Gastronomie: L’invention de la grammaire de l’estomac (How the French became the world’s dining masters)

Résultat de recherche d'images pour "omelette aux huitres alexandre dumas"Après la révolution française, observe Marx, les aristocrates dont tout le capital incorporé consistait en un art de vivre désormais dépourvu de marché, devinrent les maitres à danser de l’Europe. Bourdieu
Tout le monde n’est pas gourmet, voilà pourquoi il faut des gastronomes. Il faut penser des gastronomes ce que nous pensons des pédagogues en général: que ce sont parfois d’insupportables cuistres mais qu’ils ont leur utilité. P. de Pressac (Considérations sur la cuisine, 1931)
L’idéologie du goût naturel tire (…) son efficacité de ce qu’elle ‘naturalise’ des différences réelles, convertissant en différences de nature des différences dans les modes d’acquisition de la culture et reconnaissant comme seul légitime le rapport à la culture (…) qui porte le moins les traces visibles de sa genèse. Bourdieu
En fait, l’émigration de nombreux nobles, et principalement des plus titrés, qui laissait sans ouvrage leurs cuisiniers, y est pour quelque chose. Auparavant existaient des auberges, des tavernes et des gargotes proposant des mets en général peu délicats. Si le restaurant s’impose, c’est qu’à l’exode des aristocrates répond l’arrivée dans la capitale des députés des États-généraux, puis des assemblées, constituante et législative. À ces messieurs, il faut un lieu où manger correctement, à la fois paisible et adapté à leurs horaires : le restaurant saura remplir ces fonctions. D’abord regroupés autour du Palais-Royal, les premiers établissements se multiplient rapidement : dépassant le millier en 1825, ils sont plus de deux mille en 1834, gagnant le quartier des Boulevards. En 1835, le mot entre dans le Dictionnaire de l’Académie française dans son acception moderne. De ce nouveau lieu découlent toutes sortes d’innovations : un environnement cossu, voire luxueux, des tables individuelles, le menu à la carte avec les prix affichés, le paiement de l’addition à la fin du repas. Toute une nouvelle sociabilité fait descendre les plaisirs culinaires des nobles hôtels particuliers aux tables démocratiques des restaurants. Si, à la différence des auberges bruyantes, on peut y converser de politique, de philosophie, d’affaires, on y parle aussi et surtout de ce qu’on mange, de ce qu’on a mangé, de ce qu’on va manger. On y reçoit des « gastrologues », qui devisent sur la nourriture et deviendront bientôt des gastronomes, à mesure qu’un certain goût se met en place. Particularité hexagonale durable, le discours sur l’art culinaire se développe à partir de la fin du 18e siècle tandis que la cuisine se transforme. Elle gagne en simplicité, en délicatesse et s’organise selon un service plus sobre, appelé « à la russe » : ‘La nouvelle cuisine parvient à simplifier le repas parce qu’elle sait mieux en classer les saveurs et réussit à en faire sentir toute la gamme des goûts’. Les manières de table se mettent en place également à cette époque, de même que l’organisation des repas en petit-déjeuner, déjeuner, dîner. C’est dans les restaurants qu’on croise le chemin des grands noms de la gastronomie française, ceux qui ont fait la cuisine, ceux qui l’ont dite et la feront devenir ce qu’elle est : Roze de Chantoiseau, Brillat-Savarin, Grimod de La Reynière, Méot, Carème, Beauvilliers, Escoffier… Mais aussi, par la suite, ces mangeurs magnifiques que furent Balzac, Alexandre Dumas ou Victor Hugo, dont l’appétit laisse pantois. Peu à peu, l’offre se diversifiant sur les Boulevards, apparut ce qui semblait quelques années auparavant encore un oxymore : des restaurants pour les pauvres. On vint ainsi du monde entier pour manger à Paris, et la ville est alors devenue le ventre du monde. Sciences sociales

Comment les Français devinrent les maitres à manger de l’Europe

Terminant notre série sur la grammatomanie française, comment ne pas évoquer son ultime application à ce qui lui semble apparemment le plus éloigné, à savoir le domaine de l’estomac et de la cuisine (pardon)… de la gastronomie!

L’INVENTION DE LA GRAMMAIRE DE L’ESTOMAC
(ou comment les Français devinrent les maîtres à manger du monde)

JC Durbant, février 1999

Qui nous délivrera des Grecs et des Romains … ?

Comment expliquer l’hégémonie culinaire – quasi-planétaire – de la cuisine française? Après tout, la cuisine chinoise n’est-elle pas autrement plus ancienne, plus variée et certainement tout autant raffinée? Le terme lui-même de gastronomie ou gastrologie ne nous vient-il pas des Grecs (un certain Archestrate de Sicile), lesquels prenaient, on le sait, leurs banquets (ou faudrait-il dire leurs symposiums?) très au sérieux? Mais les Romains ne se défendaient pas mal non plus (dont le proverbial général Lucullus). Ne dit-on pas qu’ils arrivaient à distinguer, au goût, le poisson pris entre les ponts de celui qui avait été pêché plus bas ? Et leurs recettes (attribuées à un dénommé Apicius) ne furent-elles pas pieusement copiées et recopiées jusqu’à la Renaissance? D’ailleurs, le mot gastronomie lui-même ne fera son apparition dans le vocabulaire français qu’en 1801 et sous la forme la moins sérieuse qui soit: dans le titre-jeu de mots (un peu facile) d’une parodie héroï-comique d’un autre poème didactique intitulé L’Astronomie.

Grammairiens de l’estomac

Mais il ne faut pas se laisser abuser par ces commencements quelque peu fantaisistes. Derrière la facétie et les bouffonneries faciles, la gastronomie, comme l’a bien repéré un connaisseur des années 30 [2] (et fin étymologiste! : nomos, c’est bien la loi en grec), ce n’est rien de moins que « l’ensemble des règles qui président à la culture et à l’éducation du goût. C’est donc de la grammaire, la gastronomie [étant] au goût ce que la grammaire et la littérature sont au sens littéraire ». Faut-il alors s’étonner que les véritables fondateurs du discours gastronomique seront tous deux, en quelque sorte, des législateurs? Le premier, noble désargenté dénommé Grimod de la Reynière, a été critique littéraire et s’est donc occupé des règles de l’art. Le second, célèbre auteur de la « Physiologie du goût », Anthelme Brillat-Savarin, est un ancien député de l’Assemblée constituante (et ami de Balzac à qui il inspirera l’idée de sa « Physiologie du mariage »). A eux deux, ils inventeront tout: traité de gastronomie (« Manuel des amphytrions », 1808), guide culinaire (« Almanach des gourmands ») et même périodique (« Journal des gourmands et des belles ») pour Grimod. Brillat, lui, se réservera la tâche du théoricien: n’hésitant pas à se mettre lui-même en scène dans son oeuvre en professeur, il multiplie les références philosophiques (« histoire philosophique de la cuisine », « Méditations », « gastronomie transcendentale ») et les aphorismes sentencieux (dont l’auto-ironie n’ est, certes, pas absente – tradition oblige).[3]

Codificateurs versaillais

Mais tout pédagogue, direz-vous, suppose des élèves à éduquer. Comme le rappelle d’ailleurs notre perspicace connaisseur, « le gourmet n’a que faire du gastronome car il est son propre gastronome comme l’homme de goût est son propre grammairien ». Et Versailles n’avait-il pas déjà fait de la France la référence universelle du goût et de tous les arts, y compris culinaires? C’est en effet à cette époque d’extrême ritualisation monarchique que se développeront nombre d’innovations culinaires (eg. la fameuse sauce du Marquis de Bechamel) et que la cuisine française s’orientera définitivement vers le modèle ostentatoire et sophistiqué de la cour.[4] La cuisine se verra ainsi codifiée comme la langue l’avait été par Richelieu (via la vénérable Académie – de la langue – française et l’indispensable Vaugelas dont on oublie que les « Remarques » étaient inséparablement des règles de savoir parler/écrire et de savoir-vivre) et la peinture par Colbert. Mais justement cette sophistication restera limitée à la cour et à l’aristocratie et pour que cette diffusion s’étende au-delà de ces cercles restreints, il faudra attendre le siècle suivant et un bouleversement historique sans précédent et bien français: la Révolution.

Premiers restaurateurs (ou l’art de faire contre mauvaise fortune … bonne chère)

En effet, comme l’avaient bien vu tant Grimod que Brillat, c’est paradoxalement la crise de la société aristocratique qui assurera cette diffusion en jetant sur le pavé quantité de cuisiniers à domicile (officiers de bouche ou traiteurs) et jetant à table quantité de nouveaux riches soucieux de respectabilité.[5] D’où la multiplication des grands restaurants. Certes, dès 1780 (sentant peut-être le vent tourner?) un certain Beauvilliers avait quitté le service du Comte de Provence, frère du roi, pour s’installer à son compte et donner à son établissement l’allure d’une grande maison (« salon élégant, garçons bien mis, caveau soigné et cuisine supérieure », comme le décrira plus tard Brillat), ce qui explique son déménagement au Palais-Royal deux ans plus tard. De fait, la création du premier restaurant (le premier de l’histoire, oui!) lui était même antérieure. Il semble qu’elle soit l’oeuvre d’un certain Boulanger qui obtint, dès 1765, le droit de servir à ses clients des plats restaurants [5] sur place contre le monopole des traiteurs à domicile (l’anglomanie aura aussi sa part dans l’histoire, comme l’indique le choix du nom de Taverne anglaise d’un des tout premiers restaurants). Naturellement, existaient déjà depuis longtemps auberges, cabarets ou hôtelleries mais, de qualité plutot médiocre et ouverts au tout venant, ils ne pouvaient satisfaire les nouvelles exigences de la bourgeoisie conquérante, à savoir bien dîner sans entretenir une brigade coûteuse, sans dépendre d’un système complexe d’invitations filtrées et enfin sans avoir à subir la promiscuité populaire des tavernes et autres tables d’hôtes. [5] Mais cette nouvelle clientèle de parvenus avait un besoin tout aussi pressant d’être initié à des plaisirs qui lui avaient été jusque-là interdits, ce qui ne pouvait être fait sans médiateurs, détenteurs du savoir culinaire ancien (des Vaugelas de l’estomac, en quelque sorte). Alors, quand viendra la réaction après les excès de la Terreur, on comprend qu’un homme de la compétence d’un Grimod (qui plus est, toujours en délicatesse avec ses créanciers) ne pouvait manquer une occasion aussi belle de monnayer le bon goût du régime défunt à destination des nouveaux riches du Directoire, des parvenus du Consulat et des installés de l’Empire. [6]

Cuisiniers des rois et rois des cuisiniers

Mais d’autres, moins heureux, devront s’exiler et deviendront (pour transposer Marx) non les « maîtres à danser de l’Europe » mais, en quelque sorte, ses maîtres à manger. Ainsi, Brillat lui-même avait jugé plus prudent, si l’on peut dire, de « passer sa Terreur » en Suisse puis aux Etats-Unis, où il se vantera d’avoir introduit les oeufs brouillés au fromage. Mais le meilleur exemple de carrière réussie est, sans conteste, celui du chef de bouche de Talleyrand, le célèbre Marie-Antoine Carême, qui passera successivement au service d’un roi (d’Angleterre), de trois empereurs (Napoléon puis ceux de Russie et d’Autriche) avant de finir auprès d’un baron (Rothschild). Dès lors, commenceront à se diffuser au niveau international tout un savoir et un savoir-faire que des grands chefs tels qu’Escoffier porteront, au début du siècle suivant, au plus haut degré de la perfection (dans les restaurants des palaces du Suisse César Ritz). Mais cette diffusion sera aussi nationale et recevra, avec le développement du tourisme automobile [7], une impulsion décisive sous la forme du gastro-nomadisme que promouvra le célébrissime guide du premier fabricant de pneumatiques français (le « Guide Michelin pour les chauffeurs et vélocipédistes »). Puis, viendront, après les privations de la deuxième guerre mondiale, les années de forte croissance qui verront les jeunes chefs (le succès aidant) se mettre à leur compte et multiplier les ouvrages de vulgarisation culinaire à l’image du premier d’entre eux, le grand Paul Bocuse. Certes, il y aura le coup de semonce anti-consumériste de mai 68 et l’annonce maintes fois répétée de la « drugstorisation » (lisez : américanisation) prochaine de la cuisine française. Mais, une fois de plus, ce seront des publicistes [8] (Henri Gault et Christian Millaut) qui sauveront la mise avec le coup de génie de la Nouvelle Cuisine. Ainsi, Maître Bocuse, tout auréolé de sa récente Légion d’honneur, pourra reprendre son Concorde de pèlerin et étendre désormais à la planète entière la diffusion du nouvel évangile gastronomique.[9]

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1) P. de Pressac (1931). Exemple typique de l’idéologie du goût naturel qui, comme l’écrit le sociologue Pierre Bourdieu, tire (…) son efficacité de ce qu[’]elle ‘naturalise’ des différences réelles, convertissant en différences de nature des différences dans les modes d’acquisition de la culture et reconnaissant comme seul légitime le rapport à la culture (…) qui porte le moins les traces visibles de sa genèse. (La Distinction, 1979) d’où la fréquente hostilité des héritiers de la culture envers les parvenus qui, par leur manque de ‘naturel’, vendent la mèche en rappelant l’acquisition en des matières où, plus que partout ailleurs, il s’agit d’avoir sans avoir jamais acquis.

2) Littérature de l’estomac : Même les hommes de lettres s’y mettront, Dumas se fendant ainsi d’un Grand Dictionnaire de la cuisine, écrit (comme beaucoup de ses oeuvres) en collaboration. Plus récemment, c’est Barthes qui préfacera l’édition 75 de la Physiologie du goût.

3) Pour ne citer que quelques exemples parmi les plus connus : Les animaux se repaissent ; l’homme mange ; l’homme d »esprit seul sait manger. /… / La destinée des nations dépend de la manière dont elles se nourrissent. /…/ Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es. /… / La découverte d’un mets nouveau fait plus pour le bonheur du genre humain que la découverte d’une étoile. – où l’on retrouve le jeu de mots astronomie/gastronomie – /… / Un dessert sans fromage est une belle à qui manque un oeil. /… / On devient cuisinier, mais on nait rôtisseur.

4) Au contraire de la cuisine anglaise qui, elle, choisira le modèle de la gentry : rural, puritain et pratique – on se rappelle l’invention de Lord Sandwich.

5) Cette citation (comme bien d’autres ici) est extraite du tout récent et excellent petit ouvrage de l’historien Pascal Ory: Le discours gastronomique français (Gallimard,1998).

6) D’où le néologisme, l’établissement servant des plats (qui restaurent) sur place devenant le restaurant, par opposition au traiteur qui traite à domicile.

7) Jusqu’ à la 2e guerre mondiale, l’automobile restera en France un luxe quipermettra à ses possesseurs de se libérer de l’équivoque promiscuité du chemin de fer, fût-il à trois classes, et de raffiner les itinéraires. (Ory)

8) Faut-il encore présenter les célèbres auteurs de la nouvelle bible desgastronomes (le Guide Gault et Millaut), journalistes de leur état et grands pourfendeurs de « la cuisine Bibendum »?

9) Pour la période actuelle, il faudrait certes relativiser un peu le bilan, ce modèle de mondialisation réussie (puisque française !) ayant quelque peu été écorné par la persistante crise japonaise (et aussi peut-être la folie des grandeurs de certains jeunes chefs, croulant sous les dettes mais allant jusqu’à réclamer la protection légale de leurs inventions culinaires au titre du droit d’auteur?).

COMPLEMENT:

L’invention du restaurant
La France gastronome. Comment le restaurant est entré dans notre histoire , Antoine de Baecque, Payot, 2019, 240 p., 22 €
Thierry Jobard
Sciences humaines

Août-septembre 2019

La France passe pour un pays de bons vivants et est souvent louée pour sa douceur de vivre. Ce que perçoivent surtout les étrangers semble-t-il. Et les restaurants y sont pour beaucoup. Or, leur invention est assez récente puisque le lieu, de même que la profession de restaurateur, ne remontent guère au-delà de la Révolution. On peut s’en étonner, car à l’époque le pays connaît encore des épisodes de famines. Alors que la loi du Maximum (1793) entend lutter contre la spéculation sur les blés, de nombreux Parisiens ne mangent pas à leur faim, et pourtant on voit fleurir ce nouveau type d’établissements. Antoine de Baecque ne manque pas de souligner les paradoxes qui entourent leur naissance. Alors que l’idée même de gastronomie (le terme apparaît à l’époque) est liée à l’Ancien Régime et à l’aristocratie, ces lieux de bonne chère se répandent dans Paris, sans égard pour l’égalitarisme des Sans-culottes.

En fait, l’émigration de nombreux nobles, et principalement des plus titrés, qui laissait sans ouvrage leurs cuisiniers, y est pour quelque chose. Auparavant existaient des auberges, des tavernes et des gargotes proposant des mets en général peu délicats. Si le restaurant s’impose, c’est qu’à l’exode des aristocrates répond l’arrivée dans la capitale des députés des États-généraux, puis des assemblées, constituante et législative. À ces messieurs, il faut un lieu où manger correctement, à la fois paisible et adapté à leurs horaires : le restaurant saura remplir ces fonctions.

D’abord regroupés autour du Palais-Royal, les premiers établissements se multiplient rapidement : dépassant le millier en 1825, ils sont plus de deux mille en 1834, gagnant le quartier des Boulevards. En 1835, le mot entre dans le Dictionnaire de l’Académie française dans son acception moderne. De ce nouveau lieu découlent toutes sortes d’innovations : un environnement cossu, voire luxueux, des tables individuelles, le menu à la carte avec les prix affichés, le paiement de l’addition à la fin du repas. Toute une nouvelle sociabilité fait descendre les plaisirs culinaires des nobles hôtels particuliers aux tables démocratiques des restaurants. Si, à la différence des auberges bruyantes, on peut y converser de politique, de philosophie, d’affaires, on y parle aussi et surtout de ce qu’on mange, de ce qu’on a mangé, de ce qu’on va manger. On y reçoit des « gastrologues », qui devisent sur la nourriture et deviendront bientôt des gastronomes, à mesure qu’un certain goût se met en place. Particularité hexagonale durable, le discours sur l’art culinaire se développe à partir de la fin du 18e siècle tandis que la cuisine se transforme. Elle gagne en simplicité, en délicatesse et s’organise selon un service plus sobre, appelé « à la russe » : « La nouvelle cuisine parvient à simplifier le repas parce qu’elle sait mieux en classer les saveurs et réussit à en faire sentir toute la gamme des goûts ». Les manières de table se mettent en place également à cette époque, de même que l’organisation des repas en petit-déjeuner, déjeuner, dîner. C’est dans les restaurants qu’on croise le chemin des grands noms de la gastronomie française, ceux qui ont fait la cuisine, ceux qui l’ont dite et la feront devenir ce qu’elle est : Roze de Chantoiseau, Brillat-Savarin, Grimod de La Reynière, Méot, Carème, Beauvilliers, Escoffier… Mais aussi, par la suite, ces mangeurs magnifiques que furent Balzac, Alexandre Dumas ou Victor Hugo, dont l’appétit laisse pantois. Peu à peu, l’offre se diversifiant sur les Boulevards, apparut ce qui semblait quelques années auparavant encore un oxymore : des restaurants pour les pauvres. On vint ainsi du monde entier pour manger à Paris, et la ville est alors devenue le ventre du monde.

7 Responses to Gastronomie: L’invention de la grammaire de l’estomac (How the French became the world’s dining masters)

  1. […] fréquente hostilité, comme le rappelait Bourdieu, des héritiers de la culture pour les parvenus qui, “par leur manque de ‘naturel’, […]

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  2. […] Après la révolution française, observe Marx, les aristocrates dont tout le capital incorporé consistait en un art de vivre désormais dépourvu de marché, devinrent les maitres à danser de l’Europe. Bourdieu […]

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  3. […] Après la révolution française, observe Marx, les aristocrates dont tout le capital incorporé consistait en un art de vivre désormais dépourvu de marché, devinrent les maitres à danser de l’Europe. Bourdieu […]

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  4. […] pourquoi pas aussi de ces autres et oubliés maitres à manger du monde que sont nos chers voisins […]

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  5. […] Après la révolution française, observe Marx, les aristocrates dont tout le capital incorporé consistait en un art de vivre désormais dépourvu de marché, devinrent les maitres à danser de l’Europe. Bourdieu […]

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  6. jcdurbant dit :

    DON’T STUDY TOO HARD (Lack of social life and extracurricular activities can actually keep lower class students from elite schools and jobs)

    Whether intentionally or not, elite parents expose their children to different experiences and styles of interacting that are useful for getting ahead in society. Many of these are taken for granted in upper and upper-middle class circles, such as how to prepare a college application (and having cultivated the right types of accomplishments to impress admissions officers), how to network in a business setting in a way that seems natural, and how to develop rapport with teachers, interviewers, and other gatekeepers to get things you want from those in power. Basically, if we think of economic inequality as a sporting competition, elite parents give their kids a leg up, not only by being able to afford the equipment necessary to play but also by teaching them the rules of the game and giving them insider tips on how to win.

    Working and lower-middle-class children are less likely to participate in structured extracurricular activities than their more privileged peers while growing up (and when they do, they tend to participate in fewer of them). This hurts their job prospects in two ways. First, it affects the types of schools students attend. Elite universities weigh extracurricular activities heavily in admissions decisions. Given that these employers—which offer some of the highest-paying entry-level jobs in the country—recruit almost exclusively at top schools, many students who focus purely on their studies will be out of the game long before they ever apply to firms. Second, employers also use extracurricular activities, especially those that are driven by “passion” rather than academic or professional interest and require large investments of time and money over many years, to screen résumés. But participation in these activities while in college or graduate school is not a luxury that all can afford, especially if someone needs to work long hours to pay the bills or take care of family members. Essentially, extracurriculars end up being a double filter on social class that disadvantages job applicants from more modest means both in entering the recruiting pipeline and succeeding within it.

    Quite simply, we like people who are similar to ourselves. Ask anyone what constitutes a good driver, leader, or parent, and chances are they will describe someone like themselves. The same is true for how people think of merit in the working world. Most employees in these firms are graduates of highly elite undergraduate or graduate programs and believe that’s where talent really resides. In addition, given how segregated our society has become socioeconomically, people who grow up in upper-middle or upper-class communities where college attendance is the norm may not realize structural factors that influence educational pathways and erroneously view university prestige as a reflection of ability alone. Finally, national rankings matter. Rankings provide an easily quantifiable, presumably “scientific” way of making sense of the myriad of educational institutions out there. They both reinforce beliefs that school prestige equals student quality (even though things having nothing to do with students’ abilities factor into a university’s rank) and serve as a convenient justification for limiting recruitment to a small number of elite schools with strong alumni ties to firms.

    The purpose of the book was to reveal how taken-for-granted ideas about what merit is and how best to measure it contribute to class inequalities at the top of the U.S. economic ladder. I certainly did not intend for the book to be interpreted as a how-to manual. However, given rising levels of anxiety about class position among the relatively advantaged and the high stakes of getting jobs in these firms, I’m not entirely surprised that some people are using it as a tool to try to game the system. I have mixed feelings about this. On one hand, it can help groups currently disadvantaged in the hiring process, such as working class students and racial minorities, break into these jobs. On the other hand, it can benefit the already advantaged and reinforce the types of inequalities documented in the book. My hope, however, is that the research will open employees’ eyes about inequities and inefficiencies in the way hiring is currently done in these firms and motivate change in a positive direction.

    https://www.washingtonpost.com/blogs/monkey-cage/wp/2015/09/23/why-are-working-class-kids-less-likely-to-get-elite-jobs-they-study-too-hard-at-college/

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