Filières du Vatican: Attention des Monuments men peuvent en cacher d’autres (Ratlines: Looking back at the other Monuments men)

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https://i0.wp.com/www.concordatwatch.eu/Users/X890/X890_727_CWPavelicwithFranciscans.jpghttps://i0.wp.com/www.angelismarriti.it/images/ratlines-byLoftusAarons.jpghttps://i0.wp.com/fallschirmjager.net/books/TheRealOdessa.jpghttps://i0.wp.com/images.indiebound.com/994/181/9780312181994.jpghttps://i0.wp.com/static.lexpress.fr/assets/359/poster_183999.jpgRien actuellement n’empêche plus la voix du pape de se faire entendre. Il me semble que les horreurs sans nom et sans précédent dans l’Histoire commises par l’Allemagne nazie auraient mérité une protestation solennelle du vicaire du Christ. Il semble qu’une cérémonie expiatoire quelconque, se renouvelant chaque année, aurait été une satisfaction donnée à la conscience publique… Nous avons eu beau prêter l’oreille, nous n’avons entendu que de faibles et vagues gémissements. (…) C’est ce sang dans l’affreux silence du Vatican qui étouffe tous les chrétiens. La voix d’Abel ne finira-t-elle pas par se faire entendre ? Paul Claudel (lettre à Jacques Maritain, ambassadeur de France auprès du Saint-Siège, 13 décembre 1945)
C’est de ce long, troublant et douloureux silence qu’il est devenu urgent de parler. Non pour l’interpréter à la seule lueur de la polémique antichrétienne. Non pour en conclure qu’il était d’approbation ou de complicité tacite : tout prouve exactement le contraire. Comme il est devenu d’usage, on soupçonne le pape actuel des pires intentions – sans jamais préciser lesquelles – lorsqu’il franchit une étape dans le lent processus qui pourrait mener à la béatification de Pie XII. On lui refuse le crédit d’une pensée et d’une action qui s’élèvent au-dessus des calculs et se tiennent sans coup férir dans leur sphère propre : religieuse, spirituelle. Les si fortes paroles de Claudel et de Maritain ne nous engagent pas sur la voie d’un procès d’intention dont l’acte d’accusation serait écrit d’avance. En revanche, elles jugent et condamnent sans aucune ambiguïté, avec une force qui dépasse toute polémique, le silence coupable – et non pas la culpabilité silencieuse – de Pie XII. Ce faisant, elles interrogent en toute conscience la réelle héroïcité des vertus du pontife. Le péché par omission est le dernier que le fidèle catholique avoue dans l’acte de contrition. Il n’est pas le moindre. Tout ce que j’aurais pu faire et dire, que je n’ai pas fait, pas dit, remettant à plus tard, à jamais, le bien qu’il m’est commandé d’aimer et de servir. De ne pas trahir. Omettre le bien, se soustraire à ce service, ouvre donc l’espace immense et sombre d’un manquement majeur. Un espace qui ne peut pas être occulté par des motifs contingents, des excuses fallacieuses. Un espace qui n’est étranger à personne, pas même au pape. Patrick Kéchichian
Nous devons conserver une espèce de réservoir moral dans lequel nous pourrons puiser à l’avenir. Krunoslav Draganavic
À l’époque il se produisait à Nuremberg quelque chose que personnellement je considérais comme une honte et une malheureuse leçon pour le futur de l’humanité. J’acquis la certitude que le peuple argentin aussi considérait le procès de Nuremberg comme une honte, indigne des vainqueurs, qui se conduisaient comme s’ils n’avaient pas vaincu. Maintenant nous réalisons [que les Alliés] méritaient de perdre la guerre. Juan Peron
Les contacts de Pavelic sont si élevés et sa situation actuelle si compromettante pour le Vatican, que toute extradition du sujet déstabiliserait fortement l’Église catholique. Rapport des services de renseignement militaire américains (12 septembre 1947)
Le pape François joue la carte de l’ouverture. Le Point
Les travaux d’une commission d’enquête argentine ad hoc semblent montrer au contraire que les dignitaires du Vatican (au premier rang desquels le sous-secrétaire d’état Montini, futur pape Paul VI) n’ont jamais encouragé ces exfiltrations, voire ont eu l’occasion d’y manifester leur opposition. L’Église catholique aurait simplement été, comme la Croix-Rouge, tellement submergée par les flux massifs de réfugiés qu’elle n’aurait pu procéder qu’à des enquêtes sommaires, aisément contournées par les anciens dignitaires nazis. Ce défaut de vigilance aurait d’ailleurs également profité à de nombreux espions soviétiques. Wikipedia
Washington and Bonn failed to act on the information or hand it to the Israelis because they believed it did not serve their interests in the cold war struggle. In fact, the unexpected reappearance of the architect of the « final solution » in a glass box in a Jerusalem court threatened to be an embarrassment, turning global attention to all the former Nazis the Americans and Germans had recruited in the name of anti-communism. Historians say Britain and other western powers probably did the same, but they have not published the evidence. The CIA has. Under heavy congressional pressure, the agency has been persuaded to declassify 27,000 unedited pages about American dealings with former Nazis in postwar Europe. (…) It was not just a question of bureaucratic inertia. There were good reasons not to go hunting for Eichmann. In Bonn, the immediate fear was what Eichmann would say about Hans Globke, who had also worked in the Nazis’ Jewish affairs department, drafting the Nuremberg laws, designed to isolate Jews from the rest of society in the Third Reich. While Eichmann had gone on the run, Globke stayed behind and prospered. By 1960 he was Chancellor Konrad Adenauer’s national security adviser. « The West Germans were extremely concerned apparently about how the East Germans and Soviet bloc in general might make use of what Eichmann would say about Hans Globke, » Mr Naftali said. It was not just a West German concern. Globke was the main point of contact between the Bonn government, the CIA and Nato. « Globke was a timebomb for Nato, » Mr Naftali said. At the request of the West Germans, the CIA even managed to persuade Life magazine to delete any reference to Globke from Eichmann’s memoirs, which it had bought from the family. But it was not just Globke. When Eichmann was captured the CIA combed files it had captured from the Nazis to find information that might be useful to the Israeli prosecution. The results caused near panic among the CIA’s leadership because, unknown to the junior staff who had looked through the files, a few of Eichmann’s accomplices being investigated had been CIA « assets ». An urgent memo was sent to CIA investigators urging caution and pointing out that if Moscow discovered these ex-Nazis had been working for the Americans that would make those agents « very vulnerable ». Meanwhile, some of the CIA’s German agents were beginning to panic. One of them, Otto Albrecht von Bolschwing – who also had worked with Eichmann in the Jewish affairs department and was later Heinrich Himmler’s representative in Romania – frantically asked his old CIA case officer for help. After the war Bolschwing had been recruited by the Gehlen Organisation, the prototype German intelligence agency set up by the Americans under Reinhard Gehlen, who had run military intelligence on the eastern front under the Nazis. « US army intelligence accepted Reinhard Gehlen’s offer to furnish alleged expertise on the Red army – and was bilked by the many mass murderers he hired, » said Robert Wolfe, a historian at the US national archives. Alongside the Gehlen Organisation, US intelligence had set up « stay-behind networks » in West Germany, who were supposed to stay put in the event of a Soviet invasion and transmit intelligence from behind enemy lines. Those networks were also riddled with ex-Nazis who had horrendous records. One of the networks, codenamed Kibitz-15, was run by a former German army officer, Lieutenant Colonel Walter Kopp, who was described by his own American handlers as an « unreconstructed Nazi ». Most of the networks were dismantled in the early 1950s when it was realised what an embarrassment they might prove. (…) The new documents make clear the great irony behind the US recruitment of ex-Nazis: for all the moral compromises involved, it was a complete failure in intelligence terms. The Nazis were terrible spies. (…) « The files show time and again that these people were more trouble than they were worth, » Mr Naftali said. « The unreconstructed Nazis were always out for themselves, and they were using the west’s lack of information about the Soviet Union to exploit it. » The lesson would be well learned by young CIA case officers today. « Threats change rapidly, and it’s always exiles and former government elements who are the first to come running to us saying – we understand this threat. We have seen it with Iraqi exiles. No doubt we’re seeing it now with Iranian exiles. We have to be smart and we have to know who we are really dealing with. » The Guardian
J’ai enquêté personnellement sur Draganovic qui m’a dit qu’il faisait rapport à Montini, a souligné Gowen. Ce dernier a rapporté qu’à un certain moment, Montini apprit, apparemment du chef de l’antenne de l’OSS à Rome, James Angleton, qui entretenait des relations avec Montini et le Vatican, sur les recherches menées par Gowen. Montini se plaignit de Gowen à ses supérieurs et l’accusa d’avoir violé l’immunité vaticane en ayant entré dans des bâtiments appartenant à l’Église, comme le collège croate, et d’y avoir enquêté. Le but de cette plainte était de gêner l’enquête. Dans son témoignage, Gowen déclara également que Draganovic aida les Oustachis à blanchir les trésors volés avec l’aide de la Banque du Vatican : cet argent fut utilisé pour supporter financièrement ses activités religieuses, mais également pour fournir des fonds en vue de l’exfiltration des chefs Oustachis au travers de la filière. Haaretz
Jonathan Levy and Tom Easton are representing elderly Serb, Jewish and Ukrainian survivors of atrocities committed by the Nazi puppet regime in Croatia, the Ustashe, in a class action lawsuit against the Vatican Bank and the monastic Franciscan Order. Wartime intelligence documents have suggested Ustashe leaders took loot, including gold, silver and jewelry seized from their victims, to the Vatican at the end of the war. There the assets were allegedly used to help finance an escape route – the « ratline » – for Nazis trying to escape Europe, according to the Simon Wiesenthal Center, which tracks Nazi war criminals. The Vatican has consistently denied the allegations, while declining to open its unpublished wartime archives despite appeals from Jewish and other groups. The Swiss National Bank, suspected of acting as a depository for stolen Ustashe loot, has also been named as a defendant in the class action lawsuit, and the lawyers are awaiting a judge’s order allowing the case against the Swiss to proceed. Levy said it was hoped the District Court in San Francisco would order the release of more than 250 documents from files dealing with one Krunoslav Draganavic, a Croatian priest who helped run the « ratline. » Some files had been released as early as the 1980s, when Nazi war criminal Klaus Barbie stood trial in France. But a core of others remained withheld on « national security » grounds, he said. Levy said Draganavic was alleged to have worked at various times for the intelligence services of Croatia, the Vatican, the Soviet Union, Yugoslavia, Britain and the U.S. The lawyers said in a statement they believed « the withheld documents, most well over 40 years old are highly embarrassing to the Americans, the British, and Vatican. » (…) Parallel to the counterintelligence unit, other American army intelligence units, and mainly the Office of Strategic Services (OSS, from which the CIA developed) and British intelligence were engaged in contradictory actions. They made contact with Nazis and with the Ustashe people and enlisted them in their service as agents, collaborators and informers, with the intention of forming a front against the Soviet spread into Eastern Europe and the Balkans. Haaretz

Attention: des Monuments men peuvent en cacher d’autres !

A l’heure où après l’accident industriel de l’Obamamanie, nos médias en mal de copie repartent pour un tour avec le premier anniversaire de l’entrée en fonction du nouveau parangon d’ouverture argentin du Vatican …

Et où via le film Monument men, le monde redécouvre l’ampleur du pillage nazi des trésors culturels de l’Europe  …

Qui se souvient d’un autre « sauvetage » à peu près au même moment mais autrement plus sinistre ?

Et qui s’étonne du long silence radio (bientôt 70 ans !) dudit Vatican (comme d’ailleurs des habituelles banques suisses ou des services secrets américains et britanniques – ou français dans le cas du Grand Moufti de Jérusalem et dont on se souvient de l’embarras lors de la capture d’Eichmann par les Israéliens) sur ces mystérieuses archives que l’on continue de refuser d’ouvrir aux victimes de certains des plus grands criminels de l’histoire ?

Ces Eichmann, Mengele, Barbie et autres Priebke, Heim et Pavelic à qui, via notamment certains dignitaires catholiques tels que le prêtre croate Krunoslav Draganovic ou le prêtre autrichien pro-nazi Alois Hudal et sur fond de guerre froide commençante (mais, au-delà de la désinformation soviétique, probablement à l’insu d’un Pie XII et d’un sous-secrétaire d’état Montini et futur pape Paul VI dépassés), le Vatican fournira faux papiers et soutanes …

Mais aussi caches et blanchiment pour leurs butins de guerre en vue de financer leurs réseaux d’exfiltration vers l’Amérique latine (avec en première ligne l’Argentine péroniste) et le Moyen-Orient …

Les fameuses filières dites « rat lines » en anglais ou enfléchures en français, du nom de ces échelles de cordage qui servaient aux marins – mais aussi aux rats – d’ultime refuge au moment où coulait leur navire ?

Tied up in the Rat Lines

Yossi Melman

Haaretz

Jan. 15, 2006

It is possible that within a short time a court in the United States will prohibit the publication of the account before us. In the meantime, Haaretz has obtained the testimony given last month by William Gowen, a former intelligence officer in the United States Army, at a federal court in San Francisco. The testimony contains historical and political explosives. It links Giovanni Battista Montini, who later became Pope Paul VI, to the theft of property of Jewish, Serb, Russian, Ukrainian and Roma victims during World War II in Yugoslavia. Many studies and stories have already been written about the thundering silence of Pope Pius XII, who reigned in the Vatican during World War II. Now the former intelligence officer’s testimony has revealed that after the war, Montini, who during the war served as the Vatican’s deputy secretary of state under the pope, helped hide and launder property that had been stolen from, among others, Jews and was involved in the sheltering and smuggling of Croatian war criminals, such as the leader of the Ustashe movement, Ante Pavelic.

The smuggling and hiding of Croatian war criminals was part of the extensive network known as the Rat Lines. Senior officials at the Vatican were involved in hiding and smuggling Nazi war criminals and their collaborators so they would not be arrested and tried. Hundreds of war criminals were provided with church and Red Cross papers that enabled them to hide in safe houses and then flee from Europe, mainly to the Middle East and South America. Among them were Klaus Barbie (« the butcher of Lyon »), Adolf Eichmann, Dr. Josef Mengele and Franz Stengel, the commander of the Treblinka death camp.

The Vatican network was also used by leaders of the Ustashe – the nationalist Croatian Catholic movement that was active in Croatia and collaborated with the Nazi occupation. « The Reverend Dr. Prof. Krunoslav Draganovic seemed to be in cooperation with the Ustasha network. And he was given a Vatican assignment as the apostolic visitator for Croatians, which meant he reported directly to Monsignor Giovanni Battista Montini, » states an American document based on a report from the Italian police; the document was recently placed in evidence at the court in San Francisco where Gowen testified.

The leaders of the Ustashe headed by Pavelic are the ones who stole the victims’ property: art and jewelry – silver and mostly gold. After the war they fled with the treasure and laundered it with the help of Vatican institutions. According to Gowen’s testimony, Montini, who in 1964 became the first pope to visit the State of Israel, was also involved in the Vatican’s help in laundering the wealth.

Still terrified

In 1999 a suit was filed at a court in San Franciso against the Vatican Bank (Institute for Religious Works) and against the Franciscan order, the Croatian Liberation Movement (the Ustashe), the National Bank of Switzerland and others. The suit was filed by Jewish, Ukrainian, Serb and Roma survivors, as well as relatives of victims and various organizations that together represent 300,000 World War II victims. The plaintiffs demanded accounting and restitution.

One of the lawyers representing the plaintiffs is Jonathan Levy. « Many of the plaintiffs have been reluctant to be pictured, after all these years, » says Levy. « Many are still terrified of the Ustashe, the Serbs particularly. Unlike the Nazi Party, the Ustashe still exist and have a party headquarters in Zagreb. »

The Ustashe was founded in 1929 as a Croatian nationalist movement with a deep connection to Catholicism. From the day it was founded the movement made its aim the establishment of an independent Croatian state and declared to fight the monarchy in Yugoslavia. The movement was banned and its founders, Pavelic and Gustav Percec (who was later murdered at Pavelic’s orders) were condemned to death in their absence. The Ustashe was linked to the assassination of Yugoslav King Alexander and French foreign minister Louis Barthou in Marseilles in 1934.

Upon the occupation of Yugoslavia, the German Nazis and the Italian Fascists formed an « independent » state in Croatia, which was basically a Nazi puppet state. Pavelic was appointed poglovnik, the leader of the country. He hastened to meet with Hitler and allied himself with the Fuehrer. When Hitler invaded the Soviet Union, Pavelic sent Ustashe units to fight alongside the Nazis and then joined the declaration of war against the United States. Ustashe leaders declared they would slaughter a third of the Serb population in Croatia, deport a third and convert the remaining third from Orthodoxy to Roman Catholicism. Anyone who refused to convert was murdered.

Immediately upon the establishment of its puppet government, the Ustashe set up militias and gangs that slaughtered Serbs, Jews, Romas and their political foes. Catholic priests, some of them Franciscans, also participated in the acts of slaughter. The cruelty of the Ustashe was so great that even the commander of the German army in Yugoslavia complained.

Himmler of the Balkans

Under the leadership of Pavelic’s right-hand man Andrija Artukovic, who earned the nickname « the Himmler of the Balkans, » the Ustashe set up concentration camps, most notably at Jasenovac. According to various estimates, about 100,000 people were murdered at the camp, among them tens of thousands of Jews (it is interesting to note that some of the heads of the Ustashe were married to Jewish women). Throughout Croatia about 700,000 people were murdered. The partisans, led by the Croat Communist Josip Broz Tito, and the Chetniks – Nationalist Serb royalists – fought the Ustashe.

After the war, Pavelic and other Ustashe heads fled to Austria and, with the help of the British intelligence and their friends in the Vatican, found refuge in Italy. They hid in Vatican monasteries and were provided with false documents that gave them a new identity. Secret documents that were disclosed at the court in San Francisco show that at the end of the war, British intelligence took Pavelic under its wing and allowed him and a convoy of 10 trucks that carried the stolen treasure to travel to the British occupation zone in Austria. The British did this with the intention of using him as a counterweight to the Communist takeover in Yugoslavia.

The Ustashe brought the treasure convoy to Rome, where they put it into the hands of the Croatian ambassador to the Vatican, Rev. Krunoslav Draganovic. Draganovic also saw to hiding Pavelic and his aides in Vatican institutions and safe houses in Rome. American military intelligence located Pavelic’s hiding place. But according to a secret document Gowen wrote in July 1947, that was submitted to the court, Gowen’s unit received the instruction: « Hands off » Pavelic.

This was an order from the American Embassy, stressed Gowen in his testimony. It is also stated in the document, which is classified as top secret, that Pavelic, via his contacts with Draganovic, was receiving Vatican protection. From Italy, Pavelic was smuggled on the Rat Lines to Argentina, where he served as a security adviser to president Juan Peron (Peron granted entry visas to 34,000 Croats, many of them associated with the Ustashe and Nazi supporters).

In 1957 there was an attempt to assassinate him, in which he was wounded. The operation was attributed to Tito’s Yugoslav intelligence, although the possibility that this was an attempt at revenge by a Chetnik activist was not dismissed. Pavelic had to leave Argentina and found refuge with the Spanish dictator Franco. Two years later, in 1959, he died as a result of complications caused by the wound. The Ustashe has continued to exist over the years and until the 1980s its operatives were involved in acts of terror against diplomats and other Yugoslav targets abroad.

Montini complains

The suit filed at the court in San Francisco is based on earlier investigations and reports from American government agencies, the Simon Wiesenthal Center and committees of historians who researched the matter of the Jewish property in Swiss banks. The case was preceded by successful legal battles by attorney Levy and his colleagues against the CIA and the American Army to obtain secret documents. The defendants, on their part, led by the Vatican Bank and the Franciscan order and others, deny the charges against them and made every effort to have the charges dismissed. So far, the court has rejected these efforts outright and determined that the deliberations would continue. But the defendants are tenacious and now they are demanding that publication of Gowen’s testimony be prohibited.

After the end of the war Gowen served as a special agent, meaning an investigations officer in the Rome detachment of American counter-intelligence. This unit’s role was to track down, among others, Italian Fascists, Nazi war criminals and their collaborators, including the Ustashe leaders (Gowen said another mission included, at the request of British intelligence, surveillance of Irgun and Lehi activists). The code name for the unit’s actions was « Operation Circle. »

Parallel to the counterintelligence unit, other American army intelligence units, and mainly the Office of Strategic Services (OSS, from which the CIA developed) and British intelligence were engaged in contradictory actions. They made contact with Nazis and with the Ustashe people and enlisted them in their service as agents, collaborators and informers, with the intention of forming a front against the Soviet spread into Eastern Europe and the Balkans. « To try and find Pavelic you had to discover how the Ustashe network in Italy was constituted, how it operated, what were its bases, » testified Gowen.

A key person in the Pontifical Croatian college was Rev. Draganovic, the Croatian ambassador to the Vatican. Draganovic and the college issued false papers to Croatian war criminals, among them Pavelic and Artukovic. « I personally investigated Draganovic – who told me he was reporting to Montini, » emphasized Gowen.

Gowen related that at a certain stage Montini learned, apparently from the head of the OSS unit in Rome, James Angleton, who nurtured relations with Montini and the Vatican, of the investigation Gowen’s unit was conducting. Montini complained about Gowen to his superiors and accused him of having violated the Vatican’s immunity by having entered church buildings, such as the Croatian college, and conducting searches there. The aim of the complaint was to interfere with the investigation.

In his testimony, Gowen also stated that Draganovic helped the Ustashe launder the stolen treasure with the help of the Vatican Bank: This money was used to fund its religious activities, but also to fund the escape of Ustashe leaders on the Rat Line.

Voir aussi:

Nazi-Era Victims Demand Army, CIA Release Documents on Vatican

Patrick Goodenough

CNS news

July 7, 2008

(CNSNews.com) – Two California attorneys have filed a Freedom of Information Act lawsuit in a bid to have the U.S. Army and CIA release documents relating to alleged Vatican collaboration with Nazi-allied fascists in the wartime Balkans.

The Army’s decision earlier this year to withhold more than 250 documents, some at the request of the CIA, was in violation of the Nazi War Crimes Disclosure Act, the lawyers contended in their complaint.

Jonathan Levy and Tom Easton are representing elderly Serb, Jewish and Ukrainian survivors of atrocities committed by the Nazi puppet regime in Croatia, the Ustashe, in a class action lawsuit against the Vatican Bank and the monastic Franciscan Order.

Wartime intelligence documents have suggested Ustashe leaders took loot, including gold, silver and jewelry seized from their victims, to the Vatican at the end of the war.

There the assets were allegedly used to help finance an escape route – the « ratline » – for Nazis trying to escape Europe, according to the Simon Wiesenthal Center, which tracks Nazi war criminals.

The Vatican has consistently denied the allegations, while declining to open its unpublished wartime archives despite appeals from Jewish and other groups.

The Swiss National Bank, suspected of acting as a depository for stolen Ustashe loot, has also been named as a defendant in the class action lawsuit, and the lawyers are awaiting a judge’s order allowing the case against the Swiss to proceed.

Levy said it was hoped the District Court in San Francisco would order the release of more than 250 documents from files dealing with one Krunoslav Draganavic, a Croatian priest who helped run the « ratline. »

Some files had been released as early as the 1980s, when Nazi war criminal Klaus Barbie stood trial in France. But a core of others remained withheld on « national security » grounds, he said.

Levy said Draganavic was alleged to have worked at various times for the intelligence services of Croatia, the Vatican, the Soviet Union, Yugoslavia, Britain and the U.S.

The lawyers said in a statement they believed « the withheld documents, most well over 40 years old are highly embarrassing to the Americans, the British, and Vatican. »

Among those Holocaust researchers say escaped via the « ratline » between 1945 and the late 1950s was Ustashe leader Ante Pavelic, who made his way to Latin America using papers allegedly provided by the Vatican, and disguised as a priest.

Barbie, known as « the butcher of Lyon, » was another reported beneficiary of the « ratline, » escaping to Bolivia. It has long been alleged the U.S. used him as an anti-communist agent after the war. A 1983 Justice Department investigation concluded that the U.S. had no relationship with Barbie since he left Europe in 1951.

Barbie was eventually deported to France in 1983, jailed for life several years later for crimes against humanity, and died in prison in 1991.

Another suspected user of the « ratline » was Adolf Eichmann, one of the architects of Hitler’s « final solution. » He was abducted from Argentina by Mossad agents in 1960, convicted at the end of a marathon trial in Israel, and hanged in 1962.

Between 700,000 and 900,000 people died at the hands of the Ustashe regime, which also participated in the systematic Nazi looting of occupied Ukraine.

Voir également:

Why Israel’s capture of Eichmann caused panic at the CIA

Information that could have led to Nazi war criminal was kept under wraps

Julian Borger in Washington

The Guardian

8 June 2006

On May 23 1960, when Israeli prime minister David Ben-Gurion announced to the Knesset that « Adolf Eichmann, one of the greatest Nazi war criminals, is in Israeli custody », US and West German intelligence services reacted to the stunning news not with joy but alarm.

Newly declassified CIA documents show the Americans and the German BND knew Eichmann was hiding in Argentina at least two years before Israeli agents snatched him from the streets of Buenos Aires on his way back from work. They knew how long he had been in the country and had a rough idea of the alias the Nazi fugitive was using there, Klement.

Even though German intelligence had misspelled it as Clemens, it was a crucial clue. The Mossad effort to track Eichmann had been suspended at the time because it had failed to discover his pseudonym. They were ultimately tipped off by a German official disgusted at his government’s failure to bring the war criminal to justice.

Embarrassment

Washington and Bonn failed to act on the information or hand it to the Israelis because they believed it did not serve their interests in the cold war struggle. In fact, the unexpected reappearance of the architect of the « final solution » in a glass box in a Jerusalem court threatened to be an embarrassment, turning global attention to all the former Nazis the Americans and Germans had recruited in the name of anti-communism.

Historians say Britain and other western powers probably did the same, but they have not published the evidence. The CIA has. Under heavy congressional pressure, the agency has been persuaded to declassify 27,000 unedited pages about American dealings with former Nazis in postwar Europe.

One of the most startling of those documents is a CIA memo dated March 19 1958, from the station chief in Munich to headquarters, noting that German intelligence (codenamed Upswing) had that month passed on a list of high-ranking former Nazis and their whereabouts. Eichmann was third on the list. The memo passed on a rumour that he was in Jerusalem « despite the fact that he was responsible for mass extermination of Jews », but also states, matter-of-factly: « He is reported to have lived in Argentina under the alias Clemens since 1952. »

There is no record of a follow-up in the CIA to this tip-off. The reason was, according to Timothy Naftali, a US historian who has reviewed the freshly-declassified archive, it was no longer the CIA’s job to hunt down Nazis. « It just wasn’t US policy to go looking for war criminals. It wasn’t British policy either for that matter. It was left to the West Germans … and this is further evidence of the low priority the Germans gave to hunting down war criminals. »

It was not just a question of bureaucratic inertia. There were good reasons not to go hunting for Eichmann. In Bonn, the immediate fear was what Eichmann would say about Hans Globke, who had also worked in the Nazis’ Jewish affairs department, drafting the Nuremberg laws, designed to isolate Jews from the rest of society in the Third Reich. While Eichmann had gone on the run, Globke stayed behind and prospered. By 1960 he was Chancellor Konrad Adenauer’s national security adviser.

« The West Germans were extremely concerned apparently about how the East Germans and Soviet bloc in general might make use of what Eichmann would say about Hans Globke, » Mr Naftali said.

It was not just a West German concern. Globke was the main point of contact between the Bonn government, the CIA and Nato. « Globke was a timebomb for Nato, » Mr Naftali said. At the request of the West Germans, the CIA even managed to persuade Life magazine to delete any reference to Globke from Eichmann’s memoirs, which it had bought from the family.

But it was not just Globke. When Eichmann was captured the CIA combed files it had captured from the Nazis to find information that might be useful to the Israeli prosecution. The results caused near panic among the CIA’s leadership because, unknown to the junior staff who had looked through the files, a few of Eichmann’s accomplices being investigated had been CIA « assets ».

An urgent memo was sent to CIA investigators urging caution and pointing out that if Moscow discovered these ex-Nazis had been working for the Americans that would make those agents « very vulnerable ».

Meanwhile, some of the CIA’s German agents were beginning to panic. One of them, Otto Albrecht von Bolschwing – who also had worked with Eichmann in the Jewish affairs department and was later Heinrich Himmler’s representative in Romania – frantically asked his old CIA case officer for help.

After the war Bolschwing had been recruited by the Gehlen Organisation, the prototype German intelligence agency set up by the Americans under Reinhard Gehlen, who had run military intelligence on the eastern front under the Nazis. « US army intelligence accepted Reinhard Gehlen’s offer to furnish alleged expertise on the Red army – and was bilked by the many mass murderers he hired, » said Robert Wolfe, a historian at the US national archives.

‘Unreconstructed’

Alongside the Gehlen Organisation, US intelligence had set up « stay-behind networks » in West Germany, who were supposed to stay put in the event of a Soviet invasion and transmit intelligence from behind enemy lines. Those networks were also riddled with ex-Nazis who had horrendous records.

One of the networks, codenamed Kibitz-15, was run by a former German army officer, Lieutenant Colonel Walter Kopp, who was described by his own American handlers as an « unreconstructed Nazi ».

Most of the networks were dismantled in the early 1950s when it was realised what an embarrassment they might prove.

« The present furore in western Germany over the resurgence of the Nazi or neo-Nazi groups is a fair example – in miniature – of what we would be faced with, » CIA headquarters wrote in an April 1953 memo.The new documents make clear the great irony behind the US recruitment of ex-Nazis: for all the moral compromises involved, it was a complete failure in intelligence terms. The Nazis were terrible spies.

« Subject is immature and has a personality not suited to clandestine activities, » the CIA file on one of the stay-behind agents said sniffily. « His main faults are his lack of regard for money and his attraction to members of the opposite sex. »

Those were the least of their flaws as would-be anti-communist agents. They had not risen in the Nazi ranks because of their respect for facts. They were ideologues with a keen sense of self-preservation.

« The files show time and again that these people were more trouble than they were worth, » Mr Naftali said. « The unreconstructed Nazis were always out for themselves, and they were using the west’s lack of information about the Soviet Union to exploit it. »

The lesson would be well learned by young CIA case officers today.

« Threats change rapidly, and it’s always exiles and former government elements who are the first to come running to us saying – we understand this threat. We have seen it with Iraqi exiles. No doubt we’re seeing it now with Iranian exiles. We have to be smart and we have to know who we are really dealing with. »

Protected Nazis

Adolf Eichmann The SS colonel who organised the final solution was so enthusiastic about his work that he carried on even after Heinrich Himmler had called a halt. He was captured by US troops but escaped to Argentina. Israeli agents tracked him down in 1960 and he was hanged in 1962.

Hans Globke A Nazi functionary working with Eichmann in the Jewish Affairs department who helped draft the laws stripping Jews of rights. After the war he rose to become one of the most powerful figures in the government. As national security advisor to Chancellor Konrad Adenauer, he was the main liaison with the CIA and Nato.

Reinhard Gehlen A major general in the Wehrmacht who was head of intelligence-gathering on the eastern front. He sold his supposed inside knowledge of the Soviet Union to the Americans who made him head of West German intelligence, an organisation he led until 1968.

Voir encore:

Le long péché par omission de Pie XII

Patrick Kéchichian

Le Monde

29.12.2009

A propos de l’attitude de Pie XII durant la guerre, face à la Shoah qui avait lieu presque sous ses yeux (et ceux des puissances alliées) au coeur de la Vieille Europe chrétienne, les historiens s’affrontent. Tous les documents ne sont pas encore accessibles. Il est urgent qu’ils le deviennent. Ce à quoi le Saint-Siège ne s’oppose pas, que l’on sache, invoquant simplement la nécessité d’un « délai technique » pour « le classement et la mise en ordre d’une masse énorme de documents », selon les déclarations de Federico Lombardi, directeur de la salle de presse du Vatican, le 23 décembre. Il semblerait naturel et intellectuellement digne que le procès de canonisation n’aille pas plus vite que le complet dévoilement des archives.

La très diplomatique prudence de Pie XII permit-elle de sauver plus de juifs que ne l’auraient fait des interventions directes ? Les témoignages ne manquent pas, y compris du côté juif, qui attestent de gestes multiples et ponctuels. Par ailleurs, une chose est sûre : aucune complaisance idéologique avec le paganisme nazi ne peut être imputée au Saint-Père. Rappelons simplement, parmi d’autres paroles, son message de Noël 1942 évoquant les « centaines de milliers de personnes, qui, sans aucune faute de leur part, et parfois uniquement pour des raisons de nationalité ou de race, sont destinées à la mort ou à une extinction progressive ».

De même, six mois plus tard, devant le collège des cardinaux, il parle des « supplications anxieuses de tous ceux qui, à cause de leur nationalité ou de leur race, sont parfois livrés, même sans faute de leur part, à des mesures d’extermination ». Mais il ajoute (nous sommes donc en juin 1943) : « Toute parole de notre part, toute allusion publique devrait être sérieusement pesée et mesurée, dans l’intérêt même de ceux qui souffrent, pour ne pas rendre leur situation encore plus grave et insupportable. » Ce propos qui sonne si mal à notre oreille introduit directement à l’autre aspect de la question.

Pour y répondre, je laisserai la parole à un homme peu soupçonnable de la moindre inimitié à l’égard de la papauté ou d’esprit de querelle face aux faits et gestes du magistère romain. Paul Claudel, le 13 décembre 1945, écrivit à Jacques Maritain, alors ambassadeur de France auprès du Saint-Siège – ce document et ses commentaires furent publié par les Cahiers Jacques Maritain, n° 52, 2006. « Je pense souvent à vous et à la mission si importante et si difficile que vous remplissez auprès de Sa Sainteté. Rien actuellement n’empêche plus la voix du pape de se faire entendre. Il me semble que les horreurs sans nom et sans précédent dans l’Histoire commises par l’Allemagne nazie auraient mérité une protestation solennelle du vicaire du Christ. Il semble qu’une cérémonie expiatoire quelconque, se renouvelant chaque année, aurait été une satisfaction donnée à la conscience publique… Nous avons eu beau prêter l’oreille, nous n’avons entendu que de faibles et vagues gémissements. »

Puis, faisant référence à l’Apocalypse, il parle du sang des « 6 millions (de juifs) massacrés » et conclut par ces mots : « C’est ce sang dans l’affreux silence du Vatican qui étouffe tous les chrétiens. La voix d’Abel ne finira-t-elle pas par se faire entendre ? » Peut-on imaginer plus claire prise de position ?

Jacques Maritain, dont la réflexion sur l’antisémitisme s’est approfondie au cours des années 1930, était lui-même intervenu, dès 1942, pour obtenir de Pie XII une encyclique « qui délivrerait beaucoup d’âmes angoissées et scandalisées ». Il avait même proposé, la même année, de faire du Yom Kippour un jour de prière pour les chrétiens en faveur des juifs persécutés. L’on sait que toutes ces démarches restèrent lettre morte.

C’est de ce long, troublant et douloureux silence qu’il est devenu urgent de parler. Non pour l’interpréter à la seule lueur de la polémique antichrétienne. Non pour en conclure qu’il était d’approbation ou de complicité tacite : tout prouve exactement le contraire.

Comme il est devenu d’usage, on soupçonne le pape actuel des pires intentions – sans jamais préciser lesquelles – lorsqu’il franchit une étape dans le lent processus qui pourrait mener à la béatification de Pie XII. On lui refuse le crédit d’une pensée et d’une action qui s’élèvent au-dessus des calculs et se tiennent sans coup férir dans leur sphère propre : religieuse, spirituelle.

Les si fortes paroles de Claudel et de Maritain ne nous engagent pas sur la voie d’un procès d’intention dont l’acte d’accusation serait écrit d’avance. En revanche, elles jugent et condamnent sans aucune ambiguïté, avec une force qui dépasse toute polémique, le silence coupable – et non pas la culpabilité silencieuse – de Pie XII. Ce faisant, elles interrogent en toute conscience la réelle héroïcité des vertus du pontife.

Le péché par omission est le dernier que le fidèle catholique avoue dans l’acte de contrition. Il n’est pas le moindre. Tout ce que j’aurais pu faire et dire, que je n’ai pas fait, pas dit, remettant à plus tard, à jamais, le bien qu’il m’est commandé d’aimer et de servir. De ne pas trahir. Omettre le bien, se soustraire à ce service, ouvre donc l’espace immense et sombre d’un manquement majeur. Un espace qui ne peut pas être occulté par des motifs contingents, des excuses fallacieuses. Un espace qui n’est étranger à personne, pas même au pape.

Patrick Kéchichian, auteur de Petit éloge du catholicisme (Gallimard, 130 p. 2 €), ancien collaborateur du Monde des livres.

L’Eglise catholique face au génocide

Marc Riglet

Lire

05/07/2012

Spécialiste des relations judéo-chrétiennes, l’auteur revoit la position de l’Eglise vis-à-vis des Juifs.

Quelle fut l’attitude de l’Eglise romaine, des années 1930 jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, envers les Juifs persécutés ? Quelles positions de principe adopta-t-elle par rapport au fascisme en général et au national-socialisme en particulier et quelle politique fut conduite, par le Vatican, avec l’Allemagne nazie ? L’antijudaïsme chrétien s’accommoda-t-il de l’antisémitisme racialiste moderne ou bien y a-t-il eu entre l’un et l’autre solution de continuité ? Quel jugement, enfin, convient-il de porter sur la personnalité et les actions de Pie XII qui, de la nonciature à Berlin dans les années 1930 au trône de saint Pierre pendant la guerre, joua le tout premier rôle et commanda l’essentiel des réponses à ces questions ?

Dans les années 1960, la pièce de Rolf Hochhuth, Le Vicaire, qui dénonçait sans ménagement les silences du pape face aux persécutions des Juifs, avait provoqué une vive polémique. Les travaux historiques conduits depuis, les réflexions menées au sein même de l’Eglise romaine, l’aggiornamento de Vatican II revisitant et déplorant l’antijudaïsme traditionnel, et puis, surtout, les déclarations de repentance de nombreuses autorités ecclésiales semblaient avoir établi solidement le « jugement de l’Histoire ». Non seulement Pie XII était bien resté silencieux face au martyre juif, mais sa position ambiguë sur l’antisémitisme rendait ce silence coupable. Or, voici que ce constat est à nouveau discuté. Menahem Macina, éminent spécialiste des relations judéo-chrétiennes, s’en émeut dans un excellent livre où la richesse de la documentation le dispute au caractère serré de l’argumentation. Et comment ne pas être sensible, avec lui, à ce qu’il peut y avoir d’indécent dans l’entreprise de « révision hagiographique de l’attitude de Pie XII envers les Juifs » ? Elle s’explique dans le projet, bien avancé, de béatifier ce pontife et culmine même, chez certains, dans la proposition de conférer à Pie XII la qualité de « Juste des Nations » dont Israël honore ceux qui, dans les épreuves, ont aidé le peuple juif.

Menahem Macina reprend toutes les pièces du dossier. Ses conclusions sont sévères mais justes. Pie XII, tout attaché à la défense de son Eglise, a manqué, vis-à-vis des Juifs, de la troisième vertu théologale : la charité. Ce serait la force de l’Eglise catholique que de le reconnaître et de s’en tenir là… une fois pour toutes.

LA CAVALE DES MAUDITS

Conan Eric

L’Express

12/08/1993

A la fin des années 40, fuyant l’épuration, des centaines de Français débarquent à Buenos Aires. Dans cette ville qui leur rappelle Paris, on n’est pas trop regardant sur leur passé. Et ils ne risquent pas d’en être extradés. Certains s’y referont une vie de notable. D’autres végéteront. Quelques-uns y sont encore. Beaucoup sont rentrés. Récit d’une débandade.

Il y a ceux qui sont restés et ceux qui sont repartis. La plupart sont restés. Souvent jusqu’à leur mort, au terme d’une seconde vie, paisible et confortable. Très loin de leur éternel sujet de discussion, de passion et de ressentiment: la France. Cette France qui les a fait fuir. Et qui les a perdus. Personne n’a tenu la chronique de cet exil silencieux: à la fin des années 40, des centaines de Français ont débarqué à Buenos Aires, redoutant la justice de la Libération, ou désireux de s’y soustraire lorsqu’elle s’était déjà prononcée.

L’exil argentin reste une tradition française. Plusieurs générations de proscrits ont échoué ici: communards, anarchistes, juifs fuyant Vichy, collaborateurs, soldats de l’OAS. Jean-Michel Boucheron, le député socialiste ripou, constitue le dernier arrivage de marque… Ce tropisme s’explique d’abord par l’absence de convention d’extradition entre la France et l’Argentine, qui rend la sérénité à beaucoup de fuyards. De plus, Buenos Aires, véritable cité européenne, rassure avec ses immenses quartiers copiés sur Paris, Madrid ou Bruxelles, et sa population comme sa gastronomie offrent un agréable échantillon des silhouettes et traditions du Vieux Continent. La vie y fut longtemps facile, et les Français, très bien accueillis. D’autant plus que la tradition locale veut que l’on n’importune jamais les migrants sur les raisons qui ont pu les pousser à faire subitement des milliers de kilomètres pour s’établir dans un pays qu’ils ne connaissent pas…

A leur arrivée, beaucoup de ces Français de l’épuration tiennent cependant à s’expliquer, en donnant une version retouchée des événements qui les ont conduits à quitter la France: ils sont résistants, mais, à cause de De Gaulle, le Parti communiste a pris le pouvoir et fait la chasse aux vrais patriotes. En danger de mort, il leur a fallu fuir… Version peu discutée dans une Argentine péroniste qui croit alors à l’imminence d’une troisième guerre mondiale… Ils viennent de Suisse, d’Italie ou d’Espagne, pays refuges où beaucoup ont attendu de connaître leur jugement par contumace avant de décider d’aller voir ailleurs. Certains débarquent à Buenos Aires avec femme et enfants, comme ces notables de province engagés tardivement dans la folie meurtrière de la Milice de 1944. Beaucoup ont dû tout abandonner. Le clivage se fait vite entre ceux qui ont de l’argent, facile à faire fructifier en Argentine, et ceux qui n’ont rien. Ces derniers, souvent, commencent par trimer comme dockers sur le port avant de trouver mieux. Mgr Barrère, évêque de Tucuman et proche de l’Action française, fut secourable pour certains. Mais, entre eux, il n’y eut jamais de réelle solidarité, sauf peut-être au sein de l’importante tribu des anciens journalistes de « Je suis partout »: Charles Lesca, directeur de l’hebdomadaire, condamné à mort par contumace en mai 1947, avait la double nationalité française et argentine et une petite fortune héritée d’un père négociant dans la viande à Buenos Aires. Mais il est mort dès 1948, immédiatement après son arrivée.

Un petit groupe de nostalgiques essaya pourtant de maintenir l’ambiance de l’ex- « nouvelle Europe ». Dans le quartier Belgrano, une association, la Casa Europa (la « Maison Europe »), dirigée par Radu Guenea, ancien ambassadeur de Roumanie à Madrid, leur permettait de se retrouver: Français, Allemands, Roumains, Italiens, Croates, Belges, Hongrois se réunissaient et suivaient à travers la presse étrangère les développements de la guerre froide en Europe. Ils avaient choisi pour quartier général la brasserie Adam’s, près du port, où les soirées se prolongeaient souvent fort tard, dans la gaieté et la bonne humeur. Il s’agissait alors moins de nostalgie que d’espoir: la troisième guerre mondiale leur semblait une hypothèse sensée, et son déclenchement leur aurait permis de revenir en Europe participer au combat final contre le communisme. Espoir que la plupart perdent définitivement après la fin de la crise de Corée, en 1953. Les manifestations collectives chez Adam’s deviennent moins régulières. « J’ai vite compris qu’il fallait s’en sortir tout seul, précise un ancien Waffen SS français. Continuer chez Adam’s, c’était la meilleure façon de se faire remarquer. Et, à cette époque, c’était encore dangereux. »

Car, dans ces années d’après guerre, l’ambassade de France demeure active, comme le raconte un ancien membre des services spéciaux auprès de l’attaché militaire: « Nous devions repérer ceux qui arrivaient et établir des rapports sur leur identité, leur comportement et leurs activités. Selon leur ?calibre?, plusieurs devaient faire l’objet d’une élimination physique. C’était la tâche de commandos qui, sur la base de nos renseignements, agissaient de façon autonome. Certains sont même venus spécialement de France. Le travail était difficile, car il ne fallait absolument pas éveiller les soupçons des Argentins, très sourcilleux sur leur souveraineté et leur hospitalité. Beaucoup d’opérations ont ainsi échoué au dernier moment. » Une dizaine de Français ont finalement été « neutralisés » sans bruit et sans éclat: morts naturelles apparentes et surtout accidents divers.

ÉPURATION SECRÈTE

Jean de Vaugelas, l’un des principaux chefs de la Milice, est l’une des plus célèbres victimes de cette épuration secrète. Cité par Laval à l’ordre de la Nation le 8 juillet 1944 (« commandant de la Franc-Garde permanente de la Milice française. Chef milicien de très grande classe »), cet aristocrate, ancien officier d’aviation monarchiste, fut un temps le responsable de l’école des cadres de la Milice à Uriage (Isère), avant de prendre la tête de l’une des unités les plus redoutées de la Franc-Garde (la Milice armée), appelée à intervenir contre les maquis les plus importants. Il dirigea ainsi les 600 miliciens accompagnant les 5 000 Allemands qui détruisirent le maquis des Glières en mars 1944. Le mois suivant, il est chargé des opérations de maintien de l’ordre qui sèmeront la terreur dans la région de Limoges. Puis dans des maquis du Massif central. Lorsque la débâcle se précise, il n’hésite pas, le 10 août 1944, à rejoindre en avion plus de 1 000 miliciens encerclés par le maquis autour de Limoges, pour en organiser l’évacuation, avant de partir avec la division Charlemagne comme chef d’état-major. Prisonnier des Soviétiques en Lituanie, il s’échappe en compagnie du chef milicien Jean Bassompierre, et, avec lui, traverse la Lituanie et l’Allemagne pour rejoindre l’Italie. Là, ils sont trahis. Bassompierre sera arrêté (puis fusillé en France), tandis que Vaugelas s’échappe à nouveau et parvient à gagner Buenos Aires en 1948 avec un passeport de la Croix-Rouge. Son périple s’arrête brusquement en 1954, à Mendoza, région viticole, où il est devenu administrateur des Caves franco-argentines: il est exécuté dans une mise en scène d’accident de voiture.

Cette vindicte cesse au cours des années 50, l’ambassade se bornant encore pendant quelques années à « suggérer » aux entreprises françaises implantées en Argentine de ne pas employer quelques compatriotes en situation irrégulière. Et le consulat, à rappeler de temps en temps à certains membres de la communauté française au lendemain de dîners mondains: « Quand vous invitez le consul, évitez les condamnés à mort! »

Que peut faire un exilé politique en Argentine? Entre ceux qui n’ont jamais pu imaginer changer d’activité et ceux qui ont réussi une reconversion radicale, les nuances sont nombreuses. D’autant plus que d’aucuns ont développé de nouvelles compétences tout en conservant leurs anciennes obsessions (1).

Parmi les premiers s’impose d’abord le célèbre Dewoitine: il a passé sa vie à construire des avions. Pour les Français, les Allemands, les Espagnols. Et les Argentins. L’un des plus grands créateurs français d’avions de l’entre-deux-guerres avec Henry Potez et Marcel Bloch (Dassault), Emile Dewoitine, fondateur des usines aéronautiques de Toulouse (2) et père du D 520 (le dernier chasseur que la France put opposer aux Messerschmitt en 1940), avait mis pendant l’Occupation ses talents au service de la firme allemande Arado, en dirigeant, à Paris, un bureau d’études de 200 employés (dont une partie venait des usines de Toulouse). A la même époque, il travailla également pour l’Espagne et le Japon. Lorsqu’il est recherché, à la Libération, pour « intelligence avec l’ennemi » et « atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat », il se trouve depuis longtemps en Espagne. Et en Argentine quand, le 9 février 1948, la cour de justice de la Seine le condamne par contumace à vingt ans de travaux forcés, à l’indignité nationale à vie et à la confiscation de ses biens. Il n’a pas perdu de temps: dès son arrivée à Buenos Aires, en mai 1946, il s’est attelé à la construction du premier avion à réaction argentin! Le prototype du Pulqui (la Flèche) a volé le 9 août 1947: grâce à lui, l’Argentine péroniste est le cinquième pays au monde à posséder un avion à réaction. Le retentissement est énorme, y compris dans les couloirs du ministère de l’Air à Paris. Mais Dewoitine, qui a créé sa société, Dewoitine Aviacion, et fait venir de Toulouse une dizaine de spécialistes français pour passer à la phase industrielle, sera évincé par l’ingénieur allemand Kurt Tank (ancien ingénieur de la Luftwaffe, créateur du célèbre Focke-Wulf 190), qui, venu en Argentine avec une cinquantaine de techniciens allemands, mettra au point le Pulqui II. Dépité, Emile Dewoitine écrit à son ami Charles Lindbergh pour proposer ses services aux Etats-Unis. Indésirable, il se voit refuser le visa d’entrée. Il vivote en mettant au point un avion de tourisme pour les aéro-clubs argentins (El Boyero), avant de partir, en 1951, offrir ses services en Uruguay. En vain. Il revient alors en Espagne pour répondre à un appel d’offres du ministère de l’Air concernant un avion d’entraînement. Il se fait à nouveau devancer par un avionneur allemand, cette fois-ci le grand Willy Messerschmitt en personne!

RETOUR NÉGOCIÉ

Les lois d’amnistie étant votées, il peut envisager de rentrer en France et négocie son retour: cinq ans après sa condamnation, il est acquitté au cours d’un procès express – le commissaire du gouvernement abandonne l’accusation, et l’on n’entend même pas les témoins. Mais Emile Dewoitine pousse le bouchon un peu loin et agace ses protecteurs en réclamant la restitution de ses bénéfices acquis illicitement sous l’Occupation… Très vite, il offre ses services à son ancien concurrent Marcel Dassault, qui refuse de le recevoir en déclarant que « Dewoitine n’est plus dans le coup »… Il tente ensuite sa chance au Japon. Sans résultat. Vexé, il retourne en Argentine et s’installe en Patagonie pour y créer un élevage de 8 000 moutons et se livrer à son plaisir favori: la pêche. Il se retire dans les années 60 à Montreux, en Suisse, puis à Toulouse, où, à la fin des années 60, les milieux de l’aérospatiale lui accordent sa place d’ancêtre fondateur de l’aéronautique française. Il ne manque plus un Salon de l’aéronautique à Toulouse (il sera même un jour assis à dîner à la droite de Pierre Messmer, ministre des Armées… et ancien des Forces françaises libres). Il est invité à l’un des premiers vols à mach 2 du Concorde (mais refuse de participer à un vol inaugural d’Airbus, par rancune envers son responsable, Henri Ziegler, ancien ingénieur du ministère de l’Air ayant rallié la France libre…). L’année de sa mort, la promotion 1977 de l’école d’apprentissage de Toulouse porte son nom.

Même obstination professionnelle chez l’ex-conseiller d’Etat Jean-Pierre Ingrand. L’obsession du service de l’Etat l’avait conduit sous l’Occupation à administrer envers et contre tout. En exil, il n’eut qu’une passion: l’administration, et il est mort en décembre dernier président de l’Alliance française de Buenos Aires. Représentant du ministère de l’Intérieur à Paris, auprès de Fernand de Brinon, de juillet 1940 à janvier 1944, il avait, à moins de 40 ans, les 48 préfets de la zone nord sous son contrôle. Ce rôle d’intermédiaire entre le ministre de l’Intérieur et l’autorité militaire allemande (avec pouvoir de négociation politique) l’a amené à jouer un rôle essentiel, en août 1941, dans la mise en place de la Section spéciale de Paris, tribunal d’exception qui renia le principe de non-rétroactivité des lois. Prévoyant son sort, il se cache à la Libération. Dénoncé, arrêté, mis en liberté provisoire, il préfère s’échapper en Suisse avant son procès, qui a lieu en 1948 (voir L’Express du 8 août 1991). Puis en Argentine, où, grâce à un ami inspecteur des Finances, il devient administrateur de la Compagnie financière de Santa Fe, avant d’investir dans l’agriculture et la faïence. Tout en se consacrant vite au développement spectaculaire de l’Alliance française: en vingt ans, il en fait le plus beau fleuron au monde, avec plus de 30 000 élèves et une multitude de succursales dans tout le pays. Situation dont ne profitèrent guère les autres exilés: « Il était hors de question d’aller demander de l’aide à Ingrand, cette marionnette de Laval, ce suppôt de l’ordre bourgeois de Vichy! » explique un ancien de « Je suis partout ». Seul rappel du passé pour l’ancien délégué de Pierre Pucheu en zone occupée: lors de la visite du général de Gaulle au cours de son grand périple en Amérique latine, en octobre 1964, Christian Margerie, ambassadeur de France en Argentine, le convoque et lui demande, « pour éviter tout incident », de ne pas participer aux cérémonies et d’aller prendre quelques jours de vacances, par exemple au Brésil… Refus de l’ancien conseiller d’Etat révoqué en 1944: il est chez lui à Buenos Aires, il est chez lui à l’Alliance française. De plus, il a connu de Gaulle à Bordeaux, en juin 1940, lorsque celui-ci était sous-secrétaire d’Etat à la Guerre dans le gouvernement Reynaud, et il est curieux des retrouvailles. Tout se passera bien, le Général se contentant de lui envoyer une apostrophe très gaullienne: « Alors, Ingrand, ça marche, l’Alliance française, à Buenos Aires? »…

L’esprit de continuité peut aller jusqu’à l’absurdité, comme chez Olier Mordrel, ancien chef du Parti national breton (PNB) allié avec les nazis: il passa une partie de ses années d’exil, au fin fond de l’Amérique du Sud, à réinventer une langue pure à partir du breton de la Renaissance pour remplacer le dialecte parlé, qu’il jugeait trop vulgaire… Architecte, cet autonomiste bretonnant présente la particularité d’avoir été condamné à mort deux fois, en mai 1940 et en 1946. En août 1939, il avait envoyé de Berlin un manifeste proclamant la neutralité de la Bretagne et appelant les Bretons à la désertion. Avant de revenir au pays avec les nazis, qui offraient, selon lui, aux « êtres supérieurs » qu’étaient le marin et le paysan bretons la chance historique d’être enfin libérés de l’ « exploitation du capitalisme juif et français ». Ses illusions de parti et d’Etat bretons ne prendront que la forme sanglante, en 1943, d’une Milice régionale (la « Milice Perrot ») et se termineront par l’épisode pathétique du protocole signé le… 15 février 1945, sur le lac de Constance, avec Jacques Doriot (autoproclamé chef de l’Etat français), qui le désigne comme gouverneur en exil d’une Bretagne enfin reconnue en tant qu’Etat associé à la France… Mordrel débarque à Buenos Aires en juin 1948 et rachète, à un ancien nazi, un hôtel à Cordoba. Ses études linguistiques, étendues aux langues celtiques, et quelques correspondances avec des Bretons occupent une grande partie de ses vingt-trois ans d’exil. Il part pour l’Espagne en 1969, en attendant la mesure de grâce qui lui permettra de rentrer en Bretagne en 1971. Après avoir tenté de renouer avec le mouvement régionaliste breton (qui préfère ne pas utiliser la culture phénoménale de cet encombrant ancêtre), il s’occupera un temps d’une crêperie, avant de mourir en 1985.

Quelques-uns en sont réduits à exploiter le seul atout qui reste à un exilé: sa langue. Comme Philippe Darnand, qui donna pendant longtemps des cours de français à l’Alliance française. Fils du chef de la Milice, Joseph Darnand, et lui-même ancien membre de l’Avant-garde (les jeunes de la Milice qui montaient la garde à Sigmaringen, le château sur le Danube où s’était réfugié en 1944 le gouvernement de Pétain), il s’était enfui en Italie, où il travailla comme speaker à Radio-Vatican. Après l’exécution de son père, en 1945, et sur les conseils de Jean de Vaugelas, il se rend avec sa mère en Argentine, à Tucuman, où il enseigne le français. Mal à l’aise dans le pays, il décide, à 28 ans, de passer son bac, entreprend des études et quitte l’Argentine en 1960, avec un diplôme d’ingénieur, pour aller travailler en Allemagne, à Cologne, où il trouve une place chez Hoechst grâce à un ami allemand de son père, ancien secrétaire de l’ambassade du Reich à Paris.

LE CAS LE VIGAN

La langue française fut également le gagne-pain de quelques acteurs. Maurice Rémy, membre du PPF, qui joua un rôle important dans le film de propagande « Forces occultes » et animait des sketchs politiques dans l’émission « Au rythme du temps » sur Radio-Paris, trouva du travail dans les émissions en langue française de « La Voix de l’Argentine ». En compagnie d’une autre ancienne de Radio-Paris, Lola Robert. Mais le cas le plus célèbre – et le plus paradoxal – reste celui de Robert Le Vigan. Car le ténébreux interprète du « Quai des Brumes » et de « Goupi Mains rouges », recyclé dans les émissions de propagande de Radio-Paris et auteur d’un délire antisémite digne de Céline (dont il était l’ami et qu’il accompagnera à Sigmaringen), n’a pas fui l’épuration: il ne s’est exilé qu’après avoir été condamné, en 1946, à dix ans de travaux forcés. Libéré en 1949, et se heurtant au boycottage du cinéma français, il part tenter sa chance en Espagne, puis en Angleterre. En vain. En Argentine, deux essais tourneront court, et il doit vite se contenter de donner des cours de français et de diction, à Tandil, à quelques centaines de kilomètres de Buenos Aires, où il traîne péniblement sa silhouette, avec sa cape et son épée, ruminant sa hantise de la victoire prochaine du communisme. Confronté à de coûteux problèmes de santé, il survivra difficilement jusqu’à sa mort, en 1972, grâce à l’aide financière de quelques bienfaiteurs parisiens: Pierre Fresnay, Madeleine Renaud, Jean-Louis Barrault, Maurice Ronet, Fernand Ledoux et Arletty (qui lui rendit visite en 1966).

Les véritables reconversions sont plus ou moins spectaculaires. Beaucoup d’anciens responsables de la Milice ont simplement troqué un statut de notable de province en France contre celui de notable de la Pampa. C’est le cas de X., ancien ingénieur de Centrale, industriel, responsable de la Milice dans le Sud-Ouest, qui réussit à organiser la fuite de la Milice de Toulouse par la vallée du Rhône en août 1944, avant de diriger le bataillon des 500 derniers « soldats » de l’Etat français à Sigmaringen. Arrivé en Argentine via l’Italie, il rentra en France dans les années 60. Ou du Dr Y., ancien chef de la Milice de Limoges, mêlé au pillage et au massacre de Magnac-Laval (Haute-Vienne) le 8 juillet 1944, mais surtout célèbre grâce à sa femme, milicienne exubérante et surexcitée, qui participait aux opérations sanglantes des francs-gardes et aimait à répéter publiquement qu’il lui fallait un « sac à main en peau de maquisard ».

Parmi les reconversions plus originales, celle d’Henri Queyrat mérite d’être citée. Délégué du PPF de Jacques Doriot pour toute l’Afrique du Nord, il retourne clandestinement en Tunisie après le débarquement des Alliés, en novembre 1942, pour former, en 1943, un réseau d’espionnage allemand. Nommé ensuite secrétaire fédéral du PPF de la Seine, il crée, en mars 1944, les « Groupes d’action du PPF », formés par les Allemands à Taverny (Val-d’Oise), spécialistes de la chasse aux résistants, aux réfractaires au STO, aux juifs, et réputés pour leurs chantages et leurs pillages. Engagé dans la Waffen SS en mai 1944, il sera condamné à mort par contumace. En Argentine, il effectue divers travaux pour les éditions Larousse, rédige le journal de la Chambre de commerce franco-argentine et travaille plusieurs années comme journaliste à l’AFP (où il sera remplacé par Jean Dumazeau, un ancien milicien du Nord), avant de se consacrer à sa nouvelle passion: l’oenologie. Devenu l’un des meilleurs spécialistes des vins argentins, il sera, jusqu’à sa mort, récente, le conseiller très écouté de plusieurs caves de Mendoza (qui sont encore loin d’atteindre la qualité de la production chilienne). Et l’auteur, chez Hachette, de très bons livres de référence sur les vins (et les fromages) argentins.

La confrérie tumultueuse des anciens de « L’Action française », de « Je suis partout » ou du « Cri du peuple » (le quotidien du PPF de Doriot) arriva en force à la fin des années 40. Il y avait notamment là Pierre Daye, ancien grand reporter du « Soir » de Bruxelles et correspondant belge de « Je suis partout » depuis 1932, tout en étant député et président du groupe rexiste au Parlement de Bruxelles. Condamné à mort en 1946, il fut professeur de littérature française à l’université de La Plata, avant de mourir en 1960.

Georges Guilbaud, ancien marxiste ayant intégré le PPF, dont il devint le responsable en Tunisie, dirigeait le quotidien « Tunis-Journal », organe du collaborationnisme en Tunisie. Venu en France après le débarquement allié de 1942, il est chargé par Pierre Laval d’organiser la Milice en zone nord. Il tentera d’en faire un organe unique, en essayant en vain d’y faire fusionner toutes les organisations collaborationnistes. Au début très actif, à Buenos Aires, au sein du groupe des nostalgiques de la brasserie Adam’s, il se lança, au milieu des années 50, dans les activités financières, où il excellait, en travaillant avec la maison de change Piano. Gagnant beaucoup d’argent, il devint administrateur d’un célèbre palace de Buenos Aires, avant de partir, dans les années 60, exercer ses talents financiers en Suisse.

Contrairement aux Flamands et aux Allemands, rares furent les Français qui se passionnèrent pour la politique locale. Mais il y eut quelques exceptions sérieuses. Comme W., ancien militant de l’Action française rallié au PPF et journaliste hyperactif (chroniqueur à « Je suis partout », au « Cri du peuple » et l’un des chroniqueurs du « Radio-Journal » de Radio-Paris). Violemment antivichyste (il sera interné trois mois sur ordre de Laval, avant d’être libéré sur pression allemande), il termine la guerre en s’enrôlant dans la brigade SS Wallonie, dont la croisade s’arrête en 1945 devant Cracovie. Parvenu en Suisse, il y attend de connaître sa condamnation par contumace à perpétuité, en 1948, et part pour Buenos Aires, où il débarque avec 50 francs en poche. Il se plonge alors dans les subtilités du péronisme et fait la connaissance de Victor Paz Estenssoro, chef du Mouvement national révolutionnaire (MNR), parti de la gauche nationaliste bolivienne en exil à Buenos Aires, dont il devient un actif conseiller politique. Lorsque Victor Paz Estenssoro conquiert la présidence de la République de Bolivie, en 1952, W. le suit au palais Quemado, où il occupe pendant trois ans les fonctions de conseiller officiel, avant que sa femme, qui supporte mal La Paz, le contraigne à revenir à Buenos Aires. Il entame alors une carrière alimentaire de publicitaire, tout en restant passionné par la politique argentine. Dans les années 70, il participe à « Segunda Repùblica », revue de Marcello Sorrendo, vieux nationaliste maurrassien et l’un des pères spirituels des Montoneros, péronistes dissidents d’extrême gauche passés à la guérilla.

Même passion politique chez Jacques de Mahieu, professeur de philosophie, ancien de l’Action française, où il fut le théoricien du maurrassisme social et du corporatisme. Ayant terminé la guerre dans les rangs de la division Charlemagne, il arrive en 1946 avec sa famille à Buenos Aires. Devenu professeur polyvalent (économie, français, ethnographie) à l’université de Cuyo et directeur de l’Institut d’études et de recherche du marché, il publie de nombreux ouvrages sur le syndicalisme, les problèmes sociaux et le corporatisme. Il eut son heure de gloire pendant la période des gouvernements militaires à partir de 1966, quand il devint le maître à penser sur les questions sociale et syndicale auprès des jeunes profs de droit et de sciences politiques proches des militaires. Il est resté très lié avec un autre intellectuel, William Gueydan de Roussel, philosophe germaniste engagé dans la lutte contre la maçonnerie, cofondateur du Cercle aryen de Paris, avec Paul Chack, et président du Cercle d’études judéo-maçonniques, dont le principal objectif était de prouver l’origine juive de la maçonnerie. Etabli à El Bolson, Gueydan de Roussel mit son érudition bibliographique au service de la Bibliothèque nationale de Buenos Aires.

LES VIKINGS, DIEUX INCAS

Mais Jacques de Mahieu est également connu en France comme auteur à succès de la collection Les énigmes de l’Univers, chez Robert Laffont. Dans « L’Agonie du dieu Soleil », publié en 1974, il prétend révéler que l’Amérique du Sud a été découverte par des Vikings. Il avait monté à la fin des années 60 des expéditions d’ethnographie au Paraguay et retrouvé, à la frontière du Brésil, des fresques représentant de grands gaillards blonds, pour lui incontestablement « de race aryenne ». Il échafauda une théorie selon laquelle le continent aurait été découvert au xe siècle par les Vikings, qui auraient civilisé les Indiens et fondé l’Empire inca, dont ils devinrent les « dieux blancs ». Les actuels Guayakis seraient, d’après cette théorie, leurs derniers représentants, malheureusement « dégénérés par

métissage ».

Quelques exilés n’ont pas connu les bonheurs d’une seconde vie parce qu’ils n’ont pas supporté l’Argentine et sont rentrés le plus tôt possible. Il y eut deux vagues de retours: dans les années 50, après les lois d’amnistie de 1951 et de 1953, et au milieu des années 70, grâce à la prescription des poursuites. Ainsi Henri Lèbre, qui fut à la fois directeur du « Cri du peuple » et l’un des dirigeants de « Je suis partout », journaux dans lesquels il s’insurgeait contre la mollesse de la politique antijuive de Vichy (statut des juifs et aryanisation), qu’il qualifiait de « solution dérisoire ». Arrivé en Argentine en 1947 avec un passeport de la Croix-Rouge, après sa condamnation à mort par contumace en France, il ne s’adapte pas au pays et repart très vite pour le Portugal, où il attend la loi d’amnistie qui lui permet de rentrer en France dans les années 50, afin de reprendre du service à « Rivarol » et à « Spectacle du monde ». A la même période quitte également Buenos Aires Pierre Villette, cofondateur de « Je suis partout », membre du PPF et journaliste au « Cri du peuple », qui avait terminé sa carrière de journaliste engagé à Radio-Patrie, à Sigmaringen, et au « Petit Parisien », publié à Constance, à la fin de 1944, avant d’être condamné à mort par contumace en 1947. Marc Augier, journaliste à l’hebdomadaire « La Gerbe », ancien de la LVF et de la division Charlemagne, réfugié à Mendoza, aidera un temps l’armée argentine à organiser des expériences de résistance au froid en zone montagneuse, avant de rentrer en France, dans les années 50, pour entamer une seconde carrière d’écrivain et de chroniqueur dans la presse d’extrême droite, sous le pseudonyme de Saint-Loup. C’est plus tard, au tout début des années 70, qu’Henri Janières regagne la France. Ancien de « Paris-Soir » et de « Notre combat », organe oeuvrant pour « une France socialiste dans l’Europe nouvelle », ce dandy obsessionnel occupa à Buenos Aires la place enviée de correspondant du « Monde » de 1961 à 1969, tout en étant très proche de l’ambassade de Syrie. Autre personnage particulièrement affecté par le mal du pays: Simon Sabiani, le célèbre maire PPF de Marseille et véritable empereur de l’agglomération, mise en coupe réglée pendant l’Occupation au profit de ses hommes de main du clan corse de Simon Mema et de la pègre de Carbone et Spirito. Condamné à mort par contumace et réfugié à Rome, ce personnage célèbre pour son goût du luxe et de l’opulence s’est retrouvé dans une petite pension de famille de Buenos Aires, vivotant en travaillant dans une agence immobilière. Ne supportant plus de vivre si loin de sa vieille mère corse, il vint s’installer en 1952 à Barcelone, où les fervents sabianistes venaient le voir en car de Marseille et d’où il fit quelques voyages clandestins en Corse pour voir sa mère. A sa mort, en 1956, des centaines de personnes assistèrent à son enterrement dans le petit cimetière de Casamaccioli, près de Corte.

Les passions sont retombées depuis longtemps chez la plupart des exilés restés sur place et encore vivants. « De temps en temps, on a eu des bouffées de chaleur, comme les femmes de 40 ans, précise un ancien de ?Je suis partout?, au moment de la guerre d’Algérie, quand on a paniqué l’ambassade de France en lui faisant croire que s’était créé un ?Comité Algérie française? à Buenos Aires, puis en Mai 68, quand les jeunes de Paris ont failli foutre en l’air de Gaulle. Mais c’est tout. Et c’est bien fini. » Aujourd’hui, la plupart viennent régulièrement passer des vacances en France. « Les Français vivent bien, c’est un beau pays, bien tenu, et vous avez un bon président de la République, qui vous a enfin débarrassés des communistes », conclut un ancien SS français.

(1) Nous avons préservé l’anonymat des personnes encore vivantes que nous avons mentionnées.

(2) Voir Emmanuel Chadeau, « Histoire de l’industrie aéronautique en France, 1900-1950 », Fayard.

PHOTOS:

ÉMILE DEWOITINE

Le célèbre avionneur au service des Allemands, puis de Peron (ci-dessus, dans son bureau à Buenos Aires); rentrera à Toulouse dans les années 60 (ci-contre, chez lui, en 1977, l’année de sa mort).

JEAN-PIERRE INGRAND

Délégué du ministre de l’Intérieur à Paris (ci-dessus, dans son bureau), auprès des autorités allemandes, entre 1940 et 1944. Meurt à Buenos Aires en décembre dernier, où il dirigeait l’Alliance française (ci-contre).

ROBERT LE VIGAN

L’interprète de « Quai des Brumes » (ci-contre, avant la guerre) sera condamné

(ci-dessous, pendant son procès) pour avoir animé les émissions de propagande de Radio-Paris. Vivotera de leçons de français en Argentine (ci-dessus), où il mourra en 1972.

HENRI QUEYRAT

Responsable au PPF de Doriot (ci-dessus, tenant une réunion salle Wagram en avril 1944), engagé dans la Waffen SS, condamné à mort, il s’enfuit en Argentine. Après quelques années à l’AFP, il se lance dans l’oenologie à Mendoza (en haut) et publie des livres de référence sur le vin (ci-contre).

PIERRE DAYE

Journaliste à « Je suis partout », député belge d’extrême droite (au centre sur la photo, en 1944). Condamné à mort, il enseignera la littérature française à l’université de La Plata. Meurt en 1960.

GEORGES GUILBAUD

Chargé par Laval d’organiser la Milice en zone nord (ici, lors d’une conférence au théâtre des Ambassadeurs, à Paris, en mars 1944), il fera ensuite fortune en Argentine, puis en Suisse.

JACQUES DE MAHIEU

Intellectuel de l’Action française, théoricien du corporatisme social, il débarque en 1946 à Buenos Aires. Professeur d’université, influent auprès des militaires argentins en matière sociale, il se rend célèbre en Europe pour ses thèses ethnologiques, publiées chez Laffont (ci-contre): selon lui, l’Amérique du Sud aurait été découverte par les Vikings, fondateurs de l’Empire inca.

HENRI LÈBRE

Directeur du « Cri du peuple », le journal de Doriot, condamné à mort. Court séjour en Argentine, puis amnistie et retour à Paris dans les années 50. Il rejoint les rédactions de « Rivarol » et de « Spectacle du monde ».

SIMON SABIANI

Maire de Marseille, qu’il se partagea avec les célèbres gangsters Carbone (à sa gauche, ci-dessus) et Spirito; proche de Doriot (ci-contre, à la droite du chef du PPF). Condamné à mort, s’installa à Barcelone après un exil malheureux en Argentine.

Background Report on Krunoslav Draganovic

The Pavelic papers

This is a follow-up report to Counter-Intelligence Corps Agent Robert Clayton Mudd’s earlier report in which he indicated that the Monastery of San Girolamo was acting as a haven for Ustase fugitives, and that he had run an agent into the network smuggling accused Ustase war criminals out of Croatia. Mudd appeared earlier to be suspicious that Ustase agents had infiltrated legitimate networks to help refugees, rather than that these networks themselves had been set up in order to smuggle out hunted Ustase officials. His conclusions in Paragraph 15 remain unchallenged to this day. This is an improved copy of the document originally published here, found among the CIA papers on Krunoslav Draganovic.

HEADQUARTERS

COUNTER INTELLIGENCE CORPS

ALLIED FORCES HEADQUARTERS

APO 512

February 12, 1947

SUMMARY OF INFORMATION

SUBJECT: Father Krunoslav DRAGANOVIC,

RE: PAST Background and PRESENT Activity.

1. Fr. Krunoslav DRAGANOVIC is a Croatian Catholic priest in the Monastery of San Geronimo [sic – here and below], 132 Via Tomacelli. ROME. This man has for some time now been associated with Ustashi elements in Italy and, while in many instances it is hard to distinguish the activity of the Church from the activity of one man whose personal convictions might lie along a certain line, it is fairly evident in the case of Fr. DRAGANOVIC that his sponsorship of the Ustashi cause stems from a deep-rooted conviction that the ideas espoused by this arch-nationalist organization, half logical, half lunatic, are basically sound concepts.

2. Fr. DRAGANOVIC is a native of TRAVNIK where he finished his elementary and secondary school. Shortly after this he went to SARAJEVO to study theology and philosophy. Here he fell under the personal magnetism of Dr. Ivan SARIC, archbishop of SARAJEVO, whose particular interest he soon became and after graduation he was sent to ROME under the auspices of Dr. SARIC who had some good connections in the Vatican.

3. Having completed his studies at ROME where he majored in ethnology and Balkan affairs he returned to SARAJEVO where he held various political offices, all of a minor importance. Shortly after the formation of the Independent State of Croatia under Ante PAVELIC in April 1941 DRAGANOVIC became one of the leading figures in the Bureau of Colonization. In the middle of 1943 however he became involved in a disagreement over the relative merits of the younger Eugen KVATERNIK, whom he called a « madman and a lunatic », and he left Croatia and returned to ROME.

4. According to a reliable informant it is believed that this departure of DRAGANOVIC from Croatia to Italy is a classic example of « kicking a man upstairs » inasmuch as it is fairly well established that the leaders of the Independent State of Croatia expected the prelate, through his good connections in the Vatican, to be instrumental in working out the orientation of Croatia towards the West rather than the East. These same leaders, being occidental-minded and knowing full well that Croatia’s militant Catholocism [sic] made her a « natural » in such a deal, relied on DRAGANOVIC to assist them in their aims. He was eminently unsuccessful.

5. DRAGANOVIC has a brother still in ZAGREB who is a member of the Napredak Co., who recently was ignored in the elections to determine the members of the Board of Directors. He has another brother, whereabouts unknown, who was a member of the Croatian Embassy in BERLIN. He is in touch with his brother, ZVONKO, in ZAGREB but not with KRESO, whsoe [sic] whereabouts are not definetly [sic] known although he has been reported in the British zone in Germany.

6. About a year ago DRAGANOVIC is alleged in some circles to have somewhat denounced his now ardent pro-Ustashi sentiments during a conference of Croats in ROME. Having been accused by a certain Dr. KLJAKOVIC (apparently a member of the Croat Peasant Party) of being in very close contact with only Ustashi emogrees [sic] DRAGANOVIC is said to have replied that if working for an independent Croatia meant being an Ustasha then « I am an Ustasha ». « However, » he added, « I disassociate myself from all other attributes of the Ustashi. »

7. With this aim in view DRAGANOVIC is working with the Ustashi and also with some leftovers of the Croat Peasant Party in exile. When Milan PRIBANIC, erstwhile Commandant of the Guard of Vlado MACEK, appeared in ROME, he immediately contacted him and thus made his aims and purposes clear to MACEK.

8. Many of the more prominent Ustashi war criminals and Quislings are living in ROME illegally, many of them under false names. Their cells are still maintained, their papers still published, and their intelligence agencies still in operation. All this activity seems to stem from the Vatican, through the Monastary of San Geronimo to Fermo, the chief Croat Camp in Italy. Chief among the intelligence operatives in the Monastery of San Geronimo appear to be Dr. DRAGANOVIC and Monsignor MADJARAC.

9. The main messenger between the Vatican, the Monastary and Fermo is an Ustasha student by the name of BRISKI. BRISKI was interned in the 209 POW Camp at AFRAGOLA and was with the Ustashi Cabinet members when their escape was organized from there. His physical description is as follows: 25 years old, medium height, black hair, seen mostly without a hat. Has very bad teeth in upper and lower jaw. Appears to be very wise.

10. This Agent managed to run a counter-operative into this Monastary to find out if possible if the internal setup of the place was as had been alleged, namely that it was honeycombed with cells of Ustashi operatives. This was established and several things more but operations were stopped abruptly when it became too dangerous for the counter-intelligence agent in the Monastary. The following facts were ascertained:

11. In order to enter this Monastary one must submit to a personal search for weapons and identification documents, must answer questions as to where he is from, who he is, whom he knows, what is purpose is in the visit, and how he heard about the fact that there were Croats in the Monastary. All doors from one room to another are locked and those that are not have an armed guard in front of them and a pass-word is necessary to go from one room to another. The whole area is guarded by armed Ustashi youths in civilian clothes and the Ustashi salute is exchanged continually.

12. It was further established that the following prominent ex-Ustashi Ministers are either living in the monastery, or living in the Vatican and attending meetings several times a week at San Girolamo:

1. Ivan DEVCIC, Lt. Colonel

2. VRANCIC, Dr. Vjekoslav, Deputy Minister of Foreign Affairs.

3. TOTH, Dr. Dragutin, Minister of Croat State Treasury.

4. SUSIC, Lovro, Minister of Corporations in Croatian Quisling Government

5. STARCEVIC, Dr. Mile, Croat Minister of Education.

6. RUPCIC, General Dragutin, General of Ustashi Air Force.

7. PERIC, Djordje, Serbian Minster of Propaganda under NEDIC.

8. PECNIKAR, Vilko – Ustasha General and CO of Ustashi Gendarmerie

9. MARKOVIC, Josip, Minister of Transport in Pavelic Government.

10. KREN, Vladimir – Commander-in-Chief of the Croat Air Force.

13. While this « Croat », directed by this Agent to try to penetrate the Croat intelligence network, was inside the Monastary he personally heard a conversation ensue between this Monsignor MADJERAC and Dr. SUSIC, who, at the time of the conversation, was in the Vatican library. He also heard a conversation between two of the Ustashi in the monastary which established the fact that a brother of Dr. PERIC runs a hotel in ROME, and that often this hotel is visited at night for the purpose of holding important Ustahi [sic] conferences. The money for the purchase of the hotel was given this man by his brother, Dr. PERIC.

14. It was further established that these Croats travel back and forth from the Vatican several times a week in a car with a chauffeur whose license plate bears the two initials CD, « Corpo Diplomatico ». It issues forth from the Vatican and discharges its passengers inside the Monastary of San Geronimo. Subject to diplomatic immunity it is impossible to stop the car and discover who are its passengers.

15. DRAGANOVIC’s sponsorship of these Croat Qusilings definetly [sic] links him up with the plan of the Vatican to shield these ex-Ustashi nationalists until such time as they are able to procure for them the proper documents to enable them to go to South America. The Vatican, undoubtedly banking on the strong anti-Communist feelings of these men, is endeavoring to infiltrate them into South America in any way possible to counteract the spread of Red doctrine. It has been reliably reported, for example that Dr. VRANCIC has already gone to South America and that Ante PAVELIC and General KREN are scheduled for an early departure to South America through Spain. All these operations are said to have been negotiated by DRAGANOVIC because of his influence in the Vatican.

16. This agent will continue to make an effort to keep abreast of the situation in this area and also to advise G-2 of any new plans or changes of operations on the part of DRAGANOVIC and his satellites.

[signed]

ROBERT CLAYTON MUDD,

SPECIAL AGENT, CIC DISTRIBUTION:

AC of S, G-2, AFHQ (2)

Chief, CIC, AFHQ (1)

File (1)

:: filing information ::

Title: Background Report on Krunoslav Draganovic

Source: CIA, declassified September 12, 1983

Date: February 12, 1947 Added: March 15, 2003

Voir enfin:

Peron’s Nazi Ties

How the European fascist sensibility found new roots and new life in the South Atlantic region

Mark Falcoff

Time

November 9, 1998

Since the 1930s, the political culture of Argentina has been afflicted by periodic spasms of covert violence, secrecy and denial. As in the case of Vichy France, memory can be an inconvenience or an embarrassment; faced with incidents that require explanation, too many Argentines instinctively reach for the words borron y cuenta nueva (Let’s forget it all and start over with a clean slate). As a result, even today nobody knows exactly how many people disappeared during the « dirty war » against subversion (1976-83), nor the number of victims in the left-wing guerrilla violence that preceded it. The 1992 and 1994 bombings of the Israeli embassy in Buenos Aires and the city’s Jewish center, causing the loss of 115 lives, remain unsolved. Even events far more remote have had to wait decades for elucidation.

One of the most important of those events is Argentina’s vaunted neutrality in World War II, a posture it maintained long after other American republics broke off relations with the Axis. Only since the country’s return to democracy in 1983 has the real story of Argentina’s covert alignment with the Axis finally begun to emerge. A commission to investigate the activities of Nazism in Argentina, appointed by President Carlos Menem and assisted by an international team of scholars, started work last July. A preliminary report is expected in mid-November, when the scholars meet in Buenos Aires, and a final report a year later.

At issue here is not merely a matter of diplomatic taste. Throughout the war, Argentina was regarded by U.S. diplomats and the U.S. media as the regional headquarters for Nazi espionage. After 1945, reports kept cropping up in the U.S. press that Argentina was the final redoubt of important Nazis and their European collaborators, a point dramatically brought home as late as 1960 by the capture and forcible removal to Israeli justice of Adolf Eichmann, principal director of the « final solution. »

Over the years, these allegations seemed at least superficially credible in light of the emergence in 1946 of Colonel Juan Peron as the leader of a defiant, nationalist Argentina. Though in practice the Peron regime resembled hardly at all the defeated European fascist dictatorships, Peron made no secret of his sympathy for the defeated Axis powers.

Argentina’s and Peron’s apparent preference for the Axis, and particularly for Nazi Germany, has muddied the country’s relations with the Anglo-Saxon powers and poisoned its domestic politics. Anti-Peronists have often used the term Nazi (or Pero-Nazi) a bit too freely in attempting to discredit their opponents–not just Peron but also the administration of President Ramon S. Castillo (1940-43), who preceded him. Indeed, Argentina’s 1946 elections, the first of three in which Peron was elected to the presidency, were, as much as anything else, a plebiscite on the credibility of such accusations. In recent years, the Canadian scholar Ronald Newton, in his masterly The « Nazi Menace » in Argentina, 1931-47 (Stanford), has suggested that much of the Nazi-fascist menace in Argentina was an invention of British intelligence, fearful of the loss of historic markets in that country to the U.S. after the war, and therefore desirous of straining relations between Buenos Aires and Washington.

Far in advance of the final report of President Menem’s commission (of which Newton is a member), that theory has now been refuted in an extraordinary piece of investigative reporting–also a major breakthrough in historical scholarship–by Uki Goni, whose Peron and the Germans has just been published in Buenos Aires. In this book the author, who also works as a local correspondent for TIME, establishes that, for all the hyperbole, Washington’s darkest suspicions were if anything greatly understated. For one thing, Goni demonstrates that the Castillo administration, and particularly the Argentine Foreign Ministry, was honeycombed with Nazi sympathizers as early as 1942–so much so that it is difficult to see why any of the most anxious partisans of neutrality, such as found in the secret lodges of the Argentine army, felt the need to overthrow the government at all!

Voir par ailleurs:

Qui étaient les «Monuments Men»?

Métro

11/03/2014

CINEMA – Le film «Monuments Men» et le livre qui l’a inspiré racontent l’histoire d’une poignée de soldats britanniques et américains chargés de sauver le patrimoine culturel…

Basée sur des faits réels. C’est une histoire passionnante et méconnue que relate le film Monuments Men, tiré du livre éponyme de Robert M. Edsel. Après s’être installé à Florence, cet homme d’affaires texan explique à 20 Minutes qu’il avait commencé à s’intéresser à l’art: «Je me suis demandé comment, lors de la Seconde Guerre mondiale, qui a causé la mort de 65 millions de personnes, tant d’œuvres d’art avaient pu survivre et surtout qui les avaient sauvées.» Soit, en Europe, lors de la fin officielle des hostilités le 8 mai 1945, une soixantaine de personnes, engagés dans la section des Monuments, des Beaux-Arts et des Archives.

De la préservation à l’enquête

En 1944, les Monuments Men débarquent en France avec le souci de préserver le patrimoine, «d’éviter que les Etats-Unis et la Grande-Bretagne détruisent les musées et les œuvres d’art, en bombardant les sites culturels». Au fur et à mesure, les Monuments Men découvrent que les œuvres d’art, issues d’institutions ou propriétés de particuliers, ont été dérobées en masse par les Nazis. Hitler avait pour projet de bâtir son «Führermuseum», un musée gigantesque, à Linz, en Autriche. «En progressant vers Paris, ils se sont aperçus de l’extension du pillage. De leur mission de préservation du patrimoine, ils sont passés, comme des détectives, à la recherche des œuvres d’art.» Parmi celles-ci, L’Autel de Gand, chef-d’œuvre de la peinture des primitifs flamands ou encore La Madone de Bruges, sculptée par Michel-Ange.

Mettre la main sur ces trésors

Alors que la date de la fin de la guerre reste encore inconnue, s’engage une course contre la montre pour mettre la main sur ces trésors, acheminés vers l’Est, comme vers l’extravagant château de Neuschwanstein, en Bavière, ou vers les mines de sel de Altaussee (Autriche) ou de Heilbronn (en Allemagne). Dans cette dernière a travaillé Harry Ettlinger, 88 ans, qui avait fui l’Allemagne pour les Etats-Unis, avant de s’engager dans l’armée. L’ex-Monuments Men se rappelle pour 20 Minutes: «A 18 ans, j’étais le boss juif, rigole-t-il. Je dirigeais les mineurs, je localisais les boîtes, identifiables grâce au nom des institutions marquées dessus, et vérifiais leurs contenus. Par les ascenseurs, on les emmenait aux camions. C’est là qu’on a retrouvé les caisses contenant les vitraux de la cathédrale de Strasbourg»… Aujourd’hui encore, des œuvres dérobées par les Nazis réapparaissent, comme celles découvertes à Munich en 2012. «Mais des centaines de milliers manquent toujours», déplore Robert M. Edsel.

Une reconnaissance pour Rose Valland

L’essayiste conserve l’amertume d’une critique en France au sujet de son livre, intitulée «Pillages et approximations». Il espère toutefois que le rôle de Rose Valland, attachée de conservation au musée du Jeu de Paume pendant l’Occupation, qui a aidé les Monuments Men, sera davantage considéré. «Elle n’a jamais eu en France la reconnaissance qu’elle méritait.» L’héritage des Monuments Men a permis selon lui de largement influencer la rédaction par l’Unesco de «la Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé» datant de 1954. Mais leur idéal semble s’être tari. Il déplore que les Américains aient oublié de s’en inspirer en bombardant des sites historiques, pendant la Guerre d’Irak en 2003.

« Monuments Men » : Cate Blanchett incarne une résistante française oubliée

Stéphanie Trouiilard

France 24

05/03/2014

En écrivant sur Rose Valland, une résistante qui permit de sauver des œuvres d’arts volées par les nazis, la sénatrice Corinne Bouchoux était loin d’imaginer son livre porté à l’écran. C’est pourtant chose faite avec le film « Monuments Men ».

« La boucle est bouclée ! Mission accomplie ! Je suis plutôt contente. » Corinne Bouchoux a du mal à cacher son excitation. Il y a quelques jours, la sénatrice Europe Écologie-Les Verts (EELV) a été personnellement invitée à assister à l’avant-première parisienne du dernier film de Georges Clooney « Monuments Men ». Très émue, l’élue du Maine et Loire a pu voir sur grand écran le fruit d’un long travail. Dans cette superproduction, l’actrice australienne Cate Blanchett redonne vie à la résistante Rose Valland, à laquelle Corinne Bouchoux a consacré une biographie. « Si on m’avait dit un jour que mon livre, qui n’a intéressé personne pendant des années et que j’ai fait dans une solitude totale, pourrait inspirer un film, je ne l’aurais pas cru ! ».

Un coup de fil d’Hollywood

En 2006, en effet, son ouvrage « Rose Valland, la résistance au musée » sort dans une relative discrétion. Le livre est imprimé à seulement 2 000 exemplaires. « Après des années de recherches, j’étais très contente de l’avoir publié. Mais ensuite, j’ai estimé qu’une page de ma vie s’était tournée et je ne m’en suis plus occupée. On me sollicitait juste pour des conférences », raconte Corinne Bouchoux, interviewée par FRANCE 24 dans son petit bureau du Sénat . « Mais un jour, il y a un peu plus de cinq ans, un monsieur avec un fort accent américain m’a appelée pour me dire qu’il voulait racheter les droits de mon livre pour en faire un film à Hollywood. »

Incrédule, la sénatrice croit d’abord à une plaisanterie. Mais au bout du fil, son interlocuteur est des plus sérieux : Robert Edsel est un ancien homme d’affaires texan reconverti dans l’histoire de l’art. Passionné par la Seconde Guerre mondiale, ce riche américain a regroupé dans un livre, aujourd’hui porté à l’écran par Georges Clooney, les mémoires des Monuments Men, ces soldats alliés chargés de récupérer les œuvres d’art volées par les nazis. « Il s’est aperçu qu’en France, il y avait eu très peu de recherches sur ce sujet. Il a juste trouvé mon livre sur Rose Valland, précise Corinne Bouchoux. Il a fait un chèque de 7 500 euros à mon éditeur pour racheter les droits. Il l’a fait traduire et il le vend même aujourd’hui sur son site comme un produit dérivé du film ».

Rose Valland, une résistante de l’ombre

Il faut dire que le parcours de Rose Valland est indissociable de celui des Monuments Men. Tombée dans l’oubli, cette femme originaire d’une famille modeste de l’Isère a pourtant joué un rôle essentiel auprès de ces soldats pour sauver les chefs d’œuvre spoliés durant le conflit. Attachée de conservation au musée du Jeu de Paume, à l’époque le centre de triage des tableaux et des sculptures promis au musée d’Hitler à Linz en Autriche ou encore à la collection personnelle d’Hermann Goering, cette spécialiste de l’histoire de l’art a été un témoin privilégié du pillage nazi. « Pendant l’occupation, elle a été une véritable espionne, notant tous les tableaux qui partaient, avec leur destination. Elle a informé la résistance française et ensuite les Américains afin qu’ils évitent de bombarder certaines caches. Si son cahier n’était pas arrivé entre de bonnes mains, tout cela aurait été perdu », insiste la sénatrice.

Le long-métrage « Monuments Men » se concentre précisément sur ce travail de l’ombre et sur les risques encourus par Rose Valland. Son personnage, joué par Cate Blanchett sous le nom de Claire Simone, fournit de précieux renseignements au soldat américain James Granger (incarné par Matt Damon) pour l’aider à identifier les endroits où les nazis stockaient les œuvres réquisitionnées.

Le film tait toutefois une large partie de sa vie. « Elle aurait pu avoir un rôle plus consistant, car le film s’arrête en 1945 alors que Rose Valland est restée en Allemagne jusqu’en 1954 », regrette Corinne Bouchoux. Au lendemain de la capitulation allemande, poursuit la sénatrice, la résistante a en effet pris une décision courageuse. Devenue capitaine de l’armée française, elle parcourt pendant de longues années – et en uniforme – les ruines du Troisième Reich pour retrouver les œuvres d’arts emportées par les Allemands. « Grâce à elle, 70 000 œuvres sont revenues en France, où sont enregistrées 100 000 réclamations. À l’époque, elle était aussi une négociatrice souterraine pour les diplomates, une sorte de sherpa lorsqu’étaient entamés des pourparlers. Elle s’est ainsi déplacée une quarantaine de fois en zone soviétique pour voir ce que les Russes avaient récupérés. Ce n’était pas facile car ils considéraient qu’ils pouvaient bien tout garder étant donné tout ce qu’on leur avait pris. Elle a ainsi joué un rôle crucial pendant et après la guerre. »

Devenue conservatrice des musées nationaux en 1952 et décorée des titres les plus prestigieux (Chevalier de la Légion d’honneur, Médaille de la Résistance, Médaille de la Liberté en 1948, et Officier de l’Ordre du Mérite de la République fédérale d’Allemagne), Rose Valland a ensuite passé le reste de sa vie dans l’anonymat le plus total. « On l’a mise dans un placard quand elle est rentrée en France. On lui a confié une nouvelle mission, celle de défendre le patrimoine français en cas de troisième guerre mondiale. Elle était la madame sécurité des musées français », poursuit Corinne Bouchoux. « Mais elle n’a jamais accepté qu’on lui dise que c’était terminé. Elle était obsédée par le sujet. Elle a travaillé jusqu’à sa mort [En 1980, NDLR], elle voulait retrouver un propriétaire pour chaque tableau volé par les nazis et renouer le fil de l’histoire ».

Pour sa biographe, Rose Valland est finalement tombée dans l’oubli pour plusieurs raisons : « D’abord, c’était une femme, et dans ce pays, on préfère les héros masculins. Elle était aussi issue d’un milieu modeste, loin du sérail culturel. Et elle était également homosexuelle. Elle a vécu avec la même compagne, mais pendant longtemps on l’a prise pour une vieille fille acariâtre, alors qu’elle ne l’était pas du tout. Elle était juste discrète. Enfin, elle était aussi au courant d’un certain nombre de scandales et d’abus. Personne n’avait intérêt à ce qu’elle les révèle ».

Soixante-dix ans après son engagement héroïque, le film « Monuments Men » lui rend enfin honneur. Mais l’action de Rose Valland est loin d’être une page révolue de l’histoire. Dans les musées nationaux français, 2 000 œuvres issues de la spoliation (appelées MNR) n’ont toujours pas retrouvé leurs propriétaires. À l’image de son illustre aînée, Corinne Bouchoux en a fait un combat personnel. Rapporteuse d’une commission sur le sujet au Sénat, elle souhaite que la France donne réellement aux ayants droit des propriétaires juifs les moyens de retrouver leurs trésors culturels et que l’État ne se contente plus d’attendre qu’ils se manifestent. Elle préconise la création d’une cellule de recherches. « Si on ne peut pas les identifier, il faut au moins qu’on soit au clair sur ces tableaux. Je ne veux plus qu’aucun musée français n’achète une œuvre alors qu’il y a un doute sur son passé », assène-t-elle.

Pour faciliter ce travail, un site Internet portant le nom de Rose Valland a été créé par le ministère de la Culture. Il permet notamment de consulter le répertoire des MNR en dépôt dans les musées français ou de se documenter sur le sujet. Mais ce bel hommage ne satisfait pas encore pleinement Corinne Bouchoux : « Je trouve cela anormal qu’il n’y ait pas dans tous les musées une plaque avec son nom et sa photo. J’espère que cela va arriver. Que Rose Valland soit aussi méconnue m’a toujours semblé être une injustice. J’ai juste voulu la réparer ». Sur les écrans le 12 mars, le film « Monuments Men », va aussi contribuer à lui redonner sa juste place dans l’Histoire.

1 Responses to Filières du Vatican: Attention des Monuments men peuvent en cacher d’autres (Ratlines: Looking back at the other Monuments men)

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