Media lied, people died: President Bush on Skynews (Sep. 2005)
Un extrait de la véritable somme (quelque 50 pages !) que vient d’écrire l’universitaire francophone de Baton Rouge, Alexandre Leupin, sur l’ouragan de désinformation et d’antiaméricanisme qui a suivi, ici et là-bas, Katrina. A lire d’urgence sur son blog.
Katrina : un ouragan d’antiaméricanisme
Alexandre Leupin
« Hell is truth seen too late. » Thomas Hobbes
L’âge de la désinformation
Je préface cette section par quelques observations d’ordre général. Depuis 2000, la gauche essaie de blâmer Bush pour tous les maux du village global. Les démocrates n’ont pas digéré une victoire que les multiples recomptages des bulletins de vote de Floride ont sanctionnée comme légitime, certes par une marge minuscule. Bush devient le bouc émissaire pour tous les malheurs du monde. Cette stratégie est futile : elle se retourne de fait, à chaque fois, contre les démocrates (voir l ’Irak en 2003, l ’élection en 2004, avec les républicains qui reconduisent non seulement le président, mais accèdent au contrôle du Congrès). L’opération se répète avec Katrina, tout est la faute de Bush.
Il est curieux que les démocrates américains ne changent pas de tactique après cinq ans de vains efforts. Lorsqu’une catastrophe arrive, ils semblent afficher, aux yeux du public, leur manque du sens de l ’état, s’épuiser en cas de crise nationale, il faut mettre les intérêts partisans en veilleuse et appeler à un effort positif, au lieu de récriminer à chaque fois sur les failles du système, réelles et inventées, et d’accuser Bush de tous les maux. Le parti démocrate finit par effrayer les électeurs qui se demandent à bon droit ce qu ’ils feraient pour les protéger en cas de catastrophe. Par ailleurs, ces attaques ne peuvent avoir qu’un seul but, le court terme, Bush ne pouvant se représenter en 2008. Il s’agit donc seulement de l’affaiblir le plus possible, et ce au milieu d’une crise nationale. La gauche américaine mine sa propre crédibilité, et c’est grave dans le sens où un système démocratique a besoin de deux partis responsables pour fonctionner. Je n’avance nullement que les républicains et Bush soient toujours au dessus de tout reproche, loin de là (voir plus bas); mais on a la nette impression que la gauche américaine (et l’extrême gauche a fortiori) sont des poissons dans un bocal qui se félicitent des bulles qu ’ils produisent, sans savoir qu’il y a un océan à côté. Leurs attaques n’ont d’effet que sur les déjà convertis, elles sont de fort peu de conséquence sur l’ensemble de la population ; depuis 2000, j’ai répété à qui voulait m’entendre que la haine de Bush n’est ni un programme électoral, ni un projet gouvernemental, ni rien du tout. Je réitère que la critique est certes autorisée, souvent justifiée, mais nulle et non avenue quand elle est systématique et ne connaît aucune exception. Bush n’était pas sur place, il est insensible et lent, quand il arrive ce n’est qu’une occasion pour une photo de propagande gouvernementale (textuel, de la bouche de la sénatrice démocrate de Louisiane, Mary Landrieu). Rien n’y fait, il n’est de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. L’avenir seul peut nous dire si Katrina est une exception à cette règle et endommagera durablement la cote de popularité du président ; j’ai tendance à penser que les espoirs des démocrates seront encore une fois déçus.
Je laisse de côté les réactions de l’establishment du divertissement hollywoodien, lui aussi anti-Bush et anti-républicain dans son immense majorité. Je ne peux cependant résister à raconter la mésaventure de Sean Penn , qui arrive à la Nouvelle-Orléans et affrète un bateau pour sauver des survivants après avoir éructé les obligatoires slogans- bien-sentis contre l’administration fédérale. Mais le bateau n’a pas le petit bouchon de fond de cale et commence à couler, et Sean commence à écoper frénétiquement. Jusqu’ici, rien de bien grave. Mais, dans le bateau, il y avait aussi ses deux photographes personnels, ce n’était donc qu’un spot publicitaire.
Suis-je alors un inconditionnel de Bush ? À vrai dire, l’amour et l’identification au grand chef m’ont abandonné après ma période maoïste (tard, trop tard, mais j’ai l’esprit d’escalier). Ma version du maoïsme était à classer sous l’étiquette « Comment emm… mon père avec les feuillets du petit livre rouge ». En 1982, je suis arrivé vaguement socialiste mais fermement anticommuniste dans un pays que je croyais préfasciste – contrairement aux leçons de l’histoire, tous les totalitarismes étant nés, soit en Europe, soit en terre musulmane. Peu à peu, je m’aperçois que les seuls et derniers totalitaires se sont réfugiés dans l’Université américaine. Marxistes aigris, révolutionnaires en peau de lapin qui n’ont jamais rien fait pour le prolétariat au nom duquel ils croient parler, belles-âmes hégéliennes pour lesquelles dire c’est faire, miliciens de la correction politique, apôtres du multiculturalisme pour lesquels l’Occident est source de tous les maux de la terre, cette faune peuple les facultés. Le pays, à l’inverse, est terre de liberté et de démocratie. Dans tous les domaines, je découvre un pays d’un dynamisme, d’une ouverture d’esprit et d’une générosité dont la plupart des Européens n’ont pas la moindre idée (bien entendu, loin de moi l’idée que les Etats-Unis d’Amérique soit au-delà de tout critique, un Eden sans tache ; mais la critique doit être fondée en raison et en fait, non dans le fantasme, la désinformation et le mythe) ; et ma mentalité d’éternel assisté de l’état m’abandonne. Tout cristallise le 12 septembre 2001 : d’un coup, je me sens profondément américain, et entièrement solidaire des victimes innocentes du WTC. Les mois et les années qui suivent approfondiront ma conviction que la gauche américaine, à de rares exceptions près [i] , n’a aucune solution pratique à proposer pour contrer la terreur islamo-fasciste qui monte. En 2004, Bush, avec tous ses défauts, m’apparaît comme un moins mauvais choix que Kerry, milliardaire (qui parlait au nom des pauvres), médaillé militaire (mais qui était contre toutes les guerres), proposant, en guise de politique étrangère, une machine à remonter le temps qui nous transporterait avant le 11 septembre : « We have to come back to a pre-9-11 foreign policy ». Comme beaucoup d’anciens de gauche, je suis donc « à droite » par défaut : tant que la gauche américaine dans son ensemble ne présente pas d’idées réalistes et crédibles quant à la sécurité nationale (et mondiale) et n’abandonne pas le multiculturalisme [ii] qui l’aveugle sur l’islamisme, je m’abstiendrai de la soutenir.
Serais-je alors, comme on m’en a accusé, un agent de la CIA ? [iii] Ma seule source d’information est-elle Fox News, et tous les autres canaux sont de la neige ? Nullement. Mais le déséquilibre médiatique m’engage à diversifier mes sources, Fox News n’étant pour moi qu’un contrepoids indispensable à un anti-Bushisme majoritairement répandu. Contrepoids honnête, puisque, à l’encontre des autres médias nationaux, il affiche d’emblée ses choix politiques et idéologiques et les assume. De même, je consulte beaucoup les blogs de tous bords politiques. Souvent, ils recadrent ou même amènent au jour des nouvelles que les médias traditionnels passent sous silence, et, tout comme Fox News, ces blogs affichent d’emblée leur coloration idéologique : je sais donc à quoi m’attendre, au contraire des médias traditionnels, qui n’avouent jamais leur orientation politique. Celle-ci est cependant facile à déterminer : 85% des journalistes aux Etats-Unis votent démocrates ; lorsqu’un expert universitaire passe à la TV, il est à peu près sûr qu’il est anti-Bush : 80%, des professeurs d’université, 97% à Dartmouth College, ont contribué à la campagne de Kerry en 2004 ; nous avons affaire dans les journaux et les universités à une nomenklatura idéologique homogène qui se coopte, se reproduit à l’infini, et qui est, dans le cas du professorat universitaire, protégée à vie par la titularisation.
Les Français ont aussi la plus grande peine à saisir la structure des médias télévisuels américains. Ceux-ci sont tous en mains privées, sans chapeautage étatique, au contraire de la France. De plus, seule les grandes chaînes nationales, ABC, CBS, et MSNBC sont reçues partout (par satellites). FOX et CNN ne touchent que les abonnés au câble optique. Aucune chaîne ici ne jouit d’un monopole (étatique ou non), personne ne reçoit les subventions pharamineuses d’une redevance gouvernementale, nul n’a besoin d’une autorisation fédérale autre que technique pour lancer une station de radio ou une chaîne de télévision. Nul média américain, à l’encontre la télévision française publique n’est la voix de son maître. Fox News, considérée par les français comme le caniche de la Maison Blanche, n’hésite pas à critiquer Bush et à présenter des débats contradictoires sur sa politique.
Dans cet environnement médiatique, il faut tout aborder avec des précautions épistémologiques élémentaires ; les idéologèmes ne s’affichent pas seulement dans les éditoriaux, ils vont se dissimuler sous l’information apparemment objective. Un exemple : un article récent du New York Times, fourni et intéressant, mais où tout est fait pour minimiser les responsabilités locales en Louisiane (démocrates, féminines et noires) et pour maximiser les failles de l’administration fédérale (républicaine, blanche et masculine).
Or, J’ÉCRIRAIS EXACTEMENT LA MÊME CHOSE SI LES RÔLES AVAIENT ÉTÉ RENVERSÉS, avec un président démocrate attaqué vicieusement par les républicains et les médias au milieu d’une crise nationale (et j’ai la certitude que les républicains se livreraient au jeu avec la même férocité que les démocrates aujourd’hui ; la Somalie, le Kosovo, Monica Lewinsky, autant de preuves de leur hargne partisane quand un démocrate, Clinton, est au pouvoir). Il est inadmissible que des politicards et intellectuels de quelque obédience qu’ils soient, véritables vautours du malheur, se servent d’une catastrophe naturelle pour affaiblir leurs adversaires politiques. Cette fois, par hasard conjoncturel, ce sont les vautours démocrates du bac de sable washingtonien qui ont commencé la bagarre dans la cour de récré. Ç’eût parfaitement pu être l’inverse.
Depuis 2000, les récriminations anti-Bush, d’une véhémence partisane, dans les médias nationaux américains, CNN, le Washington Post, le New York Times ou le Los Angeles Times ne connaissent aucune trêve. Jusqu’ici, rien que de très normal dans une démocratie : une presse libre et critique est indispensable au fonctionnement des institutions. J’ai acquis, au cours de mes années en terre américaine, une révérence quasi-religieuse pour le premier amendement de la Constitution, qui garantit la liberté de parole (et aussi une vénération sans limites pour l’ensemble du document, depuis 1776 un des grands monuments de la pensée humaine). Tout se gâte (à gauche et à droite d’ailleurs), quand la coloration idéologique quitte la colonne des éditoriaux pour s’infiltrer partout dans l’information. Un exemple directement pertinent quant à Katrina : le New Times clame à cor et à cri que Bush a miné les levées par ses coupures budgétaires (un mythe, les subsides de l’Army Corps of Engineers ayant été augmentés par rapport aux années Clinton). Mais en 1993, 2004 et 2005, le même journal était contre une augmentation des subsides . Ces médias nationaux, fortement marqués dans leur idéologie partisane, sont aussi parmi les sources les plus utilisées par les journalistes français, qui s’en inspirent sur le plan de l’information comme sur le plan de la politique, en y rajoutant un grain de sel le plus souvent anti-américain. Tout conforte donc le public non seulement américain, mais aussi français, dans son ignorance ; l’information orientée, sélective, les silences judicieusement choisis, les contrevérités, la désinformation deviennent la vérité absolue sur les États-Unis. Entre autres exemples : en 2002, la surprise de la presse française de voir l’opération contre les Talibans réussir alors que beaucoup prévoyaient un nouveau Vietnam en Afghanistan ; l’ébahissement se répète en 2003, de voir l’armée américaine conquérir l’Irak en 15 jours (l’opération militaire la plus rapide de tous les temps, avec les lignes logistiques les plus longues), alors que tous les jours les journaux dans leur ensemble, et non sans Schadenfreude, parlait de l’enlisement, de Stalingrad, du Vietnam, etc. (voir le livre d’ Alain Hertoghe ,La guerre à outrance – qu’il a d’ailleurs payé de son poste au journal La Croix); ou, en 2004, la stupéfaction de la presse française de voir Bush enfoncer Kerry, qu’elle donnait gagnant à coup sûr. Pourquoi Katrina ferait-elle exception ? Ce qui est certain, c’est que le public français (et aussi américain, dans une moindre mesure parce qu’il a accès à des sources d’information mieux diversifiées), est désinformé par des journalistes et des éditorialistes qui à la fois le flattent dans son anti-américanisme et produisent cet anti-américanisme, tout en exposant leur ignorance profonde du pays qu’ils couvrent [iv] . Ce n’est pas un problème qui date d’hier, Philippe Roger en a documenté très soigneusement les étapes dans son livre, L’ennemi américain .
J’avais réagi à chaud après le 11 septembre (les réactions médiatiques aux catastrophes semblent m’inspirer [v] ). Or, en ce qui concerne les réactions à l’événement, mutatis mutandis , quatre ans plus tard, rien n’a changé. Au contraire, on peut constater une pétrification effrayante des opinions, une paresse et un immobilisme intellectuels de plus en plus ravageurs.
Quand on lit la majorité de la presse française, on est toujours surpris de son quasi unanimisme anti-américain, un unanimisme qui, bien sûr, ne manque pas une occasion de dénoncer « la pensée unique » qui règnerait en maîtresse Outre-Atlantique. Et ceci, en dépit de toutes les évidences : les Etats-Unis ont les médias contradictoires et contradicteurs les plus dynamiques du monde. Les lecteurs français du Monde, de Libération, de Marianne, de Paris Match, du Nouvel Observateur devraient s’étonner d’être étonnés. Depuis 50 ans, on leur peint les Etats-Unis sous les traits les plus noirs, on décrit la faillite imminente d’une société quasi-fasciste qui ne produit que violence et exploitation. Ce bon public devrait quand même se poser des questions sur la qualité de l’information qui lui est fournie. Car il se trouve que les Etats-Unis ne s’effondrent toujours pas, que la démocratie perdure, que la croissance économique y est l’une des plus vigoureuses des pays avancés, que cette nation d’imbéciles dirigée par un idiot rafle la majorité des prix Nobel en sciences, que les dépôts de brevets d’invention écrasent en nombre toutes les autres nations, que parmi les 20 meilleures universités du monde, 18 se trouvent être américaines (la France brillant par son absence en tête du classement). Il y a hiatus pathologique entre la réalité des Etats-Unis et l’image qu’en ont de nombreux Européens. « Schadenfreude », ressentiment, jalousie, complexe d’infériorité, sentiment d’impuissance trouvent un exutoire dans le « fantasme américain » fabriqué par les médias européens. Fort souvent, les Etats-Unis sont mesurés à l’aune d’une société utopique parfaite, fantasme par rapport auquel, bien entendu et par définition, elle se trouvera toujours en défaut. Remarquez que les fauteurs de cette opération médiatique se gardent bien d’appliquer cette norme inatteignable à leur propre pays parce que l’écart entre l’utopie et la réalité paraîtrait alors un gouffre infranchissable. La « rue (ou le téléphone) arabe », c’est nous !
Il faut évidemment nuancer : on trouve de tout dans les journaux français. Il y a ceux qui désinforment par haine viscérale de Bush, mais qui ne sont pas antiaméricains (bien que la ligne de démarcation entre anti-bushisme et anti-américanisme soit souvent bien difficile à tracer). Il y en a d’autres qui portent au cœur une exécration farouche de tout ce qui est américain, qui se réjouissent de tous les malheurs des États-Unis, et qui, contre toute évidence, n’auront jamais rien à dire de positif sur ce pays. Il y a enfin une minorité qui s’efforce à l’impartialité et à la raison.
La couverture de Katrina par les médias français est à cet égard révélatrice : les titres se concentrent, comme ceux du New York Times, sur la responsabilité unique et singulière de Bush, aux dépens des responsabilités locales, des contraintes historiques et géographiques, des limites constitutionnelles qui rendaient le résultat inéluctable (voir plus haut). Un exemple type extrait du Monde (ne recevant pas la TV française, je m’abstiendrai de la commenter) :
Les ravages de Katrina accusent le système Bush
Article paru dans l’édition du 08.09.05
LES RAVAGES du cyclone Katrina, qui a englouti La Nouvelle-Orléans et provoqué plusieurs milliers de morts – dix mille selon certaines estimations -, provoquent aux Etats-Unis un débat sur le modèle de gouvernement de George Bush. Pour certains commentateurs, c’est la page du 11 septembre 2001 qui se tourne, et l’on assiste peut-être à la fin du conservatisme triomphant. « La première tâche d’un gouvernenement est de protéger ses citoyens », a déclaré Susan Collins, sénatrice du Maine et représentante de la tendance modérée du Parti républicain. Elle estime que, dans la première phase de sa réponse à la catastrophe, le gouvernement « a failli à sa mission ». Pour John Edwards, ancien candidat démocrate à la vice-présidence, Katrina a « donné un visage » aux 37 millions d’Américains qui vivent dans la pauvreté. C’est le cas de 25 % des Noirs, dont certains se demandent si la couleur de leur peau n’explique pas, en partie, la lenteur des secours.
Seul responsable, ici, le « modèle de gouvernement de George Bush » (on peut se demander en quoi il diffère de celui de Clinton, la Constitution n’ayant pas été abrogée, à ma connaissance, et Clinton étant beaucoup plus proche de Bush que Chirac, pour prendre un exemple).
Un autre exemple, tiré du Monde :
« Contrôle des dégâts » après Katrina, par Dominique Dhombres
Article paru dans l’édition du 14.09.05
Le changement de ton est spectaculaire. Lundi encore, George Bush, en bras de chemise, au côté du maire de La Nouvelle-Orléans, ne voulait pas admettre sa responsabilité dans l’échec des secours après le passage du cyclone Katrina. « Je n’ai pas envie de jouer à ce petit jeu de savoir qui a failli. C’est ce que vous me poussez à faire, non ? » , rétorquait-il à une journaliste.
Mardi, dans un décor nettement plus solennel, à la Maison Blanche, il se livrait précisément à cet exercice. On pouvait voir la scène en direct sur CNN. L’occasion lui en était fournie par la visite du président irakien Jalal Talabani. Autre contexte, même question. Et, cette fois, George Bush battait sa coulpe : « Katrina a révélé de sérieux problèmes dans notre capacité de réaction à tous les niveaux de l’Etat. Dans la mesure où le gouvernement fédéral n’a pas totalement fait son travail, j’en prends la responsabilité. »
Une vaste opération de « contrôle des dégâts » , comme disent les experts en relations publiques, est en cours. Elle devrait culminer, vendredi à La Nouvelle-Orléans, avec un grand discours du président. Ce sera la quatrième visite de George Bush en quinze jours dans la région. Les conseillers du président espèrent que celle-ci sera la bonne. Il y a en effet péril en la demeure. La popularité de George Bush est en chute libre. Des propos, impensables jusqu’ici, sont tenus. « S’il dit encore une fois que c’est la faute des autorités locales, je lui mets ma main sur la figure » , s’écrie, exaspérée, une sénatrice démocrate de Louisiane.
Une autre femme, Kathleen Blanco, gouverneure de l’Etat, a annoncé que devant la carence des organismes fédéraux elle faisait appel à une entreprise privée pour ramasser les cadavres. Il en reste encore dans les rues de La Nouvelle-Orléans, et ces images de corps en décomposition abandonnés depuis deux semaines reviennent régulièrement dans les journaux télévisés.
George Bush a donc opéré un prudent recul stratégique. Il n’en est pas encore au point d’admettre ce que les témoins répètent pourtant à satiété devant les caméras : dans les jours qui ont suivi le passage du cyclone, le pouvoir fédéral avait tout simplement déserté.
Décortiquons : d’abord, la naïveté ou la complicité : le signataire ne voit pas que l’establishment louisianais essaie à toute force de sauver sa peau en faisant endosser toute la culpabilité de son incompétence (démontrée publiquement) à Bush et au gouvernement fédéral. L’auteur, sans s’en rendre compte, se fait le relais d’une opération idéologique et médiatique aux objectifs pourtant transparents. Ensuite, la désinformation et/ou l’ignorance : la faillite des premières lignes de défense locale, les problèmes constitutionnels, Blanco qui ne demande pas l’intervention des corps fédéraux de la National Guard, Nagin qui n’évacue pas le Superdome et le Convention Center, les politiciens qui se sont engraissés grâce aux subsides des digues, rien n’est mentionné ; en lieu et place, on dénigre Bush et on ricane : « Mais il a une façon bien à lui de reconnaître ses responsabilités. « Je veux savoir ce qui s’est bien passé et ce qui s’est mal passé. Je veux savoir comment mieux coopérer avec les autorités locales”, dit-il. », De tout évidence, la question n’a pas effleuré Dominique Dhombres: pourquoi diable, au nom de quelle logique, Bush, qui accepte les manquements du gouvernement fédéral, devrait-il aussi porter les responsabilités de tout ce qui incombe au premier chef à la municipalité de la Nouvelle-Orléans et à l’État de Louisiane ?
Et pourquoi la question ne vient-elle pas à l’esprit de Dhombres ? Parce que ses lorgnettes idéologiques scannent la réalité et affichent : « Bush, mâle, blanc, républicain, fauteur de guerre = pas bon, très méchant, pourri, imbécile, incompétent, toujours responsable de tout ; gouverneure, sénatrice, maire, femmes, démocrates, noir = y’a tout bon, tout vrai, tout pur, tout innocent, tout gentil, incorruptible, super compétents, hyper intelligents ! »
Vu d’ici, le Monde s’inscrirait dans la première catégorie : les anti-Bush viscéraux, qui ne sont pas systématiquement anti-américains.
Une semaine après Katrina, j’ai écrit une parodie des réactions de la presse ; ça donnait à peu près ça :
« Et c’est sûr qu’avant la politique ultralibérale qui commence en 2000 avec l’élection de Bush, il n’y avait pas de pauvres à la Nouvelle-Orléans, les digues étaient plus hautes et d’ailleurs la Nouvelle Orléans était au-dessus du niveau de la mer (c’est Bush qui l’a fait couler en coupant les subsides), il n’y avait pas d’ouragans ni de réchauffement climatique, les marais qui font tampon contre les ouragans n’avaient pas été détruits par l’endiguement du Mississippi (achevé en 1936 par Roosevelt), et les politiciens, chefs de police et maires de Louisiane étaient tous sans exception d’une compétence superbe. Je dirais même plus, il n’y avait jamais de cyclones. D’ailleurs, Bush est raciste, il a laissé faire parce qu’ils ne se soucie pas des noirs [vi] . Il a privatisé l’État, donc il doit faire appel à la charité publique pour gérer la crise. Et j’ajoute, la guerre en Irak a détourné des ressources vitales pour ses concitoyens. L’Amérique, raciste, a fait naufrage. La preuve du racisme : le seul alligator sauvé de l’Aquarium de la Nouvelle-Orléans était un albinos [vii], les autres, les reptiles noirs, on les a laissé crever ! Un incapable commande une nation d’imbéciles. Les troupes fédérales fascistes occupent la Nouvelle-Orléans après l’Irak [viii] . Avant Bush, c’était le bon vieux temps. Ah, madame Pichegru, nous vivons dans un drôle de monde! »
En fait, j’aurais pu m’en dispenser; un ami m’a envoyé un petit florilège du numéro spécial de Marianne (tirage: autour des 200.000 exemplaires) consacré à Katrina, et Marianne bat Alexandre Leupin à plates coutures, comme le prouve ce collage d’extraits littéraux :
« La chute du pompier pyromane… pleins feux sur un fiasco planétaire…le naufrage d’un modèle… défié au Proche-orient, assommé par une catastrophe humanitaire sur son propre territoire, lâché par son opinion publique, le géant américain plie sous le poids de ses échecs et peine à faire respecter un ordre qu’il a voulu imposer au monde… images apocalyptiques… les palais de marbre et les bidonvilles, les enfants vivant dans des décharges publiques…la sauvagerie des bandes tribales, la férocité du chacun pour soi… les forces de l’ordre qui escortent les blancs et tirent sur les noirs… un invraisemblable étalage de misère de saleté, de sauvagerie et de désolation…catastrophes en chaîne… tout un pan de la société tombé entre les mains de sectes intégristes qui contrôlent la presse, la radio la télévision et le pouvoir financier… la dégringolade irrésistible de Bush, la chute finale… l’avis de décès du modèle bushiste… les Français avec leur légendaire bon sens avaient construit La Nouvelle-Orléans au-dessus du niveau de la mer, les Américains toujours intrépides étendirent la cité dans les profondeurs d’une cuvette qu’ils durent protéger des flots en édifiant mille digues plus ou moins étanches [ix] … dans les temps modernes à part Hiroshima, on avait jamais vu ça… cette ville a été perdue parce que le pays est gouverné par des crétins… tous les rapports depuis quarante ans indiquaient que les barrages ne résisteraient pas à un ouragan de force 4… le modèle néoconservateur englouti sous les flots…il aura fallu l’apocalypse pour que l’Amérique prenne conscience des dégâts colossaux du bushisme : carences de l’Etat, délitement de la sphère publique, incompétence des responsables, le tout sur fond de racisme anti-Noirs, des favelas nord-américaines qui évoquent les «hoovervilles» où s’entassaient les chômeurs pendant la Grande Dépression dans les années 30… les 700 clients et employés de l’hôtel Hyatt Regency promptement évacués sous la protection de la garde nationale, l’éternelle histoire des passagers de 1ère classe embarqués prioritairement sur les chaloupes de sauvetage… la même impuissance hébétée que son père en 1991 lors des émeutes de Los Angeles, là aussi la garde nationale avait abandonné les quartiers pauvres à la fureur des pillards concentrant ses forces sur les faubourgs riches .. »
Avec Paris-Match (tirage : environ 750.000 exemplaires), c’est de nouveau Leupin 0 – presse populaire française 1 (sur penalty). Tout est vu à travers des lunettes doctrinales qu’aucun fait, par exemple la NÉCESSITÉ de la loi et de l’ordre pour pouvoir mener une opération de sauvetage, ne peut démentir; l’entière responsabilité retombe sur une entité mythique, « l’Amérique de Bush » [x] ; encore une fois, les autorités locales, la nature, les considérations historiques et sociales n’ont aucune place. J’ai essayé de démontrer que les causalités n’étaient pas telles, et bien plus complexes ; et aussi et surtout, AUCUNE notation positive (si telle avait été la réalité, tous les inondés auraient péri). Que les « reporters » aient été sur le terrain ne change rien à l’affaire ; la douane américaine ne leur a pas confisqué leurs lorgnettes idéologiques :
N° 2937 – DU 8 SEPTEMBRE AU 14 SEPTEMBRE 2005
Une petite école de Louisiane ,
par Alain GENESTAR, agenestar@hfp.fr
« …de toutes ces images dénonçant la responsabilité des autorités fédérales coupables de n’avoir rien fait, malgré les rapports alarmants des experts, pour consolider les digues quand il était encore temps …Ces images, dont je veux vous parler, vous parlant souvent ici de l’Amérique que j’aime, sont celles d’un naufrage… Soudain, un bruit de tonnerre. La panique de nouveau. Un hélicoptère de l’armée américaine se pose au milieu de la cour de récréation. Le vacarme est assourdissant. La caméra montre les visages effrayés, les femmes serrant leurs enfants dans les bras. Des soldats jaillissent de l’hélicoptère, fusil d’assaut à l’épaule. Prennent position. Comme en Irak. Ils se ruent dans la classe, pointent leurs armes sur les pauvres. Ils crient des ordres. Les réfugiés crient leur peur. Puis leur colère. « Pourquoi ces armes ?Pourquoi vous nous visez ? Nous voulons de l’aide, à manger. » Réponse du soldat qui commande : « Ici, il y a des gens qui ne nous aiment pas. Nous sommes là pour la sécurité. Nous n’avons pas de vivres.» Les soldats repartent dans l’hélicoptère, laissant quelques bouteilles d’eau minérale aux Noirs qui retournent dans l’école. Fin de la scène. Une scène d’une inhumanité totale.
… Elles montrent ce que l’Amérique est en train de devenir : une grande nation, beaucoup plus riche que les autres, mais qui, à la différence des autres, a peur d’une partie d’elle-même, de ses plus pauvres. Et parmi ces plus pauvres, les Noirs. Les Noirs ont conquis leur liberté, puis les mêmes droits que les autres Américains, mais ils sont suspectés d’être toujours coupable de désordres, d’agressions, de meurtres, de pillages et traités en parias, en ennemis qu’il faut combattre les armes à la main. Même s’ils souffrent, s’ils meurent, comme ces jours d’épouvante en Louisiane, la première réponse n’est pas humanitaire. Mais militaire.
…L’Amérique de Bush reproduit, par réflexe, sur son propre sol, ce qu’elle entend faire partout dans le monde, en Irak, ailleurs : sécuriser de force un territoire sans respect pour les peuples. Y compris le sien, quand il est de couleur. Elle ne sait pas aimer, aider les plus pauvres, leur tendre la main. Elle parle sans cesse de la Bible et du Bien mais « évangélise » avec ses soldats qui patrouillent pour rassurer les « bons citoyens », contre les autres. Jesse Jackson, le leader noir, a eu, sur place, cette phrase terrifiante qui exprime toutes les hontes : Cela ressemble au fond de cale d’un bateau d’esclaves. »
Naïvement, nous pourrions exiger de Paris-Match une certaine cohérence ; mais là encore, le lecteur cartésien fera chou blanc. À la lecture de l’article cité ci-dessus, tout serait la faute de « l’Amérique de Bush » ; que penser alors de cet entrefilet qui dément sans retour le cadre idéologique que le magazine a choisi pour présenter et déformer l’événement ?
« Chronique d’un désastre annoncé (Régis Le Sommier)
Le 1er septembre, le président Bush affirmait que « personne ne pouvait prévoir que les digues seraient enfoncées ». Greg Breerword, ingénieur des digues pour le district de La Nouvelle-Orléans, estime qu’il a raison.
« Nous savions que si c’était un ouragan de catégorie 5, les digues seraient submergées. Mais il ne nous étaient jamais venu à l’esprit qu’elles seraient enfoncées. » En 2000, Joe Allbaugh, le premier directeur du Fema de l’administration Bush avait commandé une simulation informatique des conséquences d’un cyclone de catégorie 5 sur la Nouvelle-Orléans. Les conclusions des ingénieurs de l’université de Louisiane qui ont réalisé cette étude sont édifiantes. « Un autre scénario, écrit l’un d’eux, serait que certaines parties des digues cèdent. Nous ne pensons pas que cela est possible. mais l’érosion est une réalité et si une brèche venait à se produire, elle ne pourrait que s’accentuer. L’eau envahira la ville et s’arrêtera quand elle atteindra les zones plus élevées [que le niveau du lac]. » La tragédie était donc écrite à l’avance. » (Extrait)
On me dira que je demande à des journalistes d’être des puits de science et de réflexion. Que non pas, je crois comprendre la vitesse à laquelle l’actualité les contraint ; mais, par élémentaire prudence, ils pourraient, quand même, assurer un minimum de connaissances des faits, sans se mettre en pilote automatique dès qu’il s’agit de l’ Amérique, pays auquel ils n’entendent strictement rien. Il est vrai que, contrairement à une vision monolithique fort répandue, les Etats-Unis sont un pays d’une extrême complexité. Mais ne pourrait-on pas exiger que les journalistes remplissent des minima déontologiques et s’abstiennent d’écrire de ce qu’ils ne comprennent pas, même dans le cas des prestigieux correspondants de New York, Los Angeles, Chicago ?
Passons à Emmanuel Todd dans le Figaro du 12 septembre 2005 :
« Spectre d’une crise à la soviétique…extorsion de fonds à l’échelle planétaire…casse du siècle… …effondrement » …Après l’empire développait des thèses somme toute modérées [xi] que je suis aujourd’hui tenté de radicaliser…La bande de chômeurs noirs qui pille un supermarché et le groupe d’oligarques qui tente d’organiser le « casse » du siècle sur la réserve d’hydrocarbures de l’Irak ont un principe d’action en commun : la prédation [xii] …la mise à sac des supermarchés n’a fait que répéter au niveau le plus bas de la société le schème de la prédation qui est aujourd’hui au coeur du système social américain…lancée dans une politique du scorpion, système malade qui finit par s’injecter son propre venin… »
Tout cela est fort bien dit, mais n’a qu’un rapport extrêmement ténu avec la vérité et la réalité. Et, vu du dehors du bocal germanopratin, les symptômes d’une Schadenfreude, d’un ressentiment, d’une jalousie peu ragoûtants, qui se prennent pour le summum de l’esprit « critique », sont parfaitement évidents. Guy Sitbon de Marianne n’est qu’un journaleux en soif de public ; Emmanuel Todd, par contre, est un universitaire, il n’en est que moins excusable:
« E. Todd : L’hypothèse du déclin développée dans Après l’empire évoque la possibilité d’un simple retour des Etats-Unis à la normale, certes assorti d’une diminution du niveau de vie de 15 à 20% mais garantissant à la population le maintien d’un niveau de consommation et de puissance «standard» dans le monde développé. Je ne faisais qu’attaquer le mythe de l’hyperpuissance. L’incapacité des Etats-Unis à réagir face à la concurrence industrielle, le lourd déficit sur les biens de technologie avancée, la remontée du taux de mortalité infantile, l’usure et l’incapacité pratique de l’appareil militaire, l’incurie persistante des élites m’invitent à envisager, à moyen terme, la possibilité d’une vraie crise à la soviétique aux Etats-Unis. »
À travers les erreurs factuelles, les analogies sans fondement avec la défunte union soviétique, le patelinage hypocrite (« Aujourd’hui, je crains d’avoir été un peu optimiste »), le fantasme de l’hyperpuissance, le désir du bonhomme transparaît: l’Amérique doit se rabaisser ou être rabaissée, absolument. Pour arriver au niveau de vie de la France, cependant, il faudrait que son PNB se ratatine de 40% ; Todd manque d’ambition dans ses objectifs, et surtout pour la France : pourquoi souhaiter le rabaissement des autres, et non l’élévation de soi ?
Je parie, sans courir beaucoup de risque, que la négativité de cette Cassandre de supermarché sera démentie EN TOUT. Enfin, comme disait Achille Talon « il y a ceux qui font l’histoire et les autres qui ont besoin de lunette pour la lire » [xiii] . Paris-Match, Marianne, Emmanuel Todd, c’est du Céline, mais pas celui D’un château l’autre , celui de L’école des cadavres et Bagatelles pour un massacre ….
Ces derniers font partie de la deuxième catégorie, celle des anti-américains par réflexe conditionné ; leur cas est incurable : aucun fait, aucun raisonnement ne pourra les débouter de leur malveillance à l’égard d’un peuple, qu’ils vouent in toto et de toute éternité aux gémonies. Leurs commentaires (publiés à droite comme à gauche) vont plus loin que la haine de Bush ; ils montrent que celle-ci, chez certains, n’est que le cache-sexe d’un ouragan d’antiaméricanisme ; la « haine de Bush » a la même fonction que les distinctions souvent spécieuses entre « antisémitisme » et « anti-sionisme » : il s’agit de faire endosser à un peuple tout entier la responsabilité du malheur ; ce n’est pas Bush (source unique de tous les maux du globe) seulement qui est en cause, pas plus que l’ « Amérique de Bush », c’est toute une nation, sans distinction , qui est rejetée, sur laquelle « penseurs » et « journalistes », charognards du désastre, pilleurs du malheur, ne trouvent absolument rien de positif à dire [xiv] . Tout comme l’antisémitisme fait l’unité de sociétés faillies au Moyen Orient, l’antiaméricanisme, bouc émissaire de tous les maux du monde, fait souvent en France l’union nationale, agrégeant formations politiques, groupes ethniques et religieux, classes sociales, élites et masses, intellectuels et ouvriers, dirigeants et citoyens dans un unanimisme béat et acritique [xv] .
À chaque fois que j’associe antisémitisme et antiaméricanisme, les belles-âmes effarouchées poussent des cris d’orfraie. Mais, sur la longue durée, cet apparentement idéologique est des plus communs, comme le montre Philippe Roger (op.cit.). Il réapparaît aujourd’hui dans l’appellation d’ « entité américano-sioniste », qui combine avec élégance les deux faces d’une même haine.
Et enfin, le troisième groupe, malheureusement bien marginal, et d’autant plus courageux pour cette raison même: contre la pensée unique, les Guy Millière, Jean-François Revel, Yvan Rioufol, Alexandre Adler, Nicolas Baverez, Guy Sorman, les éditeurs des « Matins de France-Culture » font entendre la voix des nombreux citoyens et des intellectuels qui se sont tus, lassés par le déferlement continu de la haine [xvi] .
Bien sûr, en Amérique, nous avons aussi, dans les plus grands médias, notre quotient de partisans ultras :
Nous avons aussi notre presse popu, avec ses hebdomadaires tout à fait comparables à Marianne dans leur soif de mythes, déplacée sur d’autres sujets ; ils épluchent Nostradamus pour prouver que Saddam est un homosexuel masochiste qui a galipetté avec Ben Laden, et pour prédire le prochain krach boursier ou la prochaine catastrophe (curieusement, aucun n’avait annoncé Katrina). Personne n’y croit, mais ils sont divertissants. Nous avons bien entendu nos anti-Bush (mais pas anti-américain), et aussi nos guérilléros pour qui la détestation du président est le cache sexe d’une haine de l’Amérique ; et nous avons aussi nos politiciens partisans qui comprennent la nécessité de l’union nationale en cas de catastrophe [xvii]. Mais surtout, nous disposons de médias contradictoires, qui couvrent l’ensemble des opinions politiques ; Bush, les républicains, les démocrates sont critiqués tous les jours ; le citoyen peut se faire une opinion; rien de comparable ici, à la pensée unique qui semble être, sur l’Amérique, l’apanage de la presse française et peut-être européenne. Au fait, la couverture de la presse américaine s’est révélée en majorité presque aussi anti-Bush que les médias français. Tout aussi graves a été la reprise de rumeurs non confirmées sur les viols, les meurtres et la pédophilie qui étaient supposés régner dans l’obscurité du Superdome et du Convention Center. Les rumeurs naissaient dans les bureaux du maire Nagin ou du chef de la police Eddie Compass, qui a depuis lors démissionné de la direction d’une unité dont 249 officiers sont sous enquête pour avoir déserté devant l’ouragan, et où certains ont « emprunté » 200 Cadillacs et des voitures classiques à un concessionnaire après avoir découpé à la torche le coffre-fort contenant les clés. Le maire et le chef de la police répondaient généreusement ces bruits pour accélérer l’entrée en jeu des forces fédérales. Le résultat en a été un ralentissement, les secouristes devant opérer sous la protection des forces armées. Ce sont les médias qui se sont livrés à une émeute de désinformation et à une orgie de rumeurs, pas la population ; tout cela, bien entendu, a été repris tel quel par la presse française. Ainsi, Libération envoie à la Nouvelle-Orléans son correspondant, Pascal Riché, qui répète les faux bruits sans sourciller. Ils conviennent trop bien à ses œillères idéologiques pour qu’il n’ait pas le réflexe, indispensable à la déontologie journalistique, de les vérifier, ou dans l’impossibilité de le faire, de s’abstenir de colporter des ragots. Il persistera et signera après coup : http://usa.blogs.liberation.fr/2005/09/quels_viols_que_1.html
À quoi sert d’avoir des correspondants sur le terrain, s’ils peuvent écrire la même désinformation, au mot près, en restant tranquillement à Trifouillis-lès-Oies ? À quoi sert d’être «grand reporter» sur le terrain, si l’on s’obstine, par malveillance pour le pays qui vous accueille, à ne pas suivre les règles élémentaires de l’information et du savoir, et à plaquer ses schémas idéologiques sur une réalité qui leur échappe en quasi-totalité ?
Quoi qu’il en soit, les presses nationales et locales, américaines et françaises, ont repris les rumeurs sans avoir une seule fois l’idée de les confirmer indépendamment.
En résumé, la couverture médiatique de Katrina, ici ou ailleurs, s’avère une faillite quasi générale : erreurs de fait, méconnaissance de l’histoire, de l’ingénierie, des questions constitutionnelles, du terrain local ; promotion, non de l’information, mais de l’idéologie, sensationnalisme, tout est ramené à des questions de basse politique où, de façon systématique, un agenda anti-Bush prend le pas sur toute autre considération. Si tel est le château des brouillards, comment accorder confiance aux médias sur les problèmes urgents de notre temps : en vrac, l’Amérique, Bush, le républicanisme, l’Irak [xviii], l’islamisme, le réchauffement climatique, l’économie, l’ONU et le scandale « Pétrole contre nourriture » etc. ? Les médias nous fabriquent un monde indéchiffrable, d’où toute rationalité critique est absente. Et nous ne cessons d’être abasourdis par des conséquences dont les causes ont été rendues inintelligibles. La « rue (ou le téléphone) arabe », c’est nous !
Mais revenons à la presse française ; couvrant les Etats-Unis, ce qu’elle révèle, c’est un syndrome : celui qui prévient la France et les Français d’accepter et de se résoudre à avoir perdu, définitivement semble-t-il, son statut de grande puissance. Les criailleries d’un Villepin à l’ONU avant la guerre d’Irak n’y changent rien ; au contraire, elles aggravent le mal, puisque qu’elles garantissent que l’Amérique n’écoutera pas son allié. Par un tour de passe-passe extraordinaire (et dont j’admire le culot), le général de Gaulle avait réussi à imposer la présence de la France officieuse (Libre) à la table des négociations de la victoire, aux côtés des Etats-Unis, de l’URSS et de la Grande-Bretagne, alors que la France officielle (celle de Vichy) était de l’autre côté de la table, dans le camp des totalitaires défaits. Ces temps sont maintenant révolus, seuls restent l’aigreur, la déception, la malveillance et le ressentiment contre une Amérique qui, pour sa part, peine à assumer son rôle de locomotive de la démocratie et de la prospérité en face d’une Europe bien défaillante. Tout cela explique, mais n’excuse pas, les flots de désinformation malveillante que doivent subir les Français.
On pourrait arguer de l’anti-gallicisme des Américains ; certes, il y a des sites web anti-français, et parfois les médias se font l’écho de ce sentiment. Mais tout est question de proportions. Nation d’importance secondaire, la France ne se taille nullement dans l’imaginaire américain la place capitale que les USA occupent dans le discours public français et les fantasmes des citoyens. Un ministre américain qui invoquerait les méfaits du modèle français soulèverait des haussements d’épaule ; on sait la fonction de repoussoir que remplit par contre le « modèle anglo-saxon » dans le discours politique français [xix] .
Sur le plan économique, il faut aussi remettre les pendules à l’heure. Partout dans les médias, le mythe court que Bush, à cause des réductions d’impôt qu’il a décidées, aurait mis la nation à genoux ; en y ajoutant les dépenses de la guerre en Irak, les États-Unis seraient dans l’incapacité de subvenir aux besoins des opérations de secours. Or, et je sais que le fait va contre le bon sens et l’intuition des économistes du Café du Commerce, LES RÉDUCTIONS D’IMPÔT AUGMENTENT LES RECETTES FISCALES, parce que l’économie se développant plus rapidement, produit plus de richesse : l’assiette de la taxation s’agrandit. Ainsi, les réductions d’impôts de Reagan ont non seulement remis l’économie américaine sur la voie de la croissance après les années septante de la stagflation nixonienne [xx] et du « malaise » cartérien, elles ont AUGMENTÉ [xxi] les recettes fiscales entre 1980 et 1988. Il est plus que probable que les diminutions d’impôt promulguées par Bush ont évité une récession mondiale en stimulant la croissance globale, après la catastrophe du 11 septembre 2001, qui a produit une coupe de 80 à 10 milliards du produit national brut américain. Tout comme dans le cas de Reagan, les diminutions d’impôts ont encore une fois gonflé les recettes fiscales de 66 milliards de dollars en quatre ans. Par contre les dépenses ont augmenté de 30% (562 milliards de dollars pendant la même période). On dira que c’est à cause de l’Irak. Mais ce n’est vrai qu’en partie ; la cause du déficit est avant tout l’appétit incontrôlé des politiciens pour des subsides sans aucune valeur économique, mais qui assurent leur réélection au Congrès par des électeurs repus et satisfaits. Dans ce contexte, la subvention de 250 milliards de dollars (50.000 dollars par habitant) réclamée au gouvernement par les Sénateurs Landrieu et Vitter, même si elle offense la raison, est dans la logique de ce système de patronage.
On me rétorquera une fois de plus les inégalités, on me jettera à la tête « seuls les riches profitent de l’abaissement des impôts » ; là encore, on est dans le mythe : en 2004, 40% de la population NE PAYE AUCUN IMPÔT FÉDÉRAL. Le cinquième (20%) au sommet de l’échelle des revenus paie 80% DE TOUS LES IMPÔTS. Par ailleurs, je préfère un modèle économique qui offre des chances de se tirer de sa condition, et qui permet de subvenir aux dépenses sociales de l’état , à un modèle économique stagnant qui emprisonne les citoyens dans leur médiocrité. Les réductions d’impôts bushiennes n’ont donc pas affaibli l’Amérique, elles ont amélioré sa performance économique et donc sa capacité à affronter un désastre national.
Et, puis, il faut garder à l’esprit les dimensions relatives des pays. En 2004, le produit national brut des Etats-Unis était de 12 trillions de dollars environ (12 mille milliards de dollars, 40.000$ par habitants). Pour la France, toujours en 2004, on obtient 1,7 trillion, 28.000$ par habitant [xxii]. Katrina a ruiné au moins 160.000 maisons en Louisiane seule, affecté plus de mille systèmes de distribution d’eau sur 280.000 km2. Mais supposons que Katrina ait causé pour 125 milliards de dégâts, ce ne serait encore qu’un peu plus de 1.25% du PNB, 413$ par habitant. Posons par hypothèse que l’addition fédérale atteigne 200 milliards. Pour la couvrir, il suffit, soit que l’on augmentent de 1.75% la ponction fiscale sur l’économie, soit que l’économie, en croissant, dégage 1.75% de recettes imposables supplémentaires. Ça n’est pas la fin du monde dans une économie qui, récemment, croissait en moyenne de 3% par an, c’est-à-dire de 360 milliards de dollars.
Ceci dit, de par le monde, les bureaucraties sont sœurs : entre l’Europe et l’Amérique, seule l’échelle du gaspillage et de la corruption diffre.
En résumé, en vertu de la désinformation, des préjugés qui courent dans les médias, l’Amérique, ses complexités, sa diversité sont réduits à des clichés : elle en devient pour le citoyen alpha un rébus indéchiffrable. Le problème est qu’il croit en détenir la clé magique.
6) « We are down, but not out »
Quand une catastrophe de la dimension de Katrina arrive, je ne peux m’empêcher de revenir à mon être natif, à ma forme première, celui d’un vieil européen désabusé, cynique, sceptique et pessimiste. J’ai tendance à oublier l’optimisme foncier, la générosité, la solidarité et la bonté du peuple américain et de l’humanité en général ; les exceptions s’imposent chez moi aux dépens de la règle. Quelques exemples, outre ceux dont j’ai été le témoin personnel, et où jamais les divisions de race, de classe, de nationalité, de religion ne sont entrées en jeu : en UNE semaine, les organisations caritatives ont reçu CINQ CENT MILLIONS de dollars des particuliers, les corporations ont donné 350 millions et continueront à donner, le Koweït a donné 500 millions, le gouvernement dépense sans broncher UN MILLIARD par jour pour l’ensemble de l’opération (signe d’une solidarité nationale, puisque les contribuables, c’est dire nous tous, ne s’élèvent pas contre cette facture que nous finirons par acquitter), le Texas accueille 35.000 réfugiés à bras ouverts, Bali, le Sri Lanka, pays parmi les plus pauvres du monde, font des donations, le Canada, la France fournissent une aide substantielle, un rescapé des camps de concentration arrive à l’ambassade américaine en Israël avec 1000 euros dans une enveloppe par reconnaissance pour avoir été sauvé de l’extermination par l’armée américaine en 1945, les soldats irakiens de la base de Taji ont réunis un million de dinars, le colonel Abbas Fadhil a déclaré : « Nous sommes tous frères. Quand l’un de nous endure une tragédie, nous partageons sa douleur » … la liste des gestes admirables n’en finit pas.
Voici ce que j’avais noté dans mon journal de bord au 6 septembre :
« Aujourd’hui 6 septembre, reprise des cours interrompus par Kat rina. Je m’assure que tous mes étudiants et leurs familles sont e nsécurité . Je m’étais promis de ne pas parler de l’ouragan, mais pour finir j’en parle, et mon pessimisme de vieil européen ne peut s’empêcher de refaire surface .J’ai évidemment forcé la note. À la fin du cours, un étudiant un peu intimidé vient me reprendre et me dit en substance : « N’effrayez pas , ne désespérez pas les étudiants ! Dès mardi ,le lendemain du passage de l’ouragan, j’ai été volontaire pour une organisation de santé, les gens arrivaient on leur donnait les premiers soins, tout marchait à merveille ! Nous devons être optimistes »
J’ai vu aussi , personnellement, partout, des exemples extraordinaires de dévouement partout; sans jamais penser à s’épargner personnellement , sans mesquinerie, sans chipoter sur rien ,des millions d’inconnus ont fait un don total de leur personne, de leur sressources ,de leur intelligence ,de leurs aptitudes, de leurs logements avec une générosité et un dévouement sans limites à d’autres inconnus, quelle que soient leur race et leur identité, jusqu’ à mon assistante d’origine française qui a fait du volontariat que personne ne lui avait demandé, et mon ancienne assistante qui a organisé discrètement une collecte en France pour les victimes ; jusqu’à mon université qui héberge provisoirement le Consulat de France à la Nouvelle-Orléans (ce sont des évacués, comme tout le monde), pour qu’il puisse s’occuper des quelque 900 ressortissants résidant dans la ville ; jusqu’aux étudiants de ma classe ce semestre: un étudiant camerounais nous arrive de l’Université de New Orleans, sous les eaux et fermée jusqu’en janvier. Il a perdu la maison dont il était le propriétaire, il est séparé de sa femme et vit dans un refuge à Baton Rouge. Bien que tout à fait désorienté, il me dit bravement: « J’étudie à la bibliothèque, c’est trop difficile d’étudier au refuge ». Aussitôt, six étudiants se précipitent pour l’aider.
Une des mes étudiantes a toute sa famille à Gulfport, Mississippi. Sur neuf maisons, six ont été entièrement rasées, les survivantes seront inhabitables pendant des mois. Tout le monde est sain et sauf, et elle ajoute cette remarque : « J’ai fait du volontariat pour les évacués, ça m’a remonté le moral ».
Je m’excuse de rompre partiellement l’anonymat des ces âmes secourables, mais je ne pouvais passer leur exemple sous silence : il m’a remonté le moral au bon moment [xxiii] .
Nous avons eu de la chance! J’avais craint cinquante mille morts, il n’y en aura probablement pas plus de mille.
Et encore : déjà les décideurs et hommes d’affaires de la Nouvelle-Orléans font des plans pour la reconstruction [xxiv], pour une parade pour le Mardi Gras en 2006 ; déjà des centaines de milliers d’évacués se décident à reprendre leur destinée en main.
Je vous garantis que le Mardi Gras de 2006 sera exceptionnel, et je vous invite tous à y participer !
En un jour, Baton Rouge a vu sa population doubler, de 350.000 à 700.000 habitants, et est soudainement la plus grande ville de Louisiane. Les hôpitaux sont débordés. En ville, le vrombissement des hélicoptères et les sirènes des ambulances sont devenus le bruit de fond. L’infrastructure routière avait déjà vingt ans de retard…il est maintenant pratiquement impossible de se déplacer. Enfin, cela n’est rien.
Katrina a révélé le meilleur et le pire, la générosité et la haine, la bêtise et l’héroïsme. Le 15 septembre, un sondage révèle que 61% de la population pense que l’Amérique sortira plus forte de la catastrophe. Rien ne peut abattre cette nation, sinon une implosion qu’elle aurait causée par ses divisions internes. Les terroristes sont sans doute ceux qui ont suivi le désastre avec le plus d’attention : ils auraient tort d’en conclure qu’ils pourraient, avec quatre « Katrinas », en finir avec le grand Satan, tout comme ils ont eu tort de croire que le 11 septembre révélerait les fondations en carton pâte d’un tigre en papier.
Katrina a renouvelé ma confiance dans le peuple américain. Il rebâtira ce qui a été détruit et fera ce qu’il faut faire, comme, la plupart du temps dans son histoire, il l’a prouvé.
Il ne faut jamais désespérer de l’Amérique ; la Couronne anglaise, les nazis, les soviétiques, les totalitaristes de tout poil, tous ceux qui, au cours de l’histoire, ont espéré qu’elle s’écroulerait se sont trouvé démentis.
Il ne faut jamais douter de la solidarité humaine.
[i] Notamment Joe Liebermann, sénateur démocrate du Connecticut, que j’aurais bien vu en président. Il fait 3% aux primaires en 2004 et se retire de la course à la présidence. Hillary Clinton, quant à elle, vote tous les budgets de la défense et du Homeland Security, et se repositionne au centre, au grand dam de l’extrême gauche.
[ii] On aura garde de ne pas confondre le multiculturalisme, qui accorde un poids moral équivalent à toutes les revendications de toutes les cultures, avec le pluralisme, qui reconnaît les différences à l’intérieur d’un cadre légal qui les transcende.
[iii] Comme j’en ai été accusé sur le blog de Libération , « À l’heure américaine » : « Al, n’est pas un commentateur comme les autres. Méfiance. Il ne donne pas une opinion. Il ne réagit pas à chaud. Non, c’est un professionnel. Il s’appelle Al ici, Voxtruc là, ailleurs il endossera une autre identité. Notez la longueur de ses textes, la richesse de ses argumentaires découpés en petit 1, petit 2, etc., la pléthore de liens. Il égrène inlassablement la doxa bushienne. C’est un troll, mais un pro, qui émarge sur le budget de la CIA ou d’on ne sait quel agence occulte ou think tank ultra ! ». Bizarre hommage aux efforts que je fais pour écrire clairement. (Rédigé par: Hugo , le 7 sept. 05)
[iv] À titre de vérification, j’engage mes lecteurs à trouver une note positive sur l’Amérique contemporaine dans deux blogs suivis en France, celui de Libération, http://usa.blogs.liberation.fr/ et celui du Monde http://clesnes.blog.lemonde.fr/etatsunis/ . Tout récemment le ton a changé. Quelle que soit la cause de ce revirement, nos félicitations! On peut étendre l’opération à ces quotidiens, mais enfin personne n’a le temps.
[v] Voir La débâcle de la pensée – À propos du 11 septembre 2001 .
[vi] Accusation lancée pendant un Téléthon par un rappeur noir, avec à côté de lui, effaré, Mike Myers : http://apnews.myway.com/article/20050903/D8CCNBNO0.html . Kanye West, le rappeur, s’est fait copieusement siffler par le public deux jours après : http://www.boston.com/sports/football/patriots/articles/2005/09/09/nfl_kickoff_show_falls_short_at_gillette/
[vii]
[viii] Authentique, de la part d’une américaine, Cindy Sheehan..
[ix] Celle-là, je l’adore! Mon ami m’avait recopié les extraits, je n’arrivais pas à y croire. Je n’ai été convaincu que quand j’ai vu les photocopies qu’il avait faites. L’argument historique est peut-être correcte ; mais le transformer en cocorico, sans savoir comment les français auraient fait face à l’expansion du lieu stratégique est du plus haut comique.
[x] L’ « Amérique de Bush », c’est 62 millions d’électeurs en 2004, une coalition bien plus bigarrée, selon n’importe quel critère, que celle qui réunirait par hypothèse les votants du PS et de l’UMP en France.
[xi] C’est cela, oui…
[xii] J’avais l’impression, peut-être fausse, que nous payions le pétrole irakien au prix du marché….
[xiii] Cependant, il ne faut pas désespérer de la France. Le lendemain, le Figaro publie un article qui témoigne d’une compréhension profonde des Etats-Unis ; on peut débattre des thèses de l’essayiste, marquer son accord ou son désaccord. Pourquoi ? parce que nous sommes enfin sur un terrain rationnel et factuel.
Après Katrina, un Etat américain plus fort , par Guy Sorman :
http://www.lefigaro.fr/debats/20050913.FIG0289.html?080153
[xiv] Je me focalise sur la presse française, mais, comme on l’a vu, la presse américaine, bien souvent, n’est pas non plus innocente. La BBC non plus, d’après Tony Blair, choqué par « la haine de l’Amérique » dont fait preuve sa couverture de Katrina.
[xv] Cette fonction politique de l’antiaméricanisme n’est pas propre à la France. Elle a permis à Schröder de se faire élire en Allemagne. Il se peut que l’antiaméricanisme porte Villepin au pouvoir en 2007. Il sera certainement un argument central contre Sarkozy.
[xvi] Autre opinion : The Hurricane of Anti-Americanism: The Blame Game’s Real Target .
[xvii] Il ne faut pas désespérer des démocrates: Donna Brazile, conseillère stratégique de la campagne d’Al Gore en 2000, apporte son soutien sans réserves à George Bush dans un lettre ouverte, trois jours après l’allocution télévisée du président, prononcée à Jackson Square, devant la cathédrale Saint-François.
http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2005/09/16/AR2005091602167.html :
I Will Rebuild With You, Mr. President , by Donna Brazile, Saturday, September 17, 2005 :
[xviii] Encore une fois je renvoie à Hertoghe, op.cit.
[xix] L’antécédent historique est Vichy, dont la propagande vouait aux gémonies les « anglo-saxons ». Voir Philippe Roger, op. cit. p 461 sqq.
[xx] Nixon était dirigiste, il avait mis en place un contrôle des prix et des salaires catastrophique.
[xxi] Pour les états et l’état fédéral.
[xxii] La comparaison est faite sur la parité du pouvoir d’achat, qui donne une vue réaliste des différences :
http://www.cia.gov/cia/publications/factbook/fields/2001.html et http://www.cia.gov/cia/publications/factbook/geos/fr.html#Econ
La différence entre l’Amérique et la France est donc de l’ordre de 40%. Sans correction pour comparer le pouvoir d’achat (en termes nominaux), les chiffres sont plus favorables à la France :
http://www.worldbank.org/data/databytopic/GDP.pdf .
[xxiii] Autant pour le poncif, fort répandu dans la presse française, de l’américain-moyen- égoïste –et-individualiste-qui-ne-s’intéresse-qu’au-Dieu-Dollar.
[xxiv] Le débat sur quoi et comment reconstruire a déjà commencé: http://www.slate.com/id/2125810/;Some DAMAGE REPORTS.