opprimés et les « Blancs » héritiers de la colonisation.
Alors que le mot « race » – jusqu’il y a peu signe de ralliement de l’extrême droite – vient d’être effacé de la Constitution française par un vote à l’unanimité de l’Assemblée nationale, en juillet 2018, le voilà qui fait son entrée en force dans les universités, y compris les plus prestigieuses. En juin 2018, la Sorbonne a lancé une série de conférences autour du thème : « Approches phénoménologiques du genre et de la race. Penser les oppressions et les résistances ».

L' »objectivité du savoir »
En septembre, Paris-Diderot (Paris-VII) a aussi tenu un ambitieux colloque. Trois jours de réflexion avec au menu : « Racisme et discrimination raciale, de l’école à l’université ». Plusieurs enseignants de Paris-VII disent aujourd’hui à « l’Obs », mais toujours sous le sceau de l’anonymat, combien ils ont été heurtés par ce symposium. Bien sûr, expliquent-ils, la problématique de la race, en tant que construction sociale, mérite l’intérêt. Bien sûr, poursuivent-ils, les facultés ont toujours eu pour mission d’animer le débat et la recherche. Mais le Code de l’Education prévoit aussi que l’enseignement supérieur soit « indépendant de toute emprise politique, religieuse ou idéologique ». Et qu’il tende à l' »objectivité du savoir ». Or, à lire la présentation des travaux de Paris-VII, il semble d’emblée posé que l’école et l’université françaises sont par nature « racistes », et produisent automatiquement des discriminations. « C’est donner raison à Bouteldja [la porte-parole des du PIR, NDLR] », affirme l’un de ces enseignants.
Si des associations de défense des droits de l’Homme parviennent parfois à lui fermer la porte des facultés – comme à Limoges il y a un an -, à Toulouse, en revanche, elle a été reçue par deux fois en 2016. Elle bénéficie également du soutien de nombreux intellectuels. En juin 2017, après un article du « Monde » consacré au malaise croissant de la gauche face à l' »usage militant des notions comme la ‘race’ ou l »islamophobie' », une vingtaine de personnalités s’indignent dans une tribune et volent au secours de Bouteldja : « Accusations infondées », « calomnies ». Parmi les signataires : l’historienne Ludivigne de Bantigny, la sociologue Christine Delphy, la philosophe Isabelle Stengers, l’écrivain Annie Ernaux, ou l’éditeur Eric Hazan.

Les « thèses » professées par Houria Bouteldja ont depuis longtemps franchi les sphères confinées de la radicalité. En voici un florilège. Sur les Blancs : « J’appartiens à ma race. Au-dessus de moi, il y a les profiteurs blancs. […] Mes oppresseurs. » Sur l’homosexualité : « La tarlouze n’est pas tout à fait un homme. Ainsi, l’Arabe qui perd sa puissance virile n’est plus un homme. » Sur les juifs : « Pour le Sud, la Shoah est – si j’ose dire – moins qu’un détail. […] Cette histoire n’est pas la mienne en vérité […]. C’est pourquoi, je vous le dis en vous regardant droit dans les yeux : je n’irai pas à Auschwitz. »
Le collectif Lallab des femmes musulmanes lors d’un rassemblement féministe des quartiers populaires devant la Basilique Saint-Denis, le 11 mars 2017. (Anita Pouchard Serra / Hans Lucas)

« Femmes, voilez-vous ! »
Lors des grèves des facs au printemps, on a pu mesurer l’effet de tels discours sur les étudiants. Les murs de plusieurs universités ont été tagués de slogans racistes (« Mort aux Blancs », « Fuck White People », « Assimilation = ethnicide »,  » Si le racisme antiblanc existait, je serais un gros faf ») ou à connotation islamiste (« Femmes, voilez-vous ! », « Allahou akbar »,  » Califat Queer « ). Pendant le même mouvement de grève, lors d’une conférence à Nanterre, deux militants « décoloniaux » ont été jusqu’à soutenir que « la gauche blanche enjoint aux non-Blancs de s’identifier comme homosexuels ». Pourquoi ? » Parce que la majorité blanche du Nord impose sa vision de la sexualité, qu’elle prétend universelle et émancipatrice, à l’intégralité de la population non-blanche du Sud qui ne lui a rien demandé.  » Sus à l' »homoracialisme français », concluaient les deux  » décoloniaux « . A bas l' »impérialisme gay » (l’une des expressions phares d’Houria Bouteldja).

Sous la pseudo-spécialisation du langage, des alliances, en apparence contre-nature, se nouent. Entre les Indigènes de la République, les Frères musulmans (lesquels conceptualisent également une racialisation de l’islam) et certains militants d’extrême gauche. Tous unis pour dénoncer un « racisme d’Etat structurel, pensé, organisé et légalisé par des Blancs » et pour instituer les « indigènes » (noirs, arabes ou asiatiques) en « nouveaux damnés de la terre ».
Exemple tout récent : le Collectif Rosa-Parks, qui, en octobre, a appelé à faire la « grève de la France » (« On disparaît de nos lieux de travail, de nos facs, de nos écoles ») pour dénoncer la « gestion raciale » des populations et la « ségrégation » érigée en « système ». Au bas de cet appel, les signatures d’Houria Bouteldja du PIR, de Marwan Muhammad du CCIF et d’une dizaine d’universitaires, parmi lesquels les « indigénistes » assumés Nacira Guénif-Souilamas, professeur de sociologie à Paris-VIII, et Françoise Vergès, politologue.
De l’avis de tous ceux que nous avons rencontrés au cours de cette enquête, la mouvance « décoloniale » gagne du terrain à l’université. Certains s’en réjouissent, d’autres s’en inquiètent. Le plus souvent en silence. Un professeur est allé jusqu’à nous avouer sa « terreur » face à d’éventuelles représailles d’étudiants. Un autre craint de ne plus « obtenir de crédits » pour ses recherches s’il critique les orientations de son labo. Discours inutilement alarmistes ? Peut-être est-il simplement temps d’ouvrir le débat sur le sujet, sans anathèmes ni fantasmes, et de faire un état des lieux. »

Voir aussi:

L’invraisemblable pétition de soutien à Houria Bouteldja

Pour la sociologue Nathalie Heinich, les signataires qui défendent la militante indigéniste trahissent leurs propres valeurs et nuisent à leur réputation.

Nathalie Heinich*, de l’Observatoire du Décolonialisme**


Classement de Shanghaï/2018: L’État est mort, vive l’État ! (Decentralized dirigisme: Will the pressure of international academic rankings finally force France to let go of its obsession for state-commanded centralization to save its overcrowded and underfunded universities ?)

16 août, 2018
Les uns défilent pour l'avenir des universités, les autres pour le 14-Juillet. Étudiantes et étudiantes de l'Université de Nantes, le 28 mars 2018, et élèves de Polytechnique, le 14 juillet 2018 à Paris | Loïc Venance / AFP - Ludovic Marin / AFP
Les étudiants restent viscéralement attachés à une fiction égalitaire: la méritocratie, à laquelle ils adhèrent, doit être compensée par le libre accès aux filières universitaires, même si cette égalité formelle débouche sur une sélection par l’échec en premier cycle. Olivier Galland
32,000 students at the Nanterre campus of the University of Paris, but no student center, no bookstore, no student-run newspaper, no freshman orientation, no corporate recruiting system. The 480,000-volume central library is open only 10 hours a day, closed on Sundays and holidays. Only 30 of the library’s 100 computers have Internet access. (…) When the government proposed a reform in 2003 to streamline curriculums and budgets by allowing each university more flexibility and independence, students and professors rebelled. (…) While students are ready to protest against something they dislike, there is little sense of belonging or pride in one’s surroundings. During the recent protests over the contested labor law, that attitude of alienation contributed to the destruction of property, even computers and books, at some universities. NYT (2006)
Entre 1951 et 1955, les jeunes d’origine modeste y étaient 29 %, contre 9 % trente ans plus tard. Ils ont aujourd’hui 24 fois moins de chances d’intégrer une grande école que des enfants de cadres ou d’enseignants. Libération
How, you may ask, can anyone call higher education wasteful in an age when its financial payoff is greater than ever? The earnings premium for college graduates has rocketed to 73 percent—that is, those with a bachelor’s degree earn, on average, 73 percent more than those who have only a high-school diploma, up from about 50 percent in the late 1970s. The key issue, however, isn’t whether college pays, but why. The simple, popular answer is that schools teach students useful job skills. But this dodges puzzling questions. First and foremost: From kindergarten on, students spend thousands of hours studying subjects irrelevant to the modern labor market. Why do English classes focus on literature and poetry instead of business and technical writing? Why do advanced-math classes bother with proofs almost no student can follow? When will the typical student use history? Trigonometry? Art? Music? Physics? Latin? The class clown who snarks “What does this have to do with real life?” is onto something. The disconnect between college curricula and the job market has a banal explanation: Educators teach what they know—and most have as little firsthand knowledge of the modern workplace as I do. Yet this merely complicates the puzzle. If schools aim to boost students’ future income by teaching job skills, why do they entrust students’ education to people so detached from the real world? Because, despite the chasm between what students learn and what workers do, academic success is a strong signal of worker productivity. Suppose your law firm wants a summer associate. A law student with a doctorate in philosophy from Stanford applies. What do you infer? The applicant is probably brilliant, diligent, and willing to tolerate serious boredom. If you’re looking for that kind of worker—and what employer isn’t?—you’ll make an offer, knowing full well that nothing the philosopher learned at Stanford will be relevant to this job. The labor market doesn’t pay you for the useless subjects you master; it pays you for the preexisting traits you signal by mastering them. This is not a fringe idea. Michael Spence, Kenneth Arrow, and Joseph Stiglitz—all Nobel laureates in economics—made seminal contributions to the theory of educational signaling. Every college student who does the least work required to get good grades silently endorses the theory. But signaling plays almost no role in public discourse or policy making. As a society, we continue to push ever larger numbers of students into ever higher levels of education. The main effect is not better jobs or greater skill levels, but a credentialist arms race. Lest I be misinterpreted, I emphatically affirm that education confers some marketable skills, namely literacy and numeracy. Nonetheless, I believe that signaling accounts for at least half of college’s financial reward, and probably more. Most of the salary payoff for college comes from crossing the graduation finish line. Suppose you drop out after a year. You’ll receive a salary bump compared with someone who’s attended no college, but it won’t be anywhere near 25 percent of the salary premium you’d get for a four-year degree. Similarly, the premium for sophomore year is nowhere near 50 percent of the return on a bachelor’s degree, and the premium for junior year is nowhere near 75 percent of that return. Indeed, in the average study, senior year of college brings more than twice the pay increase of freshman, sophomore, and junior years combined. Unless colleges delay job training until the very end, signaling is practically the only explanation. This in turn implies a mountain of wasted resources—time and money that would be better spent preparing students for the jobs they’re likely to do. The conventional view—that education pays because students learn—assumes that the typical student acquires, and retains, a lot of knowledge. She doesn’t. Teachers often lament summer learning loss: Students know less at the end of summer than they did at the beginning. But summer learning loss is only a special case of the problem of fade-out: Human beings have trouble retaining knowledge they rarely use. Of course, some college graduates use what they’ve learned and thus hold on to it—engineers and other quantitative types, for example, retain a lot of math. But when we measure what the average college graduate recalls years later, the results are discouraging, to say the least. In 2003, the United States Department of Education gave about 18,000 Americans the National Assessment of Adult Literacy. The ignorance it revealed is mind-numbing. Fewer than a third of college graduates received a composite score of “proficient”—and about a fifth were at the “basic” or “below basic” level. You could blame the difficulty of the questions—until you read them. Plenty of college graduates couldn’t make sense of a table explaining how an employee’s annual health-insurance costs varied with income and family size, or summarize the work-experience requirements in a job ad, or even use a newspaper schedule to find when a television program ended. Tests of college graduates’ knowledge of history, civics, and science have had similarly dismal results.Of course, college students aren’t supposed to just download facts; they’re supposed to learn how to think in real life. How do they fare on this count? The most focused study of education’s effect on applied reasoning, conducted by Harvard’s David Perkins in the mid-1980s, assessed students’ oral responses to questions designed to measure informal reasoning, such as “Would a proposed law in Massachusetts requiring a five-cent deposit on bottles and cans significantly reduce litter?” The benefit of college seemed to be zero: Fourth-year students did no better than first-year students.Other evidence is equally discouraging. One researcher tested Arizona State University students’ ability to “apply statistical and methodological concepts to reasoning about everyday-life events.” (…) Educational psychologists have discovered that much of our knowledge is “inert.” Students who excel on exams frequently fail to apply their knowledge to the real world. Take physics. As the Harvard psychologist Howard Gardner writes, Students who receive honor grades in college-level physics courses are frequently unable to solve basic problems and questions encountered in a form slightly different from that on which they have been formally instructed and tested. The same goes for students of biology, mathematics, statistics, and, I’m embarrassed to say, economics. I try to teach my students to connect lectures to the real world and daily life. My exams are designed to measure comprehension, not memorization. Yet in a good class, four test-takers out of 40 demonstrate true economic understanding. (…) Indeed, today’s college students are less willing than those of previous generations to do the bare minimum of showing up for class and temporarily learning whatever’s on the test. Fifty years ago, college was a full-time job. The typical student spent 40 hours a week in class or studying. Effort has since collapsed across the board. “Full time” college students now average 27 hours of academic work a week—including just 14 hours spent studying. What are students doing with their extra free time? Having fun. (…) Arum and Roksa cite a study finding that students at one typical college spent 13 hours a week studying, 12 hours “socializing with friends,” 11 hours “using computers for fun,” eight hours working for pay, six hours watching TV, six hours exercising, five hours on “hobbies,” and three hours on “other forms of entertainment.” Grade inflation completes the idyllic package by shielding students from negative feedback. The average GPA is now 3.2. What does this mean for the individual student? Would I advise an academically well-prepared 18-year-old to skip college because she won’t learn much of value? Absolutely not. Studying irrelevancies for the next four years will impress future employers and raise her income potential. If she tried to leap straight into her first white-collar job, insisting, “I have the right stuff to graduate, I just choose not to,” employers wouldn’t believe her. To unilaterally curtail your education is to relegate yourself to a lower-quality pool of workers. For the individual, college pays. This does not mean, however, that higher education paves the way to general prosperity or social justice. When we look at countries around the world, a year of education appears to raise an individual’s income by 8 to 11 percent. By contrast, increasing education across a country’s population by an average of one year per person raises the national income by only 1 to 3 percent. In other words, education enriches individuals much more than it enriches nations. How is this possible? Credential inflation: As the average level of education rises, you need more education to convince employers you’re worthy of any specific job. One research team found that from the early 1970s through the mid‑1990s, the average education level within 500 occupational categories rose by 1.2 years. But most of the jobs didn’t change much over that span—there’s no reason, except credential inflation, why people should have needed more education to do them in 1995 than in 1975. What’s more, all American workers’ education rose by 1.5 years in that same span—which is to say that a great majority of the extra education workers received was deployed not to get better jobs, but to get jobs that had recently been held by people with less education. As credentials proliferate, so do failed efforts to acquire them. Students can and do pay tuition, kill a year, and flunk their finals. Any respectable verdict on the value of education must account for these academic bankruptcies. Failure rates are high, particularly for students with low high-school grades and test scores; all told, about 60 percent of full-time college students fail to finish in four years. Simply put, the push for broader college education has steered too many students who aren’t cut out for academic success onto the college track. The college-for-all mentality has fostered neglect of a realistic substitute: vocational education. It takes many guises—classroom training, apprenticeships and other types of on-the-job training, and straight-up work experience—but they have much in common. All vocational education teaches specific job skills, and all vocational education revolves around learning by doing, not learning by listening. Research, though a bit sparse, suggests that vocational education raises pay, reduces unemployment, and increases the rate of high-school completion. Defenders of traditional education often appeal to the obscurity of the future. What’s the point of prepping students for the economy of 2018, when they’ll be employed in the economy of 2025 or 2050? But ignorance of the future is no reason to prepare students for occupations they almost surely won’t have—and if we know anything about the future of work, we know that the demand for authors, historians, political scientists, physicists, and mathematicians will stay low. It’s tempting to say that students on the college track can always turn to vocational education as a Plan B, but this ignores the disturbing possibility that after they crash, they’ll be too embittered to go back and learn a trade. The vast American underclass shows that this disturbing possibility is already our reality.Education is so integral to modern life that we take it for granted. Young people have to leap through interminable academic hoops to secure their place in the adult world. My thesis, in a single sentence: Civilized societies revolve around education now, but there is a better—indeed, more civilized—way. If everyone had a college degree, the result would be not great jobs for all, but runaway credential inflation. Trying to spread success with education spreads education but not success. Bryan Caplan
“Super People,” the writer James Atlas has called them—the stereotypical ultra-high-achieving elite college students of today. A double major, a sport, a musical instrument, a couple of foreign languages, service work in distant corners of the globe, a few hobbies thrown in for good measure: They have mastered them all, and with a serene self-assurance that leaves adults and peers alike in awe. A friend who teaches at a top university once asked her class to memorize 30 lines of the eighteenth-century poet Alexander Pope. Nearly every single kid got every single line correct. It was a thing of wonder, she said, like watching thoroughbreds circle a track. These enviable youngsters appear to be the winners in the race we have made of childhood. But the reality is very different, as I have witnessed in many of my own students and heard from the hundreds of young people whom I have spoken with on campuses or who have written to me over the last few years. Our system of elite education manufactures young people who are smart and talented and driven, yes, but also anxious, timid, and lost, with little intellectual curiosity and a stunted sense of purpose: trapped in a bubble of privilege, heading meekly in the same direction, great at what they’re doing but with no idea why they’re doing it. When I speak of elite education, I mean prestigious institutions like Harvard or Stanford or Williams as well as the larger universe of second-tier selective schools, but I also mean everything that leads up to and away from them—the private and affluent public high schools; the ever-growing industry of tutors and consultants and test-prep courses; the admissions process itself, squatting like a dragon at the entrance to adulthood; the brand-name graduate schools and employment opportunities that come after the B.A.; and the parents and communities, largely upper-middle class, who push their children into the maw of this machine. In short, our entire system of elite education. (…) I taught many wonderful young people during my years in the Ivy League—bright, thoughtful, creative kids whom it was a pleasure to talk with and learn from. But most of them seemed content to color within the lines that their education had marked out for them. Very few were passionate about ideas. Very few saw college as part of a larger project of intellectual discovery and development. Everyone dressed as if they were ready to be interviewed at a moment’s notice. (…) So extreme are the admission standards now that kids who manage to get into elite colleges have, by definition, never experienced anything but success. The prospect of not being successful terrifies them, disorients them. The cost of falling short, even temporarily, becomes not merely practical, but existential. The result is a violent aversion to risk. You have no margin for error, so you avoid the possibility that you will ever make an error. Once, a student at Pomona told me that she’d love to have a chance to think about the things she’s studying, only she doesn’t have the time. I asked her if she had ever considered not trying to get an A in every class. She looked at me as if I had made an indecent suggestion. (…) “Return on investment”: that’s the phrase you often hear today when people talk about college. What no one seems to ask is what the “return” is supposed to be. Is it just about earning more money? Is the only purpose of an education to enable you to get a job? (…) At least the classes at elite schools are academically rigorous, demanding on their own terms, no? Not necessarily. In the sciences, usually; in other disciplines, not so much. There are exceptions, of course, but professors and students have largely entered into what one observer called a “nonaggression pact.” Students are regarded by the institution as “customers,” people to be pandered to instead of challenged. Professors are rewarded for research, so they want to spend as little time on their classes as they can. The profession’s whole incentive structure is biased against teaching, and the more prestigious the school, the stronger the bias is likely to be. The result is higher marks for shoddier work. It is true that today’s young people appear to be more socially engaged than kids have been for several decades and that they are more apt to harbor creative or entrepreneurial impulses. But it is also true, at least at the most selective schools, that even if those aspirations make it out of college—a big “if”—they tend to be played out within the same narrow conception of what constitutes a valid life: affluence, credentials, prestige. Experience itself has been reduced to instrumental function, via the college essay. From learning to commodify your experiences for the application, the next step has been to seek out experiences in order to have them to commodify. The New York Times reports that there is now a thriving sector devoted to producing essay-ready summers, but what strikes one is the superficiality of the activities involved: a month traveling around Italy studying the Renaissance, “a whole day” with a band of renegade artists. A whole day! I’ve noticed something similar when it comes to service. Why is it that people feel the need to go to places like Guatemala to do their projects of rescue or documentation, instead of Milwaukee or Arkansas? When students do stay in the States, why is it that so many head for New Orleans? Perhaps it’s no surprise, when kids are trained to think of service as something they are ultimately doing for themselves—that is, for their résumés. “Do well by doing good,” goes the slogan. How about just doing good? If there is one idea, above all, through which the concept of social responsibility is communicated at the most prestigious schools, it is “leadership.” “Harvard is for leaders,” goes the Cambridge cliché. To be a high-achieving student is to constantly be urged to think of yourself as a future leader of society. But what these institutions mean by leadership is nothing more than getting to the top. Making partner at a major law firm or becoming a chief executive, climbing the greasy pole of whatever hierarchy you decide to attach yourself to. I don’t think it occurs to the people in charge of elite colleges that the concept of leadership ought to have a higher meaning, or, really, any meaning. The irony is that elite students are told that they can be whatever they want, but most of them end up choosing to be one of a few very similar things. As of 2010, about a third of graduates went into financing or consulting at a number of top schools, including Harvard, Princeton, and Cornell. Whole fields have disappeared from view: the clergy, the military, electoral politics, even academia itself, for the most part, including basic science. It’s considered glamorous to drop out of a selective college if you want to become the next Mark Zuckerberg, but ludicrous to stay in to become a social worker. “What Wall Street figured out,” as Ezra Klein has put it, “is that colleges are producing a large number of very smart, completely confused graduates. Kids who have ample mental horsepower, an incredible work ethic and no idea what to do next.” (…) The sign of the system’s alleged fairness is the set of policies that travel under the banner of “diversity.” And that diversity does indeed represent nothing less than a social revolution. Princeton, which didn’t even admit its first woman graduate student until 1961—a year in which a grand total of one (no doubt very lonely) African American matriculated at its college—is now half female and only about half white. But diversity of sex and race has become a cover for increasing economic resegregation. Elite colleges are still living off the moral capital they earned in the 1960s, when they took the genuinely courageous step of dismantling the mechanisms of the WASP aristocracy. The truth is that the meritocracy was never more than partial. Visit any elite campus across our great nation, and you can thrill to the heart-warming spectacle of the children of white businesspeople and professionals studying and playing alongside the children of black, Asian, and Latino businesspeople and professionals. Kids at schools like Stanford think that their environment is diverse if one comes from Missouri and another from Pakistan, or if one plays the cello and the other lacrosse. Never mind that all of their parents are doctors or bankers. That doesn’t mean there aren’t a few exceptions, but that is all they are. In fact, the group that is most disadvantaged by our current admissions policies are working-class and rural whites, who are hardly present on selective campuses at all. (…) The numbers are undeniable. In 1985, 46 percent of incoming freshmen at the 250 most selective colleges came from the top quarter of the income distribution. By 2000, it was 55 percent. As of 2006, only about 15 percent of students at the most competitive schools came from the bottom half. The more prestigious the school, the more unequal its student body is apt to be. And public institutions are not much better than private ones. As of 2004, 40 percent of first-year students at the most selective state campuses came from families with incomes of more than $100,000, up from 32 percent just five years earlier. The major reason for the trend is clear. Not increasing tuition, though that is a factor, but the ever-growing cost of manufacturing children who are fit to compete in the college admissions game. The more hurdles there are, the more expensive it is to catapult your kid across them. Wealthy families start buying their children’s way into elite colleges almost from the moment they are born: music lessons, sports equipment, foreign travel (“enrichment” programs, to use the all-too-perfect term)—most important, of course, private-school tuition or the costs of living in a place with top-tier public schools. The SAT is supposed to measure aptitude, but what it actually measures is parental income, which it tracks quite closely. Today, fewer than half of high-scoring students from low-income families even enroll at four-year schools. The problem isn’t that there aren’t more qualified lower-income kids from which to choose. Elite private colleges will never allow their students’ economic profile to mirror that of society as a whole. They can’t afford to—they need a critical mass of full payers and they need to tend to their donor base—and it’s not even clear that they’d want to. And so it is hardly a coincidence that income inequality is higher than it has been since before the Great Depression, or that social mobility is lower in the United States than in almost every other developed country. Elite colleges are not just powerless to reverse the movement toward a more unequal society; their policies actively promote it. Is there anything that I can do, a lot of young people have written to ask me, to avoid becoming an out-of-touch, entitled little shit? I don’t have a satisfying answer, short of telling them to transfer to a public university. You cannot cogitate your way to sympathy with people of different backgrounds, still less to knowledge of them. You need to interact with them directly, and it has to be on an equal footing: not in the context of “service,” and not in the spirit of “making an effort,” either—swooping down on a member of the college support staff and offering to “buy them a coffee,” as a former Yalie once suggested, in order to “ask them about themselves.” Instead of service, how about service work? That’ll really give you insight into other people. How about waiting tables so that you can see how hard it is, physically and mentally? You really aren’t as smart as everyone has been telling you; you’re only smarter in a certain way. There are smart people who do not go to a prestigious college, or to any college—often precisely for reasons of class. There are smart people who are not “smart.” (…) U.S. News and World Report supplies the percentage of freshmen at each college who finished in the highest 10 percent of their high school class. Among the top 20 universities, the number is usually above 90 percent. I’d be wary of attending schools like that. Students determine the level of classroom discussion; they shape your values and expectations, for good and ill. It’s partly because of the students that I’d warn kids away from the Ivies and their ilk. Kids at less prestigious schools are apt to be more interesting, more curious, more open, and far less entitled and competitive. (…) The education system has to act to mitigate the class system, not reproduce it. Affirmative action should be based on class instead of race, a change that many have been advocating for years. Preferences for legacies and athletes ought to be discarded. SAT scores should be weighted to account for socioeconomic factors. Colleges should put an end to résumé-stuffing by imposing a limit on the number of extracurriculars that kids can list on their applications. They ought to place more value on the kind of service jobs that lower-income students often take in high school and that high achievers almost never do. They should refuse to be impressed by any opportunity that was enabled by parental wealth. Of course, they have to stop cooperating with U.S. News.More broadly, they need to rethink their conception of merit. If schools are going to train a better class of leaders than the ones we have today, they’re going to have to ask themselves what kinds of qualities they need to promote. Selecting students by GPA or the number of extracurriculars more often benefits the faithful drudge than the original mind. The changes must go deeper, though, than reforming the admissions process. That might address the problem of mediocrity, but it won’t address the greater one of inequality. The problem is the Ivy League itself. We have contracted the training of our leadership class to a set of private institutions. However much they claim to act for the common good, they will always place their interests first. The arrangement is great for the schools, but is Harvard’s desire for alumni donations a sufficient reason to perpetuate the class system? I used to think that we needed to create a world where every child had an equal chance to get to the Ivy League. I’ve come to see that what we really need is to create one where you don’t have to go to the Ivy League, or any private college, to get a first-rate education. High-quality public education, financed with public money, for the benefit of all: the exact commitment that drove the growth of public higher education in the postwar years. Everybody gets an equal chance to go as far as their hard work and talent will take them—you know, the American dream. Everyone who wants it gets to have the kind of mind-expanding, soul-enriching experience that a liberal arts education provides. We recognize that free, quality K–12 education is a right of citizenship. We also need to recognize—as we once did and as many countries still do—that the same is true of higher education. We have tried aristocracy. We have tried meritocracy. Now it’s time to try democracy. William Deresiewicz
The biggest problem is that the advice in Deresiewicz’s title is perversely wrongheaded. If your kid has survived the application ordeal and has been offered a place at an elite university, don’t punish her for the irrationalities of a system she did nothing to create; by all means send her there! The economist Caroline Hoxby has shown that selective universities spend twenty times more on student instruction, support, and facilities than less selective ones, while their students pay for a much smaller fraction of it, thanks to gifts to the college. Because of these advantages, it’s the selective institutions that are the real bargains in the university marketplace. Holding qualifications constant, graduates of a selective university are more likely to graduate on time, will tend to find a more desirable spouse, and will earn 20 percent more than those of less selective universities—every year for the rest of their working lives. These advantages swamp any differences in tuition and other expenses, which in any case are often lower than those of less selective schools because of more generous need-based financial aid. The Ivy admissions sweepstakes may be irrational, but the parents and teenagers who clamber to win it are not. Any rethinking of elite university admissions must begin with an inkling of the goals of a university education. As the song says, if you don’t know where you’re going, any road will take you there. One contributor to the admissions mess is that so few of a university’s thought leaders can say anything coherent about what those goals are. (…) It’s easy to agree with him that “the first thing that college is for is to teach you to think,” but much harder to figure out what that means. Deresiewicz knows what it does not mean—“the analytical and rhetorical skills that are necessary for success in business and the professions”—but this belletristic disdain for the real world is unhelpful. The skills necessary for success in the professions include organizing one’s thoughts so that they may be communicated clearly to others, breaking a complex problem into its components, applying general principles to specific cases, discerning cause and effect, and negotiating tradeoffs between competing values. In what rarefied ivory chateau do these skills not count as “thinking”? In its place Deresiewicz says only that learning to think consists of “contemplating things from a distance,” with no hint as to what that contemplation should consist of or where it should lead. This leads to Deresiewicz’s second goal, “building a self,” which he explicates as follows: “it is only through the act of establishing communication between the mind and the heart, the mind and experience, that you become an individual, a unique being—a soul.” Perhaps I am emblematic of everything that is wrong with elite American education, but I have no idea how to get my students to build a self or become a soul. (…) I heartily agree with Deresiewicz that high-quality postsecondary education is a public good which should be accessible to any citizen who can profit from it. At the same time, there are reasons for students to distribute themselves among colleges with different emphases and degrees of academic rigor. People vary in their innate and acquired intelligence, their taste for abstraction, their familiarity with literate culture, their priorities in life, and their personality traits relevant to learning. I could not offer a course in brain science or linguist theory to a representative sample of the college-age population without baffling many students at one end and boring an equal number at the other. Also, students learn as much from their peers as their professors, and benefit from a cohort with which they can bat around ideas. Not least, a vibrant research institution must bring smarter undergraduates into the fold, to challenge received wisdom, inject energy and innovation, and replenish its senescing membership. All this is to say that there are good reasons to have selective universities. The question is, How well are the Ivies fulfilling their mandate? After three stints teaching at Harvard spanning almost four decades, I am repeatedly astounded by the answer. Like many observers of American universities, I used to believe the following story. Once upon a time Harvard was a finishing school for the plutocracy, where preppies and Kennedy scions earned gentleman’s Cs while playing football, singing in choral groups, and male-bonding at final clubs, while the blackballed Jews at CCNY founded left-wing magazines and slogged away in labs that prepared them for their Nobel prizes in science. Then came Sputnik, the ’60s, and the decline of genteel racism and anti-Semitism, and Harvard had to retool itself as a meritocracy, whose best-and-brightest gifts to America would include recombinant DNA, Wall Street quants, The Simpsons, Facebook, and the masthead of The New Republic. This story has a grain of truth in it: Hoxby has documented that the academic standards for admission to elite universities have risen over the decades. But entrenched cultures die hard, and the ghost of Oliver Barrett IV still haunts every segment of the Harvard pipeline. At the admissions end, it’s common knowledge that Harvard selects at most 10 percent (some say 5 percent) of its students on the basis of academic merit. At an orientation session for new faculty, we were told that Harvard “wants to train the future leaders of the world, not the future academics of the world,” and that “We want to read about our student in Newsweek 20 years hence” (prompting the woman next to me to mutter, “Like the Unabomber”). The rest are selected “holistically,” based also on participation in athletics, the arts, charity, activism, travel, and, we inferred (Not in front of the children!), race, donations, and legacy status (since anything can be hidden behind the holistic fig leaf). The lucky students who squeeze through this murky bottleneck find themselves in an institution that is single-mindedly and expensively dedicated to the pursuit of knowledge. It has an astonishing library system that pays through the nose for rare manuscripts, obscure tomes, and extortionately priced journals; exotic laboratories at the frontiers of neuroscience, regenerative medicine, cosmology, and other thrilling pursuits; and a professoriate with erudition in an astonishing range of topics, including many celebrity teachers and academic rock stars. The benefits of matching this intellectual empyrean with the world’s smartest students are obvious. So why should an ability to play the bassoon or chuck a lacrosse ball be given any weight in the selection process? The answer, ironically enough, makes the admissocrats and Deresiewicz strange bedfellows: the fear of selecting a class of zombies, sheep, and grinds. But as with much in the Ivies’ admission policies, little thought has given to the consequences of acting on this assumption. Jerome Karabel has unearthed a damning paper trail showing that in the first half of the twentieth century, holistic admissions were explicitly engineered to cap the number of Jewish students. Ron Unz, in an exposé even more scathing than Deresiewicz’s, has assembled impressive circumstantial evidence that the same thing is happening today with Asians. Just as troublingly, why are elite universities, of all institutions, perpetuating the destructive stereotype that smart people are one-dimensional dweebs? It would be an occasion for hilarity if anyone suggested that Harvard pick its graduate students, faculty, or president for their prowess in athletics or music, yet these people are certainly no shallower than our undergraduates. In any case, the stereotype is provably false. Camilla Benbow and David Lubinski have tracked a large sample of precocious teenagers identified solely by high performance on the SAT, and found that when they grew up, they not only excelled in academia, technology, medicine, and business, but won outsize recognition for their novels, plays, poems, paintings, sculptures, and productions in dance, music, and theater. A comparison to a Harvard freshman class would be like a match between the Harlem Globetrotters and the Washington Generals. What about the rationalization that charitable extracurricular activities teach kids important lessons of moral engagement? There are reasons to be skeptical. A skilled professional I know had to turn down an important freelance assignment because of a recurring commitment to chauffeur her son to a resumé-building “social action” assignment required by his high school. This involved driving the boy for 45 minutes to a community center, cooling her heels while he sorted used clothing for charity, and driving him back—forgoing income which, judiciously donated, could have fed, clothed, and inoculated an African village. The dubious “lessons” of this forced labor as an overqualified ragpicker are that children are entitled to treat their mothers’ time as worth nothing, that you can make the world a better place by destroying economic value, and that the moral worth of an action should be measured by the conspicuousness of the sacrifice rather than the gain to the beneficiary. Knowing how our students are selected, I should not have been surprised when I discovered how they treat their educational windfall once they get here. A few weeks into every semester, I face a lecture hall that is half-empty, despite the fact that I am repeatedly voted a Harvard Yearbook Favorite Professor, that the lectures are not video-recorded, and that they are the only source of certain material that will be on the exam. I don’t take it personally; it’s common knowledge that Harvard students stay away from lectures in droves, burning a fifty-dollar bill from their parents’ wallets every time they do. Obviously they’re not slackers; the reason is that they are crazy-busy. Since they’re not punching a clock at Safeway or picking up kids at day-care, what could they be doing that is more important than learning in class? The answer is that they are consumed by the same kinds of extracurricular activities that got them here in the first place. Some of these activities, like writing for the campus newspaper, are clearly educational, but most would be classified in any other setting as recreation: sports, dance, improv comedy, and music, music, music (many students perform in more than one ensemble). The commitments can be draconian: a member of the crew might pull an oar four hours a day, seven days a week, and musical ensembles can be just as demanding. Many students have told me that the camaraderie, teamwork, and sense of accomplishment made these activities their most important experiences at Harvard. But it’s not clear why they could not have had the same experiences at Tailgate State, or, for that matter, the local YMCA, opening up places for less “well-rounded” students who could take better advantage of the libraries, labs, and lectures. The anti-intellectualism of Ivy League undergraduate education is by no means indigenous to the student culture. It’s reinforced by the administration, which treats academics as just one option in the college activity list. Though students are flooded with hortatory messages from deans and counselors, “Don’t cut class” is not among them, and professors are commonly discouraged from getting in the way of the students’ fun. Deans have asked me not to schedule a midterm on a big party day, and to make it easy for students to sell their textbooks before the ink is dry on their final exams. A failing grade is like a death sentence: just the first step in a mandatory appeal process. It’s not that students are unconditionally pampered. They may be disciplined by an administrative board with medieval standards of jurisprudence, pressured to sign a kindness pledge suitable for kindergarten, muzzled by speech codes that would not pass the giggle test if challenged on First Amendment grounds, and publicly shamed for private emails that express controversial opinions. The common denominator (belying any hope that an elite university education helps students develop a self) is that they are not treated as competent grown-ups, starting with the first law of adulthood: first attend to your priorities, then you get to play. My third surprise was what happens to Harvard students at the other end of the pipeline: they get snatched up by the big consulting and investment firms, helping to explain that 20 percent boost in their expected earnings. Why, I wondered, do these cutthroat institutions hire rowers and baritones who know diddly-squat about business just because they have a transcript with the word “Veritas” on it? Wouldn’t they get more value by hiring the best finance major from Ohio State? I asked some people familiar with this world to explain what seemed to me like a massive market failure. They responded candidly. First, an Ivy degree is treated as a certification of intelligence and self-discipline. Apparently adding a few Harvard students to a team raises its average intelligence and makes it more effective at solving problems. That, the employers feel, is more valuable than specific knowledge, which smart people can pick up quickly in any case. Second, a little education can go a long way. As one business-school professor put it, “I have observed many smart people who have little idea of how to logically think through a problem, who infer causation from a correlation, and who use anecdotes as evidence far beyond the predictability warranted. Most of the undergrads who go to the consulting firms did take a course in social science, and much of this basic logic can be obtained there.” More disconcertingly, I was told that Ivy League graduates are a prestige good: having a lot of them in your firm is like wearing a Rolex or driving a Bentley. Also, if something goes wrong, your keister is covered. As they used to say about computers, “No one ever got fired for buying IBM.” Is this any way to run a meritocracy? Ivy admissions policies force teenagers and their mothers into a potlatch of conspicuous leisure and virtue. The winners go to an exorbitant summer camp, most of them indifferent to the outstanding facilities of scholarship and research that are bundled with it. They can afford this insouciance because the piece of paper they leave with serves as a quarter-million-dollar IQ and Marshmallow test. The self-fulfilling aura of prestige ensures that companies will overlook better qualified graduates of store-brand schools. And the size of the jackpot means that it’s rational for families to play this irrational game. What would it take to fix this wasteful and unjust system? Let’s daydream for a moment. If only we had some way to divine the suitability of a student for an elite education, without ethnic bias, undeserved advantages to the wealthy, or pointless gaming of the system. If only we had some way to match jobs with candidates that was not distorted by the halo of prestige. A sample of behavior that could be gathered quickly and cheaply, assessed objectively, and double-checked for its ability to predict the qualities we value…. We do have this magic measuring stick, of course: it’s called standardized testing. I suspect that a major reason we slid into this madness and can’t seem to figure out how to get out of it is that the American intelligentsia has lost the ability to think straight about objective tests. After all, if the Ivies admitted the highest scoring kids at one end, and companies hired the highest scoring graduates across all universities at the other (with tests that tap knowledge and skill as well as aptitude), many of the perversities of the current system would vanish overnight. Other industrialized countries, lacking our squeamishness about testing, pick their elite students this way, as do our firms in high technology. And as Adrian Wooldridge pointed out in these pages two decades ago, test-based selection used to be the enlightened policy among liberals and progressives, since it can level a hereditary caste system by favoring the Jenny Cavilleris (poor and smart) over the Oliver Barretts (rich and stupid). If, for various reasons, a university didn’t want a freshman class composed solely of scary-smart kids, there are simple ways to shake up the mixture. Unz suggests that Ivies fill a certain fraction of the incoming class with the highest-scoring applicants, and select the remainder from among the qualified applicant pool by lottery. One can imagine various numerical tweaks, including ones that pull up the number of minorities or legacies to the extent that those goals can be publicly justified. Grades or class rank could also be folded into the calculation. Details aside, it’s hard to see how a simple, transparent, and objective formula would be worse than the eye-of-newt-wing-of-bat mysticism that jerks teenagers and their moms around and conceals unknown mischief. So why aren’t creative alternatives like this even on the table? A major reason is that popular writers like Stephen Jay Gould and Malcolm Gladwell, pushing a leftist or heart-above-head egalitarianism, have poisoned their readers against aptitude testing. They have insisted that the tests don’t predict anything, or that they do but only up to a limited point on the scale, or that they do but only because affluent parents can goose their children’s scores by buying them test-prep courses. (…) Paul Sackett and his collaborators have shown that SAT scores predict future university grades, holding all else constant, whereas parental SES does not. Matt McGue has shown, moreover, that adolescents’ test scores track the SES only of their biological parents, not (for adopted kids) of their adoptive parents, suggesting that the tracking reflects shared genes, not economic privilege. (…) After first denying that we have ever tried meritocracy, Deresiewicz concludes by saying that we have tried it, and now should try “democracy” instead, by which he seems to mean a world in which the distribution of incomes of Ivy League families would be identical to that of the country as a whole. But as long as the correlation between wealth and aptitude is not zero, that goal is neither possible nor desirable. Still, he’s right that the current system is harmful and unfair. What he could have said is that elite universities are nothing close to being meritocracies. We know that because they don’t admit most of their students on the basis of academic aptitude. And perhaps that’s what we should try next. Steven Pinker
Parcoursup, le nouveau dispositif d’inscription des bacheliers dans l’enseignement supérieur, introduit des «attendus», fixés par les universités pour l’entrée dans chaque licence. (…) «Attendu» est le terme qui a remplacé celui de «prérequis», jugé un peu trop technique. (…) Comme l’explique la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Frédérique Vidal, «l’université reste ouverte à tous, le bac reste le passeport d’entrée dans le supérieur». Sauf qu’il ne garantit pas une place dans les filières dites «en tension», celles qui ne peuvent répondre à toutes les demandes qui leur sont adressées: «Dans le cas où il manquerait des places, on acceptera prioritairement ceux dont le profil est le plus cohérent avec la formation choisie». Ces filières très demandées sont connues: ce sont les STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives, qui permettent de devenir professeurs d’EPS, entraîneur ou de travailler dans le domaine du sport), le droit, la psychologie… L’année dernière, devant l’afflux de demandes, certaines universités ont dû procéder à des tirages au sort entre les étudiants, un procédé choquant et injuste s’il en est. D’une manière générale, l’université a du mal à faire face à l’afflux d’étudiants supplémentaire –ce fut particulièrement le cas à la rentrée 2016. Et la situation ne va pas aller en s’arrangeant: la France devrait compter 350.000 étudiants supplémentaires d’ici à 2025. (…) En attendant d’hypothétiques constructions de nouvelles universités – il en faudrait dix – et l’allocation de moyens supplémentaires, les universités devront se débrouiller pour fixer leurs critères de sélection. Certains d’entre eux sont évidents: «aptitude à la logique» en droit, «compétences scientifiques» en physique, «bon niveau rédactionnel» en lettres… Mais la situation peut rapidement se compliquer, la définition des critères étant laissée à la discrétion des universités. Encore en cours d’élaboration dans quelques facs, ils se révèlent déjà être très variés, comme le montrent nos confrères de l’Étudiant: « Pour départager des dossiers similaires, les universités valoriseront aussi certains éléments du parcours de lycéen en cohérence avec la formation demandée. En droit, à Cergy-Pontoise, il pourra s’agir des cours de latin ou grec suivis jusqu’en terminale ou encore le fait d’avoir été en classe européenne ou en section internationale. De même, les options “Droit et grands enjeux du monde contemporain” en terminale L et “sciences sociales et politiques »” en ES seront considérées comme un plus dans le parcours de l’élève. L’université d’Aix-Marseille tiendra compte des séjours à l’étranger, de l’engagement citoyen ou associatif… À Bordeaux, en STAPS, les éléments permettant d’apprécier les compétences sportives ou l’investissement associatif seront pris en compte dans l’analyse des dossiers, comme les licences ou le BAFA. Pour certaines formations, un CV détaillant tous ces éléments est ainsi demandé.» Justifier de compétences sportives pour s’engager dans des études en STAPS semble effectivement de bon aloi, mais plusieurs questions se posent en observant la diversité des attendus. Ce nouveau mode de sélection renforce les inégalités entre les bacheliers. Beaucoup des attendus n’ont pas grand-chose à voir avec le parcours scolaire.  (…) La capacité à se valoriser et à mettre ses atouts en avant est très variable suivant les individus; elle recoupe des compétences sociales qui n’ont sans doute pas à entrer en compte comme critère de jugement dans un pays déjà très inégalitaire scolairement –nous sommes champions en la matière. Les activités extra-scolaires dépendent hélas encore beaucoup du milieu d’origine et de l’engagement familial dans le parcours de l’enfant, notamment financier: les inscriptions en club de sport, en cours de musique… ont un coût. De même, faire des «séjours à l’étranger» un attendu confirmé relève purement et simplement du tri social. (…) Toutes les universités ne seront sans doute pas aussi sélectives: seulement une partie des filières sont «en tension», dans quelques villes. À ce titre, on peut craindre le retour du débat sur la différence de valeur des diplômes, comme l’explique la sociologue Annabelle Allouch, auteure de La société du concours: «Les attendus différenciés sont une manière d’objectiver et de mettre en scène les différences et les hiérarchies entre les universités. On suppose alors que certains établissements vont investir les critères (leur nombre élevé, leur nature) comme un élément qui met en scène leur prestige ou leur désirabilité. Les universités qui refusent de jouer le jeu de la réforme vont se trouver reléguées, faute d’avoir des critères clairs. » Un recrutement basé sur les compétences sociales et les activités extra-scolaires s’opère déjà dans de nombreuses filières sélectives et à l’entrée des grandes écoles. Science Po et l’Essec –entre autres– ont dû créer des dispositifs d’ouverture sociale tant il leur était impossible d’offrir autre chose qu’un entre-soi de privilégiés à leurs étudiants. Ce sera désormais peut-être aussi le cas dans certaines universités. (…) Le problème existe depuis longtemps, mais la hiérarchie du supérieur risque de s’en trouver renforcée. En matière de choix voire de «marchés» scolaires, la sociologie nous apprend que les individus s’orientent en fonction de leur niveau d’information, de leur sens tactique –des facteurs très dépendants de leur origines sociales. On le sait, les stratégies éducatives sont l’apanage des catégories les plus favorisées. Louise Tourret
Ce classement, centré sur la recherche, n’est pas pertinent en France. Chez nous, les universités n’ont pas le monopole de la recherche. Le CNRS n’est pas pris en compte par Shanghaï. Thibault Weber (président de la Fage, deuxième fédération étudiante, 2008)
Le classement annuel de Shanghaï (…) 2018 ressemble à celui des années précédentes avec un palmarès dominé par les universités américaines, qui s’arrogent dix-sept des vingt premières places. Harvard, Stanford, Massachusetts Institute of Technology, Berkeley, Princeton et Columbia trustent les premiers rangs. Seules trois universités britanniques parviennent à figurer dans cette élite : Cambridge (3e), Oxford (7e) et l’University College of London (16e). A noter la performance de l’Institut fédéral de Zurich (Suisse), qui se hisse au 19e rang. Le premier établissement français, Sorbonne Université, apparaît au 36e rang. (…) Fondé essentiellement sur des critères relatifs à l’excellence scientifique, et régulièrement critiqué pour ses biais méthodologiques qui favorisent de facto le modèle universitaire anglo-saxon, il avait provoqué une onde de choc au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy. (…) Afin de hisser quelques champions tricolores au sommet de la compétition mondiale, [la ministre Valérie Pécresse] avait accéléré un mouvement de regroupement des universités, des grandes écoles et des centres de recherche dans des structures communes, une politique de fusion poursuivie par ses successeurs. (…) Le classement de Shanghaï, établi par une équipe de l’université Jia Tong, ne considère qu’avec précaution ces regroupements tant que les établissements ne sont pas définitivement fusionnés dans une entité unique : les communautés d’universités et d’établissements (Comue), mises en place en 2013 en France, n’y apparaissent pas, alors qu’elles sont prises en compte par d’autres palmarès, également très suivis à l’international, ceux du magazine Times Higher Education (THE) et du cabinet Quacquarelli Symonds (QS). En outre, pour que leur institution soit créditée de leurs travaux dans le classement de Shanghaï, les chercheurs doivent impérativement signer leurs articles de recherche du nom de la nouvelle entité, ce qui prend du temps à faire accepter et à mettre en place. Ainsi, Sorbonne Université, née cette année de la fusion de l’université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC, Paris-VI) et de Paris-Sorbonne (Paris-IV), n’est donc classée qu’au 36e rang mondial du classement de 2018. Une position qui « confirme Sorbonne Université comme une université de recherche de dimension internationale », s’est félicité l’établissement dans un communiqué. Elle grappille quatre places, par rapport à l’édition 2017, dans laquelle la première française (l’UPMC) était 40e. (…)  mais (…) dans le classement dit « sectoriel » (…) en mathématiques, elle glisse de la troisième place mondiale en 2017 à la neuvième. Reculant dans tous les secteurs, elle perd aussi le statut d’université française la plus citée dans ce palmarès sectoriel. Or, Sorbonne Université dit qu’elle a été pénalisée par « un artefact technique lié au référencement incomplet de la production scientifique de l’université » à la date où les données ont été collectées. « Un pointage fin mars indiquait que seulement deux tiers des publications étaient correctement indexées dans la base qui sert au classement de Shanghaï », avait-elle fait savoir dans un communiqué le 19 juillet. (…) Là où ce processus a pu aboutir, les résultats sont au rendez-vous. L’université de Montpellier a ainsi conquis la première place mondiale dans le classement sectoriel en écologie, dépassant l’université d’Oxford, qui détenait cette palme en 2017. Grenoble Alpes, la Française la mieux représentée dans la dernière édition dévoilée le 17 juillet, apparaît pour sa part dans 35 des 54 disciplines, se hissant même dans onze d’entre elles parmi les cinquante meilleures universités mondiales. Et les établissements français confirment aussi leur place prééminente dans la recherche en mathématiques avec seize établissements dans le top 100 mondial dans cette matière. (…) Mais le biais le plus critiqué du classement tient à ce qu’il donne une prime aux mastodontes américains : « La façon dont il est construit consacre quasiment à vie les dix à quinze premiers établissements, compte tenu du capital, y compris symbolique, dont ils disposent : les prix Nobel parmi leurs anciens élèves, par exemple. C’est ce que l’ARWU appelle les “historical data” [données historiques] », explique Alain Fuchs, président de la Comue Paris sciences et lettres (PSL). Ainsi l’Ecole normale supérieure (ENS) se hisse à la 64e place, gagnant cinq rangs par rapport à 2017, un résultat remarquable étant donné sa petite taille (2 500 étudiants). Enfin, la concurrence est de plus en plus rude avec les pays émergents : « La Chine, Singapour, qui est présente depuis longtemps mais qui s’est fortement renforcée, la Corée du Sud ou des pays du Moyen-Orient ne restent pas les deux pieds dans le même sabot. Quand on progresse, ou même quand on se maintient, ce n’est déjà pas mal. Il est tout à fait possible de s’approcher du top 100, mais y être et y rester est difficile », prévient Patrick Lévy. La France a perdu un établissement dans ce top 500 avec dix-neuf universités en 2018 contre vingt en 2017. Nice-Sophia Antipolis, que présidait la ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal avant de rejoindre le gouvernement, n’y figure plus. Le Monde
Les universités, qui ont de grandes difficultés depuis les années 1960 à accueillir la population étudiante et plus encore à la former, sont quant à elles pleines à craquer. Entre 1980 et 2015, le nombre d’étudiantes et étudiants des universités a plus que doublé, passant de 1,2 million à 2,6 millions. Et la crise semble aujourd’hui avoir atteint un seuil critique. (…) Ce désespoir parfois bruyant est largement étranger aux élèves des grandes écoles. Il en existe plus de 450 (majoritairement en ingénierie et en management), qui accueillent 10% des étudiantes et étudiants français, Bien que ces écoles soient toutes plutôt prestigieuses, certaines le sont plus que d’autres. Les plus connues sont les écoles d’ingénieurs Polytechnique et Centrale, HEC (École des hautes études commerciales), l’ENA (École nationale d’administration) et l’ENS (École normale supérieure) qui, en tant qu’institution formant majoritairement des professeurs en lettres et sciences sociales, est un cas à part. La plupart de ces écoles sont situées en région parisienne et les deux plus anciennes, Polytechnique et l’ENS, ont des origines qui remontent à la Révolution française –il fallait de nombreux ingénieurs et enseignants pour bâtir les fondations de la jeune Première République. Pour des raisons similaires, c’est en tant que chef du gouvernement provisoire que Charles de Gaulle créa l’ENA en 1945, pour fournir à la future IVe République des administrateurs et administratrices n’ayant pas été entachés par l’occupation et la collaboration. Bien que la plupart des grandes écoles sont publiques, elles ressemblent aux universités de la Ivy League, aux États-Unis. Elles sont extrêmement sélectives –à tel point qu’elles demandent souvent deux années d’études dans des classes préparatoires elles aussi très compliquées à intégrer. Comme dans les universités de la Ivy League, il est difficile d’y échouer une fois que l’on y est rentré. Le capital culturel et social que l’on trouve parmi les étudiantes et étudiants des grandes écoles est très important. Le sociologue Pierre Bourdieu décrivait leurs diplômées et diplômés comme une «noblesse d’État», une aristocratie administrative qui, sous le vernis de la méritocratie républicaine, représente moins une rupture qu’une continuation de l’Ancien Régime. Il s’agit en somme d’une méritocratie qui trouve plus de mérites à celles et ceux nés dans un certain type de milieux privilégiés. En 2014, un rapport a montré que 60% des étudiantes et étudiants admis à Polytechnique venaient de familles déjà établies dans ce milieu professionnel, tandis qu’à peine 1% étaient issus de la classe ouvrière. Il n’est donc pas surprenant que nombreuses et nombreux soient celles et ceux qui accusent Polytechnique –et les autres écoles– d’aggraver la crise de l’enseignement supérieur français. L’un des grands projets du président Nicolas Sarkozy a été la création d’un «Cambridge à la française». Il avait été prévu que sous la supervision de l’État, cette méga université naîtrait sur le plateau de Saclay, au sud de Paris. Annoncé en 2010, l’objectif de Sarkozy était de réunir physiquement et sous la même tutelle administrative les établissements les plus prestigieux du pays, pour associer les missions de recherche des universités avec la sélectivité des grandes écoles. Leur génie intellectuel et scientifique combiné devait, selon lui, permettre à la France de retrouver le sommet des classements internationaux des établissements d’enseignement supérieur. La vision de Sarkozy semblait presque répondre au classement de Shanghaï de 2010, dans lequel seules deux universités françaises étaient présentes dans le top 50. Pire encore: l’ENS occupait la 71e place, tandis que Polytechnique était rejetée au-delà du top 200 et récoltait à peine une mention. (…) Malheureusement, l’audace à elle seule ne suffit pas à bâtir un pont pour relier ce qui sépare administrativement et culturellement les universités et les grandes écoles. Les universités craignaient l’étroitesse, le conformisme des admissions sélectives et de la culture pédagogique des grandes écoles, tandis que les grandes écoles veillaient jalousement sur leurs privilèges: une bien meilleure dotation financière et des réseaux de profs et d’élèves dans les plus hautes sphères des secteurs public comme privé. Sarkozy, quant à lui, n’était pas en capacité de déterminer précisément quels aspects de quelles institutions finiraient par dominer. Conséquence: Saclay est largement resté à l’état de chantier depuis l’annonce de Sarkozy, tandis que les principaux acteurs de la question ont continué à s’observer les uns les autres, déterminés à ne pas céder leur autonomie et incapables de regarder au-delà de leurs privilèges institutionnels. (…) Cela n’a pas dissuadé l’État français, ou plus précisément Emmanuel Macron, de tenter. Bien qu’il soit diplômé de deux grandes écoles différentes, Sciences Po et l’ENA, il a tenté de combiner l’esprit d’entreprenariat américain avec le progressisme à la française traditionnel. (…) Rebaptisant le projet de Sarkozy le «MIT à la française», Macron a annoncé que le gouvernement superviserait la création non pas d’une, mais de deux méga-universités. En nommant l’une d’entre elles «Université Paris-Saclay», il a déclaré qu’elle combinerait plusieurs universités, dont Paris-Sud, à certaines grandes écoles. L’autre, affublée du nom temporaire «NewUni», sera dominée par des grandes écoles, y compris Polytechnique, et dirigée par Jean-Lou Chameau –qui bien que français a été pendant plusieurs années à la tête du California Institute of Technology. Même si les détails n’en sont pas encore précisés, il est possible que les deux institutions servent de laboratoire expérimental, chacune d’entre elles disposant d’une chance de se développer suivant ses propres normes pédagogiques et institutionnelles. Il y a là l’audace de Sarkozy, mais aussi la centralisation étatique. La recette de Macron, qui mêle quelques pincées de pragmatisme à un zeste de dirigisme, est un exemple de ce que des spécialistes ont appelé le «dirigisme décentralisé». Vivien Schmidt, une experte en relations internationales, soutient qu’une telle politique, qui délègue le pouvoir de l’État à de plus petites entités administratives, a fonctionné au niveau régional en France. En principe, cette même approche hybride pourrait aussi être utilisée pour faire refleurir le jardin défraîchi qu’est devenu le monde universitaire français. Les classements de Shanghaï sont là pour rappeler que la France ne peut pas risquer de ne pas prendre ce risque. Comme l’a déclaré Macron, «il est trop tard pour faire demi-tour», et il n’est pas plus possible d’avancer sans que l’État ne soit présent pour «consolider, clarifier et multiplier» les avancées de ses institutions. En somme, l’État est mort, vive l’État! Robert Zaretsky

Le dirigisme est mort, vive le dirigisme décentralisé !

Gain de cinq places mais 36e place pour la première université française (grâce à la fusion entre Pierre-et-Marie-Curie (Paris-VI) et Paris-Sorbonne (Paris-IV), gain de cinq places (grâce à ses prix Nobel) mais décevante 36e place pour une ENS victime de sa nanité (2 500 étudiants), première place mondiale en classement sectoriel de Montpellier (en écologie devant Oxford) mais recul – regroupement oblige – de cinq places de Pierre et Marie Curie en mathématiques, éjection pure et simple de Sophia-Antipolis …

Alors qu’avec une nouvelle publication du classement de Shanghaï

Qui voit sans surprise le renforcement de la domination des universités anglo-saxonnes (10 premières places dont 8 américaines, 19 des 20 premières, dont 16 américaines) …

Pourtant elles-mêmes critiquées pour le véritable « potlach de loisirs et de vertu ostentatoires » à laquelle, au détriment du mérite académique et sans compter l’origine ethnique, les dons à l’université ou le parrainage familial, se réduit de plus en plus leur mode de recrutement « holistique » entre activités sportives, caritatives, militantes ou touristiques …

Retour …

Avant les effets nécessairement futurs de l’actuelle introduction, timide mais controversée, de sélection à l’entrée de l’université (Parcourplus) …

Incluant, au moment on l’a vu où les Américains commencent à les remettre en question, les critères des compétences sociales et des activités extra-scolaires

Sur le bilan mitigé des tentatives de regroupement d’universités et de rapprochement facs-grandes écoles …

Notamment le fameux projet sarkozien de « Cambridge à la française » récemment repris et macronisé comme « MIT à la française » …

Censé remplacer à l’ère de Monsieur « Et-en-même-temps » lui-même …

Les de moins en moins confortables ornières de l’étatisme historique pour les progrès pour l’instant tout relatifs du « dirigisme décentralisé » …

Vu des États-Unis, l’enseignement supérieur français est un champ de bataille

«Cambridge» ou «MIT à la française», les tentatives de rapprochement entre facs et grandes écoles peinent pour l’instant à faire leur preuves.

La version originale de cet article a été publiée en anglais sur le site américain Foreign Policy.

Depuis 1789, la France est le théâtre permanent des dites «guerres franco-françaises», selon l’expression qui renvoie à l’ensemble des conflits idéologiques et politiques qui déchirent toujours le pays aujourd’hui.

La monarchie contre la République, la religion contre la raison, la droite contre la gauche et Paris contre la province: quelles que soient les oppositions, elles sont toutes nourries par l’héritage idéologique de la Révolution française.

Au cours des derniers mois, un match entre deux poids lourds académiques s’est ajouté de façon paradoxale à la liste de ces guerres. D’un côté, le challenger: la grande école, âgée d’environ deux siècles; de l’autre, le poids lourd: l’université et son demi-millénaire d’histoire. De façon surprenante, le système de l’université, en dépit de son origine médiévale, se révèle plus égalitaire, tandis que les grandes écoles, pourtant nées de la Révolution française, sont devenues plus élitistes.

Le conflit a récemment culminé dans la tentative du président Emmanuel Macron de prendre en compte et de réconcilier les deux systèmes. À sa façon, Macron, bien qu’il soit un brillant produit des si typiquement françaises grandes écoles, tente d’utiliser le système d’enseignement supérieur français comme véhicule de la transformation du pays à son image, plutôt atlantiste.

Universités pleines à craquer

La plupart des Françaises et Français déplorent ou se vantent de leur double système d’enseignement supérieur. Les universités en constituent la partie la plus ancienne; la Sorbonne, qui attire les étudiantes et étudiants de toute l’Europe, a été fondée au XIIIe siècle. Et tandis que l’État, basé à Paris, étendait son pouvoir sur le territoire siècle après siècle, les universités se développaient en parallèle.

Il existe aujourd’hui en France quatre-vingt cinq universités, qui garantissent –du moins en théorie– une admission libre. Tout ce dont a besoin un candidat ou une candidate, c’est du baccalauréat.

Dans le passé, la difficulté à obtenir le diplôme du «bac» servait dans les faits à sélectionner les étudiantes et étudiants. Mais les lycées français, tout comme ceux des États-Unis, sont sujets à l’inflation des notes et le bac, qui fut un jour un événement craint que peu traversaient avec succès et après lequel encore moins continuaient les études, est devenu une simple formalité. En 2017, près de 88% des candidates et candidats ont obtenu le baccalauréat.

Les universités, qui ont de grandes difficultés depuis les années 1960 à accueillir la population étudiante et plus encore à la former, sont quant à elles pleines à craquer. Entre 1980 et 2015, le nombre d’étudiantes et étudiants des universités a plus que doublé, passant de 1,2 million à 2,6 millions. Et la crise semble aujourd’hui avoir atteint un seuil critique.

Elle a été aggravée plus encore par la tentative du gouvernement de mettre en place une forme d’admission sélective. Comment on pouvait le prévoir, les étudiantes et étudiants d’une douzaine d’universités se sont mis en grève, des bâtiments ont été occupés, des discours déclamés et des murs couverts de graffitis.

Mais comme le disait Karl Marx des révolutionnaires de 1848, l’histoire se répète d’abord en tragédie, puis en farce. Les bloqueurs et bloqueuses étaient rares; la majorité des jeunes voulaient simplement passer leurs examens normalement et ont dirigé leur frustration non pas tellement contre l’administration, mais surtout contre leurs camarades qui empêchaient l’accès aux salles de classe.

Mais même lorsque les étudiantes et étudiants peuvent passer leurs examens et recevoir leur diplôme, leur futur reste sombre. Peu d’employeurs souhaitent embaucher à un niveau important d’études, particulièrement en lettres et sciences humaines, et la jeunesse française est la moins optimiste d’Europe.

Très sélectives grandes écoles

Ce désespoir parfois bruyant est largement étranger aux élèves des grandes écoles. Il en existe plus de 450 (majoritairement en ingénierie et en management), qui accueillent 10% des étudiantes et étudiants français, Bien que ces écoles soient toutes plutôt prestigieuses, certaines le sont plus que d’autres. Les plus connues sont les écoles d’ingénieurs Polytechnique et Centrale, HEC (École des hautes études commerciales), l’ENA (École nationale d’administration) et l’ENS (École normale supérieure) qui, en tant qu’institution formant majoritairement des professeurs en lettres et sciences sociales, est un cas à part.

La plupart de ces écoles sont situées en région parisienne et les deux plus anciennes, Polytechnique et l’ENS, ont des origines qui remontent à la Révolution française –il fallait de nombreux ingénieurs et enseignants pour bâtir les fondations de la jeune Première République. Pour des raisons similaires, c’est en tant que chef du gouvernement provisoire que Charles de Gaulle créa l’ENA en 1945, pour fournir à la future IVe République des administrateurs et administratrices n’ayant pas été entachés par l’occupation et la collaboration.

Bien que la plupart des grandes écoles sont publiques, elles ressemblent aux universités de la Ivy League, aux États-Unis. Elles sont extrêmement sélectives –à tel point qu’elles demandent souvent deux années d’études dans des classes préparatoires elles aussi très compliquées à intégrer. Comme dans les universités de la Ivy League, il est difficile d’y échouer une fois que l’on y est rentré.

Le capital culturel et social que l’on trouve parmi les étudiantes et étudiants des grandes écoles est très important. Le sociologue Pierre Bourdieu décrivait leurs diplômées et diplômés comme une «noblesse d’État», une aristocratie administrative qui, sous le vernis de la méritocratie républicaine, représente moins une rupture qu’une continuation de l’Ancien Régime.

Il s’agit en somme d’une méritocratie qui trouve plus de mérites à celles et ceux nés dans un certain type de milieux privilégiés. En 2014, un rapport a montré que 60% des étudiantes et étudiants admis à Polytechnique venaient de familles déjà établies dans ce milieu professionnel, tandis qu’à peine 1% étaient issus de la classe ouvrière. Il n’est donc pas surprenant que nombreuses et nombreux soient celles et ceux qui accusent Polytechnique –et les autres écoles– d’aggraver la crise de l’enseignement supérieur français.

Saclay et l’«audace» de Sarkozy

L’un des grands projets du président Nicolas Sarkozy a été la création d’un «Cambridge à la française». Il avait été prévu que sous la supervision de l’État, cette méga université naîtrait sur le plateau de Saclay, au sud de Paris.

Annoncé en 2010, l’objectif de Sarkozy était de réunir physiquement et sous la même tutelle administrative les établissements les plus prestigieux du pays, pour associer les missions de recherche des universités avec la sélectivité des grandes écoles. Leur génie intellectuel et scientifique combiné devait, selon lui, permettre à la France de retrouver le sommet des classements internationaux des établissements d’enseignement supérieur.

La vision de Sarkozy semblait presque répondre au classement de Shanghaï de 2010, dans lequel seules deux universités françaises étaient présentes dans le top 50. Pire encore: l’ENS occupait la 71e place, tandis que Polytechnique était rejetée au-delà du top 200 et récoltait à peine une mention.

Faisant écho à la fameuse exhortation de Danton pendant la Révolution, Sarkozy avait déclaré que tout ce qu’il fallait pour combler l’écart, c’était de l’audace. Malheureusement, l’audace à elle seule ne suffit pas à bâtir un pont pour relier ce qui sépare administrativement et culturellement les universités et les grandes écoles.

Les universités craignaient l’étroitesse, le conformisme des admissions sélectives et de la culture pédagogique des grandes écoles, tandis que les grandes écoles veillaient jalousement sur leurs privilèges: une bien meilleure dotation financière et des réseaux de profs et d’élèves dans les plus hautes sphères des secteurs public comme privé. Sarkozy, quant à lui, n’était pas en capacité de déterminer précisément quels aspects de quelles institutions finiraient par dominer.

Conséquence: Saclay est largement resté à l’état de chantier depuis l’annonce de Sarkozy, tandis que les principaux acteurs de la question ont continué à s’observer les uns les autres, déterminés à ne pas céder leur autonomie et incapables de regarder au-delà de leurs privilèges institutionnels.

«Société bloquée»

La plus intransigeante de ces institutions aura été Polytechnique. Comme l’a fait remarquer un observateur, «l’X [le surnom sous lequel est connue l’école] s’est toujours vue comme la meilleure école non seulement de France, mais également d’Europe et du monde».

La conviction de l’X qu’elle est une institution «pas comme les autres» trouve écho dans la place qui lui est traditionnellement dévolue lors de la célébration du 14-Juillet. Depuis le XIXe siècle, elle est avec l’école militaire de Saint-Cyr la seule institution d’enseignement supérieur à défiler. Dans leur tenue qui les fait ressembler aux officiers de la Marine britannique dans Pirates des Caraïbes, un uniforme bleu-gris à plastron et un tricorne aux bords dorés, les étudiantes et étudiants marchent sous le drapeau de l’école, où est inscrit la devise: «Pour la patrie, pour les sciences, pour la gloire».

À cette devise, Michel Crozier aurait pu ajouter «pour la fraternité». Le grand sociologue français avait formulé le célèbre diagnostic selon lequel la France serait une «société bloquée», par quoi il entendait que les institutions de la nation étaient gelées dans des configurations autoritaires laissant peu de place pour l’initiative individuelle et l’innovation.

Chancelant sous l’éternelle tradition du dirigisme à la française, qui veut que les individus proposent et que l’État dispose, les Françaises et Français n’étaient pas enclins, selon Crozier, à prendre «le risque de la liberté» en réformant ou en décentralisant les institutions –comme l’évoquait le titre d’un de ses ouvrages, On ne change pas la société par décret.

Macron et le dirigisme décentralisé

Cela n’a pas dissuadé l’État français, ou plus précisément Emmanuel Macron, de tenter. Bien qu’il soit diplômé de deux grandes écoles différentes, Sciences Po et l’ENA, il a tenté de combiner l’esprit d’entreprenariat américain avec le progressisme à la française traditionnel.

À la fin de l’année dernière, Macron a reconnu que les institutions d’enseignement françaises avaient besoin d’être réformées: «À chaque fois que nous mettons trop d’énergies dans des guerres intestines, nous ralentissons l’histoire quand l’histoire s’accélère. Certains ont joué le jeu, d’autres ont montré leur résistance». Le président a également souligné que le changement ne viendrait qu’en travaillant en coopération avec les institutions existantes et en respectant leur singularité.

Rebaptisant le projet de Sarkozy le «MIT à la française», Macron a annoncé que le gouvernement superviserait la création non pas d’une, mais de deux méga-universités. En nommant l’une d’entre elles «Université Paris-Saclay», il a déclaré qu’elle combinerait plusieurs universités, dont Paris-Sud, à certaines grandes écoles. L’autre, affublée du nom temporaire «NewUni», sera dominée par des grandes écoles, y compris Polytechnique, et dirigée par Jean-Lou Chameau –qui bien que français a été pendant plusieurs années à la tête du California Institute of Technology. Même si les détails n’en sont pas encore précisés, il est possible que les deux institutions servent de laboratoire expérimental, chacune d’entre elles disposant d’une chance de se développer suivant ses propres normes pédagogiques et institutionnelles.

Il y a là l’audace de Sarkozy, mais aussi la centralisation étatique. La recette de Macron, qui mêle quelques pincées de pragmatisme à un zeste de dirigisme, est un exemple de ce que des spécialistes ont appelé le «dirigisme décentralisé».

Vivien Schmidt, une experte en relations internationales, soutient qu’une telle politique, qui délègue le pouvoir de l’État à de plus petites entités administratives, a fonctionné au niveau régional en France. En principe, cette même approche hybride pourrait aussi être utilisée pour faire refleurir le jardin défraîchi qu’est devenu le monde universitaire français.

Les classements de Shanghaï sont là pour rappeler que la France ne peut pas risquer de ne pas prendre ce risque. Comme l’a déclaré Macron, «il est trop tard pour faire demi-tour», et il n’est pas plus possible d’avancer sans que l’État ne soit présent pour «consolider, clarifier et multiplier» les avancées de ses institutions. En somme, l’État est mort, vive l’État!

Voir aussi:

La formation des grandes écoles, critiquée de part et d’autre de l’Atlantique