WikiLeaks: C’est du vandalisme de l’information, imbécile! (In fact, WikiLeaks must be counted among the enemies of open society)

Il est difficile, mais pas impossible, pour un journaliste d’avoir accès à des documents originaux. Mais ceux-ci sont souvent un piège et une illusion. Parce qu’un document est un document, il a un charme qui incite le lecteur à lui donner plus de poids qu’il n’en mérite. Ce document de l’ambassade des États-Unis à Amman, par exemple. S’agit-il d’un premier projet, d’un second projet ou d’un mémorandum achevé ? A-t-il été rédigé par un fonctionnaire de haut rang ou par un quelconque chien de faïence ayant eu une idée lumineuse ? A-t-il été rédigé avec une intention sérieuse ou simplement pour rehausser la réputation de son auteur ? Même s’il s’agit indubitablement d’une instruction directe du secrétaire d’État à l’ambassadeur des États-Unis datée de mardi dernier, est-elle encore valable aujourd’hui ? En bref, l’information documentaire, pour être vraiment précieuse, doit arriver en flux continu, agrémentée d’une quantité impressionnante d’annotations explicatives. Une heure de discussion sérieuse avec un informateur digne de confiance est souvent plus précieuse que n’importe quel nombre de documents originaux. (…) Bien entendu, il est préférable d’avoir les deux. Kim Philby (« Ma guerre silencieuse », 1968)
Je suis le cœur et l’âme de cette organisation, son fondateur, son philosophe, son codeur original, son organisateur, son financier et tout le reste. Si vous avez un problème avec moi, allez vous faire voir. Julian Assange
M. Assange a souligné qu’aujourd’hui, il est peut-être plus facile de réformer la Chine que les États-Unis. Time
D’après ce que j’ai pu lire, les membres du service diplomatique américain n’ont pas grand-chose à se reprocher. Certes, on perçoit çà et là des relents de combines douteuses, notamment dans la conduite de la « guerre contre le terrorisme » pendant les années Bush. Des questions précises devront être posées et l’on devra y répondre. Pour l’essentiel, cependant, on voit les diplomates faire le travail qui est le leur : savoir ce qui se passe dans les endroits où ils sont en poste, oeuvrer à la promotion des intérêts de leur pays et de la politique de leur gouvernement. (…) ce qui ressort de tous ces échanges diplomatiques, c’est à quel point les questions liées à la sécurité et au contre-terrorisme ont imprégné le moindre aspect de la politique étrangère américaine depuis une décennie. On constate aussi à quel point ces menaces sont sérieuses, et à quel point l’Occident a peu de prise sur elles. (…) Reste toutefois une question. Comment mener une activité diplomatique dans ces conditions ? (…) Il y a un intérêt public à savoir comment fonctionne le monde et ce que l’on y fait en notre nom. Il y a aussi un intérêt public à ce que la politique étrangère soit menée de façon confidentielle. Et ces deux intérêts sont contradictoires. Timothy Garton Ash (historien, Oxford)
Le fait est que les gouvernements traitent avec les États-Unis parce que c’est dans leur intérêt, non pas parce qu’ils nous aiment, ni parce qu’ils nous font confiance, ni parce qu’ils pensent que nous pouvons garder des secrets… D’autres nations continueront à traiter avec nous. Elles continueront à travailler avec nous. Nous continuerons à partager des informations sensibles les uns avec les autres. Robert Gates
Les révélations (…) sapent la vision du monde que Julian Assange et ses collègues de Wikileaks soutiennent très certainement. Dans l’ensemble, la gauche dure en Amérique et dans le monde préférerait voir la résolution pacifique des différends plutôt que l’utilisation de la force militaire. La paix mondiale est toutefois beaucoup plus difficile à atteindre si on coupe les jambes au le département d’État américain. Et c’est exactement ce que cette révélation massive de documents va faire. L’outil essentiel de la diplomatie du département d’État est la confiance entre les fonctionnaires américains et leurs homologues étrangers. Contrairement au Pentagone, qui dispose de forces militaires, ou au département du Trésor, qui dispose d’outils financiers, le département d’État fonctionne principalement en gagnant la confiance des fonctionnaires étrangers, en partageant des informations et en persuadant. Pour réussir, ces discussions doivent être confidentielles. Détruire la confidentialité, c’est détruire la diplomatie. James P. Rubin
L’ironie est qu’Assange représente une forme plus pure de l’idéalisme d’Obama. Selon le dangereux utopisme d’Assange, en matière de gouvernance, la pureté doit déterminer les moyens, et pas seulement les fins. Il est convaincu d’avoir révélé l’hypocrisie et la corruption de la politique étrangère américaine, alors qu’en réalité, tout ce qu’il a révélé, c’est que la poursuite des idéaux de la politique étrangère est plus désordonnée et plus compliquée dans un monde où de mauvaises personnes poursuivent de mauvaises fins. Nous pouvons espérer qu’Obama a retenu cette leçon. Assange, quant à lui, n’en tient tout simplement pas compte. Jonah Goldberg
Chaque année, certaines applications populaires parmi les conseillers ne sont pas retenues après que le personnel de Knight a fait preuve de diligence raisonnable. WikiLeaks n’a pas été recommandé au conseil d’administration par le personnel de Knight. Marc Fest (porte-parole Knight Foundation)
Nous pensons que la bonne gouvernance répond à l’injustice et que pour qu’il y ait bonne gouvernance, il faut qu’il y ait une gouvernance ouverte. Les nouvelles technologies et les idées cryptographiques nous permettent non seulement d’encourager les fuites de documents, mais aussi de les faciliter directement à grande échelle. Nous avons l’intention de placer une nouvelle étoile dans le firmament politique de l’homme. WikiLeaks
J’étais hors de moi parce que je pensais que tout mon marché africain était en train de disparaître. Je lui ai écrit à WikiLeaks pour lui dire qu’il allait nuire à sa propre cause parce que si des gens comme moi ne peuvent pas gagner d’argent sur les droits d’auteur, les éditeurs ne vont pas commander des livres sur la corruption en Afrique (…) Il a été extrêmement pompeux, disant que dans l’intérêt de la sensibilisation du public aux questions en jeu, j’avais le devoir d’autoriser le piratage du livre. Il m’a dit : « Ce livre a peut-être été votre bébé, mais il est maintenant le fils du Kenya ». Cette phrase m’est restée à l’esprit parce qu’elle était très arrogante. Dans l’ensemble, j’approuve WikiLeaks, mais ces types sont d’une arrogance exaspérante. Michael Wong (auteur de It’s Our Turn To Eat)
WikiLeaks est une imposture. Allez vous faire voir avec votre campagne de désinformation contre les dissidents légitimes. C’est toujours la même chose, vous travaillez pour l’ennemi. John Young (Cryptome)
Ils ont acquis et publié des documents d’une importance extraordinaire. Je dirais également que WikiLeaks est une réponse à un véritable problème, à savoir le contrôle excessif des informations d’intérêt public. (…) Leur réponse au secret aveugle a été d’adopter une politique de divulgation aveugle. Elles ont tendance à ignorer les considérations relatives à la vie privée, à la propriété intellectuelle et à la sécurité. (…) L’une des choses que je trouve choquantes dans leurs activités est leur volonté de divulguer des dossiers confidentiels d’organisations religieuses et sociales. Si vous êtes mormon ou franc-maçon, ou si vous êtes une étudiante membre d’une sororité dont le rituel d’initiation est secret, WikiLeaks n’est pas votre ami. Ils violeront votre vie privée et votre liberté d’association sans la moindre hésitation. Cela n’a rien à voir avec la dénonciation ou la responsabilité. Il s’agit simplement d’une divulgation pour le plaisir de divulguer. Steven Aftergood (Secrecy news, Federation of American Scientists)
En fait, WikiLeaks doit être considéré comme l’un des ennemis de la société ouverte, car il ne respecte pas l’État de droit ni les droits des personnes. L’année dernière, par exemple, WikiLeaks a publié le « rituel secret » d’une sororité universitaire féminine appelée Alpha Sigma Tau. Or, Alpha Sigma Tau (comme plusieurs autres sororités « exposées » par WikiLeaks) n’est pas connue pour s’être livrée à une quelconque forme d’inconduite, et WikiLeaks ne prétend pas qu’elle l’ait fait. WikiLeaks a plutôt choisi de publier le rituel confidentiel du groupe simplement parce qu’il le pouvait. Il ne s’agit pas de dénonciation ni de journalisme. Il s’agit d’une sorte de vandalisme de l’information. Steven Aftergood
Tôt ou tard, Assange devra faire face au paradoxe de sa création: la chose au monde qu’il semble détester le plus – ce pouvoir qui ne rend pas de comptes – est encodée dans l’ADN du site et deviendra plus prégnante à mesure que WikiLeaks se transformera en véritable institution. Raffi Khatchadourian

Rituels d’initiation de clubs d’étudiantes, rites privés francs-maçons ou mormons, livre sur la corruption au Kenya, mais aussi manuels de sécurité des aéroports américains, spécifications techniques d’un appareil militaire anti-bombes artisanales, numéros de sécurité sociale de soldats, dossiers d’un tueur pédophile

Y a-t-il une limite aux cibles du site prétendument lanceur d’alarmes WikiLeaks?

Et à quel intérêt général peut bien servir la divulgation de tels documents ?

A l’heure où nos médias font leurs choux gras des documents volés par WikiLeaks et où certains y voient même l’avenir du journalisme …

Pendant que les autocrates à la Poutine en profitent pour ironiser sur la première des sociétés ouvertes et que des émules ont déjà flairé le filon …

Retour, avec l’un de ses précurseurs (Secrecy news), sur la face cachée de la « première agence de renseignement du peuple » du pirate de l’information australien.

Qui après s’être mis à dos à la fois Amnesty international et Reporters sans frontières et manqué une subvention de la Fondation Knight

Montre par son mépris pour l’Etat de droit et les droits individuels comme son propre autocratisme et son opacité de fonctionnement, qu’il est très clairement du côté du vandalisme et des ennemis de la société ouverte

Wikileaks Fails “Due Diligence” Review

Steven Aftergood

Secrecy news

June 28th, 2010

In the past week, both the Washington Post and the New York Times have referred to WikiLeaks.org, the web site that publishes confidential records, as a “whistleblower” site.  This conforms to WikiLeaks’ own instructions to journalists that “WikiLeaks should be described, depending on context, as the ‘open government group’, ‘anti-corruption group’, ‘transparency group’ or ‘whistleblower’s site’.”

But calling WikiLeaks a whistleblower site does not accurately reflect the character of the project.  It also does not explain why others who are engaged in open government, anti-corruption and whistleblower protection activities are wary of WikiLeaks or disdainful of it.  And it does not provide any clue why the Knight Foundation, the preeminent foundation funder of innovative First Amendment and free press initiatives, might have rejected WikiLeaks’ request for financial support, as it recently did.

From one perspective, WikiLeaks is a creative response to a real problem afflicting the U.S. and many other countries, namely the over-control of government information to the detriment of public policy.  WikiLeaks has published a considerable number of valuable official records that had been kept unnecessarily secret and were otherwise unavailable, including some that I had attempted and failed to obtain myself.  Its most spectacular disclosure was the formerly classified videotape showing an attack by a U.S. Army helicopter crew in Baghdad in 2007 which led to the deaths of several non-combatants.  Before mostly going dormant late last year, it also published numerous documents that have no particular policy significance or that were already placed in the public domain by others (including a few that were taken from the FAS web site).

WikiLeaks says that it is dedicated to fighting censorship, so a casual observer might assume that it is more or less a conventional liberal enterprise committed to enlightened democratic policies.  But on closer inspection that is not quite the case.  In fact, WikiLeaks must be counted among the enemies of open society because it does not respect the rule of law nor does it honor the rights of individuals.

Last year, for example, WikiLeaks published the “secret ritual” of a college women’s sorority called Alpha Sigma Tau.  Now Alpha Sigma Tau (like several other sororities “exposed” by WikiLeaks) is not known to have engaged in any form of misconduct, and WikiLeaks does not allege that it has.  Rather, WikiLeaks chose to publish the group’s confidential ritual just because it could.  This is not whistleblowing and it is not journalism.  It is a kind of information vandalism.

In fact, WikiLeaks routinely tramples on the privacy of non-governmental, non-corporate groups for no valid public policy reason.  It has published private rites of Masons, Mormons and other groups that cultivate confidential relations among their members.  Most or all of these groups are defenseless against WikiLeaks’ intrusions.  The only weapon they have is public contempt for WikiLeaks’ ruthless violation of their freedom of association, and even that has mostly been swept away in a wave of uncritical and even adulatory reporting about the brave “open government,” “whistleblower” site.

On occasion, WikiLeaks has engaged in overtly unethical behavior.  Last year, without permission, it published the full text of the highly regarded 2009 book about corruption in Kenya called “It’s Our Turn to Eat” by investigative reporter Michela Wrong (as first reported by Chris McGreal in The Guardian on April 9).  By posting a pirated version of the book and making it freely available, WikiLeaks almost certainly disrupted sales of the book and made it harder for Ms. Wrong and other anti-corruption reporters to perform their important work and to get it published. Repeated protests and pleas from the author were required before WikiLeaks (to its credit) finally took the book offline.

“Soon enough,” observed Raffi Khatchadourian in a long profile of WikiLeaks’ Julian Assange in The New Yorker (June 7), “Assange must confront the paradox of his creation: the thing that he seems to detest most–power without accountability–is encoded in the site’s DNA, and will only become more pronounced as WikiLeaks evolves into a real institution.”

Much could be forgiven to WikiLeaks if it were true that its activities were succeeding in transforming government information policy in favor of increased openness and accountability — as opposed to merely generating reams of publicity for itself.  WikiLeaks supporter Glenn Greenwald of Salon.com wrote that when it comes to combating government secrecy, “nobody is doing that as effectively as WikiLeaks.” But he neglected to spell out exactly what effect WikiLeaks has had.  Which U.S. government programs have been cancelled as a result of Wikileaks’ activities?  Which government policies have been revised?  How has public discourse shifted?  (And, by the way, who has been injured by its work?)

A less sympathetic observer might conclude that WikiLeaks has squandered much of the impact that it might have had.

A telling comparison can be made between WikiLeaks’ publication of the Iraq Apache helicopter attack video last April and The New Yorker’s publication of the Abu Ghraib abuse photographs in an article by Seymour Hersh in May 2004.  Both disclosures involved extremely graphic and disturbing images.  Both involved unreleased or classified government records.  And both generated a public sensation.  But there the similarity ends.  The Abu Ghraib photos prompted lawsuits, congressional hearings, courts martial, prison sentences, declassification initiatives, and at least indirectly a revision of U.S. policy on torture and interrogation.  By contrast, the WikiLeaks video tendentiously packaged under the title “Collateral Murder” produced none of that– no investigation (other than a leak investigation), no congressional hearings, no lawsuits, no tightening of the rules of engagement.  Just a mild scolding from the Secretary of Defense, and an avalanche of publicity for WikiLeaks.

Of course, it’s hard for anyone to produce a specific desired outcome from the national security bureaucracy, and maybe WikiLeaks can’t be faulted for failing to have done so.  But with the whole world’s attention at its command for a few days last April, it could have done more to place the focus on the victims of the incident that it had documented, perhaps even establishing a charitable fund to assist their families.  But that’s not what it chose to do.  Instead, the focus remained firmly fixed on WikiLeaks itself and its own ambitious fundraising efforts.

In perhaps the first independent review of the WikiLeaks project, the John S. and James L. Knight Foundation considered and rejected an application from WikiLeaks for financial support.  The Knight Foundation was actively looking for grantees who could promote innovative uses of digital technology in support of the future development of journalism.  At the end of the process, more than $2.7 million was awarded to 12 promising recipients.  WikiLeaks was not among them.

“Every year some applications that are popular among advisors don’t make the cut after Knight staff conducts due diligence,” said Knight Foundation spokesman Marc Fest in response to an inquiry from Yahoo news.  “WikiLeaks was not recommended by Knight staff to the board.”

Voir aussi:

WikiLeaks, la pire « agence de renseignement du peuple »

Antonin Grégoire

Rue89

10/27/2010

Vendredi 22 octobre, WikiLeaks [2] révélait 400 000 documents [3] sur la guerre en Irak [4] – « Iraq War Logs » – soit la « plus grande fuite de l’histoire », a titré la presse. Ainsi les scoops seront désormais jugés au poids. C’est du journalisme à la pesée.

Et quels scoops… L’ignoble Pentagone a dissimulé la mort de 15 000 civils [5] sur sept ans de guerre. Cela fait des mois que le site IraqBodyCoun [6]t en affiche 107 000 au vu et au su de tous, mais, à 109 000, grâce à WikiLeaks, cela devient un scoop.

Des tortures dans les prisons, des compagnies militaire privées qui se comportent comme au Far West, des innocents et des civils tués par erreur chaque jour aux checkpoints [7]… WikiLeaks révèle la « vraie » guerre [3]paraît-il… C’est vrai qu’avant, l’Irak, ça évoquait plutôt le parfum des jonquilles et les bisous dans le cou.

WikiLeaks pour « les élus » vs. WikiLeaks pour « le peuple »

Ce sont pourtant ces scoops que révèlent Der Spiegel, Le Monde, The Guardian, The New York Times et Al Jazeera, les « élus » choisis pour la révélation. The New York Times, notamment, a pu faire un article sur les compagnies militaire privées [8] grâce à ces documents consultables en ligne :

* « IED ATTK ON CF CIV IN AR ___ (ZONE ) : ___ CF CIV INJ/DAMAGE » [9]

* « SAF INCIDENT BETWEEN PRIVATE SECURITY CO./___ IVO BAGHDAD (ZONE ___) : NO INJ/___ » [10]

* « (FRIENDLY ACTION) ESCALATION OF FORCE RPT UNITY RESOURCE GROUP : ___ ISF WIA [11] »

Incompréhensible ? Ah oui, mais, en fait, les « élus », ils ont eu accès à ceci [12]. (Voir la capture d’écran du site du New York Times)

Une insulte pour les journalistes, du vol pour les internautes

WikiLeaks brouille le jeu mondial [14] des médias, certes, mais pour en faire quoi ? Comment rebat-il les cartes ? En quoi Le Monde (qui réserve certains de ses articles sur les « War Logs » à ses seuls abonnés) est il plus honorable qu’un autre ? Pourquoi WikiLeaks, enfant chéri, né de la culture internet, a-t-il choisi uniquement des médias papier ou télé pour donner ses documents ?

Owni.fr, le seul média web à avoir participé à l’aventure [15] (de façon exclusivement technique) est le seul à poser la question qui fâche :

« Pourquoi, quand on tape “ Blackwater ” [16], l’une des compagnie de sécurité privée les plus controversée, il s’affiche “ no results found ” ? » (Voir l’application d’Owni.fr sur les « Iraq War Logs »)

Warlogs [17]

Parce qu’il faut protéger les éventuelles victimes d’éventuelles représailles nous dit-on. Et par ce très juste argument, WikiLeaks redécouvre, comme par magie, l’une des vertu du secret en temps de guerre, et s’y soumet docilement.

Oui, mais WikiLeaks, à l’origine, c’était pas le type qui justement brisait les secrets ? Pourquoi se retrouve-t-on avec dans les mains des feuillets plus censurés qu’une lettre de Poilu de 1917 ? On ne comprend plus trop.

Lorsqu’on parcourt les « Iraq War Logs »…

* pour un historien, c’est de la rage devant leur inutilité ;

* pour un journaliste, c’est une insulte ;

* pour un spécialiste du renseignement, c’est révoltant d’amateurisme ;

* pour un internaute, c’est du vol.

Des lanceurs d’alerte qui finissent en prison

L’essence même de WikiLeaks était de publier des documents confidentiels en libre accès en assurant l’anonymat des « whistleblowers » [18], ces lanceurs d’alerte qui envoient des notes à WikiLeaks.

Ce sont eux qui se mettent en danger, qui agissent dans l’ombre, qui ont le courage de dénoncer ce que leur conscience ne peut accepter ; ce sont eux les héros anonymes de l’information libre. Tout le système WikiLeaks repose sur eux.

L’avatar de WikiLeaks sur Twitter.Bradley Manning [19] est le « whistleblower » qui a envoyé à WikiLeaks les 90 000 documents sur la guerre d’Afghanistan [20]. Il est en prison et risque d’y rester 54 ans. On ne trouve, sur WikiLeaks, pas le moindre lien vers le comité de soutien à Manning [21]. A peine un minuscule « Free Bradley » a-t-il été ajouté sur l’icône d’un centimètre carré du compte Twitter de l’organisation [22].

Mais attention, Julian Assange [23] « est menacé », dit-il. Il laisse cela volontairement dans le vague qu’on se nourrisse nous-mêmes des paranoïas faciles, des fantasmes de secrets et des mythes de James Bond que le monde des renseignements évoque dans l’imaginaire populaire.

Car Julien Assange présente « son » site WikiLeaks.org comme « l’agence de renseignement du peuple ».

Ce n’est pas parce que c’est secret que c’est vrai

Mais en matière de renseignement, WikiLeaks succombe aux pires travers des pires agences de renseignement :

* on n’envoie pas n’importe quoi à n’importe qui, mais on sélectionne soigneusement quel renseignement pour quel destinataire ;

* on ne noie pas le destinataire sous une avalanche de documents qu’il sera incapable de lire ;

* on n’utilise pas la culture du secret à des fins d’auto-promotion, mais pour la protection et l’efficacité du renseignement ;

* on ne succombe pas à la paranoïa et on évite de la propager ;

* on évite de violer les règles arbitrairement, sans qu’aucun avantage stratégique ne vienne justifier ce viol ;

* on reste discret et on n’étale pas sa tête à la une de tous les médias du globe ;

* on confronte ce qui est secret et ce qui est en libre accès, car ce n’est pas parce que c’est secret que c’est vrai.

Ces rapports sont rédigés par la base du renseignement de terrain américain, et représentent les faits vus par ceux qui les rédigent, influencés par les thèses de leurs chefs.

Un document, par exemple, dit que l’Iran [24] aide les insurgés d’Al Quaeda. Nn’importe quel expert se demandera pourquoi une puissance qui se réclame de la défense des chiites irait donner des bombes avec lesquelles Al Quaeda -sunnite- va aller faire sauter d’autres chiites. Mais puisque c’est secret, c’est que c’est vrai.

Une agence de renseignement digne de ce nom dispose d’un service de contre-espionnage qui lui permet de résister aux manœuvres d’intoxication.

Ça aurait permis à WikiLeaks, par exemple, de se demander pourquoi il reçoit des documents secrets sur le « climatgate » [25] qui vont alimenter tous les climatosceptiques de la planète la veille du sommet de Copenhague… sur le climat.

Un scoop en or, surtout pour les lobbies pétroliers qui vont aller torpiller le « mythe du réchauffement de la planète », qui s’essouffle [26].

Il est interdit de critiquer WikiLeaks

Ces règles, les agences de renseignement les ont apprises à force de scandales et de morts, en perdant des batailles, en échouant à prévenir des attentats, en tuant des manifestants de Greenpeace ou en mettant des Dreyfus au bagne.

WikiLeaks, d’une initiative citoyenne et sur Internet, qui a gagné de multiples prix, est devenu le joujou d’un James Bond amateur qui se croit dans un film d’espionnage.

Il est interdit de critiquer WikiLeaks. Parce que WikiLeaks, ce n’est pas du journalisme, ce n’est pas du renseignement, ce n’est plus Internet : c’est devenu de l’idéologie. Une idéologie en noir et blanc aux relents conspirationnistes, faite de gentils Assange et de méchante CIA.

Au final, le Grand Combat, c’est un chevalier de l’information libre prétendant lutter contre des terrifiantes puissances de l’ombre incapables de bloquer un pauvre site tenu par trois geeks et deux hackers. Pendant que Bradley Manning croupi en prison.

WikiLeaks voulait être le service secret du peuple, Assange en a fait un fantasme raté de ceux qu’il prétendait combattre.

3 Responses to WikiLeaks: C’est du vandalisme de l’information, imbécile! (In fact, WikiLeaks must be counted among the enemies of open society)

  1. Thot Har Megiddo dit :

    « (…) One of the things I find offensive about their operations is their willingness to disclose confidential records of religious and social organisations. »: chez les autres, mais pas chez moi. La plupart des journaux obtiennent une proportion de leurs informations de manière illégale. En France, les journalistes mais aussi les sources des journalistes qui obtiennent ainsi des informations sont protégées par la loi. Pourquoi pas Wikileacks ? Ce dernier ne fait que du journalisme. L’avantage par rapport au journalisme classique, c’est que l’information est brute, pour le meilleur et pour le pire, et qu’elle n’est pas « traitée » « analysée » par des médias politiquement corrects qui s’autocensurent, et peuvent donc être analysés par cette nouvelle espèce de journalistes : les blogs. Permettre aux citoyens de connaître l’état du monde est une bonne chose, puisque les médias traditionnels ne le lui permettent pas. Même si, Assange pour le moment n’a pas révélé de dossiers « secret défense », ses sources n’y ayant peut-être pas accès, mais surtout du « confidentiel défense ». Ces révélations ne sont pas pires que celle de la presse américaine pendant la guerre du Vietnam, sauf que cette fois-ci elles concernent tout le monde, et obligent à réfléchir dans une optique à laquelle nous n’étions pas habitués : il y a de vrais méchants dans le monde, et nos gouvernements comme nos médias nous mentent comme des arracheurs de dents

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  2. I like PM dit :

    Wikileaks dévoile l’utilisation du Perception Management par les diplomates…

    Trackback : article traitant du même sujet sur notre blog…

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  3. […] que nos pirates de Wall street  ou de Wikileaks comme nos Chirac ou leurs successeurs continuent eux leurs razzias financières ou […]

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