Gastronomie: Scoop, la fondue ne serait pas savoyarde!

Swiss FondueGonflés, quand même, ces Suisses!

Petite découverte sur l’excellent blog un swiss roll (qui cite le quotidien suisse Le Matin), la fondue ne serait pas… savoyarde!

Et donc en fait pas… italienne – la Savoie étant, on le sait, « italienne » (ou plutôt sarde) avant sa cession à la France (avec Nice) en 1860, même si elle eut un épisode français entre la Révolution et la fin du 1er Empire et que les populations y ont toujours été apparemment largement francophones …?

Pourtant, le « plat national suisse » ne se retrouve-t-il pas dans toute la région et donc à cheval sur les trois pays alpins, à savoir la Suisse, la France (Savoie) et l’Italie (Vallée d’Aoste et Piémont)?

Mais, pire encore, la fondue ne serait pas un plat typique et millénaire de montagnards (qui n’en avait tout simplement pas les moyens) mais (comme pour le beaujolais) le produit d’une vulgaire opération de marketing (destinée aux bourgeois des villes) de l’Union suisse des fromagers des années 30!

En tout cas, les Suisses (ou du moins les Bullois) ont bien de la chance, d’avoir pu écouter une si alléchante conférence avant-hier soir au Musée gruérien de Bulle (la capitale du gruyère) par l’ethnologue Isabelle Raboud-Schüle (« Comment la fondue vint aux Suisses: petite histoire d’un plat national »).

Mais le Centre culturel suisse pourrait peut-être nous la faire venir à Paris ?

Et même en bonus, elle pourrait nous parler de… l’invention du steak-frites ?

Ou plutôt du… couscous?

Et pourquoi pas aussi de ces autres et oubliés maitres à manger du monde que sont nos chers voisins suisses?

Qui, en plus des réformateurs (Zwingli), humanistes (Henri Dunant), théologiens (Hans Küng, Karl Barth), psychologues et pédagogues (Jung, Rorschach, Piaget), diététiciens (Bircher-Benner, le Kellogg suisse), linguistes (Saussure), écrivains (Mme de Stael, Benjamin Constant, Rousseau, Cendrars, Albert Cohen), historiens (Jacob Burckhardt), musiciens (Arthur Honneger), peintres et sculpteurs (Vallotton, Klee, Giacometti, Tinguely), architectes (Le Corbusier), sociologue (Jean Ziegler?), révolutionnaires (Marat?), financiers (Necker), stratèges (Jomini), hôteliers (Ritz), constructeurs automobiles (Chevrolet), cinéastes et acteurs (Godard, Ursula Andres), chanteurs (Stephan Eicher, Henri Dès, Patrick Juvet ?), blogueurs (Monnerat, Mairet, Leupin, Sisyphe, un swissroll), sans parler des innombrables et plus ou moins volontaires résidents ou naturalisés (Calvin, Voltaire, Napoléon III, les Dada, Lénine?, Einstein, Alain Delon, Johnny Halliday?) et des légendaires (Guillaume Tell) …

Nous ont donné et au monde tous ces mots magiques et ces saveurs qui ont bercé les enfances et adolescences de tant d’entre nous, Français (ou de nos parents ou grands-parents, et en tout cas du petit savoyard d’adoption que j’ai été)?

Nestlé (petit nid en allemand – ah ! les fameux tubes de lait condensé), Suchard, Lindt, Cailler, Milka (Milch und Kakao), Toblerone (avec ses petits prismes en forme de Mont Cervin), Nescafé (NEStlé CAFE, lancé par une crise de surpoduction de café brésilien, relancé par les GI’s en 44), Ovomaltine, Ricola et Sugus (bonbons), Rivella (boisson gazeuse), sans parler du célébrissime Birchermuesli et des fameux Bouillons Kub Maggi


La fondue: un coup marketing de 1930!

BULLE (FR) D’où vient la fondue? Qui la mangeait? Depuis quand? L’ethnologue Isabelle Raboud-Schüle brise le mythe
FABIAN MUHIEDDINE
Le Matin
27 mars 2007

Aujourd’hui, on a l’impression que la fondue est aussi vieille que la Suisse. Pour peu, on imaginerait les trois Suisses signataires du pacte de 1291 en train de partager une fondue sur le Grütli… Il n’en est rien, la fondue telle que nous la connaissons aujourd’hui ne date que des années 1930! L’ethnologue Isabelle Raboud-Schüle, valaisanne d’origine, actuellement cheffe du Musée gruérien à Bulle (FR), a planché sur la question. Voici donc la véritable histoire du plat national suisse.

Les origines
Le fait de faire fondre du fromage (on ne parle pas encore de fondue, un mélange de vin de fromage) est une habitude aussi vieille que le fromage. On trouve déjà des traces écrites de cette pratique dans «L’Illiade»!

La plus vielle fondue… est zurichoise!
La trace de la première recette d’un mélange de vin et de fromage en Suisse date de 1699. Et n’en déplaise aux Romands, elle a été écrite par une Zurichoise!Qui a inventé la fondue?
«Personne», insiste Isabelle Raboud-Schüle. Il ne faut pas imaginer une erreur de manipulation qui a conduit à une découverte géniale. Il existait plusieurs recettes qui circulaient et finalement une l’a emporté. C’est comme le mythe des soeurs Tatin, qui troublées par l’arrivée d’un visiteur de dernière minute, auraient confectionné leur tarte à l’envers. En fait, on sait que dans la région beaucoup de gens préparaient les tartes de la sorte.

Un plat de montagnards?
Absolument pas! A l’époque, le fromage gras, comme le gruyère était cher, un vrai produit de luxe qui s’exportait à Lyon ou à Turin… Les montagnards ne pouvaient se permettre de manger ce précieux gagne-pain. La fondue était donc un plat urbain et bourgeois. La fondue est d’abord citée en premier comme neuchâteloise, puis comme vaudoise.

50 grammes par personne!
Aujourd’hui, on calcule une portion de 250 grammes par personne. A l’époque, les livres de cuisine parlaient de 5 fois moins de fromage. Il faut savoir que les recettes compensaient le manque de fromage par des oeufs qui servaient d’ailleurs de liant.

Un coup marketing des années 30
Dans les années de l’entre-deux-guerres, l’Union suisse des fromagers a voulu relancer la consommation des fromages suisses. C’est alors que la recette de la fondue s’est figée. Jusqu’à cette époque, la fondue n’était vraiment connue qu’en Suisse romande. Voire en France. L’association envoyait même carrément à l’armée et au ski club des sets entiers de caquelons à fondue en expliquant aux fourriers que c’est vite fait et que les soldats adorent.

Une affaire d’hommes
Dans beaucoup de familles suisses, c’est l’homme qui prépare la fondue. «C’est comme pour le barbecue ou les grillades, ce n’est pas vraiment de la cuisine, explique l’ethnologue, on est dans un autre registre. Traditionnellement, ça vient peut-être d’un rapport particulier à la gestion du feu.»

Le caquelon
Aujourd’hui, le caquelon est intimement lié à la fondue. Mais à l’époque, cette casserole en terre cuite était simplement l’ustensile de base dans une cuisine. Les premières recettes ne citent pas le caquelon mais indiquent tout naturellement qu’il faut servir chaud. On utilisait des braises en guise de réchaud.

Remuer en formant un huit ou dans le sens contraire des aiguilles d’une montre.
Encore un mythe! « Les livres de cuisine donnent le même genre d’astuces pour la mayonnaise… C’est simplement une façon ingénieuse de transmettre qu’il faut remuer délicatement et sans oublier les bords. »

Fondue et coca-cola
Traditionnellement, avec la fondue, il faut boire du thé ou du vin au risque qu’une boule de fromage se forme dans le ventre. Pourtant, tous les jours, des touristes commandent des cocas dans les stations de ski. «Et personne n’en est jamais mort! C’est simplement une façon de dire, on mange local et donc on boit local!»

Pour les enfants
«Aucun problème! On fera simplement bouillir le vin pour que l’alcool s’évapore et on évitera de rajouter le kirsch.»

Et les étrangers?
«Sans tomber dans le cliché du film «Les faiseurs de Suisses», c’est un passage obligé, un rite initiatique. Quand un Suisse reçoit un étranger, il n’hésite pas à préparer la fondue. Pourtant, il sait que c’est un plat spécial et que beaucoup risquent de ne pas apprécier.»

L’avenir?
Aujourd’hui, on trouve pleins de nouvelles fondues et autres bizarreries: la fondue au chèvre, la portion individuelle à mettre au micro-ondes, la fondue où le pain est remplacé par des légumes… «Toutes ces nouveautés prouvent qu’il s’agit d’une tradition vivante et donc en perpétuel changement. Laissons l’histoire décider de ce qui restera!

Conférence publique
Isabelle Raboud-Schüle donne une conférence «Comment la fondue vint aux Suisses: petite histoire d’un plat national» demain 29 mars à 20h à la grande salle des Halles, Bulle.

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