Shabouot/Pentecôte: A quand un référendum sur les dix commandements ? (Robespierre’s one-day religion: Looking back at the ceremony that was to abolish 2, 000 years of “perverted” christianism)

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https://pbs.twimg.com/media/CFUHobyUsAAhT9b.jpg:largeHomme et femme, il les créa. Genèse 1: 27
Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. Jésus (Jean 14: 6)
Celui qui aime les autres a accompli la loi.  En effet, les commandements: Tu ne commettras point d’adultère, tu ne tueras point, tu ne déroberas point, tu ne convoiteras point, et ceux qu’il peut encore y avoir, se résument dans cette parole: Tu aimeras ton prochain comme toi-même. L’amour ne fait point de mal au prochain: l’amour est donc l’accomplissement de la loi. Paul (Romains 13: 8-10)
Dans le calendrier juif, Chavouot se déroule « sept semaines entières » ou cinquante jours jusqu’au lendemain du septième sabbat » après la fête de Pessa’h. De là son nom de Fête des Semaines (Chavouot, en hébreu) et celui de Pentecôte (cinquantième [jour], en grec ancien) dans le judaïsme hellénistique. (…) Ce n’est qu’à partir du IIe siècle que le pharisianisme liera la fête de la moisson à la commémoration du don de la Loi au Sinaï. Les Actes des Apôtres situent explicitement lors de cette fête juive le récit où les premiers disciples de Jésus de Nazareth reçoivent l’Esprit Saint et une inspiration divine dans le Cénacle de Jérusalem : des langues de feu se posent sur chacun d’eux, formalisant la venue de l’Esprit (…) L’image du feu — conforme à la tradition juive de l’époque sur l’épisode de la révélation sinaïtique que l’épisode entend renouveler — matérialise la Voix divine. La tradition chrétienne perçoit et présente la Pentecôte comme la réception du don des langues qui permet de porter la promesse du salut universel aux confins de la terre ainsi que semble en attester l’origine des témoins de l’évènement, issus de toute la Diaspora juive. Wikipedia
Dans l’ancien Orient, lors d’une alliance entre deux puissances, on disposait, dans le temple des partenaires, un document écrit devant être lu périodiquement12, il n’est donc pas surprenant que les Tables de la Loi soit le témoignage concret de l’Alliance entre Dieu et son peuple. C’est la raison pour laquelle, les images des tables sont souvent présentes sur le fronton des synagogues. (…) Dans les temples protestants, une représentation des Tables de la Loi remplaçait, jusqu’au XVIIe siècle, la croix des églises catholiques. Wikipedia
Tous les préceptes du Décalogue se peuvent déduire de la justice et de la bienveillance universelle que la loi naturelle ordonne. (…) Le Décalogue ne contient donc que les principaux chefs ou les fondements politiques des Juifs ; mais néanmoins ces fondements (mettant à part ce qui regardait en particulier la nation judaïque) renferment des lois qui sont naturellement imposées à tous les hommes et à l’observance desquelles ils sont tenus dans l’indépendance de l’état de la nature comme dans toute société civile. Louis  de Jancourt (article Décalogue, Encyclopédie dirigée par D’Alembert et Diderot, 1 octobre 1754)
L’Assemblée Nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l’Être suprême, les droits suivants de l’Homme et du Citoyen… Préambule de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen
Le texte s’inscrit sur deux registres, dont la forme évoque celles des Tables de la Loi rapportées par Moïse du mont Sinaï. Il est accompagné de figures allégoriques personnifiant la France et la Renommée, et de symboles comme le faisceau (unité), le bonnet « phrygien » (liberté), le serpent se mordant la queue (éternité), la guirlande de laurier (gloire), les chaînes brisées (victoire sur le despotisme) ; l’ensemble étant placé sous l’œil du Dieu créateur, rayonnant d’un triangle à la fois biblique et maçonnique. Philippe de Carbonnières
Sans doute a-t-on pu retracer l’histoire pré-révolutionnaire de la formule, et faire remarquer que les trois mots magiques de nos frontons étaient déjà parmi ceux qu’affectionnaient, au XVIIIe siècle, les sociétés de pensée. Mais ils figuraient au milieu de beaucoup d’autres, Amitié, Charité, Sincérité, Union. Les francs-maçons usaient surtout d’Égalité, un peu moins volontiers de Fraternité, montraient plus de tiédeur encore à Liberté, et une franche indifférence à l’arrangement : Liberté-Égalité-Fraternité, alors même que les enchantaient par ailleurs les cadences ternaires (Salut, Force, Union, par exemple). Les longues collectes entreprises dans le lexique des Lumières se sont révélées également décevantes. On voit sans doute souvent briller les trois mots dans le tamis des orpailleurs du lexique, mais ce sont des paillettes isolées, qui ne s’agrègent que fort rarement en triade organisée. Mona Ozouf
Le troisième mot de la devise française, « fraternité », a été introduit en 1848, au cours du rapprochement des forces républicaines et du christianisme social. Cela n’a pas duré, puisque, par la suite, l’appareil clérical devait choisir de soutenir le second Empire. Mais cette brève rencontre nous a laissé ce mot, très fort dans la mystique républicaine. Autant la liberté et l’égalité peuvent être perçues comme des droits, autant la fraternité est une obligation que chacun a vis-à-vis d’autrui. C’est donc un mot d’ordre moral. La République a toujours eu des difficultés avec la morale. Elle possédait une figure fraternitaire avec le bon instituteur, celui qui se dévoue pour les bons élèves afin qu’ils continuent leurs études. Mais l’instituteur est celui qui échoue à réaliser l’égalité des chances. Il a été rattrapé par le droit, puisque, désormais, l’université est un droit. Le christianisme, tel que l’incarnait l’abbé Pierre, propose une figure extérieure au droit (…) il faut y aller, il faut se mouiller, dormir avec ceux qui dorment dans la rue… Mais, au final, c’est devenu un projet de loi sur le droit au logement opposable, mutation caractéristique du passage de la fraternité au droit. (…) mais il a d’abord mis en place une organisation qui a été un succès : les compagnons d’Emmaüs. Il a aidé des individus à se recycler, à s’aider eux-mêmes. C’est secondairement qu’il a eu une revendication politique. Et d’ailleurs, s’il a eu une brève carrière de député, celle-ci n’a laissé aucun souvenir : ce n’est pas par son action politique ou sur la politique qu’il a laissé des traces, c’est par son oeuvre personnelle et son appel aux consciences. (…) Il était de culture franciscaine et s’inscrivait dans un universalisme compassionnel et idéaliste qui a du mal avec les institutions et avec la politique et qui, souvent, refuse d’admettre que la justice et la fraternité ne remplacent pas l’organisation sociale. (…) Mais, à la différence de ceux qui rivalisent d’indignation aujourd’hui sur la misère du monde, en exigeant tout de l’Etat et du droit, l’abbé Pierre, lui, a mis les mains dans le cambouis. D’une manière non politique, certes, mais efficace. Il ne s’est pas contenté de bons sentiments. Paul Thibaud
Le Judaïsme a abandonné la lecture quotidienne des proclamations des ‘sectaires’ (Chrétiens) (Berachot 12a). Les partisans de Paul croyaient que seuls les Dix Commandements et non le reste de la loi mosaïque étaient divins, éternels et obligatoires. Dans ce contexte, pour les Juifs, donner la priorité au Décalogue aurait pu signifier un accord avec les sectaires, aussi la lecture quotidienne a été abandonnée de façon à montrer que toutes les autres 613 mitzvot étaient des commandements divins. Raymond Apple
Les Tables ne sont pas un symbole laïc ou païen. A la différence du bonnet phrygien, du serpent qui se mord la queue, des faisceaux de licteurs, etc., leur référent n’est pas l’antiquité païenne, mais la Bible, au message religieux évident. Pourtant, dans la France chrétienne du 18e siècle, le message religieux normalement reçu est lié à une symbolique chrétienne, que justement la Révolution repousse. La mentalité révolutionnaire est donc à la recherche d’une symbolique qui ne soit pas chrétienne (puisque l’Eglise est désormais perçue comme synonyme de fanatisme et d’absolutisme despotique), mais qui soit cependant suffisamment religieuse pour satisfaire le sentiment religieux profond qui réside au coeur de chaque révolutionnaire (…) Mais par-delà la croyance sentimentale difficilement déracinable existe aussi un pragmatisme politique. Il peut être dangereux de déraciner tout symbole religieux dans l’imagerie populaire et donc dans les mentalités qu’on veut forger. Représenter des symboles chrétiens est exclu, puisque contraire aux principes jacobins. Les Tables de la Loi s’offrent donc d’une manière idéale pour répondre à un certain besoin religieux sans pour autant laisser croire à une affiliation cléricale. Les Tables de la Loi fournissent ainsi « les vêtements du sacré » à la religion de la Patrie. Nous les voyons figurer sur des allégories patriotiques, sur le soleil qui doit faire sortir le monde vers l’âge des lumières, sur des médailles en fer de grande diffusion, représentant l’Egalité et la Justice, sur des gravures évoquant des fêtes populaires, et jusque sur les uniformes militaires, au milieu des canons. On les trouve sur les médailles d’identification des membres des diverses assemblées révolutionnaires comme celle du Conseil des Cinq-Cents. (…) La laïcisation des Tables de la Loi peut aller jusqu’au cas limite où un contenu nouveau est donné au Décalogue. C’est ainsi qu’une gravure populaire présente « les Dix Commandements républicains » dans le cadre graphique des Tables de la Loi. Les Tables de la Loi remplissent donc un rôle important dans l’iconographie de la Révolution. Elles permettent à la Révolution de déconnecter ses emblèmes de tout ce qui est chrétien sans se prévaloir uniquement de symboles d’origine antique et païenne. Elles permettent de donner une coloration religieuse mais dans un ton pour ainsi dire « neutre » aux idéaux de justice, d’égalité, de soumission à une loi égale pour tous, que prône la Révolution. La défaite de l’arbitraire royal et l’apparition d’une Constitution garantissant les Droits de l’homme sont très clairement symbolisés par les Tables de la Loi, ce qui explique leur place récurrente dans l’iconographie de la Révolution. Renée Neher-Bernheim
On a supposé qu’en accueillant des offrandes civiques, la Convention avait proscrit le culte catholique. Non, la Convention n’a point fait cette démarche téméraire: la Convention ne la fera jamais. Son intention est de maintenir la liberté des cultes, qu’elle a proclamée, et de réprimer en même temps tous ceux qui en abuseraient pour troubler l’ordre public; elle ne permettra pas qu’on persécute les ministres paisibles du culte, et elle les punira avec sévérité toutes les fois qu’ils oseront se prévaloir de leurs fonctions pour tromper les citoyens et pour armer les préjugés ou le royalisme contre la république. (…) Il est des hommes qui veulent aller plus loin; qui, sous le prétexte de détruire la superstition, veulent faire une sorte de religion de l’athéisme lui-même. (…) La Convention n’est point un faiseur de livres, un auteur de systèmes métaphysiques, c’est un corps politique et populaire, chargé de faire respecter, non seulement les droits, mais le caractère du peuple français. Ce n’est point en vain qu’elle a proclamé la déclaration des droits de l’homme en présence de l’Etre suprême!” (…) L’athéisme est aristocratique; l’idée d’un grand être, qui veille sur l’innocence opprimée, et qui punit le crime triomphant, est toute populaire. Le peuple, les malheureux m’applaudissent; si je trouvais des censeurs, ce serait parmi les riches et parmi les coupables. J’ai été, dès le collège, un assez mauvais catholique; je n’ai jamais été ni un ami froid, ni un défenseur infidèle de l’humanité. Je n’en suis que plus attaché aux idées morales et politiques que je viens de vous exposer: “Si Dieu n’existait pas, il faudrait |’inventer.” (…) Ce sentiment est celui de l’Europe et de l’univers, c’est celui du peuple français. Ce peuple n’est attaché ni aux prêtres, ni à la superstition, ni aux cérémonies religieuses; il ne l’est qu’au culte en lui-même, c’est-à-dire à l’idée d’une puissance incompréhensible, l’effroi du crime et le soutien de la vertu, à qui il se plaît à rendre des hommages qui sont autant d’anathèmes contre l’injustice et contre le crime triomphant. Si le philosophe peut attacher sa moralité à d’autres bases, gardons-nous néanmoins de blesser cet instinct sacré et ce sentiment universel des peuples. Quel est le génie qui puisse en un instant remplacer, par ses inventions, cette grande idée protectrice de l’ordre social et de toutes les vertus privées? Maximilien Robespierre (club des Jacobins, 21 novembre 1793)
Si quelqu’un me prouvait que le Christ est en dehors de la vérité, et qu’il serait réel que la vérité fût en dehors du Christ, j’aimerais mieux alors rester avec le Christ qu’avec la vérité. Dostoeivski
Si vous admettez qu’un homme revêtu de la toute-puissance peut en abuser contre ses adversaires, pourquoi n’admettez-vous pas la même chose pour une majorité?  (…) Le pouvoir de tout faire, que je refuse à un seul de mes semblables, je ne l’accorderai jamais à plusieurs. Tocqueville
Toute idée fausse finit dans le sang, mais il s’agit toujours du sang des autres. C’est ce qui explique que certains de nos philosophes se sentent à l’aise pour dire n’importe quoi. Camus
Dans ces temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire.  George Orwell (?)
Si les faits ne coïncident pas avec la théorie, il faut changer les faits ! Albert Einstein (?)
La vérité ne se décide pas au vote majoritaire. Doug Gwyn
Dans l’histoire de l’Europe moderne, c’est la Révolution française qui la première fit passer dans la réalité l’idée d’exterminer une classe ou un groupe. Ernst Nolte
Si j’étais législateur, je proposerais tout simplement la disparition du mot et du concept de “mariage” dans un code civil et laïque. Le “mariage”, valeur religieuse, sacrale, hétérosexuelle – avec voeu de procréation, de fidélité éternelle, etc. -, c’est une concession de l’Etat laïque à l’Eglise chrétienne – en particulier dans son monogamisme qui n’est ni juif (il ne fut imposé aux juifs par les Européens qu’au siècle dernier et ne constituait pas une obligation il y a quelques générations au Maghreb juif) ni, cela on le sait bien, musulman. En supprimant le mot et le concept de “mariage”, cette équivoque ou cette hypocrisie religieuse et sacrale, qui n’a aucune place dans une constitution laïque, on les remplacerait par une “union civile” contractuelle, une sorte de pacs généralisé, amélioré, raffiné, souple et ajusté entre des partenaires de sexe ou de nombre non imposé.(…) C’est une utopie mais je prends date. Jacques Derrida
C’est le sens de l’histoire (…) Pour la première fois en Occident, des hommes et des femmes homosexuels prétendent se passer de l’acte sexuel pour fonder une famille. Ils transgressent un ordre procréatif qui a reposé, depuis 2000 ans, sur le principe de la différence sexuelle. Evelyne Roudinesco
Le monde moderne n’est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu’un dispositif religieux est brisé (comme le fut le christianisme pendant la Réforme), ce ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les vertus le sont aussi, et elles errent plus férocement encore en faisant des ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé des vieilles vertus chrétiennes virant à la folie.  G.K. Chesterton
On a commencé avec la déconstruction du langage et on finit avec la déconstruction de l’être humain dans le laboratoire. (…) Elle est proposée par les mêmes qui d’un côté veulent prolonger la vie indéfiniment et nous disent de l’autre que le monde est surpeuplé. René Girard
Si les forêts tropicales méritent notre protection, l’homme (…) ne la mérite pas moins (…) Parler de la nature de l’être humain comme homme et femme et demander que cet ordre de la création soit respecté ne relève pas d’une métaphysique dépassée. Benoit XVI
La lisibilité de la filiation, qui est dans l’intérêt de l’enfant, est sacrifiée au profit du bon vouloir des adultes et la loi finit par mentir sur l’origine de la vieConférence des évêques
Israël existe et continuera à exister jusqu’à ce que l’islam l’abroge comme il a abrogé ce qui l’a précédé. Hasan al-Bannâ (préambule de la charte du Hamas, 1988)
Le Mouvement de la Résistance Islamique est un mouvement palestinien spécifique qui fait allégeance à Allah et à sa voie, l’islam. Il lutte pour hisser la bannière de l’islam sur chaque pouce de la Palestine. Charte du Hamas (Article six)
Les enfants de la nation du Hezbollah au Liban sont en confrontation avec [leurs ennemis] afin d’atteindre les objectifs suivants : un retrait israélien définitif du Liban comme premier pas vers la destruction totale d’Israël et la libération de la Sainte Jérusalem de la souillure de l’occupation … Charte du Hezbollah (1985)
La libération de la Palestine a pour but de “purifier” le pays de toute présence sioniste. (…) Le partage de la Palestine en 1947 et la création de l’État d’Israël sont des événements nuls et non avenus. (…) La Charte ne peut être amendée que par une majorité des deux tiers de tous les membres du Conseil national de l’Organisation de libération de la Palestine réunis en session extraordinaire convoquée à cet effet. Charte de l’OLP (articles 15, 19 et 33)
Je mentirais si je vous disais que je vais l’abroger. Personne ne peut le faire. Yasser Arafat (Harvard, octobre 1995)
Abraham n’était pas juif, pas plus que c’était un Hébreu, mais il était tout simplement irakien. Les Juifs n’ont aucun droit de prétendre disposer d’une synagogue dans la tombe des patriarches à Hébron, lieu où est inhumé Abraham. Le bâtiment tout entier devrait être une mosquée. Yasser Arafat, cité dans le Jerusalem Report, 26 décembre 1996)
Mariage homosexuel : l’Irlande plus démocratique que les socialistes français, fait un référendum. Les votes sont clos, en République d’Irlande, où plus de 3.2 millions d’habitants étaient appelés à prendre part à un référendum sur la légalisation du mariage homosexuel. 3,2 millions d’Irlandais chanceux qu’on leur demande s’il veulent que la constitution du pays soit modifiée pour autorisé le mariage des couples de gays et lesbiennes. 3,2 millions d’Irlandais plus chanceux que les Français, méprisé par les élites et les dirigeants politiques socialistes, qui ont fait passer leur réforme malgré l’hostilité de millions de Français dans les rues. 3,2 millions d’Irlandais respectés par leur gouvernement, qui, pour un sujet de société aussi important, les a consultés. Jean-Patrick Grumberg
Le Luxembourg donne l’image d’un pays en avance sur les questions de société. C’est un message envoyé à un moment où l’homophobie est en train de monter en Europe. (…) J’aurais pu le cacher, ou le refouler et être malheureux toute ma vie. J’aurais pu avoir une relation avec quelqu’un de l’autre sexe et avoir des relations homosexuelles en cachette. Mais je me suis dit : si tu veux faire de la politique et être honnête en politique, tu dois être honnête avec toi-même et donc t’accepter toi-même. Charles Michel (Premier ministre belge)
Le Luxembourg a célébré une grande première. Le Premier ministre libéral du Luxembourg Xavier Bettel a épousé vendredi son compagnon belge Gauthier Destenay. Il est ainsi devenu le premier dirigeant uni par les liens d’un mariage homosexuel dans l’Union européenne. Europe 1
Pour fêter les deux ans du mariage homo­sexuel léga­lisé en avril 2013. Et puis, je suis très heureux, alors ça donne envie de faire bouger les menta­li­tés. Mon mari et moi sommes venus vivre à Las Vegas pour être libres d’avoir l’en­fant que nous n’au­rions pas pu avoir en France. À Paris, on a parfois l’im­pres­sion qu’il ne faut être ni juif ni noir, ni arabe ni homo­sexuel. Je ne supporte plus le refus de l’autre. J’en ai assez qu’on dise à Romain de féli­ci­ter sa femme pour la nais­sance. Moi-même je devrais me taire. Eh bien non. Je le reven­dique : nous sommes deux hommes, nous avons fait un enfant et ça se passe bien. Alex Goude (animateur M6)
L’Irlande devient ainsi le premier pays au monde à autoriser le mariage gay par voie référendaire. (…) Plus de 3,2 millions d’Irlandais ont été appelés à se prononcer sur une modification de la Constitution proposant d’autoriser « le mariage entre deux personnes, sans distinction de sexe ». L’Irlande devient ainsi le 19e pays, le 14e en Europe, à légaliser le mariage gay. Il est par contre le seul pays à l’avoir fait par référendum, les autres ayant opté pour la voie parlementaire. « C’est historique », a souligné le ministre de la Santé, Leo Varadkar. Ce référendum, a-t-il estimé, constitue « une révolution culturelle » dans un pays longtemps conservateur et où l’homosexualité n’a été dépénalisée qu’en 1993. « Je suis tellement fier d’être Irlandais aujourd’hui », avait tweeté en début de journée, Aodhan O Riordain, secrétaire d’Etat pour l’Egalité, tandis que, dans les rues de Dublin, des Irlandais, hommes et femmes de tous âges, exultaient et se prenaient dans les bras. Avant même la publication des résultats, un des principaux responsables de la campagne du non, David Quinn, avait concédé la défaite de son camp. « C’est une claire victoire pour le camp du oui », a-t-il déclaré, adressant ses « félicitations » aux partisans du mariage homosexuel. Francetvinfo
Une Allemande de 65 ans, mère de 13 enfants et grand-mère de 7 petits-enfants, a accouché de quadruplés « pas complètement développés » à Berlin, un cas controversé mêlant médecine et téléréalité qui relance le débat sur les grossesses tardives. Annegret Raunigk, qui a procédé à des fécondations in vitro en Ukraine, est désormais la mère de quadruplés la plus âgée au monde, selon la chaîne de télévision RTL, détentrice des droits exclusifs sur cette grossesse hors normes. Les bébés prématurés, trois garçons et une fille, sont nés mardi par césarienne, après seulement 26 semaines de grossesse. Ils ont été placés en couveuse mais ont « de bonnes chances de survivre », selon un communiqué de RTL. « Toutefois, les bébés, par comparaison avec une naissance normale dans la 40e semaine de grossesse, ne sont pas encore développés complètement. D’éventuelles complications ne peuvent donc pas être complètement exclues », poursuit la chaîne. (…) Cette femme élégante, les cheveux roux et une fine paire de lunettes sur les yeux, n’en est pas à sa première grossesse tardive. En 2005, alors âgée de « seulement » 55 ans, elle avait mis au monde une petite fille. C’est d’ailleurs pour répondre au souhait de sa dernière fille d’avoir un petit frère ou une petite sœur qu’elle a décidé de retenter une insémination artificielle, a-t-elle expliqué. Nés de 5 pères différents, les autres enfants d’Annegret Raunigk ont déjà tous quitté le domicile maternel. RTL
L’homme et la femme utilisent tous les deux ces poupées pour remplacer un compagnon humain, que ce soit par choix ou par nécessité. Je pense qu’il n’y a aucun inconvénient à cela, surtout si les journées en deviennent plus supportables » (…) Mes photos concernent la vie, les relations amoureuses et la sexualité. Les poupées repoussent certaines personnes, tandis que d’autres sont empathiques envers elle. Au fur et à mesure que le monde devient plus numérique et moins personnel, il sera de plus en plus banal que des poupées et des robots soient utilisés en tant que substituts pour les relations amoureuses. Je peux uniquement espérer que mes photos déclenchent une émotion ou une connexion chez le spectateur. Stacy Leigh
Une reconnaissance de l’Etat de Palestine par le Saint-Siège est un signe fort envoyé aux pays musulmans. C’est un appel à l’apaisement. (…) En règle générale, le Saint-Siège reconnaît des pays qui l’ont déjà été par la communauté internationale et les grandes puissances. C’est bien le style du pape François de bousculer ainsi les habitudes. François Mabille
Israël-Palestine : la France veut renverser la table Paris propose un projet de résolution poussant les deux parties à s’entendre en 18 mois. Sous peine de reconnaître l’État palestinien. Le Point
Banking on Netanyahu’s assertion while campaigning for re-election that there would be no Palestinian state during his term in office, Obama is reported exclusively by our sources to have given the hitherto withheld green light to European governments to file a UN Security Council motion proclaiming an independent Palestinian state. Although Netanyahu left the foreign affairs portfolio in his charge and available to be filled by a suitably moderate figure as per the White House’s expectations did not satisfy the US President. The White House is confident that, with the US voting in favor, the motion will be passed by an overwhelming majority and therefore be binding on the Israeli government. To show the administration was in earnest, senior US officials sat down with their French counterparts in Paris last week to sketch out the general outline of this motion. According to our sources, they began addressing such questions as the area of the Palestinian state, its borders, security arrangements between Israel and the Palestinians and whether or not to set a hard-and-fast timeline for implementation, or phrase the resolution as  a general declaration of intent. Incorporating a target date in the language would expose Israel to Security Council sanctions for non-compliance. (…) At the same time, both American and French diplomats are already using the club they propose to hang over the Netanyahu government’s head for gains in other spheres. French President Francois Hollande, for instance, the first foreign leader ever to attend a Gulf Council of Cooperation summit, which opened in Riyadh Tuesday to discuss Iran and the Yemen war, used the opportunity to brief Gulf Arab rulers on Washington’s turnaround on the Israeli-Palestinian issue. And US Secretary of State John Kerry plans to present the Obama administration’s new plans for Palestinian statehood to Saudi leaders during his visit to Riyadh Wednesday and Thursday, May 6-7. Kerry will use Washington’s willingness to meet Palestinian aspirations as currency for procuring Saudi and Gulf support for a Yemen ceasefire and their acceptance of the nuclear deal shaping up with Iran. Debka file
Once again, Barack Obama was riffing off the cosmic joke that he is somehow anti-Semitic, when in fact, as many people understand, he is the most Jewish president we’ve ever had (except for Rutherford B. Hayes). No president, not even Bill Clinton, has traveled so widely in Jewish circles, been taught by so many Jewish law professors, and had so many Jewish mentors, colleagues, and friends, and advisers as Barack Obama (though it is true that every so often he appoints a gentile to serve as White House chief of staff). (…) I’ll grapple with the meaning of Obama’s Jewishness later, but the dispute between the Jewish right and the Jewish left over Obama is actually not about whether he is anti-Jewish or pro-Jewish, but over what sort of Jew he actually is. Jeffrey Goldberg
I’ve been called the first Jewish president, you know. Barack Hussein Obama
Maximilien Robespierre, known as l’Incorruptible, is at the summit of his glory.  Rivers of blood, flowing from the guillotines of France, have washed away the Girondins and anyone who had pactised with them; the Jacobins, even though they were close to him;  certain Montagnards and, curiously, some of his friends who had too openly supported the theses of the atheists… (…) So great is his power now, that to have any opinion at all is a crime of lese-Revolution.  Since obtaining the head of Louis XVI, he seems to be invested with a sort of absolute power, a divine right. (…) When, after having voted for death, the Convention came to its senses, terrified at what it had just decided, he demanded an immediate execution.  (…)  Everyone is waiting to see how the High Priest is going to organize the next part of the sacrifice.  For a whole month, a great silence settles on Paris, troubled only by the cries of the executed.  The Convention, the clubs, the army, the Commune and even the revolutionary tribunal, remain quiet… At last, on 6 May, l’Incorruptible climbs up to the tribunal.  He is wearing his sacerdotal clothes, a sky blue riding-coat and white stockings.  (…)  By degrees, he asks the Deputies to recognize the existence of a “Supreme Being and immortality as the directing power of the Universe”. Then to the stupefaction of some, and the enthusiasm of others, he wants to give his vibrant profession of faith the form of a decree, with immediate effect. His speech, which at the end rises in a passionate plea for a regenerated Humanity, is welcomed by unending applause. Couthon spurs his gendarme mount and proclaims that this great piece of literature must be displayed throughout the whole country.  That it should be translated into all languages, too, and diffused throughout the whole universe. The fabulous decree which institutes in France a new religion and proposes a festival in the style of the celebrations of Antiquity, is voted with enthusiasm and without any discussion.  In the corridors, when the euphoria has died down, the least terrorised start to murmur that, when they had voted the King’s death, they thought that they had also voted that of God. The French people welcome back a divinity.  For months, the churches had been profaned.  Mountain decors peopled with mythological characters symbolising Reason had been built in them.  In a lot of places, prostitutes, “living marbles of public flesh” had draped themselves, completely naked, on the altars. God was now being re-installed under the name of Supreme Being. In Paris, it is not yet known that this Being will soon take on the profile of l’Incorruptible.  But perhaps this will eclipse in a brilliant manner the red reflects of the guillotine, of which everybody is secretly very tired. (…) To bring God back to Earth, Robespierre engages the most gifted director, the painter David, who will soon plant the scene of other festivities, this time imperial… (…) On the terrace of the Tuileries Palace, a colossal amphitheatre, whose floor completely covers the ornamental lake, begins to grow.  Cyclopean statues rise above the formal French gardens, which have become the Jardin national.  They symbolise Atheism, Ambition, Discord, Egoism, and will explode on the day of the ceremony…  It is on 20 prairial, year II (8 June, 1794) that it will take place.  Robespierre has chosen the Sunday which, according to the former Roman Catholic rites, was Pentecost. On the Champs-de-Mars, the Holy Mountain is nearly finished.  The People’s representatives will take place on it, along with the choirs, the orchestras and the banner-bearers.  On its summit, a column fifty feet high overlooks the entrance to a deep cave, lit by giant candelabra.  A river seeps from it, snaking between Etruscan tombs in the shade of an oak tree, and an antique altar, a pyramid, a sarcophage and a temple with twenty columns, complete this mythology.  It takes only a month for a swarm of ditch-diggers, masons, carpenters and artists of all kinds, to finish this unusual church. And here, at last, is the astonishing day of 8 June 1794.  Starting at five o’clock in the morning, the sound of pikes striking the pavement, the rattling of sabres, and the noise of a great troop marching, out-of-step and almost in silence, for a lot of these men do not have shoes, is to be heard.  Robespierre sees, parading under his windows, in columns of twelve, some of the forty-eight Sections of the People who are hurrying towards the meeting places, followed by the Parisians who, already the day before, had discovered the altars of the Supreme Being. (…) Occupied by the armies of Europe outside, chopped down by the butchers of the revolutionary tribunal on the inside, the capital escapes for the first time in months from the baseness of this time of proscriptions…  A lot of people cry and embrace each other in the fading light. (…) From 8 June, the day of the Festival of the Supreme Being, Robespierre will have fifty more days to live.  (…) For Robespierre, the sense and the aim of this festival were to replace the pagan, dry and materialistic cult of Reason by a religion which restored transcendance, a God, without Whom, no man worthy of the name, could live… Right from the beginning of the Revolution, Robespierre had tried to stop the dechristianisation of France.  As a faithful disciple of Rousseau, whom he qualified as a “divine man”, he was sure that Man is a “religious animal”, incapable of durably banishing his spiritual needs.  He shared the feeling of the curate of Boissis-la-Bertrand who was willing to renounce his “mummeries”, that is to say, all formal aspects of the cult, but not his religion. (…) The 8 June festival gives a fairly precise idea of the religion that Robespierre wanted, but did not have the time to develop. (…) What originally caused Robespierre’s downfall was the Deputies’ certainty that he wanted to install a new religion of which he would be the High Priest, and this enormous misunderstanding would be fatal to him.  It was not the god of the christian religion that he wanted to install, of course.  He most certainly wanted to radically end the christian institutions and abolish two thousand years of “perverted” christianism, to return to the spirit and the liturgy of the Roman Republic, the religion of Antiquity.  His ideal not only had the sense of political revolution, but also that of a fundamental cultural revolution. This was his great dream.  He succeeded in giving it body for a few hours by getting five hundred thousand French people to live a day in the fashion of Antiquity. Louis Pauwels

Attention: une solution finale peut en cacher une autre !

En ce jour où avec le don du Décalogue et de l’Esprit Saint pour l’universaliser, la Synagogue et l’Eglise ne fêtent rien de moins que leur fondation et acte de naissance

Et où après l’église protestante des Européens les plus mécréants et avant la Cour suprême du peuple jusqu’ici le plus croyant du monde, c’est à présent aux Européens les plus christianisés mais aussi à l’église la plus décrébilisée par les scandales de pédophilie …

Que se décide au vote majoritaire (A quand un référendum sur la pédophilie ?) la vérité sur l’origine de la vie elle-même …

Alors qu’avec une science désormais capable de s’affranchir du temps, on peut à présent  changer  les faits qui ne coïncident plus avec la théorie …

Pendant qu’après l’Amérique d’Obama et la France de Hollande, c’est au tour du Vatican du petit père des peuples François d’imposer au seul Israël …

La prétendue nouvelle vérité d’un Etat qui n’existe même pas sur le papier

Mais qui à l’instar de la purification de toute trace du judéo-christianisme qui se poursuit dans le berceau de celui-ci et pendant que les mollahs eux préparent tranquillement leur Arme fatale, prétend à rien de moins que l’annihilation de son voisin …

Comment ne pas repenser …

A cette même journée de Pentecôte-Shabouot de 1794

Où redescendant de son Horeb en papier-maché du champ de Mars …

Après le sacrifice par régions et tombereaux entiers des réfractaires comme du roi et de son grand rival Danton …

Et avec son nouveau culte de la Raison et ses autels couverts de marbres vivants de chair publique …

L’Incorruptible et nouveau Moïse entendait apporter sous les vivats de la foule …

L’ultime solution finale à la question chrétienne en France  ?

8 juin 1794
La fête de l’Être suprême
À Paris, le 8 juin 1794 (20 prairial An II), le tout-puissant Maximilien de Robespierre conduit la première fête en l’honneur de l’Être suprême. Par cette cérémonie qui se veut grandiose, civique et religieuse à la fois, l’« Incorruptible » tente de concilier la déchristianisation menée par le Comité de Salut public avec les aspirations religieuses de la grande masse des Français.

Fabienne Manière

Hérodote

L’Être suprême plutôt que Dieu
Depuis l’exécution de son principal rival, Danton, le 5 avril 1794, Robespierre écrase de son autorité le Comité de Salut public (le gouvernement révolutionnaire) ainsi que l’assemblée de la Convention. Celle-ci est dominée par les députés de la Montagne (ainsi nommés parce qu’ils siègent sur les bancs les plus élevés). Alliés aux sans-culottes des sections et des clubs parisiens, ils sont disposés à suivre Robespierre sur le chemin sans fin de la Révolution.

Robespierre a recours à la Terreur contre les citoyens suspects de tiédeur révolutionnaire. Il est décidé d’autre part à mener la déchristianisation de la France à son terme.

Mais l’« Incorruptible » ne veut pas priver le peuple de références religieuses et morales car il caresse l’idéal rousseauiste d’une société vertueuse, démocratique et égalitaire. Lui-même se veut déiste, à l’encontre de nombre de ses anciens adversaires, athées déclarés tels Anacharsis Cloots, « pape des athées » ou encore Danton et Desmoulins. Au Club des Jacobins, il lance : « Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer ! »

À son instigation, la Convention décrète le 18 floréal An II (7 mai 1794) : « le peuple français reconnaît l’existence de l’Être suprême et de l’Immortalité de l’âme ». Par la même occasion, elle annonce une grande fête destinée à inaugurer ce nouveau culte fondé sur la raison.

Vive la fête
Arrive le jour fixé pour la fête de la nouvelle divinité sans nom et sans visage. Il coïncide avec le dimanche de la Pentecôte (commémoration par les chrétiens de la révélation de l’Esprit-Saint aux apôtres du Christ). À l’initiative du peintre et conventionnel Louis David, grand ordonnateur des festivités, les maisons de Paris ont été fleuries et enguirlandées pour l’occasion.

Robespierre, en habit bleu à revers rouge, met d’abord le feu à une effigie de l’Athéisme, installée au milieu du bassin des Tuileries. En s’effondrant, elle révèle la statue de la Sagesse !

Puis le dictateur prend la tête d’un cortège magnifique, un bouquet de fleurs et d’épis à la main. Il se rend au Champ-de-Mars où a été dressée une montagne surmontée d’un obélisque et de la statue du Peuple français.

La foule des sans-culottes semble apprécier les effets de scène mais le ridicule de la cérémonie suscite des ricanements dans l’entourage de l’« Incorruptible ». Celui-ci, qui s’en aperçoit, dissimule mal son ressentiment.

Retour à la tradition

Quelques semaines plus tard, la victoire de Fleurus rassure les conventionnels sur le sort du pays. Elle les convainc de se défaire d’un chef devenu encombrant et décidément imprévisible. La chute de Robespierre, le 27 juillet 1794 (9 thermidor An II), entraîne la disparition de l’Être suprême.

Les conventionnels n’en ont pas fini pour autant avec les fêtes civiques. Le 11 octobre 1794, ils organisent l’entrée solennelle au Panthéon de la dépouille de leur maître à penser Jean-Jacques Rousseau. Ils créent aussi sept fêtes nationales : fête de la République (1er vendémiaire), fête de la Jeunesse (10 germinal), fête des Époux (10 floréal), fête de la Reconnaissance (10 prairial), fête de l’Agriculture (10 messidor), fête de la Liberté (9 et 10 thermidor – chute de Robespierre ! -), fête de la Vieillesse (10 fructidor).

Dans un ultime effort pour déchristianiser la société, la loi du 9 septembre 1798 instaure la fête du décadi en remplacement du dimanche ; ce jour-là, le président de chaque municipalité, en uniforme d’apparat, doit rassembler les habitants sur la place du village, les informer des lois et des nouvelles, prononcer un sermon civique et célébrer les mariages civils !

Avec le Concordat de 1802, enfin, la religion catholique va retrouver les faveurs des autorités publiques.

Voir aussi:

Mariage homosexuel : l’Irlande plus démocratique que les socialistes français, fait un référendum

Les votes sont clos, en République d’Irlande, où plus de 3.2 millions d’habitants étaient appelés à prendre part à un référendum sur la légalisation du mariage homosexuel.

3,2 millions d’Irlandais chanceux qu’on leur demande s’il veulent que la constitution du pays soit modifiée pour autorisé le mariage des couples de gays et lesbiennes.

3,2 millions d’Irlandais plus chanceux que les Français, méprisé par les élites et les dirigeants politiques socialistes, qui ont fait passer leur réforme malgré l’hostilité de millions de Français dans les rues.

3,2 millions d’Irlandais respectés par leur gouvernement, qui, pour un sujet de société aussi important, les a consultés.

Le résultat du référendum irlandais sur le mariage homosexuel semble se diriger vers deux fois plus de oui que de non.

Il semble même que dans les régions rurales les plus conservatives, le vote se situe aux alentours de 50/50.

A Dublin, le vote est massivement pour le Oui.

Voir également:

L’Irlande a voté en faveur du mariage homosexuel à 62,1% selon les résultats définitifs
L’Irlande devient ainsi le premier pays au monde à autoriser le mariage gay par voie référendaire.

Francetvinfo avec AFP et Reuters

23/05/2015

Les Irlandais se sont prononcés massivement en faveur de la légalisation du mariage homosexuel, selon des résultats définitifs de ce référendum historique, organisé vendredi, et publiés samedi 23 mai. Le oui l’emporte largement avec 62,1% des voix, selon des résultats publiés par la chaîne nationale RTE.

Plus de 3,2 millions d’Irlandais ont été appelés à se prononcer sur une modification de la Constitution proposant d’autoriser « le mariage entre deux personnes, sans distinction de sexe ».

Le 19e pays dans le monde à légaliser le mariage gay
L’Irlande devient ainsi le 19e pays, le 14e en Europe, à légaliser le mariage gay. Il est par contre le seul pays à l’avoir fait par référendum, les autres ayant opté pour la voie parlementaire.

« C’est historique », a souligné le ministre de la Santé, Leo Varadkar. Ce référendum, a-t-il estimé, constitue « une révolution culturelle » dans un pays longtemps conservateur et où l’homosexualité n’a été dépénalisée qu’en 1993. « Je suis tellement fier d’être Irlandais aujourd’hui », avait tweeté en début de journée, Aodhan O Riordain, secrétaire d’Etat pour l’Egalité, tandis que, dans les rues de Dublin, des Irlandais, hommes et femmes de tous âges, exultaient et se prenaient dans les bras.

Avant même la publication des résultats, un des principaux responsables de la campagne du non, David Quinn, avait concédé la défaite de son camp. « C’est une claire victoire pour le camp du oui », a-t-il déclaré, adressant ses « félicitations » aux partisans du mariage homosexuel.

Voir également:

Pédophilie: excuses du primat d’Irlande
Le Figaro/AFP
17/03/2010

Le primat d’Irlande, au coeur d’une polémique pour n’avoir pas dénoncé des abus sexuels dont il avait eu connaissance, a présenté aujourd’hui ses excuses et exprimé sa « honte » de n’avoir pas défendu les valeurs qu’il professe.

Des familles de victimes ont réclamé la démission du cardinal Sean Brady depuis que l’église catholique d’Irlande a reconnu qu’il avait participé à deux réunions en 1975 au cours desquelles deux victimes présumées d’abus sexuels avaient signé des promesses de silence.

« Je voudrais dire à tous ceux qui ont été blessés par des manquements de ma part, que je leur présente des excuses du fond du coeur », a déclaré le cardinal Brady dans son homélie en la cathédrale d’Armagh (Irlande du nord), selon un communiqué de l’église publié à Dublin. « Je voudrais également présenter mes excuses à tous ceux qui ont l’impression que je les ai laissés tomber », a-t-il ajouté. « Avec le recul, j’ai honte de n’avoir pas toujours soutenu les valeurs que je défendais et en lesquelles je crois ».

Une culture de « silence » et de « secret

Le primat d’Irlande avait affirmé lundi qu’il ne présenterait sa démission qu’à la demande du pape Benoît XVI. Selon l’Eglise catholique, le cardinal Sean Brady a participé à deux réunions en 1975, alors qu’il était prêtre. Au cours de ces réunions, deux victimes présumées « ont signé des engagements promettant de respecter la confidentialité de la récolte d’informations », a confirmé l’Eglise.

Les autorités ecclésiastiques enquêtaient alors sur le père Brendan Smyth, considéré comme responsable d’abus sexuels sur des centaines d’enfants sur une période de 40 ans et mort en prison après son arrestation dans les années 1990.
Sur la radio BBC Ulster, le cardinal Brady avait expliqué lundi qu’il régnait il y a 35 ans une culture de « silence » et de « secret » concernant les abus sexuels à la fois dans le clergé et dans la société civile, et qu’il n’avait pas jugé de sa responsabilité de dénoncer le pédophile.

Mariage gay : L’Eglise protestante unie de France autorise la bénédiction des couples de même sexe
Rédaction du HuffPost avec AFP
17/05/2015

MARIAGE POUR TOUS – L’Eglise protestante unie de France (EPUdF) a adopté dimanche la possibilité de bénir les couples homosexuels à l’issue d’un vote très largement positif, une quasi-première en France, a indiqué le porte-parole de la principale Église protestante du pays.

Sur la centaine de délégués de l’EPUdF réunis à Sète (Hérault) et ayant pris part au vote, 94 ont voté pour la possibilité d’offrir une bénédiction religieuse aux couples homosexuels, et trois contre, a-t-il précisé.

Ce vote donne la possibilité aux 500 pasteurs de l’EPUdF de bénir des couples homosexuels, sans pour autant y obliger ceux des pasteurs qui sont opposés à un tel geste.

Le protestantisme est actuellement la 3e religion en France. Selon des données de l’INED de 2008, 45% des Français se déclarent sans religion, 43% se disent catholiques, 8% musulmans, 2% protestants et 0,5% juifs. En 2012, le CSA estimait de son coté que les catholiques représentaient 56% de la population adulte, les musulmans 6%, les protestants 2% et les juifs 1%.

Même bénédiction que celle accordée aux couples hétérosexuels

Le mariage n’est pas un sacrement pour les protestants, mais les couples hétérosexuels unis en mairie peuvent être bénis au temple. En France, seule la Mission populaire évangélique (MPEF), une Eglise beaucoup plus petite que l’EPUdF, autorise un « geste liturgique d’accueil et de prière » pour les homosexuels.

Cette décision intervient deux ans après l’adoption de la loi Taubira sur le mariage gay. Les délégués de la principale Eglise protestante française sont réunis depuis jeudi autour du thème « Bénir, témoins de l’Evangile dans l’accompagnement des personnes et des couples ».

L’EPUdF, qui incarne le courant historique du protestantisme français, revendique 110.000 membres actifs parmi 400.000 personnes faisant appel à ses services.

Tout en se défendant d’être en concurrence avec une mouvance évangélique en forte croissance, elle parie désormais sur une démarche missionnaire pour « passer d’une Eglise de membres à une Eglise de témoins ».

Voir encore:

Etats-Unis : la Cour suprême s’apprête à légaliser le mariage gay
La Cour suprême des Etats-Unis examine mardi la constitutionnalité du mariage homosexuel pour dire si les couples de même sexe peuvent se marier partout dans le pays. Deux ans après le premier round, la plus haute juridiction des Etats-Unis arbitre le second lors d’une audience exceptionnelle de deux heures et demie.
Le Parisien

28 Avril 2015

La Cour suprême des Etats-Unis examine ce mardi, lors d’une audience exceptionnelle de deux heures et demie, la constitutionnalité du mariage homosexuel. Il s’agit de dire si les couples de même sexe peuvent se marier partout dans le pays. Des centaines de militants des deux camps étaient attendus dans la journée devant le temple de la justice.

Une première dans l’UE : le Premier ministre du Luxembourg épouse son compagnon
Plusieurs milliers d’Américains ont déjà manifesté ce week-end à Washington, dont certains ont campé au pied des marches de la haute Cour pour s’assurer une place dans la salle d’audience.

Quatre Etats réfractaires

Légal dans 37 Etats sur 50 (dont certains en appel) ainsi que dans la capitale fédérale Washington, le mariage homosexuel doit encore être reconnu dans tout le pays. C’est ce que réclament des gays et lesbiennes de quatre Etats interdisant le mariage homosexuel, le Tennessee, le Kentucky, le Michigan et l’Ohio. Soutenus par l’administration Obama, les 16 plaignants veulent pouvoir se marier légalement ou voir leur mariage reconnu dans l’Etat où ils vivent. Les quatre Etats incriminés, soutenus par nombre d’organisations religieuses et conservatrices, définissent le mariage comme l’union entre un homme et une femme, refusent de marier des hommes entre eux ou des femmes entre elles, et ne reconnaissent pas le mariage homosexuel lorsqu’il a été légalement célébré ailleurs.

Les quatre Etats visés arguent de leur droit à protéger la définition traditionnelle du mariage, pour «respecter la complémentarité biologique des deux sexes» dans l’éducation des enfants et dans la société. De leur côté, les plaignants ne voient rien d’autre qu’une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. «Quelles que soient les limites imposées au droit à se marier, le genre des conjoints ne peut pas être l’une d’elles», arguent les couples du Michigan. Ils jugent aussi que les quatre Etats violent leur liberté de voyager en refusant de reconnaître leur mariage lorsqu’il a été légalement célébré.

Trois questions pour les neuf Sages

Pour savoir si elle légalise le mariage gay sur tout le territoire américain, la haute Cour se demandera d’abord si le 14e Amendement de la Constitution exige d’un Etat qu’il unisse par les liens du mariage les couples de même sexe. Dans un deuxième temps, elle déterminera si le même Amendement requiert qu’un Etat reconnaisse un mariage homosexuel légalement célébré dans un autre Etat. Dans les deux cas, elle s’appuiera sur le principe d’égalité de tous devant la loi et sur le droit fondamental au mariage. Sur la base du principe de «rationnalité», les neuf sages se demanderont également si un Etat a un intérêt légitime à interdire le mariage des couples de même sexe ou si c’est purement arbitraire.

Fin juin 2013, la Cour suprême a abrogé une partie d’une loi fédérale qui définissait le mariage comme l’union entre un homme et une femme, ouvrant de facto les droits fédéraux à la retraite, à la succession ou aux abattements fiscaux à tous les couples légalement mariés, qu’ils soient hétérosexuels ou homosexuels. Mais le mariage restait du ressort des Etats. Or la haute Cour protège traditionnellement les principes de fédéralisme.

Une marche arrière difficile

D’avis d’experts, la reconnaissance du mariage pour tous à l’échelle du pays semble désormais «inévitable». Traditionnel défenseur des droits homosexuels, le juge conservateur Anthony Kennedy devrait rejoindre les quatre juges progressistes de la haute Cour pour valider le mariage homosexuel au niveau national.

Ces dernières années, la haute Cour américaine, pourtant à majorité conservatrice, a confirmé toutes les décisions judiciaires en faveur des unions des couples de même sexe, «ce qui rend une marche arrière vraiment difficile», estime Steven Schwinn, professeur de la John Marshall Law School.

Cette controverse sur la mariage gay présente un caractère historique. Plus de 150 argumentaires ont été déposés – un record – dont une vingtaine par les deux parties. Sur ces argumentaires, 78 soutiennent les plaignants homosexuels, dont l’administration Obama ; 67 prennent position pour les Etats, dont la Conférence des évêques des Etats-Unis.

Voir de même:

Luxembourg : le Premier ministre épouse son compagnon
B.W avec AFP

Europe 1

15 mai 2015

INÉDIT – Le Premier ministre luxembourgeois s’est marié avec son compagnon, une première pour un chef de gouvernement de l’Union européenne.
Le Luxembourg a célébré une grande première. Le Premier ministre libéral du Luxembourg Xavier Bettel a épousé vendredi son compagnon belge Gauthier Destenay. Il est ainsi devenu le premier dirigeant uni par les liens d’un mariage homosexuel dans l’Union européenne. « Le Luxembourg donne l’image d’un pays en avance sur les questions de société. C’est un message envoyé à un moment où l’homophobie est en train de monter en Europe » », a insisté Charles Michel, le Premier ministre belge.

Le mariage homosexuel légalisé en 2014. Xavier Bettel et Gauthier Destenay, tous deux en costumes sombres, sont arrivés en marchant, la main dans la main. Deux cent personnes étaient présentes devant l’hôtel de ville de Luxembourg et ont applaudi le couple à son arrivée. Les mariés sont revenus sur le perron pour les saluer après la cérémonie et ont eu droit à un lancer de riz. Le jeune Premier ministre, 42 ans, avait fait savoir en août 2014 son intention de se marier avec Gauthier Destenay, un architecte belge. L’annonce était intervenue deux mois après l’adoption à une très large majorité de la législation autorisant le mariage et l’adoption pour les couples du même sexe au Luxembourg.

« Tu dois être honnête avec toi-même ». Xavier Bettel a été nommé chef du gouvernement fin 2013. Il n’a jamais caché son homosexualité à ses compatriotes. « J’aurais pu le cacher, ou le refouler et être malheureux toute ma vie. J’aurais pu avoir une relation avec quelqu’un de l’autre sexe et avoir des relations homosexuelles en cachette. Mais je me suis dit : si tu veux faire de la politique et être honnête en politique, tu dois être honnête avec toi-même et donc t’accepter toi-même », a-t-il expliqué sur la chaîne de télévision belge RTBF. Le Luxembourgeois n’est cependant pas le Premier chef de gouvernement homosexuel à se marier en Europe. La Première ministre islandaise Johanna Sigurdardottir, au pouvoir depuis 2009, a épousé sa compagne en 2010, mais l’Islande n’est pas membre de l’UE.

Voir de plus:

Exclu Gala – Alex Goude: « Avec Romain, on aime­rait un second enfant »
L’anima­teur raconte son homo­pa­ren­ta­lité
Séverine Servat

Gala

22 mai 2015

Alex Goude, anima­teur de La France a un incroyable talent, dévoile sa vie privée. Comme un acte mili­tant. Avec Romain, son mari et amou­reux depuis cinq ans, ils ont eu un fils, Elliot, né par mère porteuse aux États-unis. Rencontre dans leur home sweet home, à Las Vegas.

Du centre-ville truffé de casi­nos, il faut quinze minutes pour arri­ver devant la maison du trublion de M6 située dans un coquet lotis­se­ment de Las Vegas. Deux voitures, dont une imma­tri­cu­lée au nom de son chien, une piscine entou­rée de palmiers fichés sous le soleil de plomb de la ville, deux chambres d’amis et un écran de télé­vi­sion géant exté­rieur signent l’abou­tis­se­ment du rêve améri­cain d’Alex Goude. Voici deux ans qu’il s’est installé à Las Vegas et prend l’avion pour tour­ner ses émis­sions en France. Dans un tran­sat, son fils Elliot, trois mois. Un tableau ordi­naire, sauf qu’El­liot a la parti­cu­la­rité d’avoir deux papas. Alex est marié à Romain, trente ans, et l’en­fant du couple est né par gesta­tion pour autrui. Cette démarche, inter­dite en France, pousse plus loin le débat autour des droits des homo­sexuels. Que penser de ce tableau de famille 2.0, homo­pa­ren­tal, qui oscille entre conte de fées contem­po­rain et étran­geté assu­mée ? Lorsque la nais­sance s’af­fran­chit des lois de la nature, que reste-t-il de nos repères ? L’ani­ma­teur livre ses convic­tions.

Gala : Pourquoi choi­sir, aujourd’­hui, de parler de votre vie privée ?

Alex Goude : Pour fêter les deux ans du mariage homo­sexuel léga­lisé en avril 2013. Et puis, je suis très heureux, alors ça donne envie de faire bouger les menta­li­tés. Mon mari et moi sommes venus vivre à Las Vegas pour être libres d’avoir l’en­fant que nous n’au­rions pas pu avoir en France. À Paris, on a parfois l’im­pres­sion qu’il ne faut être ni juif ni noir, ni arabe ni homo­sexuel. Je ne supporte plus le refus de l’autre. J’en ai assez qu’on dise à Romain de féli­ci­ter sa femme pour la nais­sance. Moi-même je devrais me taire. Eh bien non. Je le reven­dique : nous sommes deux hommes, nous avons fait un enfant et ça se passe bien.

Gala : S’as­su­mer et s’y tenir, c’est un long chemi­ne­ment ?

A. G. : On n’ima­gine pas à quel point. Jusqu’à vingt-cinq ans, je pensais que j’étais hété­ro­sexuel,  j’avais du succès avec les filles, je devais me fian­cer, avoir des enfants comme tout le monde. Puis tout a basculé.

Gala : Vous avez réalisé que ce ne serait pas votre destin ?

A. G. : Oui, j’ai pris des cours de théâtre et à force d’en­dos­ser des person­na­li­tés diffé­rentes, je me suis libéré. Un jour, j’ai embrassé un homme. Le lende­main, j’ai pleuré toute la jour­née, sous le choc. L’his­toire d’amour a duré six mois. J’ai à nouveau aimé des femmes et puis fina­le­ment mon choix s’est à nouveau porté sur un homme.

Gala : Vous l’avez annoncé à vos parents ?

A. G. : Mon père était tombé dans l’al­cool. On ne se parlait plus (le père d’Alex est décédé des suites de son alcoo­lisme). Pour ma mère, qui m’avait connu hétéro, c’était dur à imagi­ner. J’étais son fils unique, elle a pensé qu’elle ne serait jamais grand-mère. Aujourd’­hui elle est heureuse, la vraie ‘Lady Gaga’, c’est elle.

Gala : Le grand public, lui, n’en a jamais rien su…

A. G. : Ma chaine, M6, en tout cas, est au courant et assume. Je n’au­rais jamais parlé de ma vie privée si je ne rece­vais pas sans arrêt, via les réseaux sociaux, des témoi­gnages de jeunes gays déses­pé­rés.

Gala : Vous les écou­tez?

A. G. : Mieux: je leur réponds. L’ho­mo­sexua­lité est encore lour­de­ment stig­ma­ti­sée. En Espagne en 2005 ou au Portu­gal en 2010, la léga­li­sa­tion du mariage est passée en douceur. En France, le débat a été instru­men­ta­lisé. Les gens sont sortis défi­ler en assu­mant leur homo­pho­bie. A ce moment, des adoles­cents me disaient « mes parents me forcent à mili­ter avec eux, ils ne savent pas que je suis homo ». C’était choquant. Qu’est-ce que les parents d’un enfant de six ans qu’on emmène défi­ler savent de la voie qu’il emprun­tera plus tard? Si je peux montrer qu’on réus­sit à fonder une famille malgré tout, alors je le fais.

Gala : Votre enfant est né d’une mère porteuse. Vous auriez pour­tant pu recou­rir à l’adop­tion…

A.G. : En tant que céli­ba­taire oui, mais pas en tant que couple. Pour être en mesure d’adop­ter, en France, aujourd’­hui, on doit taire son homo­sexua­lité. Je n’avais pas envie de mentir. Et puis c’est vrai que Romain et moi, rêvions d’un lien du sang.

Gala : Vous aviez des exemples autour de vous ?

A.G. : Bien sûr. Au sein du show­biz français, nous ne sommes pas les seuls à avoir eu recours à la gesta­tion pour autrui, mais le sujet est tabou. D’au­tant qu’on doit partir à l’étran­ger pour le faire. Aux États-Unis, où la gesta­tion pour autrui (GPA) est légale, les profes­sion­nels ont plus de vingt-cinq ans de recul sur le sujet. Et les enfants, une fois adultes, vont bien. Nous avons fait appel à une agence sérieuse.

Gala : Pour bien comprendre, quel est le proto­cole à suivre ?

A.G. : On l’a débuté avant même de se marier, en mars 2013. D’abord, il faut répondre à des ques­tions sur son couple avec un psy, une démarche que jamais aucun parent biolo­gique n’a évidem­ment à subir pour mettre au monde un enfant. Puis s’in­for­mer des impli­ca­tions psycho­lo­giques qui sont assez complexes, c’est vrai. Il faut être très clair : deux hommes ne peuvent pas faire un enfant. Le tiers, c’est la mère, et on doit respec­ter son rôle. On choi­sit alors une donneuse d’ovule, et une mère porteuse, qui est une personne diffé­rente de la donneuse d’ovule.

Gala : A ce moment, quels ont été vos critères de choix?

A. G. : Romain et moi avons choisi la donneuse qui parais­sait le mieux dans sa peau. Ensuite, nous avons aussi choisi, par goût, une personne aux yeux bleus (ndlr : Elliot a les yeux clairs) comme plusieurs personnes de nos familles respec­tives. C’est une jeune femme qui travaille dans la mode, une yuppie, qui a déjà donné ses ovules à deux autres couples. Elle est dans une démarche altruiste.

Gala : Mais la mère porteuse, elle fait ça pour l’argent, non?

A. G. : Le recours à la GPA pour un couple coûte très cher, mais dans tout le proces­sus, celle qui touche le moins d’argent, c’est la mère porteuse. Elle gagne moins que l’avo­cat, le méde­cin ou l’agence. La nôtre est noire – déjà maman parce que c’est la condi­tion pour porter le bébé d’un autre – et suit des études de psy. Elle avait déjà porté un enfant pour un autre couple. Nous sommes deve­nus amis après avoir commu­niqué avec elle par Skype tout le temps de la gros­sesse. D’après les psys, l’enfant, plus tard, est moins atta­ché à la donneuse d’ovule qu’à la mère porteuse. Cette dernière nous a déjà dit qu’elle voudrait porter notre deuxième enfant. Je comprends le débat autour de la marchan­di­sa­tion des corps, mais dans les faits, ça ne se passe pas comme ça.

Gala : Comment vos voisins prennent-ils votre famille atypique?

A. G. : Sans préju­gés. On se reçoit les uns les autres pour des barbe­cues. Et nous veillons à garder des réfé­rents fémi­nins avec ma mère, celle de Romain, ma tante et sa fille, qui habitent près de chez nous à Las Vegas.

Gala : Comment envi­sa­gez-vous la suite ?

A.G. : On n’a pas voulu savoir si Elliot est mon fils ou celui de Romain. Mais on aime­rait avoir un second enfant et qu’il soit de l’autre papa, c’est ce qu’on a demandé au méde­cin.

Gala : Vous n’avez pas l’im­pres­sion de propo­ser une sorte de monde virtuel, de labo­ra­toire expé­ri­men­tal ?

A.G. : Ecou­tez, pour être clair, quand on est là en train de se tripo­ter devant une éprou­vette pour avoir un bébé alors que c’est tout simple pour les hété­ros, bien sûr, on voit bien que ce n’est pas natu­rel. Mais dans 99% des cas, les psys disent que ce que l’en­fant retient, in fine, c’est la volonté farouche qu’ont eue ses parents de l’avoir.

Voir aussi:

En Allemagne, une femme de 65 ans, mère de 13 enfants, donne naissance à des quadruplés
AFP/ RTL

23 mai 2015

Une Allemande de 65 ans, mère de 13 enfants et grand-mère de 7 petits-enfants, a accouché de quadruplés « pas complètement développés » à Berlin, un cas controversé mêlant médecine et téléréalité qui relance le débat sur les grossesses tardives.

Annegret Raunigk, qui a procédé à des fécondations in vitro en Ukraine, est désormais la mère de quadruplés la plus âgée au monde, selon la chaîne de télévision RTL, détentrice des droits exclusifs sur cette grossesse hors normes.

Les bébés prématurés, trois garçons et une fille, sont nés mardi par césarienne, après seulement 26 semaines de grossesse. Ils ont été placés en couveuse mais ont « de bonnes chances de survivre », selon un communiqué de RTL.

« Toutefois, les bébés, par comparaison avec une naissance normale dans la 40e semaine de grossesse, ne sont pas encore développés complètement. D’éventuelles complications ne peuvent donc pas être complètement exclues », poursuit la chaîne.

Annegret Raunigk, enseignante d’anglais et de russe qui doit prendre sa retraite à l’automne, avait effectué de multiples tentatives en Ukraine avec un donneur et une donneuse anonymes. La dernière tentative s’est avéré un succès puisque les quatre ovules implantés avaient été fécondés.

Malgré des conditions exceptionnelles, « la grossesse s’est déroulée étonnement sans problèmes », assure RTL, sur la foi des témoignages de médecins qui l’ont prise en charge.

Cette femme élégante, les cheveux roux et une fine paire de lunettes sur les yeux, n’en est pas à sa première grossesse tardive. En 2005, alors âgée de « seulement » 55 ans, elle avait mis au monde une petite fille.

C’est d’ailleurs pour répondre au souhait de sa dernière fille d’avoir un petit frère ou une petite sœur qu’elle a décidé de retenter une insémination artificielle, a-t-elle expliqué. Nés de 5 pères différents, les autres enfants d’Annegret Raunigk ont déjà tous quitté le domicile maternel.

Avant même de naître, Neeta (655 g, 30 cm), Dries (960 g, 35 cm), Bence (680 g, 32 cm) et Fjonn (745 g, 32,5 cm) ont suscité un vif intérêt médiatique en Allemagne. Il faut dire que la chaîne de télévision privée, qui diffuse nombre d’émissions de téléréalité et de télécrochet, s’est assuré les droits exclusifs sur cette histoire rocambolesque.

C’est la chaîne qui avait d’ailleurs révélé cette grossesse en avril.

Après avoir suivi Annegret Raunigk ces derniers mois sous la forme d’un « journal de grossesse », RTL a promis de poursuivre l’histoire, même si elle assure qu’aucun tournage n’a eu lieu dans l’hôpital où sont nés les bébés.

La chaîne a également précisé que la mère ne répondrait à aucune demande d’interview d’autres médias.

Lors de la révélation de cette grossesse extraordinaire, la Berlinoise n’avait accordé d’entretien qu’à la chaîne RTL et au quotidien à grand tirage Bild qui l’avait fait poser en Une sous le titre: « J’ai 65 ans et j’attends des quadruplés ».

Annegret Raunigk n’en est pas à sa première coopération avec le groupe RTL. Il y a dix ans, elle avait déjà négocié un contrat d’exclusivité avec la chaîne et le journal Bild pour la naissance de sa fille.

Interviewée en avril, la Berlinoise avait balayé les critiques sur son manque de responsabilité, notamment sur le fait qu’elle aura plus de 70 ans quand les enfants entreront à l’école. « On ne peut jamais savoir ce qui va se passer. Il peut aussi se passer des choses à 20 ans », avait-elle argumenté, affirmant que c’était à chacun de décider pour soi-même de devenir parent.

« Les enfants me permettent de rester jeune », avait-elle lancé.

Ces dernières années, plusieurs cas de grossesse tardive ont attiré l’attention, notamment en Italie. En Allemagne, la chanteuse italienne très populaire Gianna Nannini avait aussi retenu l’attention en 2010 en mettant au monde une petite fille à l’âge de 56 ans.

Voir également:

Mère de quadruplés à 65 ans  : l’indignation du professeur Nisand
Une femme de 65 ans, ayant recours à une fécondation in-vitro en Ukraine, a donné naissance à quatre enfants prématurés en Allemagne. «  Il ne faut surtout pas y voir un exploit. On est juste dans la médecine du fric et de l’irresponsabilité » , dénonce  le professeur Israël Nisand , chef du pôle de gynécologie-obstétrique du CHRU de Strasbourg,

La Croix

23/5/15

Le professeur Israël Nisand dénonce avec force le recours à une fécondation in vitro chez cette femme de 65 ans, mère de quadruplés.

« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Chef du pôle de gynécologie-obstétrique du CHRU de Strasbourg, le professeur Israël Nisand cite spontanément Rabelais pour exprimer sa consternation après l’annonce, samedi 23 mai, de l’accouchement d’une Allemande de 65 ans, qui a mis au monde quatre enfants très prématurés. Le cas de cette sexagénaire, Annegret Raunigk, déjà mère de 13 enfants et grand-mère de 7 petits-enfants, avait défrayé la chronique en avril lors de l’annonce de sa grossesse. Après cet accouchement, elle est désormais la mère de quadruplés la plus âgée au monde. «  Il ne faut surtout pas y voir un exploit, ni un record à célébrer. Et les médecins, qui l’ont aidé dans cette démarche, n’ont pas de quoi être fiers. On est juste dans le champ de la médecine du fric et de l’irresponsabilité  », s’agace le professeur Nisand.

«  Ils iront à l’école avec une mère qui aura plus de 70 ans »
Les bébés prématurés, trois garçons et une fille, sont nés mardi par césarienne, après seulement 26 semaines de grossesse. Ils sont dans en situation de grande prématurité et ont été placés en couveuse. « Une naissance à 26 semaines de grossesse expose les enfants à des handicaps qui peuvent être lourds. Et même si tout se passe bien pour eux, il faut songer à leur vie plus tard », explique le professeur Nisand. «  Ils iront à l’école avec une mère qui aura plus de 70 ans », ajoute-il. Interviewée en avril sur ce thème, Annegret Raunigk, avait rejeté les critiques sur son manque de responsabilité « On ne peut jamais savoir ce qui va se passer. Il peut aussi se passer des choses à 20 ans », avait-elle estimé affirmant que c’était à chacun de décider pour soi-même de devenir parent. « Les enfants me permettent de rester jeune », avait-elle ajouté.

Un enfant après 40 ans
Une fécondation in-vitro en Ukraine
Cette enseignante d’anglais et de russe, qui doit prendre sa retraite à l’automne, s’est rendue en Ukraine pour de multiples tentatives de fécondation in-vitro avec un donneur et une donneuse anonymes. La dernière tentative s’est avérée être un succès puisque les quatre ovules implantés ont été fécondés. « Il n’existe malheureusement aucune réglementation internationale permettant d’éviter ce type de bavures médicales, indique le professeur Nisand. On arrive forcément à des dérives quand la médecine emprunte des chemins dévoyés et que des praticiens se comportent comme des prestataires de service avec pour seul principe que celui ou celle qui paie peut tout avoir  ».

Des pays connus pour accepter ces pratiques
Selon le professeur Nisand, plusieurs pays sont connus pour abriter certains médecins qui acceptent de favoriser ces grossesses tardives via les techniques d’assistance médicale à la procréation. «  C’est le cas de l’Ukraine, de la Grèce et surtout de la Turquie. Sinon, il y a aussi l’Inde où quelques médecins peuvent accepter de faire des choses très déraisonnables », indique le médecin, en se félicitant de l’existence en France des lois de bioéthiques qui s’opposent à ces pratiques.

En France, des techniques réservées aux couples « en âge de procréer »
En France, les techniques d’assistances médicales à la procréation (AMP) sont réservées aux couples confrontées à une infertilité médicalement constatée ou pour éviter la transmission d’une maladie grave. La loi ne fixe pas un âge limite précis au delà duquel il n’est plus possible de bénéficier de ces techniques. Elle stipule simplement que le couple (un homme et une femme) doit être en « âge de procréer ». Ce sont donc les médecins qui décident à partir de ce critère. Une autre limite est le fait que l’assurance-maladie ne prend pas en charge une fécondation in-vitro pour une femme au delà de l’âge de 43 ans. Les médecins, en pratique, ne prennent pas non plus en charge les couples dans lesquels l’homme à dépassé 60 ans.

En 2009, une mère de triplés à 59 ans à Paris
En France, ce débat sur les grossesses tardives, favorisées par la médecine, s’était posé en septembre 2008. Une femme de 59 ans avait alors donné naissance à Paris à trois enfants, conçus via une FIV au Vietnam. L’implantation de ces trois embryons avait été, à l’époque, qualifiée de « faute médicale », par le professeur René Frydman, interrogé par la Croix, « Néanmoins, nos services accueillent de plus en plus souvent des femmes enceintes de 45 ans ou plus Elles se rendent principalement en Espagne ou en Belgique, là où le don d’ovocyte est plus répandu puisqu’il est rémunéré 900 €, ou encore en Grèce, à Chypre ou en Ukraine », expliquait alors le célèbre gynécologue-obstétricien, alors chef de service à la maternité de l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart.

Voir encore:

L’autoconservation des ovocytes ou la tentation de s’affranchir du temps
Aux États-Unis, les entreprises Apple et Facebook ont annoncé qu’elles couvriraient les frais engagés par leurs salariées qui souhaitent reporter leur projet de grossesse au-delà de 40 ans en ayant recours à la congélation de leurs ovocytes. Une possibilité interdite en France, mais réclamée par certains.

Flore Thomasset

La Croix

27/10/14

Aux États-Unis, certains n’hésitent pas à parler d’une «révolution» comparable à celle que fut, dans les années 1970, l’arrivée de la pilule. L’autoconservation des ovocytes permet à une jeune femme de faire prélever ses ovocytes, notamment quand sa fertilité est maximum, vers 20 ou 30ans, puis de les congeler. Plus tard, vers 40 ou 50ans, elle pourra les faire décongeler, féconder in vitro puis se les voir réimplanter pour commencer sa grossesse.

La technique est pratiquée depuis plusieurs années outre-Atlantique, où elle est en vogue. Mais deux grandes entreprises, Facebook et Apple, viennent d’y apporter un nouvel élan, en annonçant, comme d’autres avant elles, qu’elles prendraient en charge à hauteur de 20000 dollars (16 000€) les traitements contre l’infertilité de leurs salarié(e)s, y compris l’autoconservation des ovocytes  (lire La Croix du 20 octobre)  .

À l’heure où l’âge du premier enfant ne cesse de reculer, où les relations amoureuses sont de plus en plus chaotiques et les ruptures tardives, les femmes y ayant recours se disent libérées de la pression de «l’horloge biologique» et de l’obligation, à 30 ou 35ans, de trouver «absolument» un père pour leur enfant. Surtout, les trentenaires entendent ainsi s’investir pleinement dans leur vie professionnelle, sans être freinées dans leur ascension par la maternité : plutôt que de choisir entre l’une et l’autre, elle diffère la seconde. Les entreprises, évidemment, y trouvent aussi leur compte.

Combien de femmes ont déjà eu recours à cette technique, autorisée aux États-Unis, mais aussi en Espagne, en Belgique, en Italie ? Dans la presse américaine, médecins et laboratoires parlent de 2 000 à 5 000 bébés nés. Dans un article publié dans BusinessWeek en avril, le New York University Fertility Center assurait procéder à 5 à 10ponctions par semaine.

En 2013, l’autoconservation représentait le tiers de leur «business». Car c’est bien de cela qu’il s’agit : aux États-Unis, l’ensemble de la procédure (stimulation hormonale, suivi médical, ponction des ovocytes, vitrification) coûte entre 10 000 et 15 000 dollars (entre 7 900 € et 11 800€), auxquels il faut ajouter 500 à 1000 dollars (393€ à 786€) par an pour la conservation. Sur une dizaine d’années (prélèvement avant 35ans, grossesse avant 45ans), le procédé revient donc très cher.

Et en France, qu’en est-il ? L’autoconservation «sociétale» ou «pour convenance» est interdite. En revanche, elle est autorisée pour raisons médicales, depuis la loi de bioéthique de 2011. Ainsi, elle est régulièrement pratiquée quand une femme est soumise à des traitements qui peuvent rendre infertiles, comme une chimiothérapie. La loi autorise aussi l’autoconservation pour les femmes donnant leurs ovocytes : une partie du prélèvement est donnée, l’autre est conservée pour son propre et éventuel futur usage. Cette mesure, qui n’est cependant pas appliquée faute de décret, a été décidée pour favoriser le don d’ovocytes, qui connaît une pénurie en France.

Pour le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), l’autoconservation ne peut être un élément de marchandage en échange du don, elle doit être ouverte à toutes les femmes.

En décembre 2012, le CNGOF a officiellement pris position en ce sens, estimant que cette technique est, «avec le don d’ovocytes, la seule méthode de traitement de l’infertilité réellement efficace à 40 ans et plus». «Il y a un fait de société majeur et largement sous-estimé qui est le retard de la procréation, explique son président, Bernard Hédon. Nous ne cessons de recevoir dans nos cabinets des femmes de 40 ans passés qui, bien qu’elles aient su qu’il ne fallait pas trop attendre pour concevoir, n’ont pas pu le faire avant. On les engage alors dans des processus de FIV (fécondation in vitro) complexes, coûteux et qui sont loin de donner toujours des résultats.»

Plus qu’une affaire de relations ou de carrière, c’est selon lui, plus globalement, une question de mentalité : «Aujourd’hui, quand une femme de 25 ans devient enceinte, on lui dit qu’elle est bien jeune pour cela, remarque-t-il. Or, c’est pourtant le bon âge, d’un point de vue biologique. Le message essentiel doit d’ailleurs rester : “Faites des enfants jeunes.” Car la congélation n’offre aucune garantie de grossesse : ce n’est qu’une aide, limitée, quand on n’a pas pu faire autrement.»

Sauf que pour beaucoup de médecins, l’ouverture de cette technique pour convenance envoie justement un message contradictoire. Elle risque de favoriser les grossesses tardives, au-delà de 43ans, à haut risque pour la mère et l’enfant : fausse couche, diabète gestationnel, hypertension… Une des questions posées par cette technique est d’ailleurs : jusqu’à quel âge réimplanterait-on l’ovocyte fécondé ? Des exemples extrêmes de mères accouchant à 60 ans font régulièrement la une des journaux. Le CNGOF, lui, fixe une limite à 45ans, voire 50ans pour une femme qui ne cumule aucun autre facteur de risque.

«On crée l’illusion que la science peut tout, que l’on peut avoir un enfant à n’importe quel âge, alors que la procréation est quand même un processus naturel, déplore Louis Bujan, président de la fédération des Centres d’études et de conservation des œufs et du sperme (Cecos). On crée des besoins qui n’existent pas : certes, l’âge de la maternité recule, mais il y a encore de la marge avant d’en arriver à ces âges-là. Plutôt que d’abonder dans ce sens, il faudrait se poser la question de savoir pourquoi les femmes reculent leurs projets de maternité.»

En janvier 2013, la fédération a pris position contre l’autoconservation pour convenance, insistant notamment sur la question du coût et de la prise en charge : «Cela pose un vrai problème éthique, poursuit Louis Bujan. Étant donné le coût, que l’on pourrait estimer à 3000€ en France, hors fécondation in vitro et réimplantation, toutes les femmes n’y auront pas accès. Faut-il que la Sécurité sociale le prenne en charge ? Et si oui, au détriment de quel autre remboursement ?»

C’est ainsi un véritable choix de société qui est en jeu. L’Observatoire de la parentalité en entreprise ne s’y est pas trompé, son président, Jérôme Ballarin, se disant «choqué» par l’annonce de Facebook et Apple : «C’est en réorganisant la vie professionnelle autour de la vie privée et non en faisant l’inverse que nous construirons une société équitable et épanouie», a-t-il jugé dans un communiqué. Quant à la ministre de la santé, Marisol Touraine, elle a estimé que «le débat est un débat médical, éthique, ça n’est certainement pas un débat pour directeurs de ressources humaines».

————————————

CE QUE DIT LA LOI BIOÉTHIQUE
En juillet 2011, la révision de loi de bioéthique autorise, en France, «la technique de congélation ultra-rapide des ovocytes». En France, le premier bébé conçu après cette technique naît le 4 mars 2012.
Quand une femme donne ses ovocytes, une partie de la ponction peut être conservée pour usage propre : «Lorsqu’il est majeur, le donneur peut ne pas avoir procréé. Il se voit alors proposer le recueil et la conservation d’une partie de ses gamètes (…) en vue d’une éventuelle réalisation ultérieure, à son bénéfice, d’une assistance médicale à la procréation».
En France, le don d’ovocytes souffre d’une pénurie: en 2012, 422 femmes ont fait un don pour près de 800 fécondations in vitro réalisées ; 2 110 couples étaient en attente d’un don d’ovocytes; 164 enfants sont nés suite à une PMA avec un don.

Voir de même:

Sci/Tech/Health Journalism Ethics News :
Daily Media Pick
Same Sex Marriage Study: At least 12 News Outlets retract or add Editor’s Note
Sydney Smith
iMediaethics

May 20, 2015

Since the news broke that a study on same-sex marriage published last year in Science may be based on fabricated information, most of the news outlets that reported on the study have warned readers about the problems with the study they covered.

As iMediaEthics previously reported, one of the study’s co-authors Donald Green issued a retraction request after saying he learned there were problems with his co-author Michael LaCour’s work. While LaCour hasn’t spoken out yet and said he is still working on a response, Green said at first LaCour « confessed to falsely describing at least some of the details of data collection, » Retraction Watch reported. LaCour later said he didn’t fabricate and that instead he can’t find research evidence to support his study.

The discovery was made when two graduate students tried to further the research and encountered problems. For example, when they went to Qualtrics, the company who LaCour said he got the survey data from, Qualtrics said it couldn’t find that data.

A spokesperson for UCLA, where LaCour is a Ph.D. candidate, told iMediaEthics: « UCLA expects its students to demonstrate integrity in all academic endeavors.  UCLA is reviewing allegations regarding data published by UCLA graduate student Michael LaCour.  UCLA will assess these allegations pursuant to UCLA policy and in a manner that provides due process to Mr. LaCour. »

Below, see a collection of editor’s notes added to news reports because of the questions raised by the study.

1. The Washington Post has added an editor’s note to its story: « Editor’s Note: Since the publication of this post on a study examining how easily people’s minds can be changed concerning same-sex marriage, a co-author has disavowed its findings. Donald P. Green is seeking a retraction of the study from the journal Science, which originally published the research. » Science told iMediaEthics it is reviewing the case.

2. US News added this editor’s note to its Dec. 22, 2014 story that reads: « Editor’s Note: The data used in the study recently were found to have been falsified, » linking to its report on the debunking

3. This American Life retracted its report on the Science study. « Our original story was based on what was known at the time, » This American Life‘s Ira Glass wrote in part. « Obviously the facts have changed. We’ll update today as we learn more. The apparent fakery was discovered by researchers at UC Berkeley and Stanford who tried to replicate the findings in the original study. How they figured it out is a great story in itself. »

4. New York Magazine‘s Dec. 11, 2014 story, « A 20-Minute Chat with a Gay Person Made People Much More Supportive of Gay Marriage » now has this note: « (UPDATE: This study has been retracted by Science. Science of Us has posted an explanation here.) »

5. Bloomberg tacked on an editor’s note to its Oct. 6 story, « How do you Change Someone’s Mind About Abortion? Tell Them You Had One. » That reads:

« EDITOR’S NOTE, May 20, 2015: The findings from the field experiment on attitudes toward gay marriage conducted by UCLA graduate student Michael LaCour described below—which were published in the journal Science two months after Bloomberg Politics reported on the research—have been called into question by co-author Don Green, who yesterday requested that the journal retract the article. ‘Michael LaCour’s failure to produce the raw data,’ Green wrote to the journal’s editors, ‘undermines the credibility of the findings.' »

6. BuzzFeed added an editor’s note to its Dec. 11, 2014 story, « Scientists Report Gay People are the Best at Changing Minds on Marriage Equality. » It states: [Update: The study described in the article below was retracted in May 2015 after the lead author said his co-author faked data. BuzzFeed News reports here.]

7. Business Insider‘s May 12, 2015 story, « How to convince anyone to change their mind on a divisive issue in just 22 minutes — with science, » has this update.  « *Update 5/20: While trying to follow up on the study cited in the story below, researchers have found that some of the data in the original study was falsified. The authors say they’ve requested that the paper be retracted from the journal Science. »

8. Vox retracted its story on the study earlier today, warning readers « don’t believe » it.

9. The New York Times added an editor’s note to its two stories on the study, a spokesperson for the newspaper told iMediaEthics. The editor’s note on The New York Times‘ Dec. 12, 2014 story, « Gay Advocates Can Shift Same-Sex Marriage Views, »  and the New York Times’ Dec. 18 story, « How Same Sex Marriage Effort Found a Way Around Polarization » reads:

« An article on Dec. 12, 2014, reported on a study published by the journal Science that said gay political canvassers could change conservative voters’ views on gay marriage by having a brief face-to-face discussion about the issue. The editor in chief of the journal said on Wednesday that the senior author of the study had now asked that the report be retracted because of the failure of his fellow author to produce data supporting the findings. »

New York Times public editor Margaret Sullivan told iMediaEthics she doesn’t plan to address this issue in her blogs or columns and pointed us to the Times‘ PR.

10. The Los Angeles Times added a note to its Dec. 12, 2014 article « Doorstep visits change attitudes on gay marriage. » That update, at the bottom of the article, states: « May 20, 2015: Science published an ‘Expression of Concern’ about the study reported on here. ‘Serious questions have been raised about the validity’ of the report, which claimed that skeptics of same-sex marriage could be persuaded to accept it after talking with a gay lobbyist for 20 minutes. One of the study’s co-authors, Donald Green, said he no longer has confidence in the data and has requested that the study be retracted. Read our full story here. »

The Los Angeles Times also posted a follow-up story on the news, a spokesperson for the newspaper told iMediaEthics.

11. Mother Jones added an update to its Dec. 18, 2014 story, « How a 20-Minute Conversation Can Convince People with Anti-Gay Views to Change Their Mind, a spokesperson for the magazine told iMediaEthics. The update reads: « The following study was retracted following allegations the data had been faked by a co-author. « I am deeply embarrassed by this turn of events and apologize to the editors, reviewers, and readers of Science, » author Columbia University political science professor Donald Green said. The original article follows but be forewarned that its contents are no longer credible given this revelation. »

12. The Wall Street Journal posted this « note to readers » on its Feb. 25, 2015 story, « Gay Marriage: How to Change Minds. »

« NOTE TO READERS: According to an Associated Press report, data in the Science magazine study to which the article below alludes have come under question, as one of the authors of the study has asked the magazine to retract it. Read the article. »

UCLA and Columbia issued a press release last year touting the study.  iMediaEthics has written to Columbia for comment.

Other outlets that reported on the study without adding a flag to readers about the study’s retraction request as of 3 PM EST are:

UPDATED: 5/20/2015 5:57 PM EST Added responses from UCLA, additional info from the New York Times

UPDATED: 5/20/2015 8:32 PM EST Added response from the Los Angeles Times

UPDATED: 5/21/2015 12:42 PM EST Updated with notes from Mother Jones and Wall Street Journal

Voir de plus:

Des poupées sexuelles touchantes

  21/05/2015

ART – Voilà une artiste dont les muses sont assez surprenantes. À travers une série de clichés, la photographe new-yorkaise Stacy Leigh a souhaité montrer que des poupées sexuelles en caoutchouc pouvaient être touchantes.

Si à première vue, les images peuvent paraître glamour et sexy, il suffit de les observer de plus près pour que cette dimension charmante s’amenuise. Le maquillage, les vêtements et la position des poupées… Tout est mis en scène pour qu’elles ressemblent le plus possible à de véritables femmes.

À l’origine, ces poupées pour adulte grandeur nature sont conçues pour donner du plaisir, mais elles servent aussi à apporter de la compagnie. Stacy Leigh l’explique elle-même au site du Mirror: « L’homme et la femme utilisent tous les deux ces poupées pour remplacer un compagnon humain, que ce soit par choix ou par nécessité. Je pense qu’il n’y a aucun inconvénient à cela, surtout si les journées en deviennent plus supportables ». Au total, Stacy Leigh en possède 12, qui valent chacune 4000 livres sterling (5630.80 euros).

Si la série de photos s’intitule « Américains moyens« , c’est parce que l’artiste de 43 ans tient à interpréter une certaine réalité selon laquelle les humains artificiels finiront par faire partie de notre quotidien.

« Mes photos concernent la vie, les relations amoureuses et la sexualité. Les poupées repoussent certaines personnes, tandis que d’autres sont empathiques envers elle. Au fur et à mesure que le monde devient plus numérique et moins personnel, il sera de plus en plus banal que des poupées et des robots soient utilisés en tant que substituts pour les relations amoureuses. Je peux uniquement espérer que mes photos déclenchent une émotion ou une connexion chez le spectateur« .

Celle qui s’auto-décrit comme une « peintre frustrée » raconte comment elle en est arrivée à utiliser des poupées gonflables comme modèles il y a 10 ans, après avoir regardé une série documentaire télévisée sur HBO, « Real Sex« . Au départ, elle reconnaît que c’était plutôt effrayant.

« Elles avaient un effet étrange sur moi. J’étais empathique à leur égard parce qu’elles avaient l’air si réelles, mais je me suis aussi sentie très mal à l’aide, je sentais qu’elles étaient en train de m’observer », confie-t-elle à nos confrères du Huffington Post américain. Avant d’ajouter: « J’ai ressenti le besoin de montrer à quoi elles ressembleraient si elles étaient intégrées dans notre société ».

Jusqu’ici, les poupées gonflables sexuelles n’avaient rien d’humain. Mais plus elles deviennent réalistes, plus leur popularité augmente. « Les clients peuvent choisir de personnaliser absolument tout, qu’il s’agisse de la couleur des cheveux, des yeux et de la peau, de la taille des seins, et même de la forme et du style du vagin », peut-on ainsi lire sur le DailyMail. Inquiétant, vous avez dit?

Voir par ailleurs:

Dans un accord bilatéral, le Saint-Siège reconnaît « l’Etat de Palestine »
Sixtine Dechancé
La Vie

13/05/2015

Dans un accord bilatéral conclu ce 13 mai avec la Palestine, le Saint-Siège reconnaît clairement « l’État de Palestine ». La signature définitive du texte, qui établit une reconnaissance juridique de l’Eglise catholique dans les territoires palestiniens, devrait avoir lieu dans les jours à venir.

Le président palestinien Mahmoud Abbas sera en effet présent au Vatican les 16 et 17 mai, où il assistera à la canonisation de deux palestiniennes, la carmélite Mariam Bawardi et Soeur Marie-Alphonsine Ghattas, co-fondatrice de la congrégation des Soeurs du Rosaire. Toutes deux nées au XIXe siècle, elles deviendront les premières saintes palestiniennes de l’époque contemporaine. Le patriarche latin de Jérusalem, Mgr Fouad Twal, a souligné l’importance de cet événement, « signe d’espoir » pour la Terre Sainte et le Moyen-Orient « déchirés par la guerre ».

Le texte, qui attend encore d’être signé, est le fruit d’un long travail entre le Saint-Siège et l’autorité palestinienne, depuis l’accord initial qui les a liés en février 2000. Il s’agissait alors de garantir sur le territoire palestinien la liberté de religion et l’égalité devant la loi des institutions et des fidèles de toutes confessions, ainsi que le libre accès aux lieux saints. Ces dispositions sont renforcées dans le nouvel accord, qui permettra à l’Église, selon Mgr Antoine Camilleri, sous-secrétaire pour les relations avec les États, « d’assurer un service plus efficace à la société ».

La référence explicite à « l’État de Palestine » n’est pas une nouveauté pour le Saint-Siège, qui employait déjà cette expression dans ses communiqués diplomatiques depuis 2012 et plaide depuis longtemps pour la « solution des deux Etats ». Néanmoins, le texte de cet accord bilatéral est appelé à faire jurisprudence.

« Il peut être suivi par d’autres pays, même ceux à majorité musulmane, et il montre qu’une telle reconnaissance [de l’Église] n’est pas incompatible avec le fait que la majorité de la population du pays appartient à une autre religion », a assuré Mgr Camilleri dans une interview à L’Osservatore Romano, le quotidien du Vatican.

Pour François Mabille, spécialiste de la géopolitique vaticane, l’accord est à replacer dans le contexte de crise que subissent les chrétiens au Moyen-Orient : « Une reconnaissance de l’Etat de Palestine par le Saint-Siège est un signe fort envoyé aux pays musulmans. C’est un appel à l’apaisement », interprète-t-il. Bien que la démarche s’inscrive dans la continuité de la politique internationale vaticane, le chercheur y voit une nouveauté : « En règle générale, le Saint-Siège reconnaît des pays qui l’ont déjà été par la communauté internationale et les grandes puissances. C’est bien le style du pape François de bousculer ainsi les habitudes. »

Soulignant dans L’Osservatore Romano « le souhait d’une résolution de la question palestinienne et du conflit israélo-palestinien dans le cadre de la solution des deux Etats », Mgr Antoine Camilleri rappelle également qu’un seul de ces deux Etats existe pour le moment  (Israël). Il réaffirme le souhait du Saint-Siège de voir « l’établissement et la reconnaissance d’un Etat palestinien indépendant, souverain et démocratique ».

Dans le quotidien israélien Haaretz, un membre du ministère des Affaires étrangères critique ce geste du Vatican : « Israël est déçu d’apprendre la décision du Saint-Siège de valider un texte d’accord qui mentionne le terme d' »Etat de Palestine » ». « Ce geste ne fait pas avancer le processus de paix, et éloigne même les autorités palestiniennes d’un retour à des négociations directes et bilatérales. Israël va examiner cet accord et étudier une réaction proportionnée », ajoute-t-il.

Voir aussi:

Exclusive: Obama to back Palestinian state at Security Council – payback for Israel’s right-wing cabinet
DEBKA file

May 6, 2015

US President Barack Obama did not wait for Binyamin Netanyahu to finish building his new government coalition by its deadline at midnight Wednesday, May 6, before going into action to pay him back for forming a right-wing cabinet minus any moderate figure for resuming negotiations with the Palestinians.

Banking on Netanyahu’s assertion while campaigning for re-election that there would be no Palestinian state during his term in office, Obama is reported exclusively by our sources to have given the hitherto withheld green light to European governments to file a UN Security Council motion proclaiming an independent Palestinian state. Although Netanyahu left the foreign affairs portfolio in his charge and available to be filled by a suitably moderate figure as per the White House’s expectations did not satisfy the US President.

The White House is confident that, with the US voting in favor, the motion will be passed by an overwhelming majority and therefore be binding on the Israeli government.

To show the administration was in earnest, senior US officials sat down with their French counterparts in Paris last week to sketch out the general outline of this motion. According to our sources, they began addressing such questions as the area of the Palestinian state, its borders, security arrangements between Israel and the Palestinians and whether or not to set a hard-and-fast timeline for implementation, or phrase the resolution as  a general declaration of intent.

Incorporating a target date in the language would expose Israel to Security Council sanctions for non-compliance.
It was indicated by the American side in Paris that the Obama administration would prefer to give Netanyahu a lengthy though predetermined time scale to reconsider his Palestinian policy or even possibly to broaden and diversify his coalition by introducing non-aligned factions or figures into such key posts as foreign affairs.
At the same time, both American and French diplomats are already using the club they propose to hang over the Netanyahu government’s head for gains in other spheres.

French President Francois Hollande, for instance, the first foreign leader ever to attend a Gulf Council of Cooperation summit, which opened in Riyadh Tuesday to discuss Iran and the Yemen war, used the opportunity to brief Gulf Arab rulers on Washington’s turnaround on the Israeli-Palestinian issue.

And US Secretary of State John Kerry plans to present the Obama administration’s new plans for Palestinian statehood to Saudi leaders during his visit to Riyadh Wednesday and Thursday, May 6-7. Kerry will use Washington’s willingness to meet Palestinian aspirations as currency for procuring Saudi and Gulf support for a Yemen ceasefire and their acceptance of the nuclear deal shaping up with Iran.

Voir également:

Le règne de la vertu – La dictature de Robespierre
Louis Madelin
Revue des Deux Mondes tome 1, 1911

Le 16 germinal an II, Jacques Danton montait à l’échafaud avec ses « complices ; » le 4 du même mois, Jacques Hébert et sa « bande » avaient péri. Seuls, depuis le lamentable effondrement des Girondins, Hébert et Danton gênaient, à des degrés divers, l’omnipotence de Robespierre. Leur sang semblait donc pour longtemps cimenter le pouvoir de Maximilien et je peux dire son sacerdoce ; ce sang impur n’était-il pas offert en holocauste à l’Etre Suprême, trop longtemps offensé par l’athéisme et l’immoralité de ces scélérats ? Les « victoires » du 4 au 16 germinal, ne nous y trompons point, ne sont pas seulement celles d’un homme, ni même d’une politique : voyons-y le passager triomphe d’une secte religieuse. Désormais la « Vertu » l’emporte et, avec elle, Dieu ressuscita. Jusqu’au 9 thermidor, quatre mois durant, la France va connaître le gouvernement le plus singulier et d’ailleurs le plus effroyable, celui qui fera rouler des têtes au nom d’une mission divine.

I
Certes, depuis plus de huit mois, Robespierre semblait l’homme le plus puissant du pays. Après avoir, avec l’appui de Danton, précipité les Girondins du pouvoir, il avait, le 10 juillet 1793, fait éliminer Danton du Comité de Salut public où un instant celui-ci avait paru régner ; Maximilien y avait prudemment, — c’était sa façon, — fait entrer ses amis, puis le 27 juillet, la majorité lui étant assurée, s’y était fait élire. Et depuis lors, il semblait, de cette célèbre salle verte du Pavillon de Flore, où besognait le terrible Comité, dominer la Convention et le pays.

Il s’en fallait cependant qu’avant le printemps de 1794, il pût tout diriger. Il avait dû assister presque impuissant aux « intrigues des factions » et presque à leur triomphe. Plusieurs fois, la Convention avait failli faire rentrer Danton au Comité et sa faction d’indulgens ; par ailleurs, Maximilien avait dû, la rage au cœur, accepter cet opprobre : le triomphe momentané de la faction des exagérés, ces Hébertistes transgressant les dogmes qui lui étaient chers et froissant ses sentimens les plus intimes. Enfin, des provinces où ils desservaient sa politique, les proconsuls l’avaient presque bravé, des « pourris » par surcroît, que son incorruptibilité vomissait et que soutenaient les « factions » de Paris.

Le « règne de la Vertu » ne s’établit donc pas en un jour et il importe de voir de quelle réaction la redoutable dictature parut le fruit : l’Eglise robespierriste avait été militante et même souffrante, avant d’être, pour une heure, triomphante.

Eglise ! Le mot s’impose à nous, mais il avait déjà cours. Son chef et ses apôtres suffisent à marquer d’un caractère vraiment sacerdotal cette singulière confrérie.

Interrogeait-on sur Robespierre un des séides qui l’entouraient, il répondait : Maximilien est l’homme de la vertu.

Il était l’homme de la vertu : probe, chaste, moral, il avait, de l’aveu de Danton, étonné, « peur de l’argent ; » il avait plus peur encore de la femme, et, en ayant la peur, il en avait la haine. Cette phobie était avérée : si, en décembre 1793, une « patriote » pourtant pure, Emilie Laroche, plaide près de lui la cause de Hérault de Séchelles, on écrit : « Il n’y fera pas attention : c’est d’une femme. » Bien au contraire, telle intervention suffirait à perdre le bel Hérault, spécialement haï parce que lui, au contraire, pratique la femme. On dira de Maximilien qu’il est « un prêtre : » par certains côtés il semble plus : quelque moine fanatique persuadé que la femme est « la bête de perdition » destinée à dégrader l’homme et à le faire tomber : il n’a ni épouse ni maîtresse ; il méprise qui se laisse conduire par la maîtresse ou l’épouse : Danton, Hébert, Desmoulins, Tallien, Barras, Fréron encourent à bien des titres sa rancune, mais il déteste spécialement en eux des hommes « avilis » que conduisent des femmes. Mme Roland l’a littéralement exaspéré : nul n’a plus contribué que lui à mener à l’échafaud l’héroïque Manon. C’est lui qui, d’ailleurs, y jettera Lucile Desmoulins qui l’a longtemps cru son ami, et la « veuve Hébert, » après la « veuve Capet. » Et c’est lui encore qui, à la veille de Thermidor, y acheminera, avec une sorte de joie cruelle, cette belle fille de Thérézia Cabarrus, la maîtresse de Tallien. Si, de sa prison, elle réclame moins de gêne : « Qu’on lui donne un miroir, » ricanera-t-il. Et on sent passer, dans cette raillerie, la haine de cette beauté féminine qui a stupidement ensorcelé Tallien, hier « pur. » Il n’est pas jusqu’à sa sœur Charlotte qu’il n’ait, d’une main froide, écartée de sa vie. Pour la première fois, ce pays de France, sentimental et rieur, est gouverné par un ennemi de la femme et du rire.

Il n’est pas laid cependant, ce Maximilien : les demoiselles Duplay, dont il est l’hôte, le trouvent charmant et le lui font bien voir ; la citoyenne Jullien dont, à la vérité, les lettres sont celles d’une fanatique du prophète, lui trouve « les traits doux ; » et, de fait, aucun portrait ne révèle « la figure de chat » dont parle aigrement Buzot. Son portrait par Danloux nous présente un jouvenceau élégant, à la taille mince, aux traits à la vérité un peu forts, le nez et les lèvres trop larges, mais, en dernière analyse, de physionomie fort peu antipathique. Les yeux, sans doute, clignotaient derrière des besicles bleues ; c’était, disait-on, pour ne se point laisser pénétrer : au demeurant, d’une correction parfaite, les cheveux frisés, poudrés, les joues toujours soigneusement rasées, le petit corps maigre bien pris dans une redingote bleue ou marron qu’il porte sur la veste de casimir, chemise brodée à jabots, manchettes toujours blanches, ce sans-culotte se culotte de soie, trop fier pour sacrifier au débraillement républicain. Jusqu’au bout, les effets resteront sans taches, jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à cette horrible matinée du 10 thermidor où il viendra s’échouer, éclaboussé de sang et d’ordure, en lambeaux, sur la table du Comité de Salut public, en attendant l’échafaud : « habit de drap de Silésie taché de sang, » lit-on dans l’inventaire du greffe. Sa chambre aux rideaux bleus, son cabinet, où il peine cependant (car sa littérature sent l’huile), sont toujours bien rangés, — remplis d’ailleurs (plusieurs témoins signalent ce trait) de ses portraits et de ses bustes : on y voit Maximilien « sous toutes les formes. »

Le trait est à retenir. Maximilien est avant tout personnel. Nul n’a porté plus haut l’orgueil d’être soi. « Vertueux, » il a reçu du Très-Haut mission de faire régner la vertu. Infortune affreuse, voici la France aux mains d’un de ces terribles missionnaires qui sévissent de temps à autre pour écraser « les impies » et les « corrompus, » les « Amalécites, » disait Cromwell, bref les « non-conformistes. » Ce sont les pires tyrans. A une mission surnaturelle la nature même doit être sacrifiée : Robespierre lui sacrifiera tout, et d’abord l’amitié, la reconnaissance, la tendresse. De Camille Desmoulins, son vieux camarade de Louis-le-Grand, à la petite Lucile au mariage de laquelle il a servi de témoin ; de Brissot, avec lequel il a probablement grossoyé chez le procureur, à Danton dont il sait fort bien qu’il fut un loyal compagnon de luttes, il n’hésitera jamais à jeter un ami sous le couperet. Sa sœur put penser qu’il l’y voulait envoyer. Au fond, il n’aimait personne, parce qu’il se vénérait.

« Etre atroce qui ment à sa conscience, » a écrit de lui la vindicative Manon Roland. Non ! Il obéit, au contraire, à sa conscience ; pénétrée de sa mission, cette conscience lui commandera la calomnie (contre les Girondins notamment) et jusqu’au faux (s’il s’agit de perdre un Hérault de Séchelles contre lequel il forge une pièce) : c’est qu’il ne s’agit point aux yeux de Maximilien de frapper un ennemi personnel : son ennemi est « l’ennemi de la vertu. »

D’ailleurs, aucun doute : s’il incarne la vertu, il tient la vérité. D’où une sorte de sérénité : celle d’un prêtre infaillible : le caractère frappe, dès 1792, qui l’approche. « Robespierre est un prêtre, » a-t-on écrit alors (probablement le mot est-il de Condorcet) : un prêtre et presque un prophète du nouveau Millénaire. « Il y avait en cet homme-là du Mahomet et du Cromwell, » dit un conventionnel. Du pontife il a l’impassibilité. Certes, il n’est pas immuable, étant, ainsi que l’écrivait récemment un excellent historien, M. Sagnac, « grand opportuniste ; » il n’est pas immuable dans ses attitudes, mais il l’est, au fond, dans l’idée maîtresse de sa vie. Il y croit sincèrement, et sa force est dans sa sincérité. Il n’est pas l’ « hypocrite raffiné » que Bossuet a flétri en Olivier Cromwell. Se tenant pour l’homme de la Liberté, de la République, de la Révolution, il estime en toute candeur que quiconque lui fait obstacle est l’ennemi de la Révolution, de la République et de la Liberté. Or lui fait obstacle quiconque excite sa « bilieuse jalousie : » qui a plus de talent et de succès, plus d’audace et plus d’entregent, lui porte nécessairement ombrage. Sa jalousie inquiète multiplie ses ennemis : ce sont ceux de la Patrie. Celui qui n’est pas avec lui est contre elle.

Le prophète proclame des dogmes. Tout d’abord, la Terreur soutenant la Vertu et la Vertu justifiant la Terreur. Le 25 décembre, le dogme fondamental a été proclamé par le pontife infaillible. « Le ressort du gouvernement populaire dans la paix est la Vertu ; en révolution, il est à la fois la Vertu et la Terreur. » Certes, il n’a inventé ni le système ni le mot. Dès le 5 septembre, « les sections de Paris » sont venues demander qu’on « plaçât la Terreur à l’ordre du jour » et, depuis l’été de 1793, Fouquier-Tinville expédie à Sanson « gros et petit gibier. » Ce n’est cependant que du jour où la doctrine a été proclamée par l’Incorruptible sainte, pure et indiscutable, que « l’activité du tribunal » a redoublé. Alors commencent les belles fournées de l’hiver de l’an II qui deviendront « magnifiques » une fois les Indulgens supprimés en germinal (155 victimes en germinal, 354 en floréal), et formidables, quand la loi de Prairial, qu’on peut appeler la loi Couthon-Robespierre, permettra à l’accusateur public d’envoyer, en quarante-sept jours, 1 366 « cliens » au « rasoir national. »

Il serait injuste de faire de cet homme le bouc émissaire de la Terreur. Des proconsuls qu’il n’aimait pas, Carrier, Lequinio, Tallien, Barras, Fréron, Fouché, Collot d’Herbois, Javogue, Le Bon, Schneider, faisaient à Nantes, Lorient, Bordeaux, Toulon, Marseille, Lyon, Amis, Strasbourg, tomber des têtes avant que Paris connût « les belles fournées d’aristocrates. » Mais s’il parut un jour les blâmer, c’est moins d’avoir terrorisé, que d’avoir terrorisé « sans vertu. » De toutes parts, le monde infâme que la Terreur exaltait jusqu’à la démence avait les yeux fixés sur lui avec une sorte de gratitude. Tyranneaux subalternes et délateurs immondes l’adoraient parce qu’il leur avait appris que, forgeant des fers et répandant le sang, ils servaient « la Loi, » « la Patrie, » la Vertu » surtout. « Quelles délices tu aurais goûtées, a écrit un de ces misérables, Achard (de Lyon où l’on mitraille) : quelles délices tu aurais goûtées, si tu eusses vu, avant-hier, cette justice nationale de 209 scélérats ! » et la lettre adressée à un ami du « grand patriote » se termine par : « Le bonjour à Robespierre. » Ils l’adorent tous.

C’est que Robespierre a proclamé ces mouchards, ces geôliers et ces bourreaux, les « hommes de la Vertu. »

Deux autres dogmes cependant seront proclamés ex cathedra : la croyance à l’Etre Suprême, sanction de la vertu, satisfaction donnée aux « âmes pures » et aux élans vers le ciel du Vicaire savoyard, et, par ailleurs, le respect de la propriété sacro-sainte, fondement de l’Etat et de la République ; car, s’il a pu, à certaines heures, paraître mériter, par des concessions purement verbales, les félicitations de la Société des indigens, Maximilien restera, de 1789 à 1794, socialement parlant, un conservateur.

Déiste et conservateur, il l’est avec le même dogmatisme que moraliste et terroriste, c’est-à-dire qu’il se sent une sorte de haine contre les non-conformistes en matière sociale et religieuse comme en matière politique. « Mauvais citoyen, » certes, celui qui prêche « l’indulgence » ou qui, sans vertu, pratique la terreur, mais « mauvais citoyen » aussi qui nie l’existence de l’Etre Suprême et « mauvais citoyen » qui ose prêcher le partage des terres. Telles dispositions lui font apercevoir un monde de « scélérats. » Dans ce pays où, s’est-il écrié en janvier 1793, « la vertu est en minorité ; » mais plus précisément dans cette Convention où Danton et Hébert ont tant d’amis, que peu d’élus au regard de tant de réprouvés ! Sa sombreur s’en augmente. Son maître Rousseau dont il commente le soir, aux enfans du menuisier Duplay, l’œuvre immortelle, « comme un curé de village, dit Barras, explique l’Evangile à ses paroissiens, » entend que les non-conformistes soient chassés de la Cité. Le prophète appliquera la doctrine du Dieu, mais de terrible manière ; ce n’est point seulement hors de la Cité que seront jetés ces scélérats, mais sous le couteau. Au fond ces « scélérats ». soiit des hérétiques, car Robespierre, comme Torquemada, est, suivant le mot ironique de M. Aulard, « le maître de la vérité. »

« La vertu a toujours été en minorité ! » Robespierre ne compte que sur quelques amis, surtout à la Convention : Couthon, Saint-Just, Le Bas. Ce sont les séides de ce Mahomet, les émirs du Prophète.

Couthon plaît à Maximilien par son spiritualisme : lui a non seulement lu le Vicaire savoyard, mais il l’a paraphrasé. Ce n’est pas sans quelque regret que le représentant du Puy-de-Dôme a vu disparaître « messieurs les curés » dont, à la fin de 1791, il louait encore « le zèle et la délicatesse ; » il a toujours protesté que, loin de travailler contre « la religion de nos pères, » les députés travaillaient pour elle « par le rétablissement des mœurs. » Car s’il est religieux, il l’est avec ce puritanisme qui est vraiment la marque du groupe : ce malheureux Couthon, à dire vrai, a peut-être moins de mérite qu’un autre à être de mœurs pures, infortuné qui s’avoue cousu de maux, geint en toutes ses lettres sur son sang avarié et ses jambes recroquevillées, et ne quitte sa voiturette de cul-de-jatte que pour se faire porter à la tribune. A la veille de Thermidor, c’est lui qui, fort de ses bonnes mœurs, dénoncera avec âpreté « les hommes impurs qui cherchent à corrompre la morale publique sur le tombeau des mœurs et de la vertu. » Mais dès 1793, il a admis que « la religion était l’appui des bonnes mœurs, » et si, à l’automne de cette année-là, il a supprimé le culte catholique, c’est avec les considérans d’un puritain d’Ecosse abolissant le presbytérianisme après le papisme : car louant « l’architecte » qui « maintient l’harmonie dans la nature » et dont nous sommes « les enfans, » il affirme n’avoir « détruit la religion des prêtres » que pour instaurer « la religion de Dieu. » Ce « Dieu de vérité » qu’il salue du haut de la tribune, il trouve sa main partout. Nul orateur « clérical » n’a aussi souvent fait appel au Très-Haut et discerné sa dextre : c’est le Très-Haut qui « servant mieux la Révolution que les hommes » a « rappelé » Léopold d’Autriche, ennemi de la France ; et c’est Lui qui, inondant de soleil la fête de la Victoire en 1794, a marqué sa prédilection aux républicains, en « ouvrant pour la première fois depuis longtemps son œil bienfaisant. »

Personne n’a, plus que ce singulier Jacobin, entretenu Robespierre dans cette sorte de mysticisme déiste que le groupe imposera, nous le verrons, aux agens subalternes à l’heure des passagers triomphes. Personne aussi ne contribue plus à donner à cette religion un caractère sombre et terrifiant. L’infirme qu’aigrit son malheur et auquel ses maux font pousser parfois en pleine assemblée des cris de douleur, ne saurait être un souriant apôtre. Dans ses lettres nous le trouvons hanté jusqu’au délire par la crainte des éternels conspirateurs : « Le nombre des complices est immense… Patience, ajoute-t-il, nous saurons délivrer la République de tous ses ennemis. »

Le vrai séide n’est cependant point Couthon, c’est Saint-Just, qu’on appellerait l’enfant de chœur de cette église (il a vingt-cinq ans en 1794), s’il n’était fort supérieur à Robespierre en intelligence et en talent. « Esprit de feu, cœur de glace, » le mot est de Barère et paraît exact. Ce joli garçon, dont Greuze a laissé un charmant portrait, est « un terrible adolescent. » Les Robespierristes eux-mêmes en gardaient un souvenir terrifiant. « Son enthousiasme résultait d’une certitude mathématique, écrit l’un d’eux, Levasseur de la Sarthe… Pour fonder la République qu’il avait rêvée, il aurait donné sa tête, mais aussi cent mille têtes d’hommes avec la sienne. » L’ex-conventionnel Baudot nous le peint, vibrant et coupant, « ne parlant que par sentences. » Orgueilleux jusqu’au miracle, il « portait sa tête comme un Saint-Sacrement : » ne riant qu’ironiquement, il rebutait et alarmait. Audacieux et inflexible, il dépassait Robespierre, — s’il était possible, — en dogmatisme. Nouveau venu à la « vertu » (il avait, dans sa prime jeunesse, composé un poème érotique et commis plus d’une peccadille), il savait parler de la morale mieux qu’homme du monde. « Voyant des criminels dans tous les dissidens, » dit un conventionnel, il flattait l’idée favorite de Robespierre. Il avait épaulé celui-ci, mais le poussait : moins « légaliste » que Maximilien, il était l’agent des exécutions, « le chevalier porte-glaive, » dit M. Claretie. Il eût renié le Maître, si celui-ci avait faibli.

Quant à Le Bas, son fanatisme a quelque chose d’émouvant. Aveugle lorsqu’il s’agissait de Robespierre, ce jeune Le Bas livre, dans ses lettres à Elisabeth Duplay, sa fiancée, puis sa femme, une âme ingénue : pour servir le Maître, il sacrifie tout, s’arrache en soupirant de son idylle, mais sans hésiter, et, après lui avoir voué sa vie, se vouera pour lui à la mort, sachant que tous, là-bas chez les Duplay, l’approuveront, la jeune femme, la belle-sœur, le papa et la maman Duplay. Vraiment les seuls prophètes trouvent de tels serviteurs et les grands égoïstes de tels amis.

II
Le reste du monde politique, Robespierre l’avait en méfiance, surtout en cet hiver de 1793-1794 où la Convention semblait encore subir l’influence de Danton tantôt, et tantôt de l’Hôtel de Ville hébertiste. En somme, tout ce monde lui paraissait tenir en échec la Vertu.

Grand réaliste en face de cet idéaliste presque mystique, brutal, violent, mais parfois généreux, impulsif, autant que l’autre était calculateur, Danton est l’antithèse de Robespierre. Capable de folles colères suivies de prompts retours, d’actes de prodigieuse énergie et d’inexplicables nonchalances, c’était pour Maximilien un adversaire redoutable, mais dont la cuirasse de bronze présentait vingt défauts. Robespierre le tenait pour improbe. Avait-il tort ou raison ? Danton peut-être ne tripota pas, mais couvrit plus d’un tripotage. En cette âme tumultueuse et trouble on découvre, pêle-mêle, dans une lave incandescente des métaux précieux et d’horribles scories. Assurément, on volait autour de lui et l’on jouissait. Lui, truculent, ardent, aimant la femme, — plus particulièrement la sienne, les siennes, car il en eut deux qu’il adora follement, — se plaisant à la ripaille, vrai personnage de Shakspeare, fanfaron de vices et parfois de crimes, paraissait assurément s’éloigner fort de « l’homme de la Vertu. » Il plaisantait d’ailleurs ceux que son ami Chabot (celui-là un vrai voleur) appelait « les catonistes, » et toute cette famille Duplay où prêchait Robespierre, un sot qui fanatisait ces belles filles au lieu de les aimer et transformait en Spartiates et en Romaines ces petites Parisiennes : « Cornélie Copeau, » disait-il en riant de la fille du menuisier, platonique et grave amoureuse.

Au fond, c’étaient ces railleries que Robespierre ne pardonnait pas, et moins encore le génie de ce Danton qui vraiment, à nos yeux, domine de cent coudées l’étroit politicien. Mais il affectait d’être avant tout scandalisé des « mœurs » de son adversaire : un « scélérat, » dira Couthon, qui pratiquait un « système d’immoralité, d’athéisme et de corruption, » et particulièrement avait affirmé — abominable chose, — qu’après la mort, l’homme rentrait dans « le néant. »

En fait Danton paraît bien avoir été athée, sans d’ailleurs avoir jamais voulu ériger en doctrine un sentiment tout personnel. Libre penseur, il n’était pas fanatique. Les prêtres ne l’occupaient pas : il en avait laissé massacrer une centaine aux Carmes sans remords, mais quand, en pleine Terreur, sa fiancée (bonne catholique), avait entendu faire bénir leur union par un « réfractaire, » il y avait consenti. Il n’était point pour une Eglise d’Etat, pas plus la constitutionnelle que la catholique, et pas plus le culte de la Raison que celui de l’Être Suprême. Il pensait que chacun devait vivre à sa guise et, Robespierre étant partisan de l’école obligatoire (pour ne citer qu’un trait), Danton la voulait libre. Mais cette facilité de doctrine même, Robespierre la tenait pour immorale. En toute sincérité, il tenait pour un médiocre républicain ce Danton, dix fois plus « libre penseur » que lui.

D’autre part, depuis quelques mois, en cet hiver de l’an II, — ce terrible Danton encourait à d’autres titres l’excommunication majeure. Ne voulait-il point qu’on mît fin à la Terreur, lui l’homme qui avait presque assumé la responsabilité des massacres de Septembre ? Ce dessein était connu. Au scandale des purs, Danton prônait « l’indulgence. » Lorsque, après la condamnation des Girondins, Camille Desmoulins était venu, en pleurs, se jeter dans ses bras, criant : « C’est moi qui les tue ! » Danton avait pleuré avec lui, et, un soir, passant sur le Pont-Neuf, il avait, dans une sorte d’hallucination, montré à Camille la Seine qu’éclairait le soleil couchant : « Regarde : la Seine coule du sang. Ah ! c’est trop de sang versé. Allons, reprends ta plume et demande qu’on soit clément. » Desmoulins l’avait entendu. Lui aussi avait autrefois allumé les incendies ; mais, depuis des mois, il restait consterné du désastre : « Ce pauvre Camille, » avait écrit de lui le puissant Mirabeau. Il restait « ce pauvre Camille, » enfant terrible, journaliste d’élan, ne calculant rien, âpre folliculaire en 1789, dont un charmant mariage avait adouci l’âme ulcérée, en le dotant d’ailleurs de quelques rentes. Danton ayant parlé, Camille avait lancé son terrible Vieux Cordelier qui prenait à la gorge le Père Duchesne, organe ignoble de l’Extrême Terreur, en attendant qu’il flétrît, avec la basse délation et la terreur sanglante, toute la clientèle de Robespierre.

Robespierre avait cependant, lors de l’apparition du Vieux Cordelier, détourné pour un instant de la tête de Desmoulins les foudres des Jacobins. C’est qu’il lui plaisait que les amis de Danton éventrassent ceux d’Hébert. Il les voulait tous détruire : le Père Duchesne jeté par terre, on tordrait le cou au Vieux Cordelier. Le Père Duchesne, en effet, c’était Hébert, c’était Chaumette, c’était leur Commune « exagérée, » c’était le communisme et l’athéisme affichés et un instant triomphans.

La Commune de Paris, sous l’inspiration d’Hébert et de Chaumette, semblait en effet, — sur le terrain social et religieux, — résolue à consommer ce que leur ami, le citoyen Fouché de Nantes appelait dans ses proclamations de proconsul, à Moulins et Nevers, puis à Lyon, « la Révolution intégrale. »

C’est en effet Fouché, futur millionnaire, qui, en Nivernais et en Bourbonnais, avait, dès l’été de 1793, pris une attitude si démagogique qu’elle avait déconcerté l’Eglise orthodoxe que présidait Maximilien, mais fort exalté l’Hôtel de Ville de Paris. Le futur duc d’Otrante avait, en ces riches provinces du Centre, prêché « la révision des fortunes, » « la guerre au négotiantisme, » « le partage des fruits de la terre, » « l’obligation pour la République d’occuper le travailleur, » tout cela pour faire triompher la formule maratiste : « La richesse et la pauvreté doivent également disparaître du régime de l’égalité. »

Chaumette, fort lié avec Fouché, l’avait poussé, puis suivi. La Commune avait félicité le proconsul et était entrée dans- ses voies : il fallait « inviter la nation à s’emparer de tout le commerce, de toutes les manufactures et à l’aire travailler pour son compte. » Hébert soutenait fort cette doctrine : si Chaumette était le théoricien de l’Hôtel de Ville, lui était le maître, puissant surtout par son terrible Père Duchesne, la feuille la plus répandue de Paris. On entendait convertir Robespierre à l’idée de « faire disparaître, lui écrivait-on, l’aristocratie mercantile. » Mais derrière le mot de révolution intégrale, Maximilien lisait le mot de révolution sociale. Rien ne pouvait plus froisser ses persistans principes de bourgeois conservateur que ces théories extrêmes : elles ne venaient pas de lui et cela eût suffi à les lui faire détester. Il regardait avec une irritation croissante les Hébert, les Chaumette, les Fouché favoriser la révolution communiste et y conquérir, chose grave, une partie de sa clientèle à lui.

Par surcroît, un autre mouvement, parti des mêmes milieux, l’offusquait jusqu’au scandale. On entreprenait la déchristianisation par le triomphe de la Raison. Et tel fait doit nous retenir un instant, car ce mouvement suivi d’une réaction violente permet de saisir le caractère exact de la lutte qui va s’engager, presque exclusivement religieuse.

Dès l’abord, — et c’est ce qui explique ces essais de culte, — la Révolution avait été marquée d’une indéniable tendance à s’ériger en religion ; 1789 est, somme toute, le point de départ d’une crise de mysticisme civique. MM. Tiersot et Mathiez, l’un étudiant plus spécialement les rites et l’autre la doctrine, ont parfaitement démontré à quel point, dès les premières heures, le Verbe s’était fait religieux, et rien ne serait plus intéressant que de résumer ici leurs édifiantes études : évolution des cultes et des dogmes, extension et transformation des fêtes où les Mehul et les Gossec mêlent une sorte de musique sacrée au son du canon et aux hymnes patriotiques.

L’organisation de l’Église constitutionnelle, « l’Eglise tricolore, » avait été un autre essai pour créer un culte révolutionnaire sans se détacher de ce que Couthon appelait encore en 1791 « la religion de nos pères. » Cet essai, on le sait, échouait lamentablement en 1791. L’Eglise artificielle, imposée par la Constitution civile, se dissolvait ; des prêtres jureurs avaient rallié le « papisme, » et d’autres avaient achevé leur évolution en se défroquant ; Grégoire soutenait avec peine les ruines branlantes du sanctuaire « tricolore. »

L’entreprenante Commune de Paris hâtait cette dissolution. De l’Hôtel de Ville, on méditait d’organiser, sur les débris de toutes les religions déistes, le culte païen de la Raison ou de la Liberté.

A cette entreprise Hébert prêtait son nom : le vrai instigateur fut pourtant bien Chaumette. C’était un aventurier que ses mœurs, — si j’en crois les gens bien informés, — eussent de nos jours conduit en cour d’assises (à huis clos). Lui aussi parlait de « la vertu, » mais il pratiquait le vice rare. Anaxagoras Chaumette se fût ici sans doute recommandé des philosophes grecs : comme eux, par ailleurs, il entendait déloger les dieux. Il fallait entre autres évincer le Christ. On commença à Paris par décrocher des clochers « les breloques du Père Éternel » dont on entendit faire des canons et des sous ; puis on parla d’abattre les clochers eux-mêmes, qui, « par leur domination sur les autres édifices, semblaient, écrivait-on à l’Hôtel de Ville, contrarier les principes de l’Egalité. » Le théâtre se mit à ridiculiser l’ancienne religion dans le Tombeau des Imposteurs et l’Inauguration du temple de la Vérité où une grand’messe était, sur la scène, chantée en parodie.

La Convention ne sembla pas tout d’abord portée à favoriser cette campagne. C’étaient cependant certains de ses membres qui avaient, les premiers, en province, tenté de substituer, dès l’automne de 1793, au culte chrétien le culte civique : Dumont à Abbeville, Fouché à Nevers, Laignelot à Rochefort, et bien d’autres. Sous l’inspiration de Chaumette, venu à Nevers, Fouché avait, par un célèbre arrêté, aboli le ciel, le purgatoire et l’enfer, en proclamant la mort « sommeil éternel. »

Le mouvement se généralisa : on se mit à brûler un peu partout « les vierges à miracles » et à rafler « l’argenterie des églises. » Entre les mains de Fouché l’évêque de l’Allier abjura- ; Gobel, évêque de Paris, allait l’imiter. Il y eut des détails grotesques : tel converti se lava la tête en plein club pour « se débaptiser » et, solennellement, Bechonnet, ci-devant prêtre, divorça publiquement d’avec son bréviaire.

Encouragée, la Commune pesait sur la Convention où, appuyé par Robespierre et même par Danton, l’évêque Grégoire résistait très courageusement à la poussée. Mais les « héberistes » de l’Assemblée faisait rage, gens dont Grégoire affirme qu’ils lui amenaient leurs femmes à confesse et leurs enfans à baptiser, mais publiquement « blasphémaient contre la révélation. »

Fouché envoyait des caisses de calices et de crucifix qu’on déballait devant la tribune. Cette opération grisait d’iconoclastie l’Assemblée. Lorsque, après un de ces « inventaires, » Gobel, traîné par Chaumette à la barre de l’Assemblée, s’y fût venu défroquer, la Convention, un instant conquise, céda. Le président, félicitant l’ex-évêque de Paris, déclara que l’Être suprême « né voulait pas de culte que celui de la Raison… et que ce serait désormais la religion nationale. »

Chaumette incontinent fit décider par la Commune que, « pour célébrer le triomphe que la Raison avait, dans cette séance, remporté sur les préjugés de dix-huit siècles, » on célébrerait, le 20 brumaire, une cérémonie civique « devant l’image de cette divinité, dans l’édifice ci-devant église métropolitaine. »

On a maintes fois décrit cette célèbre fête et comment une Liberté, empruntée à l’Opéra, siégea sur l’autel de la Raison. La Convention s’étant, sous prétexte de travail, refusée à assister à la fête, un cortège (extrêmement mêlé) amena la déesse aux Tuileries, et, en sa gracieuse présence, força l’Assemblée à décréter que Notre-Dame deviendrait à jamais Temple de la Raison. Bientôt Libertés et Raisons pullulèrent à Paris et dans les départemens, vierges folles trop souvent (à côté de quelques « déesses » dont le nom étonne) : si l’une de ces Libertés portait sur son front une banderole ornée de ces mots : « Ne me tournez pas en licence, » le conseil n’eût été presque nulle part superflu, car partout s’organisaient de répugnantes saturnales.

Tout cela froissait Robespierre. Lorsque, dès frimaire an II, un de ses hommes, Payan, dénonçait « ces déesses plus avilies que celles de la Fable, » il applaudissait au propos. Collot d’Herbois lui-même, sermonné au Comité, flétrissait « cette Raison postiche qui courait les rues avec les conspirateurs (les Hébertistes déjà menacés) et terminait avec eux leurs prétendues fêtes dans de licencieuses orgies. » Couthon, à la fête de la Victoire, tint des propos fort déistes. Enfin Maximilien lui-même prononçait le 1er frimaire au club ce discours célèbre où il proclamait « toute populaire… l’idée d’un grand Être qui veille sur l’innocence opprimée et qui punit le crime triomphant ; » le 16, il faisait condamner par la Convention « les extravagances du philosophisme. » « Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer, » avait-il, entre autres propos, affirmé péremptoirement.

Brusquement, le culte de la Raison oscilla sur ses autels. A Paris, Chaumette et Hébert étaient menacés et dans les départemens où quelques Raisons, fort prudemment, regagnaient, qui les coulisses du théâtre, qui te foyer familial, les proconsuls « athéistes » se sentirent en détresse. Robespierre avait résolu de les faire rappeler, ces misérables et indignes satrapes qui, non contens de pratiquer des « mœurs » contraires à la vertu, expulsaient de son presbytère jusqu’au vicaire savoyard.

Pour les abattre plus sûrement, il fallait abattre leurs protecteurs de Paris, ces « conspirateurs, » ces « scélérats » qui, écrira Couthon, « adoptaient le système absurde et désespérant du néant : » Danton et ses hommes, Hébert et ses complices.

Comment Robespierre les abattit dans les journées de Germinal, nous n’avons pas à le raconter ici. Remarquons seulement que le double procès eut un caractère nettement « moral. » Contre les Hébertistes, il fut vraiment impossible d’articuler un grief sérieux, sauf celui d’avoir eu de mauvaises mœurs ou d’avoir ébranlé celles d’autrui « par la religion de l’athéisme ; » Gobel, qui les suivra à l’échafaud, n’y sera conduit, somme toute, que pour avoir foulé aux pieds sa crosse ; et quant à Chaumette, il est assez caractéristique qu’il se vit reprocher en plein tribunal par le président, Robespierriste fervent, d’avoir démoralisé l’esprit public en supprimant les messes de minuit, le 25 décembre 1793.

Contre les Dantonistes, tels reproches n’étaient pas de mise : Danton lui-même avait, à la Convention, montré quelque dégoût pour « les mascarades » de la Raison. Contre eux, on ne vengea pas l’Être Suprême, mais « la Vertu. » N’ayant à formuler aucun reproche précis contre Danton, on l’accusa de conspiration réactrice, ce qui lui arracha ces magnifiques réponses où l’ironie se mêlait à l’indignation et qui font de son procès une des scènes les plus prodigieusement intéressantes de ce drame révolutionnaire ; mais on avait eu soin de l’entourer d’amis compromettans : Fabre, Chabot, Hérault et autres, dont « l’improbité » ou « l’immoralité » paraissaient établies. Ces « scélérats » salissaient le puissant tribun de leurs « vols » et de leurs « débauches. »

Et c’est pourquoi, lorsque, le 16 germinal, la tête de Danton roulait, douze jours après celle d’Hébert, dans le panier de Sanson, la Vertu était tenue pour triomphante et le Vice pour terrassé.

La veille de cette bataille décisive, Couthon avait écrit (il était certainement l’écho de son milieu) : « Si l’Enfer est contre nous, le Ciel est pour nous et le Ciel est maître de l’Enfer. » La maison des Duplay devenait un Vatican contre lequel les portes de l’enfer ne pouvaient prévaloir.

III
« Le ciel » étant resté « maître, » Robespierre paraissait désormais le chef incontesté. Les dogmes triomphaient avec le pontife. L’Europe (Sorel l’a admirablement montré), l’Europe, mal instruite de sa personnalité, crut qu’un Cromwell était né : de Vienne à Londres, de Pétersbourg à Naples, on affirmait qu’il allait mettre fin à la Révolution.

Il n’y songeait point. De cerveau médiocre et d’âme rétrécie, il n’était pas fait pour concevoir une grande tâche. Il ne pensait toujours qu’à s’assurer contre « ses ennemis, » — ceux de la République s’entend. Qui étaient-ils ? Son vicaire l’a proclamé à la Convention. Il faudrait reproduire ici le discours de Saint-Just où tient tout un programme, non de restauration, mais d’extermination : « Ce qui constitue la République, c’est la destruction de tout ce qui lui est opposé. On est coupable contre la République parce qu’on s’apitoie sur les détenus ; on est coupable parce qu’on ne veut pas de la vertu ; on est coupable parce qu’on ne veut pas de la terreur… » Chaque phrase livrait des centaines de têtes à Fouquier-Tinville. Ce jeune sectaire semblait, devant l’Assemblée terrifiée, faire manœuvrer le déclic d’une gigantesque guillotine.

La Terreur allait donc continuer, frappant pêle-mêle royalistes et républicains, anciens amis de la Reine et d’Hébert, de Mme Roland et de Danton. C’est que Robespierre entendait étouffer dans le sang toute opposition.

Tout — une heure — lui sembla soumis. La Convention, en livrant Danton, s’était faite esclave. On y votait sans discussion et « avec un air de contentement, » sinon, dit Baudot, on était « l’objet de l’attention de Saint-Just comme du temps de Néron. » Il ne fallait point paraître triste ; on devait même se garder de sembler songeur. Barras cite ce député qui, s’étant vu regardé par Robespierre au moment où il paraissait rêver, s’écriait, terrifié : « Il va supposer que je pense quelque chose ! » Billaud qui, au printemps de 1794, ne s’est pas encore séparé de Robespierre au Comité, participe à sa mentalité absolutiste ; prononçant un discours à la Convention, il s’interrompt brusquement et, impérieusement : « Je crois, s’écrie-t-il, qu’on murmure ; » un grand silence plana. Ce Comité, c’est un César à dix têtes qui, pour trois mois, est soumis à Maximilien.

Celui-ci en profitait pour faire rappeler les proconsuls détestés. Déjà Robespierre leur a substitué en province des missi dominici à lui, des agens nationaux qui, partout, entravent, puis démolissent l’œuvre des représentans en mission, envoient à Robespierre des rapports sur les « crimes » commis par ces « despotes » et grossissent les dossiers sous lesquels, avant peu, le maître compte bien écraser cette queue d’Hébert et de Danton. Le type de ces envoyés spéciaux est le petit Jullien ; cet adolescent fait, de Nantes à Toulouse par Bordeaux, une tournée qui pourrait bien coûter cher à ceux qui ont terrorisé « sans vertu. » A Lyon, à Marseille, à Toulon, Robespierre ne se fiera qu’à son frère Augustin, qui, déjà, dénonce l’improbité de Fouché, de Barras et de Fréron. Quand ceux-ci ont regagné Paris, fort inquiets, ils tentent de désarmer le César. Ils courent tous chez Duplay, prêts à toutes les soumissions, à toutes les capitulations : ils trouvent figure de marbre, suivant l’expression de l’un d’eux. Fixés sur leur sort, ils vont saper l’idole et feront Thermidor, mais pas un n’osera, avant le 8 thermidor, élever la voix à la Convention contre ce « tyran » qu’ils démolissent dans l’ombre.

La force du « tyran » est que, maintenant, il tient l’Hôtel de Ville : au « papa Pache, » maire de Paris, suspect d’Hébertisme, on a substitué une des créatures de Robespierre, Fleuriot-Lescot, et, à Chaumette, un homme de la maison Duplay, Payan ; la nouvelle Commune est toute « robespierriste. »

Tenant l’Hôtel de Ville, il tient également le tribunal révolutionnaire ; le président Dumas est à lui, à lui l’accusateur public Fouquier-Tinville. Et le jury ne paraissant pas assez pur, on l’épure : le menuisier Duplay y va exercer une grande influence ; les jurés sont la garde prétorienne du maître et le vont chercher chez Duplay pour l’escorter à la Convention. Il croit tenir l’armée, faisant trembler les généraux : tout à l’heure Hoche et Kellermann seront jetés en prison ; on ne choisit les commissaires aux armées que parmi les amis de Robespierre (mauvaise manœuvre au surplus qui laissera dégarnie, en Thermidor, la gauche robespierriste). Maximilien, par ailleurs, a sous la main la pépinière du futur état-major, cette École de Mars, fondée depuis peu et où vingt-cinq jeunes gens, vêtus à la romaine, reçoivent la visite du Maître avec un enthousiasme que nous a dit l’un d’eux : Le Bas dirige de haut ces jeunes prétoriens. Au surplus, le « général » Henriot livre l’armée de Paris, ce misérable Henriot qu’on appelle couramment dans le peuple « la bourrique à Robespierre. » La propriété rassurée et la religion vengée ont foi en celui-ci : les députés de la Plaine, un Boissy d’Anglas, un Durand de Maillane ont peine à ne lui être pas reconnaissans d’avoir abattu les énergumènes de la Révolution intégrale, et l’évêque Grégoire d’avoir ressuscité Dieu.

Et puis, — et cela maintenant se dit et se redit, — il est « l’homme de la vertu. »

Jamais la vertu ne fut plus magnifiée. Certes, Robespierre n’a fait qu’emprunter le vocable à la phraséologie sentimentale de Rousseau et de vingt autres ; tous les tribuns des assemblées, tous les orateurs des clubs, tous les commissaires dans les départemens l’ont employé à satiété ; Mirabeau, l’homme le plus immoral de son époque, a tonné au nom de la vertu, et c’est pour « le triomphe de la vertu » que Carrier a noyé, Barras et Fréron fusillé, Fouché et Collot mitraillé, Le Bon guillotiné. Tallien, oui Tallien, a parlé au nom de la vertu, et n’est-ce point la citoyenne Therezia Cabarrus, future citoyenne Tallien (on ne s’attendait guère à la trouver en cette affaire), qui, dans une adresse à la Convention du 5 floréal, dit par quels exercices « on exercera les jeunes filles à la vertu ? »

Mais voici l’apothéose de la vraie vertu après l’écrasement du vice hypocrite. Et soudain le pays devenu « Spartiate » est tenu à la vertu. Dès le 16 germinal, la Convention vote un décret exigeant que chacun de ses membres rende un compte moral de sa conduite pour s’assurer « qu’il n’est devenu plus riche qu’en vertus. » Grand exemple. Cou thon a écrit : « Qui dit démocratie dit gouvernement vertueux par essence. » L’heure est venue, dira-t-il encore (cette fois à la tribune), de vouer « au mépris public… tous les êtres improbes et immoraux ; » et voici des précisions : il va falloir particulièrement proscrire « le concubinage honteux qui relâche les liens sacrés du mariage. » Qu’on ne croie pas à de simples formules. Voici telle Société populaire, celle de Provins, qui entend être chaudement félicitée, ayant fait conduire en prison « l’instituteur coupable d’avoir trop tardivement régularisé sa liaison. » Rien ne vaut un petit fait de cette espèce.

Maximilien qui nettoie le Palais-Royal, faisant rentrer les filles et sortir les joueurs, Maximilien lui-même continue à pratiquer la vertu au sein d’une vertueuse famille. Sa chambre bleue — vraie Mecque de la nouvelle religion, — est l’asile des vertus austères. Un jour, il dit à Robert Lindet : « Nous voulons fonder Salente. »

Salente sanglante ! Depuis que Robespierre a écrasé les indulgens, Fouquier-Tinville ne se possède plus : il crie, peste, plaisante, s’affaire, presse tout son monde. Il a exhorté le prudent Dumas « à serrer la botte aux bavards, » grâce à quoi les audiences vont vite. On condamne, tel jour, vingt-trois prévenus sur l’audition d’un seul témoin. » L’accusateur qui a toujours barboté dans le sang avec agrément, s’exalte, tout joyeux : « Les têtes tombent comme des ardoises. » Mais il espère mieux : « La semaine prochaine, j’en déculotterai trois ou quatre cents. » « Il faut, a déclaré Robespierre, que le tribunal soit actif comme le crime et finisse tout procès en vingt-quatre heures. » On les finit en vingt-quatre minutes.

Contre les prévenus les plus disparates, ci-devant grands seigneurs et domestiques, petits boutiquiers et religieuses, anciens membres de la Commune et marquises de Versailles, prêtres et magistrats, artisans et courtisanes et dans ce pêle-mêle Gobel, Chaumette, Lucile Desmoulins, Malesherbes, Lavoisier, le général Dillon, la duchesse du Châtelet, la veuve Hébert, Madame Elisabeth, griefs sommaires : complot liberticide, mais plus souvent l’accusation vague et commode : « a dépravé les mœurs, » — ce qui cadre bien avec le règne de la vertu ; et l’on voit bien, comment la Sainte-Amaranthe, raflée, dit Beugnot, avec tout son cercle, a dépravé les mœurs, mais Madame Elisabeth et Malesherbes ?

En tout cas, des « scélérats, » « déprava leurs des mœurs » emplissent sans cesse les prisons, que sans cesse on vide. A la veille de Thermidor, André Chénier et Antoine Roucher, Garat et Beauharnais, Hoche et Kellermann, les peintres Suvée et Robert, les comédiens du Théâtre-Français sont en prison pêle-mêle avec Therezia Cabarrus, Aimée de Coigny, Joséphine de Beauharnais, des représentans des trois Assemblées révolutionnaires et tout le d’Hozier français. Et tout ce monde a plus ou moins contribué à « dépraver les mœurs, » tout en menaçant la liberté.

En province, sous les commissaires robespierristes comme naguère sous les représentans hébertistes, les massacres continuent et les arrestations. Au 9 thermidor, il y aura 1 000 personnes dans les prisons d’Arras, 3 000 dans celles de Strasbourg, 1 500 dans celles de Toulouse, — à Paris environ 7 000, — victimes vouées à la mort pour que triomphe la vertu.

Il faut cependant « une sanction » à cette vertu, — c’est la théorie de Couthon. Il faut un ciel : il faut un Dieu. Tallien ricanera, le 11 thermidor, que « ce petit Robespierre » eût « déplacé l’Eternel pour se mettre à sa place. » En attendant, il achève de le restaurer.

Le 17 germinal, Couthon vient annoncer à la Convention que le Comité prépare une fête de l’Être Suprême. Commentant son propre discours, il écrit, le 21 : « C’est un besoin pour les âmes pures de reconnaître et d’adorer une intelligence supérieure. » Evidemment, qui n’éprouve pas ce besoin est « impur. » Du reste, on doit à Dieu ces hommages : n’est-ce pas « grâce à la Providence qui veille sans cesse sur nos destinées » que « ces monstres, » Hébert, Danton, ont été abattus ? Oui, le Très-Haut veille sur Robespierre : Dieu est robespierriste, — tout comme Fleuriot-Lescot, Fouquier-Tinville et le général Henriot. « Dieu nous bénit, » écrit Couthon le 12 floréal.

Le 18 floréal, le grand prêtre lui-même lance une encyclique : il vient lire son fameux discours sur les rapports des idées religieuses et morales avec les principes républicains où tient toute la pensée du règne : il faut replonger « le vice dans le néant » et comme il est impossible à Maximilien d’oublier ses ennemis, même lorsqu’il les a fait guillotiner, il entend vouer à l’exécration ces athées : Vergniaud, Hébert, Danton, étrange triumvirat auquel il oppose (facilement, puisqu’ils ne sont plus là pour répondre) ce déisme qui fut la religion de Socrate et celle de Léonidas, — imprévu rapprochement. Quoi qu’il en soit, Robespierre obtint sans peine le vote du décret qui, sanction de son discours, établissait en France comme culte officiel celui de l’Être Suprême et de toutes tes vertus.

Discours et décret mirent le comble à l’exaltation mystique du monde robespierriste. De sa voix « cristalline » qui toujours semblait mouillée de larmes, Couthon en fit, aux Jacobins, telle apologie que le club acclama « avec transports » Dieu et son prophète : la société avait compris que l’athéisme « desséchant le cœur » eût fait de la France « un peuple d’esclaves. » Il est vrai que l’adresse de félicitations adressée par la Société à la Convention parut évidemment d’un style trop religieux au président, Lazare Carnot, l’homme le moins mystique du monde, qui l’accueillit assez sèchement le 27 floréal, — ce qui le rendit incontinent suspect de libertinage.

Mais les subalternes, au contraire, exagéraient les formules. A lire les proclamations et lettres des amis de Robespierre, on reste stupéfait. Vit-on sous une théocratie mystique où sous une république philosophique ? Les soldats qui sont en train de défendre la République et se font tuer pour elle n’ont été, — qui le croirait ? — inspirés que par le désir de « s’élancer dans le sein de la divinité : » C’est le jeune Jullien qui vient l’affirmer au club. Le Dieu des armées ressuscite donc, et voici que le Dieu de la Nature à son tour vient à la rescousse : le maire robespierriste prévoit de riches moissons. Fleuriot-Lescot n’a consulté ni les savans, ni les agronomes ; mais « l’Être Suprême, assure-t-il aux Parisiens… a commandé à la nature de vous préparer d’abondantes récoltes. Il vous observe, crie-t-il encore à ses administrés, soyez dignes de lui ! »

Les Parisiens se rendaient dignes de lui en préparant la Fête de l’Être Suprême.

Elle devait être l’apothéose du nouveau vicaire des Croyans.

Il ne lui manquait qu’un attentat pour corser l’apothéose : l’attentat vint à point. Une enfant fut saisie dans la cour des Duplay, porteuse de deux petits couteaux. On voulut que ce fût une Charlotte Corday : l’Incorruptible allait être égorgé. La petite Cécile Renault fut conduite à l’échafaud avec 53 « complices » qui jamais ne l’avaient vue, revêtus du voile noir du parricide. Maximilien n’était-il pas le père de la Patrie ?

Le 16 prairial, pour qu’il pût présider officiellement la fête du 20, il fut porté à la présidence de la Convention. Quelques ennemis, perfidement, l’y poussèrent, espérant rendre tangible cette dictature pour l’en mieux incriminer le lendemain. Car, cauteleux à son ordinaire, il régnait jusque-là sans se mettre tout à fait en avant, lançant Couthon, Saint-Just et les autres, faisant agir ses ressorts à l’Etat-major, à l’Hôtel de Ville, à la Convention, au Comité, sans prendre visiblement la tête. On voulait le faire monter au Capitole une bonne fois, pour qu’il y trouvât la Roche Tarpéienne.

David préparait la fête : il était le décorateur officiel, le ministre des Beaux-Arts de Maximilien. Marie-Joseph Chénier avait reçu commande de l’hymne que Gossec devait orchestrer. Mais Marie-Joseph avait blessé le maître en fournissant des hymnes à Chaumette. Il fut jugé indigne : le Pontife en était déjà aux excommunications majeures. Méhul et Gossec, pourvus d’une cantate orthodoxe, s’en allèrent, chaque soir, faire exécuter dans les sections le chant sacré, si bien que Paris, — le Paris sceptique et narquois que nous savons, — fut, une semaine durant, occupé à répéter, sur un mandement suivi d’un dispositif, un cantique au bon Dieu. On croit rêver.

M. Tiersot, après M. Aulard, a tracé un tableau fort pittoresque et des plus détaillés de la fête. Je n’en retiendrai que quelques traits.

Sous le ciel de juin, éclatant et propice (toujours « l’œil bienfaisant » que Couthon voit fixé sur lui et ses amis), le sol jonché de roses et les maisons tapissées de feuillage, les cloches échappées aux exécutions de Chaumette sonnent l’Alléluia, tandis que, les tambours battant, le canon tonne ; le peuple « enrégimenté » en un chœur gigantesque s’achemine vers les Tuileries, parterre immense et fleuri, car les hommes portant des branches vertes, les femmes élèvent des corbeilles aux mille nuances, « coup d’œil ravissant, de femmes en blanc couronnées de roses, » dit une spectatrice, Mlle Fusil. (Notons qu’à deux pas de là, place de la Révolution, de l’autre côté de la grille, le pavé restait rouge du sang de la veille et prêt à recevoir celui du lendemain.)

Devant le Château, la Convention est massée, elle aussi fleurie, car chaque représentant porte à la main un bouquet d’épis, de fleurs et de fruits. Au centre du bassin des Tuileries, le monument allégorique, la Sagesse terrassant l’Athéisme.

Chacun prenant place, Robespierre déjeunait au Château où, deux ans après l’éviction des Bourbons et cinq ans avant l’installation de Bonaparte, il représente seul, pour une heure, une manière de souverain. Il en avait conscience. Etait-ce joie ou inquiétude, sa voix tremblait, ses propos étaient entrecoupés. Vêtu de son habit bleu barbeau, — déjà célèbre, — la culotte de nankin bien tirée sur le bas de soie blanc, il portait avec une sorte de solennité l’écharpe et le panache aux trois couleurs. L’orgueil, vraiment, pour la première fois, lui fit perdre la tête et s’évanouir un instant son heureuse cautèle. Lorsqu’il saisit l’énorme bouquet qu’Eléonore Duplay lui avait préparé, il ressentit évidemment l’exaltation d’un pontife, maître des âmes.

Il était midi. Il parut au balcon, gagna l’estrade, se mit à la tête de la Convention qui, elle, avait attendu (c’était cependant le Souverain). De cette estrade, chaire ou trône, il prononça un long discours, rapsodie dont, pour être tout à fait dans la note (le fait a été récemment révélé), il avait prié un brave prêtre, vieux courtisan au demeurant, l’abbé Porquet, de lui composer le texte. Le sermon fini, cent mille voix entonnèrent l’Hymne au Très-Haut, « Père de l’Univers. »

Une heure après, l’énorme procession s’épanchait au Champ-de-Mars, au son des fanfares. Là encore, au milieu de groupes sentimentaux, mères tendres, pures jeunes filles, vieillards vénérables, soldats héroïques, tous pourvus d’attributs et décorés de fleurs, Maximilien pontifia. A la tête de l’Assemblée, il escalada la Montagne artificielle où, grottes, arbres, galeries, temple s’étageaient. L’immense chœur, derechef, s’était reformé que dirigeait le vieux Gossec. Maximilien était maintenant au sommet comme Moïse au Sinaï : l’Hymne montait vers lui et des nuages d’encens l’entouraient. Alors lui qui, à travers les déceptions, les querelles, les injures, les tendresses, les émeutes, les succès, les révolutions, était toujours resté impassible où sombre, lui qui ne semblait pas savoir sourire, s’épanouit à cette heure brève. Un rêve se réalisait : le pontife, — une minute, — dut se croire Dieu. IV
Une minute, il avait perdu de vue son plan de conquête sans tapage ; il était perdu. Il n’entendit pas que, derrière lui, des imprécations grondaient, partant des rangs de la Convention oubliée. Les ennemis soulignaient de murmures l’imprudence de l’homme.

Le soir même, la Décade osa plaisanter en termes acerbes la nouvelle religion d’Etat, et lorsque Maximilien, encore grisé, se rendit aux Jacobins pour y triompher, il s’y heurta à la morne figure de Joseph Fouché.

Par un hasard, ce « déchristianisateur » était président du club, où, déjà avisé, il avait cru trouver une place de sûreté. Il affecta, à la vérité, de s’associer à la joie générale, mais, après quelques phrases banales, il ajouta : « Brutus rendit un hommage digne de l’Etre Suprême en enfonçant un poignard dans le cœur d’un tyran. Sachez l’imiter. » Robespierre comprit : il le montrera bien lorsque, quelques jours après, il désignera Fouché comme le chef d’une conspiration tramée contre lui. Mais on avait applaudi la phrase audacieuse du président. Robespierre avait commis sa première faute.

Il ne lui en fallait plus commettre. On le guettait. Tout un groupe se tenait pour condamné par le règne de la vertu C’étaient ceux qu’autour de Robespierre, on appelait « les pourris, » proconsuls qui avaient fait de l’or dans le sang. C’étaient aussi les athées, la queue d’Hébert, particulièrement ce « misérable Fouché. » Il en fallait (le mot revient dans les discours di groupe) « purger » la Convention.

C’est le surlendemain de l’algarade de Fouché, le 22 prairial que surgit inopinément la proposition Couthon, destinée à livre : à Robespierre ses derniers ennemis. « Toute lenteur est un crime toute formalité un danger public ; le délai pour punir les ennemis de la patrie ne doit être que le temps de les reconnaître. » Le prévenus n’auront plus d’avocats et le jury par ailleurs juger en masse les accusés. Plus d’ « espèces ; » une seule inculpation seront déclarés ennemis du peuple « tous ceux qui cherchent anéantir la liberté soit par la force, soit par la ruse. »

C’est la dictature de l’accusateur public et du juge ; mais on sait bien qui tient juge et accusateur. Ce n’est pas tout, et voici où se trahit le vrai dessein : jusqu’à cette heure, les représentans, — de Vergniaud à Danton, — n’ont pu être traduits devant le tribunal que sur l’autorisation de l’Assemblée ; désormais ils le pourront être sur l’ordre seul des comités. L’article est pour Legendre, Fréron, Tallien, Barras, Fouché et cinquante autres. Les « ennemis » comprirent. « Si cette loi passe, s’écrie Ruamps, il ne me reste plus qu’à me brûler la cervelle. Je demande l’ajournement. » Des voix nombreuses le soutinrent.

Alors Robespierre, blême de colère, se leva. Il voulait sa loi, ses têtes : « Depuis longtemps, la Convention discute et décrète, parce que, depuis longtemps, elle n’est plus asservie qu’à l’empire des factions. » Il demande que, sans s’arrêter à la proposition d’ajournement, la Convention discute jusqu’à huit heures du soir, s’il le faut, le projet de loi qui lui est soumis.

Quel pouvoir d’hypnose exerçait cet homme ? Les opposans tremblans se turent. Une demi-heure après, la loi de mort était votée.

Maximilien partit, croyant tenir ses vengeances. Mais, dès le lendemain, l’Assemblée, soulevée, derechef s’insurgeait. Bourdon de l’Oise et Merlin obtenaient que, d’un trait de plume, on rayât l’article relatif aux représentans. Ces malheureux voulaient bien livrer la France, mais ils ne voulaient pas se livrer.

Robespierre tenait à l’article plus qu’à toute la loi. Il osa venir réclamer ces têtes qui se disputaient à lui. « Des intrigans, dit-il, s’efforçaient d’entraîner la Montagne, de s’y faire les chefs d’un parti. » — « Nommez-les ! » criaient les malheureux au comble de l’angoisse.

Il eût dû les nommer : dans l’état de terreur folle où se débattait la Convention, elle eût encore livré les têtes nommément désignées. Maximilien commit la faute de laisser planer les craintes sans rassurer la masse. « Je les nommerai quand il le faudra. » Mais il avait parlé, son œil vert fixé sur la Montagne. On s’inclina : l’article mortel fut rétabli.

Le soir même, Robespierre, qui tenait sa loi, entrait en campagne. La présence de Fouché au fauteuil des Jacobins était un scandale qui avait trop duré. Robespierre l’en fit chasser, ce soir du 23 prairial. L’autre s’éclipsa, restant désormais dans l’ombre où il tendit ses rets. Ces six semaines, — du 23 prairial au 8 thermidor, — sont affreuses. Le pays connut l’extrême Terreur : à Paris 40, 50, 60 têtes parfois par jour. « Boucherie, » dit M. Aulard. Le mot est juste.

Paris, rempli des « officieux » de Robespierre, était sous la surveillance d’une effroyable police. On craignait tout, le bruit d’une porte qui s’ouvrait, un cri, un souffle. Les salons étaient déserts, les cabarets vides : les filles ne descendaient plus au Palais-Royal où, — chose inouïe, — la vertu régna. Sous le soleil de Messidor, la ville morne attendait : Quoi ? Tous redoutaient tout, des sacristies aux lupanars.

Les députés ne venaient plus aux Tuileries, craignant d’y trouver une souricière : Prieur fut élu président par 94 voix. Les députés ne couchaient plus chez eux. Parmi ceux qui venaient, dit Thibaudeau, « des timides erraient déplace en place, d’autres n’osaient en occuper aucune, s’esquivant au moment du vote. » C’était la Convention-géante, l’Assemblée qui avait vaincu l’Europe, la Représentation nationale. Déjà Cromwell pouvait, du pavillon de Flore, apercevoir son Parlement croupion.

Il semblait vraiment régner sur un monde aplati : Barras, lors d’une suprême démarche, avait trouvé chez Duplay le général Brune, — le futur maréchal, — épluchant les légumes avec la femme du menuisier. On voit aussi chez le menuisier favori le conventionnel Curée, le futur tribun sur la proposition duquel l’Empire sera un jour proclamé et qui, à plat chez Robespierre, s’exerce à la servitude.

Mais, dans l’ombre, les « pourris » agissaient. Puisqu’ils ne pouvaient entraîner la Convention contre les comités, ils avaient entrepris de disloquer les comités. Au Comité de Salut public, Collot d’Herbois, Barère, Billaud-Varenne, Carnot, Prieur, Lindet, — à des titres divers, — se croyaient menacés, à voir l’exclusive faveur de Couthon et Saint-Just ; et le Comité de Sûreté générale presque tout entier se laissait entraîner contre Robespierre. Beaucoup, après tout, parmi les membres des comités n’avaient serré les coudes que devant l’absolue nécessité de préparer d’accord la résistance aux ennemis de la Patrie. A certains d’entre eux le salut public avait paru justifier leur dicta ture collective et leur imposer l’union. Mais les frontières étaient définitivement reconquises : la victoire de Fleurus, dont la nouvelle éclate à Paris en messidor, est le couronnement d’éclatans succès, et chaque succès, en diminuant le péril extérieur, dispose à trouver plus abusive la dictature intérieure et moins nécessaire l’union du comité. Ce « salut public » n’apparaît plus que comme un audacieux prétexte à la dictature, non plus d’un comité, mais d’une coterie et bientôt d’un homme. « Les victoires s’acharnaient contre Robespierre, » écrira Barère. Aussi Saint-Just recommandait-il à celui-ci de « les faire moins mousser à la tribune. »

Parmi les membres des comités d’autre part, certains se sentaient froissés ou menacés, les uns par l’éclatante réaction spiritualiste, les autres par l’insupportable puritanisme de la vertu. Si Carnot et Lindet goûtaient peu la nouvelle religion d’Etat, un Collot d’Herbois n’était point une rosière, et le vieux Vadier, qui parlait de ses « soixante ans de vertu, » les couronnait par d’étranges débauches. Si on faisait décidément passer la vertu des phrases de tribune aux réquisitoires de l’accusateur, la vie devenait instable.

La morgue pédante de tout l’état-major robespierriste exaspérait : le larmoyant Couthon était insupportable, moins cependant que l’arrogant Saint-Just. Le caractère pontifical de Robespierre faisait sourire ce vieux pitre de Vadier : à la Sûreté générale, il avait saisi les fils d’une affaire dont il entendait faire une machine de guerre. Une folle, Catherine Théot, se disait mère de Dieu : elle prédisait la venue d’un nouveau messie ; ce nouveau messie, ne serait-ce pas Robespierre ? Vadier croyait le démêler dans les propos extravagans de la prophétesse. Il compromit Robespierre en en faisant partout des gorges chaudes. On ricana. La force de Robespierre était d’avoir imposé à tous la gravité tragique. Mais, vraiment, on en avait assez en France. Du jour où le ridicule retrouvait ses droits, Robespierre était perdu.

Les ennemis à l’affût, Tallien, Fouché, comprirent qu’ils n’avaient qu’un parti à prendre pour se sauver : agrandir les fissures qui couraient le long du bloc jusque-là si ferme des comités. Ils s’y appliquèrent. Ils y devaient réussir. Les 8 et 9 thermidor, le bloc tombera en pièces et écrasera sous ses morceaux les missionnaires de la Vertu, les apôtres de l’Être Suprême, Maximilien en tête. En réalité, la dictature de la Vertu avait lassé. Notre joyeux pays se laisse impressionner, une beure, par les professeurs de moralité. Encore faut-il que ces professeurs ne coiffent point trop ostensiblement la tiare et ne transforment pas la tribune en chaire pontificale.

La chute de Robespierre sera très nettement marquée par une réaction de débauches. Lui le prévit et le prédit. « Les brigands triomphent ! » s’écriera-t-il le 9 thermidor. Quelques momens après, hagard, accablé, près d’être arrêté, il essaiera de faire front, il se tournera vers le Centre et tendant les bras aux gens du Marais, il criera : « Hommes purs ! hommes vertueux ! c’est à vous que j’ai recours ! » L’un de ces hommes, Durand de Maillane, lui répondra : « Scélérat, la vertu dont tu profanes le nom doit te traîner à l’échafaud. »

Que la réponse ait été le lendemain imaginée par le bon Durand ou qu’il l’ait prononcée, elle s’imposait. L’avant-veille même, 36 personnes avaient péri, dont André Chénier, le pur poète et, la veille, 55, parmi lesquelles 19 femmes ; et demain Hoche allait périr à son tour, — toujours au nom de « la vertu. » Vraiment cette « vertu » coûtait trop cher.

N’importe : soyons persuadés que Robespierre se croira sincèrement, le 9, victime de « brigands, » ainsi qu’il le dit. Jusqu’au bout, l’homme gardera une sincérité qui fait frémir. Au service d’un cœur de marbre et d’un esprit étroit, telle sincérité équivaut à la pire férocité. En tous cas, elle avait abouti au plus effroyable des régimes. Au plus étonnant aussi : des mois durant, la France aura connu et subi le système qu’elle détestera toujours comme le pire des despotismes : une théocratie fondée sur la morale. Le verbe de Rousseau aura donné naissance à la dictature de Calvin doublée de celle de Torquemada. « C’est ainsi, écrivait Saint-Just à Robespierre, que se gouverne un État libre. »

Voir de plus:

Fête de l’Être suprême au Champ de Mars le 20 prairial an II (8 juin 1794)
Thomas Charles Naudet
(1778 – 1810)
Musée Carnavalet – Histoire de Paris
1793
Aquarelle, gouache et pastel sur traits de plume et mine de plomb
Hauteur: 46,8 cm Longueur: 73 cm

En avril 1794, après l’élimination des Hébertistes, après les mesures prises à l’encontre des sans-culottes (épuration de la Commune de Paris, démantèlement des sections, etc.), le comité de Salut Public se trouvait privé d’un soutien populaire dont il avait craint les excès. La Révolution était « glacée », selon l’expression de Saint-Just. Quelques gages donnés à la bourgeoisie dans le domaine économique ne pouvaient suffire à élargir les bases sociales du régime. C’est pour dépasser les divergences idéologiques et les oppositions de classes par le recours à un consensus d’ordre moral et même métaphysique, que, dans le discours du 18 floréal an II, au cours d’une véritable profession de foi déiste, très imprégnée des idées de Rousseau, Robespierre réclama l’instauration d’une religion de l’Être Suprême. La célébration du nouveau culte fut admise par la Convention au nombre des fêtes nationales et décadaires. Cette religion de substitution devait théoriquement pallier les effets de la déchristianisation croissante, ceux qu’entraînait la disparition du principe d’ordre sous-tendu par le catholicisme. Fondée en nouvelle théologie, la Vertu devient alors garante de la pratique politique puisque, selon Robespierre, « le fondement unique de la société civile, c’est la morale » et que « l’idée de l’Être suprême et de l’immortalité de l’âme est un rappel continu à la justice : elle est donc sociale et républicaine » (Rapport du 18 floréal).

C’est David, grand ordonnateur des fêtes révolutionnaires depuis 1791, qui fut chargé de l’organisation de la cérémonie. Commencée aux Tuileries, où Robespierre mit le feu à un groupe de l’Athéisme, père de tous les vices, pour mettre au jour l’effigie de la Sagesse, la fête atteignit son terme au Champ de la Réunion (Champ de Mars). Elle devait sanctionner la fin de la Révolution dans l’espace même où avaient eu lieu les fêtes de la Fédération (14 juillet 1790) et de l’Unité (10 août 1793) ainsi que la destruction solennelle des emblèmes féodaux, le 14 juillet 1792.

Le but de la procession était un rocher artificiel au sommet duquel était planté un arbre de la Liberté. Cette montagne, métaphore politique, était amplement symbolique puisqu’elle relevait d’une conception moralisée de la nature, connotant l’idée de puissance et celle d’une religion naturelle fondée sur la théologie « panthéiste » de l’Émile. Le thème de la montagne avait déjà été exploité au cours des fêtes révolutionnaires : au camp fédératif de Lyon (30 mai 1790), aux Invalides, lors de la fête de l’Unité (10 août 1793) et durant les cérémonies accompagnant la fête de la Liberté et de la Raison à Notre-Dame de Paris (20 brumaire an II) et à Saint-André de Bordeaux (20 frimaire an II). Au Champ de Mars, la montagne était accompagnée d’une colonne dont seul le sommet apparaît dans l’aquarelle de Naudet ; elle supportait une statue du peuple français sous les traits d’Hercule. La montagne était suffisamment élevée pour accueillir les membres de la Convention, les musiciens et une foule de participants qui interprétèrent un hymne à l’Etre suprême sur une musique de Gossec et des paroles de Marie-Joseph Chénier, et jurèrent de ne déposer les armes qu’après avoir triomphé des ennemis de la République. À droite, le char de Cérès, tiré par des bœufs, est, avec l’Hercule et le trépied fumant, la référence obligée à une Antiquité mythique dont les vertus supposées étaient érigées en modèles. À la fin de la cérémonie, cependant, apparurent les premières marques déclarées d’hostilité envers Robespierre, dont le 9 thermidor allait voir la chute, moins de deux mois plus tard.

Sous un ciel dont le bleu est nuancé de nuages légers, dans un registre réduit de couleurs pâles, Naudet a rendu, plus que la gravité d’une liturgie solennelle, l’enthousiasme d’une foule, rivalisant de verve avec Swebach (vr no 147). Il a isolé le motif de la montagne, en l’utilisant comme une sorte de dispositif scénographique et en a fait le centre de sa composition, à l’encontre, par exemple, d’un De Machy qui, dans son tableau du musée Carnavalet, déploie une vision panoramique du Champ de Mars, avec la colonnade circulaire du temple de l’Immortalité (vestige, il est vrai, d’une fête antérieure, celle de l’Unité).

La Fête de l’Etre suprême, 20 prairial an II (8 juin 1794)
Mémoire de l’artificier Ruggieri relatif à la Fête de l’Etre suprême, 20 prairial an II.

Voir encore:

Vue du jardin national et des décorations, le jour de la fête célébrée en l’honneur de l’être suprême
Fête de l’Etre suprême au Champ de Mars (20 prairial an II – 8 juin 1794)

Auteur : Pierre-Antoine DEMACHY (1723-1807)
Date de création : 1794
Date représentée : 8 juin 1794
Dimensions : Hauteur 53.5 cm – Largeur 88.5 cm
Technique et autres indications : Huile sur toile
Lieu de Conservation : Musée Carnavalet (Paris) ; site web

Contexte historique
L’alliance de la Vertu et de la Terreur

A l’été 1793, la Révolution française traverse une période sombre : le pays est durement touché par une crise économique et des troubles sociaux auxquels s’ajoutent une guerre civile (insurrection vendéenne et révolte fédéraliste) et une série de défaites militaires aux frontières. Or l’entrée de Robespierre, fervent jacobin, au Comité de salut public le 27 juillet 1793 marque un tournant : elle permet au gouvernement révolutionnaire d’opérer un redressement de la situation sur tous les fronts, tandis qu’elle entraîne simultanément une radicalisation de la Révolution. Robespierre, qui aspire à l’unité et à la régénération du peuple, s’efforce d’éliminer physiquement tous les ennemis de la Révolution. A ce renforcement de la Terreur, il ajoute l’instauration d’une religion d’Etat en mai 1794 : le culte de l’Etre suprême, en l’honneur duquel il organise des cérémonies fastueuses le 8 juin suivant.

Analyse de l’image
La fête de l’Etre suprême

Cette huile sur toile de Pierre-Antoine Demachy (1723-1807), peintre d’histoire et excellent dessinateur, livre un témoignage particulièrement intéressant sur le déroulement de la fête de l’Etre suprême au Champ-de-Mars, à Paris. Une vue panoramique du Champ-de-Mars lui a permis de restituer l’ampleur et la somptuosité de la célébration : au premier plan figure le peuple, dont les gestes, minutieusement dépeints, laissent transparaître l’allégresse que suscite la vue, au deuxième plan, d’une gigantesque procession formée par les représentants du peuple suivis des soldats révolutionnaires et de la garde républicaine. Au centre, sur un char que tirent quatre taureaux, trône l’allégorie des instruments des arts et des métiers et des productions du territoire français. Ce cortège s’achemine vers une sorte de rocher artificiel – la « montagne sacrée » par excellence – au sommet duquel s’élèvent l’arbre de la Liberté, symbole de l’unité et de l’adhésion collective à la Révolution, et une colonne antique surmontée d’une statue qui brandit un flambeau. En arrière-plan, à gauche, l’architecture massive de l’Ecole militaire évoque le cadre urbain dans lequel s’insère cette fête aux allures champêtres et mythologiques. Ainsi, de cette composition minutieuse et savamment élaborée se dégage une impression de grandeur, mais aussi de froideur qui correspond bien à l’esprit de la cérémonie, dont le faste hautain et le rituel à l’antique, strictement pensé dans ses moindres détails, étaient surtout destinés à inspirer la stupeur et à frapper l’imagination du peuple, plus spectateur qu’acteur.
Interprétation
Les cultes révolutionnaires de l’an II

Fervent catholique, Robespierre s’opposait fermement à l’accélération du processus de déchristianisation entamé en septembre 1792. Pour lui, le vide laissé par la disparition du catholicisme risquait de plus de désorienter le peuple, accoutumé à ses dogmes et à ses rites. C’est pourquoi il s’efforça de créer une religion officielle, conforme aux idéaux des Lumières et, en particulier, aux théories rousseauistes, qui postulaient l’existence d’une morale naturelle et universelle et d’une divinité impersonnelle, l’Etre suprême, créateur de l’Univers. Dépourvue de prêtres et de sanctuaires, cette nouvelle religion déiste et patriotique n’en revêtait pas moins toutes les apparences d’un culte. La fête du 8 juin 1794 rencontra ainsi un certain succès en France. Elle ne fut que le couronnement d’une série de tentatives menées par les dirigeants de l’an II pour instaurer un culte révolutionnaire. Pour la plupart avortées, ces tentatives témoignent de la complexité des liens qui unissaient la sphère politique et la sphère religieuse, ainsi que de l’impossibilité d’éradiquer tout sentiment religieux. Elles constituèrent également le point de départ d’une religion civique dont les développements ont marqué l’histoire de la République.
Auteur : Charlotte DENOËL
– See more at: http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=379#sthash.oDNzVfcC.dpuf
Titre : Mémoire de l’artificier Ruggieri relatif à la Fête de l’Etre suprême, 20 prairial an II.

Date de création : 1794
Date représentée : 8 juin 1794
Dimensions : Hauteur 32.5 cm – Largeur 21.5 cm
Technique et autres indications : manuscrit ; encre brune ; encre de couleur
Lieu de Conservation : Centre historique des Archives nationales (Paris) ; site web
Contact copyright : CARAN – service de reprographie, 60 rue des Francs-Bourgeois, 75141 Paris cedex 03 ; site web
Référence de l’image : F/4/2090

Contexte historique
Pourfendre l’athéisme à l’aide d’un simulacre pyrotechnique

La fête de l’Etre suprême du 20 prairial an II (8 juin 1794), voulue par Robespierre et orchestrée par J.-L. David, est composée de deux parties. Aux Tuileries, le peuple doit d’abord rejeter l’athéisme puis, au Champ-de-Mars, reconnaître l’Etre suprême et célébrer son adhésion à la Révolution (Voir « La Fête de l’Etre suprême au Champ-de-Mars » de P. A. Demachy ).

Dans l’esprit de Robespierre, la « déchristianisation » entreprise à partir de brumaire an II (novembre 1793) ne doit conduire ni à l’athéisme ni à la laïcité. La reconnaissance du « Grand Etre », auteur de l’Univers, est commune à Voltaire et à Rousseau, elle cimentera la société nouvelle. Le 18 floréal (7 mai), Robespierre fait prendre par la Convention le décret par lequel « le peuple français reconnaît l’Etre suprême et l’immortalité de l’âme » et lui fait approuver le projet de déroulement de la fête de l’Etre suprême mis au point par David pour le 20 prairial. Aux Tuileries, l’Incorruptible prononce deux discours pour stigmatiser l’athéisme, rendre grâce à l’Etre suprême et élever la conscience publique.

On fait appel à l’artificier Ruggieri[1], dont l’activité s’est prolongée jusqu’à notre époque, pour mettre en scène la défaite de l’athéisme. Lorsque débute la Révolution, Petrone Ruggieri exploite un Jardin Ruggieri au faubourg Montmartre, où sont mises en scène des pantomimes pyrotechniques, tous les dimanches et jours de fête à partir du mois de mai. La République, pauvre et guerrière, n’est guère portée sur cet art de substitution dont la monarchie a usé de façon dispendieuse. Elle compose de façon exceptionnelle avec les goûts du temps pour dénoncer le risque de l’athéisme, et non pour organiser un spectacle d’art pyrotechnique.

Analyse des images
Frapper les esprits

David a prévu un effet bref mais spectaculaire : « Le président s’approche tenant entre ses mains un flambeau, le groupe s’embrase, il rentre dans le néant avec la même rapidité que les conspirateurs qu’a frappés le glaive de la loi. »

Daté du 20 fructidor an II (6 septembre 1794), le mémoire de l’artificier Ruggieri, qui s’intitule, à cette occasion, « artificier de la République française une et indivisible », révèle que la statue de l’Athéisme à laquelle Robespierre, habillé en bleu céleste, met le feu a reçu un traitement spécial afin de brûler de façon fulgurante. Il détaille la composition de la pâte inflammable et mentionne aussi la main-d’œuvre « pour avoir aidé au sculpteur à poser la draperie ». L’Athéisme doit aussi consumer les figures qui lui servent de socle : l’Ambition, l’Egoïsme, la Discorde et la Fausse Simplicité. David a prévu qu’elles portent toutes sur le front la mention « seul espoir de l’étranger ». Ces maux fragilisent la patrie en guerre contre les souverains d’Europe coalisés, et le peuple doit en prendre conscience.

L’estampe, éditée par Jacques-Simon Chéreau[2], montre la Sagesse surgissant alors du brasier. Selon David, elle présentera « un front calme et serein », – mais peut-être un peu noirci par la fumée ! – aux députés de la Convention massés sur la tribune. Derrière la Sagesse, on aperçoit les restes de la statue de l’Athéisme et le char de l’allégorie des instruments des arts et des métiers et des productions du territoire français qui sera tiré par quatre taureaux jusqu’au Champ-de-Mars, « emblèmes des jouissances simples de la nature » que « le peuple laborieux et sensible » doit préférer aux « vils trésors de ses lâches ennemis ». Les drapeaux déploient les trois couleurs dans leur disposition originelle[3], qui était encore horizontale et non verticale comme de nos jours.

Interprétation
Promouvoir la vertu civique

Il est surprenant de voir ici l’Incorruptible se prêter à une substitution pyrotechnique organisée avec le concours d’un artificier professionnel pour frapper les esprits ! Le but de Robespierre est d’opérer une pédagogie de masse, fondée sur les conceptions de Rousseau selon lesquelles une émotion bouleversante peut élever les consciences.

L’image, le projet et les documents de cette fête montrent que Robespierre a tenté de propager la morale « naturelle », tout aussi chère à Rousseau que la Raison. Mais cette morale qui serait fondée sur la bonté de l’homme dans l’état de nature nécessite de susciter des élans vers les valeurs simples et naturelles. Robespierre espère voir se répandre la vertu civique grâce à des cérémonies de ce type, qui cherchent à toucher collectivement la sensibilité des participants. David prévoit que le programme suscitera de nombreux moments d’émotion et des larmes populaires, mais aux participants qui viennent de traverser la Terreur, cette fête paraît sans doute grandiose mais étrangement abstraite.

Quelques jours plus tard, la victoire de Fleurus le 8 messidor (26 juin 1794) contre les Autrichiens desserrera l’étau de la coalition et provoquera, sur le plan intérieur, le rejet de la Terreur le mois suivant. Mais, bien après le 9 Thermidor, le Directoire maintiendra longtemps ces cultes civiques à l’Etre suprême.

Auteur : Luce-Marie ALBIGÈS
Notes
1. retour
L’ancêtre de la maison Ruggieri,  » artificier de Bologne « , s’installe à Paris en 1743 pour contribuer par ses  » ingénieuses inventions  » aux spectacles de la Comédie-Italienne. Ses descendants, artificiers du roi, organisent de nombreux spectacles sous l’Ancien Régime.

2. retour
Jacques-Simon Chéreau édite des estampes Aux Deux Colonnes, au 257 de la rue Saint-Jacques – devenue sur cette gravure Rue Jacques, du fait de la déchristianisation –, jusque sous l’Empire. Il est le petit-fils de Jacques Chéreau et le fils de Jacques-Simon Chéreau.

3. retour
Les trois couleurs seront disposées verticalement pour éviter la confusion avec les Pays-Bas.
Bibliographie
Patrick BRACCO,, Ruggieri, 250 ans de feux d’artifice, Paris, Denoël, 1988.
Jules DAVID, Le Peintre Louis David,1748-1825, tome I « Souvenirs et documents inédits », Paris, 1880.
Maxime Préaud, Pierre Casselle, Marianne Grivel et Corinne Le Bitouzé, Dictionnaire des éditeurs d’estampes à Paris sous l’Ancien Régime, Paris, Promodis, 1987.

Voir encore:

Robespierre’s one-day religion
Louis Pauwels

Marilyn Kay Dennis

September 15, 2010

Maximilien Robespierre, known as l’Incorruptible, is at the summit of his glory.  Rivers of blood, flowing from the guillotines of France, have washed away the Girondins and anyone who had pactised with them; the Jacobins, even though they were close to him;  certain Montagnards and, curiously, some of his friends who had too openly supported the theses of the atheists…

In this 1794 Spring, all the great names which had embodied, one after the other, the revolutionary ideals have disappeared in the torment:  Verniaud, Brissot and twenty-one of their friends;  Petion whom he called his brother and Roland, known as le Vertueux;  his wife, the fascinating Madame Roland, Condorcet, the great scholar, President of the Convention, whom he had obliged to commit suicide.

The Corrompus, the Indulgents and, for good measure, the Exageres;  Hebert and his band of lynchers;  the superb Danton and all his companions;  Camille Desmoulins, his former fellow-disciple at Louis-le-Grand, whose best man he had been at his wedding, had all been cut in two.

So great is his power now, that to have any opinion at all is a crime of lese-Revolution.  Since obtaining the head of Louis XVI, he seems to be invested with a sort of absolute power, a divine right.

Without a debate, with no interrogation, no discussion and without anyone to defend him, he had wanted to throw the King into the common grave.  When, after having voted for death, the Convention came to its senses, terrified at what it had just decided, he demanded an immediate execution.  To succeed in this, he had the public tribunals of the Assembly invaded by his friends the sans-culottes.  The redoubtable Commune de Paris lays seige to the King’s prison, the armed sections, the clubs who are devoted to him, get ready for a fight…

Of course, no-one likes him.  There are those who hate him because he has made them vile through the fear that he inspires.  There are those who admire him fearfully, like the Ancients who bowed down before the omnipotent demiurge.  There is the People whom he loves more than he understands, and who idolises him for the absolute rigour of his life.  But without really liking him.  When he, himself, will follow the tragic path of the King, in a cart, an immense cry of joy will rise from the little people of Paris.

He has always been alone, since childhood, and the sceptre of death that he brandishes always higher, isolates him more every day.  Two men only can still enter as they like the door of the living god.  Two exterminating angels.  The handsome Saint-Just, whose principles sharpen every day the blade of the guillotine, and the frightful Couthon, the paraplegic, the blue shadow of the machine, when a gendarme carries him to the tribunal to designate the next victims…

It is April 1794 and, in Paris, it is more oppressing than in the heart of Summer.  Everyone is waiting to see how the High Priest is going to organize the next part of the sacrifice.  For a whole month, a great silence settles on Paris, troubled only by the cries of the executed.  The Convention, the clubs, the army, the Commune and even the revolutionary tribunal, remain quiet…

At last, on 6 May, l’Incorruptible climbs up to the tribunal.  He is wearing his sacerdotal clothes, a sky blue riding-coat and white stockings.  In the deathly silence which greets all of his appearances now, he straightens up and stares for a long time without speaking at the faces of several Deputies.  In particular, that of Fouche, who feels his stony heart starting to liquefy…

Then, he begins in a strange voice, both exalted and monochord…  He starts by establishing that the people of France are at the height of happiness.

“It is in prosperity that the people must meditate to listen to the voice of wisdom…”
Prosperity:  that must be the explosive inflation, with its cortege of misery.  As for wisdom:  that must be the definitive one via the guillotine, with twenty-four heads the day before, and twenty-six today.

Robespierre is more nervous than usual.  His pale, graceless face is agitated with tics.  His eyes with their moist gaze blink frequently while his fingers drum on the edge of the tribunal.

Now, his voice swells, and he climbs over the cadavers, toward the high metaphysical regions, where the Assembly has trouble following him, at first.  By degrees, he asks the Deputies to recognize the existence of a

“Supreme Being and immortality as the directing power of the Universe”.
Then to the stupefaction of some, and the enthusiasm of others, he wants to give his vibrant profession of faith the form of a decree, with immediate effect.

His speech, which at the end rises in a passionate plea for a regenerated Humanity, is welcomed by unending applause.  Couthon spurs his gendarme mount and proclaims that this great piece of literature must be displayed throughout the whole country.  That it should be translated into all languages, too, and diffused throughout the whole universe.

The fabulous decree which institutes in France a new religion and proposes a festival in the style of the celebrations of Antiquity, is voted with enthusiasm and without any discussion.  In the corridors, when the euphoria has died down, the least terrorised start to murmur that, when they had voted the King’s death, they thought that they had also voted that of God.

The French people welcome back a divinity.  For months, the churches had been profaned.  Mountain decors peopled with mythological characters symbolising Reason had been built in them.  In a lot of places, prostitutes, “living marbles of public flesh” had draped themselves, completely naked, on the altars.  God was now being re-installed under the name of Supreme Being.

In Paris, it is not yet known that this Being will soon take on the profile of l’Incorruptible.  But perhaps this will eclipse in a brilliant manner the red reflects of the guillotine, of which everybody is secretly very tired.

Robespierre’s one-day religion – part 2
Louis Pauwels

Marilyn Kay Dennis
September 16, 2010

To bring God back to Earth, Robespierre engages the most gifted director, the painter David, who will soon plant the scene of other festivities, this time imperial…

Robespierre, himself, organizes the music for the ceremonies, and closely oversees the elaboration of the texts, given into the care of Marie-Joseph de Chenier, brother of the great poet, who had only two more months to live.

The gigantic works are hastily started.  On the terrace of the Tuileries Palace, a colossal amphitheatre, whose floor completely covers the ornamental lake, begins to grow.  Cyclopean statues rise above the formal French gardens, which have become the Jardin national.  They symbolise Atheism, Ambition, Discord, Egoism, and will explode on the day of the ceremony…  It is on 20 prairial, year II (8 June, 1794) that it will take place.  Robespierre has chosen the Sunday which, according to the former Roman Catholic rites, was Pentecost.

On the Champs-de-Mars, the Holy Mountain is nearly finished.  The People’s representatives will take place on it, along with the choirs, the orchestras and the banner-bearers.  On its summit, a column fifty feet high overlooks the entrance to a deep cave, lit by giant candelabra.  A river seeps from it, snaking between Etruscan tombs in the shade of an oak tree, and an antique altar, a pyramid, a sarcophage and a temple with twenty columns, complete this mythology.  It takes only a month for a swarm of ditch-diggers, masons, carpenters and artists of all kinds, to finish this unusual church.

A map with all the details of the organization, which had to be strictly respected, was printed and distributed to the people of Paris.  At the crossroads, the musicians who had composed the hymns, Gossec, Mehul and Cherubini, rehearsed and taught their chants to the assembled crowds.

Experts in solemn occasions, the Italians have come to help, and the great firework master of ceremonies, Ruggieri, has installed the mines which are to reduce to ashes the statues which symbolise the major vices of the old times, atheism in particular.  Hardly any notice is taken, amongst all the hammering and sawing, of the rumbling of the carts which, on the other side of the Seine, are carrying hundreds of people to the guillotine.

And here, at last, is the astonishing day of 8 June 1794.  Starting at five o’clock in the morning, the sound of pikes striking the pavement, the rattling of sabres, and the noise of a great troop marching, out-of-step and almost in silence, for a lot of these men do not have shoes, is to be heard.  Robespierre sees, parading under his windows, in columns of twelve, some of the forty-eight Sections of the People who are hurrying towards the meeting places, followed by the Parisians who, already the day before, had discovered the altars of the Supreme Being.

For once, l’Incorruptible allows himself a bit of coquetry.  In this early morning, he adjusts with care the uniform, whose view turns suspects icy cold:  the sky blue jacket, the immaculate stockings, in the pre-Revolution fashion.

At nine o’clock, Paris is in place right down to the last man.  It is not a good idea to be absent from the Grand-Mass in the parish of the terrifying curate who walks in front of his parishioners, carrying a sheaf of wheat ears.

On the Tuileries terrace, the Conventionnels, dressed in dark blue, are already assembled in the amphitheatre.  On their hats, they wear tricoloured feathers, and they, too, brandish wheat ears, mixed with artificial cornflowers and poppies.  The young men arrange themselves in a square around their Section flag, and mothers, who carry bouquets of roses, hold the hand of their daughters dressed in white tunics.

When l’Incorruptible appears, the orchestras start playing their symphonies accompanied by the rolling of drums.  When he arrives at the highest part of the theatre, a salvo of artillery explodes.  Pale, extatic, his body stiff, Robespierre takes a deep breath.

“At last it has arrived, the day forever fortunate that the People consecrate to the Supreme Being…”
His speech, which goes unheard by many, for his voice doesn’t carry well, is magnificent with lyricism and poetic elevation.  The whole time that he takes to descend to the wooden floor over the lake, five hundred thousand Parisians give him an ovation.  Then they see the statue of Atheism go up in flames, replaced by that of Wisdom.  Unfortunately, this papier-mache allegory also has a singed forehead, and its head is crooked.  When Robespierre regains his place, the Conventionnels, sure of making people laugh, cry out:

“Citizen, your wisdom has been obscured!”
Around him, people roar with laughter.  And suddenly, for the High Priest of the new cult, the day darkens, heavy with fateful signs.  Now, an immense procession forms which moves towards the Champ-de-Mars, preceded by cavalry and music squadrons

The Convention surrounds the Liberty float which disappears under an enormous tricoloured banner carried by Childhood decorated with violets.  Virility follows, decorated with oak leaves, beside Adolescence, distinguished by myrtle.  Old Age, decorated with grape-bearing vines, closes the procession.  Behind them, comes the float of the blind, singing hymns to the divinity.

Within the procession, the Deputies look at their little bouquet and find themselves ridiculous.  Luckily, Robespierre walks far up front, which allows the Conventionnels to relax.  In spite of the music, the salvos, the cheering and the singing, he hears behind him cries of “dictator” and “charlatan”.  A woman screams:

“You are a god, Robespierre!”
A Deputy yells to her:

“Cry “Vive la Republique” rather, madwoman!”
In spite of the heat, the face of the Incorruptible is deadly pale.  He thought that today he would feel the spirit of the Supreme Being, but he feels hate around him instead.  He can hear the Deputies openly insulting himself and his God…

Robespierre’s one-day religion – part 3
Louis Pauwels

Marilyn Kay Dennis
September 17, 2010

Very, very slowly, the procession arrives at the foot of the Holy Mountain.  The Conventionnels climb it, and each finds his place on its flanks.  They all have to play their part in front of this long, immense, double column, with men on one side and women on the other.  The crucial moment has arrived.  When the Symphonie au pere de l’Univers erupts, the young girls throw their flowers, the mothers hold their babies up toward Robespierre, the sons unsheath their swords, which they put into their fathers’ hands, swearing only to use them for victory.

Occupied by the armies of Europe outside, chopped down by the butchers of the revolutionary tribunal on the inside, the capital escapes for the first time in months from the baseness of this time of proscriptions…  A lot of people cry and embrace each other in the fading light.

Spread out over the square, whose black soil has not yet finished absorbing the blood of its victims, the crowd feasts and sings.  It will take the whole night to break up…  In the pompous decor delivered up to relic and souvenir hunters, the Deputies can be heard to grumble:

“It’s not enough for him to be the master…  This fellow wants to be a god, as well!”
At nightfall, l’Incorruptible returns alone to the home of the Duplays who shelter him, from where he had left that morning, so full of happy exaltation.  His hosts are very simple people.  When he arrives in the little lodgement, they welcome him with cries of joy and congratulate him on this immense, this indescribable triumph.  Calm, impenetrable, Robespierre tells them in a low voice:

“You will not be seeing me for much longer, my friends…”
***

From 8 June, the day of the Festival of the Supreme Being, Robespierre will have fifty more days to live.  As well as a premonition, it was an act of lucidity that he made with this prediction.  He knew, that day, that he was totally misunderstood by the Conventionnels.

For Robespierre, the sense and the aim of this festival were to replace the pagan, dry and materialistic cult of Reason by a religion which restored transcendance, a God, without Whom, no man worthy of the name, could live…

***

Right from the beginning of the Revolution, Robespierre had tried to stop the dechristianisation of France.  As a faithful disciple of Rousseau, whom he qualified as a “divine man”, he was sure that Man is a “religious animal”, incapable of durably banishing his spiritual needs.  He shared the feeling of the curate of Boissis-la-Bertrand who was willing to renounce his “mummeries”, that is to say, all formal aspects of the cult, but not his religion.  It is in this sense that Michelet was able to say of Robespierre:

“He had a priest’s temperament”.
***

The 8 June festival gives a fairly precise idea of the religion that Robespierre wanted, but did not have the time to develop.  Four days after the festival, perhaps disappointed by the attitude of the Conventionnels, he disappeared, only reappearing at the Convention one month later.  This was enough time for Fouche, Barras and his friends, to dig the hole into which he would fall on 9 Thermidor.  Stefan Zweig writes of Robespierre:

“You can’t pardon a man who has caused you so much fear.”
The 10 Thermidor, he is guillotined with his brother, Saint-Just, Couthon and seventeen of his friends…

***

What originally caused Robespierre’s downfall was the Deputies’ certainty that he wanted to install a new religion of which he would be the High Priest, and this enormous misunderstanding would be fatal to him.  It was not the god of the christian religion that he wanted to install, of course.  He most certainly wanted to radically end the christian institutions and abolish two thousand years of “perverted” christianism, to return to the spirit and the liturgy of the Roman Republic, the religion of Antiquity.  His ideal not only had the sense of political revolution, but also that of a fundamental cultural revolution.

This was his great dream.  He succeeded in giving it body for a few hours by getting five hundred thousand French people to live a day in the fashion of Antiquity.

It is for this reason that he was accused on 9 Thermidor of taking himself for a divinity, and was made to look ridiculous.  He would not have the time to correct this.  And everyone knows that, in France, you can die from being ridiculous…

***

Voir enfin:

La messe rouge

… David, cependant, ne revint pas le lendemain ni les jours suivants, absorbé qu’il était par les préparatifs de la fête gigantesque ordonnée par Robespierre désormais au faîte de la puissance. Celui-ci, considérant que ses ennemis étaient abattus, hormis un seul [xl], a décidé d’en remercier quelqu’un de plus crédible que la déesse Raison : un Etre suprême qui ne peut pas ne pas exister mais auquel cependant il refuse le nom de Dieu. Et depuis que le 7 mai, à la Convention stupéfaite, il a déclaré vouloir rendre hommage à cette entité suprême qui a fait de lui son élu, Louis David dessine, prépare, trace des plans pour l’immense manifestation qui aura lieu, comme par hasard, le 20 prairial, autrement dit le dimanche de la Pentecôte. Dans l’espoir peut-être que le Saint-Esprit s’en mêlerait…

 Ces deux affaires simultanées firent un bruit énorme : on conclut à ce que, par deux fois le même jour, on avait voulu assassiner l’Incorruptible! La fameuse conspiration prenait corps, visages, et Robespierre n’en attacha que plus de soin à la préparation de la cérémonie dont il serait l’unique héros, lui, le grand prêtre de l’Être suprême. Ensuite, on offrirait au peuple le spectacle de la punition exemplaire des membres de cette infâme conspiration : les amis de Batz. D’ici là, on réussirait peut-être à mettre la main sur le baron fantôme.

      Quatre jours avant la fête, le 16 prairial (4 juin) Robespierre fut élu président de la Convention à l’unanimité mais – et ce mais pèserait d’un certain poids dans la suite des événements – quarante-huit heures plus tard, le citoyen Fouché devenait président des Jacobins. Et Fouché haïssait Robespierre…

      En dépit des objurgations de Julie, de Talma et de David qui voudrait qu’elle vienne contempler son ouvre, Laura a refusé farouchement de se rendre à la fête. Ses amis américains n’y vont pas et, de toute façon, elle a horreur de la foule en général et celle qui va se rassembler lui ferait plutôt peur : elle sait trop de quoi elle est capable.

      – Allez-y sans moi, leur dit-elle. Vous me raconterez.

      En revanche, elle a volontiers accordé à Jaouen la permission de s’y rendre : avec lui, elle est sûre d’avoir une relation fidèle, dépourvue de toute autosatisfaction comme de louange obligatoire. Mais, en vérité, Robespierre, David, et les milliers d’ouvriers qui, durant un mois, ont travaillé comme des esclaves construisant des pyramides ont bien fait les choses : un immense cortège doit conduire le char de la Liberté des Tuileries, où se fait le rassemblement, au Champ-de-Mars choisi pour le plus important de la cérémonie. David a donné libre cours à son goût du gigantesque. Sur la terrasse des Tuileries, il a bâti un amphithéâtre dont le plancher recouvre jusqu’au grand bassin. Autour sont plantées d’immenses statues de l’Athéisme (?), de l’Ambition, de la Discorde et de l’Égoïsme que la magie des frères Ruggieri, les maîtres artificiers, fera sauter plus tard.

      A neuf heures du matin, l’amphithéâtre est plein et la foule s’écrase autour. Il est garni de tous les députés de la Convention vêtus de bleu sombre avec chapeaux empanachés de tricolore et portant un petit bouquet d’épis de blé mêlés de bleuets et de coquelicots artificiels. Les jeunes gens forment des carrés autour du drapeau de leur section, cependant que les mères nanties de bouquets de rosés, tiennent par la main leurs filles en tuniques blanches. Et puis voici Robespierre !

      Précédé de roulements de tambour et salué par les éclats des orchestres, il apparaît soudain tout en haut de l’amphithéâtre, silhouette grêle sanglée dans un frac de soie bleu azur avec culotte et bas blancs, coiffé de son habituelle perruque à catogan : presque un élégant de l’Ancien Régime. Il tient dans les bras une gerbe de blé, et c’est dans cet appareil qu’il entame un discours :  » II est enfin arrivé le jour fortuné que le peuple consacre à l’Être suprême…  » Un discours que tous n’entendront pas, car il a toujours eu la voix un peu faible. Puis il se met en marche vers le Champ-de-Mars tandis que flambent les statues que remplace aussitôt celle de la Sagesse. Un peu trop tôt, d’ailleurs, car elle sent le brûlé et manque de perdre la tête. Ce qui fait rire franchement les conventionnels visiblement agacés par une cérémonie qu’ils jugent ridicule.

      Sur le chemin de celui qui se veut le grand prêtre d’un culte nouveau, éclatent les acclamations, les vivats, les chants mais, de temps en temps tout de même son oreille – qu’il a fine s’il ne voit pas très clair -perçoit des cris moins aimables :  » Dictateur!  » ou  » Charlatan! « . Et, sous l’impact de la colère, il devient encore plus pâle que d’habitude. Enfin, voici le Champ-de-Mars, et là, David s’est surpassé. S’il n’a pas encore réussi à construire une montagne sur le Pont-Neuf avec les pierres de Notre-Dame, il en a élevé une ici : la  » Sainte-Montagne  » où prendront place les représentants du peuple, les choeurs, les orchestres et les porte-drapeaux

      Lorsque la Convention eut pris place au sommet de la montagne, un choeur de deux mille cinq cents voix entonna un hymne au Père de l’Univers composé par Marie-Joseph Chénier tandis que les jeunes filles jetaient des fleurs sur la foule répandue tout autour, que les mères élevaient leurs enfants au-dessus de leurs têtes et que les jeunes hommes brandissaient des sabres en jurant de s’en servir jusqu’à la victoire. Après quoi, bien sûr, les assistants se livrèrent à une sorte d’énorme pique-nique copieusement arrosé : il faisait si chaud !

      Parmi les députés, deux hommes avaient suivi le délirant événement avec des yeux froids, un sourire glacé. L’un d’eux dit :

      – Ce n’est pas assez d’être le maître, ce bougre-là voudrait aussi être un dieu?

      – Il faudrait peut-être songer à y mettre un frein?

      L’un s’appelait Barras et l’autre Fouché…

      Robespierre lui-même était-il satisfait? Plein d’exaltation le matin en quittant la maison Duplay, il y revint le soir, toujours calme, toujours impénétrable mais à cette seconde famille qu’il s’était donnée et qui le félicitait en pleurant de joie, il déclara :

      – Vous ne me verrez plus longtemps…

      Ils pensèrent qu’il était fatigué, mais lui songeait déjà à compléter la cérémonie de ce jour en offrant à sa nouvelle divinité un sacrifice propitiatoire susceptible de frapper de terreur ceux qui devaient comploter sa ruine. D’abord, il fallait accorder une grâce aux habitants de sa rue dont certains ne cachaient pas leur écoeurement de voir passer jour après jour, sous leurs fenêtres, les sinistres charrettes de la mort dans lesquelles, parfois, ils reconnaissaient des amis. Une semaine plus tard, le bourreau Sanson démontait la guillotine pour la transporter au bout du faubourg Saint-Antoine, sur la vaste place du Trône-renversé [xlii]. On avait d’abord pensé à la Bastille, mais les habitants s’y opposèrent fermement.

 …

xl

C’est à cette époque qu’il note :  » Les jours qui viennent de luire sont gros des destinées de l’Univers : les deux génies qui s’en disputaient l’empire sont en présence… A la tête de la faction criminelle qui croit toucher au moment de se baigner dans le sang des fidèles représentants du peuple est le baron de Batz… « 

[xli]. Sur son faîte, une colonne de cinquante pieds surveille l’entrée d’une grotte profonde éclairée par des candélabres géants. Une rivière en sourd qui serpente entre des tombeaux étrusques ombragés d’un chêne. Un autel antique, une pyramide, un sarcophage et un temple soutenu de vingt colonnes, complètent cette mythologie.

xli

Louis Pauwels,  » Robespierre ou la religion qui dura un jour  » dans Histoires magiques de l’histoire de France, t. II.
xlii

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