Théorie du genre: Attention, un angélisme peut en cacher un autre (No sex differences, please, we’re socialists)

The Mystical Nativity - Wikipedia
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A la résurrection des morts, les hommes ne prendront point de femmes, ni les femmes de maris, mais ils seront comme les anges dans les cieux. Jésus (Marc 12: 25)
S’ils se taisent, les pierres crieront! Jésus (Luc 19 : 40)
Par la bouche des enfants et de ceux qui sont à la mamelle Tu as fondé ta gloire, pour confondre tes adversaires, Pour imposer silence à l’ennemi et au vindicatif. Psaumes 8:2
N’avez-vous jamais lu ces paroles: Tu as tiré des louanges de la bouche des enfants et de ceux qui sont à la mamelle? Jesus (Matthieu 21:16)
Le monde moderne n’est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu’un dispositif religieux est brisé (comme le fut le christianisme pendant la Réforme), ce ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les vertus le sont aussi, et elles errent plus férocement encore en faisant des ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé des vieilles vertus chrétiennes virant à la folie.  G.K. Chesterton
L’inauguration majestueuse de l’ère « post-chrétienne » est une plaisanterie. Nous sommes dans un ultra-christianisme caricatural qui essaie d’échapper à l’orbite judéo-chrétienne en « radicalisant » le souci des victimes dans un sens antichrétien. René Girard
On a commencé avec la déconstruction du langage et on finit avec la déconstruction de l’être humain dans le laboratoire. (…) Elle est proposée par les mêmes qui d’un côté veulent prolonger la vie indéfiniment et nous disent de l’autre que le monde est surpeuplé. René Girard
L’esprit des Lumières a récupéré le Salut pour le transformer en progrès en le laïcisant. En ce sens, il a repris le christianisme, mais il l’a perverti en le dépouillant de la transcendance, ce qui change tout : le processus devient impatient et matérialiste. Mais on ne peut certainement pas dire que l’esprit des Lumières a évincé le christianisme en l’avalant. Les seules Lumières qui aient tenté d’évincer la religion sont les Lumières françaises (ni les Lumières américaines, ni les Lumières écossaises, n’en ont fait autant, au contraire). Ensuite parce qu’après les déceptions de la première modernité, on aperçoit clairement que le progrès est corrélé à l’espérance, ou alors n’est plus. Privées de transcendance, les Lumières françaises cessent de croire au progrès et se résignent au temps circulaire : c’est-à-dire qu’elles s’éteignent. Nous sauverons les libertés démocratiques si nous cessons de transformer l’émancipation des Lumières en religion intolérante et inquisitoriale. Pour l’instant, la folie du consensus traduit un despotisme technocratique. Chantal Delsol
À l’époque, et notamment aux États-Unis, on lit ce texte comme un pamphlet anti-stalinien et un roman désenchanté sur les dérives inéluctables de la révolution. Or, il est tout à fait intéressant de voir qu’Orwell conteste très explicitement cette lecture, qui est encore largement répandue aujourd’hui. Le propos du livre, précise-t-il, consiste avant tout à mettre en lumière ce fait inattendu que les idées totalitaires naissent très souvent chez des intellectuels. 1984, c’est, au fond, le rêve secret des intellectuels de gauche britanniques !… (…) Quand on pense à 1984,  on pense d’abord à Big Brother, au télécran, aux procédures de contrôle – et c’est, bien entendu, parfaitement légitime. Mais le cœur du livre, ce sont avant tout les mécanismes intellectuels à l’œuvre dans ces procédures. (…) Bref, le totalitarisme, selon Orwell, ce n’est pas seulement la police et le contrôle, c’est d’abord l’ambition de former les consciences et de façonner les corps. Et ce fantasme est bien, selon lui, un fantasme d’intellectuel. (…) Ceux que dénonce Orwell, ce sont les intellectuels cyniques ou ceux qu’on appelle les « compagnons de route », tous ceux qui, par fascination du pouvoir, trahissent leur fonction consistant d’abord à réfléchir à partir des faits qu’on a sous les yeux. (…) Si Winston s’accroche à des vérités apparemment insignifiantes comme « 2+2=4 » ou « L’eau est mouillée », c’est parce que le totalitarisme vise justement à couper les individus de cette expérience ordinaire, de ce qu’on peut vérifier par soi-même, et qui constitue le socle de notre rapport au monde et aux autres. Ce que visent les mécanismes totalitaires, c’est l’introduction d’un écran de mots et d’images entre les individus et cette expérience du sens commun. Et il s’agit bien là d’un projet qui mobilise des intellectuels. (…) C’est aussi pourquoi je pense qu’on a tort de rabattre le propos de 1984 sur celui tenu, par exemple, par Huxley dans Le Meilleur des mondes, où il s’agit essentiellement d’une dénonciation des risques que nous font courir le progrès des technologies. Il me semble que ce que dit Orwell, c’est que les progrès technologiques ne suffisent pas pour établir un régime policier. Un tel régime suppose aussi certains mécanismes qui sont très souvent pensés et voulus par des intellectuels. (…) Parce qu’en traitant les faits de manière désinvolte on supprime toute forme d’expérience personnelle sur laquelle s’appuyer ; et on laisse alors libre cours aux purs rapports de forces et de langage, ce qui est l’assurance de voir les plus puissants et les plus habiles triompher au détriment de tous les autres. Jean-Jacques Rosat
Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. Déclaration universelle des droits de l‘homme (Article 2, 1948)
La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée. Constitution de la république française (Article 1, 1958)
L’inscription du terme « race », dans l’article même qui dispose des valeurs fondamentales de la République, est inadmissible même dans une « phrase qui a pour objet de lui dénier toute portée ». Proposition de loi du groupe socialiste (Assemblée nationale, nov. 2004)
Oui [je suis favorable à l’ouverture de la procréation médicale assistée (PMA) aux couples de lesbiennes], je l’ai dit. Aux conditions d’âge bien sûr. Je suis très précis là-dessus. Il faut que ce soit un projet parental. Et je suis aussi très soucieux du respect de l’anonymat du don des gamètes. En revanche, je suis hostile à la gestation pour autrui, la GPA. François Hollande (Têtu, 27 février 2012)
Le Parti socialiste s’engage pour garantir l’égalité des droits et construire l’égalité réelle, sans discrimination de genre ou d’orientation sexuelle, • Tous les citoyennes et c itoyens, tous les couples, toutes les familles, doivent pouvoir avoir accès aux même droits, êtres reconnus et protégés par les mêmes institutions. Il s’agit de défendre nos principes républicains et de garantir l’égalité au sein de notre société • Nous ouvrirons le mariage à tous les couples et renforcerons le Pacs (concernant notamment les congés pour évènements familiaux, la protection sociale complémentaire, le droit au séjour, l’enregistrement à la mairie). • Nous ouvrirons l’adoption aux couples de même sexe et l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes , sans condition de couple ou d’infertilité. • Nous reconnaîtrons aux homosexuels le droit de donner leur sang. • Nous affirmons qu’il revient à chaque personne de déterminer son identité de genre . • Nous formerons tous les acteurs éducatifs pour éviter les stéréotypes et les assignations de genre. Tract du parti socialiste
Les questions dites « de société » sont pour moi tout aussi importantes que les questions économiques ou sociales. Elles mettent en lumière les valeurs que nous portons (la liberté, l’égalité, la solidarité, la laïcité, etc.) et les réponses que nous y apportons doivent donner du sens au « vivre ensemble » apaisé et optimiste que nous appelons de nos voeux. Le thème principal de ma campagne est clair : donner une priorité à la jeunesse. Or, cette jeunesse pour laquelle je souhaite mobiliser l’action publique est aussi celle qui aborde le plus simplement et avec la plus grande ouverture les questions de genre parmi lesquelles se trouvent les questions LGBT. Pour en venir au fond de votre demande et avant d’entrer dans le détail des propositions qui sont déjà très largement intégrées au projet du Parti socialiste (notamment grâce aux amendements portés par votre association), je vais m’attacher à vous indiquer la méthode de travail qui sera la mienne et le planning de mise en œuvre de ces propositions. En préambule, je ne cacherai pas que j’ai un réel désaccord avec l’une d’elles : l’autorisation encadrée de la gestation pour autrui (GPA). De nombreuses associations féministes s’opposent à cette légalisation de la GPA et leurs arguments portant sur la marchandisation et l’instrumentalisation du corps humain m’ont convaincu. S’agissant de vos autres propositions, celles-ci se décomposent, me semble-t- il, en deux groupes : celles qui relèvent d’une évolution législative et celles qui nécessitent de simples changements réglementaires ou la mise en œuvre de politiques publiques. Pour ce qui est des évolutions législatives, sur le fondement des propositions de loi déposées par le groupe socialiste dès 2006 (et dont j’étais le premier signataire au nom de tous les socialistes), plusieurs textes seront proposés au 5 vote du Parlement dans le courant de l’année 2012. Ces textes permettront, notamment, l’ouverture du mariage aux couples de même sexe et la possibilité d’adopter pour tous. Ils seront complétés par l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation (AMP) à toutes les femmes. Un dernier ensemble de dispositions viendront traduire notre vision moderne et ouverte de la famille en re – connaissant le statut des beaux-parents. Quant au PaCS, il sera amélioré. Un autre texte sera présenté dans le courant de l’année 2013 pour faciliter le parcours de vie des personnes trans. Enfin, après avoir évalué l’efficacité et la pertinence du dispositif actuel de « Défenseur des droits », nous mettrons en place une Autorité indépendante chargée de lutter contre les discriminations et de promouvoir l’égalité. François Hollande
Introduire, dès la maternelle, des séances consacrées à la mixité et au respect hommes/femmes 190 Proposition UMP. Le premier objectif de la promotion de l’égalité des sexes et du respect hommes/femmes dès la maternelle est d’amener les enfants à se sentir autorisés à adopter des conduites non stéréotypées. Il faut aider les filles et les garçons à percevoir positivement leur genre et celui du sexe opposé. Le second objectif est d’accroître les capacités des enfants à résoudre de façon non violente et coopérative des conflits qui mettent en cause l’appartenance à l’un ou l’autre sexe ainsi que de promouvoir le respect entre les hommes et les femmes. Agir sur une population jeune reste en effet le meilleur moyen d’endiguer la naissance de comportements inacceptables chez les adolescents puis chez les adultes. Tract UMP
Je n’ai jamais défendu la théorie du genre. Nous avons, en 2009, revu l’organisation et le contenu des programmes, notamment de SVT, et nous avons effectivement travaillé sur l’égalité hommes-femmes. C’était la première étape de ce que le gouvernement est en train de vouloir faire aujourd’hui. Luc Chatel
Après les attaques de Jean-François Copé le 9 février au sujet d’un ouvrage intitulé Tous à poil et recommandé selon lui aux enseignants des classes de primaire, Vincent Peillon a fait venir la presse à la dernière minute dans son ministère ce 10 février pour riposter. Son argumentaire tient en deux points : 1) il n’a rien à redire sur le contenu de cet ouvrage et 2) le livre n’est de toutes façons que la recommandation d’une lointaine association ardéchoise. Factuellement, le ministre a raison. Tous à poil fait partie d’une liste de 92 albums jeunesse recommandés par L’Atelier des Merveilles, association du Teil, en Ardèche, qui établit ces listes avec des familles depuis 2009. Le livre en question a été ajouté en 2012. Les missions départementales aux droits des femmes et à l’égalité ont soutenu la création de cette liste qui a fini par être diffusée par le Centre régional de documentation pédagogique de l’Académie de Grenoble. Comme l’indique Vincent Peillon, les listes diffusées par ce centre font office de recommandations que les enseignants sont libres de suivre, ou pas. Mais la présentation du ministre ne va pas jusqu’au bout. Vincent Peillon semble en effet vouloir cantonner à un niveau local, et presque anecdotique, ce qui a été récemment diffusé à une échelle nationale via les ABCD de l’égalité. Ces derniers, qui proposent des ressources aux enseignants pour mieux appréhender les inégalités filles-garçons dès la maternelle, reprennent les bibliographies diffusées par six académies. Celle de l’Ardèche avec Tous à Poil en fait partie, au milieu de six autres listes tout aussi fournies. On peut concrètement trouver un lien vers cette liste dans la rubrique « outils pédagogiques » du site des ABCD de l’égalité – décrit comme le site de référence par le gouvernement – en se rendant dans la sous-partie « littérature jeunesse ». Le Lab Europe 1
« Tous à poil » ou « Papa porte une robe », ne relèvent pas de l’imaginaire et du fantasmatique mais du « modèle identificatoire » proche, c’est-à-dire du personnage réel, auquel l’enfant peut s’identifier et ces livres sont justement conçus pour que le phénomène du « modèle identificatoire » y soit puissant, sous couvert de rigolade bien entendu. Les objectifs sous-jacents sont bien sûr l’abattage de la barrière des générations, donc la négation d’une certaine forme d’autorité honnie du gauchiste libéral, dans le fait de se retrouver tous à poil. Mais au second degré, figure aussi une forme de « sexualité » dont les enfants ne seraient pas exclus puisqu’eux aussi sont « à poil », ce qui relève de ce qu’on appelle « l’implicite » et dans lequel l’enfant est poussé à imaginer qu’il « est » ce qu’il n’est pas et qu’il « fait » ce qu’il ne fait pas en réalité. (…) Et quand « papa » porte une robe, c’est bien de manière possible dans la tête de l’enfant, c’est « mon » papa et peut-être que ce sera moi aussi quand je serai grand : je porterai une robe. Ou même, « mais alors, si je grandis, je risque moi aussi de porter une robe », d’où le trouble. L’implicite est dans l’incertitude créée dans l’idée que l’on se fait de devenir un garçon ou une fille et surtout la conviction d’avoir le choix de devenir un garçon ou une fille, choix que nous n’avons pas en réalité. (…) Ces livres ne sont évidemment que l’un des aspects de l’offensive libérale-libertaire, il ne faut pas les brûler puisque ce faisant ce serait la dictature politico-policière classique bien connue, qui ne vaut pas mieux que l’autre, mais on n’est pas obligé de les acheter et de les lire à ses enfants. Pierre Duriot
Chez Judith Butler, la grande théoricienne du gender, la définition du genre est une construction sociale et culturelle au service de cette domination. Son livre, traduit en 2005 en français, s’intitule Trouble dans le genre, pour un féminisme de la subversion. Judith Butler affirme vouloir penser ensemble « le féminisme et la subversion de l’identité ». En d’autres termes, elle entreprend de définir une politique féministe qui ne soit pas fondée sur l’identité féminine et précise, dans son introduction, son objectif : déstabiliser « l’hétérosexualité obligatoire » pour repenser l’organisation sociale selon les modèles homosexuels et transsexuels. L’hétérosexualité sert la domination de l’homme. Il faut y mettre fin en supprimant les concepts d’homme et de femme et imposer un nouveau genre fondé sur les orientations sexuelles et non sur l’identité sexuelle : « Les femmes ne seraient pas opprimées s’il n’existait pas un concept de femme. » Le deuxième point d’appui de la théorie, c’est l’opposition entre nature et culture. La société de la personne capable de créer des relations avec son semblable est remplacée par la société de l’individu qui se choisit ses vérités, ses intérêts et ses plaisirs. L’individu postmoderne doit se créer lui-même. C’est son droit le plus fondamental : « le droit à être moi ». Or la nature lui impose d’être homme ou femme. Accepter cette dictature, c’est refuser d’être libre. Se considérer comme homme ou femme, c’est refuser de se construire soi-même. Et pour la femme, c’est refuser de s’affranchir de la domination de l’homme. Ainsi, l’individu serait mieux caractérisé par son orientation sexuelle choisie que par son identité sexuelle comme donnée biologique, donc de nature. On entrevoit aisément les conséquences de cette idéologie pour notre vie sociale. Après avoir déconstruit la différence sexuelle, il est nécessaire de déconstruire le couple, la famille et la reproduction. Pour les gender feminists, le couple doit être choisi. La famille fondée sur le mariage monogamique, comme survivance de la domination de l’hétérosexualité, devient polymorphe (bi, pluri, homo, monoparentalité…). La filiation se décline : filiation biologique, intentionnelle, juridique, sociale. L’individu fait son choix dans ce grand marché libertaire. Et enfin, la reproduction doit évoluer. Les techniques permettent une reproduction asexuée (AMP, mères porteuses, utérus artificiel…) et les révisions des lois de bioéthique sont une opportunité pour obtenir satisfaction. Dans ce grand bouleversement, la loi enregistre les revendications individuelles et crée de nouveaux droits arbitraires et déconnectés du bien commun et de la stabilité de notre communauté humaine. Elisabeth Montfort
« Les mères produisent des recettes biologiques différentes pour un garçon et pour une fille », a expliqué Katie Hinde, une biologiste de l’Université de Harvard. Des études sur des humains, des singes et d’autres mammifères ont révélé une variété de différences dans le contenu du lait et la quantité produite. Ainsies petits garçons ont du lait plus riche en graisse et en protéines donc énergétique tandis que les petites filles obtiennent de plus grande quantités de lait. Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer ce phénomène, a relevé Katie Hinde lors d’une présentation à la conférence annuelle de l’Association américaine pour l’avancement de la science (AAAS) réunie à Chicago du 13 au 17 février. Chez les singes rhésus par exemple, la femelle a tendance à produire plus de calcium dans son lait destiné à des progénitures femelles qui héritent du statut social de leur mère. « Cela permet aux mères de donner plus de lait à leurs filles ce qui va permettre d’accélerer leur développement pour commencer à se reproduire plus jeune », a expliqué la biologiste de l’évolution. Les mâles n’ont pas besoin de parvenir à la maturité sexuelle aussi vite que les femelles car leur seule limite sur la fréquence de leur reproduction dépend du nombre de femelles qu’ils peuvent conquérir. Les femelles chez les singes sont nourries au lait maternel plus longtemps que les mâles qui passent plus de temps à jouer et qui ont de ce fait besoin d’un lait plus énergétique. Mais on ne sait pas vraiment encore pourquoi chez les humains les mères produisent des laits différents pour leur nourrissons selon leur sexe, admet la scientifique. Il y a des indications montrant que tout est déjà programmé quand le bébé est encore dans le ventre de sa mère. AFP
Les garçons se développent plus vite que les filles, et ce, dès le début de la grossesse. Les médecins spécialistes des fécondations in vitro sont souvent capables de deviner si l’embryon sera mâle ou femelle rien qu’en se basant sur le nombre de divisions cellulaires qui se sont produites en un certain nombre d’heures depuis la fécondation: les embryons mâles ont un métabolisme plus élevé, qui accélère le début de leur croissance et la multiplication des cellules. L’évolution semble avoir favorisé cette croissance plus rapide afin que les embryons mâles passent la période critique de la différenciation testiculaire avant que les œstrogènes de leur mère, dont les niveaux grimpent régulièrement au début de la grossesse, ne perturbent le développement de leur appareil uro-génital. Conséquence de leur développement plus rapide, les garçons sont plus grands, plus lourds et physiquement plus vigoureux que les filles au moment de la naissance – avec des crânes plus épais et, oui, des cerveaux plus gros. Si les corps des garçons grandissent et grossissent plus vite, ceux des filles mûrissent plus rapidement. Et cette différence se traduit par un avantage net en faveur des fœtus féminins à la fin de la grossesse. Selon la plupart des critères de mesure, les filles sont plus capables de relever le défi de la vie en dehors de l’utérus ; les garçons sont davantage vulnérables à tout un éventail de maladies, de problèmes cognitifs et comportementaux, et même à la mort, à la fin de la grossesse et après l’accouchement. (…) Quand une femme enceinte fait une fausse couche, il est environ 30 % plus probable que le fœtus était celui d’un garçon. Les garçons ont aussi environ 7 % de chances de plus que les filles de naître prématurément. Même les garçons nés à terme courent davantage de risques que les filles. Le taux de mortalité infantile global, aux Etats-Unis, est 22% plus élevé chez les garçons que chez les filles. (…) Tous ces facteurs expliquent comment le surplus d’embryons mâles conçus à la fécondation diminue peu à peu, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un nombre de fœtus masculins presque égal à celui des fœtus de filles. Après la naissance, néanmoins, la vulnérabilité des garçons reste un thème dominant du début de leur croissance. Ils risquent davantage que les filles de succomber à un nombre impressionnant de problèmes physiques et mentaux. Cela fait d’eux, par bien des aspects, le sexe le plus difficile à élever au début de l’enfance. (…) Deux études récentes – une sur les jolis petits vervets, l’autre sur les singes rhésus -ont révélé que les mâles et les femelles se différenciaient comme les garçons et les filles en matière de choix de jouets. La première étude, menée à l’université de Californie à Los Angeles (UCLA) par Gerianne Alexander et Melissa Hines, s’est penchée sur les préférences de vervets âgés de 1 an pour divers jouets humains conventionnels. Les mâles consacrèrent davantage de temps à manipuler la balle ou la petite voiture de police qu’aux autres jouets, tandis que les femelles préférèrent une poupée de chiffon et, plus mystérieusement, une casserole rouge. Cependant, les deux sexes passèrent autant de temps à examiner deux jouets unisexes (un chien en peluche et un livre d’images). Les résultats sont similaires dans l’étude des singes rhésus menée au Centre Yerkes de recherche sur les primates de l’université Emory. Dans les deux études, les singes ignoraient sans aucun doute le sens du concept de «jouet de garçon ou de jouet de fille». Aussi, ces résultats donnent bien à penser que ces préférences ont quelque chose d’inné. Les garçons, plus actifs, sont peut-être davantage séduits par les objets mobiles qu’ils peuvent manipuler et contrôler en utilisant leur corps. Les filles trouvent peut-être les poupées plus plaisantes parce qu’elles ont davantage propension à nouer des liens avec les personnes de leur entourage, voire, parce qu’elles ont une attitude véritablement instinctive pour les bébés. (…) L’attirance des femelles vervets pour les bébés pourrait aussi expliquer leur intérêt bien étrange pour la casserole de l’étude. Il se trouve simplement que le rouge de cette casserole était proche de celui de la peau des nourrissons vervets. Lise Eliot
Il est tout simplement aberrant de nier les preuves que, dans l’espèce humaine comme dans toutes les autres espèces, les différences génétiques entre mâles et femelles entraînent des différences moléculaires, cellulaires, physiologiques, et comportementales. Principalement, un gène localisé sur le chromosome Y entraîne la synthèse d’en moyenne sept fois plus de testostérone chez les hommes que chez les femmes. Or, comme chez les autres vertébrés, cette molécule possède des récepteurs dans le cerveau, qui, lorsqu’ils sont activés par la testostérone, influencent d’une part la construction du cerveau (au cours du développement embryonnaire mais aussi post-natal), et d’autre part le comportement (préférences, décisions, réactions, interactions sociales, performances cognitives, etc., à tous les âges de la vie). Sachant cela, il paraît indispensable de comprendre pourquoi et comment l’évolution a conduit à de telles différences, c’est-à-dire quelles sont les pressions sélectives qui ont façonné et maintenu ces différences au cours de l’histoire évolutive. Ceux qui nient ces faits, et donc rejettent leurs explications, le font pour des raisons idéologiques et affectives – non-scientifiques. Charlotte Faurie
La position qui consiste à dire que les différences entre les cerveaux d’hommes et de femmes est uniquement d’origine culturelle est fondée sur une idéologie, mais elle est reprise en boucle par les médias, car elle est décrétée politiquement correcte. Étant donné que, chez tous les animaux étudiés, la différence est très forte entre les cerveaux mâles et femelles, pour des raisons génétiques, il faudrait proposer un mécanisme particulier expliquant pourquoi et comment cette différence s’est effacée dans la lignée conduisant à l’espèce humaine. À ma connaissance, il n’en existe aucun de crédible, parce qu’aucun n’a été proposé. Les cerveaux sont biologiquement différents vu que les forces sélectives agissant sur les mâles et sur les femelles ne sont pas les mêmes, ce qui fait que les comportements sélectionnés depuis des centaines de millions d’années sont, eux aussi, différents. Les contraintes et les enjeux liés à la reproduction des hommes et des femmes sont aussi différents, dans tous les groupes culturels connus. À la naissance, les nouveaux nés garçons et filles ont déjà des comportements différents, donc des cerveaux biologiquement différents. Évidemment, l’environnement familial et social va aussi contribuer à augmenter ou atténuer ces différences, et le résultat sera une différence aux bases biologiques et culturelles. L’égalité sociale entre hommes et femmes peut évidemment se construire sans nier des différences biologiques, y compris dans les cerveaux. Ignorer ou nier une contribution biologique est une aberration, l’aveuglement idéologique ne peut conduire à rien de bon. Michel Raymond
Enfin, niveau éducation, Faurie et Raymond sont d’accord pour dire que « l’évolution et la biologie évolutive, y compris en ce qui concerne l’espèce humaine, doivent être enseignées dès le collège, afin de donner aux élèves des outils adéquats pour une véritable compréhension du monde biologique, de la même façon qu’on leur propose la gravité pour comprendre le monde physique ». Et en ce sens, ils s’inscrivent dans la droite ligne du prix Nobel François Jacob, pour qui « cela simplifierait beaucoup la compréhension des enfants si l’on commençait l’étude du monde vivant par l’étude de l’évolution ». Peggy Sastre

Attention: un obscurantisme peut en cacher un autre !

A l’heure où, entre deux concubinats et interviews à Têtu, notre Marieur pour tous en chef en oublie jusqu’à ses (premières) promesses de campagne en faveur de la PMA …

Et où, après avoir projeté d’introduire la théorie du genre en maternelle puis l’avoir effectivement introduite au lycée avec la controverse que l’on a déjà oubliée, le précédent gouvernement sarkozyste se défend un peu trop fort d’avoir lancé « la première étape de ce que le gouvernement est en train de vouloir faire aujourd’hui » …

Pendant qu’après avoir appelé ses recteurs à « s’appuyer sur la jeunesse pour changer les mentalités » via au besoin l’intervention à l’école d’associations homosexuelles ou même prôné la dépenalisation du cannabis,  l’actuel ministre de l’Education annonce contre toute évidence qu’un livre appelant à mettre à poil la maitresse et d’autres représentants de l’autorité ne figure pas sur les listes de son ministère …

Que, du côté de la recherche, le lait même dès le sein maternel et la bouche des enfants crie la vérité de la différentiation sexuelle …

Et que, sous prétexte de mauvaises fréquentations supposées avec la sociobiologie et l’antiféminisme, la psychologie évolutionnaire, c’est-à-dire  l’application de la théorie de l’évolution aux comportements humains, a tant de mal à se faire accepter en France …

Comment ne pas voir …

Derrière ces nouvelles byzantineries sur le sexe des anges et ce nouvel iconoclasme contre les « images stéréotypées » …

Et à l’instar de ces idées chrétiennes devenues folles contre lesquelles nous avait averti dès avant Orwell l’un des plus grands prophètes de notre monde moderne …

Le totalitarisme bien-pensant de nos nouveaux faiseurs d’anges …

Qui après avoir nié les différences raciales (pardon: ethniques jusque dans la… Constitution !) et l’antisémitisme (voire la présence juive !) en France …

Voudraient à présent faire ici-bas pour les différences sexuelles ce qu’un plus prudent christianisme avait réservé au ciel ?

Les neurones ont-ils un sexe ?

Sophie Roquelle

Le Figaro

20/08/2011

Les meilleurs extraits du livre événement de la neurobiologiste Lise Eliot , Cerveau rose, cerveau bleu (Robert Laffont).

1/5

Garçons et filles sont différents. Cette donnée, évidente pour toutes les générations qui nous ont précédés, fait aujourd’hui l’effet d’une révélation étonnante à de nombreux parents. Nous qui avons été élevés dans l’idée de l’égalité des sexes, nous considérons ou nous espérons, à tout le moins, que les différences entre les sexes ne sont pas innées, mais fabriquées par la société. Nous nous côtoyons sans difficulté entre personnes des deux sexes, nous échangeons nos points de vue aussi bien sur le sport que sur la cuisine et nous sommes joyeusement en compétition les uns avec les autres sur nos lieux de travail en faisant constamment semblant de considérer qu’hommes et femmes sont plus ou moins identiques. Jusqu’à ce que nous ayons à notre tour des enfants et que les différences entre les sexes deviennent impossibles à ignorer! (…)

Oui, garçons et filles sont différents. Ils ont des centres d’intérêt différents, des niveaux d’activité différents, des seuils sensoriels différents, des forces physiques différentes, des styles relationnels différents, des capacités de concentration différentes et des aptitudes intellectuelles différentes ! Les différences ne sont pas quantitativement très importantes et, dans de nombreux cas, bien plus modestes que celles, parfois énormes, qui existent entre hommes et femmes adultes. Les petits garçons pleurent, les petites filles tapent et donnent des coups de pied. Mais les différences s’additionnent -et c’est cela qui provoque l’apparition de certaines statistiques alarmantes qui influencent notre façon de penser l’éducation des enfants. (…) Ces différences entre les sexes ont de réelles conséquences et posent d’énormes défis aux parents. Comment soutenir aussi bien nos fils que nos filles, les protéger et continuer de les traiter de manière équitable, alors que leurs besoins sont manifestement si différents?

Déjà, dans le ventre de la mère…

Les tests de grossesse vendus dans le commerce sont excellents, mais ils ne sont pas encore capables d’annoncer le sexe du futur bébé. Cette limitation est en partie due au fait que plus on est tôt dans la grossesse, moins il est possible de différencier les fœtus. Les bébés des deux sexes sont identiques pendant les six premières semaines de leur développement intra-utérin. Le processus de différenciation sexuelle s’enclenche vers le milieu du premier trimestre, mais il n’apparaît pas clairement à l’échographie avant la fin du troisième mois (au plus tôt). Les fœtus prennent leur temps pour révéler leurs organes génitaux au monde extérieur. Et à l’intérieur de leurs toutes petites têtes, la différenciation est encore plus lente.

Cependant, il y a des différences qui s’impriment dans le cerveau, et sans doute dans l’esprit, avant la naissance. Vous ne pouvez ni les voir à l’échographie ni les entendre dans les battements de cœur du fœtus, mais elles sont bien là: garçons et filles sont influencés dans l’utérus par différents gènes et différentes hormones qui leur sont propres. (…)

Parmi toutes ces influences, celle que les chercheurs connaissent le mieux est celle de la testostérone, la célébrissime hormone stéroïde contre laquelle les mères adorent se lamenter quand elles surprennent leurs fils à se pourchasser à travers la maison ou à se bagarrer trop près de la table basse du salon.

Les parents, en général, ne savent pas à quel point la testostérone intervient tôt dans le développement de leur enfant. La première poussée de testotérone démarre six semaines après la conception, pour se terminer avant la fin du second trimestre. Ensuite, et jusqu’au moment de la naissance, le niveau de testostrérone des garçons n’est guère différent de celui des filles. Une autre poussée survient alors, plus modeste que la première, qui s’étend sur les six premiers mois de la vie. En tout état de cause, la brève période de quatre mois, avant la naissance, durant laquelle les fœtus sont exposés à la testostérone, suffit à les masculiniser entre les jambes et, dans une certaine mesure, dans leurs cerveaux embryonnaires. (…)

Les garçons se développent plus vite que les filles, et ce, dès le début de la grossesse. Les médecins spécialistes des fécondations in vitro sont souvent capables de deviner si l’embryon sera mâle ou femelle rien qu’en se basant sur le nombre de divisions cellulaires qui se sont produites en un certain nombre d’heures depuis la fécondation: les embryons mâles ont un métabolisme plus élevé, qui accélère le début de leur croissance et la multiplication des cellules. L’évolution semble avoir favorisé cette croissance plus rapide afin que les embryons mâles passent la période critique de la différenciation testiculaire avant que les œstrogènes de leur mère, dont les niveaux grimpent régulièrement au début de la grossesse, ne perturbent le développement de leur appareil uro-génital. Conséquence de leur développement plus rapide, les garçons sont plus grands, plus lourds et physiquement plus vigoureux que les filles au moment de la naissance – avec des crânes plus épais et, oui, des cerveaux plus gros.

Si les corps des garçons grandissent et grossissent plus vite, ceux des filles mûrissent plus rapidement. Et cette différence se traduit par un avantage net en faveur des fœtus féminins à la fin de la grossesse. Selon la plupart des critères de mesure, les filles sont plus capables de relever le défi de la vie en dehors de l’utérus ; les garçons sont davantage vulnérables à tout un éventail de maladies, de problèmes cognitifs et comportementaux, et même à la mort, à la fin de la grossesse et après l’accouchement. (…)

Quand une femme enceinte fait une fausse couche, il est environ 30 % plus probable que le fœtus était celui d’un garçon. Les garçons ont aussi environ 7 % de chances de plus que les filles de naître prématurément. Même les garçons nés à terme courent davantage de risques que les filles. Le taux de mortalité infantile global, aux Etats-Unis, est 22% plus élevé chez les garçons que chez les filles. (…)

Tous ces facteurs expliquent comment le surplus d’embryons mâles conçus à la fécondation diminue peu à peu, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un nombre de fœtus masculins presque égal à celui des fœtus de filles. Après la naissance, néanmoins, la vulnérabilité des garçons reste un thème dominant du début de leur croissance. Ils risquent davantage que les filles de succomber à un nombre impressionnant de problèmes physiques et mentaux. Cela fait d’eux, par bien des aspects, le sexe le plus difficile à élever au début de l’enfance.

A la naissance: si semblables… et si différents

Comme les chatons, les nouveau-nés se ressemblent à peu près tous. (…). N’empêche, il existe quelques différences entre les sexes, constantes et fiables, qui influencent sans doute réellement le démarrage de chaque garçon et de chaque fille dans la vie. Les bébés filles devancent les garçons par le nombre de gestes qu’elles produisent. En moyenne, elles commencent quelques semaines avant eux à pointer du doigt, à saluer de la main et à lever les bras vers les adultes pour être soulevées. Mais là encore, leur avantage est assez réduit: dans une importante étude suédoise, il est apparu que les filles de 18 mois produisaient… 5% de gestes en plus que les garçons. D’un autre côté, les gestes ne sont pas tout à fait les mêmes. Certains des gestes des bébés sont déjà marqués sexuellement: les filles de 8 à 16 mois ont davantage tendance à imiter les comportements parentaux (par exemple, elles étreignent ou bercent leurs poupées); les garçons de la même tranche d’âge font le geste de lire un journal, de conduire une voiture ou de donner des coups de marteau.

Après les gestes vient la prononciation des mots, premiers outils d’expression verbale des bébés. Les filles conservent leur modeste avancée, tout au long de la petite enfance, pour produire en moyenne trois cents mots à l’âge de 22 mois, tandis que les garçons atteignent ce seuil à 23 ou 24 mois.

Passé l’âge de 2 ans, les enfants commencent à parler pour de bon. Ils se mettent à associer les mots en petites phrases simples telles que Maman maison, Encore lait ou Aller parc. Là encore, les filles prennent la tête: huit mots consécutifs d’un souffle, à deux ans et demi, contre environ six mots pour les garçons. Et à l’émergence des phrases grammaticalement justes, celles des filles sont plus longues et plus complexes que celles des garçons – une différence qui se maintient durant toute la période préscolaire. (…)

Les écarts entre garçons et filles se creusent énormément entre 2 et 6 ans -et certains sont plus marqués à cette période qu’à aucun autre moment de la vie. Les coupables ne sont pas les hormones, puisque les gonades des enfants se sont calmées et resteront tranquilles jusqu’à la puberté. Mais il est vrai, comme nous l’avons vu, que certaines influences génétiques et hormonales pré et postnatales ont projeté les enfants sur des trajectoires légèrement différentes. Longtemps avant qu’ils n’entrent en contact avec notre culture très codifiée entre masculin et féminin, leurs cerveaux sont préparés à ne pas réagir tout à fait de la même manière à certains aspects de notre environnement. Et une fois le processus amorcé, ils s’épanouissent selon un modèle rose ou bleu qui caractérisera de bien des façons la suite de leur développement. (…)

Jouets: Barbie vs camion-benne

La plupart des parents ont des récits (…) sur les activités ludiques «typiques de leur sexe» de leurs très jeunes enfants. Et les recherches confirment que cette différence est remarquablement universelle. Qu’ils grandissent aux Etats-Unis, en Europe, au Japon et probablement n’importe où dans le monde, les garçons de 2 à 5 ans choisissent à une écrasante majorité le camion, la petite voiture, le ballon ou tout autre jouet « masculin » quand on leur offre le choix entre ces objets et une poupée. Les fillettes du même âge sélectionnent la poupée, les ustensiles de cuisine ou le nécessaire à maquillage (surtout si l’un de ces jouets est rose). (…) «Il doit y avoir un gène de la bagnole sur le chromosome Y!» Voilà comment de nombreux parents expliquent le fait indéniable, universel. (…)

Bien sûr, ni les camions ni les poupées n’existaient il y a cent mille ans, quand le génome humain s’est stabilisé sur la séquence qu’il a aujourd’hui. Mais il ne paraît pas absurde de croire que certaines propriétés intrinsèques des jouets «garçons» et des jouets «filles» séduisent profondément, et différemment, les garçons et les filles.

L’argument contraire, c’est que non, non, trois fois non, il n’y a strictement rien d’inné à tout cela. C’est nous, les parents, qui imbibons les enfants de ces préférences à travers les choix que nous faisons très consciemment quand nous leur achetons des jouets et à travers les présupposés inconscients sur les garçons et les filles. Cette théorie de la prééminence de l’acquis sur l’inné, des facteurs culturels sur la nature, n’a plus autant la cote qu’il y a quelques décennies, notamment parce qu’elle est contredite par les tentatives des parents pour intéresser leurs fils aux poupées et leurs filles aux camions. Mais la vérité est quelque part entre les deux idées: les préférences des garçons et des filles pour telle ou telle sorte de jouets sont clairement biaisées par certaines tendances innées, mais elles sont amplifiées par divers facteurs sociaux au premier chef desquels la prise de conscience qui s’impose à l’enfant qu’il est un garçon ou une fille. (…)

Deux études récentes – une sur les jolis petits vervets, l’autre sur les singes rhésus -ont révélé que les mâles et les femelles se différenciaient comme les garçons et les filles en matière de choix de jouets. La première étude, menée à l’université de Californie à Los Angeles (UCLA) par Gerianne Alexander et Melissa Hines, s’est penchée sur les préférences de vervets âgés de 1 an pour divers jouets humains conventionnels. Les mâles consacrèrent davantage de temps à manipuler la balle ou la petite voiture de police qu’aux autres jouets, tandis que les femelles préférèrent une poupée de chiffon et, plus mystérieusement, une casserole rouge. Cependant, les deux sexes passèrent autant de temps à examiner deux jouets unisexes (un chien en peluche et un livre d’images). Les résultats sont similaires dans l’étude des singes rhésus menée au Centre Yerkes de recherche sur les primates de l’université Emory. Dans les deux études, les singes ignoraient sans aucun doute le sens du concept de «jouet de garçon ou de jouet de fille». Aussi, ces résultats donnent bien à penser que ces préférences ont quelque chose d’inné.

Les garçons, plus actifs, sont peut-être davantage séduits par les objets mobiles qu’ils peuvent manipuler et contrôler en utilisant leur corps. Les filles trouvent peut-être les poupées plus plaisantes parce qu’elles ont davantage propension à nouer des liens avec les personnes de leur entourage, voire, parce qu’elles ont une attitude véritablement instinctive pour les bébés. (…) L’attirance des femelles vervets pour les bébés pourrait aussi expliquer leur intérêt bien étrange pour la casserole de l’étude. Il se trouve simplement que le rouge de cette casserole était proche de celui de la peau des nourrissons vervets. (…)

L’école: elles écrivent, ils comptent

S’ils insistent parfois pour porter des robes bien roses ou des jeans bien bleus pour l’école, ils ont beaucoup de choses en commun une fois en classe. Oui, les filles sont plus précoces sur le plan verbal. Mais en réalité, il s’agit là d’une des différences entre les sexes les moins importantes: elle se traduit par un simple écart de deux points de QI avant 6 ans et elle diminue beaucoup au cours des premières années du primaire (sans aucun doute parce que les enfants se mettent tous à parler énormément une fois qu’ils sont scolarisés). En d’autres termes, il y a des tas de petits garçons très loquaces. Et s’il est vrai que davantage de garçons que de filles ont des difficultés à apprendre à lire, il ne faut pas en conclure que tous les garçons peineront dans ce domaine ou, pis, qu’aucune fille n’a besoin d’aide supplémentaire pour apprendre à s’exprimer ou à lire. En outre, les filles ne sont pas en avance dans toutes les mesures de l’aptitude verbale. Pour le vocabulaire, en particulier, on n’observe pas de différence entre les sexes à partir de l’âge de 6 ans, en tout cas, et pendant toutes les années qui suivent.

Les garçons ont l’avantage dans d’autres domaines. Dès le primaire, ils ont des résultats un peu supérieurs aux tests d’aptitudes visio-spatiales et ils distancent de plus en plus les filles tout au long de l’enfance et de l’adolescence. Ils sont également tout aussi bons, sinon meilleurs qu’elles en maths. (…) En maths et en sciences, à vrai dire, les filles démarrent tout à fait du bon pied. Au début du primaire, elles connaissent leurs nombres et savent compter aussi bien que les garçons. Les filles et les femmes sont même meilleures que les garçons et les hommes en calcul mental. Au bout du compte, pourtant, ce sont les garçons qui obtiennent les meilleurs résultats dans la plupart des examens de mathématiques, dont ceux de géométrie, de mesures, de probabilités et pour les très redoutés «problèmes».

Considérons les données des tests d’évaluation passés par des centaines de milliers d’élèves américains. Les filles ont des résultats inférieurs à ceux des garçons, en maths comme en sciences, dans les classes de CM1 et de quatrième quoique la différence (deux à trois points) soit considérablement moindre que la différence, au désavantage des garçons, relevée aux tests de lecture et d’écriture. Les filles sont encore un peu plus en retard en terminale. A cet âge, cependant, il est encourageant de constater que les écarts se sont réduits presque de moitié par rapport à ce qu’ils étaient il y a dix ou vingt ans.

Ne pleure pas, mon fils!

A vrai dire (…), les garçons seraient plutôt plus émotifs que les filles: les nouveau-nés sont plus irritables, ils pleurent plus tôt s’ils ont un problème et ils sont moins faciles à consoler que les nouveau-nées. Les choses s’égalisent assez vite, mais, comme le savent tous les parents de garçons, ceux-ci manifestent beaucoup, beaucoup leurs émotions. Pour eux comme pour les filles, le début de la vie est un méli-mélo de périodes de bonne humeur et de chutes dans la déprime la plus noire, de crises de colère et de sourires exubérants, sans oublier les poignantes déclarations d’amour qu’ils adressent à leurs parents, leurs frères et sœurs et leurs animaux domestiques. Les visages des garçons, comme ceux des filles, sont très, très expressifs (voilà pourquoi les parents aiment tellement les photographier). Arrivés à l’âge de 4 ou 5 ans, les garçons pleurent peut-être un peu moins que les filles, mais ils versent encore bien assez de larmes pour vous donner envie de les prendre dans vos bras, de les bercer et de faire tout votre possible pour les réconforter.

Si les garçons éprouvent sans l’ombre d’un doute les mêmes émotions que les filles, ils apprennent cependant bien vite à ne pas les montrer. Le cliché du mâle stoïque est assez juste – en apparence, du moins. Les hommes adultes manifestent effectivement moins d’expressions faciales, ils pleurent moins et, de manière générale, ils dissimulent leurs sentiments davantage que les femmes. Mais cela ne signifie pas qu’ils ne ressentent rien, bien au contraire! Dans les études en laboratoire, les hommes réagissent d’ailleurs plus intensément que les femmes aux stimuli émotionnels frappants comme le visionnage d’un film violent ou la peur de recevoir une décharge électrique. Le truc, c’est que leurs réactions sont essentiellement internes: dans les situations émotionnellement troublantes, ils connaissent de plus fortes accélérations de leur rythme cardiaque, de plus fortes élévations de leur pression artérielle et davantage de suées que les femmes. Mais leurs émotions, même si elles sont moins visibles en surface, sont tout aussi puissantes que celles des femmes.» (…)

Les intertitres sont de la rédaction.

Cerveau rose, cerveau bleu. Les neurones ont-ils un sexe?, de Lise Eliot, Robert Laffont, 504p., 22€.

Voir aussi:

Pourquoi la théorie de l’évolution de Darwin est-elle autant détestée ?

Peggy Sastre

Le Nouvel Observateur

12-06-2012

LE PLUS. Les comportements des femmes sont-ils différents de ceux des hommes pour des raisons génétiques ? Le décryptage de la vie humaine par Darwin est bien une révolution, selon Peggy Sastre, auteur de « No Sex » et « Ex utero ». Ceux qui la critiquent peuvent aussi mal comprendre ou sous-estimer son importance.

Édité et parrainé par Mélissa Bounoua

La théorie darwinienne de l’évolution est l’une des plus importantes découvertes de tous les temps et peut se résumer en quatre propositions fondamentales :

1. Il existe une compétition entre les individus car les ressources de leur environnement sont limitées et les organismes produisent en général plus d’individus qu’il ne peut en survivre.

2. Il existe une variabilité interindividuelle au sein de chaque population. Certaines de ces variations sont héréditaires.

3. Il existe, dans un environnement donné, un avantage adaptatif (« fitness ») associé à certaines variations, certains individus étant en conséquence plus efficaces (« fittest ») que d’autres dans la lutte pour la survie et la reproduction.

4. En vertu des deux premières propositions, les individus porteurs de traits avantageux se reproduisent plus que les autres et transmettent leurs traits héritables à leur descendance. La population se trouve donc graduellement modifiée au fil des générations. Ce processus est appelé sélection naturelle, l’adaptation en est la conséquence.

À côté d’autres révolutions scientifiques (Copernic, Galilée, Newton ou Einstein), la force de Darwin est double : d’une part, c’est la vie et l’homme qu’il décrypte, pas des lois abstraites d’organisation de la matière et, d’autre part, sa théorie répond d’un seul mouvement à la question du « pourquoi » (l’adaptation) et à celle du « comment » (la sélection).

Mais l’idée darwinienne est peut-être l’un des paradigmes scientifiques les plus détestés de tous les temps, ne serait-ce que par tout le mal qu’elle fait et a fait aux religions. En France, tout particulièrement, elle est aussi l’une des plus sous-estimées, mal connues et mal comprises. Je ne compte plus les fois où, en essayant de l’exposer et de l’utiliser, on m’a répondu des trucs du genre « ce n’est qu’une théorie, rien ne la prouve », « on ne peut pas l’appliquer aux humains », « c’est juste un gros délire anglo-saxon », « en voilà des idées odieuses qui justifient l’extermination des plus faibles, on va tous finir dans un stade avec un numéro sur le bras à ce rythme-là ! », etc.

Le royaume pourri de Darwin ?

Dernièrement, je suis ainsi tombée sur trois articles qui, bien que très différents dans leur forme comme dans leurs attendus, véhiculaient, globalement, le message selon lequel il y aurait quelque chose de fondamentalement pourri au royaume de Darwin :

– Le premier (le plus « sérieux »), publié sur un jeune blog qui se donne comme mission, somme toute honorable, d’être une sorte d’observatoire critique de la vulgarisation scientifique, mettait en garde contre les travers supposés de la « psychologie évolutionniste », « discipline idéologiquement suspecte du fait de ses accointances avec la sociobiologie et l’antiféminisme » [1] ;

– Le second, rédigé par Mona Chollet en réponse au dernier livre de Nancy Huston (sur lequel je reviendrai bientôt), voyait dans l’application de la théorie de l’évolution aux comportements humains en général, et sexuels en particulier, des « thèses réactionnaires et indigentes » ;

– Enfin, le troisième, écrit par Agnès Giard, n’y allait pas par quatre chemins : pour elle, toutes ces histoires ne sont qu’une « théorie douteuse, voire foireuse ». On aura bien saisi : avant même de tenter de le comprendre, le dangereux Darwin, il faut s’en méfier, voire s’en détourner.

Un peu lasse d’avoir à combattre ces idées reçues (pour parler poliment) avec mes petits bras d’autodidacte, j’ai voulu m’entretenir avec quelques spécialistes estampillés « officiels » pour voir si la situation était réellement aussi désespérée qu’elle m’en avait l’air, ou si c’était, encore une fois, mon esprit malade qui me jouait des tours.

Pour couper l’herbe sous le pied de ceux pour qui la théorie de l’évolution et la France sont incompatibles (j’en suis parfois, je l’avoue, quand je suis très très énervée), je me suis orientée vers Michel Raymond, directeur de recherche au CNRS, responsable d’une équipe de recherche en biologie évolutive humaine à l’Institut des sciences de l’évolution de Montpellier [2]. Au sein de son laboratoire, j’ai aussi posé quelques questions à Charlotte Faurie, spécialiste, entre autres, de l’évolution de la latéralité dans les populations humaines.

Pour eux, la situation commence tout juste à se débloquer, en particulier depuis 2009, la fameuse « année Darwin », qui célébrait les deux cents ans de sa naissance et les cent cinquante ans de la première édition de « De l’origine des espèces ».

Mais pour autant, m’ont-ils expliqué, « les mécanismes qui sous-tendent l’évolution sont généralement mal connus, peu enseignés, et mal vulgarisés. Souvent caricaturé, le principe de la sélection naturelle est aussi parfois rejeté pour des raisons idéologiques. Il est pourtant nécessaire de s’accommoder des règles qui régissent le monde, puisque nos opinions ne les changeront pas. Ainsi, si l’on projette d’aller sur la Lune, quelles que soient nos opinions personnelles, il est prudent de ne pas s’inventer sa propre la loi de la gravité. Il en est de même en biologie. La compréhension du monde vivant passe par la connaissance des règles de l’évolution, et la sélection naturelle est l’une d’elles, la seule qui puisse rendre compte des adaptations du vivant et de l’existence d’organes complexes. »

Et l’espèce humaine ? Elle n’y échappe évidemment pas : « la culture humaine ne fait pas sortir notre espèce du large champ de l’évolution », poursuivent Faurie et Raymond. Certes, « l’espèce humaine a des spécificités, comme un langage extrêmement développé et une culture complexe », mais « de nombreuses espèces animales possèdent une culture, parfois pas si rudimentaire que cela et, là encore, la sélection naturelle est indispensable pour en comprendre l’évolution ».

Des blocages idéologiques et institutionnels

C’est pourtant ce genre de mantra – que l’humain super complexe échappe à l’évolution, d’aucuns disent même que l’humain n’évolue plus – qu’on se ressasse ici ou là, et en particulier dans les articles mentionnés ci-dessus. Pour Faurie et Raymond, cela s’explique par des « blocages, d’ordre idéologique et institutionnel. Les sciences sociales, au XXe siècle, ont défendu et construit des paradigmes scientifiques fondés essentiellement sur des déterminants purement environnementaux. Les effets biologiques dans les comportements étaient inconcevables (et restent inconcevables pour certains). Évidemment, la position opposée – tout s’explique biologiquement – est aussi extrême et fausse. »

Selon les chercheurs, « le véritable problème est que la culture humaine est étudiée dans nos institutions comme une particularité qui échappe aux règles du vivant, particulièrement en France : les universités de sciences humaines ont des campus séparés des autres, cette séparation se retrouve également au sein du CNRS… Comme un dualisme conforté de façon institutionnelle. Mais rien ne vient appuyer scientifiquement une telle séparation. Au contraire, on sait maintenant que ce sont les interactions entre la biologie et la culture qui ont façonné ce que nous sommes, des interactions très fortes : chaque changement d’un côté modifiant les sélections de l’autre, qui en retour change la trajectoire initiale, et ainsi de suite. Les exemples sont de plus en plus nombreux. Avec cette coupure institutionnelle, on est mal équipé pour aborder sereinement ce genre d’interaction. »

Blocage d’entre les blocages : les différences sexuelles. Pour Charlotte Faurie, ce sujet fait même « l’objet d’un obscurantisme ahurissant » :

« Il est tout simplement aberrant de nier les preuves que, dans l’espèce humaine comme dans toutes les autres espèces, les différences génétiques entre mâles et femelles entraînent des différences moléculaires, cellulaires, physiologiques, et comportementales. Principalement, un gène localisé sur le chromosome Y entraîne la synthèse d’en moyenne sept fois plus de testostérone chez les hommes que chez les femmes. Or, comme chez les autres vertébrés, cette molécule possède des récepteurs dans le cerveau, qui, lorsqu’ils sont activés par la testostérone, influencent d’une part la construction du cerveau (au cours du développement embryonnaire mais aussi post-natal), et d’autre part le comportement (préférences, décisions, réactions, interactions sociales, performances cognitives, etc., à tous les âges de la vie). Sachant cela, il paraît indispensable de comprendre pourquoi et comment l’évolution a conduit à de telles différences, c’est-à-dire quelles sont les pressions sélectives qui ont façonné et maintenu ces différences au cours de l’histoire évolutive. Ceux qui nient ces faits, et donc rejettent leurs explications, le font pour des raisons idéologiques et affectives – non-scientifiques. »

Ce que Michel Raymond confirme :

« La position qui consiste à dire que les différences entre les cerveaux d’hommes et de femmes est uniquement d’origine culturelle est fondée sur une idéologie, mais elle est reprise en boucle par les médias, car elle est décrétée politiquement correcte. Étant donné que, chez tous les animaux étudiés, la différence est très forte entre les cerveaux mâles et femelles, pour des raisons génétiques, il faudrait proposer un mécanisme particulier expliquant pourquoi et comment cette différence s’est effacée dans la lignée conduisant à l’espèce humaine.

À ma connaissance, il n’en existe aucun de crédible, parce qu’aucun n’a été proposé. Les cerveaux sont biologiquement différents vu que les forces sélectives agissant sur les mâles et sur les femelles ne sont pas les mêmes, ce qui fait que les comportements sélectionnés depuis des centaines de millions d’années sont, eux aussi, différents. Les contraintes et les enjeux liés à la reproduction des hommes et des femmes sont aussi différents, dans tous les groupes culturels connus. À la naissance, les nouveaux nés garçons et filles ont déjà des comportements différents, donc des cerveaux biologiquement différents.

Évidemment, l’environnement familial et social va aussi contribuer à augmenter ou atténuer ces différences, et le résultat sera une différence aux bases biologiques et culturelles. L’égalité sociale entre hommes et femmes peut évidemment se construire sans nier des différences biologiques, y compris dans les cerveaux. Ignorer ou nier une contribution biologique est une aberration, l’aveuglement idéologique ne peut conduire à rien de bon. »

Comment pourrait-on s’en sortir ?

Encore, et toujours, les meilleurs ennemis de l’obscurantisme sont l’éducation et l’information. Pour Charlotte Faurie, la vulgarisation doit être mise avant tout entre les mains des chercheurs, qui devraient « être incités à une implication dans des actions de vulgarisation, par une valorisation de ce travail par le CNRS et les universités (actuellement c’est plutôt considéré comme un loisir et/ou une perte de temps, qui doit être fait en dehors du temps de travail) ».

Quant aux journalistes, c’est en étroite collaboration avec les universitaires qu’ils devraient travailler, sans se contenter de « passer un coup de fil de dix minutes à un chercheur avant d’écrire à la va-vite et de publier sans relecture un article sur une question scientifique ».

Enfin, niveau éducation, Faurie et Raymond sont d’accord pour dire que « l’évolution et la biologie évolutive, y compris en ce qui concerne l’espèce humaine, doivent être enseignées dès le collège, afin de donner aux élèves des outils adéquats pour une véritable compréhension du monde biologique, de la même façon qu’on leur propose la gravité pour comprendre le monde physique ». Et en ce sens, ils s’inscrivent dans la droite ligne du prix Nobel François Jacob, pour qui « cela simplifierait beaucoup la compréhension des enfants si l’on commençait l’étude du monde vivant par l’étude de l’évolution ».

Il ne reste plus qu’à mettre tout cela en œuvre. Est-ce vraiment difficile ?

—-

[1] C’est ici une spécialité française et très signifiante que de souvent choisir des suffixes (-isme, -iste) marquant une couleur idéologique et politique (parle-t-on de physique quantiste?) pour mentionner les disciplines scientifiques nées avec Darwin. Pour ma part, j’insisterai toujours pour l’emploi de formules neutres comme « évolutionnaire » (la traduction est d’ailleurs plus fidèle à l’anglais « evolutionary ») ou « évolutif ».

[2] Auteur, entre autres, de deux ouvrages de vulgarisation bien malins dont je ne saurais que trop vous conseiller la lecture.

Voir également:

Le lait maternel s’adapte au sexe du bébé

Les Echos

15/02/14

Les mères produisent un lait différent selon qu’elles donnent naissance à un garçon ou à une fille, selon une étude britannique.

Il n’est pas rose ou bleu en fonction du sexe, mais sa constitution diffère : le lait des mères n’est pas le même selon qu’elles donnent naissance à un garçon ou à une fille, révèle une recherche publiée vendredi. « Les mères produisent des recettes biologiques différentes pour un garçon et pour une fille », a expliqué Katie Hinde, une biologiste de l’Université de Harvard. Des études sur des humains, des singes et d’autres mammifères ont révélé une variété de différences dans le contenu du lait et la quantité produite.

Ainsi les petits garçons ont du lait plus riche en graisse et en protéines donc énergétique tandis que les petites filles obtiennent de plus grande quantités de lait. Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer ce phénomène, a relevé Katie Hinde lors d’une présentation à la conférence annuelle de l’Association américaine pour l’avancement de la science (AAAS) réunie à Chicago du 13 au 17 février.

Accélerer le développement

Chez les singes rhésus par exemple, la femelle a tendance à produire plus de calcium dans son lait destiné à des progénitures femelles qui héritent du statut social de leur mère. « Cela permet aux mères de donner plus de lait à leurs filles ce qui va permettre d’accélerer leur développement pour commencer à se reproduire plus jeune », a expliqué la biologiste de l’évolution.

Les mâles n’ont pas besoin de parvenir à la maturité sexuelle aussi vite que les femelles car leur seule limite sur la fréquence de leur reproduction dépend du nombre de femelles qu’ils peuvent conquérir. Les femelles chez les singes sont nourries au lait maternel plus longtemps que les mâles qui passent plus de temps à jouer et qui ont de ce fait besoin d’un lait plus énergétique.

Mais on ne sait pas vraiment encore pourquoi chez les humains les mères produisent des laits différents pour leur nourrissons selon leur sexe, admet la scientifique. Il y a des indications montrant que tout est déjà programmé quand le bébé est encore dans le ventre de sa mère.

Améliorer le lait maternisé

Une étude de Katie Hinde publiée la semaine dernière montre que le sexe du foetus influence la production de lait des vaches longtemps après la séparation de leurs veaux, le plus souvent dans les heures après avoir mis bas. Cette recherche menée sur 1,49 million de vaches a montré qu’au cours de deux cycles de lactation de 305 jours, elles ont produite en moyenne 445 kilos en plus de lait quand elles donnaient naissances à des femelles comparativement à des mâles. Ces chercheurs n’ont pas non plus constaté de différences dans le contenu de protéines ou de graisse dans le lait produit pour une progéniture femelle ou mâle.

Comprendre les différences dans le lait maternel humain et l’impact sur le développement de l’enfant pourrait aider à améliorer les formules de lait pour enfant destinées aux mères n’allaitant pas. « Si la valeur nutritionnelle du lait maternel est bien reproduite dans les formules, les facteurs favorisant l’immunité du nourrisson ainsi que les signaux hormonaux sont absents », a expliqué la chercheuse.

Pouvoir mieux comprendre comment le lait est « personnalisé » selon chaque enfant permettrait également d’aider les hôpitaux à trouver du lait provenant du sein donné pour aider à mieux nourrir des enfants malades et nés prématurément, a-t-elle ajouté.

source AFP

Voir encore:

La subversion de l’identité

Elizabeth Montfort

Valeurs actuelles

03 février 2011

Avec la théorie du gender, une véritable déferlante s’abat sur la France et l’Europe, dans une indifférence quasi générale. En juin dernier, l’IEP de Paris annonçait un enseignement obligatoire sur les gender studies pour septembre 2011. Début janvier, l’IUFM de Nice organisait un colloque sur “Filles et garçons au sein de l’institution scolaire” avec une place de choix pour ces études.

Cette théorie née aux États-Unis s’est développée dans les années 1990. Mais c’est vraiment la 4e conférence mondiale sur les femmes, organisée par l’Onu en 1995, qui a imposé ce concept dans le vocabulaire international, largement relayé au Parlement européen. Cette théorie est une véritable révolution anthropologique dont l’objectif est de repenser les rapports homme-femme à partir d’une déconstruction de leur identité. Ce mouvement succède à deux courants féministes : l’égalitarisme où la femme prend comme modèle l’homme pour s’affranchir de sa domination, et le différentialisme qui exalte les différences entre les sexes au mépris de ce qui est commun, c’est la revendication des droits de la femme et la guerre des sexes. Ces deux courants avaient encore un aspect pratique car leur but était d’obtenir par la loi l’égalité des droits (droit de vote, égalité salariale…).

Avec la théorie du gender, un nouveau courant idéologique apparaît. Une partie des féministes radicales, notamment dans leur composante lesbienne, ne sont pas satisfaites de l’égalité des sexes et de la parité. Pour elles, l’égalité et la parité sont un leurre car elles supposent une distinction entre les sexes, synonyme d’inégalité et de la domination de l’homme sur la femme. Leur féminisme s’inspire d’un mélange de néomarxisme, de structuralisme et d’existentialisme : d’une part, la dialectique dominants-dominés ; d’autre part, la déconstruction des stéréotypes imposés par la culture. Admettre la différence des sexes, c’est admettre la complémentarité des sexes, la domination patriarcale, donc l’oppression et l’aliénation de la femme.

Chez Judith Butler, la grande théoricienne du gender, la définition du genre est une construction sociale et culturelle au service de cette domination. Son livre, traduit en 2005 en français, s’intitule Trouble dans le genre, pour un féminisme de la subversion. Judith Butler affirme vouloir penser ensemble « le féminisme et la subversion de l’identité ». En d’autres termes, elle entreprend de définir une politique féministe qui ne soit pas fondée sur l’identité féminine et précise, dans son introduction, son objectif : déstabiliser « l’hétérosexualité obligatoire » pour repenser l’organisation sociale selon les modèles homosexuels et transsexuels. L’hétérosexualité sert la domination de l’homme. Il faut y mettre fin en supprimant les concepts d’homme et de femme et imposer un nouveau genre fondé sur les orientations sexuelles et non sur l’identité sexuelle : « Les femmes ne seraient pas opprimées s’il n’existait pas un concept de femme. »

Le deuxième point d’appui de la théorie, c’est l’opposition entre nature et culture. La société de la personne capable de créer des relations avec son semblable est remplacée par la société de l’individu qui se choisit ses vérités, ses intérêts et ses plaisirs. L’individu postmoderne doit se créer lui-même. C’est son droit le plus fondamental : « le droit à être moi ». Or la nature lui impose d’être homme ou femme. Accepter cette dictature, c’est refuser d’être libre. Se considérer comme homme ou femme, c’est refuser de se construire soi-même. Et pour la femme, c’est refuser de s’affranchir de la domination de l’homme. Ainsi, l’individu serait mieux caractérisé par son orientation sexuelle choisie que par son identité sexuelle comme donnée biologique, donc de nature.

On entrevoit aisément les conséquences de cette idéologie pour notre vie sociale. Après avoir déconstruit la différence sexuelle, il est nécessaire de déconstruire le couple, la famille et la reproduction. Pour les gender feminists, le couple doit être choisi. La famille fondée sur le mariage monogamique, comme survivance de la domination de l’hétérosexualité, devient polymorphe (bi, pluri, homo, monoparentalité…). La filiation se décline : filiation biologique, intentionnelle, juridique, sociale. L’individu fait son choix dans ce grand marché libertaire. Et enfin, la reproduction doit évoluer. Les techniques permettent une reproduction asexuée (AMP, mères porteuses, utérus artificiel…) et les révisions des lois de bioéthique sont une opportunité pour obtenir satisfaction. Dans ce grand bouleversement, la loi enregistre les revendications individuelles et crée de nouveaux droits arbitraires et déconnectés du bien commun et de la stabilité de notre communauté humaine.

Il est urgent de réagir. C’est la mission que s’est donnée l’Alliance pour un nouveau féminisme européen : analyser et informer pour construire une société pacifiée, fondée sur le respect et la coopération plutôt que sur la rivalité et la compétition. Il s’agit bien de nouveaux rapports entre les hommes et les femmes, égaux en droits et d’une égale dignité.

Elizabeth Montfort, ancien député européen, présidente de l’Alliance pour un nouveau féminisme européen

Voir par ailleurs:

Boys and Girls May Get Different Breast Milk

Milk composition differs based on a baby’s sex and a mother’s wealth

Marissa Fessenden

Scientific American

Nov 13, 2012

mother with babies, breast milk, breastfeeding

Thomas Fuchs

Mother’s milk may be the first food, but it is not created equal. In humans and other mammals, researchers have found that milk composition changes depending on the infant’s gender and on whether conditions are good or bad. Understanding those differences can give scientists insights into human evolution.

Researchers at Michigan State University and other institutions found that among 72 mothers in rural Kenya, women with sons generally gave richer milk (2.8 percent fat compared with 0.6 percent for daughters).* Poor women, however, favored daughters with creamier milk (2.6 versus 2.3 percent). These findings, published in the American Journal of Physical Anthropology in September, echo previous work that showed milk composition varying with infant gender in gray seals and red deer and with infant gender and the mother’s condition in rhesus macaques. The new study also follows findings that affluent, well-nourished moms in Massachusetts produced more energy-dense milk for male infants.

Together the studies provide support for a 40-year-old theory in evolutionary biology. The Trivers-Willard hypothesis states that natural selection favors parental investment in daughters when times are hard and in sons when times are easy. The imbalance should be greatest in polygamous societies, in which men can father offspring with multiple wives, such as the Kenyan villages. In those societies, a son can grow to be a strong, popular male with many wives and children, or he can end up with neither. Well-off parents who can afford to invest in sons should do so because their gamble could give them many grandchildren. Conversely, poor parents should not heavily invest in sons because it is unlikely to pay off—their offspring start at the bottom of the socioeconomic ladder. For those families, daughters are a safer bet because as long as they survive to adulthood, they are likely to produce young.

The new study is “exciting and enthralling,” says Robert Trivers, an evolutionary biologist at Rutgers University and co-author of the hypothesis, who was not involved in the recent work. “It is a Trivers-Willard effect I wouldn’t have the guts to predict.”

Even beyond fat and protein, other milk components might vary in humans, says Katie Hinde, an assistant professor in human evolutionary biology at Harvard University. She has found higher levels of cortisol, a hormone that regulates metabolism, in rhesus macaque milk for male infants. Her work shows that milk differences could change infant behavior and might affect growth and development. “Only half the story is what the mom’s producing,” Hinde says. “The other [half] is how the infant uses the milk.” These findings could have implications for formula, which could be tweaked to optimize development for both boys and girls.

Voir aussi:

Le livre jeunesse « Tous à poil » est-il recommandé aux enseignants ? La présentation tronquée de Vincent Peillon

Delphine Legouté

Le Lab/Europe 1

10/02/14

Il le soutient mais ne veut pas en endosser la responsabilité. Après les attaques de Jean-François Copé le 9 février au sujet d’un ouvrage intitulé Tous à poil et recommandé selon lui aux enseignants des classes de primaire, Vincent Peillon a fait venir la presse à la dernière minute dans son ministère ce 10 février pour riposter.

Son argumentaire tient en deux points : 1) il n’a rien à redire sur le contenu de cet ouvrage et 2) le livre n’est de toutes façons que la recommandation d’une lointaine association ardéchoise.

Le ministre de l’Education nationale prend en effet toutes ses distances avec Tous à poil en le décrivant ainsi :

Il y a un livre recommandé par une association de lecture de la Drôme et de l’Ardèche, dans une liste d’une centaine d’ouvrages pour enfants qui existe depuis des années. (…)

Il y a beaucoup de parents dans cette association. (…)

Ce sont des associations qui justement cherchent à développer la lecture, font un travail avec les enfants et les parents et recommandent un certain nombre d’ouvrages.

Ces livres sont des livres d’éditeur dont on peut faire un usage pédagogique, ensuite c’est au libre choix des enseignants de le faire ou pas.

Et ajoute :

Si on commence à faire ça sur l’ensemble de ce que les associations de parents ou de lectures peuvent faire en France, on va partir dans une inquisition qui sera tout à fait regrettable.

Factuellement, le ministre a raison. Tous à poil fait partie d’une liste de 92 albums jeunesse recommandés par L’Atelier des Merveilles, association du Teil, en Ardèche, qui établit ces listes avec des familles depuis 2009. Le livre en question a été ajouté en 2012.

Les missions départementales aux droits des femmes et à l’égalité ont soutenu la création de cette liste qui a fini par être diffusée par le Centre régional de documentation pédagogique de l’Académie de Grenoble.

Comme l’indique Vincent Peillon, les listes diffusées par ce centre font office de recommandations que les enseignants sont libres de suivre, ou pas.

Mais la présentation du ministre ne va pas jusqu’au bout. Vincent Peillon semble en effet vouloir cantonner à un niveau local, et presque anecdotique, ce qui a été récemment diffusé à une échelle nationale via les ABCD de l’égalité.

Ces derniers, qui proposent des ressources aux enseignants pour mieux appréhender les inégalités filles-garçons dès la maternelle, reprennent les bibliographies diffusées par six académies.

Celle de l’Ardèche avec Tous à Poil en fait partie, au milieu de six autres listes tout aussi fournies. On peut concrètement trouver un lien vers cette liste dans la rubrique « outils pédagogiques » du site des ABCD de l’égalité – décrit comme le site de référence par le gouvernement – en se rendant dans la sous-partie « littérature jeunesse ».

Notons que, le nom de domaine ayant migré, le lien n’est plus valide sur le site officiel. Voici la nouvelle adresse de la bibliographie qui se présente ainsi :

Bref, comme le relève Le Monde, Tous à poil n’est présent sur aucune liste de livres officiellement proposés aux enseignants et la constitution de la liste est particulièrement singulière puisqu’elle a été réalisée par les parents d’élève d’une association. En revanche, l’ouvrage a bien été promu sur un site institutionnel national à la faveur des ABCD de l’égalité.

Interrogé à ce sujet par le Lab ce 10 février, Vincent Peillon n’a pas caché la promotion par les ABCD de l’égalité de cette liste d’une « association de lecture dans la Drôme et l’Ardèche ».

Il a tenu à préciser que ces programmes n’étaient pas nouveaux et que les remettre en question serait néfaste pour le travail sur les stéréotypes :

– Le Lab : Reconnaissez-vous que cet ouvrage est recommandé, parmi d’autres, par le site des ABCD de l’égalité ?

– Vincent Peillon : Absolument. C’était d’ailleurs en 2009 déjà une recommandation des personnes qui travaillent à la lutte contre les stéréotypes.

Il ne faudrait pas que l’on mette en question– car c’est ce qui se cache derrière tout ça – la nécessité de faire un travail entre les hommes et les femmes. Ce n’est pas nier les différences mais au contraire les reconnaître et considérer qu’elles ne doivent pas empêcher certains d’avoir accès à un certain nombre de métiers.

Sans rentrer dans le débat sur le contenu de l’ouvrage (en quoi montrer des dessins de personnes se déshabillant à des enfants est-il un problème, en fait ?), l’information donnée par Jean-François Copé le 9 février sur RTL n’est donc pas factuellement inexacte. Amplifiée mais pas inexacte. Tous à poil fait bien partie des livres que les ABCD de l’égalité voient d’un bon œil et conseillent aux enseignants qui seraient intéressés.

Une première pour l’UMP qui multiplie depuis quelques jours les fausses rumeurs telle que l’existence d’un document promouvant la théorie du genre que le gouvernement voudrait cacher (document pourtant diffusé dans un premier temps par l’UMP au pouvoir) ou la diffusion de films à des enfants de primaire montrant des scènes de sexe entre personnes homosexuelles, affirmation intégralement fausse.

Voir enfin:

François Hollande à TÊTU: « Les libertés, elles s’arrachent toujours »

ÉVÉNEMENT. A une semaine du second tout de l’élection présidentielle, TÊTU.com* publie l’nterview accordée par François Hollande au magazine TÊTU le mois dernier.

Propos recueillis pour le numéro d’avril du magazine TÊTU, mis en vente le 21 mars 2012.

TÊTU : Le 23 février dernier, un auditeur de France Inter vous a interpellé pour savoir s’il pourrait se marier avec son compagnon d’ici à la fin de l’année. Quel sera votre calendrier concernant l’ouverture aux homosexuels du mariage et de l’adoption ?

Au plus tard au printemps 2013. _ Pourquoi cette date  ? Parce que je sais que les premiers mois de la session parlementaire vont être essentiellement consacrés aux éléments de programmation financière, donc je préfère être honnête  : si on veut un bon débat, mieux vaut qu’il puisse commencer au début de l’année 2013 et se terminer au printemps. Le printemps, ce n’est pas une mauvaise saison pour se marier  ! [Sourire.]

Lors des primaires socialistes, vous aviez confié «  en off  » lors d’une interview à Libération  : «  Attention, ce ne sera pas simple de faire passer ces textes.  »

Oui, et je continue de le dire. Vous avez vu ce qu’a dit le candidat sortant dans Le Figaro Magazine  ?

Si l’on songe que la droite n’a jamais accepté le pacs durant de nombreuses années…

Concevoir qu’elle accepte maintenant facilement le mariage pour les homosexuels, c’est une vue de l’esprit.

Aucune loi de conquête n’a été arrachée sans combat parlementaire mais aussi citoyen, et c’est bien qu’il en soit ainsi. Les libertés, elles s’arrachent toujours.

Vous escomptez donc que ce projet rassemble au-delà d’une majorité de gauche  ?

Je le souhaite  ! Pour le pacs, à part quelques parlementaires courageux, dont madame Bachelot, nous n’avions eu guère de soutien.

Après, des regrets ont été exprimés, y compris de la part de Nicolas Sarkozy, qui en a fait le reproche à ses propres amis. Je n’ai pas le sentiment qu’il soit aujourd’hui dans la même philosophie…

La droite est très offensive sur le sujet, mais en même temps 63 % des Français soutiennent l’ouverture du mariage aux couples de même sexe. On peut se demander si ce ne sont pas les responsables politiques qui sont en retard par rapport aux évolutions de la société…

Ça peut arriver que la politique soit en retard par rapport à la société. L’inverse aussi. Mais il y a des minorités qui sont très agissantes.

Il y a des forces culturelles, spirituelles, qui vont également se mettre en mouvement.

Regardez ce qui se passe en Espagne avec la volonté du gouvernement conservateur de Mariano Rajoy de revenir sur la loi du gouvernement Zapatero qui a ouvert le mariage.

Mais je ne redoute rien, dès lors qu’il y a une volonté, la nôtre, et une compréhension affichée par une majorité de Français.

C’est un droit reconnu par de nombreux pays européens, nous ferons donc cette évolution tranquillement. Avec le souci de convaincre et de faire avancer la société française.

Nicolas Sarkozy justifie son opposition à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe au nom, dit-il, des « valeurs », et il expliquait dans Le Figaro

Magazine que  : « En ces temps troublés où notre société a besoin de repères, je ne crois pas qu’il faille brouiller l’image de cette institution sociale qu’est le mariage.  » Que vous inspirent ces propos  ?

Le mariage, au contraire, sera consacré s’il est ouvert à tous. Il sera même renforcé  ! Ceux qui sont attachés au mariage doivent se féliciter de voir que des couples homosexuels comme hétérosexuels se battent pour qu’il soit ouvert à tous.

Actuellement à l’Assemblée nationale, il n’y a qu’un seul député ouvertement gay, Franck Riester, de l’UMP, qui a fait son coming out récemment. On n’en compte aucun dans les rangs de gauche. Comment l’expliquez-vous  ?

Bertrand Delanoë avait fait ce choix avant sa première candidature à la mairie de Paris…

Mais Bertrand Delanoë reste un peu seul…

Je me souviens aussi qu’André Labarrère [ancien maire de Pau, décédé en 2006] l’avait fait, et avec quel fracas  ! [Sourire.] Après, c’est une affaire personnelle.

C’est une décision personnelle, mais ne dépend-elle pas, aussi, du climat dans lequel les élus ou les militants évoluent dans leur famille politique  ?

Oui, mais au PS, cette question n’a jamais fait débat… Et n’a jamais conduit à préférer une candidature plutôt qu’une autre.

Globalement, ne trouvez-vous pas que les partis politiques français ont des difficultés pour intégrer les minorités, les différences  ?

Cela a pu être vrai. Ça l’est beaucoup moins aujourd’hui.

À gauche, les partis sont tout à fait conscients que la société est diverse et que c’est un facteur de richesse.

Au sujet des débats sur le pacs puis le mariage, beaucoup de militants se sont mobilisés qui n’étaient pas homosexuels, et c’est très bien.

De la même manière, le combat pour le pacs est venu de groupes réunis au nom de l’idée républicaine d’égalité.

Il ne faut surtout pas réduire le mariage ouvert à tous à une revendication portée par les seuls homosexuels.

Plusieurs enquêtes montrent que jusqu’à 20 % des gays et lesbiennes seraient prêts à voter pour Marine Le Pen…

Cette intention peut surprendre. Mais cela vaut pour tous les citoyens. Pourquoi y a-t-il des Français qui ont le sentiment d’être abandonnés, délaissés, méprisés, stigmatisés, discriminés, et qui ont envie d’un cri de colère en le poussant de la pire des façons à mes yeux  ?

Et ne pensez-vous pas que certains partis réactionnaires développent des discours démagogiques et clivants en direction des gays et des lesbiennes, en agitant notamment la peur de l’islam  ?

En Europe du Nord, la crainte d’un islam fondamentaliste ouvertement hostile aux libertés a pu conduire certains vers des votes extrémistes.

Il y a eu cette instrumentalisation.

Aux homosexuels qui, ici, peuvent avoir la même crainte, je dis que c’est la laïcité qui les protégera. Je fais de la laïcité un élément majeur de mon projet.

La laïcité, c’est à la fois la liberté de conscience, la liberté religieuse et la garantie de la liberté  : liberté de vie personnelle, égalité homme-femme et orientation sexuelle pleinement assumée.

Je ne lâcherai rien là-dessus. Sinon, cela ferait effectivement le jeu d’une extrême droite qui a toujours stigmatisé les homosexuels, une extrême droite qui les a moqués, les a parfois pourchassés. Ce serait un comble que, pour être protégé d’une dérive fondamentaliste, on se réfugie dans une dérive antirépublicaine.

Êtes-vous favorable à l’ouverture de la procréation médicale assistée (PMA) aux couples de lesbiennes  ?

Oui, je l’ai dit. Aux conditions d’âge, bien sûr. Je suis très précis là-dessus. Il faut que ce soit un projet parental.

Et je suis aussi très soucieux du respect de l’anonymat du don des gamètes. En revanche, je suis hostile à la gestation pour autrui, la GPA.

Seriez-vous néanmoins favorable à la reconnaissance des enfants nés par GPA à l’étranger  ?

Vous imaginez bien que si j’ouvrais cette question-là, ça pourrait être finalement une facilité donnée à la gestation pour autrui. Et seul compte le droit de l’enfant.

Justement, des enfants nés ainsi se retrouvent actuellement en difficulté…

Je sais bien, et donc ce débat devra avoir lieu, mais il ne doit en aucun cas être considéré comme une façon d’accepter la marchandisation du corps.

Sur un autre point important, concernant le droit des personnes trans, quelles sont vos propositions ?

Je connais ce problème, des détresses immenses et parfois des suicides m’ont été signalés. Il faut également lutter contre cette discrimination-là.

Je suis pour la rectification de l’état civil lorsqu’il y a eu changement de sexe. Et également pour l’accès aux soins.

C’est-à-dire forcément une chirurgie  ?

Pas nécessairement. C’est un processus qui peut, dans certaines hypothèses, être distinct du parcours médical accompagnant la transition vers l’autre sexe. C’est le sens des recommandations du Conseil de l’Europe notamment.

Et des expertises psychologiques  ?

Oui. Ensuite, sur l’accès aux soins – car beaucoup de trans s’engagent dans un parcours médicalisé –, la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Il conviendra de la corriger.

Êtes-vous pour un remboursement par la Sécurité sociale ?

Pour partie. Il n’y a pas de raison de donner une gratuité totale à ce qui est un choix individuel.

Quelles sont, au-delà des incantations, vos propositions concrètes pour lutter contre l’homophobie  ?

Les grands principes comptent, déjà. D’abord commençons par l’école, car c’est là aussi que beaucoup se joue et que des personnes homosexuelles peuvent toute leur vie durant porter un fardeau fait d’humiliations, de mépris, de méconnaissances.

À quel âge pensez-vous que cela doit commencer  ?

Au collège, parce que c’est à ce moment-là que ces questions se posent pour les adolescents.

Le dessin animé Le Baiser de la Lune, qui mettait en scène une histoire d’amour entre deux poissons de même sexe et était destiné aux classes de primaire, avait déclenché une polémique…

Oui, je me souviens. Je veux rétablir la formation des enseignants.

C’est très important qu’ils puissent savoir, aussi bien en primaire qu’au second degré, ce qu’il est possible de dire aux enfants.

On ne parle pas de la même manière à un enfant en primaire, où la connotation sexuelle n’est pas du tout présente, qu’en secondaire, où elle commence à apparaître.

C’est une forme à la fois d’enseignement de la réalité, et en même temps de pédagogie qui appelle de la sensibilité.

Les clichés, les insultes homophobes commencent très jeune, bien avant la sexualité…

Oui, c’est vrai. La lutte contre les clichés peut commencer très vite.

Il y aussi la situation dans le monde du travail qui doit être améliorée.

Le rôle des syndicats, des assistantes sociales et des médecins du travail, est très important.

Face à la polémique menée par la Droite populaire et des associations catholiques contre l’introduction des questions de genre dans les manuels scolaires de classe de première, le ministre Luc Chatel a tenu bon.

C’est bien qu’il ait tenu. C’était une offensive très idéologique, car elle niait même le fait qu’il existe des genres  ! Donc, poursuivons ce mouvement de sensibilisation avec tous les moyens utiles.

Vous avez fait de la jeunesse un des axes centraux de votre campagne. Que proposez-vous pour améliorer l’autonomie des jeunes adultes  ?

Des enquêtes ont démontré une surreprésentation des jeunes LGBT dans les populations en errance…

Effectivement, parfois des ruptures familiales peuvent avoir lieu beaucoup plus tôt encore que pour d’autres jeunes.

Et la recherche de logement devient la première préoccupation, car c’est une difficulté de plus pour une personne seule ou vivant en couple homosexuel.

Je suis favorable à un système de mutualisation des cautions, de façon que de plus en plus de jeunes ne puissent pas être empêchés de fonder un couple ou d’accéder à l’autonomie.

Deuxièmement, je souhaite que les jeunes puissent rentrer plus tôt dans l’emploi, c’est mon idée de «  contrat de génération  ».

Qu’il puisse y avoir, entre un senior et un jeune, une transmission d’expérience, et un soutien à l’employeur qui permettra à un jeune de rentrer dans le monde du travail en bénéficiant d’un CDI.

Enfin, je suis pour des parcours d’insertion, des systèmes de bourse, des contrats d’autonomie, qui puissent ouvrir des formations à ces jeunes.

Enfin, je suis très préoccupé par la déscolarisation de certains qui partent très tôt de chez leurs parents.

C’est la raison pour laquelle j’ai pris l’engagement qu’aucun jeune entre 16 et 18 ans ne se retrouve sans solution.

Le service civique peut en fournir une, par exemple. Que les jeunes ne se retrouvent pas dans la rue et dans la désespérance.

L’éducation sexuelle reste focalisée sur la reproduction. N’est-ce pas réducteur ?

L’éducation aux risques est une absolue nécessité. Elle a été relâchée ces dernières années. Le sida se diffuse encore, notamment chez les homosexuels. Malheureusement, l’idée que le fléau a été enrayé fait qu’il y a plus d’imprudences. Nous devons donner les éléments qui permettent à chacun d’avoir sa sexualité sans se faire contaminer un jour. Il y a toujours eu une réticence des pouvoirs publics en France à faire des campagnes de prévention VIH ciblées sur les populations homos… Je ne partage pas cette réticence qui peut être fondée sur de bons motifs de non discrimination… Mais dès lors que le risque est plus grand dans les populations homosexuelles masculines, mieux vaut le dire, parce que des jeunes peuvent l’ignorer encore.

Est-ce que vous imposeriez aux médecins généralistes l’utilisation des tests de dépistage rapides  ? Que prévoyez-vous concernant une possible généralisation de ces tests, comme en Espagne dans les pharmacies  ? Et troisièmement, allez-vous appliquer le «  plan sida  » proposé par Roselyne Bachelot, qui a promis un financement de 1,08 milliard d’euros, vu les circonstances budgétaires ?

En matière de prévention, le rôle des associations est déterminant. Je veux saluer ici tout ce qu’engagent Act Up, Aides, Sida Info Service…

Car ce sont elles qui permettent aujourd’hui de diffuser le dépistage, de donner l’information et d’accueillir. Le dépistage doit être généralisé. J’ai participé à une opération de cars de dépistage – c’était Aides qui l’organisait –, qui se rendaient au plus près de la vie des Français pour leur proposer ce test qui est très simple. À chaque fois qu’il y a une inquiétude, mieux vaut aller faire le test que de continuer à porter cette interrogation. Enfin, je suis attentif à certaines populations qui sont plus exposées, les personnes dans les prisons, où il est nécessaire de renforcer les dispositifs de dépistage, et les populations migrantes, notamment les sans-papiers qui, par crainte de se faire connaître, peuvent ne pas se faire dépister ou soigner. Je suis pour le retour de l’aide médicale d’État, l’AME, qui nous permettra, nous citoyens français ou résidents réguliers, d’être protégés plutôt que d’être exposés.

La situation aux Antilles vous paraît-elle préoccupante  ? Oui, à plus d’un titre  : 60 % des jeunes au chômage, vie chère, violence qui s’est aggravée dans les régions d’outre-mer, et encore des préjugés nombreux par rapport aux orientations sexuelles.

Vous évoquez l’AME, quelles seront vos priorités concernant la politique de santé  ? Comptez-vous abolir les franchises médicales  ? Je suis conscient que nous devons maîtriser les comptes publics et sociaux, et en même temps, l’hôpital public doit être renforcé dans ses missions. La médecine de ville doit mieux travailler à la fois avec l’hôpital et avec les autres professions de santé. Il est légitime de mieux rémunérer les médecins. Sur les franchises, nous en discuterons car nous avons plusieurs problèmes à régler  : problèmes de dépassement d’honoraires, les mutuelles qui ont été taxées, les franchises, le prix des médicaments…

Au niveau international, quels sont vos engagements pour faciliter l’accès aux traitements dans les pays pauvres ?

Je suis favorable aux médicaments génériques. Nous avons besoin d’une politique internationale sur ce sujet.

Nous sommes tous concernés, quand un virus se développe dans une partie de la planète, nous finissons par être touchés.

Autre point important, la dépénalisation de l’homosexualité dans tous les pays du monde, c’est un enjeu essentiel en matière des droits de la personne.

Que pensez-vous de la proposition du Premier ministre britannique David Cameron de conditionner l’aide au développement au respect de tous les droits humains, y compris le respect des minorités LGBT  ?

C’est un bon principe. Là encore, ça dépasse les frontières nationales et idéologiques.

Sans mettre en cause les règles de chacun de ces pays, car en définitive, nous ne leur demandons rien d’autre que de lever une pénalisation qui est tout à fait inadmissible puisqu’elle est fondée sur la négation d’une liberté. Nous devons être fermes sur ce principe-là.

Y aura-t-il une action diplomatique à l’ONU, comme l’ont fait Nicolas Sarkozy et Rama Yade  ?

Nous n’aurons pas de mal à aller plus loin que ce qu’a fait Nicolas Sarkozy. Ce qu’il a commencé et pas terminé, nous l’amplifierons et j’espère que nous l’achèverons jusqu’à essayer de faire voter une résolution.

Au printemps dernier, Arnaud Montebourg nous expliquait qu’il ne faisait pas «  de l’identification des questions sociétales l’enjeu majeur de l’élection présidentielle  », sa priorité étant «  d’apporter de nouvelles propositions pour transformer l’économie  ». Séparer ces enjeux n’est-ce pas en réalité une erreur  ?

Moi, je suis pour le progrès. Pour qu’une élection présidentielle puisse faire avancer la France. Puisque nous sommes confrontés à un choix, que cela soit celui qui nous donne la fierté de vivre ensemble, c’est mon ambition.

Qu’au bout de cinq ans, nous soyons encore plus fiers d’être Français que nous ne le sommes aujourd’hui.

Comment y parvenir  ? D’abord en permettant à tous nos concitoyens de travailler, d’être autonomes, de pouvoir accéder à de meilleures conditions au logement, d’être mieux soignés.

Et le progrès, c’est aussi vivre en plus grande liberté, en plus grande sécurité, en plus grande sûreté, en harmonie. Et parmi ces progrès, il y a la reconnaissance de droits qui peuvent être une meilleure protection à l’égard d’un certain nombre de risques, que cela soit des risques sanitaires ou de violence. Je disais combien la laïcité et la liberté devaient être protégées, ce qui suppose de lutter contre toutes violences.

Une société avance globalement. Les plus belles périodes de notre histoire sont celles où les conquêtes ont été multiples  : économiques, sociales, sociétales.

Je veux remettre le pays en mouvement pour que chacun se sente partie prenante. Les Français n’accepteront pas tout ce que je proposerai, mais dès lors qu’ils verront le but, qui est l’harmonie, la réconciliation, le rassemblement, ils y participeront.

* Têtu, le site du magazine gay ( sic).

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pierre Reignier.

En librairie à partir du 8 septembre.

5 Responses to Théorie du genre: Attention, un angélisme peut en cacher un autre (No sex differences, please, we’re socialists)

  1. […] aussi fondamentale pour une société que celle du mariage et avant probablement celle de la génération à coup d’adoption homosexuelle, gestation assistée et théorie du genre à l’école […]

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