Education: Des manuels bien trop noirs (French antidiscrimination agency denounces… antiracism!)

saac Mkalia, 20 years old, a teacher by profession is checking his mobile phone.Il faut changer les représentations en allant même un peu au-delà de la réalité à un moment donné, afin de donner une image en ligne avec l’ambition qu’on a pour la société. M. Schweitzer
Ces recommandations vont dans le bon sens. Montrer des contre-stéréotypes et la société telle qu’on voudrait qu’elle soit, on va en tenir compte. Pascale Gélébart (Syndicat national de l’édition)
Les minorités visibles apparaissent davantage comme des personnages de débats portés par les manuels que des personnages de manuels au même titre que les autres. Enseignant d’anglais
Le stéréotype à l’égard des personnes noires le plus souvent mentionné par les élèves et les enseignants est la pauvreté. (…) La photo présente de profil un petit enfant noir, nu et rachitique, en train de s’alimenter. (…) Une photo page 75 montre en plan rapproché la main d’un enfant noir dans la paume de celle d’un adulte blanc. Ce dernier tient entre le pouce et l’index une main noire minuscule laissant apparaître un avant bras de la taille du pouce de l’adulte. Utilisée pour illustrer la solidarité nécessaire avec l’Afrique, cette image a été jugée choquante à plusieurs reprises, notamment dans le cadre du “focus group” avec les professionnels de l’intégration. Elle renforce le stéréotype du Noir non seulement pauvre, mais aussi malade. Elle contribue également à entretenir le stéréotype du rapport inégalitaire entre Noirs et Blancs en faisant appel à un registre émotionnellement inutile. Cette analyse critique ne signifie pas qu’il s’agit de taire la vérité sur les faits, qu’ils soient économiques ou historiques. Cependant, les contenus susceptibles de produire des identifications négatives par proximité de critères de catégorisation sociale doivent être absolument relativisés. Dans son étude des manuels de géographie consacrés à l’Afrique, Prévost (…) dresse le même constat en regrettant que « ces images ne sont pas souvent contrebalancées par des réussites de développement ». Dans ses réponses au questionnaire un enseignant fait le même type de proposition « Dans les manuels de géographie, les chapitres sur l’Afrique et le Maghreb montrent trop souvent la pauvreté avec des photos d’enfants de rue, ou de paysans traditionnels, mais on ne parle pas assez du dynamisme de ces pays, de la modernité que l’on trouve parfois. Rapport de la Halde

Attention: une noirceur peut en cacher une autre !

Après les manuels floutés et les manuels anti-américains,… les manuels antiracistes!

Surdénonciation des discriminations à l’égard des minorités visibles, oubli des femmes, handicapés, seniors (réduits à « l’image très négative » du « Mignonne, allons voir si la rose… » de Ronsard!) ou homosexuels, stéréotypes ou représentations exagérément choquantes de l’Africain pauvre et malade ou esclave (main famélique), choix systématique d’Africains ou immigrés en difficulté ou en échec scolaire, « exotisme » tout aussi systématique des représentations (mosquée située hors du territoire national, niqab illustrant le refus de l’Union européenne d’intégrer la Turquie) …

Au lendemain de l’élection du messie, noir comme il se doit, du multiculturalisme …

Dernière illustration de ces étranges temps que nous vivons: la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité) obligée de monter au créneau, si l’on en croit le compte-rendu du Monde (au titre pour le moins surprenant: “Des manuels encore un peu trop blancs”?) pour dénoncer les manuels scolaires qui, après 40 ans de bien-pensance et de politiquement correct,… noircissent trop le tableau!

Et redonner enfin à tous les « bergers massaïs au milieu de leurs troupeaux, souriants et plutôt bien portants, téléphone portable à la main » la place qu’ils méritent.

Au risque de retomber du coup (chassez le naturel!) …

En prônant d’aller « au-delà de la réalité à un moment donné, afin de donner une image en ligne avec l’ambition qu’on a pour la société » (?)…

Dans d’autres (contre-)stéréotypes?

Des manuels encore un peu trop blancs
Laetitia van Eeckhout
Le Monde
06.11.08

Une femme voilée pour illustrer la Turquie, une main rachitique pour symboliser l’Afrique… Sans attendre que Barack Obama fasse son entrée dans les livres d’histoire des écoliers français, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) publie, jeudi 6 novembre, une grande enquête sur la place des stéréotypes et des discriminations dans les manuels scolaires.

Pas moins de 29 ouvrages et 3 097 illustrations ont été passés au crible par une équipe de chercheurs de l’université Paul-Verlaine de Metz. Le constat n’est pas accablant. Premier relatif satisfecit : les minorités visibles… sont visibles. 10% des illustrations représentent « un personnage principal de couleur », dont un peu plus de la moitié un personnage « pouvant être perçu comme étant originaire d’Afrique du Nord ou du Moyen-Orient ». Ensuite, parce que les clichés racistes hérités de la période coloniale ont disparu. Le discours antiraciste y est présent. Les discriminations à l’égard des minorités visibles sont davantage dénoncées que celles à l’encontre d’autres groupes tels que les femmes, les handicapés, les seniors ou les homosexuels, également étudiés par l’enquête.

Toutefois, certains stéréotypes ont encore la vie dure. D’abord, note la Halde, certaines minorités sont manifestement plus mises en valeur que d’autres. Ensuite, les manuels de géographie en particulier, dans les chapitres sur l’Afrique et le Maghreb, mettent l’accent sur la pauvreté sans que soient par ailleurs représentées des situations positives de modernité pourtant présentes dans les pays étudiés.

Les personnes noires sont particulièrement stigmatisées. Les illustrations où elles apparaissent, tant en géographie, en sciences de la vie et de la terre qu’en éducation civique, renforcent encore souvent le stéréotype de l’Africain non seulement pauvre, mais aussi malade. Dans les manuels d’histoire, la présence des personnes noires, fortement liée à la question de l’esclavage et à celle de la ségrégation raciale aux Etats-Unis, amène certains élèves à considérer que « pour les Français, Noir égale esclave ». Autant de représentations qui, selon les auteurs, contribuent à entretenir « une vision inégalitaire entre Noirs et Blancs en faisant appel à un registre émotionnellement inutile ». Bref, le « sanglot de l’homme blanc » n’est jamais bien loin.

Les auteurs ne préconisent évidemment pas de taire la vérité sur les faits, comme l’esclavage ou la famine. « Cependant, insistent-ils, les contenus susceptibles de produire des identifications négatives doivent être absolument relativisés. » A quand la photo d’un cybercafé en plein milieu d’un quartier populaire à Tunis ou à Bamako ou d’un agriculteur africain consultant les cours des matières premières sur son ordinateur? « Les minorités visibles apparaissent davantage comme des personnages de débats portés par les manuels que des personnages de manuels au même titre que les autres », résume un enseignant d’anglais.

Au-delà des illustrations, le choix des exemples, ou des prénoms dans les exercices, y compris de mathématiques, n’est pas anodin. Chez Hatier (manuel de 5e), une petite fille réussit-elle son exercice de géométrie? Normal, elle porte un prénom « bien français ». Sa camarade de classe se trompe? Pas de chance, elle s’appelle Samira. « Ce type d’exercice peut renforcer le stéréotype de l’élève maghrébin ou noir en situation d’échec scolaire ou éveiller un sentiment de discrimination », notent les auteurs de l’étude, alertés eux-mêmes par des élèves de 5e.

Le lien qui est fait avec les appartenances religieuses, et en particulier l’islam, tend aussi à entretenir une discrimination. Pourquoi Nathan (manuel d’histoire-géographie de terminale) illustre-t-il l’islam avec une mosquée située hors du territoire national, et le catholicisme avec la cathédrale de Chartres? Forcément, un tel choix ne peut que renforcer l’idée que l’islam est une religion étrangère à la France. Surtout que le texte évoque « la crise des vocations » mais jamais « l’évolution de la pratique religieuse ».

De même, recourir à la symbolique du voile, notamment du niqab, dans une illustration évoquant le refus de l’Union européenne d’intégrer la Turquie est pour le moins périlleux. Certes, ce choix peut avoir pour but de faire réagir les élèves et d’être discuté en classe mais, relèvent les auteurs de l’étude, « il risque surtout de renforcer le stéréotype selon lequel le port du voile justifie toutes les formes de rejet et d’exclusion ».

Il y a une autre façon d’exclure. Ne pas montrer. En sciences de la vie et de la terre, les corps noirs sont particulièrement peu représentés. Dans un autre registre, l’origine étrangère d’une célébrité, comme Picasso, n’est pas systématiquement évoquée.

Dans ses recommandations, la Halde reconnaît que « les stéréotypes sont peu fréquents mais ils existent, d’autant plus que la fréquence n’enlève rien à l’effet qu’ils peuvent produire chez celui ou celle qui en est victime ». Jugeant le bilan « mitigé », elle recommande surtout aux éditeurs de ne pas se contenter de « représenter correctement deux ou trois minorités visibles, en ignorant les autres ».

Ce premier principe établi, la Halde recommande d’éviter les stéréotypes véhiculés par des représentations exagérément choquantes, « sans pour autant dissimuler le rapport à la vérité des faits ». Comment? En procédant par contraste ou contre-stéréotype. Les auteurs délivrent un satisfecit à Magnard pour avoir illustré un de ses ouvrages d’histoire-géographie avec « un berger massaï au milieu de son troupeau, souriant et plutôt bien portant, téléphone portable à la main ». En revanche, c’est le même éditeur qui publie (dans un autre ouvrage) la main famélique. « Un même manuel peut contenir des contre-stéréotypes pertinents, mais également des stéréotypes que nous condamnons », déplorent les chercheurs.

Les manuels de français doivent aussi s’ouvrir davantage à la diversité culturelle. « L’identité française qu’ils véhiculent au travers de la littérature, et de l’intitulé de leur discipline, ne doit pas laisser de côté les minorités visibles qui constituent la société civile », relève la Halde.

Parallèlement à cette réflexion, la Halde estime qu’un débat et des recherches mériteraient d’être engagés sur l’enseignement de la religion en France, notamment sur la représentation de l’islam et des musulmans dans les manuels scolaires. Mais la Halde ne se fait guère d’illusions. « La meilleure volonté des éditeurs ne suffira pas à faire réellement évoluer certains manuels, si les programmes ne les aident pas à introduire davantage les minorités visibles dans le respect de l’évitement des stéréotypes. »

Voir aussi:

Discrimination: la Halde recommande de lutter via les programmes et manuels scolaires
Emmanuel DEFOULOY
Le Point/ AFP
le 06/11/2008

Discrimination: la Halde recommande de lutter via les programmes et manuels scolaires

La lutte contre les discriminations doit être au coeur de l’éducation des élèves, à la fois via les programmes et via les manuels scolaires qui devront corriger les stéréotypes discrimatoires qu’ils contiennent encore, selon les recommandations faites jeudi par la Halde.

La lutte contre les discriminations doit être au coeur de l’éducation des élèves, à la fois via les programmes et via les manuels scolaires qui devront corriger les stéréotypes discrimatoires qu’ils contiennent encore, selon les recommandations faites jeudi par la Halde.

« Les programmes ne mettent pas la lutte contre les discriminations au centre de l’éducation », a regretté lors d’un point de presse Louis Schweitzer, le président de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), en rappelant que cette question n’était abordée en éducation civique qu’en classe de 5ème.

Quant aux manuels scolaires, ils ne sont « ni racistes, ni sexistes », « mais ils sont plutôt le reflet d’hier que le reflet de la société que nous voudrions voir » dans l’avenir, a-t-il ajouté.

Des stéréotypes dévalorisants pour les femmes et les personnes d’origine étrangère, le handicap « rarement évoqué », des « seniors » associés à la maladie et à la dégénérescence du corps, « l’impasse » faite sur le sujet de l’orientation sexuelle: tel est le constat fait par la Halde après analyse de 29 manuels allant de la 6ème à la terminale.

Les métiers ne sont pas encore assez féminisés, les hommes sont souvent présentés en position de supériorité, et il n’y a qu’une femme représentée au travail pour trois hommes, ce qui ne correspond plus à la société actuelle.

En résumé, les manuels montrent généralement l’homme en médecin et la femme en infirmière, des « représentations » qu’il faut « casser », a dit M. Schweitzer.

Les handicapés ne sont « jamais représentés dans une situation ordinaire » et les personnes d’origine étrangère fréquemment montrées « en situation de pauvreté et de difficultés », a-t-il regretté.

En histoire et géographie, « le stéréotype du Noir pauvre et malade » entretient « une vision inégalitaire entre Noirs et Blancs », selon l’étude.

Enfin, sur les 3.097 photos des manuels étudiés, une seule est consacrée à l’orientation sexuelle, prise lors d’une Gay Pride à Paris.

« Il faut changer les représentations », en allant même « un peu au-delà de la réalité à un moment donné », afin de « donner une image en ligne avec l’ambition qu’on a pour la société », a affirmé M. Schweitzer.

Pour cela, la Halde demande à l’Education nationale que la prévention des discriminations soit présente dans tous les programmes de la 6ème à la terminale et que les enseignants aient une « formation spécifique » à ce sujet.

Aux éditeurs de manuels, elle recommande notamment que les personnes « qui souffrent d’une représentation le plus souvent négative soient illustrées dans des situations ordinaires et non systématiquement négatives ».

« Ces recommandations vont dans le bon sens. Montrer des contre-stéréotypes et la société telle qu’on voudrait qu’elle soit, on va en tenir compte », a réagi auprès de l’AFP Pascale Gélébart, du Syndicat national de l’édition.

Les changements se feront « au fur et à mesure de la refonte des manuels liée aux nouveaux programmes », a-t-elle ajouté.

Elle assure toutefois que « par rapport à il y a 20 ans, il y a des différences énormes sur les stéréotypes hommes/femmes dans les manuels ».

Elle se félicite que la Halde se soit adressée « à tous les interlocuteurs de la chaîne », y compris au ministère de l’Education sur les programmes.

La Halde examinera à l’avenir la réédition des manuels étudiés et élargira son étude à ceux du primaire, a promis M. Schweitzer.

Voir également:

La Halde dénonce la discrimination dans les manuels scolaires
L’Express
le 07/11/2008

A l’occasion de la publication d’un rapport qui met en évidence l’existence de nombreux stéréotypes de discrimination dans les manuels scolaires, la HALDE appelle l’école ce jeudi à plus de lutte pour l’égalité.

Le constat est frappant: l’analyse d’une trentaine de manuels scolaires révèle la présence d’une multitude de clichés qui discriminent les femmes, les origines étrangères, les handicapés, les vieux et les homosexuels. Auteur de l’étude, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et l’égalité (HALDE) souhaite que l’école relaye davantage la lutte pour l’égalité.

Les manuels scolaires, « le reflet d’hier »

« Les programmes ne mettent pas la lutte contre les discriminations au centre de l’éducation », a regretté vendredi, lors d’un point de presse, Louis Schweitzer, le président de la Halde.

Quant aux manuels scolaires, ils ne sont « ni racistes, ni sexistes », « mais ils sont plutôt le reflet d’hier que le reflet de la société que nous voudrions voir » dans l’avenir, a-t-il ajouté.

Des stéréotypes dévalorisants pour les femmes et les personnes d’origine étrangère. Le handicap est « rarement évoqué » et les « seniors » associés à la maladie et à la dégénérescence du corps.

Enfin est évoquée, « l’impasse » faite sur le sujet de l’orientation sexuelle.

L’analyse a porté sur 29 manuels allant de la 6e à la terminale. Les métiers n’y sont pas encore assez féminisés, les hommes sont souvent présentés en position de supériorité, ce qui ne correspond plus à la société actuelle.

Les handicapés ne sont « jamais représentés dans une situation ordinaire ». Et les personnes d’origine étrangère fréquemment montrées « en situation de pauvreté et de difficultés », a-t-il regretté.

En histoire et géographie, « le stéréotype du Noir pauvre et malade » entretient « une vision inégalitaire entre Noirs et Blancs », selon l’étude.

« Il faut changer les représentations » a affirmé M. Schweitzer.

L’Ecole, relais de la prévention des discriminations

La Halde demande à l’Education nationale que la prévention des discriminations soit présente dans tous les programmes de la 6ème à la terminale et que les enseignants aient une « formation spécifique » à ce sujet.

Aux éditeurs de manuels, elle recommande notamment que les personnes « qui souffrent d’une représentation le plus souvent négative soient illustrées dans des situations ordinaires et non systématiquement négatives ».

« Ces recommandations vont dans le bon sens. (…) On va en tenir compte », a réagi Pascale Gélébart, du Syndicat national de l’édition.

Les changements se feront « au fur et à mesure de la refonte des manuels liée aux nouveaux programmes », a-t-elle ajouté.

Elle assure toutefois que « par rapport à il y a 20 ans, il y a des différences énormes sur les stéréotypes hommes/femmes dans les manuels ».

Elle se félicite que la Halde se soit adressée « à tous les interlocuteurs de la chaîne », y compris au ministère de l’Education sur les programmes.

La Halde examinera à l’avenir la réédition des manuels étudiés et élargira son étude à ceux du primaire, a promis son président.

Les stéréotypes

Sous-valorisation des femmes:

« L’homme en médecin et la femme en infirmière ». « Une femme représentée au travail pour trois hommes. » « Les femmes « icônes ou emblèmes » (Marianne, déesses grecques ou romaines. « Filles de », « femme de » ou « mère de » (Letizia, mère de Napoléon). Les femmes en tant qu' »objet de désir des hommes »

Discrimination ethnique:
-3 prénoms à consonance étrangère sur 71 prénoms dans les manuels de mathématiques.

Le handicap à la trappe:
-Sur 3097 illustrations, 25 évoquent le handicap.

Le tabou de l’orientation sexuelle:
-Sur les 3 097 photos des manuels étudiés, une seule est consacrée à l’orientation sexuelle, prise lors d’une Gay Pride à Paris.

Extraits:

Stéréotypes dans la représentation des personnes noires

Le stéréotype à l’égard des personnes noires le plus souvent mentionné par les élèves et les enseignants est la pauvreté. Ce constat rejoint celui de Nicolas Prévost (2001, op. cit.) dans son étude sur les images et l’enseignement de l’Afrique. Deux manuels de SVT sont révélateurs de ces stéréotypes. Le premier, chez Bordas en classe de 3ème, page 163, propose une photo (la seule de la page) en appui d’une illustration d’un des trois encadrés. Il décrit “le kwashiorkor, comme une maladie fréquente dans les pays en voie de développement atteignant les enfants”. La photo présente de profil un petit enfant noir, nu et rachitique, en train de s’alimenter. Le second, est extrait du manuel d’ECJS en Terminale chez Magnard (2002). Une photo page 75 montre en plan rapproché la main d’un enfant noir dans la paume de celle d’un adulte blanc. Ce dernier tient entre le pouce et l’index une main noire minuscule laissant apparaître un avant bras de la taille du pouce de l’adulte. Utilisée pour illustrer la solidarité nécessaire avec l’Afrique, cette image a été jugée choquante à plusieurs reprises, notamment dans le cadre du “focus group” avec les professionnels de l’intégration. Elle renforce le stéréotype du Noir non seulement pauvre, mais aussi malade. Elle contribue également à entretenir le stéréotype du rapport inégalitaire entre Noirs et Blancs en faisant appel à un registre émotionnellement inutile. Cette analyse critique ne signifie pas qu’il s’agit de taire la vérité sur les faits, qu’ils soient économiques ou historiques. Cependant, les contenus susceptibles de produire des identifications négatives par proximité de critères de catégorisation sociale doivent être absolument relativisés. Dans son étude des manuels de géographie consacrés à l’Afrique, Prévost (2001, p.119) 174 dresse le même constat en regrettant que « ces images ne sont pas souvent contrebalancées par des réussites de développement ». Dans ses réponses au questionnaire un enseignant fait le même type de proposition « Dans les manuels de géographie, les chapitres sur l’Afrique et le Maghreb montrent trop souvent la pauvreté avec des photos d’enfants de rue, ou de paysans traditionnels, mais on ne parle pas assez du dynamisme de ces pays, de la modernité que l’on trouve parfois. Exemple : en géographie, en ce qui concerne le Maghreb, on pourrait mettre dans un livre une photo d’un cybercafé en plein milieu d’un quartier populaire à Tunis ». Cette perspective commence à être envisagée par des éditeurs qui utilisent ce type de contre stéréotype à propos des personnes noires dans le contexte de la mondialisation et du développement des technologies. Les deux exemples rapportés ci-dessus ont retenus à ce propos notre attention. Ils figurent tous les deux en couverture d’un ouvrage de terminale. Le premier en histoire – géographie, chez Magnard (2007), pour les classes de Terminale STG, présente un berger Massaï au milieu de son troupeau, souriant et plutôt bien portant, téléphone portable à l’oreille. La couverture propose un montage photos avec en bas de page une image de ville moderne inscrivant le berger d’une tribu africaine et la personne noire dans la modernité. Le second, en sciences économiques et sociales, chez Bordas (2007) met côte à côte trois visions de la modernité, dans un contexte asiatique une femme marchant dans une ville, un portait de femme noire, téléphone portable à l’oreille, sur fond de ville et un homme en costume se déplaçant à vélo. La mondialisation et le développement technologique apparaissent ici comme un vecteur d’ouverture à la diversité culturelle et de rapprochement entre les différentes catégories sociales qu’on a tendance à opposer par ailleurs. Présentées dans le cadre des “focus group”, ces images ont été évaluées très favorablement par les professionnels de l’intégration et de la lutte contre les discriminations de l’ACSE. Nous présentons ici ces exemples de bonnes pratiques au même titre que les précédents qui rendaient compte de pratiques à proscrire. Comme nous l’avons constaté dans plusieurs ouvrages, un même manuel peut contenir des contre stéréotypes pertinents mais également des stéréotypes que nous condamnons. C’est pourquoi, en termes de recommandations aux éditeurs, nous les invitons à développer des dispositifs qui les aideront à tenir une ligne éditoriale où les minorités visibles seront numériquement et qualitativement représentées de façon pertinente, de la couverture de l’ouvrage à la dernière ligne du manuel, et ceci pour toutes les classes et dans toutes les matières. En effet, les éditeurs ne doivent pas se contenter de la pertinence d’une image qui pourrait les autoriser à être moins attentif à d’autres endroits du manuel.

(…)

Recommandations faites aux éditeurs

Recommandations de principe: Les recommandations ci-dessous proposent aux éditeurs (et aux équipes d’auteurs   dont ils ont la responsabilité) de suivre deux principes de base lors de la conception  d’un manuel scolaire: 1) principe de représentativité Les éditeurs doivent lutter contre l’exclusion des catégories sociales souffrant d’un  problème de représentativité dans leurs manuels, en s’efforçant de les introduire dans  des situations où ils pourront les faire apparaître quelle que soit la discipline. Des  propositions concrètes ont été faîtes à ce sujet. Ce principe peut être expliqué, voire  rédigé très clairement, aux  équipes d’auteurs, en  leur demandant de  penser aux  femmes  ou  encore  aux  minorités  visibles dans  les illustrations  ou  le  choix  des  prénoms, comme certains le font déjà; ils doivent également aller plus loin, aussi  bien sur le nombre de critères pris en compte, que sur les contextes d’apparition, par  exemple  en  s’efforçant  de  trouver  des  personnages  célèbres  de  la  discipline  répondant à ces critères. 2) principe de diversification des représentations Les éditeurs doivent lutter contre le renforcement des stéréotypes que leurs manuels  peuvent  induire  en  évitant  les  représentations  inutilement  dévalorisantes  ou  stigmatisantes, tout en veillant à la véracité des faits rapportés. L’utilisation de contre  stéréotypes est à encourager dans des proportions qui doivent rester raisonnables. Ils  doivent aussi et surtout s’efforcer de représenter les membres de ces catégories dans  des situations diversifiées. Pour les cinq  critères étudiés, toutes les analyses ont  révélé le besoin de faire apparaître davantage les membres de ces catégories sociales  en tant qu’individu, notamment en les mettant en scène dans des situations de la vie  quotidienne.  La  diversification  des  situations  peut  aussi  s’opérer  à  partir  du  relativisme culturel ou géographique, comme l’ont révélé des exemples pertinents, qui présentaient un cas en montrant la diversité des façons dont il était abordé dans  plusieurs pays européens.

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