Caricatures: Pourquoi j’ai publié ces caricatures (Flemming Rose: Why I published those cartoons)

Plantu9Plantu4Je suis offensé par des sujets dans le journal chaque jour: traductions des discours de Osama bin Laden, photos de Abu Ghraib, de personnes qui insistent pour qu’Israël soit effacé de la surface de la terre, de gens qui prétendent que l’Holocauste n’a pas existé. Mais cela ne signifie pas que j’hésiterai à publier ces sujets. (…) Des voix furieuses prétendent que la caricature dit que le prophète est un terroriste ou que tous les musulmans sont des terroristes. Je lis cette caricature différemment: certains individus ont pris la religion musulmane en otage en commettant des actes terroristes au nom du prophète. Ce sont ceux-ci qui ont donné une mauvaise image à cette religion. Flemming Rose

Enfin ! Après le flot ininterrompu de paroles et de pages pour le déligitimer, soit (pour les plus réactionnaires ou munichois) pour son mépris supposé des musulmans et de leur religion, soit (pour les plus « progressistes ») pour son mauvais goût, une chance pour l’éditeur du journal danois par qui le scandale est arrivé de s’expliquer.

Une chance pour montrer le vrai courage et les vraies nouveauté et force de ces dessins. D’autres comme Plantu du Monde avait déjà montré la fameuse bombe dans un turban (mais c’était celui d’un imam anglais) ou dans la main d’autres imams mais juste à côté du Coran (dans la main gauche !). Le dessin du Mahomet à la bombe dans le turban (que moi-même, je dois dire, je n’aimais pas trop au départ, lui préférant celui plus « soft » des vierges) est lui le premier, que je sache, à oser dire la vérité qui fâche (et qui semble dépasser l’éditeur danois lui-même ?).

A savoir que le problème n’est PAS SEULEMENT un problème de dévoiement ou d’une interprétation dévoyée de l’islam mais… l’islam lui-même, à partir du moment où on fait (ce que n’ont toujours pas rejeté la plupart des musulmans, « modérés » ou pas – du fait notamment d’une conception de la nature du texte lui-même comme « incréé », c’est à dire d’origine divine et donc théoriquement inamendable) une interprétation LITTÉRALE du Coran et donc des paroles de Mahomet.

La vérité que personne ne veut dire explicitement, c’est que le Coran pour ceux qui prennent la peine de le lire et ceux qui le lisent LITTÉRALEMENT, c’est AUSSI  un texte GUERRIER qui relate et fait l’apologie de la GUERRE et que Mahomet lui-même était AUSSI (contrairement par exemple au prophète judéo-chrétien Jésus, vénéré par nombre d’occidentaux)… un chef de GUERRE !

Et donc tant que (comme cela a dû être fait par la plupart des juifs et chrétiens avant eux pour certains des passages les plus guerriers de la Bible – même s’ils n’atteignent pas ce niveau d’explicitation du Coran et des hadiths) cette lecture LITTÉRALE-là ne sera pas déclarée CADUQUE  (explicitement et solennellement – et réellement, pas comme Arafat avec la charte de l’OLP !) par l’ensemble des musulmans ou leurs représentants, les tribuns dits « radicaux » et autres djihadistes auront beau jeu de s’appuyer sur ces textes pour continuer à jouir, malgré les faibles et occasionnelles protestations du contraire devant les caméras occidentales, de l’assentiment ou du moins de la complaisance ou du silence plus ou moins consentant ou « compréhensif » de la plupart des musulmans pour continuer leurs appels (et réguliers passages à l’acte) au meurtre et à l’assassinat ou à la destruction de tout ou partie d’Israël ou de l’Occident, juste parce qu’ils sont peuplés de prétendus « infidèles »  …

D’où l’importance particulière de ce texte de Flemming Rose parce qu’il montre qu’en gaspillant leur (précieuse parce que rare) voix à se joindre à la meute PC des imbéciles qui passent leur temps à démolir ces dessins pour leur mauvais goût supposé, les « progressistes » eux-mêmes (même Charlie Hebdo, aussi bénis soient-ils sur ce coup-là pour leur courage, n’évite pas tout à fait ce travers!) passent encore hélas à côté d’une belle occasion:… en montrer le vrai courage et la vraie profondeur!

Pourquoi j’ai publié ces caricatures
Flemming Rose
The Washington Post
19 février 2006

Puéril. Irresponsable. Expression haineuse. Une provocation juste pour le plaisir de provoquer. Un gag de pub. Les critiques des douze caricatures du prophète Mahomet que j’ai décidé de publier dans le journal Jyllands-Posten n’ont pas mâché leurs mots.

Ils disent que la liberrté d’expression n’implique pas la permission d’insulter les sentiments religieux de personnes et, de plus, ils ajoutent que les médias s’autocensurent constamment. En conséquence de quoi, “nous vous prions de ne pas nous donner de leçons en ce qui concerne la liberté d’expression sans limites”. Je suis d’accord pour dire que la liberté de publier ne signifie pas la liberté de publier n’importe quoi. Jyllands-Posten ne publierait jamais d’images pornographiques ou des images montrant en détail des cadavres; des jurons trouvent rarement leur place dans nos pages. Nous ne sommes donc pas des fondamentalistes dans notre support de la liberté d’expression.

Mais l’histoire des caricatures est différente.

Les exemples précédents sont liés à l’exercice d’une retenue pour des raisons éthiques et de bon goût; appelons cela la mise en page. Par contraste, j’ai lancé l’histoire des caricatures pour répondre à plusieurs incidents d’autocensure en Europe, incidents causés par les peurs croissantes et les sentiments d’intimidation ressentis en adressant des problèmes liés à l’Islam. Et je suis plus que toujours persuadé que c’est un thème que nous, Européens, devons confronter, afin de pousser les Musulmans modérés à s’exprimer. L’idée n’était pas de provoquer gratuitement – et certainement, notre intention n’était pas de provoquer des manifestations violentes dans le monde musulman.

Notre but était simplement de faire reculer des limites que nous nous imposons nous-mêmes et qui semblaient devenir de plus en plus étroites. Fin septembre, un humoriste danois a dit dans une interview avec Jyllands-Posten qu’il n’avait aucun problème à uriner sur une Bible devant une caméra, mais qu’il n’oserait pas faire la même chose avec le Coran. Cet aveu a été le point culminant d’une série d’instances troublantes d’autocensure. En septembre dernier, un écrivain pour enfants danois avait de la peine à trouver un illustrateur pour publier un livre sur la vie de Mahomet. Trois personnes ont refusé le travail par peur des conséquences. La personne qui a finalement accepté a insisté pour garder son anonymat, ce qui, selon moi, est une forme d’autocensure. Des traducteurs européens d’un livre critique de l’Islam ne voulaient pas que leur nom apparaisse à côté du nom de l’auteur, une politicienne néerlandaise née en Somalie qui, elle-même, vit cachée.

Environ à la même époque, la galerie d’art Tate à Londres a retiré une oeuvre par l’artiste d’avant- garde John Latham montrant le Coran, la Bible et le Talmud déchirés en morceaux. Le musée a expliqué qu’ils ne voulaient pas envenimer la situation après les attentats de Londres. (Quelques mois plus tôt, un musée de Göteborg en Suède, a enlevé une peinture contenant un motif sexuel et des citations du Coran afin de ne pas offenser les Musulmans.)

Finalement, fin septembre, le premier ministre danois, Anders Fogh Rasmussen a rencontré un groupe d’imams dont l’un d’entre eux a demandé au premier ministre d’intervenir auprès de la presse afin de produire une présentation plus positive de l’Islam. Ainsi, au cours de deux semaines, nous avons observé une demi-douzaine de cas d’autocensure, opposant la liberté d’expression à la peur de confronter des questions concernant l’Islam. Tout celà constituait une information légitime à publier, et Jyllands-Posten a décidé de le faire en adoptant le principe journalistique bien connu: montrer mais ne rien dire. J’ai écrit à des membres de l’association danoise des caricaturistes, leur demandant de “dessiner Mahomet comme ils le voyaient”. Nous ne leur avons certainement pas demandé de se moquer du prophète. Douze des 25 membres actifs ont répondu. Nous avons une tradition satirique lorsque nous parlons de la famille royale et d’autres personnes publiques et ceci est visible dans les caricatures. Les caricaturistes ont traité l’Islam comme ils traitent le christianisme, le bouddhisme, l’hindouisme et d’autres religions. Et en traitant les Musulmans au Danemark comme des égaux, ils ont démontré un point: nous vous intégrons dans la tradition danoise de la satire parce que vous faites partie de notre société, et vous n’êtes pas des étrangers. Les caricatures incluent, plutôt qu’excluent les Musulmans.

Les caricatures en aucun cas ne démonisent les Musulmans, et ne veulent pas créer de stéréotype. En fait, elles diffèrent l’une de l’autre tant dans la manière dont elles représentent le prophète que dans leur but. Une caricature se moque de Jyllands-Posten, représentant ses rédacteurs culturels comme une bande de provocateurs réactionnaires. Une autre suggère que l’auteur du livre pour enfants, ne pouvant pas trouver d’illustrateur, a rendu ce problème public juste pour se faire de la publicité à bon marché. Une troisième a mis la tête de la présidente du parti “Danish People’s Party “, parti au programme anti-immigratoire, dans une rangée de personnages, comme si elle était suspectée d’activités criminelles.Une caricature – montrant le prophète avec une bombe dans son turban – a attiré les critiques les plus sévères. Des voix furieuses prétendent que la caricature dit que le prophète est un terroriste ou que tous les musulmans sont des terroristes. Je lis cette caricature différemment: certains individus ont pris la religion musulmane en otage en commettant des actes terroristes au nom du prophète. Ce sont ceux-ci qui ont donné une mauvaise image à cette religion. La caricature évoque aussi le conte d’Aladin et l’orange qui est tombée dans son turban, lui assurant ainsi la fortune. Cela suggère que la bombe vient du monde extérieur et n’est donc pas une caractéristique inhérente au prophète. Parfois, Jyllands-Posten a refusé de publier des caricatures satiriques de Jésus, mais pas parce que nous appliquons des règles différentes. En fait, le même caricaturiste qui a dessiné Mahomet avec une bombe dans son turban a dessiné une caricature de Jésus sur la croix avec des billets de dollars dans ses yeux et une autre avec l’étoile de David attachée à la mèche d’une bombe. Cependant, lors de leur publication, nous n’avons pas vu d’ambassades incendiées ni reçu de menaces de mort.

Jyllands-Posten a-t-il insulté l’Islam ou manqué de respect? Ce n’était certainement pas son intention. Mais que signifie “respect”? Lorsque je visite une mosquée, je montre mon respect en enlevant mes chaussures. Je suis les coutumes de la même manière que je le ferais dans une église, une synagogue ou tout autre lieu saint. Mais lorsqu’un croyant demande que moi, non croyant, je respecte ses tabous sur le domaine public, il ne demande pas mon respect, mais ma soumission. Et ceci est incompatible avec une démocratie laïque. C’est exactement à cause de cela que Karl Popper dans son ouvrage « La Société ouverte et ses ennemis » insiste sur le fait qu’il ne faut pas être tolérant avec l’intolérant. Nulle part d’autre que dans une démocratie, où la liberté d’expression est un droit fondamental, ne coexistent autant de religions de manière pacifique. En Arabie Saoudite, vous pouvez être arrêté pour avoir porté une croix ou pour avoir une Bible dans votre valise, alors qu’au Danemark, pays laïque, les Musulmans peuvent avoir leurs propres mosquées, cimetières, écoles, stations de télévision et de radio.

Je reconnais que certaines personnes ont été offensées par la publication des caricatures, et Jyllands-Posten s’en est excusé. Mais nous ne pouvons pas nous excuser pour notre droit à publier certains sujets, même des sujets offensifs. On ne peut pas publier un journal si on est paralysé par la crainte d’une insulte. Je suis offensé par des sujets dans le journal chaque jour: traductions des discours de Osama bin Laden, photos de Abu Ghraib, de personnes qui insistent pour qu’Israël soit effacé de la surface de la terre, de gens qui prétendent que l’Holocauste n’a pas existé. Mais cela ne signifie pas que j’hésiterai à publier ces sujets, pour autant qu’ils respectent la loi et le code éthique du journal. Le fait que d’autres rédacteurs feraient d’autres choix fait partie de l’essence même du pluralisme. En tant qu’ancien correspondant en Union Soviétique, je suis très sensible à des demandes de censure basées sur la notion d’insulte. C’est un truc populaire des mouvements totalitaires: taxer chaque critique ou appel au débat d’insulte et punir les offenseurs. C’est ce qui est arrivé aux activistes des droits de l’homme et a des écrivains comme Andrei Sakharov, Vladimir Bukovsky, Alexander Soljenitsyne, Natan Sharansky, Boris Pasternak. Le régime les a accusés de propagande anti-Soviétique, de la même manière que certains Musulmans décrivent 12 caricatures parues dans un journal danois comme anti-Islamiques.
La leçon de la guerre froide est la suivante: si vous cédez a des impulsions totalitaires une seule fois, de nouvelles demandes suivront. L’Occident a prévalu dans la guerre froide, parce que nous avons défendu nos valeurs fondamentales et n’avons pas apaisé des tyrans totalitaires.

Depuis la publication des caricatures, le 30 septembre, un débat constructif concernant la liberté d’expression, la liberté de religion, ainsi que le respect pour les immigrants et les croyances individuelles s’est instauré au Danemark et en Europe. Jamais auparavant, autant de Musulmans danois ont participé à un dialogue public – dans des rencontres communales, lettres aux rédacteurs, opinions de lecteurs et débats à la radio et à la télévision. Nous n’avons pas eu d’émeutes anti-musulmanes, de Musulmans fuyant le pays et nous n’avons pas vu de Musulmans commettant des actes violents. Les imams radicaux qui ont informé leurs collègues au Moyen-Orient de manière erronnée concernant la situation des Musulmans au Danemark ont été marginalisés. Ils ne sont plus les porte-paroles de la communauté Musulmane au Danemark, parce que des Musulmans modérés ont eu le courage de s’exprimer contre eux. En janvier, Jyllands-Posten a publié trois pages complètes d’interviews et de photos de Musulmans modérés, disant ne pas être représentés par les imams. Ils insistent sur le fait que leur foi est compatible avec une démocratie laïque moderne. Un réseau de Musulmans modérés, respectant pleinement la constitution, a été établi, et le parti anti-immigration “People’s Party” a appelé ses membres à faire la différence entre les Musulmans radicaux et modérés, c’est à dire entre les Musulmans propageant la charia et les musulmans acceptant la tradition de la loi laïque. La face du Danemark musulman a changé, et il devient clair que ce n’est pas un débat entre “eux” et “nous”, mais entre ceux qui sont attachés à la démocratie au Danemark et ceux qui ne le sont pas.

Ceci est le genre de débat que Jyllands-Posten a espéré produire, lorsqu’il a choisi d’explorer les limites de l’autocensure en appelant des caricaturistes à remettre en question un tabou musulman. Avons nous réussi? Oui et non. Certaines défenses de notre liberté d’expression faites avec esprit, nous ont inspirés. Mais les tragiques manifestations à travers le Moyen-Orient et l’Asie ne sont pas ce que nous avions attendu et encore moins désiré. De plus, le journal a reçu 104 menaces, 10 personnes ont été arrêtées, des caricaturistes ont été forcés de se cacher à cause de menaces pesant sur leur vie et les bureaux de Jyllands-Posten ont été évacués plusieurs fois à cause d’alertes à la bombe. Ceci est un climat qui encourage peu à modérer l’autocensure.

Je pense cependant que les caricatures ont leur place dans deux histoires différentes, l’une en Europe et l’autre au Moyen-Orient. La politicienne néerlendaise d’origine somalienne, Ayaan Hirsi Ali, dit que l’intégration des Musulmans dans les sociétés européennes a été accélérée de 300 ans par la parution des caricatures; peut-être ne devrons nous pas rééditer la bataille du Siècle des Lumières en Europe. L’histoire du Moyen-Orient est plus complexe, mais a en fait très peu à voir avec les caricatures.

Flemming Rose est le rédacteur culturel du journal danois Jyllands-Posten
flemming.rose@jp.dk

Cet article est paru dans le Washington Post

Traduction en française: Galat

 Voir aussi:

Why I Published Those Cartoons
Flemming Rose
The Washington Post
Sunday, February 19, 2006

Childish. Irresponsible. Hate speech. A provocation just for the sake of provocation. A PR stunt. Critics of 12 cartoons of the prophet Muhammad I decided to publish in the Danish newspaper Jyllands-Posten have not minced their words. They say that freedom of expression does not imply an endorsement of insulting people’s religious feelings, and besides, they add, the media censor themselves every day. So, please do not teach us a lesson about limitless freedom of speech.

I agree that the freedom to publish things doesn’t mean you publish everything. Jyllands-Posten would not publish pornographic images or graphic details of dead bodies; swear words rarely make it into our pages. So we are not fundamentalists in our support for freedom of expression.

But the cartoon story is different.

Those examples have to do with exercising restraint because of ethical standards and taste; call it editing. By contrast, I commissioned the cartoons in response to several incidents of self-censorship in Europe caused by widening fears and feelings of intimidation in dealing with issues related to Islam. And I still believe that this is a topic that we Europeans must confront, challenging moderate Muslims to speak out. The idea wasn’t to provoke gratuitously — and we certainly didn’t intend to trigger violent demonstrations throughout the Muslim world. Our goal was simply to push back self-imposed limits on expression that seemed to be closing in tighter.

At the end of September, a Danish standup comedian said in an interview with Jyllands-Posten that he had no problem urinating on the Bible in front of a camera, but he dared not do the same thing with the Koran.

This was the culmination of a series of disturbing instances of self-censorship. Last September, a Danish children’s writer had trouble finding an illustrator for a book about the life of Muhammad. Three people turned down the job for fear of consequences. The person who finally accepted insisted on anonymity, which in my book is a form of self-censorship. European translators of a critical book about Islam also did not want their names to appear on the book cover beside the name of the author, a Somalia-born Dutch politician who has herself been in hiding.

Around the same time, the Tate gallery in London withdrew an installation by the avant-garde artist John Latham depicting the Koran, Bible and Talmud torn to pieces. The museum explained that it did not want to stir things up after the London bombings. (A few months earlier, to avoid offending Muslims, a museum in Goteborg, Sweden, had removed a painting with a sexual motif and a quotation from the Koran.)

Finally, at the end of September, Danish Prime Minister Anders Fogh Rasmussen met with a group of imams, one of whom called on the prime minister to interfere with the press in order to get more positive coverage of Islam.

So, over two weeks we witnessed a half-dozen cases of self-censorship, pitting freedom of speech against the fear of confronting issues about Islam. This was a legitimate news story to cover, and Jyllands-Posten decided to do it by adopting the well-known journalistic principle: Show, don’t tell. I wrote to members of the association of Danish cartoonists asking them « to draw Muhammad as you see him. » We certainly did not ask them to make fun of the prophet. Twelve out of 25 active members responded.

We have a tradition of satire when dealing with the royal family and other public figures,
and that was reflected in the cartoons. The cartoonists treated Islam the same way they treat Christianity, Buddhism, Hinduism and other religions. And by treating Muslims in Denmark as equals they made a point: We are integrating you into the Danish tradition of satire because you are part of our society, not strangers. The cartoons are including, rather than excluding, Muslims.

The cartoons do not in any way demonize or stereotype Muslims. In fact, they differ from one another both in the way they depict the prophet and in whom they target. One cartoon makes fun of Jyllands-Posten, portraying its cultural editors as a bunch of reactionary provocateurs. Another suggests that the children’s writer who could not find an illustrator for his book went public just to get cheap publicity. A third puts the head of the anti-immigration Danish People’s Party in a lineup, as if she is a suspected criminal.

One cartoon — depicting the prophet with a bomb in his turban — has drawn the harshest criticism. Angry voices claim the cartoon is saying that the prophet is a terrorist or that every Muslim is a terrorist. I read it differently: Some individuals have taken the religion of Islam hostage by committing terrorist acts in the name of the prophet. They are the ones who have given the religion a bad name. The cartoon also plays into the fairy tale about Aladdin and the orange that fell into his turban and made his fortune. This suggests that the bomb comes from the outside world and is not an inherent characteristic of the prophet.

On occasion, Jyllands-Posten has refused to print satirical cartoons of Jesus, but not because it applies a double standard. In fact, the same cartoonist who drew the image of Muhammed with a bomb in his turban drew a cartoon with Jesus on the cross having dollar notes in his eyes and another with the star of David attached to a bomb fuse. There were, however, no embassy burnings or death threats when we published those.

Has Jyllands-Posten insulted and disrespected Islam? It certainly didn’t intend to. But what does respect mean? When I visit a mosque, I show my respect by taking off my shoes. I follow the customs, just as I do in a church, synagogue or other holy place. But if a believer demands that I, as a nonbeliever, observe his taboos in the public domain, he is not asking for my respect, but for my submission. And that is incompatible with a secular democracy.

This is exactly why Karl Popper, in his seminal work « The Open Society and Its Enemies, » insisted that one should not be tolerant with the intolerant. Nowhere do so many religions coexist peacefully as in a democracy where freedom of expression is a fundamental right. In Saudi Arabia, you can get arrested for wearing a cross or having a Bible in your suitcase, while Muslims in secular Denmark can have their own mosques, cemeteries, schools, TV and radio stations.

I acknowledge that some people have been offended by the publication of the cartoons, and Jyllands-Posten has apologized for that. But we cannot apologize for our right to publish material, even offensive material. You cannot edit a newspaper if you are paralyzed by worries about every possible insult.

I am offended by things in the paper every day: transcripts of speeches by Osama bin Laden, photos from Abu Ghraib, people insisting that Israel should be erased from the face of the Earth, people saying the Holocaust never happened. But that does not mean that I would refrain from printing them as long as they fell within the limits of the law and of the newspaper’s ethical code.
That other editors would make different choices is the essence of pluralism.

As a former correspondent in the Soviet Union, I am sensitive about calls for censorship on the grounds of insult. This is a popular trick of totalitarian movements: Label any critique or call for debate as an insult and punish the offenders. That is what happened to human rights activists and writers such as Andrei Sakharov, Vladimir Bukovsky, Alexander Solzhenitsyn, Natan Sharansky, Boris Pasternak. The regime accused them of anti-Soviet propaganda, just as some Muslims are labeling 12 cartoons in a Danish newspaper anti-Islamic.

The lesson from the Cold War is: If you give in to totalitarian impulses once, new demands follow. The West prevailed in the Cold War because we stood by our fundamental values and did not appease totalitarian tyrants.

Since the Sept. 30 publication of the cartoons, we have had a constructive debate in Denmark and Europe about freedom of expression, freedom of religion and respect for immigrants and people’s beliefs. Never before have so many Danish Muslims participated in a public dialogue — in town hall meetings, letters to editors, opinion columns and debates on radio and TV. We have had no anti-Muslim riots, no Muslims fleeing the country and no Muslims committing violence. The radical imams who misinformed their counterparts in the Middle East about the situation for Muslims in Denmark have been marginalized. They no longer speak for the Muslim community in Denmark because moderate Muslims have had the courage to speak out against them.

In January, Jyllands-Posten ran three full pages of interviews and photos of moderate Muslims saying no to being represented by the imams. They insist that their faith is compatible with a modern secular democracy. A network of moderate Muslims committed to the constitution has been established, and the anti-immigration People’s Party called on its members to differentiate between radical and moderate Muslims, i.e. between Muslims propagating sharia law and Muslims accepting the rule of secular law. The Muslim face of Denmark has changed, and it is becoming clear that this is not a debate between « them » and « us, » but between those committed to democracy in Denmark and those who are not.

This is the sort of debate that Jyllands-Posten had hoped to generate when it chose to test the limits of self-censorship by calling on cartoonists to challenge a Muslim taboo. Did we achieve our purpose? Yes and no. Some of the spirited defenses of our freedom of expression have been inspiring. But tragic demonstrations throughout the Middle East and Asia were not what we anticipated, much less desired. Moreover, the newspaper has received 104 registered threats, 10 people have been arrested, cartoonists have been forced into hiding because of threats against their lives and Jyllands-Posten’s headquarters have been evacuated several times due to bomb threats. This is hardly a climate for easing self-censorship.

Still, I think the cartoons now have a place in two separate narratives, one in Europe and one in the Middle East. In the words of the Somali-born Dutch politician Ayaan Hirsi Ali, the integration of Muslims into European societies has been sped up by 300 years due to the cartoons; perhaps we do not need to fight the battle for the Enlightenment all over again in Europe. The narrative in the Middle East is more complex, but that has very little to do with the cartoons.

flemming.rose@jp.dk

Flemming Rose is the culture editor of the Danish newspaper Jyllands-Posten.

3 Responses to Caricatures: Pourquoi j’ai publié ces caricatures (Flemming Rose: Why I published those cartoons)

  1. […] Je suis offensé par des sujets dans le journal chaque jour: traductions des discours de Osama bin Laden, photos de Abu Ghraib, de personnes qui insistent pour qu’Israël soit effacé de la surface de la terre, de gens qui prétendent que l’Holocauste n’a pas existé. Mais cela ne signifie pas que j’hésiterai à publier ces sujets. (…) Des voix furieuses prétendent que la caricature dit que le prophète est un terroriste ou que tous les musulmans sont des terroristes. Je lis cette caricature différemment: certains individus ont pris la religion musulmane en otage en commettant des actes terroristes au nom du prophète. Ce sont ceux-ci qui ont donné une mauvaise image à cette religion. Flemming Rose […]

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  2. […] Je suis offensé par des sujets dans le journal chaque jour: traductions des discours de Osama bin Laden, photos de Abu Ghraib, de personnes qui insistent pour qu’Israël soit effacé de la surface de la terre, de gens qui prétendent que l’Holocauste n’a pas existé. Mais cela ne signifie pas que j’hésiterai à publier ces sujets. (…) Des voix furieuses prétendent que la caricature dit que le prophète est un terroriste ou que tous les musulmans sont des terroristes. Je lis cette caricature différemment: certains individus ont pris la religion musulmane en otage en commettant des actes terroristes au nom du prophète. Ce sont ceux-ci qui ont donné une mauvaise image à cette religion. Flemming Rose […]

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  3. […] La liberté de publier ne signifie pas la liberté de publier n’importe quoi. Jyllands-Posten ne publierait jamais d’images pornographiques ou des images montrant en détail des cadavres; des jurons trouvent rarement leur place dans nos pages. Nous ne sommes donc pas des fondamentalistes dans notre support de la liberté d’expression. Mais l’histoire des caricatures est différente. Les exemples précédents sont liés à l’exercice d’une retenue pour des raisons éthiques et de bon goût; appelons cela la mise en page. Par contraste, j’ai lancé l’histoire des caricatures pour répondre à plusieurs incidents d’autocensure en Europe, incidents causés par les peurs croissantes et les sentiments d’intimidation ressentis en adressant des problèmes liés à l’Islam. Et je suis plus que toujours persuadé que c’est un thème que nous, Européens, devons confronter, afin de pousser les Musulmans modérés à s’exprimer. L’idée n’était pas de provoquer gratuitement – et certainement, notre intention n’était pas de provoquer des manifestations violentes dans le monde musulman. Notre but était simplement de faire reculer des limites que nous nous imposons nous-mêmes et qui semblaient devenir de plus en plus étroites. Fin septembre, un humoriste danois a dit dans une interview avec Jyllands-Posten qu’il n’avait aucun problème à uriner sur une Bible devant une caméra, mais qu’il n’oserait pas faire la même chose avec le Coran. Cet aveu a été le point culminant d’une série d’instances troublantes d’autocensure. En septembre dernier, un écrivain pour enfants danois avait de la peine à trouver un illustrateur pour publier un livre sur la vie de Mahomet. Trois personnes ont refusé le travail par peur des conséquences. La personne qui a finalement accepté a insisté pour garder son anonymat, ce qui, selon moi, est une forme d’autocensure. Des traducteurs européens d’un livre critique de l’Islam ne voulaient pas que leur nom apparaisse à côté du nom de l’auteur, une politicienne néerlandaise née en Somalie qui, elle-même, vit cachée. Environ à la même époque, la galerie d’art Tate à Londres a retiré une oeuvre par l’artiste d’avant- garde John Latham montrant le Coran, la Bible et le Talmud déchirés en morceaux. Le musée a expliqué qu’ils ne voulaient pas envenimer la situation après les attentats de Londres. (Quelques mois plus tôt, un musée de Göteborg en Suède, a enlevé une peinture contenant un motif sexuel et des citations du Coran afin de ne pas offenser les Musulmans.) Finalement, fin septembre, le premier ministre danois, Anders Fogh Rasmussen a rencontré un groupe d’imams dont l’un d’entre eux a demandé au premier ministre d’intervenir auprès de la presse afin de produire une présentation plus positive de l’Islam. Ainsi, au cours de deux semaines, nous avons observé une demi-douzaine de cas d’autocensure, opposant la liberté d’expression à la peur de confronter des questions concernant l’Islam. Tout celà constituait une information légitime à publier, et Jyllands-Posten a décidé de le faire en adoptant le principe journalistique bien connu: montrer mais ne rien dire. J’ai écrit à des membres de l’association danoise des caricaturistes, leur demandant de “dessiner Mahomet comme ils le voyaient”. Nous ne leur avons certainement pas demandé de se moquer du prophète. Douze des 25 membres actifs ont répondu. Nous avons une tradition satirique lorsque nous parlons de la famille royale et d’autres personnes publiques et ceci est visible dans les caricatures. Les caricaturistes ont traité l’Islam comme ils traitent le christianisme, le bouddhisme, l’hindouisme et d’autres religions. Et en traitant les Musulmans au Danemark comme des égaux, ils ont démontré un point: nous vous intégrons dans la tradition danoise de la satire parce que vous faites partie de notre société, et vous n’êtes pas des étrangers. Les caricatures incluent, plutôt qu’excluent les Musulmans. (…) Une caricature – montrant le prophète avec une bombe dans son turban – a attiré les critiques les plus sévères. Des voix furieuses prétendent que la caricature dit que le prophète est un terroriste ou que tous les musulmans sont des terroristes. Je lis cette caricature différemment: certains individus ont pris la religion musulmane en otage en commettant des actes terroristes au nom du prophète. Ce sont ceux-ci qui ont donné une mauvaise image à cette religion. (…) Je reconnais que certaines personnes ont été offensées par la publication des caricatures, et Jyllands-Posten s’en est excusé. Mais nous ne pouvons pas nous excuser pour notre droit à publier certains sujets, même des sujets offensifs. On ne peut pas publier un journal si on est paralysé par la crainte d’une insulte. Je suis offensé par des sujets dans le journal chaque jour: traductions des discours de Osama bin Laden, photos de Abu Ghraib, de personnes qui insistent pour qu’Israël soit effacé de la surface de la terre, de gens qui prétendent que l’Holocauste n’a pas existé. Mais cela ne signifie pas que j’hésiterai à publier ces sujets, pour autant qu’ils respectent la loi et le code éthique du journal. Le fait que d’autres rédacteurs feraient d’autres choix fait partie de l’essence même du pluralisme. En tant qu’ancien correspondant en Union Soviétique, je suis très sensible à des demandes de censure basées sur la notion d’insulte. C’est un truc populaire des mouvements totalitaires: taxer chaque critique ou appel au débat d’insulte et punir les offenseurs. C’est ce qui est arrivé aux activistes des droits de l’homme et a des écrivains comme Andrei Sakharov, Vladimir Bukovsky, Alexander Soljenitsyne, Natan Sharansky, Boris Pasternak. Le régime les a accusés de propagande anti-Soviétique, de la même manière que certains Musulmans décrivent 12 caricatures parues dans un journal danois comme anti-Islamiques. La leçon de la guerre froide est la suivante: si vous cédez a des impulsions totalitaires une seule fois, de nouvelles demandes suivront. L’Occident a prévalu dans la guerre froide, parce que nous avons défendu nos valeurs fondamentales et n’avons pas apaisé des tyrans totalitaires. Flemming Rose […]

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