Oslo/Décryptage d’un Nobel (Michel Gurfinkiel: The Nobel committee has always put ideology before facts)

Arafat Nobel disgrace (1994)C’est un terrible avantage de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser. Rivarol.
Quand Alfred Nobel créa ses prix, à la fin du XIXe siècle, la Suède et la Norvège étaient confédérés sous un seul et même monarque. L’inventeur de la dynamite, Suédois, voulut confier aux Norvégiens l’une de ses distinctions. Ce fut le prix de la paix. Mais Oslo n’ayant pas d’Académie prestigieuse, analogue à l’Institut Karolinska de Stockholm, le choix des lauréats fut confié à un comité de cinq membres élu par le parlement local. A parlement de gauche, comité de gauche, et inversement : il en va ainsi depuis plus d’un siècle. Et le Nobel de la paix s’en ressent. Le comité actuel est dirigé par Thorbjorn Jagland, ancien premier ministre socialiste et ancien ministre des Affaires étrangères, dont les passages au pouvoir ont tous été entachés de scandales, de gaffes diverses et de prises de position anti-américaines ou anti-israéliennes. On sait également aujourd’hui qu’il était considéré par le KGB, tout au long des années 1970 et 1980, comme un « contact confidentiel ». Voilà qui explique beaucoup de choses, on en conviendra. Michel Gurfinkiel
Combien de Sakharov ou de Mère Térésa pour faire passer les Le Duc Tho et les Arafat?

29 sur 52 personnalités ou organisations liées au tiers-monde; 16 à des ONG de gauche ou d’extrême-gauche; 6 à l’Onu ou à des Etats ou organisations totalitaires; 4 à des pays musulmans ou à des organisations terroristes; 3 à des militants ou organisations écologistes; 17 seulement pour avoir défendu les valeurs démocratiques dont 5 (Kissinger, Sato, Begin, Peres, Rabin comme faire-valoir à des colauréats « mieux-disants » (Le Duc Tho – qui seul avec Sartre a eu la décence de le refuser! -, McBride, Sadate, Arafat – qui provoqua la seule démission à ce jour d’un membre du comité, l’honoralissime démocrate-chrétien Kaare Kristiansen); 12 lauréats occidentaux ou pro-occidentaux honorés en fait en tant que tels (Sakharov, Mère Térésa, Walesa, Wiesel, le Dalai-Lama, Hume, Trimble, Kim, Ximenes Belo, Ramos-Horta, Yunus, Ahtissari) …

Pour ceux qui s’étonneraient encore, après les Annan, Carter, Ebadi, Maathai, ElBaradei et Gore des sept dernières années, du prix attribué sur la foi de ses seuls discours au Pleurnicheur en chef …

Magistral décryptage, par Michel Gurfinkiel, de la longue tradition derrière l’apparence de rupture (au moins depuis 35 ans et sans compter le brillant duo de 1926), de choix en fait idéologiques du comité norvégien …

Oslo/Décryptage d’un Nobel
Michel Gurfinkiel
Mercredi 14 octobre 2009
Le comité Nobel norvégien a toujours fait passer l’idéologie avant les faits. Et il est dirigé par un ancien « contact » soviétique. Deux raisons de couronner Obama.

« En distinguant le président américain sur la foi de ses discours, le jury d’Oslo rompt avec sa tradition ». C’est ainsi que Le Monde, le 9 octobre, commente l’attribution du prix Nobel de la paix à Barack Obama. Jusqu’à présent, le prix avait toujours récompensé des actes, plutôt que de simples intentions. Désormais, les intentions priment les actes. Obama, installé à la Maison Blanche depuis neuf mois seulement, s’est hâté d’associer à ses honneurs une lauréate plus ancienne, la militante démocrate birmane Aung San Suu Kyi. Pour échapper, au moins en partie, au ridicule de la situation : « C’est un terrible avantage de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser », disait Antoine de Rivarol.

Mais le jury d’Oslo a-il réellement rompu avec une « tradition », comme l’affirme le Monde ? Voire. Il avait pris l’habitude d’attribuer le Nobel de la paix en fonction d’une idéologie plutôt que de faits. De là à couronner l’idéologie elle-même, il n’y avait qu’un pas.

La liste des lauréats sur les trente-cinq dernières années, de 1973 à 2008, est révélatrice. Au total, cinquante-deux personnalités ou organisations ont reçu le prix pendant cette période. Vingt-neuf sont liées à des pays du tiers-monde ; seize à des ONG de gauche ou d’extrême-gauche ; six à l’Onu ; six à des Etats ou organisations totalitaires ; quatre à des pays musulmans ; quatre à des organisations terroristes ; trois à des militants ou organisations écologistes. En regard, dix-sept lauréats seulement, toutes origines confondues, ont été explicitement honorés pour avoir défendu les valeurs d’une société démocratique et humaniste de type occidental. Encore faudrait-il en retrancher cinq (Henry Kissinger, Eisaku Sato, Menahem Begin, Shimon Peres, Yitzhak Rabin), qui servent de faire-valoir à des colauréats « mieux-disants » (Le Duc Tho, Sean McBride, Anouar el-Sadate, Yasser Arafat). Ce qui ramène les lauréats occidentaux ou pro-occidentaux honorés en tant que tels à douze seulement (Andréi Sakharov, Mère Thérésa, Lech Walesa, Elie Wiesel, le Dalai-Lama, John Hume, David Trimble, Kim Dae Jung, Carlos Felipe Ximenes Belo, Jose Ramos-Horta, Muhamad Yunus, Marrti Ahtissari).

Derrière de tels choix, on retrouve sans cesse l’illusion de l’ « arbitrage », que partageait assurément Alfred Nobel, selon lequel la paix est une affaire de bons sentiments, le produit d’une « conversion des cœurs », plutôt que le résultat d’un rapport de forces ; mais aussi le sophisme infiniment plus pervers des « pacifistes » qui, avant 1939, se proposaient de coexister avec le IIIe Reich, et qui plus tard, pendant la guerre froide, ne se souciaient de désarmer l’Ouest, selon le mot de François Mitterrand, que pour mieux armer l’Est ; et surtout le fantasme antinomiste – dont un Alain Badiou, en France, est le pyrotechnicien quasi-officiel – selon laquelle le Mal serait porteur de Bien, le Bien un Mal déguisé, la liberté un leurre, la tyrannie une liberté, le droit une imposture, la progression du niveau de vie une paupérisation, la civilisation une barbarie et les Barbares de vrais civilisés.

Ces rêves ou ces délires se nourrissent de leur inassouvissement. Là encore, il convient de relire la liste des lauréats. L’Américain Ralph Bunche obtint le Nobel de la paix, en 1950, pour sa médiation dans le conflit israélo-palestinien et israélo-arabe. Sadate et Begin, en 1978, Arafat, Rabin et Peres, en 1994, Obama en 2009, l’ont obtenu pour les mêmes raisons. Mais la guerre continue : ce qui signifie, au minimum, que cinq prix sur six n’ont servi à rien. Kissinger et Le Duc Tho ont été couronnés en 1973 pour leurs accords de paix en Indochine : deux ans plus tard, la guerre reprenait, et le communisme massacrait ou expulsait des millions d’êtres humains au Vietnam et au Cambodge. Kofi Annan et l’Onu ont été honorés en 2001 : au moment où les médias commençaient à évoquer le scandale « Pétrole contre nourriture ». L’Agence internationale de l’Energie atomique, dirigée par l’Egyptien Mohamed El-Baradei, a été distinguée en 2005 pour sa lutte contre la prolifération des armes nucléaires : elle n’avait pourtant rien fait pour empêcher l’accession de l’Inde et du Pakistan, en 1998, à ce type d’armements ; et ne fera rien pour freiner la Corée du Nord, puissance déclarée en 2008, ou l’Iran.

Tous les jurés d’Oslo n’ont pas perdu le sens commun. Tous ne sont pas restés passifs devant un tel bilan. Kaare Kristiansen démissionna du Comité Nobel en 1994 plutôt que de cautionner la remise du prix de la paix à Arafat. Mais ce ne sont là que des exceptions qui confirment la règle. Pourquoi ?

Quand Alfred Nobel créa ses prix, à la fin du XIXe siècle, la Suède et la Norvège étaient confédérés sous un seul et même monarque. L’inventeur de la dynamite, Suédois, voulut confier aux Norvégiens l’une de ses distinctions. Ce fut le prix de la paix. Mais Oslo n’ayant pas d’Académie prestigieuse, analogue à l’Institut Karolinska de Stockholm, le choix des lauréats fut confié à un comité de cinq membres élu par le parlement local. A parlement de gauche, comité de gauche, et inversement : il en va ainsi depuis plus d’un siècle. Et le Nobel de la paix s’en ressent.

Le comité actuel est dirigé par Thorbjorn Jagland, ancien premier ministre socialiste et ancien ministre des Affaires étrangères, dont les passages au pouvoir ont tous été entachés de scandales, de gaffes diverses et de prises de position anti-américaines ou anti-israéliennes. On sait également aujourd’hui qu’il était considéré par le KGB, tout au long des années 1970 et 1980, comme un « contact confidentiel ». Voilà qui explique beaucoup de choses, on en conviendra.

23 Responses to Oslo/Décryptage d’un Nobel (Michel Gurfinkiel: The Nobel committee has always put ideology before facts)

  1. […] qu’avec le premier président nobélisé avant l’heure qui devait nous délivrer du bellicisme du cowboy Bush, l’exécution extrajudiciaire des […]

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  2. […] C’est un terrible avantage de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser. Rivarol […]

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  3. […] C’est un terrible avantage de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser. Rivarol […]

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  4. […] fait élire pour son refus de la guerre et des mesures antiterroristes de son prédécesseur, le prix Nobel de la paix le plus rapide de l’histoire n’a toujours pas fermé Guantanamo tandis que le Predator en chef a multiplié par dix […]

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  5. […] qu’après le plus rapide prix Nobel de l’histoire et au lendemain d’avoir encore sauvé puis fait adouber les tueurs d’enfants à […]

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  6. […] ces temps étranges où après avoir été élu contre la politique son prédécesseur, le plus rapide Prix Nobel de la paix de l’histoire en a non seulement repris mais, des assassinats ciblés aux écoutes, largement aggravé toutes les […]

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  7. […] premier président noir sans autre programme  que l’espoir et le changement maintenant, plus rapide  prix Nobel de la paix de l’histoire avant même son invesiture […]

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  8. […] belles au bois dormant semblent se réveiller de leur longue obamalâtrie face au plus rapide prix Nobel de la paix de l’histoire […]

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  9. […] de la bourde de Fermi … . Et sans parler, d’Arafat à Gore et Obama, des innombrables erreurs de casting de la fondation de l’inventeur de la dynamite … . Sur un autre prix volé que, après […]

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  10. […] lendemain, en cette saison des prix Nobel, où nos médias se félicitent de la victoire du plus rapide prix Nobel et accessoirement plus grand creuseur des déficits de l’histoire sur la prétendue folie du […]

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  11. […] de fabrique derrière ses liquidations ciblées et  ses grandes oreilles le plus rapide prix Nobel de la paix de l’histoire […]

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  12. […] Comment ne pas voir, en ce premier anniversaire de son élection et avec l’une des rares voix discordantes, la même image largement fantasmée qui nous avait été faite d’un certain messie noir et plus rapide prix Nobel de la paix de l’histoire? […]

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  13. […] C’est un terrible avantage de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser. Rivarol […]

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  14. […] le prix Nobel de la paix aux Grandes oreilles et aux bientôt 4 000 éliminations ciblées et auteur des […]

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