Exposition Boltanski: Le monde est atroce mais il y a bien pire c’est Dieu (Is contemporary art anti-Christian?)

Treblinka grab (1943)News of the world (Queen, 1977)https://s-media-cache-ak0.pinimg.com/736x/28/b3/a3/28b3a3228bd79ccab3244cf9a6ca7372.jpgEt l’Éternel dit: J’exterminerai de la face de la terre l’homme que j’ai créé, depuis l’homme jusqu’au bétail, aux reptiles, et aux oiseaux du ciel; car je me repens de les avoir faits. Genèse 6: 7
Je suis l’Éternel, et il n’y en a point d’autre. Je forme la lumière, et je crée les ténèbres, Je donne la prospérité, et je crée l’adversité; Moi, l’Éternel, je fais toutes ces choses. Esaïe 45: 6-7
Ses disciples lui firent cette question: Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle? Jésus répondit: Ce n’est pas que lui ou ses parents aient péché. Jean 9: 2-3
Quelques personnes qui se trouvaient là racontaient à Jésus ce qui était arrivé à des Galiléens dont Pilate avait mêlé le sang avec celui de leurs sacrifices. Il leur répondit: Croyez-vous que ces Galiléens fussent de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, parce qu’ils ont souffert de la sorte? (…) Ou bien, ces dix-huit personnes sur qui est tombée la tour de Siloé et qu’elle a tuées, croyez-vous qu’elles fussent plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem? Non, je vous le dis. Jésus (Luc 3: 1-5)
Après Auschwitz, nous pouvons affirmer, plus résolument que jamais auparavant, qu’une divinité toute-puissante ou bien ne serait pas toute bonne, ou bien resterait entièrement incompréhensible (dans son gouvernement du monde, qui seul nous permet de la saisir). Mais si Dieu, d’une certaine manière et à un certain degré, doit être intelligible (et nous sommes obligés de nous y tenir), alors il faut que sa bonté soit compatible avec l’existence du mal, et il n’en va de la sorte que s’il n’est pas tout-puissant. C’est alors seulement que nous pouvons maintenir qu’il est compréhensible et bon, malgré le mal qu’il y a dans le monde. Hans Jonas
Christs, Vierges, Pietàs, Crucifixions, enfers, paradis, offrandes, chutes, dons, échanges: la vision chrétienne du monde semble revenir en force. Où? Dans le domaine de l’art le plus contemporain. (…) L’homme y est réinterprété comme corps incarné, faible, en échec. Cette religion insiste sur l’ordinaire et l’accessible, elle est hantée par la dérision, la mort et le deuil. Après une modernité désincarnée proposant ses icônes majestueuses, on en revient à une image incarnée, une image d’après la chute. En profondeur, il se dit là un renversement des modèles de l’art lui-même: A Prométhée succède Sisyphe ou mieux le Christ souffrant, un homme sans modèle, sans lien, inscrit dans une condition humaine à laquelle il ne peut échapper. Yves Michaud (4e de couverture, L’art contemporain est-il chrétien, Catherine Grenier)
C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. Christian Boltanski
Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. Christian Boltanski
Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. Christian Boltanski
Au musée, tout est sacré. Chez moi, il n’y a rien de sacré. Pour rouiller mes boîtes, je pissais dessus. Après, je les ai arrosées de Coca. Un conservateur pour une exposition les faisait installer avec des gants blancs. Cela n’a aucun sens!
Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski
Elle est bien là, la mort estampillée XXe siècle, la mort hitlérienne, celle des industriels et des scientifiques qui se regroupaient autour d’une table pour discuter des moyens de rendre leur industrie rentable : comment tuer, à moindre coût et sans trop salir, le plus de monde possible, prisonniers des camps amenés par trains entiers. Une première dans l’histoire de la guerre ; ici l’horreur n’est plus barbarie, mais annihile l’émotion pour laisser place à un esprit logique, au sens de l’organisation. Lorraine Alexandre
Né dans une famille juive originaire de Russie, le père, médecin, s’est converti au christianisme. La mère, née dans une famille bourgeoise désargentée, atteinte de la polio à 22 ans, a abandonné ses études. La guerre survient et ses lois antijuives. Dans l’appartement du 7e arrondissement, une dispute éclate. Hurlements, claquements de porte. A la concierge, on explique que le père a abandonné le domicile familial. A Luc, 2 ans, que papa est parti. Le divorce est prononcé. A la Libération, l’enfant assiste « avec effroi » au retour du père. L’homme était caché dans un réduit, aménagé sous le plancher. « Il sortait la nuit, c’est même comme ça que j’ai été conçu », raconte Christian, né en 1944. Le Monde

Après Auschwitz, l’art doit-il nécessairement être anti-chrétien?

Au lendemain de la fermeture de la monumentale et quelque peu mégalo exposition Boltanski au Grand Palais (« Personnes ») …

Comment, inversant le titre d’un récent ouvrage de la directrice du centre Pompidou et justement commissaire de l‘exposition et après les sempiternels « Piss Christ » qui nous sont imposés, ne pas se poser la question de l’anti-christianisme de cette surenchère et course à l’effroi que semble devenu, Auschwitz oblige, l’art contemporain?

Comment, dans cette monstrueuse usine de mort volontairement non chauffée au coeur de l’hiver et oppressé par un insupportable et incessant vacarme de battements de cœur amplifiés devant cette odieuse « mâchoire de Dieu » qui ressemble comme deux gouttes d’eau à l’excavatrice de Treblinka tentant d’ensevelir les traces des forfaits de ses mandants, ne pas entendre cette insidueuse condamnation de la Divinité qui a permis cela?

Et ce, par un artiste qui, porté par l’inconsolable syndrome du survivant de nombre des enfants juifs de sa génération, semble par ailleurs véritablement possédé par ce si judéo-chrétien souci souci de la victime?


Christian Boltanski : “Emouvoir et évoquer le drame de la vie”

LE FIL ARTS ET SCèNES – Pour la série d’expositions Monumenta au Grand Palais (Paris), Christian Boltanski signe “Personnes”, une installation qui évoque la vie, la mort, l’absence… et la Shoah, obsession de l’artiste.

Après l’œuvre crépusculaire de l’artiste allemand Anselm Kiefer (2007), puis les stèles d’acier cisterciennes du sculpteur américain Richard Serra (2008), le Grand Palais accueille l’artiste français Christian Boltanski dans le cadre de Monumenta. En plein hiver, en plein froid, on découvre Personnes, une œuvre forte, visuelle et sonore, entièrement composée de vêtements. Certains gisent au sol, d’autres sont entassés et forment une montagne de tissus, dont quelques pièces sont saisies par une pince mécanique montée sur une grue, puis relâchées au hasard. Simultanément, une autre installation de Boltanski est présentée au Mac/Val, à Vitry : Après, qui offre une déambulation parmi des cubes noirs et des mannequins. Rencontre.

Comment avez-vous imaginé votre Monumenta au titre ambigu, Personnes ?
Christian Boltanski : Les deux expositions sont liées. Pour moi, elles sont un peu comme les cercles de l’enfer chez Dante : au Grand Palais, il y a la mort, l’absence et la destinée humaine symbolisée par la pince qui saisit, au hasard, des tas de vêtements usagés. Cette scénographie renvoie à « la main de Dieu », qui dispose de la vie, et est accompagnée par le son puissant de battements de cœur amplifiés sous la nef du Grand Palais. Je veux que cette exposition, ouverte à tous, et non aux spécialistes de l’art contemporain, puisse émouvoir et évoquer le drame de la vie qui inclut la mort dans son chemin. Au Mac/Val, c’est plus doux – il fait plus chaud –, avec un labyrinthe de blocs noirs, que l’on découvre, et des personnages que j’ai fabriqués et qui posent des questions aux visiteurs : « Comment es-tu mort ? », « Est-ce que tu as beaucoup souffert ? », « As-tu laissé un amour ? »…

Le Grand Palais est-il difficile à occuper ?
Le bâtiment ressemble à un hangar ou à une usine. Le premier nom de l’exposition était « No man’s land » parce que je me disais qu’ici on est un peu nulle part. Finalement, même si le corps n’est jamais à proprement montré, on voit tous ces vêtements étalés par terre, éclairés par des néons positionnés volontairement assez bas, qui évoquent beaucoup de monde ! Le mot « Personnes », au pluriel, désigne à la fois tout le monde, l’humanité et quelqu’un en particulier, un parent, un proche du visiteur ou de moi-même… Je vois le Grand Palais comme une église dédiée à l’errance des âmes.

Il y est question de deuil ou de disparition ?
Le vêtement dit : il y a eu. Sans doute avec l’âge – j’ai aujourd’hui 65 ans -, la mort imprime mon temps et mes pensées. Et je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question : pourquoi j’ai survécu ?
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Propos recueillis par Laurent Boudier
Télérama n° 3132

Voir aussi:
Monumenta 2010 – Boltanski
13 Janvier 2010
Lorraine Alexandre
Artistik rezo
Jusqu’au 21 février 2010

Après Anselm Kiefer et Richard Serra, c’est au tour de Christian Boltanski d’investir la Nef du Grand Palais pour le projet Monumenta. Personnes est une création, une seule pièce donc chargée d’emplir cet immense espace dont l’architecture est si particulière.

En arts plastiques, un bon artiste est celui qui trouve, à travers sa création, le moyen de planter sa main dans votre ventre, ou dans votre tête. Peu importe vraiment, mais c’est celui qui vous meut physiquement dans une pénétration émotionnelle. Peu importe, également, la nature de votre émotion. Notre esthétique vit encore à la lueur des pensées des Lumières et plus encore celles de l’Aufklärung (Kant en particulier) le double Allemand. Cette structure de pensée philosophique qui dirige toujours la conception de l’art dans notre pensée occidentale nous a appris, pour résumer, à distinguer le Beau, le Bon, le Bien et l’Agréable. Ajoutons à cela un tournant décisif de l’art en rappelant, comme l’avait souligné Paul Valéry, qu’en 1900, la beauté en art a fait place au concept de vie. C’est pourquoi, en art, peu importe la nature de nos émotions pourvu qu’il y en ait au moins une.

Travail de mémoire

Christian Boltanski travaille sur la mémoire, la mort et la force inéluctable du temps. Sa nouvelle création, Personnes, est éphémère et disparaîtra à la fin de l’exposition dans la logique implacable de l’artiste et du thème qu’il aborde. Boltanski considère ce travail comme un Memento Mori, une Vanité contemporaine. L’artiste est né pendant la seconde Guerre Mondiale et tout son travail en est hanté. Personne ne fait exception et nous plonge dans l’angoisse d’une vision de la mort qui demeure la trouble spécificité du XXe siècle. Ainsi Boltanski pose au sol un grand nombre de vêtements (pour homme, femme ou enfant pêle-mêle) méticuleusement agencés afin de dessiner des allées, des blocs éclairés au néon. Il installe aussi un immense monticule de vêtements sans cesse agrippés puis relâchés par une grue, matériel de chantier. Les visiteurs sont donc confrontés à ces objets si familiers, devenus dérisoires puisque inusités, sous ce dôme de la Nef du Grand Palais qui ressemble tant à une gare, un lieu froid, non chauffé.

Boltanski_Monumenta 2010Elle est bien là, la mort estampillée XXe siècle, la mort hitlérienne, celle des industriels et des scientifiques qui se regroupaient autour d’une table pour discuter des moyens de rendre leur industrie rentable : comment tuer, à moindre coût et sans trop salir, le plus de monde possible, prisonniers des camps amenés par trains entiers. Une première dans l’histoire de la guerre ; ici l’horreur n’est plus barbarie, mais annihile l’émotion pour laisser place à un esprit logique, au sens de l’organisation.

Le son de la déshumanisation

Toute l’exposition vibre au rythme d’un son aussi insupportable qu’envoûtant. Est-ce un cœur qui bat en écho ou le son d’une machine ? Les deux, nous l’avons compris, sont ici liés. Tout le projet de Christian Boltanski repose sur un paradoxe. Personne, tout en nous plongeant dans l’horreur d’une Histoire qui change la raison en arme de guerre, parvient à toucher notre sens du vivant, notre amour pour lui et un soudain besoin de le ressentir, le retrouver, pour fuir cette œuvre insupportable à laquelle nous devons pourtant ce regain de vie. Mais remarquons qu’il faut rester longtemps dans l’exposition pour atteindre le stade de cette sensation. Il faut l’accepter comme une expérience à vivre ; pénétrer l’œuvre pour lui donner une chance de nous pénétrer, marcher longtemps dans ces oppressantes allées et beaucoup penser pour les fuir, les apprivoiser et alors, les rencontrer. L’artiste explique que « l’art consiste à poser des questions sans avoir de réponse ». Son travail s’impose, en effet, comme un espace qui nous interroge, qui nous oblige à devenir acteur de l’œuvre, un spectateur capable de penser.

Personne, l’exposition de Christian Boltanski pour le Monumenta 2010, est une œuvre laide, désagréable, insupportable… et toute sa puissance est là. Une exposition à ne surtout pas manquer pour se souvenir que l’art n’est pas un objet de décoration comme trop de galeries semblent le croire. Non, l’art est un lieu d’expérimentation, un espace d’interrogation où le spectateur ne peut pas se permettre d’être passif, un espace d’où il se doit de ressortir plus riche émotionnellement et intellectuellement. Merci donc à Boltanski pour la force et l’intelligence de sa cruauté.

Voir également:

CHRISTIAN BOLTANSKI AU GRAND PALAIS

12 Janvier 2010
Catégorie : EXPO’TIN

Le Grand Palais rend hommage à l’artiste Christian Boltanski du 13 janvier au 21 février 2010 dans le cadre d’une exposition intitulée « Monumenta 2010, Christian Boltanski, Personnes»

Âgé de 65 ans, Christian Boltanski est un artiste vraiment à part dans l’univers de la création française qui explore le hasard à travers des questionnements sur la nature humaine et l’envie répétée de décortiquer les meurtrissures de l’âme sur fond de mort.

Né durant l’occupation d’un père juif d’origine russe et d’une mère corse chrétienne, Boltanski a vécu sa jeunesse avec la peur vissée au ventre et la difficulté d’exister pleinement face au destin de la famille de son père décimée par les persécutions nazies et des quolibets subis lorsqu’il était à l’école primaire.

Ayant vite eu conscience du mal absolu après avoir vécu son enfance parmi des survivants des camps de la mort qui évoquaient souvent le souvenir des épreuves endurées, la Shoah a fini par le hanter jusqu’à devenir un thème récurrent dans son œuvre empreinte de métaphores frappantes, Boltanski a eu la chance d’être aidé à 24 ans par Ileana Sonnabend, l’ex-femme du grand galeriste Leo Castelli pour exposer rapidement aux Etats-Unis et devenir un artiste d’envergure internationale.

Succédant au Grand Palais à l’Allemand Anselm Kiefer et au sculpteur américain Richard Serra, Boltanski a pris possession de l’impressionnante cathédrale de verre de l’Art Nouveau pour transmettre un message digne d’un terrible uppercut sur la condition humaine à travers la représentation d’une montagne de manteaux étalés sur le sol froid des lieux rappelant l’atmosphère des camps avec l’idée de recréer une sorte de grand entrepôt servant de point de chute final à des êtres innocents condamnés sans raison histoire d’émouvoir, d’effrayer et de faire réfléchir les visiteurs sur l’absurdité de la guerre. Inutile de dire que son propos est plus qu’exemplaire alors que la planète reste confrontée à d’autres horreurs souvent nées de l’obscurantisme.

Voir de plus:

« La légèreté est la plus belle chose »
Interview
Libération
30/01/2010

A l’occasion de son exposition «Personnes», au Grand Palais, à Paris, le plasticien Christian Boltanski a reçu «Libération» dans son atelier, à Malakoff, autour de deux bouteilles de vodka cerise.
Vincent Noce

Sous la nef du Grand Palais qui abrite son exposition «Personnes», le plasticien français Christian Boltanski a lancé : «Retrouvez-moi dans l’atelier, pour un entretien éthylique, on prendra deux bouteilles de vodka, et on ne s’arrêtera pas de parler. On ne corrigera rien. Le journal publiera tout, en petits caractères, à lire à la loupe s’il le faut.»

L’atelier de Malakoff est vide, quelques papiers épars, des photos de Suisses morts, une pancarte marquée «1907-1989» en caractères noirs, et dans l’escalier, un chauffe-eau qui fuit, ploc-ploc, marqué de rigoles de rouille.

Lui, chauve, souriant, entouré de ses livres comme des talismans. La vodka polonaise à la cerise, sur la table. Avec l’alcool pour loupiote, pour entrer dans l’univers mental qu’il semble occuper avec densité. Il approuve ce désir d’immersion, «la tête vide». «C’est le problème de l’art contemporain, que les spectateurs viennent voir avec une image dans la tête. Ce besoin de coller des étiquettes ! Quand j’entends dire de moi : un artiste postconceptuel de la fin du XXe siècle, c’est de la merde. Un artiste qu’on peut situer n’est jamais bon. Poussin était conceptuel. J’ai honte de l’artiste qui parle de l’art. J’aime bien l’art pour la vie. Je n’ai pas une passion pour Duchamp, je préfère Picabia. L’art français, c’est Matisse et Duchamp, c’est l’intéressant, le bon goût… Je ne devrais pas dire ça, parce que ça m’énerve qu’on parle d’art français. C’est totalement idiot… Je suis pas plus européen qu’américain. Pour moi, la plus grande artiste conceptuelle s’appelle Anne Darboven, totalement givrée, elle a laissé un millier de pages d’écritures. C’est de l’art brut, elle ne savait pas ce qu’elle écrivait. Même l’art conceptuel est toujours décalé. Mon grand truc, c’est la phrase du général Giap, à Diên Biên Phu : « Plus on prend de l’espace, moins on a de la force. Plus on a gagné sa force, moins on a d’espace ».» Pas d’effroi, vraiment ? «C’est avant, au Grand Palais… Un ami irlandais m’a dit : « La mort, c’est comme prendre l’avion. Avant, on a peur, quand on retire le ticket, on monte sur la passerelle. Quand il part, on n’a plus peur. Quelquefois, il n’atterrit pas. Mais enfin, il part ».»

Au photographe, il dit : «La photographie, c’est un grand ratage, c’est garder la vie, et rater, puisque c’est déjà passé. Vous ne montrez que des images, vous ne pouvez rendre la vie. C’est déjà passé, c’est déjà mort.»

Il ouvre un de ses opus, «Scratch». Toutes les pages argentées sont vierges. Si on les gratte, elles laissent apparaître un cadavre espagnol en décomposition. Chaque exemplaire diffère donc de l’autre, selon que tout a été gratté, ou rien, ou des bouts. Mais justement Boltanski ne s’est-il pas lui-même élevé contre l’utilisation de cadavres dans une œuvre ? «Mais moi, je ne fais rien. Participer au crime, commettre le crime, c’est gratter. Chacun prend sa responsabilité. Je suis le tentateur, peut-être, mais je ne commets pas le crime.» Tout comme le passant qui voit un accident dans la rue. «On regarde toujours. Cela fait du mal, et, tout de même, on regarde. On a toujours de l’intérêt pour les cadavres, c’est tellement bizarre, tout le monde est fasciné par quelqu’un qui devient un tas de merde.» Ce que Warhol cherchait aussi dans ses séries photographiques sur les accidents de la route.

L’art contemporain ne s’est-il pas perdu dans cette course à l’effroi ? «Mais le Louvre n’est que sexe et violence ! Pourquoi allais-je au Louvre, adolescent ? Pour voir toutes ces femmes nues, aux prises avec des vieux barbus !» Quand les Vénitiens ont demandé à Titien de peindre l’histoire de David pour l’église de la Salute, c’est atroce, la tête du géant coupée, mais, dans le ciel, il a ménagé une trouée… Dans l’art classique, il y a toujours un espoir. A côté, sur la Pointe de la Douane, occupée par la Fondation Pinault, quelle place reste-t-il à l’espérance ? On ne sort pas indemne de l’Holocauste mis en scène par les frères Chapman comme un Jardin des supplices. «Ah, mais cette œuvre est ignoble. C’est vraiment la lie ! C’est ce qu’on peut faire de plus bas. C’est honteux de la montrer.»

Mais, lui-même, enfin, Boltanski, l’Holocauste ne le hante-t-il pas ? «Il y a une décence ! La Shoah, c’est une histoire qui m’est proche, qui me touche. Mais, chez moi, il y a du dérisoire, et, je l’espère, une lecture plus diffuse. Il n’y a pas une vérité, mais des vérités. Il y a une beauté de l’art qui est forcément dans la confusion : c’est un chapeau, et c’est un chameau. Il y a plein de sorties. Chez les Chapman, il n’y a pas beaucoup de sorties.»

Au Grand Palais, la grue s’empare des vêtements comme le doigt de Dieu envoie à la mort. «C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela.» Comme Voltaire revenu du séisme de Lisbonne, il a lu dans Proust l’histoire qui lui est «la plus proche», celle d’une femme qui perd son homme, «elle est vraiment malheureuse, terriblement malheureuse, mais elle va dans le jardin, les fleurs sont belles, elle voit combien les fleurs sont belles…»

«Je n’ai jamais connu de vernissage aussi heureux qu’à Sarajevo, je ne suis pas courageux, mais je suis allé à Sarajevo… Il y avait ce désir de vie, les filles étaient belles. Primo Levi le dit presque, on ne peut pas le dire, mais, même dans les camps, il y a la vie. Je suis un homme assez léger. La légèreté est la plus belle chose.»

Je lui dis mon étonnement de lire tant de fadaises sur son compte : ah, mais il est léger justement, si agréable, un bon vivant. Comme si nous n’étions pas des êtres multiples. «On arrive toujours à trouver une petite noirceur dans le bonheur», acquiesce-t-il. La vodka descend. «J’ai spécialement un amour de la vie ; depuis l’âge de 3 mois, je sais que la vie est atroce. En même temps, j’ai un énorme amour de la vie.»
Bric-à-brac

Venise, nous revenons à Venise, où Boltanski est invité à représenter la France lors de la prochaine biennale. Où nous nous trouvions, chacun de son côté, cet automne, à l’ouverture de la dernière. «Ce qui m’a beaucoup frappé, c’est de voir ces deux modes de la bourgeoisie, complémentaires. La Fondation Pinault, les cocktails, tout cela. Et l’envers, le Palazzo Fortuny, les bronzes chinois, Fontana.» Allusion à un bric-à-brac assez génial, exposé sur le thème de l’infini. «L’un est l’envers de l’autre : la bourgeoisie bling-bling, et celle éclairée, ceux qui savent. Rien ne change et tout change, Venise c’est cela.» Il ouvre un livre dans lequel il a publié de ravissantes photos de famille d’officiers SS, avec leurs petites filles en nattes blondes : «Ce sont les plus jolies images que je connaisse.» Il a aussi montré des photos de la biennale, en 1937 : les chefs fascistes, Hitler est là… «Et, sur les murs, des nus, des fleurs. La biennale s’est tenue en pleine guerre de Yougoslavie, c’était la fête, et à quelques kilomètres, l’horreur. Venise, c’est la ville la plus belle au monde, et c’est une horreur. L’univers s’effondrerait en une guerre totale, on y ferait encore la fête. Enfin, j’aime la morue à l’huile, dans un petit bar en face de la Giudecca.» A l’exposition du Palazzo Fortuny, l’an dernier, il y avait une vague d’Anselm Kiefer. «Kiefer est un artiste très important. J’ai toujours rêvé d’un travail, Kantor, Kiefer et moi. Kantor [dramaturge polonais, comme la vodka, ndlr], c’est le paysan qui résiste ; Kiefer, le type qui avance ; moi, je suis le Juif qui fuit. Lui est la force, moi la faiblesse. Nous avons le même âge, nous parlons du même endroit, de la même histoire, mais pas du même côté. Kantor, c’est du bricolage. J’ai passé du temps avec lui, en tournée, en soûlerie tous les soirs. Un soir son épouse est entrée dans ma chambre : sauve-moi de ce monstre. Un coup de vodka, elle est repartie. J’aime beaucoup la Pologne. C’est Ubu roi. Une grande plaine vide, nulle part, une tristesse… Tout est gris. A Cracovie, je vois tous ces sushi-bars, avec plein de couleurs, cela ne va pas du tout ! La Pologne c’est le gris.»
«Les Juifs et les coiffeurs»

Et l’antisémitisme des Polonais ? «Le pardon est absolu ! La vie reprend, la vie doit reprendre… Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. Avez-vous déjà dit : «Il faut tuer tous les Juifs et les coiffeurs». On vous répond : «Pourquoi les coiffeurs ?» Moi, je vois plein de raisons, ils ne sont pas propres, ils sont bavards, il y en a qui sont gays. Mais pour les Juifs, c’est évident, n’est-ce pas ? C’est un miracle de n’avoir pas eu de pogrom antimusulman après le 11-Septembre…»

«Ce pouvoir, je l’ai exercé quand j’étais professeur aux Beaux-Arts, c’était une grande joie de ma vie, mais dans les jurys il fallait bien éliminer, je ne savais que dire, mais je me souviens de la cruauté de mes collègues… voir chuter devant eux… Quand un étudiant voulait s’inscrire à mon atelier, je disais : je ne vous le conseille pas. C’était vraiment méchant, je rejetais la faute sur l’autre. Souvent, on manquait de joie de vivre, d’optimisme, on appelait mon atelier « la secte ». Annette [Messager, son épouse artiste, ndlr], elle, créait une vraie ambiance. Moi, je leur disais : je n’ai rien à enseigner, vous n’avez rien à apprendre. C’est la seule chose à dire à un artiste.»

Le dessin dans l’enseignement, lui qui s’avoue si mauvais dessinateur ? «Quand Orson Welles a fait Citizen Kane, il a appris le cinéma. Si l’on a du talent, le dessin vient en cinq minutes. C’est de la petite technicité.» Son propos est donc de l’ordre du récit. «Si vous voulez, mais pas avec les mots. En me vantant, je tâche d’être un rabbin hassidique. J’essaie de poser des questions, et que les gens se posent des questions. Mon travail est, avant tout, formel… Peut-être un récit qui passe par la forme. Il y a des gens qui savent trouver la forme, et d’autres pas, c’est comme d’avoir un grand ou un petit nez, cela ne s’explique pas. Etre artiste implique une force de caractère, trouver la force de ne pas se marier, ou de ne pas avoir d’enfant…» Il parle de son père caché sous le plancher sous l’Occupation, des enfants dormant jusqu’à l’âge adulte dans des sacs de couchage sur le plancher autour du lit parental, dans un grand appartement bourgeois… Il dit n’avoir jamais lu les romans écrits par sa mère. «Je ne peux pas les lire, je ne peux pas juger. On ne peut pas juger sa mère.» Il affiche une photo de lui et son frère, ce n’est pas lui ni son frère. Mais lui et son frère peuvent se retrouver un peu plus loin, sur une autre photo. L’autofiction fait-elle l’artiste ? Pourquoi raconter qu’il a des origines corses ? «Ah, cela, c’est un journaliste américain, qui m’a dit : vous êtes un artiste juif ! Cela m’a tellement énervé. « Mais pas du tout », ai-je rétorqué, « je suis corse ! » Vous avez raison, je suis un menteur ! Tout ce qui est dit n’est pas de la même personne, je veux dire Christian Boltanski, c’est l’autre. Un artiste a une chance inouïe : il parle de son village, et tout le monde est de ce village. Durand est Durand, mais Durand est tous. Je n’ai jamais parlé de l’Holocauste. « Que cette maison brûle » [appuyant cette expression de grand-mère juive, il fait un geste sec de la main] « Que cette maison brûle », si je parle de l’Holocauste. Je suis après l’Holocauste, c’est différent. Dans Quai des brumes, il y a un peintre médiocre, qui dit : quand je vois un nageur, moi, je vois un noyé. Nous avons cela. J’ai cela. J’ai cette connaissance. Mais, l’holocauste, non, Kundera disait : « Que les vieux morts laissent la place aux jeunes morts ». L’horreur de l’Holocauste, ce n’est pas le meurtre, c’est la disparition de l’individu, la pire des choses. Et en même temps, c’est le suicide de l’Allemagne. L’Allemagne, c’était le mariage des cultures allemande et juive. Dans la culture juive, on se demande : faut-il se gratter le nez ou l’oreille ? Il faut se gratter le nez ou l’oreille. Quand les Juifs ont appliqué cette pensée non plus seulement à la religion, mais à la science, à la philosophie, le résultat a été prodigieux, Freud, Marx… L’Allemagne a tué tout cela, et mis du temps à s’en remettre.»

«Etre artiste c’est être exemplaire, pas dans le sens d’être bien, mais exemplaire. Tout ceci, c’est ma vie exemplaire. Giacometti finit par ressembler à Giacometti, Bach à Bach, et moi à ma boîte de biscuits.»
Pacte de Faust

Tout de même, ce contrat avec un collectionneur en Tasmanie : son œuvre en viager pendant huit ans, durant lesquels son atelier sera filmé jour et nuit, et les images retransmises dans une grotte d’Océanie ? Ayant fait sa fortune au casino, l’homme, David Walsh, autiste et mathématicien de génie, aurait parié que Boltanski allait mourir avant huit ans, assurant qu’il n’avait jamais perdu de pari. La presse, ravie, glose beaucoup sur le pacte de Faust… «J’espère de toute mon âme vivre au-delà de huit ans [il a 65 ans]. Dire : j’ai vendu mon âme au diable, oui, c’est simplet. On ne peut pas parler de la mort, ce n’est pas possible. C’est une chose tellement honteuse. Etant jeune, je refusais la mort, ce n’est pas bien. Le cérémonial, toutes ces cérémonies funèbres, sont importants. Elles font se rencontrer des gens qui ne se seraient peut-être jamais croisés. Patrice Chéreau en parle très bien dans Ceux qui m’aiment prendront le train.»

Il reprend le fil. « Un jour, à Jérusalem, j’ai vu une petite fille en pleurs, son chat était mort en sautant de la terrasse, je n’ai pas osé m’approcher. Je n’ai pas réagi… Mon frère Luc serait allé lui parler. On s’engueule toujours, lui et moi, même à propos de l’art contemporain, mais j’ai appris tellement de choses de lui… Et, aujourd’hui, de ma sœur, elle a été très malade, elle me montre des choses nouvelles. On ne sait jamais ce qu’on ferait en telle ou telle circonstance, mais je ne suis pas sûr d’être très brave.» Il exagère. Je lui fais remarquer que Michel Leiris, aussi, parlait constamment de sa lâcheté physique. Ce qui ne l’avait pas empêché de traverser l’Afrique.

«Faut-il se consacrer à une personne, plus qu’au monde ? On dirait : il aimait tout le monde, cela l’empêchait d’aimer quelqu’un. Se consacrer au monde est un si grand engagement… Alors, on se rend forcément très égoïste… On n’est plus que son art. C’est bien. Et en même temps, c’est rassurant, c’est plus facile à vivre. Ceux qui changent la vie sont peut-être plus dignes. Ou alors ils se mentent à eux-mêmes. Eux aussi, ils pensent : encore une minute Monsieur le bourreau. C’est la plus belle phrase d’un être humain. Aimer la vie. Dieu est un vieux salaud. Moi, je dirai cette phrase. Je veux vivre d’une mort lente, je suis trop jouisseur, j’ai trop d’amour pour cela. Je m’amuse bien, je mange bien.» Il déchire une gomme en petits bouts.
Trou d’épingle et boule de marbre

«J’aime beaucoup le bricolage, j’ai fait au moins 3 000 cadres, j’y prends beaucoup de joie. J’écoute France Culture toute la journée, mais je suis occupé. C’est mon grand problème. Je passe ma vie à ne rien faire. J’aime cuisiner, là, au moins, on fait quelque chose, et c’est utile. On fait attention, c’est important… Les vernissages, les cocktails, passer son temps à voir des gens, il faut le faire, mais c’est extrêmement négatif. Je suis un si jeune retraité, quelle vacuité! Je reste des heures dans cet atelier, à ne rien faire, face à un mur.» Le peintre Zoran Music, dans son atelier à Venise, disait aussi qu’il ne faisait rien à longueur de journée, mais c’est ainsi que l’œuvre se fait. «Rien n’avance, mais c’est cela qui fait avancer. Il n’y a rien à faire qu’attendre…»

Au Grand Palais, il voudrait que son œuvre «entre dans un répertoire, et qu’elle revive dans cinquante ans, avec un autre metteur en scène. Ce devrait être une obligation liée à Monumenta. On aurait dû faire signer à Kiefer, à Serra [les deux artistes qui ont précédé Boltanski dans cette manifestation], un papier inscrivant leur œuvre sur un répertoire. Ce qui est joué est réincarné… Comme de la musique, un ballet. C’est le contraire du musée. Au Centre Pompidou, il y a un piano-éléphant de Joseph Beuys [artiste et professeur considéré comme le père de l’art conceptuel, qui a formé toute une génération], et le feutre qui le couvrait s’est abîmé. On a demandé à Beuys ce qu’il fallait faire. Il a dit : changez le feutre, et accrochez l’ancien au mur, et ainsi de suite… Aujourd’hui, il y aurait une dizaine de peaux de cet éléphant, ce serait splendide. Evidemment, ils ne l’ont pas fait. Beuys est un de mes pères. Il n’a pas laissé de trace. Autour des artistes, il y a tellement de secrétaires, de marchands, de maîtresses… Alors, en plus, si on ne laisse pas de trace. Au musée, tout est sacré. Chez moi, il n’y a rien de sacré. Pour rouiller mes boîtes, je pissais dessus. Après, je les ai arrosées de Coca. Un conservateur pour une exposition les faisait installer avec des gants blancs. Cela n’a aucun sens!»

«Toujours j’ai bricolé, je suis très près de mes sous. J’adore le théâtre, mais, aller au théâtre, c’est trop cher. J’ai essayé de faire une pièce avec mon frère Luc. Je ne comprenais pas la pièce, mais je voyais l’espace. Luc, c’est un homme des mots. Moi je suis un homme de l’espace. »

A Venise, il y avait aussi, dans un palais un peu éloigné, un hommage à James Lee Byars. «Voilà un artiste qui a fait de son œuvre sa vie, et de sa vie son œuvre. En costume lamé or, avec un haut-de-forme. Dans le restau le plus merdeux, toujours en représentation. Un homme très méchant. Lors d’un dîner, toute la soirée, il a jeté des kleenex sur moi, en disant à chaque fois : « French perfume for French artist… » Il adorait emmerder le monde. Au musée d’Art moderne, il a séquestré la directrice, Suzanne Pagé, parce qu’il n’était pas d’accord avec l’arrangement d’une exposition. Pour une autre, on avait amené une magnifique boule en marbre de Grèce. Il y avait un trou d’épingle. Il l’a refusée. Elle valait une fortune, scandale. Il l’a couverte d’un voile noir, elle a été exposée comme cela… Il m’appelait au milieu de la nuit, j’ai horreur de la sonnerie du téléphone, j’ai horreur qu’on m’appelle tard, je ne savais jamais où il était, aux Indes ou ailleurs. Une nuit, à 5 heures, il m’a appelé du Caire pour me demander la taille de mon crâne, fait chier, il est mort deux jours plus tard, je ne sais pas du tout ce qu’il voulait en faire, sa tombe ou quoi.»

«Je vois des choses que je n’ai pas vécues, tellement mélangées qu’on ne peut les définir. Gauguin disait : on croit ce qu’on ne sait jamais. Vous êtes faits de ceux qui vous ont précédés, l’oreille du grand-père, le nez de l’arrière-grand-père… Alors pourquoi ne serais-je pas corse ? J’ai appris récemment que les Juifs d’Odessa étaient des descendants des Mongols. Alors, moi qui en serais bien incapable, je suis fier d’être descendu de mon cheval. Si je suis différent de mon chat, c’est que, avant moi, il y a des gens et, après moi, il y a des gens. Chacun a une clé à donner. Et ma clé, ce sont des questions. Il n’y a pas une bonne clé, l’important c’est de chercher la clé. L’horreur de l’utopie, c’est d’avoir des réponses. L’utopie de Pol Pot était une très belle utopie ; celle du christianisme, celle du communisme ne sont pas négatives. Combien de morts ? Ma mère était communiste, je vote communiste dans ma ville, mais le communisme a tellement mal fini, dans les camps et les banques suisses… Nous avions des amis communistes, des gens formidables, je me demande toujours : que savaient-ils ? Se disaient-ils : l’avenir est tellement radieux, cinq innocents morts sur le bord de la route, cela ne compte pas… On ne peut jamais se permettre d’arrêter la vie de quelqu’un. A la biennale de La Havane, j’ai vu la fausse bonne conscience, la langue de bois du Parti, une ode à la jeunesse, mais la jeunesse, elle est là, dans les rues, droguée, vendant son corps pour 2 dollars. En même temps, sans utopie, on n’est pas humains… La seule issue c’est de poser les questions.»

L’argent ? « Je viens d’un temps qui n’est pas celui d’aujourd’hui. L’idée d’argent n’existait pas. Les artistes aujourd’hui qui mettent toute cette énergie pour financer la production, c’était impensable. De l’argent, je suis content si j’en ai, mais enfin… J’ai connu Sonabend [galeriste de référence à New York] grâce à Sarkis ; un galeriste à l’époque représentait vingt collectionneurs, c’était un tout petit club. A Bram Van Velde, la police a demandé un jour : « Comment vivez-vous ? » Il a répondu : « Je ne vis pas, j’ai des amis. »»

Mais la crise a laissé percer de nouveaux espoirs, des balbutiements dans l’art vivant, des retours en grâce… «Je suis très déçu, j’étais enthousiaste, j’espérais beaucoup, mais les petites galeries ont souffert, les grosses structures ont survécu. J’aurais voulu que Chelsea [quartier des galeries à New York] disparaisse de la carte, ce n’est pas du tout cela. L’argent, bien sûr, est lié à l’art, mais… Je voudrais croire en de nouvelles utopies, des expositions où l’on dirait : tout est à jeter, rien n’est à vendre… En France, de toute manière… L’art est ailleurs, il y a dix artistes aujourd’hui : cinq toujours connus, cinq disparus, et trois, on ne sait pas ce qu’ils sont devenus… Vous voyez, ce n’est pas une science exacte.»
«Avec amour»

Dans les expositions, Christian Boltanski n’utilise que des vêtements d’occasion, pas des loques, mais pas non plus des neufs. Et, bien sûr, par respect, il ne faut pas marcher dessus. «J’achetais souvent des vêtements aux puces, je les portais, on les refait vivre. Aux objets perdus, vous avez des tas de clés. Elles n’ouvrent rien, c’est terrible, elles ne sont qu’un peu de métal, elles n’ont plus d’histoire. Un objet n’existe que parce qu’il porte un récit, un regard. Votre fille est, parce que vous l’avez regardée. La seule chose à faire, c’est regarder. Avec amour. Et dire : tu es.»

«J’ai fait un travail sur les boutons, tous étaient des survivants, nous ne sommes que des survivants, la meilleure amie de ma mère était médecin à Auschwitz, comment s’est-elle sortie de là ? A 5 ou 6 ans, on comprend tout cela… Ma mère m’emmerde… Mais les dernières années, j’allais déjeuner avec elle tous les jours, jusqu’à ce qu’elle meure. Elle disait : « mes enfants, ce sont mes cannes. » C’est impossible d’abandonner quelqu’un… J’ai fait un travail sur les listes, la liste, c’est le plus grand changement du monde, nous appartenons à 3 500 listes, mon père juif, moi catho, je vote communiste, j’aime pas les communistes, le fascisme c’est de vous mettre dans la liste.»

Il ouvre un livre. L’horloge parlante parle. «On m’a appelé, je fumais la pipe. Mon père était mort. Ma pipe est tombée. J’ai cassé ma pipe. Vous avez de la chance d’avoir encore votre père, quand son père meurt, on est le prochain sur la liste.» On échange encore deux ou trois blagues juives. L’impasse, nuit tombée. Dans la voiture, sur France Culture, Serge Daney interviewe Eric Rohmer. Nous dansons avec les esprits.

Voir de plus:

Le mythe de la caverne
Les Boltanski Christian, 63 ans, plasticien, Luc, 68 ans, sociologue
Nathaniel Herzberg
Le monde
17.07.08

Histoire inouïe que celle de Luc et Christian Boltanski, arrivés de façon si différente dans le monde intelligible et dans le monde sensibleHistoire inouïe que celle de Luc et Christian Boltanski, arrivés de façon si différente dans le monde intelligible et dans le monde sensible

L’un explique, l’autre pas. L’un s’obstine à vouloir comprendre le monde, l’autre se contente de le sentir. L’un choisit ses mots, le débit lent et régulier, en tirant sur sa pipe dans un bureau de 8 m2 au coeur du Quartier latin ; l’autre alterne silences, accélérations verbales et éclats de rire, dans une ancienne menuiserie de Malakoff, où cohabitent tours de cartons, sacs de couchage et autres morceaux d’installations à venir. Le scientifique et l’artiste. Le cérébral et l’intuitif. Bienvenue dans le joli monde de Luc et Christian Boltanski.

C’est Christian, figure internationale de l’art contemporain, seul Français systématiquement classé dans le top 20 mondial, qui le dit : « Un artiste est quelqu’un qui affirme. Quand je dis le ciel est rouge, il est rouge. Pour Luc, ça ne marche pas comme ça. Il faut tenir compte de tel penseur du XIIe siècle qui l’a déjà dit et de tel autre qui a rétorqué qu’il tirait sur le violet. Il me conseille de les lire avant de parler. Je lui conseille de brûler ses livres et de penser par lui-même. » Luc, directeur d’étude à l’EHESS et père de la « sociologie pragmatique », précise : « Christian prétend ne jamais ouvrir un livre et détester le texte, ce qui n’est sans doute pas complètement vrai. Je suis censé me désintéresser des arts plastiques et ne rien voir dans l’espace, ce qui n’est pas complètement faux. Nous sommes face à la question assez classique et assez compliquée de la différenciation. »

Pour l’approcher, un détour par la lignée Boltanski s’impose. Né dans une famille juive originaire de Russie, le père, médecin, s’est converti au christianisme. La mère, née dans une famille bourgeoise désargentée, atteinte de la polio à 22 ans, a abandonné ses études. La guerre survient et ses lois antijuives. Dans l’appartement du 7e arrondissement, une dispute éclate. Hurlements, claquements de porte. A la concierge, on explique que le père a abandonné le domicile familial. A Luc, 2 ans, que papa est parti. Le divorce est prononcé. A la Libération, l’enfant assiste « avec effroi » au retour du père. L’homme était caché dans un réduit, aménagé sous le plancher. « Il sortait la nuit, c’est même comme ça que j’ai été conçu », raconte Christian, né en 1944.

Commence une vie de rescapés, marquée par la peur, la trahison, la honte. La mère s’est détournée de sa propre famille, largement pétainiste. Désormais écrivain, elle a embrassé les idées révolutionnaires du « parti des résistants ». « A la maison, elle faisait cohabiter quelques familles catholiques, beaucoup de communistes juifs et une poignée d’artistes homo, se souvient Luc. Je sentais évidemment des tensions entre tout ça. Les sciences sociales m’ont donné l’espoir d’éliminer ces tensions. Jusqu’à ce que je comprenne que c’était justement ça, le monde. Mais c’était beaucoup plus tard. »

En ce début des années 1950, la joyeuse constellation qui gravite rue de Grenelle cache un noyau autrement plus traumatique. Pour éviter tout accident, la famille a choisi la fusion. Dans le grand appartement, les enfants dorment par terre, au pied du lit des parents. Idem pendant les vacances : on se lave le moins possible et on dort à cinq dans la voiture. Même lorsque le père part travailler, sa femme et Christian l’accompagnent et attendent des heures dans la voiture qu’il ressorte de l’hôpital Laënnec. « J’y ai acquis une grande capacité d’observation, sourit l’artiste. Mais aussi une grande peur du monde. Je n’allais pas à l’école, je savais à peine lire, je ne parlais à personne, sauf à mes frères. Je suis sorti de chez moi seul pour la première fois à 20 ans, pour aller suivre un cours de dessin. Et ça s’est très mal passé. Sans l’art et sans mes frères, j’aurais fini dans un asile. »

Le « vieux frère », Jean-Elie, futur linguiste et déjà puits de science, lui raconte le monde. Luc, catalogué artiste de la famille pour son amour des vers et des pinceaux, l’entraîne derrière lui. « J’avais fait un petit objet en pâte à modeler, il m’a dit que c’était bien. J’avais 12 ou 13 ans. Le mythe familial en a fait le moment-clé. Je me suis mis à peindre, beaucoup, tout le temps. » Quelques années plus tard, c’est encore Luc qui lui achètera ses premiers tableaux, Luc qui lui fera découvrir le Musée de l’homme et ses vitrines : « On y voyait des gens qui n’étaient pas des héros et des mondes disparus. L’influence a été décisive. » Luc, encore, qui avec son maître d’alors, Pierre Bourdieu, plaidera pour Un art moyen (Editions de Minuit, 1965), leur essai sur les usages sociaux de la photographie. Dans la foulée, Christian adoptera la photo amateur comme support principal d’une oeuvre consacrée à la mémoire.

Luc le révolté, militant pro-FLN pendant la guerre d’Algérie, qui poussera l’audace jusqu’à quitter la maison à 20 ans, quand Christian y conservera son atelier jusqu’à 37 ans. « Enfants, nous avions un jeu tous les trois, se souvient-il. Luc était révolutionnaire et confectionnait des bombes ; moi j’étais un général putschiste, Jean-Elie tenait le Sénat. Le jeu de rôles continue. Il me traite de réactionnaire, moi je me moque de ses histoires de Parti socialiste. » A distance, Luc corrige : « Il n’a aucune conscience politique et c’est lui qui croit au PS, moi plus du tout. Je me sens de plus en plus proche des communistes libertaires. »

Ce genre de joute leur tient lieu de boussole. Chaque dimanche, quand toute la famille se retrouve rue de Grenelle, où habite toujours Jean-Elie et où s’est réinstallé Luc, ou encore au cours de leur déjeuner hebdomadaire en tête à tête, chacun retrouve sa place. « Je lui passe des livres, je lui en parle, il n’est pas obligé de les lire », sourit Luc. « Récemment, il m’a fait découvrir L’Esclave, de Singer, confie Christian, et une tribu incroyable de Nouvelle-Guinée, les… Boutafor. » « Les Arapesh », corrige Luc. Au cours de ces repas, ils rejouent aussi l’éternel affrontement entre théâtre de texte et théâtre d’image, ou encore entre art du temps et de l’espace. Avec son lot habituel d’incompréhension. « Je crois qu’il voit l’art contemporain comme un truc pour épater les bourgeois et que, au fond, il a toujours pensé que j’étais un escroc », attaque Christian. « C’est un très grand créateur, rectifie Luc, et j’aime beaucoup ce qu’il fait. Il a l’oeil, il découpe le monde. Mais, de même qu’il ne voit rien dans un texte, il me manque parfois certaines clés, notamment celle du temps. Combien de temps doit-on rester devant une oeuvre pour en percevoir le sens ? »

« Tout nous sépare, poursuit Christian. Il croit au mal, moi je pense que le mal est en chacun de nous. Il n’est jamais aussi heureux que lorsqu’il prépare à manger pour une tablée d’enfants ; moi je n’aime ni les enfants ni les chiens. Je suis plus juif ; lui catholique et mystique. » Cette fois, Luc Boltanski proteste. « Mystique, sûrement pas. Je n’ai pas de vie intérieure, c’est le monde qui m’intéresse. Mais je ne vois pas pourquoi la modernité devrait nous couper de toute une partie de l’humanité, des démons, des rituels, des fantômes. » Catholique, au moins ? « Je refuse d’être affecté à une identité. J’ai tout de suite envie de trahir. Toute ma vie, j’ai fui et trahi. Ma famille, ma première femme, Bourdieu. L’identité unique c’est la pureté, le pire des pêchés, le vitriol de l’âme. »

« Rester vivant », clame Luc. « Préparer sa mort et transmettre », rétorque Christian. Comme si, peu à peu, l’inversion des rôles faisait mentir les clichés. L’intellectuel amoureux de poésie et assoiffé de liberté. L’artiste obsédé par l’Histoire et le récit du monde. A moins, comme le dit leur ami commun le compositeur Franck Krawczyk, qu’il ne s’agisse de « la même histoire, l’une en plein, l’autre en creux ». Une histoire d’hommes, de présence, de disparition. Avec ou sans mots.

Voir enfin:

Boltanski ou l’imposture de l’art contemporain
Nouvel Hermes
20 février 2010

Quand l’artiste dévoile à son insu les ficelles d’un art usé jusqu’à la corde…

Mieux vaut parfois évoquer un événement à l’instant où il se termine ce qui aura l’avantage de ne pas inciter quelques gogos bobos à y participer.

Ainsi les pigeons retrouveront-ils le toit du Grand Palais à Paris tandis qu’ils en déserteront la nef, là où se déroulait l’exposition de Christian Boltanski.

Une exposition ? Non, plutôt – puisqu’il s’agit d’art contemporain – le rituel d’une secte, une cérémonie à laquelle, bien sûr, nous sommes conviés à participer pour la justifier.

Quelques extraits de la présentation de ce Monumenta 2010 sont particulièrement éclairants :

« L’installation inédite qu’il a créée pour MONUMENTA 2010 est conçue comme une expérience frappante, à la fois physique et psychologique, un moment d’émotion spectaculaire qui questionne la nature et le sens de l’humanité. Investissant l’ensemble de la grande nef, il crée un lieu de commémoration visuel et sonore d’une densité exceptionnelle. L’œuvre engage une réflexion sociale, religieuse et humaine sur la vie, la mémoire, la singularité irréductible de chaque existence, mais aussi la présence de la mort, la déshumanisation des corps, le hasard de la destinée. A cette installation il donne le nom évocateur de Personnes. (…)
Les œuvres de Christian Boltanski sont adressées à tous, elles interpellent et ébranlent. Sous la Nef du Grand Palais, le visiteur oublie toute référence muséale, il fait corps avec la scène vivante de l’art et de la mémoire. L’artiste, selon Boltanski, est celui qui dévoile au spectateur « une chose qui était déjà en lui, qu’il sait profondément ; il la fait venir à hauteur de la conscience ». Théâtre de la remémoration, MONUMENTA 2010 questionne le sens de la destinée humaine et affirme la place faite à chacun dans la mémoire collective. (…)
Christian Boltanski poursuit la collecte d’enregistrements de battements de cœurs qu’il a engagée pour réaliser les Archives du cœur : les visiteurs sont invités à enregistrer le son des battements de leur cœur et à en faire don à l’artiste. »

Cette cérémonie est d’autant plus intéressante qu’elle révèle ce qu’est devenu l’Art Contemporain : une métaphysique floue à l’image de celle que répandent les sectes et les accusations d’intolérance voire de blasphème pour ceux qui les dénoncent.

Attaquer l’Art Contemporain c’est immédiatement s’exposer à la condamnation : « réactionnaire, imbécile, ignare, intolérant » et j’en passe.
Car l’Art Contemporain est une secte riche avec ses appuis politiques, quelques richissimes « collectionneurs » ou « mécènes », ses relais médiatiques qui font la police dans le domaine des Arts, ses « curators », et son public de fidèles qui viennent communier pour y chercher ce qui lui fait défaut : intelligence et pouvoir.

Or, à son insu, Christian Boltansky dévoile la nullité de son oeuvre comme de celles qui jouent sur ce même registre :

– Se saisir d’un lieu prestigieux, le détourner de sa signification historique. Faire dans l’énorme, l’étouffement (cf. Koons au Palais de Versailles ou Christo pour le Pont Neuf.)

– Jouer sur le temps, la mémoire, l’oubli, .

– S’inscrire dans le sociétal : les « minorités » ethniques ou sexuelles.

– L’effacement de l’esthétique (Et pour cause !) par l’éthique : un message simpliste qui ne s’impose donc que par l’émotionnel et l’écrasement de la visibilité.

– Le jeu entre les limites : le grave, le sacré, la transgression, le sexe, la religion, la dérision, le détournement, les jeux de mots.
– L’accumulation qui souligne la redondance, la répétition d’un thème décliné à l’infini.
– Le politiquement correct sous toutes ses formes puisqu’il en est en réalité l’étendard.

Remuez tous ces ingrédients et vous obtiendrez de l’Art Contemporain dont le terme même suffit à désigner le ridicule : Un art qui n’en finit plus d’être « contemporain », qui se désigne ainsi contemporain pour l’éternité !

Un art qui, donc, fait recette mais qui ne repose donc que sur des recettes.

Mais, pour déjouer toute attaque, j’annonce que ce texte comme le blog dont il est issu est une œuvre d’ART CONTEMPORAIN !
Et à celui qui osera me critiquer, je lui répondrai qu’on ne comprenait pas Van Gogh lorsqu’il peignait et que j’en appelle à tous pour me défendre face à ceux qui veulent me censurer!

36 Responses to Exposition Boltanski: Le monde est atroce mais il y a bien pire c’est Dieu (Is contemporary art anti-Christian?)

  1. […] les sempiternels « Piss Christ » qui nous sont imposés, ne pas se poser la question de l’anti-christianisme de cette surenchère et course à l’effroi que semble devenu, Auschwitz oblige, l’art […]

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  2. jcdurbant dit :

    Voir aussi:

    « Il y a une tendance à faire des choses couteuses, prendre une boule en or véritable par exemple, construire la plus grande installation, le plus lourd… qui est mauvaise dans l’art contemporain. »

    Christian Boltanski

    « Parmi tous les vêtements étalés sous la verrière du Grand Palais, je n’ai pas repéré une seule petite culotte. Il devait pourtant bien y en avoir parmi tous les vêtements entassés dans les camps d’extermination. »

    Catherine Millet

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  3. […] ne pas s’étonner, pendant que de son côté l’art apparait de plus en plus antichrétien,  de cette sorte d’effacement progressif des […]

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  4. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. Christian Boltanski […]

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  5. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. Christian Boltanski […]

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  6. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. Christian Boltanski […]

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  7. […] ces temps étranges où, à la Richard Dawkins, nos contemporains n’ont pas de mots assez durs pour dénoncer la Bible et le Dieu de la Bible […]

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  9. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  10. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  11. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  12. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  13. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  14. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  15. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  16. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  17. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  18. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  19. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  20. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  21. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  22. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  23. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  24. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  25. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  26. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  27. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  28. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  29. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  30. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  31. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  32. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  33. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  34. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  35. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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  36. […] C’est comme une fête foraine, les jeux avec les pinces… Le monde est atroce, mais il y a bien pire : c’est Dieu. On ne peut pas comprendre Haïti. On ne peut même pas dire que Dieu est méchant, aucun méchant n’aurait fait cela. (…) Depuis quelques temps, je m’intéresse au doigt de Dieu, au hasard. Sous la nef s’élèvera une montagne de vêtements, haute d’environ dix mètres. Une grande pince au bout d’une grue prendra ces vêtements, les amènera jusqu’au ciel et les relâcher. Quand je marche dans une forêt, j’écrase sans le vouloir des fourmis à l’égard desquelles je ne nourris aucune animosité. Aujourd’hui je pense que Dieu, de la même manière, est indifférent. De temps en temps il écrase des choses en dessous de lui, mais sans désir de méchanceté. (…) Vous savez ce qu’on dit : le Russe bat le Polonais, le Polonais bat le Juif, le Juif bat son chien. On bat toujours plus bas que soi. Cet homme pourrait être nous, ou ne pas l’être. Ou pas encore. C’est le pouvoir sur l’homme qui est terrible. La loi française avait interdit aux Juifs d’avoir un chat. Notre voisin, un homme extrêmement sympathique, est venu un jour : si votre chat continue à m’embêter, je vous dénonce. Il n’était pas mauvais, mais on lui avait donné ce pouvoir. (…) Je ne cesse de penser au hasard, avec cette question, absurde, inexpliquée : pourquoi, moi, je suis encore vivant ? Et pourquoi mon voisin est-il mort ? Il n’y a aucune règle à tout ça, et cette chose m’obsède. Ma vie et mon oeuvre ont été très marqués par la Shoah – à ma naissance, en 1944, mes parents ont volontairement effacé leurs traces, et nous avons vécu dans un appartement parisien dissimulés sous le plancher de la maison -, et je crois que tous les survivants de la Shoah n’ont cessé de se poser la question: pourquoi j’ai survécu? Christian Boltanski […]

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