Polémique Ménard: Il faut relancer le débat sur les statistiques ethniques (No demographics, please, we’re French)

https://webarchive.nationalarchives.gov.uk/ukgwa/20160108071726mp_/http://www.ons.gov.uk/ons/resources/figure5religionbyethnicity_tcm77-310415.png

https://i0.wp.com/upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/44/Census-2000-Data-Top-US-Ancestries.jpghttps://i0.wp.com/upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/db/Religions_of_the_US.PNGhttps://i0.wp.com/si.wsj.net/public/resources/images/NA-BH463_numbgu_NS_20100813185901.gifhttps://i0.wp.com/upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/0/0c/Religions_of_the_United_States.png https://i0.wp.com/i.dailymail.co.uk/i/pix/2014/05/06/article-2620957-1D97975900000578-999_634x572.jpg
https://i0.wp.com/i.dailymail.co.uk/i/pix/2014/05/05/article-2620957-1D97AD2700000578-399_306x348.jpg
https://i0.wp.com/i.dailymail.co.uk/i/pix/2014/05/05/article-2620957-1D97AE0F00000578-460_306x348.jpg

Ethnic groups: Celtic and Latin with Teutonic, Slavic, North African, Indochinese, Basque minorities;  overseas departments: black, white, mulatto, East Indian, Chinese, Amerindian. CIA factbook
Ethnic groups: This entry provides an ordered listing of ethnic groups starting with the largest and normally includes the percent of total population. CIA factbook
Il y a plus d’un siècle, Jean Jaurès définissait par ces mots sa vision du vivre-ensemble entre citoyens issus des deux rives de la Méditerranée : « l’action socialiste se produira, en chaque pays, avec d’autant plus de force et d’autorité qu’elle sera universelle et universellement probe, et que nul ne pourra y soupçonner un piège ». A l’heure où les crises économique, écologique et sociale s’abattent de concert sur notre pays et où de trop longues années de mauvaise gouvernance favorisent la montée des haines et du rejet de l’autre, il nous incombe de revenir aux valeurs fondatrices de notre pacte républicain et du projet socialiste pour bâtir cette société enfin véritablement universelle. Ces jours-ci, nous célébrerons la grande fête de solidarité et de partage qu’est l’Aïd-al-Fitr. A l’issue du mois de jeûne du Ramadan, temps fort de joie, d’échange de vœux et de présents, elle illumine la vie et les demeures de millions de nos compatriotes de culture musulmane. Issue d’une longue tradition et porteuse de riches héritages culturels, par les valeurs qu’elle porte et l’idéal social qu’elle vise, elle s’inscrit pleinement dans cette démarche d’universalité. François Hollande (31 août 2011)
La République française une, indivisible et laïque. Et la République ne craint pas la diversité, parce que la diversité c’est le mouvement. La diversité, c’est la vie. Et l’uniformité, c’est l’oubli. Diversité des parcours, diversité des origines, diversité des couleurs, mais pas diversité des races. Il n’y a pas de place dans la République pour la race. Et c’est pourquoi je demanderai au lendemain de l’élection présidentielle au Parlement de supprimer le mot race de notre Constitution» (…) «parce que le mot a pris un autre sens aujourd’hui. (…) Nous ne connaissons qu’une seule race, une seule famille, la famille humaine. Notre pays s’est construit d’apports successifs de populations issues d’horizons multiples. Et l’Outre-mer en a été un des atouts. Si nous avons été capables de faire cette unité, ce rassemblement, cette construction, c’est parce que nous portons par notre histoire, par nos valeurs, une belle espérance qui se nomme l’universalité — c’est-à-dire l’universalité de la République, de ses valeurs. François Hollande
En ce début du XXI° siècle, un nouveau péril terrifiant vient assombrir encore davantage l’avenir de ce malheureux continent que l’on pourrait croire décidément voué au malheur. C’est une explosion démographique à venir, inouïe, sans précédent dans l’histoire du monde. Ce phénomène, selon les prévisions des Nations Unies, pourrait porter la population africaine au chiffre véritablement hallucinant de 4,2 milliards de personnes, soit autour de 47 % de la population mondiale prévue pour la fin de ce siècle. En 2100, un homme sur deux sur la planète vivrait en Afrique ! Cela alors que l’Afrique n’est, de toute évidence, nullement préparée à affronter ce prodigieux défi démographique. En conséquence, l’Afrique, naguère sous-peuplée, va-t-elle devenir un continent maudit, surpeuplé et affamé, livré à tous les déchirements que la misère extrême peut engendrer ? Sans compter que son déversoir naturel serait inévitablement une Europe d’abord réticente, puis un jour peut-être, hostile. Yves-Marie Laulan (Institut de Géopolitique des Populations)
Dans sa lettre aux musulmans à l’occasion de l’Aïd-al-Fitr, François Hollande évoque le « projet socialiste pour bâtir cette société enfin véritablement universelle. ». Quel est exactement ce projet ? (…) Il ne s’agit pas d’un projet secret, mais d’une utopie à moyen-long terme, qui est plus ou moins distillée dans les réflexions de Terra Nova, la Nouvelle Civilisation de Martine Aubry, le projet du Parti Socialiste pour 2012, ou bien encore dans cette petite phrase de François Hollande. (…) Mais (…) comment faire pour « bâtir cette société véritablement universelle » ? Eh bien puisque l’exportation n’a pas fonctionné, tentons le pari de l’importation ! (…) Cela fait quelque temps déjà que l’extrême-gauche prône en quelque sorte la création d’une « nouvelle civilisation » sur nos terres. Ceci en faisant venir en masse des immigrés, en important de nouveaux « prolétaires » pour remplacer ceux qui font défaut en France, afin de faire exploser le système capitaliste (si c’est sous le poids des prestations sociales, c’est bien vu !). Mais aussi pour mettre à mal l’ordre établi dans notre société judéo-chrétienne et blanche, donc  « fondamentalement raciste ». Stéphane Buret
La basilique de Saint-Denis, où reposent les rois de France, n’est qu’à quelques stations de RER ou de métro du coeur de Paris. Mais en vingt minutes de trajet, on change radicalement de monde. Je me souviens m’y être rendue il y a dix ans, trois mois après la réélection de Jacques Chirac. À la sortie du métro, les jeunes filles voilées étaient déjà nombreuses devant l’université. À l’entrée de la basilique, alors occupée par des sans-papiers, trois femmes voilées de noir, assises derrière une longue table qui barrait l’accès de la nef, contrôlaient les visiteurs. Ce jour-là, j’ai pensé que si j’avais dû habiter là-bas, j’aurais probablement voté FN. Christine Clerc
Les plus dangereux éléments de l’extrême droite ne sont donc pas ses noyaux durs, mais les pseudopodes qu’elle émet dans des directions éloignées et variées qui permettent aux venins idéologiques du Front national de se répandre dans une large partie de la société (…)  sous l’emprise d’une sorte de fanatisme démographique, telle M. Tribalat, la prophète de l’assimilation et de la population “de souche”. Ce dernier groupe est de loin le plus dangereux car il agit masqué, peut-être à l’insu de ses membres qui sont persuadés, soit de leur mission, soit que la poursuite de leur intérêt personnel par tous les moyens n’a pas de conséquence politique. Hervé Le Bras
Un chiffre étonnamment stable: contrairement à ce que l’on croit souvent, la proportion d’immigrés ne varie guère depuis le début des années 1980. Le Monde (03.12.09)
Cet article du 4 décembre montre que les bons sentiments et la volonté pédagogique de redresser l’opinion publique qui pense mal conduisent à des catastrophes. Ils conduisent à piétiner la déontologie minimale de tout journaliste qui se respecte dont le devoir est d’informer et non de consoler ou de rassurer. Le Monde vient de faire la démonstration que les chiffres peuvent être manipulés et, à l’opposé de ses intentions sans doute, conforte ainsi ceux qui pensent que les médias ne disent pas la vérité sur la question de l’immigration. Michèle Tribalat
On a voulu rester sobre pour ne pas choquer les sensibilités de l’Insee, pour que ce soit publiable par eux mais ils ont pas envie de le traiter. Toute nouvelle avec des infos de type forte concentration au delà de ce qu’on aurait pu imaginer, l’Insee préfère ne pas informer plutôt que de risquer de publier une nouvelle sensible. Par peur de réveiller le racisme en France. Michèle Tribalat
En France, on ne devrait pas pouvoir à la fois se vanter d’avoir réussi à faire barrage aux statistiques ethnoraciales et espérer connaître la situation des Noirs. Pourtant, manifestement, dans ce pays, on sait sans avoir besoin de compter. Michèle Tribalat
Si les bobos vantent la diversité, ce sont les ouvriers français qui ont été au contact des immigrés dans la capitale. Ce sont eux qui ont amorti l’intégration. Michèle Tribalat
Jean-François Revel explique très justement, dans La connaissance inutile, que les scientifiques ne sont pas plus raisonnables que le commun des mortels dès qu’ils s’éloignent de leur domaine d’études : « le travail scientifique , par sa nature particulière, comporte et impose de façon prédominante des critères impossibles à éluder durablement (…) Un grand savant peut se forger ses opinions politiques ou morales de façon aussi arbitraire et sous l’empire de considérations aussi insensées que les hommes dépourvus de toute expérience du raisonnement scientifique. (…) Vivre à une époque modelée par la science ne rend aucun de nous plus apte à se comporter de façon scientifique en dehors des domaines et des conditions où règnent sans équivoque la contrainte des procédures scientifiques. »(..) « le chercheur scientifique n’est pas un homme par nature plus honnête que l’ignorant. C’est quelqu’un qui s’est volontairement enfermé dans des règles telles qu’elles le condamnent, pour ainsi dire, à l’honnêteté. »(…) Yan van Beek, un chercheur néerlandais parle de la lecture morale selon laquelle un savoir n’est pas jugé en fonction de son mérite factuel mais en raison de ses conséquences sociales, politiques ou morales. Des normes existent et sont d’autant plus difficiles à transgresser qu’elles touchent certains sujets. Il ne faut sous-estimer l’ignorance. La méconnaissance des faits et la préférence pour le politiquement correct se conjuguent pour expliquer pourquoi il n’est nul besoin d’être sous le joug d’un pouvoir autoritaire pour voir fleurir des versions officielles sur de nombreux sujets. Les médias ont une arme plus terrible encore que le dénigrement : le silence. Une thèse qui n’est pas connue ne risque pas d’être populaire. Cependant, le pluralisme ne garantit pas la vérité. Vous pouvez mettre la plus grande diversité des incompétences devant une caméra, il est peut probable qu’il en sorte quelque chose d’instructif. Il manque un véritable attachement à la liberté d’expression, un goût de la vérité, une plus grande confiance dans l’aptitude de la société à réagir sainement aux informations. Il faudrait également que les médias cessent de vouloir réformer l’opinion publique pour l’informer. Michèle Tribalat
L’avantage fécond, sans être colossal, appliqué à une structure par âge beaucoup plus jeune, est loin d’être négligeable et favorise les croyants les plus impliqués. Combiné à une immigration dont on ne voit pas bien qu’elle puisse se réduire dans les années qui viennent, à une rétention élevée due à une endogamie religieuse très importante et à une « réislamisation » des jeunes générations, il donne à la confession musulmane un dynamisme tout à fait incongru dans un pays très fortement laïcisé, en voie de déchristianisation avancée et qui a pris l’habitude de penser cette sécularisation galopante comme à la fois progressiste et inexorable. On a, j’ai moi-même, longtemps pensé que l’islam ne ferait pas exception à ce puissant courant. Rien n’est moins sûr. Un contexte très sécularisé peut, au contraire, être le ferment d’un durcissement identitaire et religieux, l’islam n’étant pas perçu comme ringard, à la différence de l’intégrisme catholique, et bénéficiant d’un « climat relativiste », propice à son expansion. Michèle Tribalat
En 1992, on (…) observait une sécularisation importante des jeunes d’origine algérienne, des unions mixtes en nombre non négligeable pour les débuts de vie en couple de ces jeunes, une certaine mobilité sociale, ainsi qu’un recul des pratiques matrimoniales traditionnelles. La sécularisation des jeunes d’origine algérienne paraissait prometteuse. Je n’ai pas, alors, anticipé le mouvement de désécularisation que je décris dans mon dernier livre (Assimilation. La fin du modèle français, Éditions du Toucan, 2013), qui a coïncidé avec la réislamisation des jeunes. Combiné à une forte endogamie religieuse, il ne favorise pas la mixité ethnique des mariages. (…) L’enquête MGIS était rétrospective et recueillait l’histoire des individus sur le temps long, autrement dit, le passé. Elle ne pouvait donc, en aucun cas, répondre aux interrogations sur l’évolution récente et les phénomènes émergents. Il aurait fallu mener des enquêtes de ce type régulièrement. (…) L’observation nationale fait la moyenne de situations locales extrêmement contrastées et ne constitue donc pas un outil suffisant à la description du réel. Différents niveaux de réalité peuvent coexister de manière contradictoire. Il est possible que des situations locales évoluent mal sans que les données nationales n’en rendent compte, au moins pendant un certain temps. (…) Aujourd’hui, la catégorie des immigrés est entrée dans les mœurs statistiques françaises et l’Insee a introduit le pays de naissance et la nationalité de naissance des parents dans la plupart de ses grandes enquêtes. Le dernier pas à franchir est l’introduction de ces données dans les enquêtes annuelles de recensement. (…) j’ai pu montrer que l’importance accordée à la religion était plus grande chez les jeunes adultes musulmans que chez les plus vieux, alors qu’on observait le phénomène inverse chez les catholiques. Classer n’implique aucune fixité de comportement dans le temps. Classer, c’est ce que fait la statistique tout le temps. Je ne vois pas pourquoi les variables culturelles et religieuses seraient écartées d’emblée avant d’avoir été étudiées. L’introduction de la religion dans l’enquête « Trajectoires et origines » de 2008, ce qui n’avait pas été possible en 1992, nous a appris beaucoup de choses. Il a ainsi été possible d’estimer le nombre de musulmans, et pour un démographe, les nombres comptent, d’estimer leur potentiel démographique et d’analyser l’évolution de leur rapport à la religion selon l’âge, notamment à travers une transmission croissante de l’islam. (…) après le cycle migratoire des Trente Glorieuses, la France a connu vingt-cinq ans de « plat » migratoire, avec une proportion d’immigrés n’évoluant pas et une population immigrée qui augmentait au rythme de la population native. (…) Ensuite nous sommes passés à un nouveau cycle. Le cycle migratoire des années 2000, équivalent en intensité de celui des Trente Glorieuses, a offert des opportunités nouvelles au FN. Loin de les contester, Marine Le Pen utilise d’ailleurs volontiers les chiffres donnés par le ministère de l’Intérieur sur l’immigration étrangère. Mais je crois que le diagnostic du FN sur l’impuissance politique est juste. La France n’a pas vraiment la maîtrise de la politique migratoire, qui est une compétence partagée avec l’UE et la Commission européenne est favorable à une politique migratoire très généreuse compte tenu de ses anticipations démographiques. Michèle Tribalat
J’estime que le meilleur moyen de faire monter l’extrémisme, c’est de dissimuler la vérité. La sécurité n’est pas seulement une affaire de bons sentiments ; c’est une affaire de clarté et d’efficacité. Comment être efficace quand on se met hors d’état d’appréhender une partie du réel ? La manière dont on occulte certains chiffres, dont on élude certaines données statistiques, dont on laisse de côté des éléments parfaitement rationnels, de crainte qu’ils soient instrumentalisés par tel ou tel, est à la fois irresponsable du point de vue l’action publique, et contre-productif politiquement. Pourquoi ? Parce que quand on s’abstient d’aborder rationnellement un sujet, on se place en situation de le voir traiter irrationnellement par d’autres… On aide les receleurs des peurs collectives. (…) Quand on fait de ce sujet, qui devrait être traité scientifiquement, un sujet tabou, on le transforme automatiquement en objet de passion. « Si l’on nous cache les chiffres se rapportant à une réalité que nous constatons chaque jour, pensent les citoyens, c’est qu’ils sont pires encore que ce que nous imaginons… » Et de là à penser que les étrangers sont structurellement des délinquants, il n’y a qu’un pas. Ce qui relève évidemment du fantasme. Comme pour les immigrés d’ailleurs. Contrairement aux Anglo-Saxons, qui ont l’habitude du débat faisant la différence entre le fait et l’opinion dans tous les domaines, nous autres français avons une culture du commentaire. Nous parlons thérapeutique sans oser poser le moindre diagnostic. Or la criminologie a ceci de commun avec la médecine qu’elle s’ordonne en trois étapes : diagnostic, pronostic et thérapeutiques. Il existe trente-six manières d’annoncer à un patient qu’il a cancer. Mais si on ne le lui dit pas et qu’on le soigne comme s’il avait un rhume, il y a fort peu de chances qu’il en réchappe… (…) Ce qui relève de l’irrationnel, c’est évidemment d’expliquer le caractère criminogène de l’immigration par des facteurs ethniques ou raciaux. Cette explication est vieille comme le monde – l’éternelle recherche de boucs émissaires – mais elle s’invalide d’elle-même par l’observation historique : aucun groupe ethnique ne détient, dans l’histoire de l’humanité, le monopole de la violence ou du crime. Ce serait plutôt l’inverse, comme les génocides ont pu le révéler. En revanche, le fait que certains groupes, en fonction de leur composition démographique, placés dans certaines situations, réagissent selon des règles particulières, donne la piste de l’explication rationnelle. S’il existe un déterminisme, c’est du côté de la situation qu’il faut le chercher, évidemment pas du côté de l’origine… C’est si vrai que ce qui se dit aujourd’hui des Noirs, des Maghrébins ou des Roms – voleurs, violeurs et violents – se disait au début du siècle dernier, dans des termes exactement identiques, des immigrés polonais (blonds aux yeux bleus et catholiques selon le stéréotype), italiens ou espagnols (généralement catholiques), voire des Irlandais aux États-Unis…(…) L’islam constitue sans doute une difficulté supplémentaire, d’ordre culturel. Mais cela ne change rien au fond de mon propos : la quasi-identité culturelle entre Français, Polonais ou Italiens n’a pas empêché l’arrivée massive de ces derniers de générer des réactions aiguës dans certaines régions. D’où la nécessité de lever tous les tabous sur ces questions pour forger un instrument d’analyse fiable qui permette d’ajuster le traitement à la gravité du mal. Quand on aura enfin compris qu’il faut sortir de la morale abstraite (éviter tel sujet pour éviter de “stigmatiser” telle ou telle minorité), le débat pourra enfin s’ouvrir sur les faits : c’est l’intérêt de la liberté scientifique de ne proscrire aucun domaine d’investigation. Et il est clair que l’étude des liens potentiels entre délinquance et immigration est un sujet comme un autre… Encore faut-il rappeler que la statistique ethno-raciale n’a sur ces questions que peu d’intérêt tant les classifications deviennent complexes et le métissage important. Les Anglais ou les Américains l’ont compris, rendant leur outil tellement détaillé qu’il ressemble de plus en plus à l’annuaire du téléphone… (…) [Ce qu’il faut dire aux “angélistes” qui évitent d’aborder la question, c’est] Qu’ils quittent le seul domaine de la morale pour s’intéresser aux lois de la démographie. Que nous apprend-elle ? Que toute vague d’immigration se traduit par une surreprésentation naturelle des jeunes hommes. Et tout le monde admettra que les jeunes mâles sont naturellement plus agités que les vieilles dames ! De sorte que, dans les quartiers où vous avez cinq fois plus de jeunes Beurs ou Africains de la classe 15-25 ans que de jeunes “Gaulois” du même âge, il est acquis que, mécaniquement, ces jeunes Beurs seront davantage mis en cause que les “Gaulois”… La conclusion ne doit donc rien au racisme et tout à l’arithmétique : dire la vérité sur ces questions devrait permettre aux politiques d’ajuster leurs réflexions afin d’éviter la constitution d’espaces de relégation, de ségrégation et de sécession. Bref, de ghettos. (…) Le nombre d’étrangers [dans les prisons] est parfaitement connu. Mais il est faiblement significatif. D’abord parce que beaucoup d’entre eux sont détenus, justement, pour infraction à la législation sur les étrangers, ce qui leur confère, si j’ose dire, un certain handicap comparatif sur les Français. Ensuite parce que la loi interdit de communiquer sur l’origine ethnique des mineurs délinquants qui, s’ils sont nés en France de parents étrangers, deviennent automatiquement français à 18 ans… (…) comme chercheur, je suis partisan de la plus grande liberté possible. Mais en même temps, je sais d’expérience que même si la loi autorisait les recensements ethniques, ils n’auraient pas une grande signification. Et ce, pour une raison, somme toute encourageante : au bout de quelques générations, les sujets ne se définissent plus comme “algériens”, ou “maliens” mais bien comme français. En Grande-Bretagne, par exemple, où les statistiques ethniques sont courantes, beaucoup de gens de couleur se définissent comme irlandais, gallois, ou comme écossais. Et quand on a voulu définir une catégorie “indo-pakistanaise”, il y a eu un tollé : certains ont voulu se définir comme indiens, les autres, comme pakistanais. Aux États-Unis, il a fallu diviser les Latinos en plus ou moins “colorés”… (…) La pédagogie, c’est de tout dire. Cacher, c’est attiser le fantasme. Entre donner du poisson et apprendre à pêcher, j’ai toujours choisi la seconde solution. Il vaut mieux un débat qui permette aux idées, même extrémistes, de s’exprimer, qu’une absence de débat qui laisse les préjugés prospérer sur l’absence supposée des données… (…) qui représentent les plus importants sujets de réitération : les mineurs et les délinquants sexuels. Pour les premiers, le système français dispose d’un avantage, communément admis un peu partout : il considère qu’il faut donner aux jeunes une deuxième chance. Donc on ne condamne pas. Ou symboliquement. Le problème, c’est que la deuxième chance peut se multiplier à l’infini. Et qu’au lieu d’avoir un système “carotte-bâton”, parfaitement légitime, nous débouchons très vite sur un système carotte-carotte qui n’est plus dissuasif… L’une des études les plus intéressantes dont nous disposions a été menée à partir d’entretiens avec des jeunes racontant leur propre expérience criminelle. Il en ressort que 5 % des délinquants seraient responsables de 50 % de la production criminelle. Or le système traite de la même manière ces 5% et les 95 % restants… Nous sommes donc confrontés ici à un égalitarisme pénal très handicapant pour la société : on traite de la même manière les délinquants “encourageants” – ceux qui ne recommenceront jamais (une très grande majorité) et ceux qui concentrent, à eux seuls, un très grand nombre de délits ! (…)Soyons juste : si certains magistrats sont aveuglés par l’idéologie, certains policiers sont plus que légers avec la procédure : beaucoup de magistrats qui font parfaitement leur travail sont bien forcés de classer sans suite un grand nombre d’affaires parce que la procédure est mal écrite ou que son auteur est inconnu. Mais certains font aussi une théologie procédurale de la libération qui ne manque pas de culot. Alain Bauer
My name is Jamaal; I’m white. Growing up I never thought twice about my name (of course I was next door to a commune, hanging out with Orly, Oshia, Lark Song, River Rocks, Sky Blue, and more than one Rainbow). (…) Halfway through my first year teaching, the principal who had hired me confided that I was lucky to have gotten the job. (…)  They had not been planning to take another student-teacher when my application showed up.  But, in his words, as they scanned through it and saw a Jamaal who plays basketball and counts Muhammad Ali among his heroes he thought, we could use a little diversity. Jaamal Allan
Nous sommes à un tournant identitaire car nous sommes devenus minoritaires, nous, les Guyanais. En fait, nous payons aujourd’hui les plans de peuplement lancés dans les années 1970 pour noyer les mouvements indépendantistes d’alors et sécuriser le centre spatial. Jacques Chirac, le ministre de l’Agriculture de l’époque, a joué les apprentis sorciers.explique Christiane Taubira (députée PRG de Guyane, 2005)
Nous sommes à un tournant identitaire. Les Guyanais de souche sont devenus minoritaires sur leur propre terre. Christiane Taubira (2007)
Ce qu’il a fait est un crime contre la République ! Il y a une procédure judiciaire qui suivra son cheminement. Le destituer est possible dans la loi, c’est une décision qui peut être prise mais ce n’est pas à moi qu’il appartient de la prendre. Christiane Taubira (sur Robert Ménard, 2015)
Lorsque l’on passe son temps à créer de la haine dans une société, on ne peut pas être républicain ! (…) Ce qu’il faut retenir, c’est que ce sont des gens qui ne sont pas républicains et ne conçoivent pas que l’on fasse société en étant différent ce sont des gens qui passent leur temps à regarder la société en la fragmentant et en cherchant un bouc-émissaire, un ennemi intérieur, quelqu’un sur qui concentrer la haine. (…) Lorsque l’on passe son temps à créer de la haine dans une société, on ne peut pas être républicain ! Christiane Taubira (sur la famille Le  Pen, 2015)
« Il faut relancer le débat sur les statistiques ethniques et je présenterai un projet de loi en ce sens à l’Assemblée nationale en début d’année prochaine  (…) pour certains, les statistiques ethniques mettraient en cause les valeurs de la République, alors qu’au contraire, c’est l’absence de mesures concrètes qui est à craindre… Manuel Valls (2009)
Belle image de la ville d’Evry… Tu me mets quelques Blancs, quelques Whites, quelques Blancos… Manuel Valls (Evry, 06.06.09)
Evidemment avec les stands qu’il y avait là, le sentiment que la ville, tout à coup, ça n’est que cela, (…) ça n’est que cette brocante, alors que j’ai l’idée au fond d’une diversité, d’un mélange, qui ne peut pas être uniquement le ghetto. On peut le dire, ça ? (…) On a besoin d’un mélange. Ce qui a tué une partie de la République, c’est évidemment la ghettoïsation, la ségrégation territoriale, sociale, ethnique, qui sont une réalité. Un véritable apartheid s’est construit, que les gens bien-pensants voient de temps en temps leur éclater à la figure, comme ça a été le cas en 2005, à l’occasion des émeutes de banlieues. Manuel Valls (Direct 8)
Je l’assume totalement. Je veux lutter contre le ghetto. C’est quoi le ghetto? On met les gens les plus pauvres, souvent issus de l’immigration – et pas seulement – dans les mêmes villes, dans les mêmes quartiers, dans les mêmes cages d’escalier, dans les mêmes écoles. (…) Je l’assume parce que je suis républicain et que je lutte contre tous les communautarismes. (…) Ca arrange beaucoup de gens qu’il y ait des ghettos (…) moi, je veux les casser, c’est ça l’émancipation de ces quartiers qui méritent de représenter demain l’avenir de ce pays. Manuel Valls
Honte au Maire de Béziers. La République ne fait AUCUNE distinction parmi ses enfants. Manuel Valls (05.05.15)
Le fichage d’élèves dans les écoles est contraire à toutes les valeurs de la République. Il y a des principes dans la République et quand ils sont gravement atteints, les tribunaux en sont saisis et des sanctions seront prononcées par les juges compétents. François Hollande (Ryad, 05.05.15)
On a besoin de savoir quelle est la réalité pour que les choses puissent changer. Patrick Lozès (Cran)
 Il y a 64,6 % d’enfants de confession musulmane à Béziers. (…) Ce sont les chiffres de ma mairie. Pardon de vous dire que le maire a les noms, classe par classe, des enfants. Je sais que je n’ai pas le droit mais on le fait. » Il précise même : « Les prénoms disent les confessions. Dire l’inverse, c’est nier une évidence. Robert Ménard
Il y a tout un tas de pays où il y a de statistiques ethniques et ils ne sont pas moins démocratiques, pas moins républicains que les autres ! Robert Ménard
Ils sont où les enfants de nos ministres ? Dans quelle écoles ? Robert Ménard
En un mot, la gauche, elle n’a pas de leçons à nous donner et à me donner. Je voudrais juste rappeler. Quand Manuel Valls en 2008 [2009 en fait, ndlr] se plaint qu’il y a trop de noirs et d’arabes sur les marchés de sa ville et qu’il demande à un membre de son cabinet, je le cite : ‘tu me mets quelques blancs, quelques white, quelques blancos’. Qui tient ces propos ? C’est Manuel Valls. Quand Martine Aubry affirme, c’était en 2012, qu’il y a 35% de Maghrébins à Lille et que c’est génial, elle le sait  comment ? Au faciès ? Quand Jack Lang écrit en 2014 l’an dernier au premier ministre  pour liui dire que les deux tiers des prisonniers en France sont des musulmans. Il le sait comment ? Par l’opération du Siant-Esprit ?  Robert Ménard
La mairie de Béziers ne constitue pas et n’a jamais constitué de fichiers des enfants scolarisés dans les écoles publiques de la ville. Le voudrait-elle qu’elle n’en a d’ailleurs pas les moyens. Il ne peut donc exister aucun « fichage » des enfants, musulmans ou non. Le seul fichier existant à notre connaissance recensant les élèves des écoles publiques de la ville est celui de l’Éducation nationale. C’est donc à elle, et elle seule, de rendre publique cette liste. Elle ne le fera certainement pas au prétexte de motifs juridiques. Mairie de Béziers
Une telle initiative n’est pas anodine de la part de Robert Ménard. Elle se rajoute à la longue liste des polémiques qui marquent son mandat à la mairie de Béziers, depuis son élection en 2014. D’abord, c’est l’interdiction d’étendre du linge aux fenêtres donnant sur les rues du centre-ville en journée, puis l’établissement d’un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans dans certains quartiers, la suppression de l’accueil matinal des enfants de chômeurs, l’inauguration d’une crèche dans sa mairie, la publicité sur l’armement de ses policiers, la commande d’un livre sur Béziers à l’écrivain Renaud Camus, chantre de la théorie du « grand remplacement » et héraut des identitaires ou le changement d’un nom de rue pour effacer le souvenir de la guerre d’Algérie. Le Monde
La classe politique s’indigne contre Robert Ménard à cause du fichage ethnique des écoliers auquel il aurait procédé – il dément l’avoir fait – à Béziers dont le parquet a naturellement ouvert une enquête. Mais cette classe politique, gauche et droite confondues, si prompte à s’émouvoir, peut-elle se dire si remarquable? Que va-t-elle devenir quand elle n’aura plus sous l’opprobre le FN tel qu’elle l’a toujours obscurément désiré, formellement républicain mais avec des relents racistes et antisémites et des nostalgies historiques nauséabondes comme dirait le Premier ministre qui place cet adjectif partout, croyant qu’il est une argumentation à lui seul? Comme on le sent, son malaise, devant les péripéties mélodramatiques qui se déroulent au FN depuis plusieurs jours et dont elle ne sait si elle doit s’en réjouir ou les déplorer! S’en réjouir, parce que la victoire de la fille sur le père pourrait affaiblir ce parti? Les déplorer, parce que débarrassé des provocations lassantes du père, la fille pourrait enfin changer le nom du parti et conduire celui-ci sur une voie qui contraindrait ses adversaires à faire preuve d’intelligence politique et non plus seulement d’une réprobation morale souvent hypocrite? (…) Il n’y a que des imbéciles – et malheureusement Rama Yade a démontré qu’elle en était une en tournant en dérision les affrontements aussi bien familiaux que stratégiques entre Jean-Marie Le Pen et Marine Le Pen – pour ne pas percevoir l’importance de la «déchirure» qui, risquant de modifier le FN, va sans doute faire bouger les lignes autour de lui. (…) Aujourd’hui, à cause de la pauvreté de la réplique antagoniste – UMP et PS -, un grand nombre de Français, lassés par l’offre politique classique, se sentent l’envie d’essayer le FN sur la palette large qui est mise à leur disposition et qui pour l’essentiel les a déçus. (…) Il faudra considérer cependant, une fois pour toutes, que le père et la fille ont des personnalités différentes, que lui voulait provoquer et qu’elle souhaite conquérir. Que le FN sans lui ne sera pas le même que le FN sous l’emprise enfin totalement libre de sa fille. Que ce ne sera pas seulement la façade qui sera changée mais la substance et qu’avec elle on passera d’un populisme vulgaire à un projet politique, aussi discutable qu’il soit. Contre elle, la bouche en cœur et le cœur à la bouche ne suffiront plus. On ne peut pas, par ailleurs, avoir à juste titre dénoncé les saillies historiquement partiales et extrémistes du père et continuer à tenir pour rien l’adhésion de la fille au corpus honorable de la vérité sur les monstruosités historiques. Si elle a attendu longtemps pour tirer les conséquences qui convenaient, il n’est pas absurde de concevoir que longtemps dans sa tête et sa sensibilité, la fille a plus pesé que la responsable du FN, l’affection que le réalisme. Il me semble toutefois que deux écueils de taille vont devoir être surmontés et des choix clairs opérés. Le fourre-tout idéologique qui mêle, dans un vaste vivier, une vision et un programme de fermeté et d’autorité en matière de sécurité et de justice – c’est sa droite – à une conception économique, financière et européenne atypique, par certains côtés plus «mélenchonienne» que le modèle -c’est sa gauche, voire son extrême gauche – contraindra un jour ou l’autre le FN à déchirer le voile et à sortir de l’ambiguïté. Ce qui est bon pour une conquête, pour une candidate ne le sera évidemment pas si les portes du pouvoir semblent accessibles. Il y aura à arbitrer et à choisir l’ordre prioritaire dans ce désordre et la tonalité dominante dans cet entrelacs qui aujourd’hui attrape tout mais demain fera peur par son incohérence. (…) Il est manifeste qu’une fois les soubresauts, polémiques, aigreurs et désaveux dépassés, le FN se renforcera grâce à Marine Le Pen et si en face on n’a pas compris que l’adversaire ayant changé, il convenait aussi de substituer à l’éthique indignée et vaine un affrontement politique et de permettre au pays de respirer autrement que par le seul recours, pour l’avenir, à l’espoir que le FN représenterait. Toutes les autres espérances ayant été saccagées par le réel, la violation des engagements et l’amateurisme. Philippe Bilger
Le fait, hors les cas prévus par la loi, de mettre ou de conserver en mémoire informatisée, sans le consentement exprès de l’intéressé, des données à caractère personnel qui, directement ou indirectement, font apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou les appartenances syndicales des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à l’orientation ou identité sexuelle de celles-ci, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. Est puni des mêmes peines le fait, hors les cas prévus par la loi, de mettre ou de conserver en mémoire informatisée des données à caractère personnel concernant des infractions, des condamnations ou des mesures de sûreté. Code pénal (Article 226-19, modifié par LOI n°2012-954 du 6 août 2012 – art. 4)
Les discriminations sont encore plus dommageables quand elles sont implicites. Esther Dufilo
Il serait ironique que des associations qui ont pour objectif de défendre les droits et les libertés cherchent à imposer une censure préalable de la recherche. Il est toujours dangereux que des acteurs politiques prétendent dire quelle est la «bonne» science ! Remplacer l’enquête, comme le suggère la pétition, par du «testing» à grande échelle n’a pas de sens. Le testing a toute son utilité pour révéler des pratiques discriminatoires ouvertes. Il ne permet pas de reconstruire et comparer des trajectoires socioprofessionnelles, d’aller à la racine des inégalités et de repérer leur imposition, fût-elle involontaire. Du reste, en choisissant de présenter des candidats «noirs», «arabes» ou «maghrébins» et «français blancs», le testing manipule les catégories par lesquelles se construisent les discriminations. Collectif de chercheurs français et étrangers
En France, on ne devrait pas pouvoir à la fois se vanter d’avoir réussi à faire barrage aux statistiques ethnoraciales et espérer connaître la situation des Noirs. Pourtant, manifestement, dans ce pays, on sait sans avoir besoin de compter. Michèle Tribalat
Chaque fois que l’on construit des catégories statistiques, il y a un débat. L’histoire des catégories socioprofessionnelles en France le montre. Quand on a créé la catégorie «cadre», la catégorie «ouvriers», les marxistes ont dit «cela ne reflète pas les vrais rapports d’exploitation entre la bourgeoisie et le prolétariat».Aujourd’hui, on connaît les Français par acquisition, par le lieu de naissance des parents et des grands-parents, mais il y a des catégories de personnes qui sont de longue date en France et qui échappent à cette statistique. Utiliser des catégories plus fines permettrait d’avoir un reflet assez fidèle de la population française.(…) Le prénom ou le patronyme d’un individu …C’est un moyen détourné qui tient plutôt du bricolage et qui ne vaut que dans la mesure où d’autres indicateurs plus directs ne sont pas disponibles.Si vous cherchez à mesurer les discriminations dans une entreprise, vous allez constituer un échantillon sur la base des prénoms. Vous retiendrez des personnes certainement susceptibles d’être discriminées parce qu’elles s’appellent Mohamed ou Fatoumata. Mais vous passerez à côté d’un Patrick pourtant noir car antillais ou d’origine africaine. (…)  L’une des solutions est de passer par l’autodéfinition. Votre père est asiatique, votre mère noire, mais comment vous définissez-vous ? Georges Felouzis (Bordeaux-II)
Selon le rapport confidentiel que s’est procuré le Figaro, quelque 300 000 Africains pénètreraient chaque année clandestinement dans l’Union européenne. 80% d’entre eux utiliseraient les services d’organisations de trafiquants, dont les revenus pour ce type d’activité sont estimés à 300 millions de dollars, soit 237 millions d’euros, par an. (…) «Les groupes criminels d’Afrique de l’Ouest, en majorité nigérians, sont souvent décrits comme des réseaux, précise le rapport, les experts de chaque zone pouvant être associés rapidement à d’autres de manière transversale. [Une telle] flexibilité rend ces groupes extrêmement résistants à l’action des forces de l’ordre : il est virtuellement impossible de décapiter une organisation criminelle en Afrique, parce que sa structure est essentiellement horizontale. Le système du «havalah» est très fréquemment employé : ce mode traditionnel de transfert de fonds dans le monde arabe, qui se pratique par le biais d’intermédiaires et sans aucune trace écrite, permet notamment aux groupes criminels de racketter facilement les familles d’immigrants, en exigeant d’elles des sommes supplémentaires ou des recouvrements d’avances de paiement. Rapport ONUDC (2006)
Just under a year ago, France’s Marine Le Pen told TIME her far-right National Front Party would be in power within a decade. That’s a nightmarish prospect for millions who regard her France-for-the-French message as mere jingoism—and it seemed like a stretch. Her prediction, however, no longer seems preposterous. Le Pen has spun gold from voter exasperation, mixing charm and ambition to rack up wins in European Parliament and local elections with an anti-Europe, anti-immigration campaign. That’s made her Europe’s leading right-winger, giving like-minded politicians across the continent a dose of electability. And this month she finally split from her father, National Front founder Jean-Marie Le Pen, over his noxious anti-Semitism. Le Pen has strong allure for many French, who have hit the wall with asphyxiating political elitism and near zero growth. To stop her race for the Élysée Palace in its tracks, France’s lackluster leaders will need to overhaul their ineffectual, gutless style and mount a more appealing revolution of their own. Vivienne Walt (Marine Le Pen, France’s nationalist force, The 100 most influential people, Time, April 16, 2015)
Lorsqu’il s’agit de fichiers nominatifs, la crainte est de voir se constituer un « fichage ethnique » potentiellement dangereux si, par exemple, arrivait au pouvoir un gouvernement raciste qui voudrait mener des politiques défavorables à certaines catégories de la population. Mais si un tel gouvernement venait au pouvoir, il n’aurait pas forcément besoin de tels fichiers pour mener à bien ce type de politiques (…) L’autre inconvénient, c’est que l’officialisation des catégories ethniques risque d’alimenter le communautarisme. Le modèle français s’efforce de ne prendre en compte que les individus, dans ce qu’ils ont à la fois d’universel et de particulier (nous sommes tous des individus, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs, et nous sommes tous différents), et non les groupes, qu’ils soient ethniques, raciaux ou religieux. L’officialisation des catégories ethniques risque d’alimenter le séparatisme et les affrontements (idéologiques, politiques…) entre groupes, ce qui n’est pas l’effet recherché. Pierre-Yves CussetLe refus de principe de l’Etat de prendre en compte ces différences part de bonnes intentions puisqu’il vise précisément à ne pas appliquer de traitement discriminatoire à telle ou telle catégorie de la population. Mais cette cécité volontaire devient dangereuse. Car, dans la société, les discriminations fonctionnent et elles sont aujourd’hui fondées sur des critères ethniques ou, pour parler plus clairement, raciaux. Ces discriminations, qui ont pris une importance croissante – ou du moins dont on devient de plus en plus conscient – depuis une dizaine d’années, mettent en péril le pacte qui fonde la République. Lorsqu’au XIXe siècle, la République interdisait aux petits Bretons, par exemple, de parler leur langue à l’école, elle voulait leur offrir une véritable possibilité de promotion sociale, en échange de cette impossibilité d’exprimer leur identité culturelle en public. Le français était un sésame exigé d’eux. Dès lors qu’ils l’avaient appris, ils n’étaient pas l’objet de discriminations parce qu’ils étaient nés en Bretagne. Aujourd’hui, pour les jeunes gens issus de l’immigration ou des DOM-TOM, la situation est tout à fait différente et même opposée. Non seulement ils ne sont pas reconnus a minima dans leur différence, mais ils se voient stigmatisés en raison de celle-ci. Ils voient s’opposer des barrières, par exemple à l’emploi, en raison de leur patronyme. Ils peuvent être l’objet de contrôles de police plusieurs fois par jour simplement à cause de la couleur de leur peau… Si de telles discriminations ne sont pas énergiquement combattues, ces jeunes risquent de s’approprier le stigmate dont ils sont frappés, de se replier sur une identité ethnique ou raciale mythifiée, et de se réfugier dans le communautarisme. Quelle que soit par ailleurs l’ampleur non négligeable de la politique menée par l’Etat en faveur des quartiers en difficulté. Ce combat contre la discrimination exige de prendre en compte ce critère racial. Non pas pour instaurer une discrimination positive au sens d’établir des quotas de recrutement dans l’administration, l’université, les entreprises, etc. Mais par exemple pour établir des statistiques ethniques qui permettent de mesurer l’ampleur de la discrimination négative. Et donc de la combattre résolument. (…) Je ne suis pas le moins du monde favorable à une exaltation de la diversité, car elle favorise le communautarisme. Mais il faut bien constater qu’une partie de la population, et notamment les jeunes issus de l’immigration, sont aujourd’hui traités de façon discriminatoire en raison de leur race présumée, ce qui est contradictoire avec le respect des droits auxquels nous sommes également attachés. (…) Il faut employer un terme aussi chargé avec beaucoup de précautions, mais aussi voir la réalité en face : c’est souvent sur l’appartenance présumée d’un individu à une race que se fondent ceux qui se rendent coupables de discrimination négative. Il faut cependant préciser que le concept de race a largement perdu, dans la tête même de nombreux racistes, la connotation biologique qu’il avait au XIXe siècle. Aujourd’hui, c’est moins le caractère génétique ou l’apparence physique que la différence culturelle qui, souvent, fonde le racisme : des traits culturels sont supposés se transmettre de génération en génération et constituer une spécificité quasiment immuable d’un groupe humain. C’est d’ailleurs parce que la « race » est aujourd’hui perçue comme culturelle, plutôt que comme biogénétique, que l’on emploie l’euphémisme d’« ethnie » pour en parler. Pour combattre la discrimination, je crois qu’il peut être utile d’employer le concept de race, en le faisant avec beaucoup de prudence. (…) Cela consiste simplement pour un antiraciste à prendre au sérieux la question de la race, qui occupe une place inquiétante dans notre société. Nous avons en France de nombreuses données sociales. Pourquoi pas sur un sujet si central pour l’avenir de la cohésion nationale ? Bien sûr, les statisticiens doivent être extrêmement prudents dans la conception de telles catégories et leur maniement. Mais dans la mesure où ceux qui discriminent ne le font généralement pas de façon explicite, mais de manière inavouée (ce que l’on appelle la discrimination indirecte), il me semble que seules des statistiques portant sur les grands nombres, sur l’ensemble du personnel d’une usine ou d’un corps de métier, sur une région ou l’ensemble du territoire, peuvent permettre d’évaluer l’ampleur du phénomène, afin que les responsables politiques soient mis dans l’obligation d’agir. (…) Mesurer l’ampleur globale des discriminations est une forme de reconnaissance pour les groupes qu’elles frappent. Si vous êtes discriminé, on redouble l’injustice en prétendant de surcroît que vous ne l’êtes pas. (…) la lutte contre les discriminations ne se réduit pas à réparer au coup par coup les torts faits aux victimes. Elle passe aussi par des mesures de politique générale qui doivent imposer le respect des règles de la citoyenneté (le traitement à égalité des citoyens) à toute la population, minorités ethniques comprises. Robert Castel

Pas de statistiques ethniques, s’il vous plait, nous sommes français !

En ces temps étranges …

Où une ministre prénomme sa fille Térébenthine

Mais où certains prénoms doivent encore être manipulés avec soin …

Pendant que d’autres peuvent contribuer à régler le problème du chômage …

Et où, pour avoir osé évoquer le taux d’élèves d’origine musulmane dans sa commune à partir  de la consultation des registres d’élèves de l’Education nationale, un maire se voit immédiatement fustigé et menacé de poursuites judiciaires pour « fichage » …

Tant par un président qui, pour cause de gros contrats et faillite économique, flatte la croupe des pires régimes politiques de la planète …

Qu’un premier ministre qui il n’y a pas si longtemps se plaignait de la ghettoïsation de sa ville et appelait de ses voeux la relance du débat sur les statistiques ethniques …

Alors qu’à l’instar de la Grande-Bretagne ou des Etats-Unis et certes non sans leurs propres dérives, nombre d’autres états publient régulièrement tant les statistiques ethniques que religieuses de leur population …

Comment ne pas voir avec un entretien du feu sociologue Robert Castel …

Les évidentes limites d’une telle « cécité volontaire » …

Qui non seulement empêche d’agir sérieusement sur un problème dont on ne peut mesurer l’ampleur …

Mais surtout ne peut que « redoubler l’injustice » de la discrimination pour ceux qui en sont victimes  ?

France : peut-on retourner la race contre les racistes ?
Entretien avec Robert Castel, Sociologue. Robert Castel est directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Il vient de publier La Discrimination négative. Citoyens ou indigènes? (La République des idées et Le Seuil, 2007).
et Gwénaële Calvès, Juriste. Gwénaële Calvès est professeure de droit public à l’université de Cergy-Pontoise. Elle est notamment l’auteur de La Discrimination positive (PUF-QSJ, nouvelle édition à paraître en avril 2008).
Propos recueillis par Yann Mens

Alternatives Internationales

mars 2008

Alternatives Internationales : La République française se veut aveugle à toute distinction fondée sur l’origine, la race ou la religion, selon les termes de la Constitution. Cette position de principe est-elle encore tenable aujourd’hui, notamment pour lutter contre les discriminations ?

Robert Castel : Je suis très attaché au modèle républicain. Et le refus de principe de l’Etat de prendre en compte ces différences part de bonnes intentions puisqu’il vise précisément à ne pas appliquer de traitement discriminatoire à telle ou telle catégorie de la population. Mais cette cécité volontaire devient dangereuse. Car, dans la société, les discriminations fonctionnent et elles sont aujourd’hui fondées sur des critères ethniques ou, pour parler plus clairement, raciaux.

Ces discriminations, qui ont pris une importance croissante – ou du moins dont on devient de plus en plus conscient – depuis une dizaine d’années, mettent en péril le pacte qui fonde la République. Lorsqu’au XIXe siècle, la République interdisait aux petits Bretons, par exemple, de parler leur langue à l’école, elle voulait leur offrir une véritable possibilité de promotion sociale, en échange de cette impossibilité d’exprimer leur identité culturelle en public. Le français était un sésame exigé d’eux. Dès lors qu’ils l’avaient appris, ils n’étaient pas l’objet de discriminations parce qu’ils étaient nés en Bretagne.

Aujourd’hui, pour les jeunes gens issus de l’immigration ou des DOM-TOM, la situation est tout à fait différente et même opposée. Non seulement ils ne sont pas reconnus a minima dans leur différence, mais ils se voient stigmatisés en raison de celle-ci. Ils voient s’opposer des barrières, par exemple à l’emploi, en raison de leur patronyme. Ils peuvent être l’objet de contrôles de police plusieurs fois par jour simplement à cause de la couleur de leur peau… Si de telles discriminations ne sont pas énergiquement combattues, ces jeunes risquent de s’approprier le stigmate dont ils sont frappés, de se replier sur une identité ethnique ou raciale mythifiée, et de se réfugier dans le communautarisme. Quelle que soit par ailleurs l’ampleur non négligeable de la politique menée par l’Etat en faveur des quartiers en difficulté.

Ce combat contre la discrimination exige de prendre en compte ce critère racial. Non pas pour instaurer une discrimination positive au sens d’établir des quotas de recrutement dans l’administration, l’université, les entreprises, etc. Mais par exemple pour établir des statistiques ethniques qui permettent de mesurer l’ampleur de la discrimination négative. Et donc de la combattre résolument.

Gwénaële Calvès : La lutte contre les discriminations, selon moi, n’implique aucunement de renoncer au principe de cécité à l’origine, la race ou la religion. La discrimination n’est pas une offense faite à « l’Autre », c’est une offense faite au « Même ». Elle prend pour cible des Français dont la République doit, plus que jamais, affirmer qu’à ses yeux ils sont des Français comme les autres, égaux en droits et également protégés contre la violence et l’arbitraire – notamment l’arbitraire policier que vous avez évoqué. Sur un plan plus pragmatique, je ne vois pas à quoi servirait la consécration officielle de ce que vous appelez le « critère racial ». Ce n’est pas sur la victime qu’il faut mettre le projecteur, c’est sur celui qui discrimine ! Exalter la diversité pour lutter contre les discriminations, c’est prendre le risque de cautionner les fantasmes racistes qui voudraient enfermer certains d’entre nous dans une culture ou identité « autre », « différente », « étrangère »…

R. C. : Je ne suis pas le moins du monde favorable à une exaltation de la diversité, car elle favorise le communautarisme. Mais il faut bien constater qu’une partie de la population, et notamment les jeunes issus de l’immigration, sont aujourd’hui traités de façon discriminatoire en raison de leur race présumée, ce qui est contradictoire avec le respect des droits auxquels nous sommes également attachés.

N’est-il pas dangereux d’utiliser un concept comme la race, fût-ce pour combattre le racisme ?

R. C. : Il faut employer un terme aussi chargé avec beaucoup de précautions, mais aussi voir la réalité en face : c’est souvent sur l’appartenance présumée d’un individu à une race que se fondent ceux qui se rendent coupables de discrimination négative. Il faut cependant préciser que le concept de race a largement perdu, dans la tête même de nombreux racistes, la connotation biologique qu’il avait au XIXe siècle. Aujourd’hui, c’est moins le caractère génétique ou l’apparence physique que la différence culturelle qui, souvent, fonde le racisme : des traits culturels sont supposés se transmettre de génération en génération et constituer une spécificité quasiment immuable d’un groupe humain.

C’est d’ailleurs parce que la « race » est aujourd’hui perçue comme culturelle, plutôt que comme biogénétique, que l’on emploie l’euphémisme d’« ethnie » pour en parler. Pour combattre la discrimination, je crois qu’il peut être utile d’employer le concept de race, en le faisant avec beaucoup de prudence.

G. C. : C’est ce que fait déjà le droit français ! L’expression en vigueur est celle d’appartenance « vraie ou supposée » à « une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminées ». La formule, par son ambiguïté, peut satisfaire ceux qui accordent une forme de réalité à ces constructions sociales. Et elle est assez ouverte pour saisir la variété des racismes, qu’ils soient biologisants, culturalistes, xénophobes… L’analyse des fondements du racisme, d’un point de vue juridique, est d’ailleurs sans intérêt. Ce qui compte, c’est de réprimer des comportements, pas de sonder les reins et les cœurs.

Ne faut-il pas établir des statistiques ethniques pour mesurer l’ampleur de la discrimination, et ainsi mieux la combattre, comme on peut le faire dans le cadre du respect de la parité ?

G. C. :La distinction entre les hommes et les femmes ne peut pas servir de modèle à l’établissement de statistiques ethniques. Elle repose sur un critère que personne ou presque ne conteste, car il renvoie à une réalité sociale très largement admise, et il n’a rien de stigmatisant. D’autre part, et c’est le plus important d’un point de vue juridique, ce critère ne pose pas de problème d’application : c’est un critère stable dans le temps, et compréhensible par tous – rares sont ceux qui hésitent à se classer dans une catégorie ou une autre.

La question des statistiques ethniques se pose de manière tout à fait différente. Ici, les critères de classement sont éminemment problématiques. Il faudrait, d’abord, les choisir, ce qui supposerait de privilégier soit la couleur de la peau, soit l’apparence physique, soit l’origine géographique, soit encore un mélange de tout ça… Il faudrait, ensuite, créer un consensus autour de ces critères. Si celui qui est perçu comme métis ou comme indien se classe dans la catégorie « Noir », ou inversement, la nomenclature n’a guère d’utilité.

De la même manière, si ceux qui estiment avoir des origines multiples (ils sont nombreux…) choisissent de cocher plusieurs cases, on se sera donné beaucoup de mal pour rien. Par ailleurs, il faut bien comprendre qu’il est assez vain d’ethniciser l’appareil statistique national. On obtiendrait des données trop globales pour être utiles à l’évaluation des phénomènes discriminatoires. Si on veut caractériser une situation de discrimination à l’échelle, par exemple, d’un secteur professionnel ou d’un bassin d’emploi (et a fortiori d’une entreprise), il faut disposer de données beaucoup plus fines. En effet, la discrimination n’existe que toutes choses égales par ailleurs. Les membres du groupe discriminé ont-ils, en moyenne, le même âge que les autres ? Ont-ils les mêmes qualifications ? Disposent-ils, aussi souvent que les autres, du permis de conduire ? Etc. Si on veut faire des statistiques ethniques, il faut en faire sérieusement. Cela suppose d’être littéralement obsédé par la race, en introduisant cette donnée dans tous les systèmes de gestion, d’enquête et de comptage. Je crois qu’il faut avoir conscience de la violence qui serait faite aux individus.

R. C. :Pourquoi parler d’obsession ? Cela consiste simplement pour un antiraciste à prendre au sérieux la question de la race, qui occupe une place inquiétante dans notre société. Nous avons en France de nombreuses données sociales. Pourquoi pas sur un sujet si central pour l’avenir de la cohésion nationale ? Bien sûr, les statisticiens doivent être extrêmement prudents dans la conception de telles catégories et leur maniement. Mais dans la mesure où ceux qui discriminent ne le font généralement pas de façon explicite, mais de manière inavouée (ce que l’on appelle la discrimination indirecte), il me semble que seules des statistiques portant sur les grands nombres, sur l’ensemble du personnel d’une usine ou d’un corps de métier, sur une région ou l’ensemble du territoire, peuvent permettre d’évaluer l’ampleur du phénomène, afin que les responsables politiques soient mis dans l’obligation d’agir.

G. C. : Les enquêtes dont nous disposons démontrent assez clairement que la discrimination existe…

R. C. : Mesurer l’ampleur globale des discriminations est une forme de reconnaissance pour les groupes qu’elles frappent. Si vous êtes discriminé, on redouble l’injustice en prétendant de surcroît que vous ne l’êtes pas.

G. C. : Je ne crois pas. Ce qu’il faut reconnaître, pour le sanctionner et le réparer, c’est le préjudice subi par les individus qui demandent justice. La lutte contre les discriminations doit être centrée sur les auteurs de discrimination, afin de les sanctionner. Il faut donc inciter les victimes à porter plainte, pour que la police mène une enquête et que la justice instruise le dossier comme pour n’importe quel type de délit. Il reste beaucoup de progrès à faire pour que le droit de la non-discrimination soit enfin perçu comme une arme offerte à chacun d’entre nous pour se défendre contre l’arbitraire.

Aux Etats-Unis, de puissantes associations, comme la NAACP (Association nationale pour l’avancement des gens de couleur), disposent de juristes et d’avocats chevronnés pour aider les victimes à se pourvoir devant les tribunaux et à monter leur dossier, ce qui n’est hélas pas le cas en France, où les associations équivalentes sont bien moins outillées. Le droit devrait aussi être utilisé comme un levier pour l’action collective. Le travail remarquable qu’une association comme le Gisti (Groupement d’information et de soutien des immigrés) a réalisé, depuis trente-cinq ans, pour faire progresser le droit des étrangers, n’a guère d’équivalent en matière de lutte contre les discriminations.

R. C. : On peut effectivement regretter que de telles modalités existent beaucoup moins en France. Cependant, la lutte contre les discriminations ne se réduit pas à réparer au coup par coup les torts faits aux victimes. Elle passe aussi par des mesures de politique générale qui doivent imposer le respect des règles de la citoyenneté (le traitement à égalité des citoyens) à toute la population, minorités ethniques comprises.

Robert Castel est sociologue, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, auteur de La discrimination négative. Citoyens ou indigènes ? (éd. La République des idées-Le Seuil, 2007).

Gwénaële Calvès est professeure de droit public à l’université de Cergy-Pontoise. Elle est notamment l’auteur de La discrimination positive (PUF-QSJ, 2008).

Propos recueillis par Yann Mens

Voir aussi:

Polémique Robert Ménard : que dit la loi sur les statistiques ethniques ?
Métro news

05-05-2015

SUJET SENSIBLE – Provoquant un nouveau tollé, le maire de Béziers, Robert Ménard, a annoncé lundi soir sur France 2 avoir recensé le nombre d’enfants de confession musulmane dans sa commune, en fonction de leurs prénoms. Une pratique illégale de fichage ethnique qui lui vaut d’être sous le coup d’une enquête préliminaire. Pour autant, les statistiques ethniques, souvent controversées, ne sont pas toujours interdites en France. Explications.

« Le maire a les noms classe par classe, des enfants. Je sais que je n’ai pas le droit mais on le fait. » Robert Ménard sait bien que la pratique n’a rien de légal. Mais cela n’a pas empêché le maire de Béziers, élu avec le soutien du Front national, de révéler, lundi soir sur France 2, qu’il a classé les enfants de sa commune en fonction de leurs prénoms. Le but ? Savoir qui est de confession musulmane et qui ne l’est pas. Résultat, selon ses calculs : 64,6% des élèves seraient issus de familles musulmanes dans les écoles de sa ville. Des chiffres qui permettent à l’élu d’affirmer dès le lendemain, lors d’une conférence de presse que, « oui, il y a trop d’immigration en France ».

Ces révélations placent le fondateur de Reporters sans frontières sous le feu des critiques. Et le procureur de la République de Béziers d’annoncer l’ouverture d’une enquête préliminaire pour « fichage illégal ». Car en France, à la différence du Royaume-Uni ou du Brésil, les statistiques ethniques sont interdites. Elles sont contraires à la loi « Informatique et libertés », votée le 6 janvier 1978. D’après ce texte, « il est interdit de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou l’appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci. » C’est la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) qui veille d’ailleurs au respect de ces dispositions.

Des conclusions « douteuses »

Toutefois, des exceptions existent. La Cnil autorise ainsi la détention de ces informations à partir du moment où la personne concernée a donné son accord écrit. Les associations à caractère religieux sont autorisées à tenir des fichiers regroupant leurs membres. À ce titre, le CRAN (Conseil Représentatif des Associations Noires) publiait en 2007 un sondage – qui a fait beaucoup de bruit – sur les populations noires en France et les discriminations dont elles se disaient victimes.

Les statisticiens, eux aussi, échappent à la règle. Ils peuvent mener des études sur la diversité, tout en garantissant l’anonymat des personnes. L’Ined (Institut national des études démographiques) par exemple, ne s’en prive pas, au risque là aussi, de susciter la polémique. Michèle Tribalat, démographe, tente dès les années 1990 de catégoriser les ethnies, selon des données qu’elle qualifie « d’objectives » comme le lieu de naissance des parents ou encore la langue parlée. Mais pour beaucoup de ses confrères, les conclusions qu’elle en tire sont plus que « douteuses ».

En attendant, le procédé extrêmement raccourci de Robert Ménard selon lequel « les prénoms disent les confessions » ne bénéficie d’aucune dérogation au regard de la loi française. Au cas où la justice reconnaît l’existence d’un fichier ethnique à la mairie de Béziers, l’élu risque une peine de cinq ans d’emprisonnement et 300.000 euros d’amende.

Voir également:

Valls pour des statistiques ethniques
Le Figaro/AFP
12/12/2009

Le député PS Manuel Valls a annoncé aujourd’hui qu’il déposerait début 2010 une proposition de loi préconisant le recours aux statistiques ethniques, à l’issue d’un colloque sur la diversité organisé à Evry avec le Cran (Conseil représentatif des associations noires de France).

« Il faut relancer le débat sur les statistiques ethniques et je présenterai un projet de loi en ce sens à l’Assemblée nationale en début d’année prochaine », a indiqué le député-maire d’Evry. « Pour certains, les statistiques ethniques mettraient en cause les valeurs de la République, alors qu’au contraire, c’est l’absence de mesures concrètes qui est à craindre », a-t-il expliqué assurant qu’il y a « des députés prêts à suivre ».

L’annonce a été soutenue par le président du Cran, Patrick Lozès, invité du colloque, pour qui « on a besoin de savoir quelle est la réalité pour que les choses puissent changer ». C’est à la suite de propos controversés sur l’absence d’habitants « blancs » sur un marché d’Evry le 7 juin dernier que Manuel Valls avait rencontré les responsables du Cran et décidé d’organiser à Evry ce colloque intitulé « Faire des égaux – Pour un nouveau dialogue sur la diversité en France ».

Voir encore:

Polémique Ménard, guerre des Le Pen : le réquisitoire de Philippe Bilger
Philippe Bilger
Le Figaro

05/05/2015

La classe politique s’indigne contre Robert Ménard à cause du fichage ethnique des écoliers auquel il aurait procédé – il dément l’avoir fait – à Béziers dont le parquet a naturellement ouvert une enquête.

Mais cette classe politique, gauche et droite confondues, si prompte à s’émouvoir, peut-elle se dire si remarquable? Que va-t-elle devenir quand elle n’aura plus sous l’opprobre le FN tel qu’elle l’a toujours obscurément désiré, formellement républicain mais avec des relents racistes et antisémites et des nostalgies historiques nauséabondes comme dirait le Premier ministre qui place cet adjectif partout, croyant qu’il est une argumentation à lui seul?

Comme on le sent, son malaise, devant les péripéties mélodramatiques qui se déroulent au FN depuis plusieurs jours et dont elle ne sait si elle doit s’en réjouir ou les déplorer!

S’en réjouir, parce que la victoire de la fille sur le père pourrait affaiblir ce parti?

Les déplorer, parce que débarrassé des provocations lassantes du père, la fille pourrait enfin changer le nom du parti et conduire celui-ci sur une voie qui contraindrait ses adversaires à faire preuve d’intelligence politique et non plus seulement d’une réprobation morale souvent hypocrite?

Sur le plan psychologique, les ressorts sont aisément analysables avec une personnalité limpide pour le pire et le meilleur comme l’est celle du père. Une inaptitude à céder la place, à se contenter d’exister comme président d’honneur et à demeurer dans une ombre d’autant plus insupportable que la présidente du parti, dans la lumière, a choisi de mettre en œuvre, sous l’influence, pour lui, de Iago-Philippot, une dédiabolisation réussie sur les plans intellectuel et électoral.
Il n’y a que des imbéciles – et malheureusement Rama Yade a démontré qu’elle en était une en tournant en dérision les affrontements aussi bien familiaux que stratégiques entre Jean-Marie Le Pen et Marine Le Pen – pour ne pas percevoir l’importance de la «déchirure» qui, risquant de modifier le FN, va sans doute faire bouger les lignes autour de lui.

Sur le plan psychologique, les ressorts sont aisément analysables avec une personnalité limpide pour le pire et le meilleur comme l’est celle du père. Une inaptitude à céder la place, à se contenter d’exister comme président d’honneur et à demeurer dans une ombre d’autant plus insupportable que la présidente du parti, dans la lumière, a choisi de mettre en œuvre, sous l’influence, pour lui, de Iago-Philippot, une dédiabolisation réussie sur les plans intellectuel et électoral.

Aujourd’hui, à cause de la pauvreté de la réplique antagoniste – UMP et PS -, un grand nombre de Français, lassés par l’offre politique classique, se sentent l’envie d’essayer le FN sur la palette large qui est mise à leur disposition et qui pour l’essentiel les a déçus.

Sous l’égide sans partage de Marine Le Pen, malgré les foucades périphériques du père qui vont continuer et l’aura de la nièce, conservatrice revendiquée, le FN aura à arbitrer entre des alternatives qui, en tenant pour acquise l’injuste représentation parlementaire, imposeront des choix délicats
Ce n’est pas prétendre que demain le FN, même autrement baptisé, volera de succès en succès jusqu’à la victoire pour sa candidate en 2017. Je ne crois absolument pas à cette élection et j’irais même jusqu’à soutenir que pour le second tour, tout n’est pas perdu malgré l’inéluctabilité toute d’impuissance avec laquelle on annonce la présence de Marine Le Pen dans la joute finale.

Sous l’égide sans partage de Marine Le Pen, malgré les foucades périphériques du père qui vont continuer et l’aura de la nièce, conservatrice revendiquée, le FN aura à arbitrer entre des alternatives qui, en tenant pour acquise l’injuste représentation parlementaire, imposeront des choix délicats.

Il faudra considérer cependant, une fois pour toutes, que le père et la fille ont des personnalités différentes, que lui voulait provoquer et qu’elle souhaite conquérir. Que le FN sans lui ne sera pas le même que le FN sous l’emprise enfin totalement libre de sa fille. Que ce ne sera pas seulement la façade qui sera changée mais la substance et qu’avec elle on passera d’un populisme vulgaire à un projet politique, aussi discutable qu’il soit. Contre elle, la bouche en cœur et le cœur à la bouche ne suffiront plus.

On ne peut pas, par ailleurs, avoir à juste titre dénoncé les saillies historiquement partiales et extrémistes du père et continuer à tenir pour rien l’adhésion de la fille au corpus honorable de la vérité sur les monstruosités historiques. Si elle a attendu longtemps pour tirer les conséquences qui convenaient, il n’est pas absurde de concevoir que longtemps dans sa tête et sa sensibilité, la fille a plus pesé que la responsable du FN, l’affection que le réalisme.

Il me semble toutefois que deux écueils de taille vont devoir être surmontés et des choix clairs opérés.

Le fourre -tout idéologique qui mêle, dans un vaste vivier, une vision et un programme de fermeté et d’autorité en matière de sécurité et de justice – c’est sa droite – à une conception économique, financière et européenne atypique, par certains côtés plus «mélenchonienne» que le modèle -c’est sa gauche, voire son extrême gauche – contraindra un jour ou l’autre le FN à déchirer le voile et à sortir de l’ambiguïté. Ce qui est bon pour une conquête, pour une candidate ne le sera évidemment pas si les portes du pouvoir semblent accessibles. Il y aura à arbitrer et à choisir l’ordre prioritaire dans ce désordre et la tonalité dominante dans cet entrelacs qui aujourd’hui attrape tout mais demain fera peur par son incohérence.

De la même manière, même s’il progresse de plus en plus par ce mélange qui fait de lui un parti à la fois inscrit dans l’espace officiel – malgré ses deux députés seulement et à cause de sa forte présence médiatique – et un mouvement encore imprégné d’une forme de dissidence, il se devra de forcer sur les rêves d’officiel ou de se camper sur les aspirations à l’atypique.

Pour l’instant, il gagne sur les deux tableaux. Officiel, il mériterait davantage. Populiste, il attire les réfractaires, les laissés pour compte, les désespoirs civiques. Le bord de la route est empli d’adhérents du FN et les cités exsangues et mortes aussi. Et les victimes des crimes et des délits ne sont pas consolées par François Hollande et Christiane Taubira.

Il est manifeste qu’une fois les soubresauts, polémiques, aigreurs et désaveux dépassés, le FN se renforcera grâce à Marine Le Pen et si en face on n’a pas compris que l’adversaire ayant changé, il convenait aussi de substituer à l’éthique indignée et vaine un affrontement politique et de permettre au pays de respirer autrement que par le seul recours, pour l’avenir, à l’espoir que le FN représenterait. Toutes les autres espérances ayant été saccagées par le réel, la violation des engagements et l’amateurisme. Je rejoins Jérôme Fourquet qui, sur ce plan, a eu l’analyse la plus fine et la plus objective.

J’ai commencé par Robert Ménard et je vais finir par les Femen. Aurait-il été honteux pour le Premier ministre, adversaire du FN, de déclarer le 1er mai, qu’un parti avait le droit de manifester, que des folles n’avaient pas à créer du désordre et qu’on n’avait pas à les chasser de cette manière ?
La plus objective?

Pourquoi l’hostilité politique se traduirait-elle par de l’indifférence démocratique? Pourquoi, pour la cause commune, n’aurait-on pas le droit de se féliciter, pour une certaine conception de la République, de l’éviction du père et de l’autorité de la fille? Faut-il absolument tout haïr tout le temps au point de ne plus rien voir?

J’ai commencé par Robert Ménard et je vais finir par les Femen. Aurait-il été honteux pour le Premier ministre, adversaire du FN, de déclarer le 1er mai, qu’un parti avait le droit de manifester, que des folles n’avaient pas à créer du désordre et qu’on n’avait pas à les chasser de cette manière?

Serait-ce trop demander des politiques que de savoir, parfois, pour être respectés, penser contre eux-mêmes pour la cause républicaine? On ne s’en porterait que mieux.

Voir de même:

Robert Ménard, un habitué des mesures polémiques
Le Monde

05.05.2015

Il est un feuilleton à lui tout seul. Depuis son arrivée à la tête de la mairie de Béziers, en mars 2014, Robert Ménard n’a cessé de provoquer son opposition en prenant des mesures polémiques.

Dernière en date : des statistiques ethniques déterminant le taux d’écoliers de confession musulmane dans la sous-préfecture de l’Hérault, statistiques dont il a révélé l’existence sur le plateau de « Mots croisés », sur France 2, lundi 4 mai. Des chiffres dont il a assuré qu’ils n’étaient pas issus d’une forme de fichage ethnique, interdit par la loi, mais de la consultation des registres d’élèves fournis par l’éducation nationale, l’identification de la confession reposant sur « les prénoms » des enfants, avait-il précisé sur France 2.

Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Béziers pour établir s’il y a eu violation de la loi. Des perquisitions ont suivi dans l’après-midi à la mairie héraultaise.

C’est la première fois que la justice se penche sur la gestion de l’élu, proche du Front national. Avant, ses mesures étaient restées dans le cadre de ses attributs de maire, tout en faisant grand bruit.

Couvre-feu pour les mineurs
Premier coup d’éclat du maire : l’instauration d’un couvre-feu pour les mineurs, « du 15 juin au 15 septembre, durant les week-ends et les périodes de vacances scolaires », dans certains quartiers de Béziers pour les moins de 13 ans non accompagnés. Après avoir envisagé des amendes contre les mineurs, la mairie avait été obligée de choisir de poursuivre les parents en cas de manquements.

Ni crachats, ni linge aux fenêtres, ni paraboles, ni crottes de chien
En tout début de mandat, il avait multiplié les arrêtés prévoyant des sanctions contre les incivilités sur la voie publique : interdiction de l’accrochage de linge aux fenêtres, balcons et façades dans le centre sauvegardé de la ville au nom de son « attractivité économique et touristique ». Il avait également prévu de sanctionner par des amendes les crachats, au motif que « c’est dégoûtant », les crottes de chien, car elles donnent « une image déplorable de [la] ville », ou encore l’installation de paraboles.

« Les gens, quand vous leur dites, ils comprennent, mais tant qu’il n’y a pas de menace de sanction, ils ne le font pas », avait justifié le maire, qui ajouta : « Quand vous leur expliquez, les gens vous écoutent : c’est juste du laisser-aller auquel il faut mettre un point final. »

Des blouses à l’école

La mesure avait fait un flop, après avoir fait grand bruit : Robert Ménard avait proposé d’offrir une blouse à tous les écoliers de la ville. Mais cela devait se faire sur la base du volontariat des élèves et de leurs parents. Finalement, selon Midi libre, à l’automne, 1 250 blouses avaient été livrées, mais les élèves d’une seule école privée en portaient.

Une crèche à la mairie
A Noël, l’installation d’une crèche à la mairie provoqua la colère de la Ligue des droits de l’homme, qui a saisi la justice pour que cette « atteinte à la laïcité » soit réparée. Le tribunal administratif de Montpellier avait refusé de statuer dans l’urgence, repoussant sa décision à l’année suivante.

Un historien polémique pour écrire la ville
Selon les informations du Monde, le maire de Béziers envisageait de confier à l’écrivain Renaud Camus, condamné pour « provocation à la haine religieuse et à la violence » et inventeur de la théorie du « grand remplacement », la rédaction d’un livre sur la ville.

Le revolver, « un nouvel ami » de la police
Enfin, en février, c’est la campagne vantant le nouvel armement de la police municipale qui provoqua l’agacement des opposants à la mairie. Flanquée d’un revolver, l’affiche placardée dans les rues affirmait que « désormais la police municipale a un nouvel ami ». Une campagne de « shérif de pacotille », selon Sébastien Denaja, député socialiste de l’Hérault.

La mairie avait alors signé une convention avec l’Etat lui permettant d’armer ses policiers municipaux de pistolets 7.65 automatiques, en plus de « gilets pare-balles, bâtons de défense, bombes lacrymogènes et casques », selon Midi libre.

Voir de même:

Pourquoi Robert Ménard n’a pas le droit de ficher les écoliers musulmans de Béziers
Delphine Roucaute et Samuel Laurent

Le Monde

05.05.2015

Robert Ménard, maire d’extrême droite de Béziers, proche du Front national, aime les polémiques et n’a pas peur d’afficher ses actions. Lorsqu’il arme la police municipale, il le fait savoir par des affiches montrant un revolver avec le slogan : « Désormais, la police municipale a un nouvel ami ».

Et lorsqu’il est invité de France 2 et qu’on lui demande comment il peut évaluer la proportion de musulmans parmi les écoliers de sa ville, l’édile de Béziers ne cache pas sa méthode : « Ce sont les chiffres de ma mairie. Pardon de vous dire que le maire a les noms, classe par classe, des enfants. Je sais que je n’ai pas le droit mais on le fait. » Il précise même : « Les prénoms disent les confessions. Dire l’inverse, c’est nier une évidence. »

Si l’on en croit le maire, les services municipaux de Béziers recensent donc les prénoms en fonction de leur consonance et de leur origine supposée. Ils établissent ainsi un ratio par « confession » présumée (en clair, le petit Ahmed est présumé musulman et la petite Léa, non). Une enquête préliminaire a été ouverte.

Pourquoi n’est-il pas légal de faire des statistiques ethniques ?
Robert Ménard l’a lui-même reconnu : il n’a pas droit de faire ce genre de statistiques. En effet, selon la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dite « loi informatique et libertés », le traitement de données « relatives aux origines des personnes » est interdit. L’article 8 spécifie bien que :

« Il est interdit de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l’appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci. »
La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) précise que « [ces] critères ne peuvent pas être utilisés pour opérer des tris et s’adresser à des populations ciblées ». Le non-respect de cette interdiction peut entraîner, en application du code pénal, une peine de cinq ans de prison et jusqu’à 300 000 euros d’amende. La CNIL peut également sanctionner les responsables de ce genre de fichiers délictueux par des amendes.

La loi prévoit toutefois une dizaine de cas dans lesquels cette collecte serait autorisée, notamment en cas de consentement de la ou les personnes visées, de traitements nécessaires à la sauvegarde de la vie humaine, de données déjà publiées par la personne concernée ou de recherches nécessaires dans des cadres juridique ou médical.

La démarche de M. Ménard ne semble, à l’évidence, correspondre à aucune de ces dérogations. Pire, elle repose sur le détournement de données récoltées par la mairie dans le cadre de la scolarisation des enfants. Des données qui ont tout sauf une visée de statistiques ethniques.

Pourquoi la méthode employée est-elle discutable ?
Les services municipaux de Béziers n’ont donc pas le droit de procéder à un tel fichage, pour des raisons de protection des enfants et de respect de la vie privée de leurs familles. Mais outre le fait qu’il est illégal, il présente de grands risques d’erreur.

Un enfant prénommé Ahmed sera ainsi présumé « musulman », même si ses parents ne sont pas croyants ou pratiquants. De même, si une petite Fatima d’origine portugaise dont les parents sont catholiques fréquente les cantines biterroise, elle sera logiquement classée parmi les « musulmans » sur le fichier.

On peut évidemment aussi s’interroger sur l’emploi que comptent faire M. Ménard et ses services de telles statistiques.

Quels sont les antécédents de Robert Ménard ?
Une telle initiative n’est pas anodine de la part de Robert Ménard. Elle se rajoute à la longue liste des polémiques qui marquent son mandat à la mairie de Béziers, depuis son élection en 2014.

Lire aussi : Les méthodes d’extrême droite de l’ancien président de Reporters sans frontières

D’abord, c’est l’interdiction d’étendre du linge aux fenêtres donnant sur les rues du centre-ville en journée, puis l’établissement d’un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans dans certains quartiers, la suppression de l’accueil matinal des enfants de chômeurs, l’inauguration d’une crèche dans sa mairie, la publicité sur l’armement de ses policiers, la commande d’un livre sur Béziers à l’écrivain Renaud Camus, chantre de la théorie du « grand remplacement » et héraut des identitaires ou le changement d’un nom de rue pour effacer le souvenir de la guerre d’Algérie.

Mardi 5 mai, le parquet de Béziers a annoncé l’ouverture d’une enquête préliminaire pour « fichage illégal ». La mairie de Béziers a démenti tout fichage, renvoyant à l’Education nationale et contredisant de fait le maire lui-même.

Voir de même:

Michèle Tribalat, démographe et Cassandre
Intégration et islam : peut-on tout dire?
Propos recueillis par Gil Mihaely
Causeur
17 mars 2015

Causeur. En 1995, vous publiez Faire France, qui offre une vision franchement optimiste de l’intégration des immigrés et de leurs enfants. Puis, à la fin des années 1990, vous semblez changer d’avis ou au moins d’état d’esprit. En 1999, sur la base d’une enquête menée l’année précédente à Dreux, vous publiezVoyage au cœur du malaise français. Que vous est-il, ou que nous est-il arrivé ?

Michèle Tribalat. Je travaille sur l’immigration depuis quarante ans. Les questions de mesure et de méthode m’ont toujours plus intéressée que la nature des résultats. Mon évolution est directement liée aux études successives que j’ai menées.

En 1992, les résultats de l’enquête statistique « Mobilité géographique et insertion sociale (MGIS) » (qui était la base statistique de Faire France) incitaient à un certain optimisme.

Cette enquête reposait sur trois échantillons tirés du recensement de 1990 : un premier composé d’immigrés appartenant aux grands courants migratoires, un échantillon dit témoin de la population de France métropolitaine et un troisième échantillon portant sur des enfants nés en France de parent(s) immigré(s).

On y observait une sécularisation importante des jeunes d’origine algérienne, des unions mixtes en nombre non négligeable pour les débuts de vie en couple de ces jeunes, une certaine mobilité sociale, ainsi qu’un recul des pratiques matrimoniales traditionnelles. La sécularisation des jeunes d’origine algérienne paraissait prometteuse.

Je n’ai pas, alors, anticipé le mouvement de désécularisation que je décris dans mon dernier livre (Assimilation. La fin du modèle français, Éditions du Toucan, 2013), qui a coïncidé avec la réislamisation des jeunes. Combiné à une forte endogamie religieuse, il ne favorise pas la mixité ethnique des mariages.

Pourquoi n’avez-vous rien vu venir ? Est-ce parce que vous manquiez de données ?

L’enquête MGIS était rétrospective et recueillait l’histoire des individus sur le temps long, autrement dit, le passé. Elle ne pouvait donc, en aucun cas, répondre aux interrogations sur l’évolution récente et les phénomènes émergents. Il aurait fallu mener des enquêtes de ce type régulièrement.

Je ne l’ai pas obtenu pour le recensement de 1999 et il a fallu attendre 2008 pour qu’une nouvelle enquête statistique soit entreprise. Pendant ce temps, les médias continuaient à commenter les résultats de 1992, laissant croire que ces résultats seraient éternellement pertinents. Et ils en faisaient souvent un usage inapproprié.

Exemple, j’avais mis en garde contre l’extrapolation du taux de mixité lors des débuts de vie en couple des jeunes d’origine algérienne pour évaluer le taux de mariages mixtes : une copine c’est une chose, une épouse une autre. Je n’ai guère été entendue. Par ailleurs, ces résultats nationaux étaient trop souvent opposés aux perceptions communes, qui se forgent souvent dans l’environnement local.

L’observation nationale fait la moyenne de situations locales extrêmement contrastées et ne constitue donc pas un outil suffisant à la description du réel. Différents niveaux de réalité peuvent coexister de manière contradictoire. Il est possible que des situations locales évoluent mal sans que les données nationales n’en rendent compte, au moins pendant un certain temps.

Donc, c’est l’enquête sur Dreux qui vous a « ouvert les yeux » ? Avez-vous forgé de nouveaux outils d’observation ou, à tout le moins, revu vos méthodes de travail ?

Non, en un sens, c’est parce que j’avais compris l’importance de l’observation locale pour détecter à temps d’éventuelles dérives que je me suis retrouvée à Dreux.

Mon idée était que, pour y parvenir, il fallait se porter sur des lieux où la concentration ethnique est très élevée et construire des outils d’observation rigoureux dans quelques communes soigneusement sélectionnées.

J’avais donc élaboré, en 1996, un projet d’observatoire de la vie locale que je comptais proposer à des élus locaux. J’ai eu un premier contact positif avec André Gerin pour étudier la faisabilité d’un tel projet à Vénissieux.

Puis, en 1997, l’institut de sondage IPSOS m’a proposé de prendre en charge une étude commandée par le député-maire de Dreux, Gérard Hamel, dont l’aboutissement pouvait être la mise en place d’un tel observatoire. L’observation était locale mais l’enjeu national : ce qui se passait à Dreux était peut-être annonciateur de difficultés à grande échelle.

Suite à ce travail, un rapport a été remis au maire en 1998 et a abouti à la publication du Voyage au cœur du malaise français. En revanche le projet d’observatoire local a capoté. Comme l’indique la postface de Gérard Hamel, celui-ci n’était pas très content des conclusions de l’enquête et n’avait aucune envie de prolonger l’observation.

Il ne voulait pas voir ce qu’il voyait, en somme. Comment en êtes-vous venue à intégrer la dimension culturelle, ethno-religieuse, dans vos travaux de démographe ?

Ma formation démographique m’a conduit très tôt à me poser des questions de méthode et, avec le temps, j’ai essayé de faire en sorte que l’appareil statistique français soit adapté.

Avec Bernard Aubry, j’ai également utilisé les recensements et les enquêtes annuelles de recensement qui les ont remplacés, pour construire des indicateurs de concentration ethnique et de voisinage, qui ont révélé de grandes disparités géographiques.

Aujourd’hui, la catégorie des immigrés est entrée dans les mœurs statistiques françaises et l’Insee a introduit le pays de naissance et la nationalité de naissance des parents dans la plupart de ses grandes enquêtes. Le dernier pas à franchir est l’introduction de ces données dans les enquêtes annuelles de recensement.

N’étant ni anthropologue ni sociologue, je traite des origines ethniques ou de l’affiliation religieuse sous l’aspect démographique, par exemple pour observer comment certaines pratiques évoluent avec l’âge.

C’est ainsi que j’ai pu montrer que l’importance accordée à la religion était plus grande chez les jeunes adultes musulmans que chez les plus vieux, alors qu’on observait le phénomène inverse chez les catholiques.

Classer n’implique aucune fixité de comportement dans le temps. Classer, c’est ce que fait la statistique tout le temps. Je ne vois pas pourquoi les variables culturelles et religieuses seraient écartées d’emblée avant d’avoir été étudiées.

L’introduction de la religion dans l’enquête « Trajectoires et origines » de 2008, ce qui n’avait pas été possible en 1992, nous a appris beaucoup de choses. Il a ainsi été possible d’estimer le nombre de musulmans, et pour un démographe, les nombres comptent, d’estimer leur potentiel démographique et d’analyser l’évolution de leur rapport à la religion selon l’âge, notamment à travers une transmission croissante de l’islam.

Votre travail sur Dreux marque un double virage dans votre œuvre : vous découvrez que l’intégration des enfants d’immigrés marque sérieusement le pas et subissez vos premiers procès en sorcellerie…

Il faut dire que j’avais connu un certain état de grâce médiatique. À la parution de l’étude « Mobilité géographique et insertion sociale », l’accueil de la presse avait été dithyrambique.

Dans Le Monde du 24 mars 1995, Philippe Bernard écrivait :

« C’est une révolution salutaire dans l’approche de la question des immigrés en France qu’inaugure l’enquête de l’Institut national d’études démographiques (INED) sur l’insertion des populations d’origine étrangère… Cette démarche inédite a permis d’embrasser, bien au-delà des seuls étrangers, la population des jeunes Français de première et parfois de deuxième génération suivant l’immigration. Plutôt que de continuer à manier un vocabulaire hypocrite propice aux manipulations, l’étude saisit la question ethnique à bras-le-corps, transgressant un tabou sans pour autant encourir la moindre suspicion de xénophobie ou de ségrégation. »

Et, en prime, Philippe Bernard reprenait l’expression Français de souche sans guillemets !

À la fin des années 1990, le ton de la presse a changé. Moi, j’ai le sentiment d’avoir évolué avec les résultats de mes recherches. Certains ont préféré voir dans cette évolution personnelle somme toute normale au cours d’une existence un revirement idéologique.

Par exemple, dans un article publié dans Le Monde du 17 juin 2003, Xavier Ternisien préconisait de me psychanalyser pour trouver la raison cachée de ces changements. D’autres y ont vu la persistance d’un racisme jusque-là passé inaperçu.

Pourtant, en 1998, l’année de la remise du rapport sur Dreux, sortait un livre que j’avais coécrit avec Pierre-André Taguieff – Face au Front national. Arguments pour une contre-offensive – dans lequel je démontais les supercheries statistiques du rapport Milloz de 1997 – « L’immigration sans haine ni mépris. Les chiffres qu’on vous cache ».

Ma réponse à cet auteur proche du FN me vaudra même, en 1999, le prix Lyssenko, décerné par le Club de l’Horloge, c’est dire si j’étais d’extrême droite ! Mais les procès en sorcellerie que vous évoquez n’avaient rien de spontané. Un collègue de l’INED avait allumé la mèche.

Au-delà de conflits de bureau, que vous reprochait-on ?

En 1998, Hervé Le Bras sortait l’artillerie lourde dans un livre intitulé Le Démon des origines. Il y réglait ses comptes avec l’INED en général et avec moi en particulier, après une histoire interne qui n’avait pas tourné à son avantage.

Dans ce livre, il revenait sur un ouvrage collectif, publié sous ma direction, en 1991, dans lequel il croyait déjà déceler les racines du mal qui me rongeait.

« Les plus dangereux éléments de l’extrême droite ne sont donc pas ses noyaux durs, mais les pseudopodes qu’elle émet dans des directions éloignées et variées qui permettent aux venins idéologiques du Front national de se répandre dans une large partie de la société », écrivait-il en désignant l’INED comme l’un de ces pseudopodes.

Le Bras distinguait les opportunistes des autres, qui « se trouvent sous l’emprise d’une sorte de fanatisme démographique, telle M. Tribalat, la prophète de l’assimilation et de la population “de souche”. Ce dernier groupe est de loin le plus dangereux car il agit masqué, peut-être à l’insu de ses membres qui sont persuadés, soit de leur mission, soit que la poursuite de leur intérêt personnel par tous les moyens n’a pas de conséquence politique ».

En gros, j’étais un relais de la pensée frontiste, probablement à mon insu mais aussi par… ambition personnelle !

Plusieurs mois durant, le livre de Le Bras a été le prétexte de salves savamment orchestrées dans la presse, dont les-heures-les-plus-sombres-de-notre-histoire n’étaient évidemment pas absentes.

On a même vu circuler à l’INED un document anonyme qui fournissait de prétendues informations sur moi et sur des personnalités liées au Front national – j’y étais traitée de nataliste conservateur et l’on mettait en cause, pour insuffisance professionnelle, ma nomination comme directeur de recherche.

De cette époque date l’étiquette de démographe « douteuse » ou « contestée » que la presse aime m’accoler encore aujourd’hui. Ajoutez à cela que Marine Le Pen a déclaré en 2010 avoir aimé mon livre Les Yeux grands fermés, et vous comprendrez que mon compte était bon !

Si Marine Le Pen vous fait les yeux de Chimène, c’est qu’elle cherche une caution scientifique à sa critique de l’immigration. Que pensez-vous du diagnostic frontiste sur la question ?

Si le FN a, depuis longtemps, fait de l’immigration étrangère son cheval de bataille, jusqu’au début des années 2000, son discours constant sur la question n’avait pas grand-chose à voir avec l’évolution réelle des flux migratoires.

En effet, après le cycle migratoire des Trente Glorieuses, la France a connu vingt-cinq ans de « plat » migratoire, avec une proportion d’immigrés n’évoluant pas et une population immigrée qui augmentait au rythme de la population native.

Le FN contestait alors farouchement les « chiffres officiels ». Ensuite nous sommes passés à un nouveau cycle. Le cycle migratoire des années 2000, équivalent en intensité de celui des Trente Glorieuses, a offert des opportunités nouvelles au FN.

Loin de les contester, Marine Le Pen utilise d’ailleurs volontiers les chiffres donnés par le ministère de l’Intérieur sur l’immigration étrangère. Mais je crois que le diagnostic du FN sur l’impuissance politique est juste.

La France n’a pas vraiment la maîtrise de la politique migratoire, qui est une compétence partagée avec l’UE et la Commission européenne est favorable à une politique migratoire très généreuse compte tenu de ses anticipations démographiques.

Partager certains de ses constats ne signifie pas donner quitus au Front national. Approuvez-vous le programme de Marine Le Pen en matière d’immigration et de contrôle des frontières ?

Marine Le Pen propose de diviser par 20 le nombre d’entrées légales en cinq ans pour ne laisser entrer que 10 000 étrangers par an, tout en réduisant à zéro toute immigration clandestine. Quel genre d’État faut-il pour y arriver vraiment ? Telle est la question.

En fait, elle déclare vouloir en finir avec tous les droits accordés a priori aux immigrants, même sous certaines conditions. Elle compte interdire le regroupement familial, dont il faut souligner qu’il n’est pas la part la plus importante des flux familiaux, contrairement aux conjoints de Français.

Comment limiter les flux de ces derniers ? Il ne suffit pas de sortir de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Restent de sérieux obstacles : la Cour de justice de l’UE, qui garantit le respect des traités et dont les décisions font jurisprudence pour les juridictions nationales, mais aussi la jurisprudence du Conseil d’État.

Bref, si l’objectif visant à limiter le nombre d’entrées d’étrangers est légitime, cela implique de prendre toute une série de décisions qui ne seront pas sans effet sur les droits des citoyens.

Que faut-il en conclure ? La politique migratoire restrictive que nombre de Français demandent explicitement est-elle irréalisable ?

En l’état du droit français et plus largement européen, oui.

Voir par ailleurs:

6 Words: ‘My Name Is Jamaal … I’m White’
NPR
May 06, 2015

Jamaal Allan is a teacher in Des Moines, Iowa. His name has taken him on a lifelong odyssey of racial encounters.
Courtesy of Jamaal Allan
NPR continues a series of conversations from The Race Card Project, in which thousands of people have submitted their thoughts on race and cultural identity in six words.

People make a lot of assumptions based on a name alone.

Jamaal Allan, a high school teacher in Des Moines, Iowa, should know. To the surprise of many who have only seen his name, Allan is white. And that’s taken him on a lifelong odyssey of racial encounters.

Those experiences prompted him to share his six words with The Race Card Project: « My name is Jamaal … I’m white. »

Allan grew up in southern Oregon, in a house on 18 acres with a commune on one side and a llama ranch on the other.

The origins of his name weren’t that remarkable, Allan tells NPR Special Correspondent Michele Norris.

« My parents decided they wanted less traditional names for their children. … My dad was a Los Angeles Lakers fan and they had had a player named Jamaal Wilkes, and that name kind of came up, » he says.

His mother — who was pregnant with Allan’s sister at the time — fell in love with the sound of the name. Their parents named his sister Madera, and they named their son Jamaal — « just to spice things up a bit, I guess, » he says.

As Allan wrote for a blog called The Poetry Question:

« Growing up I never thought twice about my name (of course I was next door to a commune, hanging out with Orly, Oshia, Lark Song, River Rocks, Sky Blue, and more than one Rainbow).

« In a high school soccer game I was called ‘a white man with a [horrific racial expletive deleted] name.’

« In January of 2002 I flew to London. I was randomly selected for additional passenger screening. It was me, Muhammad, Abdul, Tariq, and an old white haired lady named Jenny Smith. Seriously. I’m not sure what was faster, Jenny Smith’s pat down or the dropping of the TSA agent’s face when I responded to the name Jamaal. »
Jamaal means « beauty » in Arabic.

« Learning the meaning behind it and, well, the beauty that comes in the sound of the name, I like that quite a bit, » Allan says.

It’s also a name that give him an unusual perspective on questions of identity, race and cultural stereotypes.

When he goes out in Des Moines for drinks with friends who are black, the waitress or bartender often hands his debit card to someone else — someone black.

« They’re making an assumption based on the name on the card and not paying attention to who handed it to them, » Allan says. « They say, ‘Jamaal, oh that must be the black guy sitting here.’ « 

‘We Could Use Some Diversity Here’

These kinds of assumptions also spill over into his professional life as a teacher.

« People usually don’t bring it up on a first day, but after I’ve developed a rapport with the students and they feel comfortable having open conversations, they’ll say, ‘You know, when class started I thought you were going to be black,’  » Allan says.

And he uses that as a jumping-off point for more questions: Why you would assume that and what did that mean? And were you disappointed? What were your thoughts when you actually saw me?

Many people have written to The Race Card Project about how people make assumptions about their identity, based on their name.

Race-neutral name, foot in the door — Meredith, Texas

Your name doesn’t match your face — Kimberly Jackson, New York, N.Y.

My name sounds black, I’m not — Lynea Ramse, Nashville, Tenn.

You judge me by my name? — Chaka Babarovich, Anacortes, Wash.
The question of someone’s name, particularly if it has ethnic overtones, can have real consequence. One study found that after responding to 1,300 classified ads, applicants with black-sounding names were 50 percent less likely to get a callback than white-sounding names with comparable resumes.

But the opposite was at work in Allan’s case. The principal who hired him told him he was lucky to get the job because they hadn’t been planning to take another student teacher. Then Allan’s application showed up.

« They scanned through it … and they saw someone named Jamaal who played basketball, listed Muhammad Ali among his heroes and inspirations, and thought, ‘We could use some diversity here, so let’s bring this guy on, I think he’d be good for some of our younger minority male students,' » he says. « And, well, then I showed up. »

If someone argued that the only reason Jamaal Allan got the job was affirmative action — well, the joke would be on them.

The school got diversity with Allan, but not necessarily the kind they thought. Not many people can say they grew up between a commune and a llama ranch.

« They said we need more diversity, we need someone who resonates well and connects with some of the young male students here, » Allan says. « It may not have been because of how I look, but through actions, that was exactly what they got. »

On Allan’s first day of work, he showed up at school and introduced himself to one of the secretaries.

« And she said, ‘Oh, you’re Jamaal, I expected you were going to be’ — and there was a very long, very pregnant pause, » Allan recalls. « And the word she came up with was ‘taller.’ « 

« I just sort of chuckled and said, ‘Yeah, I get reactions like that a lot.’ « 

Voir aussi:

Ethnic minorities ‘will make up one third of the population by 2050’ as Britain’s melting pot continues to grow

One in four children under ten is already from a minority group
Over next few decades the proportion will soar, Policy Exchange says
Currently 14 per cent of the UK population are from ethnic minorities
James Chapman

The Daily Mail

5 May 2014

Britain’s black and ethnic minority communities could account for almost a third of the population by 2050, according to a report published today.

The number of people from minority groups could as much as double by then, it says.

One in four children under the age of ten in the UK is already from a minority group and over the next few decades the proportion will soar, according to think-tank Policy Exchange.

Currently, eight million people, or 14 per cent of the UK population, are from ethnic minorities. But they now account for 80 per cent of population growth, while the white population remains constant.

Experts predict that as a result, by the middle of the century between 20 per cent and 30 per cent of the population – up to 16million people – will be from a minority community, the report says.

Ethnic minority communities predominantly live in three main cities, with 50 per cent living in London, Manchester and Birmingham alone. They are seven times more likely to live in an urban area than someone who is white.

But over time, ethnic minorities will move out of deprived inner city areas and into suburbs and surrounding towns, echoing the way that white groups migrated in the past with the growth of the middle classes, the report predicts.

Ethnicities are increasingly mixing: one in eight multi-person households contains people from more than one ethnic group.

The report draws on survey, census, academic and polling data to build up a comprehensive picture of the five largest black and minority ethnic (BME) groups in the UK – Indian, Pakistani, Bangladeshi, Black African and Black Caribbean.

Indians are he largest minority group in the UK, with 1,412,958 people accounting for 2.5 per cent of the population. Britain is home to the second largest Indian population in the western world outside India, after only the US.

There are 989,628 Black Africans in the UK. They are the fastest growing of the main ethnic groups, and also the most diverse, coming from countries both inside and outside the Commonwealth.

There are 1,124,511 Pakistanis in the UK, 447,201 Bangladeshis and 594,825 Black Caribbeans.

Minorities account for only 5 per cent of the total over-60 population, but 25 per cent of those under ten. Almost 30 per cent of pupils in state primary schools and around 25 per cent of pupils at secondary schools are classified as being from a minority ethnic group.

‘With such a youthful age structure, it is likely the UK’s BME population will represent a larger proportion of the UK’s population over time,’ the report says. All groups except Indians have unemployment rates that are more than double the rate of the white population.

People from ethnic minority backgrounds also have a far stronger association with being British than the white population, the report says.

It argues that politicians should stop treating ethnic minorities as one homogeneous group and start appealing to the varied political views and concerns of non-white Britons.

Rishi Sunak, co-author of the report, said: The UK is now home to a melting pot of different cultures and traditions. These communities will continue to become an ever more significant part of Britain, especially in future elections.

‘However, ethnic minorities are not one homogeneous political group. From education to employment, housing to trust in the police, politicians from all parties must understand the different issues affecting individual communities.’

Voir aussi:

Que sont les statistiques ethniques ?
Musée de l’histoire de l’immigration

Un repérage ethnique des citoyens
Historiquement, le terme d’« ethnie » fait partie du vocabulaire de l’administration coloniale et des pays de ségrégation (l’Inde, par exemple) pour identifier et recenser les populations. L’Afrique du Sud de l’apartheid et les États-Unis de la ségrégation raciale l’ont également adopté. En France, les principes républicains se sont opposés au repérage ethnique ou racial des citoyens, à l’exception des lois de Vichy de 1940 sur le statut des Juifs.

Aujourd’hui, la réalité des « quartiers sensibles » et les phénomènes de discrimination raciste ont conduit à engager un débat public pour ou contre la constitution de statistiques ethniques.

Les arguments pour…
Les arguments favorables aux statistiques ethniques sont principalement :

L’exemple des pays anglo-saxons ;
La lutte contre les inégalités visant des catégories discriminées comme les Blacks ou les Beurs ;
La nécessité de prendre des mesures de « discrimination positive » pour réparer des inégalités persistantes.
… et les arguments contre
Les arguments contre la constitution de statistiques ethniques reposent sur :

Le lien historique entre ségrégation raciale et statistique ethnique ;
L’abandon du système par certains pays (les Pays-Bas, par exemple, ont mis fin à leur « politique d’émancipation des minorités ethniques ») ;
Le caractère arbitraire et réducteur de la définition « ethnique » ou « raciale » de catégories à part de population ;
Le « labelling » ethnique vise uniquement les situations de domination sociale, culturelle et politique ;
La catégorie ethnique renforce les phénomènes de discrimination et de victimisation par l’assignation identitaire à une origine ou une appartenance réelle ou supposée ;
L’ethnicisation se fait au détriment du bien commun, de l’intérêt général, de la communauté des citoyens et elle nie le métissage croissant des sociétés modernes.
Vers un « oui, mais » ?
Deux rapports récents (2007), du Haut Conseil à l’intégration (HCI) et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), soulignent les dangers des statistiques ethniques mais posent les conditions de la mesure de la diversité en prenant en compte la question des discriminations.

En savoir plus : Avis au Premier Ministre du Haut Conseil à l’intégration (HCI) sur « Les indicateurs de l’intégration. Statistiques ethniques, enquêtes sur les patronymes, mesure de la diversité, baromètre de l’intégration », publié dans le Rapport 2007 du HCI ; et le rapport de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) du 15 mai 2007 sur la Mesure de la diversité et protection des données personnelles.

URL source: http://www.histoire-immigration.fr/histoire-de-l-immigration/questions-contemporaines/politique-et-immigration/que-sont-les-statistiques-ethniques
Liens:
[1] http://www.histoire-immigration.fr/histoire-de-l-immigration/questions-contemporaines/les-mots/qu-est-ce-qu-un-immigre
[2] http://www.histoire-immigration.fr/histoire-de-l-immigration/questions-contemporaines/politique-et-immigration/comment-evaluer-l-immigration-legale-en-france
[3] http://www.histoire-immigration.fr/histoire-de-l-immigration/questions-contemporaines/politique-et-immigration/comment-compte-t-on-les-immigres-en-france
[4] http://www.histoire-immigration.fr/2010/9/la-statistique-des-autres-compter-les-immigres-et-les-coloniaux
[5] http://www.strategie.gouv.fr/content/statistiques-ethniques
[6] http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/104000077/index.shtml

Le retour du débat sur les statistiques ethniques
Pour aller plus loin
Comment lutter contre les discriminations ?
Chômage : discriminations sans frontières , Alternatives Economiques n∞ 251.
De la discrimination positive par Eric Keslassy
Démographie : Faut-il analyser les discriminations ?
Des CV anonymes pour lutter contre les discriminations
Des discriminations de mieux en mieux évaluées , Alternatives Economiques Hors-série n∞ 078.
Discrimination : des emplois bien français
Discrimination : la RATP ouvre ses portes
Discrimination : un phénomène très répandu
Discrimination positive et justice sociale par Simon Wuhl , Alternatives Economiques n∞ 265.
Discriminations : 4 % de Noirs en France , Alternatives Economiques n∞ 256.
Discriminations : contrôles au faciès ? , Alternatives Economiques n∞ 272.
Discriminations : la galère des jeunes issus de l’immigration , Alternatives Economiques n∞ 246.
Statistiques ethniques : la Cnil se prononce , Alternatives Economiques n∞ 259.
Statistiques ethniques : pro et anti s’affrontent , Alternatives Economiques n∞ 257.
À lire également
L’état de la mondialisation 2010
Sommaire du numéro

Climat : comment enrayer le réchauffement?
Sommaire du numéro

Menaces sur la reprise
Sommaire du numéro
Le député d’Evry Manuel Valls s’apprête à déposer une proposition de loi visant à autoriser les « statistiques ethniques ». Il relance ainsi un débat complexe, illustré par ces échanges entre la juriste Gwenaele Calvès, attachée au « principe de la cécité à l’origine », et le sociologue Robert Castel, qui plaide pour de telles statistiques pour combattre les discriminations…

Voir encore:

Ethnic minorities
Into the melting pot
The rapid rise of mixed-race Britain is changing neighbourhoods—and perplexing the authorities
The Economist

Feb 8th 2014

ZADIE SMITH, a novelist born to a black Jamaican mother and a white British father, recently recalled that when she was growing up in Willesden Green, a London district with a large immigrant population, “nothing could be more normal than a mixed-race girl”. The surprise, she said, was entering publishing and finding that people thought it unusual. Nobody could get that impression now: Britons are mixing at extraordinary speed.

The 2011 census revealed a country that is decreasingly white and British: England’s ethnic-minority population grew from 9% of the total in 2001 to 14%. But the biggest single increase was in the number of people claiming a mixed-ethnic background. This almost doubled, to around 1.2m. Among children under the age of five, 6% had a mixed background—more than belonged to any other minority group (see chart). Mixed-race children are now about as common in Britain as in America—a country with many more non-whites and a longer history of mass immigration.

As Britain’s mixed-race population swells, another group appears destined to shrink. The Labour Force Survey reveals that 48% of black Caribbean men and 34% of black Caribbean women in couples are with partners of a different ethnic group—with higher proportions still among younger cohorts. Black Caribbean children under ten years old are outnumbered two-to-one by children who are a mixture of white and black Caribbean.

Rob Ford of Manchester University points out that Caribbean folk are following an Irish pattern of integration, in that their partners are often working-class. The Irish parallel also suggests they will eventually be fully absorbed into the British population. Polls show that adults who are a mixture of white and black Caribbean tend to see themselves not so much as black, Caribbean or even as British, but rather as English—the identity of the comfortably assimilated.

Indians, who began arriving in large numbers in the 1960s, were slower to mix. They are now doing so—but along Jewish, rather than Irish, lines. For them, assimilation follows education: according to research by Raya Muttarak and Anthony Heath, Indians with degrees are far more likely to marry whites. Indians are not so much marrying into the white majority as into its suburban middle class, says Shamit Saggar at the University of Essex.

Their children are quietly transforming Britain’s suburbs and commuter towns. Whereas Asians are still concentrated in cities such as Leicester and in London boroughs like Tower Hamlets and Harrow, mixed Asian and white children are widespread (see maps). In Chiltern, an affluent commuter district in Buckinghamshire, 5% of children under five years old were mixed Asian and white in 2011—more than in most of London. Their parents may have met at university or while working in the capital. Within Birmingham, too, mixed Asian and white children are especially common in the largely middle-class white suburbs of Edgbaston, Moseley and Harborne.

Still warming up

Pakistanis and Bangladeshis mostly remain in cities, and are mixing more slowly. Just 8% of Pakistani men and 7% of Bangladeshi men in couples are with people of a different ethnic group, and the proportions for women are smaller. Oddly, older Pakistani men are more likely to have partners of another ethnicity, perhaps because many early migrants were single men. But even these groups are assimilating: another study finds that Pakistanis and Bangladeshis born in Britain are far likelier to socialise with whites than their parents were.

Britain’s newer minorities are blending into the larger population, too, but in ways that defy easy categorisation. Mixed black- African and white children are particularly common in working-class suburbs and commuter towns such as Croydon and Southend-on-Sea, possibly because black Africans are rarely tied to city centres through social-housing tenancies. They are also mixing with new immigrants from continental Europe. Most of the 21,000 children born to Polish mothers in 2012 had Polish fathers; but of the rest, 23% had African or Asian fathers.

Such esoteric partnerships can confuse the authorities. Last November the Home Office invited journalists to accompany officers on a raid of an apparent sham wedding between an Italian man and a Chinese woman in north London. After interrogating the bride, groom and guests, the officers emerged sheepishly to admit that the union was probably real.

As race becomes less clear-cut, schools, hospitals and police forces, which record people’s ethnic identity at almost every opportunity, will have to deal with more fragmented definitions. So too will researchers trying to measure racial injustices. Confusingly, police officers now record the ethnicity of the people they stop and search according to two separate systems: observed ethnic appearance (which does not include a mixed-race category) and self-identified ethnicity (which does).

Politicians in the habit of treating Britain’s ethnic groups as distinct “communities” will also have to adapt. The shrewder black and Asian politicians have already built power bases that do not depend on ethnic block votes (see Bagehot). Speeches such as the one made by Tony Blair in 2007 about the culture of black youth violence will look silly when so many black teenagers have white parents too. Crude racist politics, thankfully now rare in Britain, ought to become almost impossible as more white families acquire non-white members. Englishness, which has remained distinctly a white identity for many, may become less exclusive.

Most of all, the rise of mixed-race Britain shows that Britain is capable of absorbing even large numbers of newcomers. For the young, who are used to having people of all backgrounds in their midst, race already matters far less than it did for their parents. In a generation or two more of the melting pot, it may not matter at all.

Voir de plus:

The Numbers Guy
Estimates of Religious Populations Require a Bit of Faith
Carl Bialik
WSJ

Aug. 14, 2010

In the debate over a plan to build an Islamic center near Ground Zero in New York, one number has been elusive: the population of Muslims in the city. Commentators have cited figures that have been all over the map—from 600,000 in the city’s five boroughs to between 600,000 and 800,000 in Manhattan alone.

That is because no one knows for sure how many Muslims, or Jews, or Christians, live in New York or anywhere else in the U.S. The Census Bureau doesn’t ask Americans to disclose their faith, and the surveys and studies that attempt to fill in the gap come up with different numbers—particularly when it comes to relatively small religious groups. That leaves the U.S. behind much of the world when it comes to understanding the religious beliefs of its inhabitants, and has sparked controversy about the number of Muslims in the country.

These are important numbers because « religion is very consequential in how people see the world, view politicians, and view social, economic and even environmental issues, » says Barry Kosmin, a sociologist at Trinity College and a principal investigator with the American Religious Identification Survey, which has surveyed Americans about their faith three times in the past decade.

The Numbers Guy Blog
Elusive Numbers: U.S. Population by Religion
National censuses in at least 70 countries, including the U.K. and Canada, ask about religion, according to United Nations data. « The census question on religious affiliation is used to measure cultural and religious diversity in Canada, » Peter Frayne, spokesman for Statistics Canada, wrote in an email. It is used, among other things, to monitor discrimination, diversity and the need for faith-based schools, Mr. Frayne says.

The U.S. Census Bureau debated including a question on religion in the late 1950s and again in 1976. But each time it decided not to. The census director in 1976, Vincent P. Barabba, decided to exclude such a question, concerned that including it would lead to a controversy over the separation of church and state that could impede the bureau’s work. Later that year, Congress passed a law prohibiting mandatory questions about religion.

« It’s a tough trade-off, » says Mr. Barabba, who is now retired. « You want to collect everything that’s of interest in society. [However,] you want to be careful about which ones you ask. »

That opens the door for controversy about true population counts. There is particularly sharp disagreement about the U.S. Muslim population. Several surveys have arrived at figures of 2.4 million or lower. But Ibrahim Hooper, spokesman for the Council on American-Islamic Relations, says those surveys have « real weaknesses, » and cites an estimate of seven million. He referred further questions to Ihsan Bagby, associate professor of Islamic studies at the University of Kentucky.

Prof. Bagby surveyed mosques in 2000 to arrive at a figure of two million active Muslims, including those who attend religious services on high holy days. That suggests to Prof. Bagby a true count of about four million or five million in 2000, including those who identify as Muslim but don’t attend mosques. He has found the number of mosques has increased by more than 50% to 1,900 since 2000, though it is unclear if that reflects population growth or construction to address existing demand.

Columbia University researchers estimating New York City’s Muslim population a decade ago used a figure of five million to seven million for the national population in arriving at their count of 600,000—later revised to 700,000—because they figured, based on studies of mosque affiliation, that one in 10 American Muslims live in New York.

But general population surveys suggest a much lower number of Muslims. The American Religious Identification Survey asks simply, « What is your religion, if any? » In 2008, the survey found 1.3 million adult Muslims in the U.S.

That survey, though, may undercount non-Christian groups, because members of some such minority groups may be reluctant to respond. Also, the survey is conducted only in English and Spanish. Surveys that focus on non-Christian groups can help produce more statistically reliable results. For instance, a Pew survey in 2007 of American Muslims also conducted interviews in Arabic, Farsi and Urdu. The survey also drew respondents more heavily from places expected to have more Muslims to produce a greater sample size and learn more demographic details about the population. Then researchers weighted the results to correct for the oversampling.

This may have helped the survey arrive at a larger number of Muslims than many other polls: 1.4 million adults and 2.35 million total Muslims. Yet even this survey had shortcomings, for instance, not dialing cellphones, though many Muslims are young immigrants who may be more likely to eschew landlines, according to the Pew report.

Similar issues have afflicted efforts to count the number of American Jews. Jewish groups funded a survey a decade ago that found the total population was 5.2 million. Brandeis University researchers reanalyzed the data and found because of groups that were underrepresented in the survey, the true population likely was between six million and 6.4 million.

Not all religion researchers are interested in more reliable population counts. « I don’t think it matters that much, » says Daniel A. Madigan, associate professor of theology at Georgetown University. How people self-identify doesn’t indicate much about their involvement in the religion, nor attitude toward it. « The actual numbers don’t translate necessarily into anything else. »

Voir enfin:

Marine Le Pen dans le top 100 des personnalités les plus influentes
Le Point

22/04/2015

VIDÉO. La présidente du Front national et députée européenne a été distinguée par l’hebdomadaire américain « Time » dans la catégorie des « leaders » du monde.

La présidente du parti français d’extrême droite Front national Marine Le Pen, désignée par l’hebdomadaire américain Time comme l’une des 100 personnalités influentes du monde, a salué mardi la reconnaissance d' »un mouvement politique important qui monte ».

Cette distinction, « c’est un symbole qu’outre-Atlantique on considère que le Front national est un mouvement sérieux, un mouvement de gouvernement, et que peut-être dans quelques mois il y aura en France des changements importants », a expliqué Mme Le Pen en arrivant à la soirée de gala organisée à New York par le magazine Time en l’honneur de ces personnalités. « Comme je suis la seule représentante politique de la France, il était de bon ton que je sois présente », a ajouté Mme Le Pen, hélée par des journalistes à l’entrée du Time Warner Center, à quelques pas de Central Park.
« Leaders » du monde
Marine Le Pen a été placée par Time parmi les « leaders » du monde, une catégorie où figurent aussi les présidents américain, russe et cubain Barack Obama, Vladimir Poutine et Raul Castro, ainsi que le Premier ministre grec Alexis Tsipras, la chancelière allemande Angela Merkel ou encore le dirigeant de la Corée du Nord Kim Jong-un. L’économiste français Thomas Piketty fait également partie des personnalités retenues, tout comme le pape François, la starlette Kim Kardashian ou encore le patron d’Apple Tim Cook.

Cette nomination a été l’occasion pour Mme Le Pen de passer quelques jours à New York, avant de se rendre à la soirée de gala accompagnée de son compagnon Louis Aliot. Vêtue d’une robe longue bleu nuit et d’une cape de velours noir, elle y a fait une arrivée remarquée sur tapis rouge, un peu après la styliste Diane von Fürstenberg, l’actrice Mia Farrow et le chanteur de country Tim McGraw, et avant la skieuse Lindsey Vonn ou encore l’actrice Julianne Moore.
Il ne s’agissait « pas d’une occasion frivole »
« Je suis fière pour mon pays, je suis fière que les millions de Français qui font un choix différent de l’UMP et du PS soient présents un peu ce soir », a également déclaré Mme Le Pen. « Vous voyez la France des oubliés, ce soir, elle n’est pas oubliée. » Elle a assuré au micro de la radio Europe 1 qu’il ne s’agissait « pas d’une occasion frivole » : « Il y a évidemment une partie des gens qui sont des artistes, mais il y a aussi une partie des gens dont la pensée influence le monde, dont les actes, dont les décisions influencent le monde, c’est ça qui m’intéresse au plus haut point », a-t-elle assuré.

Voir enfin:

Les statistiques « ethniques » : état des lieux, état des problèmes
Pierre-Yves Cusset
2006
Ce document de travail vise à faire le point sur l’état du droit et des pratiques en matière de statistiques « ethniques » ou « relatives aux origines ». On présente ainsi l’état du droit et des pratiques statistiques en France, afin de mettre en évidence les possibilités et les limites de notre système statistique, notamment en termes de mise au jour des différentes formes de discrimination et de ségrégation sur critères ethniques. La troisième partie du document est consacrée à la mesure de la discrimination indirecte et de la diversité ; quelques dispositifs de suivi statistique de la diversité ethnique, adoptés à l’étranger, y sont présentés.La collecte, le traitement et la diffusion de données sont ici comme ailleurs encadrés par la loi et régulés, au moins pour ce qui est de la statistique publique, par des instances garantes des principes déontologiques propres au métier de statisticien. On présente dans cette partie l’état du droit en matière de « données à caractère personnel » et de « données sensibles » (1.1.), tel qu’il ressort de la nouvelle loi Informatique et liberté du 6 août 2004 et de l’avis de la CNIL formulé en juillet 2005 sur la mesure de la diversité des origines par les employeurs. Puis, après un bref rappel historique relatif à la prise en compte des variables liées aux origines par l’appareil statistique français (1.2.), on dresse un tableau récapitulatif de la façon dont est prise en compte aujourd’hui la variable « origine » dans les grandes enquêtes de la statistique publique.L’état du droit• La rénovation de la loi Informatique et libertéLa loi du 6 août 2004, dont l’un des objectifs était de transposer la directive européenne 95/46 du 24 octobre 1995 sur la « protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation des données », a profondément remanié la loi Informatique et liberté de 1978.Le champ matériel de cette loi s’étend désormais à toute opération automatisée ou non (collecte, enregistrement, organisation, conservation, adaptation ou modification, extraction, consultation, utilisation, communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, rapprochement ou interconnexion, verrouillage, effacement ou destruction) portant sur des « données à caractère personnel », entendues comme « toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée directement ou indirectement ou par référence à un numéro d’identification ou à plusieurs éléments qui lui sont propres ».La loi retient une acception large de la notion de donnée à caractère personnel puisqu’elle précise que « pour déterminer si une personne est identifiable, il convient de considérer l’ensemble des moyens en vue de permettre son identification dont dispose ou auxquels peuvent avoir accès le responsable du traitement ou tout autre personne ». Autrement dit, sont visées toutes les données se rapportant à une personne identifiable, même par des moyens indirects.La loi subordonne, à son article 6, la collecte et le traitement de ces données à un certain nombre de conditions : − la loyauté et la licéité des traitements ; − le strict respect des finalités pour lesquelles les données ont été recueillies ; toutefois, des retraitements peuvent être réalisés ultérieurement à des fins statistiques ou à des fins de recherche scientifique ou historique sous réserve qu’ils respectent les conditions de licéité, les formalités préalables à la mise en œuvre des traitements et les obligations imposées aux responsables des traitements et, enfin, s’ils ne sont pas utilisés pour prendre des décisions à l’égard des personnes concernées ; − le caractère adéquat, pertinent et non-excessif du traitement au regard des finalités poursuivies ; − l’exactitude et la complétude des données ; − la durée limitée de leur conservation, proportionnée à la finalité du traitement.• Le cas des « données sensibles »La loi réserve un sort particulier aux données dites sensibles. L’article 8-I prohibe en principe toute collecte de « données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l’appar10 > Les statistiques « ethniques » : état des lieuxtenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci».Toutefois, cette règle souffre dix catégories d’exception qui tiennent soit à la finalité du traitement, soit aux conditions de collecte des données, soit encore à la nature de l’organisme qui réalise le traitement.Il s’agit : − des traitements de données sensibles pour lesquels la personne concernée a donné son consentement exprès (sauf dans les cas où un texte de niveau législatif prévoit que l’interdiction ne peut être levée) ; − des traitements portant sur des données ayant été rendues publiques par la personne concernée ; − les fichiers des associations et organismes à caractère religieux, philosophique, politique ou syndical (seules les données sensibles correspondant à l’objet de l’association peuvent être collectées, et ce uniquement pour les membres entretenant avec l’organisme des contacts réguliers) ; − des traitements nécessaires à la constatation, à l’exercice ou à la défense d’un droit en justice ; − des traitements nécessaires aux fins de médecine préventive, des diagnostics médicaux, de l’administration des soins ou de traitements ou de la gestion des services de santé, et mis en œuvre par un professionnel de santé ou par une autre personne tenue au secret professionnel ; − des traitements nécessaires à la sauvegarde de la vie humaine ; − des traitements de données de santé à des fins de recherche médicale ; − des traitements de données de santé pouvant faire l’objet « à bref délai », d’un procédé d’anonymisation reconnu conforme à la loi par la CNIL ; − des traitements statistiques réalisés par l’INSEE ou par un service statistique ministériel, après avis du Conseil national de l’information statistique (CNIS) ; − des autres traitements de données sensibles justifiés par l’intérêt public et autorisés par la CNIL ou par décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL.La CNIL veille avec une particulière attention au respect de ces dispositions, comme le montrent par exemple ses prises de position sur les traitements portant sur les patronymes (cf. encadré).• La position de la CNIL sur la mesure de la diversité des origines par les employeursLa CNIL a adopté lors de sa séance du 5 juillet 2005 une série de recommandations 2. Elle recommande aux employeurs de ne pas recueillir de données relatives à l’origine raciale ou ethnique, réelle ou supposée de leurs employés ou de candidats à l’embauche, même avec l’accord de ces derniers. La CNIL constate en effet qu’il n’existe ni référentiel national de typologies « ethnoraciales », ni indicateurs « ethno-raciaux » diffusés par la statistique publique qui pourraient servir aux employeurs de base de comparaison fiable (indicateurs nationaux ou par bassin d’emploi). La CNIL ajoute que l’adoption d’un tel référentiel est du ressort du législateur.La CNIL estime également que l’analyse de la consonance du nom ou du prénom, de la nationalité ou de l’adresse des personnes aux fins de classement dans des catégories « ethno-raciales » n’est pas pertinente, encore une fois en raison de l’absence d’un référentiel national de typologies « ethnoraciales » et en l’absence d’un lien fiable entre ces données et l’appartenance à une catégorie raciale ou ethnique déterminée.Elle autorise en revanche l’utilisation de données relatives à la nationalité et au lieu de naissance du salarié, données qui figurent dans les fichiers de gestion du personnel. L’employeur doit faire la déclaration d’un tel traitement des fichiers de gestion du personnel à la CNIL et en informer les employés. Toutefois, les statistiques produites ne doivent pas porter sur des groupes de moins de dix personnes afin de garantir l’anonymat et les fichiers de données individuelles constitués pour la réalisation de l’étude doivent être détruits à l’issue de la production des résultats statistiques.En revanche, les fichiers de gestion du personnel ne peuvent en aucun cas contenir, même au motif de mesure de la diversité, de données telles que la nationalité d’origine d’un employé ou d’un candidat à un emploi, de même que la nationalité ou le lieu de naissance de ses parents.

Enfin la CNIL admet la réalisation d’enquêtes ad hoc par questionnaires anonymes. Par anonyme, il faut comprendre que le questionnaire ne doit pas permettre d’identifier directement (par le nom) ou indirectement (via un numéro, la désignation d’un poste particulier ou par recoupement d’informations) la personne qui y répond. Là encore, aucun résultat statistique ne doit concerner des groupes de moins de dix personnes. Les questionnaires individuels doivent être détruits à l’issue de la phase d’exploitation des réponses. Le recours à des questionnaires permet en revanche de recueillir et de traiter des données indisponibles (car interdites) dans les fichiers de gestion du personnel, et en particulier la nationalité d’origine de l’individu et la nationalité ou le lieu de naissance de ses parents.

La prise en compte progressive des origines dans la statistique française : de la nationalité à l’« ethnicité »

L’émergence d’une forme de reconnaissance par la statistique des origines des individus s’est faite par étapes3. L’introduction dans le recensement d’une question relative à la nationalité des habitants remonte à 1851 (elle ne fut abandonnée qu’une fois, en 1856). La formulation de la question n’a pas varié entre 1871 et 1946. La nationalité est alors enregistrée en trois catégories : Français de naissance, Français par naturalisation (ou par « assimilation »), et étrangers. Si les étrangers doivent indiquer leur nationalité précise, les « naturalisés » ne doivent signaler que le caractère acquis de leur nationalité française. Ce n’est qu’en 1962 que leur nationalité antérieure leur sera demandée.

Pendant l’entre-deux guerres et jusqu’en 1946, à la lecture des tableaux publiés à partir des informations tirées du recensement, on note un vif intérêt pour la catégorie des « naturalisés », même si l’État français ne reconnaît pas de différences de statut entre citoyens français selon le mode d’acquisition de la nationalité. Il est vrai que l’importance numérique de cette catégorie a nettement augmenté depuis la fin du XIXe siècle : les naturalisés sont 202 000 en 1896, 517 000 en 1936 et 833 000 en 1946. L’information relative à la nationalité antérieure des naturalisés n’étant alors pas disponible, les services statistiques attribuent une « origine » aux naturalisés en fonction du lieu de naissance des individus, tout au moins pour ceux qui sont nés hors de France (c’est le cas de 85 % des naturalisés en 1931, mais de seulement 65 % en 1946). L’enregistrement des « Français par acquisition » et l’exploitation qui est faite de cette catégorie dans les tableaux de présentation du recensement répond déjà au besoin d’étudier l’assimilation des étrangers dans la population française.

Après la Deuxième Guerre mondiale, les flux de population en provenance d’Algérie sont assez importants (le « stock » s’élève à 200 000 en 1954) pour qu’on lui réserve un traitement particulier. Le bulletin du recensement de 1954 ne permet pas de séparer les « Français d’Algérie » des « Français musulmans ». Cette dernière catégorie naît avec la loi organique du 20 septembre 1947 qui étend la citoyenneté française à l’ensemble des habitants d’Algérie mais qui continue à les distinguer selon leur statut (civil ou personnel). Pour reconstruire cette distinction, les services du recensement suivent une règle de chiffrement inédite : ils classent en « musulmans originaires d’Algérie » les personnes nées en Algérie ayant à la fois un nom et un prénom à consonance arabe ou berbère et en « Français de naissance originaire d’Algérie » ceux qui ont un « prénom chrétien ou israélite ». Le même principe de recours au nom et prénom est appliqué en 1962, alors même que l’Algérie vient d’accéder à l’indépendance. Les catégories décrivant les migrants d’Algérie distinguent cette fois « rapatrié français de naissance », « Français musulman ayant choisi de conserver la nationalité française », « Français musulman devenu Algérien ». Alors qu’en 1954, on cherchait à retrouver les catégories juridiques existantes, avec le recensement de 1962, le critère juridique semble donc s’effacer derrière le critère « ethnique ». Il faut attendre le recensement de 1968 pour retrouver une distinction par nationalité clarifiée.

La catégorie « immigrée », elle, ne se stabilise vraiment qu’au début des années 1990. La démographe Michèle Tribalat 4 a joué un rôle pionnier en recommandant l’usage d’un concept précis pour catégoriser la population immigrée, après que de nombreux travaux eurent montré les limites et les erreurs liées à l’usage exclusif de la nationalité pour traiter de questions relatives à l’immigration. La nouvelle catégorie, adoptée par le Haut Conseil à l’intégration en 1991, combine le lieu de naissance et la nationalité de naissance, les immigrés étant définis comme les personnes résidant en France, nées étrangères à l’étranger. La reconstitution de la catégorie « immigré » ne pose pas de véritable problème. Le plus souvent, on dispose directement du lieu de naissance et de la nationalité de l’individu. Si ce n’est pas le cas, on établit une catégorie plus ou moins proche en rassemblant les étrangers et les Français par acquisition.

Cela dit, la catégorie « immigré » reste insuffisante pour qui ne s’en tient pas à l’analyse de l’immigration mais s’intéresse aussi à la question plus vaste et de plus en plus prégnante des « relations interethniques ». L’étude de cette réalité suppose pour le moins de construire une catégorie « population issue de l’immigration ». Pour ce faire, et à condition de ne pas aller au-delà de la fameuse « seconde génération », ou « première génération née en France » pour reprendre la typologie de M. Tribalat, il faut disposer du lieu de naissance des parents. Or, avant l’enquête Etude de l’histoire familiale (EHF) de 1999, complémentaire au recensement, cette variable ne figurait dans aucune enquête à large échantillon 5.

Conscient de cette lacune, le Haut Conseil à l’intégration, dans son rapport de 1993, recommande le développement d’études sur des populations définies par leurs origines, à condition que l’utilisation des catégories d’origine soit réservée à des enquêtes spécifiques telles l’enquête Mobilité géographique et insertion sociale réalisée par l’INED en 1992 en collaboration avec l’INSEE.

Hors ces enquêtes spécifiques, et avant l’enquête EHF de 1999, les démographes et autres statisticiens s’en sortent donc en « bricolant », tentant par divers moyens de surmonter le handicap lié à l’absence de catégorie statistique stable s’ajustant précisément à l’objet « seconde génération » (et a fortiori à « l’ethnicité »). Par exemple, dans l’étude de L.-A. Vallet et J.-P. Caille sur les « élèves étrangers ou issus de l’immigration », réalisée à partir du panel de la DEP, l’une des stratégies utilisées a consisté à construire une catégorie « groupe d’appartenance de l’élève » qui combinait la nationalité et le lieu de naissance de l’élève et la langue parlée à la maison 6.

Aujourd’hui, comme on va le voir maintenant, la question sur le lieu de naissance des parents tend à être plus fréquente dans les grandes enquêtes publiques.

Un exemple de refus par la CNIL d’un traitement reposant sur la constitution d’un échantillon à partir des patronymes

La CNIL a refusé d’autoriser la réalisation par la SOFRES, mandatée par le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), d’un sondage d’opinion par téléphone, à partir d’un échantillon résultant d’un tri sur les patronymes. Le refus tient à la méthode de collecte employée et non à l’objet du sondage qui consistait à « objectiver, mesurer et analyser l’état de l’opinion de la communauté juive de France ».

Pour effectuer cette enquête par téléphone, la SOFRES entendait constituer l’échantillon des personnes à interroger selon la méthode patronymique suivante : − identifier d’abord une liste d’environ 160 noms à consonance juive sur la base d’un Guide des patronymes juifs; − procéder ensuite à une sélection aléatoire, au sein du fichier des abonnés au téléphone, d’environ 15 000 personnes portant un des patronymes identifiés ; − tirer enfin, sur la base de cette liste, un échantillon de cinq cents personnes qui seraient interrogées par téléphone.

Lors de sa séance du 2 février 2006, la CNIL a estimé que, la constitution de l’échantillon des personnes à interroger reposant uniquement sur un tri par leur nom, le traitement ainsi mis en œuvre se heurtait au principe posé par l’article 8 de la loi Informatique et libertés d’interdiction de collecte ou de traitement de données faisant apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques ou les appartenances religieuses des intéressés.

En l’espèce aucune des dérogations prévues par la loi ne pouvait être invoquée,

le consentement préalable des personnes concernées ne pouvant être recueilli. La CNIL a refusé par ailleurs d’autoriser le recours à un procédé d’anonymisation de la base d’exploitation des réponses par la SOFRES, jugeant que le traitement envisagé ne répondait pas aux conditions posées par l’article 6 de la loi aux termes duquel les données doivent être « adéquates, pertinentes et non-excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées ».

En effet, la CNIL conteste le postulat selon lequel les personnes ayant un nom figurant dans le Guide des patronymes juifs seraient présumées appartenir à la « communauté juive » et souligne les risques liés à une sélection de ce type.

Le CRIF et la SOFRES ont déposé une nouvelle demande d’autorisation le 21 mars 2006. Dans cette demande, les modalités de constitution de l’échantillon reposent sur l’établissement d’une liste des 50 noms juifs les plus fréquents parmi le fichier des 50 000 donateurs de l’Appel Unifié Juif de France qui devait servir ensuite de base à la sélection aléatoire au sein du fichier des abonnés au téléphone portant l’un des 50 patronymes juifs sélectionnés.

La CNIL a également refusé d’autoriser cette étude en considérant que, même dans ces conditions, la méthode de sélection par le nom n’était pas admissible, l’établissement d’un lien entre un nom et l’appartenance à la communauté juive restant contestable dans son principe.

Source : http://www.cnil.fr

2. Ces recommandations sont consultables sur le site de la CNIL : http://www.cnil.fr.

3. Ce paragraphe s’appuie essentiellement sur SIMON P. (1998), « Nationalité et origine dans la statistique française », Population, n° 3, p. 541-568. On ne traite pas ici du cas particulier de la statistique coloniale. Pour approfondir la question, on pourra se reporter à RALLU J.-L. (1998), « Les catégories statistiques utilisées dans les DOM-TOM depuis le début de la présence française », Population, n° 3, p. 589-608, ou bien à KATEB

K. (1998), « Gestion statistique des populations dans l’empire colonial français : quelques éléments relatifs à l’histoire des populations d’Algérie (1830-1960) », Histoire & Mesure, vol. 13, n° 1-2.

4. TRIBALAT M. (1989), « Immigrés, étrangers, Français : l’imbroglio statistique », Population et Sociétés, n° 242, p. 17-29.

Voir par ailleurs:

La bombe migratoire
Régions
Marianne Payot

L’Express

01/12/2005

François Baroin n’a pas été pris au dépourvu. En évoquant, dès le mois de juillet, lors d’une visite à Mayotte, puis deux mois plus tard dans Le Figaro Magazine, l’éventualité d’une remise en question du droit du sol «pour certaines collectivités d’outre-mer», le ministre (UMP) de l’Outre-Mer savait qu’il allait déclencher une polémique. Ou tout du moins l’espérait-il? «Ce débat, je l’ai voulu, explique-t-il aujourd’hui, il était indispensable et volontairement provocateur. Comme toutes ces collectivités sont loin, il faut parler fort.»

L’enjeu d’une telle fronde? Les flux d’immigration considérables qui touchent en premier lieu Mayotte et la Guyane, où 1 habitant sur 3 serait un étranger. Mais aussi la Guadeloupe, en proie, depuis deux ans, à un afflux massif d’Haïtiens. «Si l’on avait dans l’Hexagone un même taux d’immigration, cela équivaudrait à 15 millions de clandestins, souligne le ministre, chiraquien dans l’âme. L’outre-mer avait besoin d’un message clair et rassurant de la France.» D’où, en guise de ballon d’essai, ses propos iconoclastes. Cela dit, Baroin sait parfaitement que la – difficile – acquisition de la nationalité française n’est pas, de loin, l’unique moteur de l’immigration ultramarine. Un enfant né en France de parents étrangers ne peut en effet obtenir la nationalité française qu’à sa majorité (ou, par anticipation, à partir de 13 ans) et à condition qu’il vive encore en France et que ses parents et lui-même le réclament.

Autant de démarches longues et compliquées, impraticables par la plupart des Comoriens qui déferlent sur l’ «île aux parfums» (Mayotte) et par les Haïtiens, Dominicains, Brésiliens, Surinamiens? qui «investissent» les départements français d’Amérique (DFA). «Seul un millier de « nos » étrangers ont acquis la nationalité française», rappelle le président (PSG [Parti socialiste guyanais]) du conseil régional, Antoine Karam. «En fait, affirme Victorin Lurel, son homologue PS de Guadeloupe, plutôt que le droit du sol, qui a eu la vertu d’émanciper les esclaves, c’est le droit du sang qui devrait être remis en cause. Ou, en tout cas, mieux encadré: il faut sanctionner les paternités fictives.»

La «faute originelle» de ces collectivités? Constituer de – relatifs – îlots de prospérité dans des environnements plus que sinistrés. Ainsi de l’île de Mayotte, confetti de 374 kilomètres carrés perdu dans l’océan Indien – la Réunion est à 1 500 kilomètres! – mais toute proche de ses «s?urs» de l’Union des Comores, l’un des Etats les plus pauvres de la planète. De même la Guyane peut-elle «s’enorgueillir» de détenir un PIB par habitant de cinq à dix fois supérieur à celui de ses voisins, le Brésil et le Suriname. Quant à Haïti, à l’économie exsangue et à l’instabilité politique chronique, il voit essaimer ses misérables ressortissants tout à la fois en Guyane et aux Antilles.

Pour enrayer cette volumineuse immigration économique et sociale, le premier réflexe voudrait qu’on empêche ces visiteurs d’entrer dans l’ «eldorado» français. Une tâche guère aisée: des centaines d’embarcations – les kwassa-kwassa à Mayotte (lire l’article Mayotte : marée humaine ) et les saintoises en Guadeloupe – déversent nuitamment leur lot de boat people sur les côtes des îles, tandis qu’en Guyane les? 3 000 kilomètres de frontière – de fleuves et de forêt – sont franchis allègrement par les clandestins hors des points de contrôle. Une porosité qui fait la joie des passeurs: l’Haïtien en proie au rêve guadeloupéen devra ainsi débourser environ 2 500 dollars, comprenant l’acheminement en voiture jusqu’à Saint-Domingue, puis l’avion pour la Dominique et, enfin, le bateau vers Grande-Terre. L’Anjouanais, lui, s’acquittera de 150 à 200 dollars pour franchir les 70 kilomètres du lagon et gagner Mayotte. A ses risques et périls: 200 personnes meurent chaque année dans «le plus grand cimetière de l’océan Indien», selon l’expression de Mansour Kamardine, le député (UMP) de l’île.

C’est à ces réseaux que tente donc de s’attaquer la police aux frontières (PAF) des différentes collectivités. «Nous en avons démantelé 33 en un an», annonce fièrement le commissaire Garcia, de Guyane. Mais le pain quotidien de ses 224 hommes, ce sont les interpellations dans la rue (baptisées prosaïquement «ramassage»), auxquelles s’adonnent également les gendarmes – spécialisés notamment dans la lutte contre l’orpaillage clandestin – puis les reconduites à la frontière. Une mission facilitée par le régime «d’exception» qui prévaut ici, tout comme à Saint-Martin (et dont tous les élus de Guadeloupe réclament à cor et à cri l’extension à l’archipel entier): depuis 1993, en effet, les arrêtés de reconduite ne peuvent plus faire l’objet de recours suspensifs et les contrôles d’identité peuvent s’effectuer dans un périmètre de 20 kilomètres au-delà des frontières.

Aussi suffit-il, pour faire du «chiffre», d’aller, par exemple, faire un tour du côté du marché de Saint-Laurent-du-Maroni, la ville frontière de l’Ouest guyanais. On y trouve nombre de Surinamiens qui seront embarqués le soir, avec le sourire, de l’autre côté du fleuve? D’où ils reviendront très vite, afin de vendre, côté français, quelques épices, de visiter un proche ou encore de se faire soigner (lire l’article Guyane : bousculade à la maternité ) – une réalité tellement ubuesque que les autorités recherchent actuellement une solution originale. Les autres (Brésiliens, Haïtiens, Péruviens, Chinois…) séjourneront, eux, au centre de rétention administrative (CRA) de Cayenne. Vétuste, surchargé, il devrait, Nicolas Sarkozy vient de l’annoncer, être agrandi l’année prochaine. Tout comme celui des Abymes, en Guadeloupe, beaucoup plus décent, mais dont les 20 places se révèlent souvent insuffisantes.

Parallèlement, la France s’agite sur le front diplomatique, afin de multiplier les accords de réadmission. Car les Etats ne sont pas toujours prompts à accepter le retour de leurs ouailles ni à favoriser le transit sur leur territoire de ressortissants étrangers. Après le Brésil en 2001 et le Suriname fin 2004, c’est avec la Guyana que le Quai d’Orsay, épaulé par le ministre délégué au Tourisme, Léon Bertrand, par ailleurs maire (UMP) de Saint-Laurent-du-Maroni, s’efforce de poser des jalons. Un accord d’autant plus nécessaire que les Guyaniens jouissent ici d’une mauvaise réputation, souvent justifiée (ils représentent près de 28% de la population carcérale de Cayenne).

«Nous avons créé lors de ma visite, fin octobre, un climat de confiance, qui devrait, à terme, déboucher sur l’installation d’un consulat, souligne, satisfait, Bertrand. Avec des contreparties, bien sûr, comme l’aide à la formation de leur police, confrontée à une forte criminalité et au trafic de drogue.» C’est ce même principe de donnant-donnant qui régit les négociations conduites ces jours-ci avec la Dominique, plaque tournante de l’émigration vers l’archipel guadeloupéen. Pour Haïti, gros «exportateur» de clandestins, c’est Brigitte Girardin, ministre déléguée à la Coopération et prédécesseur de François Baroin, qui est montée en première ligne en septembre. Dans le dessein d’aider financièrement le pays afin de fixer, à terme, les Haïtiens sur leur terre.

Tournant identitaire
Pourquoi un tel branle-bas de combat? Par peur de désordres sociaux. Rien à voir avec nos banlieues – durant les trois semaines d’émeutes en métropole, l’outre-mer est restée remarquablement calme. On craint, en revanche, les mouvements d’humeur de citoyens, qui se multiplient çà et là. A Mayotte, ce sont plusieurs milliers de Mahorais qui descendent dans la rue pour manifester contre l’immigration; en Guadeloupe, une pétition, diligentée par une petite radio surfant sur la xénophobie, a recueilli 40 000 signatures enjoignant notamment aux autorités d’endiguer l’ «invasion étrangère». En Guyane, enfin, un collectif dit «des mille lettres» déverse son courroux sur les ondes et dans les squats – qu’il n’hésite pas évacuer manu militari.

L’immigré, responsable de tous les maux: chômage, délinquance, carence de logements… L’antienne n’est pas nouvelle. «Nous sommes à un tournant identitaire, explique Christiane Taubira, députée (PRG) de Guyane, car nous sommes devenus minoritaires, nous, les Guyanais. En fait, nous payons aujourd’hui les plans de peuplement lancés dans les années 1970 pour noyer les mouvements indépendantistes d’alors et sécuriser le centre spatial. Jacques Chirac, le ministre de l’Agriculture de l’époque, a joué les apprentis sorciers.» Même son de cloche du côté d’Antoine Karam, qui pointe, par ailleurs, les défaillances de l’Etat en termes d’aménagement du territoire et de lutte contre les occupations illégales, tout en s’inquiétant d’une Guyane «en voie de palestinalisation» – en clair, des communautés vivant séparées sur un même territoire.

A 1 500 kilomètres de là, le Guadeloupéen Victorin Lurel en appelle à une véritable coopération avec Haïti, la Dominique et Antigua-et-Barbuda. L’autre député de gauche de l’archipel, Eric Jalton, craint pour sa part les débordements: «Le jour où un Haïtien violentera une Guadeloupéenne, cela mettra le feu aux poudres!» «Le Haïtien est tout sauf une racaille, proteste André Théodore, délégué général de l’association de Haïtiens Tèt Kole, affolé par l’anathème jeté sur ses 13 000 compatriotes légaux de Guadeloupe. Il est dans le besoin, mais pas dans la violence. Son problème, c’est de trouver du travail.»Et du travail, il en trouve. Déclaré ou pas. Sur les champs de canne à sucre, dans les bananeraies, sur les chantiers? Car ici, comme partout, règne une bonne dose d’hypocrisie. On crie à l’invasion et on emploie, au noir et pour 30 euros par jour, une main-d’?uvre malléable à souhait. «Vous avez aussi des marchands de sommeil qui louent des taudis 800 euros la semaine», s’indigne Gérald Coralie, président de la Ligue des droits de l’homme. Dieunie Fanfan, consul d’Haïti aux Antilles, ne sait plus où donner de la tête. Avec ses maigres moyens, elle doit s’occuper de sa communauté, épauler les plus démunis, s’escrimer pour donner une image moins dramatique de son pays? Choquée par les rabatteurs de Port-au-Prince qui rackettent les candidats à l’exil à coups de 3 000 dollars le faux passeport, elle exhorte ses concitoyens à ne plus tenter l’aventure.

L’accalmie, c’est ce que souhaitent aujourd’hui tous les protagonistes, afin d’éviter les drames. Ici, en outre-mer, une nouvelle politique d’immigration est à inventer. La paix sociale est à ce prix.

Voir encore:

Questions internationales (1)
Les territoires français d’outre-mer s’alarment de l’afflux d’immigrés clandestins

Jean Piel

RFI

20/04/2007

(MFI) Alors que l’immigration est l’un des thèmes majeurs de la campagne électorale en France, deux collectivités d’outre-mer – la Guyanne et Mayotte – comptent plus de 20 % de clandestins. Le renforcement des contrôles de police depuis 2005 n’a pas inversé la tendance. Dirigeants politiques locaux et population dénoncent ce qu’ils considèrent être un facteur de chômage et d’insécurité, mais profitent aussi de ces clandestins.

Quelle est l’importance de l’immigration clandestine en Guyane et à Mayotte ?

La scène se répète plusieurs fois par jour. Dissimulés sous les branchages de l’épaisse végétation, des gendarmes surveillent le fleuve Maroni qui sépare la Guyane du Surinam. Dès qu’une embarcation accoste sur la rive française du fleuve, ils interviennent. La plupart du temps, il s’agit d’un clandestin qui sera immédiatement refoulé… Avant de retenter sa chance quelques heures plus tard.
A 15 000 kilomètres de là, sur l’île de Mayotte dans l’océan Indien, le scénario est le même. Quotidiennement, les forces de l’ordre envahissent le bidonville de Cavani et arrêtent les immigrés comoriens qui n’ont pas eu le temps de s’enfuir dans la forêt voisine. Ils seront expulsés le soir même sans autre forme de procès vers Anjouan, la plus proche île de l’archipel des Comores indépendantes.
Depuis plusieurs années, les collectivités françaises d’outre-mer – Guyane et Mayotte en tête – sont confrontées à un afflux d’immigrés clandestins. En Guyane, on estime leur nombre à 35 000, soit 20 % de la population ; 59 % de ceux arrêtés sont des récidivistes. Ces immigrés viennent en majorité du Surinam, du Guyana et du Brésil.
Le constat est le même à Mayotte où les clandestins sont estimés à 50 000, soit le tiers de la population. Tous viennent des Comores, distantes de 80 kilomètres par la mer. « Mayotte est devenu le premier port d’entrée de clandestins en France », s’alarme Ali Souf, le président de l’association des maires de l’île. Comme le déclarait en 2005 François Baroin, alors ministre de l’Outre-mer et aujourd’hui ministre de l’Intérieur : « Si l’on avait en métropole le même taux d’immigration, cela équivaudrait à 15 millions de clandestins. »

Comment expliquer cette immigration clandestine ?

Par la ruée vers l’or, au sens propre comme au figuré. Au sens propre puisque environ 7 000 clandestins en Guyane sont des orpailleurs qui travaillent dans les mines d’or ou cherchent un filon en solo. Au figuré, dans la mesure où ces collectivités françaises d’outre-mer représentent des îlots de prospérité au milieu de régions sinistrées et instables politiquement. Ainsi le PIB par tête de la Guyane est 5 à 10 fois supérieur à celui de ses voisins brésilien, surinamais ou haïtien. Les possibilités d’y trouver un petit boulot sont nombreuses, comme vendeur à la sauvette ou domestique. « Je suis exploité, mais au moins je suis payé. J’ai été expulsé 7 fois ; je suis prêt à l’être encore 20 fois car je n’ai pas d’autres choix que de travailler en Guyane pour nourrir ma famille », témoignait dans Le Monde un Brésilien employé dans une exploitation agricole.
Si la Guyane abrite la base spatiale de Kourou et 200 entreprises associées, ce n’est pas le cas de Mayotte, région peu industrialisée, qui vit de la pêche et de l’agriculture. Néanmoins, Mayotte est nettement plus riche que les Comores dont l’économie est en ruine, qui ne sont pas autosuffisantes au plan alimentaire et dépendent de l’argent envoyé par la diaspora. Le PIB par tête est de 500 dollars par an aux Comores et de 4 000 dollars à Mayotte.
Certains observateurs expliquent aussi cette immigration par un facteur culturel. Ainsi la Guyane accueille des habitants de nombreuses origines pour lesquels la notion de frontière serait relative. On peut citer les Créoles, les Amérindiens, les H’mongs (d’origine laotienne), les Békés… Pour sa part, Mayotte est la seule île de l’archipel à avoir choisi de rester française lors du référendum d’autodétermination de décembre 1974 ; les trois autres îles ont opté pour l’indépendance. Mais jusqu’en 1993, les Comoriens pouvaient facilement s’installer à Mayotte. Cette année-là, le gouvernement d’Edouard Balladur a instauré un sauf-conduit spécial pour entrer sur l’île aux parfums, comme on surnomme Mayotte. « Les Comoriens ont toujours voyagé librement d’une île à l’autre. Ce visa fait de nous des étrangers dans notre archipel. Pour nombre d’habitants d’Anjouan ou de Mohéli, la notion de visa est difficile à comprendre, tout comme ils font mal la différence entre un Mayotte français et des îles indépendantes. Pour eux, c’est leur territoire », s’insurgeait un clandestin interviewé par Le Journal de la Réunion.
Mais l’argument culturel laisse dubitatif ceux qui vivent dans les DOM-TOM. Selon eux, les clandestins savent ce qu’est un visa et ont conscience du potentiel économique de Mayotte et de la Guyane. Ils sont séduits par le meilleur niveau de protection sociale qu’offrent les collectivités françaises. Même si le revenu minimum d’insertion (RMI) n’a pas cours à Mayotte. Avec 7 600 naissances par an, la maternité de Mamoudzou – capitale de Mayotte – est la première de France ; 80 % des mères sont en situation irrégulière. Même cas de figure à Maripasoula, un gros bourg sur les rives du fleuve Maroni, en Guyane, où l’on compte 4 457 habitants, mais 18 000 dossiers médicaux au dispensaire. Quant aux écoles, elles sont surchargées et comptent en moyenne 40 % d’élèves étrangers. « En ayant un enfant né en France ou qui y est scolarisé, le but des parents est d’obtenir un titre de séjour, puis la nationalité grâce au droit du sol », accusent les partisans d’un contrôle strict de l’immigration. « N’exagérons rien. Moins de mille étrangers enregistrés à Cayenne ont obtenu la citoyenneté française depuis dix ans. Et on ne peut pas reprocher à une mère de vouloir accoucher dans les meilleures conditions ou de faire soigner au mieux sa famille », réplique Antoine Karam, le président du conseil régional de Guyane.
Ce flux migratoire est évidemment facilité par la géographie. La Guyane compte 3 000 kilomètres de frontière, souvent noyés au milieu de la forêt amazonienne. Un simple fleuve la sépare du Brésil et du Surinam. Il serait illusoire de vouloir tout contrôler, même si les moyens de la gendarmerie ont été renforcés depuis 2005. Quant aux 80 km d’océan entre Mayotte et les Comores, les patrouilles maritimes ne peuvent pas en assurer une surveillance totale. Les candidats à l’exode embarquent de nuit sur de frêles embarcations, des kwassa kwassa, malgré les risques encourus. Depuis 1995, plus de 1 000 Comoriens se sont noyés, faisant de ce bras de l’Océan Indien l’un des plus grands cimetières maritimes au monde.

Comment ces immigrés clandestins sont-ils accueillis par la population locale ?

« La xénophobie est croissante en Guyane. Jusqu’à présent, cela n’a pas dégénéré. Mais je redoute le jour où les Guyanais décideront de faire justice eux-mêmes. L’Etat doit rétablir son autorité sur le territoire ». Cette déclaration de Jean Cesto, conseiller municipal de Matoury, résume l’opinion d’une grande partie de la population. Les immigrés clandestins ne sont pas les bienvenus. Le sentiment est le même à Mayotte où plusieurs manifestations rassemblant des milliers de Mahorais ont réclamé l’arrêt de « l’invasion étrangère ». Dans les deux régions, des milices musclées ont incendié des squatts occupés par des clandestins.
Les immigrés sont accusés de tous les maux : insécurité, chômage, carence des logements… Le refrain est connu. Mais dans des régions où les clandestins sont effectivement nombreux, il prend un relief particulier. D’autant qu’à Cayenne comme à Mamoudzou, le taux de chômage dépasse les 26 %. En matière de délinquance, les DOM-TOM connaissent des chiffres plutôt faibles. Sauf la Guyane, où les statistiques sont dignes de celles de la région parisienne. Et 28 % des détenus pour vols ou agressions sont originaires du Guyana. Pire : on a enregistré, en 2006, 84 meurtres (souvent des règlements de compte entre orpailleurs) pour 200 000 habitants alors que Paris – 2,1 millions d’habitants – n’a connu la même année que 52 assassinats. « Les classes sont surchargées et le niveau baisse. Les hôpitaux n’arrivent plus à faire face à l’afflux de patients. Les rues sont peu sûres et l’emploi manque. Tout ça à cause des clandestins », entend-t-on, de façon quelque peu simpliste, à Cayenne et Mamoudzou.
Les élus ne sont pas en reste, quelle que soit leur affiliation politique. Réunis en congrès en novembre dernier, les maires de Guyane, de Guadeloupe et de Mayotte ont réclamé un renforcement de la lutte contre l’immigration clandestine. « Pour éviter qu’un jour la situation ne devienne incontrôlable et que des violences contre les étrangers ne dégénèrent », se sont-ils justifiés. « Ici, l’immigration est un thème électoral majeur. C’est à celui qui montrera le plus de fermeté. Personne n’exprime de problèmes de conscience face à des situations de détresse comme en métropole. Les électeurs approuvent le durcissement des lois contre les immigrés, et ils sont peu nombreux à se dire choqués quand des milices organisent des battues contre les clandestins », reconnaît Ali Souf, le président de l’association des maires de Mayotte. Le discours est le même en Guyane où nombre d’élus ont approuvé, en juillet 2005, la proposition de François Baroin de remplacer, dans les DOM-TOM, le droit du sol par le droit du sang (voir article ci-joint). « Si cette proposition contribue à soulever le dossier de l’immigration en Guyane, tant mieux. Peu importe le tollé qu’elle a provoqué. Je suis prêt à inviter mes amis du Parti socialiste et de SOS-Racisme à venir deux mois en Guyane au lieu d’y passer 48 heures », avait alors déclaré Antoine Karam, le président du conseil régional de Guyane, pourtant membre du PS.
Ce même Antoine Karam a récemment dénoncé une « palestinisation de la région », évoquant le repli des communautés sur elles-mêmes. La crainte de perdre son identité s’exprime de vive voix. « Les enfants comoriens susceptibles d’acquérir la nationalité française par le droit du sol seront bientôt plus nombreux que les Mahorais », s’alarme Ali Souf. « Nous sommes à un tournant identitaire. Les Guyanais de souche sont devenus minoritaires sur leur propre terre », lui répond en écho Christiane Taubira, député et membre du Parti radical de gauche.
Evidemment les immigrés clandestins trouvent des défenseurs. A l’instar de l’avocat guyanais Gérald Coralie : « Les gens crient à l’invasion, mais emploient des clandestins comme jardinier ou domestique pour 20 euros par jour. Des marchands de sommeil louent des taudis 800 euros par mois. C’est le règne de l’hypocrisie. » Quant à Ali Souf, il n’a pas de mots assez durs contre « ceux qui se plaignent mais font construire leur maison dix fois moins cher par des Comoriens, puis les dénoncent à la police une fois les travaux effectués ». Un ancien commandant de gendarmerie se rappelle de « ces Guyanais qui vont acheter illégalement du poisson au Brésil pour le revendre sur le marché de Cayenne, puis se plaignent de la concurrence déloyale des clandestins ».
Du côté des politiques, on souligne que les écoles surchargées et les hôpitaux débordés tiennent aussi au manque d’investissement de l’Etat français dans les infrastructures. La conclusion revient à Daniel Bergeron, conseiller général UMP de Guyane : « Il est certain que les immigrés clandestins posent un problème et sont trop nombreux. Il est tout aussi certain qu’on a fermé les yeux pendant des années et que beaucoup en profitent. Mais bien malin celui qui arrêtera l’immigration en Guyane. Même en durcissant les lois, les clandestins ont trop intérêt à être là tant que la région d’où ils viennent sombrent dans la misère.

Voir enfin:

Alain Bauer : « Délinquance : oui, il faut tout dire ! »
Professeur de criminologie au Conservatoire national des arts et métiers et aux universités de New York et Beijing, Alain Bauer fait partie de ceux qui, avec Xavier Raufer, comptent parmi les universitaires les plus actifs pour initier le grand public aux questions d’insécurité. Pour cet ancien Grand Maître du Grand Orient de France, proche conseiller de Nicolas Sarkozy, les réponses aux drames qu’elle engendre passent par un diagnostic sans concession, seul moyen de ne pas se tromper de traitement, mais aussi de récuser les fantasmes que nourrissent les soupçons de dissimulation. Tour d’horizon.
Éric Branca
Valeurs actuelles
30 septembre 2010

On entend parfois expliquer qu’en matière de linquance toute vérité n’est pas bonne à dire, au motif que, mal interprétés, certains faits pourraient nourrir l’extrémisme… J’estime que le meilleur moyen de faire monter l’extrémisme, c’est de dissimuler la vérité. La sécurité n’est pas seulement une affaire de bons sentiments ; c’est une affaire de clarté et d’efficacité. Comment être efficace quand on se met hors d’état d’appréhender une partie du réel ? La manière dont on occulte certains chiffres, dont on élude certaines données statistiques, dont on laisse de côté des éléments parfaitement rationnels, de crainte qu’ils soient instrumentalisés par tel ou tel, est à la fois irresponsable du point de vue l’action publique, et contre-productif politiquement.

Pourquoi ? Parce que quand on s’abstient d’aborder rationnellement un sujet, on se place en situation de le voir traiter irrationnellement par d’autres… On aide les receleurs des peurs collectives.

C’est le cas de la délinquance chez les étrangers ? Également. Quand on fait de ce sujet, qui devrait être traité scientifiquement, un sujet tabou, on le transforme automatiquement en objet de passion. « Si l’on nous cache les chiffres se rapportant à une réalité que nous constatons chaque jour, pensent les citoyens, c’est qu’ils sont pires encore que ce que nous imaginons… » Et de là à penser que les étrangers sont structurellement des délinquants, il n’y a qu’un pas. Ce qui relève évidemment du fantasme. Comme pour les immigrés d’ailleurs.

Contrairement aux Anglo-Saxons, qui ont l’habitude du débat faisant la différence entre le fait et l’opinion dans tous les domaines, nous autres français avons une culture du commentaire. Nous parlons thérapeutique sans oser poser le moindre diagnostic. Or la criminologie a ceci de commun avec la médecine qu’elle s’ordonne en trois étapes : diagnostic, pronostic et thérapeutiques. Il existe trente-six manières d’annoncer à un patient qu’il a cancer. Mais si on ne le lui dit pas et qu’on le soigne comme s’il avait un rhume, il y a fort peu de chances qu’il en réchappe…

Vous parlez de ce qui est rationnel et de ce qui ne l’est pas dans le lien entre immigration et insécurité. Commençons par l’irrationnel… Ce qui relève de l’irrationnel, c’est évidemment d’expliquer le caractère criminogène de l’immigration par des facteurs ethniques ou raciaux. Cette explication est vieille comme le monde – l’éternelle recherche de boucs émissaires – mais elle s’invalide d’elle-même par l’observation historique : aucun groupe ethnique ne détient, dans l’histoire de l’humanité, le monopole de la violence ou du crime. Ce serait plutôt l’inverse, comme les génocides ont pu le révéler. En revanche, le fait que certains groupes, en fonction de leur composition démographique, placés dans certaines situations, réagissent selon des règles particulières, donne la piste de l’explication rationnelle. S’il existe un déterminisme, c’est du côté de la situation qu’il faut le chercher, évidemment pas du côté de l’origine…

C’est si vrai que ce qui se dit aujourd’hui des Noirs, des Maghrébins ou des Roms – voleurs, violeurs et violents – se disait au début du siècle dernier, dans des termes exactement identiques, des immigrés polonais (blonds aux yeux bleus et catholiques selon le stéréotype), italiens ou espagnols (généralement catholiques), voire des Irlandais aux États-Unis…

Qui, grâce à leur religion, avaient tout de même davantage de chances de s’assimiler rapidement que les musulmans… L’islam constitue sans doute une difficulté supplémentaire, d’ordre culturel. Mais cela ne change rien au fond de mon propos : la quasi-identité culturelle entre Français, Polonais ou Italiens n’a pas empêché l’arrivée massive de ces derniers de générer des réactions aiguës dans certaines régions. D’où la nécessité de lever tous les tabous sur ces questions pour forger un instrument d’analyse fiable qui permette d’ajuster le traitement à la gravité du mal.

Quand on aura enfin compris qu’il faut sortir de la morale abstraite (éviter tel sujet pour éviter de “stigmatiser” telle ou telle minorité), le débat pourra enfin s’ouvrir sur les faits : c’est l’intérêt de la liberté scientifique de ne proscrire aucun domaine d’investigation. Et il est clair que l’étude des liens potentiels entre délinquance et immigration est un sujet comme un autre…

Encore faut-il rappeler que la statistique ethno-raciale n’a sur ces questions que peu d’intérêt tant les classifications deviennent complexes et le métissage important. Les Anglais ou les Américains l’ont compris, rendant leur outil tellement détaillé qu’il ressemble de plus en plus à l’annuaire du téléphone…

Qu’avez-vous envie de dire aux “angélistes” qui évitent d’aborder la question ? Qu’ils quittent le seul domaine de la morale pour s’intéresser aux lois de la démographie. Que nous apprend-elle ? Que toute vague d’immigration se traduit par une surreprésentation naturelle des jeunes hom – mes. Et tout le monde admettra que les jeunes mâles sont naturellement plus agités que les vieilles dames ! De sorte que, dans les quartiers où vous avez cinq fois plus de jeunes Beurs ou Africains de la classe 15-25 ans que de jeunes “Gaulois” du même âge, il est acquis que, mécaniquement, ces jeunes Beurs seront davantage mis en cause que les “Gaulois”…

La conclusion ne doit donc rien au racisme et tout à l’arithmétique : dire la vérité sur ces questions devrait permettre aux politiques d’ajuster leurs réflexions afin d’éviter la constitution d’espaces de relégation, de ségrégation et de sécession. Bref, de ghettos.

Contrairement aux Suisses, nous évitons de communiquer sur l’origine des personnes détenues dans les prisons… Le nombre d’étrangers est parfaitement connu. Mais il est faiblement significatif. D’abord parce que beaucoup d’entre eux sont détenus, justement, pour infraction à la législation sur les étrangers, ce qui leur confère, si j’ose dire, un certain handicap comparatif sur les Français. Ensuite parce que la loi interdit de communiquer sur l’origine ethnique des mineurs délinquants qui, s’ils sont nés en France de parents étrangers, deviennent automatiquement français à 18 ans…

Vous regrettez cette interdiction ? Je vous l’ai dit, comme chercheur, je suis partisan de la plus grande liberté possible. Mais en même temps, je sais d’expérience que même si la loi autorisait les recensements ethniques, ils n’auraient pas une grande signification. Et ce, pour une raison, somme toute encourageante : au bout de quelques générations, les sujets ne se définissent plus comme “algériens”, ou “maliens” mais bien comme français. En Grande- Bretagne, par exemple, où les statistiques ethniques sont courantes, beaucoup de gens de couleur se définissent comme irlandais, gallois, ou comme écossais. Et quand on a voulu définir une catégorie “indo-pakistanaise”, il y a eu un tollé : certains ont voulu se définir comme indiens, les autres, comme pakistanais. Aux États-Unis, il a fallu diviser les Latinos en plus ou moins “colorés”…

Donc, liberté statistique totale, mais pédagogie… La pédagogie, c’est de tout dire. Cacher, c’est attiser le fantasme. Entre donner du poisson et apprendre à pêcher, j’ai toujours choisi la seconde solution. Il vaut mieux un débat qui permette aux idées, même extrémistes, de s’exprimer, qu’une absence de débat qui laisse les préjugés prospérer sur l’absence supposée des données…

Autre tabou : le rôle des juges dans le traitement de la récidive. Quand les policiers se plaignent de voir des délinquants multirécidivistes remis en liberté par des magistrats connus pour leur laxisme, peut-on leur donner tort ? Le criminologue distingue la récidive légale de la récidive ou de la réitération. La récidive légale c’est quand, ayant été puni pour un délit donné, un individu commet une deuxième fois le même délit. La récidive, c’est quand il commet un autre délit, identique ou différent. La réitération c’est quand il commet le même délit ou plusieurs autres de types différents, sans qu’il ait toujours été poursuivi ou condamné. C’est ce qui choque évidemment le plus, et à juste titre. Et c’est, de fait, le souci numéro un des forces de l’ordre qui, alors, se tournent vers les magistrats en leur demandant implicitement des comptes…

Or qui représentent les plus importants sujets de réitération : les mineurs et les délinquants sexuels. Pour les premiers, le système français dispose d’un avantage, communément admis un peu partout : il considère qu’il faut donner aux jeunes une deuxième chance. Donc on ne condamne pas. Ou symboliquement. Le problème, c’est que la deuxième chance peut se multiplier à l’infini. Et qu’au lieu d’avoir un système “carotte-bâton”, parfaitement légitime, nous débouchons très vite sur un système carotte-carotte qui n’est plus dissuasif…

L’une des études les plus intéressantes dont nous disposions a été menée à partir d’entretiens avec des jeunes racontant leur propre expérience criminelle. Il en ressort que 5 % des délinquants seraient responsables de 50 % de la production criminelle. Or le système traite de la même manière ces 5% et les 95 % restants… Nous sommes donc confrontés ici à un égalitarisme pénal très handicapant pour la société : on traite de la même manière les délinquants “encourageants” – ceux qui ne recommenceront jamais (une très grande majorité) et ceux qui concentrent, à eux seuls, un très grand nombre de délits !

Situation encore plus grave quand elle concerne les criminels sexuels… Criminologiquement parlant, il faut toujours distinguer entre le besoin, l’envie et le plaisir. Le besoin, c’est Jean Valjean qui vole du pain pour se nourrir, une violence du progrès, légitime, contre une violence plus grande encore ; l’envie, c’est le fraudeur dans les transports, le voleur qui s’empare d’une voiture, une violence du paraître qui nécessite de prendre en compte les circonstances ; le plaisir, c’est la pulsion violente et meurtrière, l’ennemi de la société qui, dans de nombreux cas, relève de la psychiatrie. Or l’on voit bien que, dans les deux premiers cas, il existe une réponse pénale appropriée, tandis que dans le troisième la protection de la société exige des moyens, notamment médicaux et de suivi, très particuliers. Malheureusement, la vogue de l’antipsychiatrie a pratiquement mis fin aux établissements de soins fermés. D’où l’entassement des criminels sexuels dans des prisons où ils n’ont rien à faire, et dont ils ressortent bien souvent dans un état pire que celui qui a provoqué leur détention.S’agissant de ce type de criminels, il faut rompre avec le “prêt-à-porter” pour aller vers le “surme sure”. Un sur-mesure qui peut aboutir, pour le bien de la société, à un contrôle permanent le cas échéant.

Pour les autres récidivistes, vous admettrez que certains juges font preuve d’un laxisme parfois consternant…

Soyons juste : si certains magistrats sont aveuglés par l’idéologie, certains policiers sont plus que légers avec la procédure : beaucoup de magistrats qui font parfaitement leur travail sont bien forcés de classer sans suite un grand nombre d’affaires parce que la procédure est mal écrite ou que son auteur est inconnu. Mais certains font aussi une théologie procédurale de la libération qui ne manque pas de culot.

Les jurys populaires sont-ils la solution en correctionnelle ?

Je le crois fermement. Le diplôme de l’ENM, aussi bon soit-il, n’est pas une garantie suffisante de légitimité. La technique judiciaire doit avoir son mot à dire pour le quantum de la peine, son aménagement éventuel, la gestion du prévenu ou du condamné. Mais la privation de la liberté ne peut résulter seulement d’un dialogue entre le procureur et le juge des libertés. Nos magistrats devraient prendre en compte que la formule selon laquelle la Justice est “rendue au nom du peuple français” n’est pas qu’une figure de style. De ce point de vue, est-il satisfaisant qu’en dehors des assises, le peuple français soit exclu de la procédure ? Évidemment non !

La présence en correctionnelle de jurés, d’assesseurs, d’échevins – je n’ai pas de religion sur la dénomination – aurait, en outre, un avantage considérable : augmenter, sans frais supplémentaires, la capacité de traitement du flux pénal, puisqu’il n’y aurait qu’un seul magistrat et des assesseurs citoyens. Il y faudra certes plus de greffiers, mais au moins répondra-t-on au problème. De même pour l’application des peines, qui mériterait au moins une audience et sans doute un jury dans certains cas. La France prendrait ainsi le contre-pied de la tendance plus que regrettable qui s’est affirmée depuis trente ans et qui a abouti au triptyque bien connu : décriminalisation, dépénalisation, classement sans suite…

Propos recueillis par Éric Branca

COMPLEMENT:

‘I’m a white guy with a black name’: Caucasian Oregon man given Arabic name by parents says he has suffered a lifetime of prejudice 
Jamaal Allan revealed most people are surprised that he’s white
He said his name seemed to get him selected for an airport security check
Most waiting staff, he said, hand his debit card to one of his black friends
Ted Thornhill

The Daily Mail

7 May 2015

Jamaal, a high school teacher who grew up in southern Oregon, revealed that most people he meets are always surprised when they discover he’s Caucasian
A white man called Jamaal Allan has revealed how his name has led to him being racially stereotyped throughout his life.

Jamaal, a high school teacher who grew up in southern Oregon, revealed that most people he meets are always surprised when they discover he’s Caucasian.

He said that one of the most common responses to his name is ‘I never would’ve guessed your name was Jamaal’.

In a blog post he aired his thoughts on this, writing: ‘Really, are you frequently good at guessing people’s names?’

Another reaction to his name, he said, is ‘you don’t look like a Jamaal’. He asked in response: ‘And how exactly does one look like a name?’

He wrote that some people, after meeting him, say ‘I thought you’d be…’ and then pause with ‘a sudden realization they are on the verge of sounding racist’, before finding a word such as ‘taller’ or ‘older’ to end the sentence with.

Others are outright racist.

He explained that at a high school soccer game he was called ‘a white man with a horrific racial expletive deleted name’.

And his name once appeared to get him selected for a random security check while on a trip to London in 2002, as the others picked out by officials were called Muhammad, Abdul and Tariq.

He also explained that waitresses and waiters usually hand his credit card back to a black person at his table when he’s dining out.

His name, which means ‘beauty’ in Arabic, did have one very positive effect on his life, though – because it landed him his teaching job at Des Moines, Iowa.

Jamaal said: ‘The principal who had hired me confided that I was lucky to have gotten the job…

‘They had not been planning to take another student-teacher when my application showed up. But, in his words, as they scanned through it and saw a Jamaal who plays basketball and counts Muhammad Ali among his heroes he thought, we could use a little diversity.’

He told NPR recently that his dad was a fan of the Los Angeles Lakers basketball team and that he was named after one of their players, Jamaal Wilkes.

3 Responses to Polémique Ménard: Il faut relancer le débat sur les statistiques ethniques (No demographics, please, we’re French)

  1. jcdurbant dit :

    Ca pourrait effectivement contribuer à régler le problème du chômage:

    The principal who had hired me confided that I was lucky to have gotten the job… ‘They had not been planning to take another student-teacher when my application showed up. But, in his words, as they scanned through it and saw a Jamaal who plays basketball and counts Muhammad Ali among his heroes he thought, we could use a little diversity.’

    He told NPR recently that his dad was a fan of the Los Angeles Lakers basketball team and that he was named after one of their players, Jamaal Wilkes …

    The Daily Mail

    A condition bien sûr de manipuler ça avec soin:

    He explained that because some had seemed to apologise to the community on his behalf had confirmed his guilt in the eyes of local Muslims …

    Daily Mail

    J’aime

  2. jcdurbant dit :

    Pour qu’il y ait une cohésion nationale, il faut garder un équilibre dans le pays, c’est-à-dire sa majorité culturelle. Nous sommes un pays judéo-chrétien – le général de Gaulle le disait –, de race blanche, qui accueille des personnes étrangères. J’ai envie que la France reste la France. Je n’ai pas envie que la France devienne musulmane.

    Nadine Morano

    Sur les traces d’Éric Zemmour qui avait déjà provoqué en 2008 une polémique en utilisant le mot « race », Nadine Morano a mis mal à l’aise Laurent Ruquier quand elle a parlé de « race blanche » pour définir la population française, sur le plateau de « On n’est pas couché » samedi 26 septembre.

    Citant le général de Gaulle comme naguère le polémiste et ancien chroniqueur de l’émission, l’eurodéputée LR a affirmé ne pas comprendre l’embarras que cette expression suscite . »C’est un mot qui est dans le dictionnaire, je ne vois pas en quoi il est choquant… » a-t-elle répondu à Yann Moix qui lui conseillait de ne plus jamais employer le mot race car « c’est indécent ».

    Or comme l’a remarqué le journaliste David Perrotin sur Twitter, si le mot « race » figure évidemment dans le dictionnaire, le Larousse met en garde ses lecteurs.

    http://www.huffingtonpost.fr/2015/09/27/oncp-nadine-morano-race-blanche-dictionnaire-laurent-ruquier_n_8202250.html?utm_hp_ref=nadine-morano
    Évidemment que je maintiens mes propos ! Que l’on me crucifie pour avoir cité les propos de De Gaulle en me disant que ce sont des écrits anciens.

    Nadine Morano

    C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. Qu’on ne se raconte pas d’histoires ! Les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés avec leurs turbans et leurs djellabas ? Vous voyez bien que ce ne sont pas des Français ! Ceux qui prônent l’intégration ont une cervelle de colibri, même s’ils sont très savants. Essayez d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un moment, ils se sépareront de nouveau. Les Arabes sont des Arabes, les Français sont des Français. Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront vingt millions et après-demain quarante ? Si nous faisions l’intégration, si tous les Arabes et Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment les empêcherait-on de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Églises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées !

    De Gaulle (5 mars 1959, en pleine guerre d’Algérie, conversation avec Alain Peyrrefitte)

    Le général de Gaulle considérait qu’il n’y a que l’écrit qui pouvait engager sa personne. Or cette phrase a été prononcée à l’emporte-pièce dans une conversation privée mais il n’y a aucune trace écrite dans ses mémoires ou ses discours. Le général de Gaulle ne peut donc en être comptable

    Jean-Paul Bled (ancien président des Cercles universitaires d’études et de recherches gaulliennes, directeur de la revue Études gaulliennes)

    Les Inrocks

    J’aime

  3. jcdurbant dit :

    WHITENESS MUST BE DISMANTLED (Whiteness studies: are US schools white-washing their students ?)

    “To preserve whiteness is to preserve racial injustice.”

    Professor Rachel Sanders (Portland State University)

    J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.